Rencontres internationales de Caux: Rapport 2015

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RENCONTRES INTERNATIONALES DE CAUX

RAPPORT 2015 www.caux.ch

Explorer le facteur humain dans le changement global


LA FONDATION CAUX – INITIATIVES ET CHANGEMENT (CAUX – I&C)

VISION La vision de la Fondation CAUX – Initiatives et Changement est un monde en paix, juste et durable, dans lequel tous agissent en pleine conscience de notre interdépendance et de notre responsabilité au plan mondial.

MISSION Établie en 1946, la Fondation CAUX – Initiatives et Changement (CAUX – I&C) réunit des personnes de tous horizons lors des conférences, formations et séminaires locaux ou internationaux qu’elle organise en Suisse, principalement dans son Centre de Rencontres, l’ancien Caux Palace.

CAUX – I&C offre ainsi un espace privilégié permettant d’inspirer, de former et de mettre en réseau des individus, des groupes et des organisations du monde entier, afin qu’ils puissent s’engager de manière efficace et novatrice dans la promotion de la confiance, du leadership éthique, d’un mode de vie durable et de la sécurité humaine. L’approche de CAUX – I&C vise à catalyser un changement global grâce au changement personnel. La Fondation opère selon ses valeurs de respect absolu de la dignité humaine, de la vérité, de la solidarité et de l’attention envers autrui à tous les niveaux de la vie publique et personnelle. Elle recommande la réflexion silencieuse comme moyen d’accès à la créativité et à l’inspiration.

SOMMAIRE

Que sont les Rencontres de Caux ? ­

4

Les enfants, acteurs de changement de la société

16

Confiance et intégrité dans une économie mondialisée

6

Graines d’inspiration

18

Gouvernance équitable pour une meilleure sécurité humaine

8

Impact Initiatives Challenge

20

Programmes en parallèle aux rencontres

22

Dialogue de Caux sur la terre et la sécurité 10 Forum international des bâtisseurs de la paix 12 Pour relancer une Europe inachevée

2  CAUX RAPPORT 2015

14

N.B.: «Caux» est souvent utilisé comme abréviation pour le Centre de ­Rencontres de Caux et l’ensemble des bénévoles, stagiaires, personnel et ­participants.


ÉDITORIAL

Juste avant que ne débutent les Rencontres de Caux 2015, je suis allée me promener près du Caux Palace. J’appréciais la beauté du lieu et son histoire unique – un engagement de presque 70 ans en faveur de la paix, de la réconciliation, du leadership éthique, de la sécurité humaine et de la durabilité. Alors que j’admirais le lac Léman et les Alpes suisses, je réalisai soudain que, dans les jours suivants et pendant tout l’été, des centaines de personnes allaient voyager pour venir jusqu’à Caux. Elles apprécieraient la sérénité de l’endroit, l’inspiration qu’il suscite et les rencontres qu’il génère. J’ai ensuite imaginé toutes ces personnes rentrant chez elles avec une énergie et une inspiration renouvelées qu’elles transmettraient à leur tour à leur entourage. Chacune, en s’efforçant de se changer elle-même, contribuerait à transformer sa communauté, mais aussi son pays et petit à petit le monde. Et cette année, j’allais être l’une de ces personnes. Je n’ai pas été déçue. Tout l’été, je n’ai vu que des participants enthousiastes imaginant des solutions simples et réalisables à des problèmes d’intérêt général et partageant des exemples de bonnes pratiques. Comme les années précédentes, le manque de transparence dans les entreprises et les gouvernements a suscité beaucoup d’intérêt. Les cas récents de fraudes internationales (par exemple la FIFA et Volkswagen) ont démontré, une fois de plus, l’urgente nécessité pour les dirigeants de s’engager à respecter des principes éthiques rigoureux pour conserver la confiance des

consommateurs et des actionnaires et, plus largement, celle de la société dans son ensemble. Caux a créé un environnement sûr pour examiner ces enjeux délicats, partager des expériences personnelles et discuter d’actions communes. Les flux migratoires sont des phénomènes fréquents dans l’histoire humaine. Pourtant, ces derniers mois, l’afflux de centaines de milliers de migrants et de réfugiés – notamment dans les pays européens – a provoqué d’intenses débats et tensions au niveau politique. À Caux, le séminaire « Pour relancer une Europe inachevée » a souligné le besoin de solidarité et d’empathie de la part des pays européens et la nécessité d’accueillir des migrants et des réfugiés, souvent bouleversés et épuisés par le dangereux périple qu’ils viennent d’endurer. Les participants ont rappelé que l’Europe ne devait pas oublier qu’elle s’est appuyée sur des migrants pour se construire. La Fondation CAUX – I&C a donc reconnu l’utilité de créer une plateforme d’échanges sur le sujet. Dès l’année prochaine, elle s’impliquera davantage et offrira sa longue expérience en matière de construction de la confiance. L’objectif est de faciliter le dialogue entre les différents acteurs concernés par les questions migratoires actuelles.

