Tous Banquiers! n°7

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LA REVUE DES SOCIÉTAIRES DU CRÉDIT COOPÉRATIF #07 DÉCEMBRE 2015

TOUS BANQUIERS !

SPÉCIAL

35e

TRE RENCONA LE N IO NAT

CITOYENS DE DEMAIN

PORTRAITS DE CITOYENS

p. 04 à 13

Responsables, éclairés, engagés, connectés et collaboratifs

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TABLE RONDE

p. 14

Vive la « glocalité »

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LE CHIFFRE DE L’ACTU

Plus de

1 000 projets

ont été récompensés depuis la création des « Prix et trophée de l’initiative en économie sociale ».

Cela représente

3 000 000 €

de dons de la Fondation Crédit Coopératif pour fi nancer l’innovation sociale dans les territoires.

Dans ce numéro 04

CITOYENS RESPONSABLES

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CITOYENS ÉCLAIRÉS

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CITOYENS ENGAGÉS

#07 DÉCEMBRE 2015

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CITOYENS CONNECTÉS

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CITOYENS COLLABORATIFS

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TABLE RONDE “CITOYENS DU MONDE, ACTEURS DU TERRITOIRE”

Réf. : Tous Banquiers#7 - Tous Banquiers ! Groupe Crédit Coopératif – www.credit-cooperatif.coop – Société coopérative anonyme de Banque Populaire à capital variable – RCS Nanterre 349 974 931 – APE 6419 Z – N°ORIAS 07 005 463 – Direction de la communication – 12 boulevard Pesaro, CS 10002, 92024 Nanterre cedex – 01 47 24 85 00 – Directeur de la publication : Frédéric Toussaint. Édité par . Crédits photos : Getty Images, Shutterstock, Alain Bujak, DR. Les articles et les images publiés dans cette revue ne peuvent être reproduits sans autorisation préalable – Dépôt légal décembre 2015. Imprimé sur papier cyclus 100 % recyclé sans chlore. CRÉDIT COOPÉRATIF TOUS BANQUIERS !

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DITO L’É

e

ifest n a M

Dessiner le portrait du citoyen de demain, un pied dans les territoires, un autre à l’échelle de la planète, avec l’exigence de bâtir un monde meilleur au service de l’Homme : c’est toute l’ambition qu’a porté cette 35e Rencontre nationale, le 15 octobre dernier. Cette journée, riche en échanges sur le thème de « Citoyens du monde, acteurs des territoires », a permis de partager et de nourrir nos convictions sur la nécessité d’appréhender l’homme dans sa dualité : derrière l’homme qui agit, un citoyen animé par une vision du monde généreuse et inclusive, derrière le sociétaire, l’investisseur engagé, derrière l’animal social, un individu aux attentes multiples.

COOPÉRATIFS, BANQUIERS ET

CITOYENS DE DEMAIN Une vision dans laquelle se retrouve pleinement le Crédit Coopératif qui défend une autre façon de faire de la banque en s’affirmant coopératif et banquier, solidaire et actionnaire, imaginatif et investisseur. C’est pour valoriser cette dualité-là que le Crédit Coopératif, depuis plus de 120 ans, s’attache à financer des utopies transformées en projets. Avec la volonté de concilier non pas les antagonismes dans un compromis attentiste, mais d’atteindre la convergence des intérêts de chacun. Une voie pour l’avenir, courageuse et exigeante, dans le respect de chacun, partie prenante d’une communauté humaine, vivant ici et maintenant. C’est cet esprit et cette énergie dégagés lors de cette 35e Rencontre que votre magazine Tous Banquiers s’attache à vous restituer. Pour que vous, à votre tour, puissiez affirmer : « Tous coopérateurs, tous banquiers et tous citoyens du monde, tous acteurs des territoires. » Bonne lecture. JEAN-LOUIS BANCEL Président du Crédit Coopératif

Faites-nous part de vos réactions à l’adresse societaires@credit-cooperatif.coop ●

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CITOYENS

Interview

RE

S P O N SA B L E S

« L’éco-quartier, un projet j t en éévolution l ti permanente » Louis Henry, architecte de la Caisse des Dépôts à la Direction de l’Investissement et du Développement Local, voit en l’éco-quartier le greffon du changement.

Qu’est-ce qu’un éco-quartier ?

valeurs écologiques. La manière inattendue d’atteindre ces cibles est porteuse d’enseignements : on n’est plus dans l’évaluation qui mesure un projet par rapport à des objectifs initiaux, mais dans ce que les Anglosaxons appellent la « valuation ». C’est une démarche qui valorise les réussites, qu’elles soient attendues ou non. Parce qu’un éco-quartier est un travail en cours perpétuel.

C’est d’abord un lieu de vie qui permettra, avec des ressources moins abondantes, de s’adapter aux évolutions à venir. L’éco-quartier est bien plus que l’agencement d’habitats, il joue le rôle d’un tuteur : comme pour les rosiers, il est le support de leur croissance, mais il dirige aussi le sens de leur développement. Sa mission est véritablement d’animer un projet et de susciter de la part de ses habitants des questions nouvelles. Un éco-quartier est un organisme vivant qui étend son influence sur la ville entière.

