état des lieux
Arts vivants :
vous avez dit hybridation ?
Hybridation, déterritorialisation, maîtres-mots du spectacle vivant du XXIe siècle ? Sous le jargon, (presque) rien de nouveau. Comédie, danse, musique, arts plastiques, cuisine, mécanique, numérique, littérature, poésie, cirque, la création fait feu de tout bois, et les lieux de diffusion prennent goût à surprendre le public. | Valérie Lassus
D
ans l’Antiquité, le théâtre regroupait sur scène chœurs, danseurs, musiciens et acteurs, l’hybridation fait partie intégrante du théâtre. Cela n’a pas de sens de séparer les disciplines [ce qui s’est passé pendant quelques siècles] et de croire que c’est une chose formidablement moderne de les rassembler », souligne Sébastien Bournac, metteur en scène et directeur du théâtre Sorano. « Ce qui me dérange avec la notion d’hybridation c’est que cela supposerait qu’il y a des « arts purs ». Je pense qu’il ne faut pas raisonner dans ces termes, c’est idéologiquement dangereux. Comme chez les Grecs, la représentation contemporaine est une somme d’acteurs qui ne sont pas seulement ceux qui parlent ». Quoi de plus naturel d’ailleurs pour l’art que d’être à l’écoute du monde et en perpétuelle évolution ? Sur scène,
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il peut s’agir d’une simple juxtaposition (musique + jeu + vidéo, par exemple) ou carrément de l’invention d’un courant nouveau, comme la « non-danse » dans les années 90, ou encore d’expressions uniques liées à un artiste hors norme comme chez Romeo Castellucci, François Tanguy ou Bob Wilson. Pour Sébastien Bournac, « Antoine et Cléopâtre du metteur en scène portugais Tiago Rodrigues est un exemple d’hybridation parfaite avec, à partir de l’œuvre de Shakespeare, un texte dit par deux chorégraphes ». La nouveauté, c’est au niveau technique qu’elle entre en jeu. Les arts numériques, la maîtrise toujours plus poussée de la lumière, la vidéo représentent de véritables champs d’expérimentations, surtout depuis les années 2000. Ils enrichissent la création, parfois même viennent à son secours. C’est ce qu’explique