souligné l’importance d’Initiatives et Changements. Il expliqué que l’expérience de Japonais ayant visité Caux en 1950 a influencé la société japonaise jusqu’à aujourd’hui. Ma première participation aux Rencontres de Caux fut une expérience extraordinaire et captivante. Je crois profondément que Caux offre un espace unique et privilégié à ceux qui souhaitent assumer davantage de responsabilités dans la société civile, l’économie et la politique, construire un avenir meilleur et découvrir de nouveaux chemins qui n’ont peut-être pas encore été tracés. Car c’est seulement grâce à la capacité de nous transformer nousmêmes que nous pourrons avancer dans le monde et y jouer un rôle significatif.

Barbara Hintermann Secrétaire Générale Fondation CAUX – I&C

La commémoration du bombardement atomique d’Hiroshima en 1945 fut un moment émouvant de ces Rencontres de Caux. Le maire actuel de la ville, M. Kazumi Matsui, a envoyé un courrier à Caux et a CAUX RAPPORT 2015  3


RENCONTRES INTERNATIONALES DE CAUX

Que sont les Rencontres internationales de Caux ? Chaque été, la Fondation CAUX – Initiatives et Changement organise et coordonne des conférences internationales destinées à aborder un certain nombre de questions mondiales associées aux thèmes essentiels de la Fondation, à savoir, la construction de la confiance, le leadership éthique, un mode de vie durable et la sécurité humaine. Les conférences ont lieu au Caux Palace, le Centre de rencontres de la Fondation sur les hauteurs de Montreux, en Suisse, pas très loin de Genève.

C

haque conférence est organisée par une équipe principalement formée de bénévoles engagés qui développent et mettent en œuvre le programme de la conférence.

Toutes les conférences partagent une même structure : chaque jour commence par un temps de réflexion en silence pour assimiler les expériences de la journée précédente et gagner en perspective. La vue imprenable depuis le Caux Palace sur le lac Léman et les montagnes environnantes constitue une toile de fond magnifique. Pendant la journée, les participants sont également invités à rejoindre des « groupes de communauté » afin de rencontrer et de partager leurs expériences avec les

autres. Enfin, chacun est invité à aider les bénévoles dans diverses tâches pratiques. En effet, pendant la saison des conférences, l’aspect opérationnel du centre, des tâches ménagères aux repas et à la logistique, est principalement géré par des bénévoles et les jeunes participants au Interns Leadership Programme (voir page 22), venus du monde entier. Cette diversité d’âges, de milieux et de cultures est un aspect essentiel de l’expérience de Caux. Caux offre une atmosphère unique, créée lorsque les participants, les bénévoles et les stagiaires de tous milieux et cultures : • Se rencontrent et apprennent à se connaître • Prennent le temps de réfléchir et d’agir sur des questions spécifiques, personnelles et mondiales • Echangent avec des penseurs visionnaires et des acteurs du changement du monde entier

Au cours des années, Caux s’est forgé la réputation d’être une plateforme pour le dialogue interculturel et interreli-

Antoine Jaulmes, Président de la Fondation CAUX – Initiatives et Changement

gieux. Caux fournit un espace sûr pour tous ceux qui souhaitent partager leurs pensées et leurs expériences, échanger meilleures pratiques et outils, et élargir leur réseau. L’approche holistique de CAUX – I&C met l’être humain au premier plan, mettant ainsi tout le monde sur un pied d’égalité et brisant les cloisonnements. En résumé, Caux crée un environnement destiné à inspirer, former et mettre réseau les groupes et les organisations afin de construire un monde en paix, juste et durable.

Ouverture officielle des Rencontres Internationales de Caux 2015

Ambassadeur Anne Lugon-Moulin, cheffe de la Division de l’Afrique ­subsaharienne, Département fédéral des affaires étrangères

4  CAUX RAPPORT 2015

Le dimanche 28 juin, Antoine Jaulmes, Président de la Fondation CAUX – Initiatives et Changement, Ambassadeur Anne Lugon-Moulin, cheffe de la Division de l’Afrique subsaharienne, Département fédéral des affaires étrangères, et Laurent Wehrly, Syndic de Montreux ont officielle-

ment ouvert les Rencontres internationales de Caux 2015. Les participants à cette journée ont également pu visiter le Caux Palace et en apprendre plus sur la saison 2015 des Rencontres et sur les activités d’Initiatives et Changement dans le monde.