Quels sont les enjeux à venir pour les éco-quartiers ? Les schémas directeurs de projets urbains qui figeaient les choses appartiennent au passé. Un éco-quartier exige de s’adapter en finesse à la réalité des territoires, de façon à accompagner les nouveaux usages et l’évolution des modes de vie de ses habitants. Or le changement c’est long à se mettre en place ! C’est pourquoi il faut garder une hauteur de vue, anticiper les mutations, accompagner dans la durée les bonnes pratiques et associer les habitants à la réflexion et aux décisions. Il faut renforcer la résilience de la ville pour qu’elle développe une capacité à s’adapter aux événements intenses qu’elle vivra.

À quels changements amène la vie dans un éco-quartier ? Bedzed, le célèbre éco-quartier de la banlieue de Londres, en est un bon exemple. Il reposait sur trois cibles principales : le développement du travail chez soi, une bonne performance énergétique et une mixité sociale. Résultats : sur une centaine de logements, seules quelques personnes travaillent à domicile, la chaufferie à bois n’a jamais bien fonctionné mais la performance énergétique de l’éco-conception du bâti a compensé ce dysfonctionnement, et il s’y dégage un « entre nous », un sentiment de partager des

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« Je suis fière de l’engagement de la jeunesse actuelle, qui cherche du sens et trouve des solutions. » @AnnickGirardin #citoyenacteur Crédit Coopératif @credit_coop 15 oct.

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Le citoyen responsable vu par Louis Henry

SUR LE TERRAIN, DANS LE NORD-PAS-DE-CALAIS...

Revaloriser les citoyens et les matières

Il fait face aux enjeux planétaires actuels climatiques, démographiques, d’habitat, de migration. Il ne dit pas « c’est trop tard », et ne reporte pas les solutions sur les générations futures. Cette prise de conscience a émergé en 1972, quand les premières photos de la Terre vue de l’espace ont été prises. On visualisait que l’Homme et la Terre forment un écosystème unique.

Il cherche à comprendre. Il ne se fie pas aux solutions de bon sens qui ont « l’air pourtant si simples ». Dans un monde aux interactions toujours plus complexes, il a abandonné les solutions « évidentes » parfois porteuses de nouvelles difficultés. Lui, il cherche à comprendre ces interactions et réfléchit aux investissements qui leur donneront une colonne vertébrale. De la même façon que le monde n’a jamais été aussi complexe, avec de nombreux acteurs, des actions aux multiples effets, il sait que les solutions n’existent pas toutes prêtes et qu’il va falloir les inventer.

Comment diffuser des bonnes pratiques et favoriser la récupération en s’appuyant sur une démarche créative ? Apprendre à faire du beau avec du laid, de l’usé, du cassé, du rouillé… C’est ce qu’ont entrepris Marie Gobaille et Anne-Lise Nouvier au travers de leur Scop « Filles à retordre » qui a deux activités : la création d’accessoires et de costumes à partir de matières récupérées et l’animation de stages et d’ateliers destinés à des particuliers ou des structures collectives. Dans ce deuxième volet, elles animent notamment des ateliers d’insertion pour des jeunes éloignés de l’emploi. Après plusieurs mois de travail, ces ateliers constituent une passerelle vers la réinsertion, 80 % des jeunes ont repris une activité ou une formation. De 2012 à 2014, les Filles à retordre ont également participé au Fivestival en créant les décorations urbaines à base de matériaux de récupération avec de nombreux habitants du quartier de Fives. Ces ateliers créatifs commencent à être reconnus et demandés : Filles à retordre compte ouvrir une antenne dans le Boulonnais en 2016.

Il agit à la fois en porteur d’une vision et en acteur modeste sur ses interventions. Il sait qu’il peut se tromper et reste en éveil, car il accepte de pouvoir corriger l’action qu’il met en œuvre. Observer, être à l’écoute, échanger, corriger, réorienter son action est un processus normal pour lui.

Filles à retordre « PRIX SPÉCIAL DU JURY » de l’initiative en économie sociale de la Fondation Crédit coopératif, Marie Gobaille et Anne-Lise Nouvier

Il faut penser et rechercher le libre, durable et solidaire #citoyenacteur Gaëlle Ryouq @gaelle_ryouq 15 oct. ●

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CITOYENS

Interview ÉCL AIR ÉS

« L’éducation citoyenne passe par l’ l’ex emplarité » Jérôme Saltet, co-fondateur et directeur associé de Play Bac, co-fondateur de l’Ecole de la Philanthropie, est un passionné de jeu et d’éducation. Il rêve d’une autre façon d’enseigner aux enfants.

Quelle forme doit prendre l’éducation citoyenne ?

choisir une cause et de s’engager durant toute l’année scolaire, pour faire avancer cette cause. Aidés de leur instituteur, ils vont établir un budget, travailler avec une association, créer une affiche, voire un événement, afin de faire progresser leur cause. Le slogan de l’École de la Philanthropie est « Nous avons tous le pouvoir d’aider » ; à l’issue de cette expérience, les enfants en sont tous convaincus. Ils en font même des chansons.

Avec mes deux associés, nous avons eu l’idée d’un jeu de questions-réponses sur le bac. Play Bac est né en 1985. Et depuis 30 ans, nous avons toujours eu à cœur de travailler sur le thème de « changer l’éducation ». Que ce soit de manière ludique avec les Incollables, ou de manière plus didactique avec les premiers quotidiens pour enfants, nous nous attachions à donner du sens à l’actualité. Quoi qu’il en soit, l’éducation citoyenne est une notion complexe : il faut savoir en parler, se doter de mots, mais elle passe surtout par l’exemplarité, l’exemple que nous, adultes, nous leur donnons. Car les enfants « entendent » mieux quand ils agissent.

Pour aller plus loin, vous travaillez sur la création d’un collège idéal… Il s’agit d’une initiative citoyenne de Play Bac, qui s’engage pour demain et réfléchit à une école dont la mission serait radicalement différente : au lieu de s’occuper de tous les enfants, s’occuper de chacun d’entre eux. Un seul objectif : former des citoyens autonomes, responsables, entreprenants et heureux ! Pour cela, plus de niveau, plus de classe mais un ensemble de dispositifs permettant aux enfants d’acquérir non seulement des savoirs mais surtout le savoir-apprendre, le savoir-faire et le savoir-être. L’enjeu dans le monde de demain n’est plus d’apprendre par discipline (nous savons que ce savoir est vite obsolète), mais d’apprendre à apprendre, de façon à continuer à se former tout au long de sa vie.

Pour mettre en œuvre cette exemplarité, vous avez créé, avec d’autres, l’École de la Philanthropie. En quoi consiste-t-elle ? C’est une idée généreuse et très éducative, portée par les Fondations Rothschild, qui veut utiliser la philanthropie comme outil pédagogique pour éveiller les jeunes générations à l’engagement citoyen. C’est une plateforme qui propose un programme et des outils pédagogiques pour permettre à des élèves d’écoles primaires de

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@MaisonMutualite avec @fbardeau pour parler éducation citoyenne aux rencontres de @credit_coop_. Joie ! #citoyenacteur Jérôme Saltet @ecoledufutur 15 oct.

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Le citoyen éclairé vu par Jérôme Saltet Il contribue positivement. Sur le terrain, il n’attend pas des pouvoirs publics qu’ils aient la solution à tout, ni que les choses se fassent sans lui. Il prend en charge la partie qui lui incombe. Il ne donne pas de leçons, il ne passe pas son temps à critiquer. Il est modeste et humble, mais il agit là où il est. Il est plus acteur que plaintif.

Il partage, dans un monde où il est devenu plus facile qu’avant de partager. C’est une conviction très forte que nous portons avec l’École de la Philanthropie, celle de transmettre aux enfants que tous, nous avons le pouvoir d’aider.

Il est responsable et entreprenant. Il a conscience des enjeux du monde actuel et cherche à améliorer ce qui peut l’être sur des sujets qui lui sont proches.

Il est heureux car l’on ne peut aider les autres que lorsque l’on est bien avec soi-même.

SUR LE TERRAIN, EN LORRAINE…

Mon HLM au centre de la scène S’emparer de l’espace public comme d’un terrain de jeu, montrer la vie telle qu’elle est vécue par ses habitants, et ainsi revaloriser l’image d’un quartier sinistré. C’est l’objectif de la compagnie La Chose Publique qui a choisi d’aller à la rencontre des habitants d’un HLM situé dans le quartier sensible du Sancy à Jarville-la-Malgrange, près de Nancy. Le projet « Histoire de Librement se Mélanger » met en scène la vie ordinaire dans un HLM. L’aventure s’est déroulée en trois temps. Le premier volet a consisté

à interviewer les habitants pour recueillir leurs témoignages sur leur lieu de vie. À partir de cette matière, l’équipe de la compagnie a écrit des scènes qui ont été interprétées par des comédiens, professionnels ou amateurs, et des habitants intégrés au fil des répétitions. Chacun a coopéré au projet, soit en prêtant son appartement, soit en tant que figurants. Deux journées de représentation ont eu lieu pour présenter ce travail devant près de 300 spectateurs du quartier, de la ville et de l’extérieur. Scène vivante, le HLM s’est retrouvé au centre du spectacle avec, pour final, un ballet de volets et de fenêtres manipulés par l’ensemble des participants, sur fond des premiers témoignages

La Chose Publique 4e PRIX DE L’INITIATIVE en économie sociale de la Fondation Crédit Coopératif, Stéphanie Parrens et Carole Prieur

«L’humain doit être au centre de toutes choses pour un banquier» @jeanlouisbancel @credit_coop_ #BankingOnValues #citoyenacteur

@AnnickGirardin rappelle l’importance de l’#ESS dans l’économie française #citoyenacteur Crédit Coopératif @credit_coop_15 oct.

Jamina @smurff_in 15 oct. ●

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d’habitants. À la fin, le spectacle leur a permis de poser un autre regard sur leur HLM et, plus largement, sur leur quartier. Un second projet HLM a été réalisé en 2015 et un autre est prévu en 2016 dans les autres quartiers de la ville.

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CITOYENS

ÉS

Interview

ENGAG

« Mettre en œuvre la participation du citoyen » Armel Le Coz, cofondateur du collectif Démocratie Ouverte, plaide pour plus de transparence et pour un rôle de co-construction joué par le citoyen.

Que cherche à développer le collectif Démocratie Ouverte ?

pairs à pairs ? Nous mettons en œuvre la participation : de la consultation, de la concertation (qui va jusqu’à la remise en cause possible du projet), et de la co-construction qui induit un niveau d’égalité entre les parties prenantes.

Nous sommes au Moyen Âge de la démocratie, elle doit encore avancer. Aujourd’hui, il y a encore peu de citoyens autonomes et responsables, la majorité reste en effet individualiste et dans une logique consumériste. Dans la perspective des élections municipales de 2014, j’ai entrepris un tour de France en auto-stop durant six mois. J’ai fait 5 000 km pour prendre le pouls des citoyens et de la démocratie locale et, in fine, rencontré 111 maires ou candidats : la culture de la délégation de pouvoir était omniprésente, et le sentiment d’être victime plutôt qu’acteur était largement partagé.

Quel est le premier bilan de vos actions menées auprès des politiques ? Les politiques ont certes bien conscience d’une grave crise de confiance des électeurs, mais certains sont encore analphabètes en matière de renouvellement démocratique, notamment dans les méthodes. C’est ce que nous apportons avec notre programme « Territoires hautement citoyens ». On peut toujours améliorer la démocratie locale, ce n’est pas une question de moyens. D’ailleurs, les territoires les plus actifs se trouvent parmi les territoires les plus ruraux et désargentés. Comme sur le plateau de Millevaches par exemple, un territoire où certains services publics sont pris en charge directement par les citoyens. Dans les territoires, cette démocratie trouve son sens naturellement. La mutation en est à ses débuts, la renaissance est pour bientôt.

Quels sont les enjeux d’une Démocratie Ouverte ? Les défis à relever sont majeurs : écologiques avec le réchauffement climatique, économiques avec la répartition des richesses et les inégalités sociales à l’échelle de la planète. Le concept développé par Démocratie Ouverte est lié aux modes de gouvernance : comment s’organiser ? Comment favoriser plus de transparence, de participation et de logique collaborative en mode

L’avez-vous

entendu

À #citoyenacteur @ClaudyLebreton : il faut construire une société de l’engagement citoyen. C’est l’objet de @THCitoyens dans les territoires Armel LE COZ @armel_lecoz 15 oct.

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Le citoyen engagé vu par Armel Le Coz

SUR LE TERRAIN, EN LORRAINE...

Héberger et accompagner les anciens détenus à leur sortie

Il est autonome. Le citoyen de demain veut redéfinir les règles de la délégation de pouvoir pour aller vers une démocratie plus ouverte, plus choisie, et se réapproprier un pouvoir d’agir trop facilement délégué. Il ne s’agit pas de faire des cités-états : le principe de subsidiarité reste toujours d’actualité, mais ce citoyen l’applique à l’échelle la plus réduite.

Il est responsable. La liberté conférée par l’autonomisation maximale doit être contrebalancée par une responsabilité assumée : il sait situer l’intérêt général au-dessus de son intérêt personnel et est capable de travailler pour le bien commun. Il assume ses choix et ses orientations devant la loi.

Il est connecté, mais ancré dans la réalité. Si son action est plus locale, le numérique lui permet de mieux faire circuler ses idées, de parler à la multitude, d’avoir des relais d’opinions, de trouver des communautés d’intérêt, d’interagir avec elles, de se former différemment (MOOC*), de faire des partages d’expériences, et de se connecter physiquement.

* MOOC : Massive Online Open Courses (cours en ligne massivement ouverts).

La sortie de prison est toujours un moment délicat à gérer pour l’ex-détenu, surtout s’il est isolé. L’association Alerpi a développé à Metz un dispositif d’hébergement et d’accompagnement pour y faire face. L’initiative, née d’un groupe d’aumôniers et de visiteurs de prison, propose un logement temporaire de six mois à des personnes démunies et volontaires, dans des studios situés en centre-ville. Un accompagnement personnel est également assuré par 35 bénévoles et un éducateur spécialisé qui offrent écoute bienveillante et aide pour les démarches administratives et sociales. Au total, huit personnes sont actuellement accueillies et accompagnées pour se reloger, avoir accès à des ressources, à des formations qualifiantes et à des soins. L’association organise également des activités culturelles et sportives, des dîners où bénéficiaires et bénévoles partagent des moments conviviaux. Alerpi, conventionnée par le ministère de la Justice, intervient dans le cadre de la réinsertion et de la lutte contre la récidive. La dotation de la Fondation Crédit Coopératif permettra d’aménager deux nouveaux appartements.

Alerpi TROPHÉE DE L’INITIATIVE en économie sociale de la Fondation Crédit Coopératif, Bernadette et Jacques Sidobre

La citoyenneté passe par une société de l’engagement. @ClaudyLebreton #citoyenacteur Julia. @Julia_sty 15 oct. ●

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CITOYENS

Interview

CONNECTÉS

« Retrouver la force du faire ensemble » Stéphanie Bacquere, cofondatrice de Nod-A, accompagne les entreprises pour les aider à transformer leur façon de travailler. Il y a urgence.

En quoi Nod-A aide à changer le monde ? Notre mission est de faire émerger dans les entreprises les nouvelles pratiques de travail issues du numérique. On insuffle plus de collaboration, d’horizontalité et surtout de concret dans l’élaboration d’un projet. Nous réunissons des équipes pluridisciplinaires et nous les mettons en situation de « prototypage immédiat » : plus de chef ou de manager, chacun est légitime par la compétence qu’il apporte, plus de cahier des charges. Les gens nous disent souvent qu’ils ont plus avancé en trois jours qu’en six mois.

En quoi est-il urgent de repenser sa manière de travailler ? Les start-up américaines sont en train de bouleverser des champs entiers de notre économie avec le numérique : Amazon, Apple, Uber… Or, on le voit, on assiste à une course effrénée pour des gains de production. C’est un système économique où l’on a gommé les individualités pour transformer l’homme en un simple outil de production. Nous, chez Nod-A, nous pensons que c’est là l’erreur majeure : face au phénomène d’automatisation des tâches, issu des algorithmes

L’avez-vous

entendu

dans le monde virtuel, et du développement des robots dans le travail manuel, l’humain sera toujours moins fort car moins discipliné, moins obéissant, et faillible. Humainement, cette course n’a pas de sens, économiquement, ça n’a plus de sens. L’urgence est au contraire de réapprendre à créer de la valeur grâce à l’intelligence et à l’action collective.

Que prônez-vous ? Nous sommes convaincus qu’il faut retrouver ce qui fait la force de l’être humain : la créativité, la désobéissance, l’action, le sens de l’éthique, la question du sens, tout ce qu’un robot ne saura jamais être. L’enjeu est bien de créer de la valeur pour ensuite pouvoir la partager, mais dans un nouveau rapport aux objectifs et à la performance. Il faut réapprendre à penser, comme un artisan qui a l’intelligence de son métier et le plaisir du travail bien mené. La reconquête du plaisir de travailler est aussi l’une de nos ambitions et passe par la nécessité de réinventer les entreprises : nous ne voulons pas remplacer un process par un autre, mais que les gens entreprennent cette reconquête eux-mêmes.

Un atelier-radio de @NEOPLANETE pour se dire #citoyenacteur à la R N du @credit_coop_ @YoDeLaBigne @LorenziBruno OLIVIER MONAT/ OLM @Olivier_Monat 16 oct.

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Le citoyen connecté vu par Stéphanie Bacquere C’est un « maker » (quelqu’un qui est dans l’action, en français on dirait un « faiseux »). Il préfère l’action à des beaux discours. Il laisse de côté les mesdames « yaka » et les messieurs « faudrait ».

Il travaille en réseaux et en lien avec les autres dans une dynamique d’entraide et d’égalité. Il a intégré les nouvelles pratiques du numérique : pour lui, il est naturel de partager, dans son travail et son action sociale, du contenu, de créer avec d’autres ce qui va permettre de nouveaux modes d’actions.

Il est le colibri de la légende. Alors que la forêt brûle, les animaux sont tétanisés de peur. Seul le minuscule colibri fait des allers-retours entre la rivière et l’incendie pour verser quelques gouttes d’eau. Le tatou s’énerve de cette agitation : « Tu es trop petit pour éteindre l’incendie ! ». « Oui, je sais, lui répond le colibri, mais je fais ma part. » Le citoyen de demain est le colibri qui se sent coresponsable de ce qui arrive. Il prend les choses en main et n’attend pas que d’autres le fassent à sa place, il n’a pas peur d’échouer. À sa manière, il contribue à façonner la société en faisant « sa part ».

SUR LE TERRAIN, EN RHÔNE-ALPES...

Faire l’expérience de la malvoyance Le studio de création lyonnais Dowino est spécialisé dans le jeu vidéo, notamment dans le serious game, utilisé pour sensibiliser le grand public sur des sujets de société. Dowino a entrepris de développer en son nom propre son serious game. À partir d’un financement participatif qui lui a permis de récolter 43 000 euros, et grâce au soutien de France Culture, du CNC, de la Région Rhône-Alpes et d’Humanis, Dowino a créé « A Blind Legend », un jeu d’action et d’aventures, mobile sans

image. L’originalité de la démarche participatif pour financer un prochain réside dans la technologie employée : jeu vidéo de prévention contre le l’ouïe remplace la vue grâce à une tabagisme et le cancer. technologie de son binaural*. * Les perceptions auditives engendrées par la stimulation simultanée des deux oreilles. Les joueurs ne sont guidés que par les sons en trois dimensions et prennent part à l’aventure en appuyant sur des points tactiles de leur smartphone. Au-delà de la création d’un jeu de qualité pour malvoyants, l’ambition est de sensibiliser le grand public à ce handicap, lequel peut ainsi faire l’expérience de la cécité durant quelques heures et mieux appréhender les difficultés que les malvoyants rencontrent. La dotation devrait permettre 3e PRIX DE L’INITIATIVE d’améliorer l’expérience du jeu en économie sociale de et d’investir dans une nouvelle la Fondation Crédit Coopératif, campagne de financement Pierre-Alain Gagne

Dowino

Vous aussi soyez #citoyenacteur grâce à @getstig : proposez, votez, améliorez ! Jeremie Paret @superparet 15 oct. ●

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CITOYENS

Interview

IFS

T COLLABORA

« La prox imité, nouveau modèle économique » Créateur de Modetic et de 1083, deux marques de mode écologique et éthique, Thomas Huriez a fait de la relocalisation de l’emploi son cheval de bataille. Il le prouve en réinventant un modèle économique entre local et global.

Dans un monde global, vous avez fait de la proximité le fondement de votre entreprise.

financement participatif qui nous a portés grâce à une communauté convaincue de l’utilité de notre projet. Nos clients sont ainsi nos premiers ambassadeurs. Le deuxième levier est la force de la proximité et des circuits courts. Nous sommes assez fiers d’avoir pu relocaliser des emplois.

J’avais une boutique de vêtements éthiques à Romans mais en 2011 mes fournisseurs ont fermé. Il fallait réinventer le modèle économique : j’ai gardé l’idée de la proximité, supprimé les intermédiaires et me suis appuyé sur Internet pour diffuser et vendre. Le coût de fabrication de mon jean est quatre fois plus cher qu’un jean de grande marque, mais je le compense avec la suppression des intermédiaires. C’est tout le sens de ma marque 1083 qui désigne les deux points les plus éloignés en France de Porspoder, en Bretagne, à Menton, et qui promet un jean made in France, bio, bien coupé dans une entreprise rentable à moins de 1 083 km.

Vous innovez également dans un secteur très jaloux de ses créations : vous mettez vos patrons de jean en libre de droits sur Internet… Oui, nous jouons la carte de l’Open Source, nos patrons de jeans sont en libre téléchargement sur notre site. Je crois qu’on a plus à gagner quand on partage que quand on s’isole. Dans ma première vie, j’étais informaticien, je connais bien cette intelligence collaborative. Il faut reconnaître que l’innovation de notre marque ne réside pas dans le modèle et sa coupe, mais dans notre démarche. Ouvrir et partager c’est valoriser les savoir-faire professionnels, et cela contribue à encourager la culture des savoir-faire de chacun. Nous poussons la logique à documenter tout ce que nous découvrons pour le partager. Notre communauté participe à notre projet.

Et ça marche : quelles sont les raisons de votre succès ? Oui, sans conteste ! Modetic a explosé en deux ans, sans réseau, sans contact presse. Nous sommes passés de deux salariés à dix. Il y a deux éléments qui expliquent ce succès. En premier lieu : la sincérité et la cohérence de notre démarche. Nous avons bénéficié au départ d’un

L’avez-vous

entendu

Crédit Coopératif a retweeté Azelus Notre président revêt un «hoody» ou «pull à capuche» pour soutenir les startups rurales de Lozère! #citoyenacteur Crédit Coopératif @credit_coop_ 15 oct.

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Le citoyen collaboratif vu par Thomas Huriez

SUR LE TERRAIN, EN BASSE-NORMANDIE ET ÎLE-DE-FRANCE…

La relation de pair-àpair pour partager et professionnaliser l’entraide

Il est responsable. Car il est conscient aujourd’hui des problématiques auxquelles le monde est confronté en matière environnementale et sociale, et qu’il aura à assumer demain.

C’est un consommateur engagé qui privilégie une démarche éthique, écologique et de proximité pour garder un certain contrôle sur l’impact de ses actes.

Il valorise le libre de droit (Open Source) en partageant en ligne dans une démarche d’intelligence collective avec sa communauté. Car il est convaincu que l’économie participative permet d’être plus créatif, plus intelligent et plus pérenne.

Paris, Ile-de-France Journée innovation sociale et solidaire avec @Cojob1 ce matin et les RN du @credit_coop_ cette après-midi #citoyenacteur #ESS

MFN et VoisinMalin MFN « MENTION SPÉCIALE DU JURY » et VOISINMALIN, 2e PRIX de l’Initiative en économie sociale, Céline Vauvarin, Denis Griponne et Fanny Bellassen

Sébastien Chaillou @sebchaillou 15 oct. ●

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Comment favoriser une plus grande autonomie et accompagner les personnes nouvellement en situation de handicap ? Réponse : en capitalisant sur l’expérience de ceux qui ont développé des stratégies de compensation pour affronter les actes de la vie quotidienne, sociale et professionnelle. Le projet, porté par la Mutualité Française Normandie (MFN) a pour vocation de valoriser ces compétences et capacités singulières, de professionnaliser ces pratiques d’entraide entre pairs, jusqu’ici informelles et empiriques. Cette pratique innovante d’entraide et de partage d’expériences deviendra alors une démarche d’accompagnement et d’insertion sociale reconnue. Le projet de l’association VoisinMalin repose sur la même logique d’entraide de pair-à-pair, entre voisins. L’association souhaite renforcer la capacité d’agir des habitants de quartiers populaires et lutter contre l’isolement. Constitués en réseau d’habitants-leaders, ces Voisins Malins sont formés pour aller au contact des habitants de leur quartier, en porte-à-porte, pour échanger sur des sujets très concrets de leur vie quotidienne comme l’habitat, les charges, les transports ou la santé. À l’issue d’un prototype réalisé en 2011 à Courcouronnes, l’action a essaimé en 2012 vers d’autres quartiers sensibles, dans l’Essonne et en Seine-Saint-Denis. Au total, huit quartiers de la région parisienne bénéficient aujourd’hui de ce dispositif. Et à Paris, dans le XIXe arrondissement, 10 Voisins Malins ont pu renouer le lien avec 1 500 familles en 2015.

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TABLE RONDE

VIVE LA « GLOCALITÉ »,

un monde à partager « Citoyens du monde, acteurs des territoires », que l’on pourrait traduire par comment agir local et penser global, est le thème choisi par le Crédit Coopératif pour sa 35e Rencontre nationale. Comment, à l’échelle du monde, avoir une action respectueuse de l’homme dans les territoires ? Comment concilier destins individuels et avenir collectif ? Autant de questions auxquelles nos invités ont commencé à répondre. Pour le citoyen, le premier des territoires pour agir est l’espace local Apporter une réponse à une situation géographique et sociale précise : c’est le défi auquel a répondu Jean-Guy Henckel, qui s’est retrouvé confronté à l’émergence de pauvretés inédites. « Des urbains cassés par la précarité mais aussi des ruraux et des agriculteurs, désespérés et surendettés. » Face à cette situation, il crée en 1991 le 1er Jardin de Cocagne, près de Besançon, un projet qui a bouleversé le visage de l’insertion par l’activité économique en faisant le pari de la mixité sociale, du travail de la terre et de l’agriculture bioCRÉDIT COOPÉRATIF TOUS BANQUIERS !

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logique. Les premiers paniers prévendus sont nés. Vingt-cinq ans après, le Réseau Cocagne compte 130 exploitations, fait travailler 5 000 personnes en difficulté et produit pour 30 000 familles abonnées aux paniers. Une expérience « enracinée » dans les territoires et qui a réussi à réconcilier l’économie, le social et l’écologie, « les 3 sœurs ennemies du développement durable », avec une seule méthode : celle de « donner du sens à un projet grâce aux alliances inédites des pouvoirs publics, des entreprises et des citoyens », selon Jean-Guy Henckel qui conclut joliment son intervention en trois mots « Semer, essaimer, s’aimer ».

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Le pair-à-pair, une dynamique relationnelle pour créer de la valeur et des ressources partagées

fabrication. Ainsi, sur les 70 milliards de tonnes de matières premières extraites en 2008, plus de 40 % ont été utilisées pour permettre l’acheminement et l’export de matériaux3. », analyse-t-il. Produire local est donc un modèle potentiellement hyperproductif, qui allie le local au global.

Comment être un citoyen engagé dans les territoires à l’heure où le numérique a transformé la planète en village ? « En adoptant un modèle de transition vers une société des communs, où l’activité serait collaborative, en partie non-marchande, plus écologique et plus heureuse », répond Michel Bauwens, penseur activiste d’un nouveau genre, référence mondiale du pair-à-pair, cette économie alternative qui valorise le partage des connaissances, les échanges non-marchands et l’open source 1. Ce belge, qui se définit comme un « anthropologue du numérique », est devenu le chantre de ce modèle coopératif, communautaire et citoyen. « Le pair-à-pair est une dynamique sociale qui fait que les gens peuvent aujourd’hui communiquer sans permission et s’auto-organiser pour créer des communs. »

Le savoir, un bien commun à élaborer Pascaline Dupas, professeure d’économie à Stanford, élue meilleure jeune économiste de France 2015 par Le Monde et le Cercle des Économistes, travaille sur des programmes de politiques publiques de santé et d’éducation pour les plus pauvres, notamment en Afrique. « J’essaie d’ancrer mes études dans les territoires au plus près des problématiques pressantes des ménages », précise la chercheuse. En effet, Pascaline Dupas a toujours privilégié l’approche concrète des questions économiques, et donc l’observation directe de la réalité. C’est en étudiant les contraintes et incitations auxquelles font face les parents, les enfants, les enseignants, les institutions que l’on peut déterminer quel type de politique publique il convient de mettre en œuvre pour améliorer la situation. Une méthode et des études qui portent leurs fruits : « Le savoir est un bien commun à élaborer. Dans mon domaine, on essaie de comprendre et mesurer l’impact des différentes actions possibles d’aide au développement, et cela permet aux acteurs locaux, qu’ils soient gouvernements ou ONG, de mettre en place ce qui marche le mieux… », a souligné la jeune économiste. Pascaline Dupas conclut en nous interrogeant sur une société sans solidarité : « c’est un mauvais pari économique ».

Produire local et collaborer global La technologie pair-à-pair permet des choses impossibles auparavant comme le financement participatif. « Certes, on assiste à un nouveau capitalisme qui ne produit plus : Google, Uber… Nous sommes encore en période de transition, entre ces grands acteurs et l’économie coopérative », précise Michel Bauwens. Mais aujourd’hui cette logique du pair-à-pair est déjà en marche à en croire l’ascension des modèles émergents tels que l’économie collaborative, le mouvement des makers, l’innovation sociale… : on estimait déjà en 2007 que cette nouvelle économie faisait vivre 17 millions de travailleurs aux États-Unis2. Ce modèle a-t-il de l’avenir ? « Il faut collaborer globalement et produire localement. Or nous savons qu’on consomme trois fois plus de matières premières pour assurer le transport des biens manufacturés que pour leur

Le partage du pouvoir pour un destin collectif Claudy Lebreton, ancien président de l’assemblée des départements de France, est un passionné de l’action dans les territoires, qu’il juge souvent très

La double qualité du Crédit Coopératif Jean-Louis Bancel, président du Crédit Coopératif, a ouvert le débat ainsi : « Citoyen du monde, acteur des territoires, ce n’est pas une confrontation mais une dualité. C’est la double qualité qui nous caractérise : acteur et citoyen. Cette dualité des termes s’applique à chacun de nous, tant individuellement que collectivement comme une partie prenante d’une communauté humaine vivant ici et maintenant. » ●

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TABLE RONDE innovantes. « La richesse des territoires n’est ’ t pas dans le sous-sol mais dans les gens qui les peuplent. Cependant, l’addition de politiques locales fait-elle une politique globale ? » Pour lui, le problème est la refondation des règles de la démocratie. Comment faire pour que les citoyens s’approprient les initiatives mises en œuvre dans les territoires ? Pour l’homme politique, le facteur essentiel est la proximité. « Il faut que cela parte des citoyens », ce qui rend caduques les décisions venues d’en haut et la centralisation.

Des cito citoyens des territoires et du monde

MICHEL BAUWENS

Polliniser les savoirs pour créer l’abondance Thanh Nghiem4, fondatrice de l’Institut Angenius, un incubateur d’initiatives et d’idées au service du développement durable, veut « utiliser la puissance du numérique pour accélérer les actions d’intérêt général ». Convaincue que c’est de l’intelligence collective que naîtront les innovations sociales et environnementales, elle s’attache à diffuser librement les connaissances, à « polliniser les savoirs » en s’inspirant des modèles Open Source et de l’économie collaborative. Une récente réalisation, à laquelle son Institut Angenius a collaboré, est un Bedzed5 à la française à Loos-en-Gohelle, bassin minier du nord de la France qui connaissait une situation économique désastreuse. Grâce au lancement d’un programme « Commune durable », cette commune accueille aujourd’hui 7 500 habitants qui ont pu renouer avec leur territoire et mieux vivre ensemble. « Il faut ajouter de la cohérence à la convergence », dit-elle pour aider à « l’empuissement »6 des gens et les aider à devenir acteurs. « En somme, conclut Michel Bauwens, pour faire émerger ce monde de demain, il faut associer au partage de la connaissance, le durable, et rajouter le partage de la valeur, c’est-à-dire la solidarité. » On a la grille de lecture, reste à définir ce nouvel alphabet et créer un nouveau langage.

PASCALINE DUPAS

JEAN-GUY HENCKEL

CLAUDY LEBRETON

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« Sauver le monde : vers une société post-capitaliste avec le peer-to-peer », Édition Les liens qui dérangent, 2015, 267 p., 20 €. http://p2pfoundation.net/Fair_Use_Economy 3 http://blog.p2pfoundation.net/three-times-as-many-rawmaterials-are-used-to-export-traded-goods-than-are-used-intheir-manufacture/2013/09/15 Conférence TED talk Paris, février 4 2012 « La pollinisation ou le partage des savoirs » : https://www.youtube.com/watch?v=hBs1VGhNHuM 5 Expérience d’éco-quartier à Londres. 6 Empowerment, en anglais. 2

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THANH NGHIEM

Fondateur de la Fondation P2P (Peer to Peer Foundation), un réseau international de chercheurs engagés qui observent et promeuvent l’émergence d’une nouvelle économie centrée sur la « production entre pairs » : l’économie collaborative. Professeure française d’économie, elle travaille à l’Université américaine de Stanford sur l’évaluation des politiques publiques sur la santé et l’éducation en Afrique. Elle a été distinguée meilleure jeune économiste en 2015 par le Cercle des Économistes et Le Monde. Elle appartient au JPAL, laboratoire d’action contre la pauvreté du MIT, fondé notamment par Esther Duflo, lauréate du Prix 2005. Il commence sa carrière comme éducateur spécialisé dans un centre d’hébergement pour marginaux et crée en 1991 le premier « Jardin de Cocagne » près de Besançon. Il propose ainsi de réinsérer par l’emploi des publics sociaux différents. Il dirige aujourd’hui le Réseau Cocagne. Maire de la commune de Plénée-Jugon, puis président du Conseil général des Côtes-d’Armor de 1997 à 2014, il était jusqu’en 2015 président de l’Assemblée des départements de France. Il a fait de la démocratie territoriale son cheval de bataille. Première femme directrice associée du cabinet McKinsey en France, elle fonde en 2002 l’Institut Angenius, un incubateur d’initiatives au service du développement durable.

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