QUELQUES CHIFFRES

Rencontres de Caux – été 2015 1421 personnes 217

66

20  Participants  Bénévoles  Stagiaires  Scholars  Artistes  Personnel  Équipes

9 38 144

1008 217 66 20 9 38 144 13 %

12 %

1008

8 % 2 %

100 nationalités   Europe 65 %   Asie 12 %   Afrique 13 %   Amériques du Nord et du Sud 8 %   Australie et Nouvelle-Zélande 2 % 783

65 %

Vue d’ensemble détaillée : âge et sexe 350

 Nombre

300 250 200 150 100 50

638

0

 Hommes 638  Femmes

783

0–5

6–17

18–25

26–35

36–45

46–55

56–65

66–80

80+

28

127

262

299

175

201

167

141

21

CAUX RAPPORT 2015  5


CONFIANCE ET INTÉGRITÉ DANS UNE ÉCONOMIE MONDIALISÉE

Former les leaders pour une transformation économique 26 juin – 1er juillet. L’objectif de cette neuvième conférence annuelle était d’encourager les leaders à travailler pour le bien commun, et de présenter des histoires et des modèles de transformation personnelle et économique. La conférence a adopté une approche holistique, donnant aux participants le temps et les outils pour l’exploration intérieure, le développement des compétences et la création de synergies pour travailler sur un objectif commun.

L

a séance d’ouverture a été marquée par le thème de la lutte contre la corruption. Sunil Mathur, président-directeur général de Siemens Corporation en Inde et en Asie du Sud, a raconté comment l’entreprise internationale a analysé en profondeur sa culture d’entreprise à la suite d’un énorme scandale de corruption à la suite duquel tout le comité exécutif a démissionné. Le travail minutieux entrepris pour détecter les failles et la transformation de l’entreprise qui a suivi, ont fait de Siemens la meilleure entreprise du monde en matière de conformité d’entreprise, selon l’indice de durabilité Dow Jones.

Michael Smith, un membre de l’équipe TIGE, a également présenté son livre, Great Company, qui expose des récits de prises de décisions fondées sur la conscience issus des conférences TIGE et d’ailleurs depuis la crise financière de 2008.

Emmanuel Mutisya, Professeur ­assistant de projet du Programme en sciences du développement durable de l’Université de Tokyo

deux directeurs d’une célèbre société de bien-être et de fitness où elle travaillait comme trésorière du groupe au niveau international. Alia Benomar, avec le soutien de son grand-père, a exposé la corruption au sein de l’entreprise familiale de minoterie, la plus grande du Maroc.

Sunil Mathur, président-directeur général de Siemens Corporation en Inde et en Asie du Sud

Parmi d’autres histoires inspirantes, on peut mentionner celle de l’entrepreneur kenyan Emmanuel Mutisya, dont le refus de payer des pots-de-vin pour corrompre la police a créé un précédent qui a encouragé d’autres Kenyans à refuser de se soumettre aux normes de corruption. Wendy Addison, originaire d’Afrique du Sud, a courageusement dénoncé un détournement de fonds par 6  CAUX RAPPORT 2015

En parallèle, la « Caux Round Table », un réseau international de chefs d’entreprises expérimentés qui travaillent ensemble pour renforcer l’entreprise privée et la gouvernance publique afin de créer une économie mondiale durable, a organisé une réunion sur la responsabilité des entreprises de créer une économie mondiale durable. La Business School de Lausanne et Leadership for Transformation ont offert une formation en leadership orientée sur l’action (Impact Leadership). Divers ateliers ont été organisés avec pour thèmes le leadership intérieur, la paix, le leadership basé sur les valeurs, et le leadership basé sur les objectifs, dirigé par Pedro Langre, directeur exécutif de « Oxford Leadership » au Mexique.

Des chapitres nationaux de TIGE sont sur le point d’émerger. Des discussions ont eu lieu sur l’établissement de chapitres en Australie, au Danemark, au Mexique, aux Pays-Bas, en Écosse, en Suède, en Suisse, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Un modèle de persévérance Wendy Addison, fondatrice de Speak ­Out, Speak Up, a dénoncé ce que l’on considère comme le plus gros scandale d’entreprise de l’histoire de l’Afrique du Sud. Dénoncer n’a pas été un choix facile. Elle a raconté : « J’avais peur. ­

Wendy Addison, fondatrice de Speak Out, Speak Up et Alia Benomar, entrepreneuse


dier. Mais même si j’avais été bannie du terrain de jeu de la vie, je restais aux portes de l’espoir chaque jour sur mon morceau de carton. » Depuis 2012, elle a « dédié [sa] vie à [se] reconstruire, à lancer Speak Out, Speak Up (son organisation de soutien à ceux qui dénoncent la corruption), puis à aider les autres. »

Emmanuel Jeger, consultant et coach, animateur de l’atelier «Gérer le ­changement dans des équipes non ­permanentes»

J’étais très mal à l’aise. J’ai dû choisir entre ma loyauté envers mes collègues, mon contrat de travail et mon contrat social avec la société. J’ai essayé d’évaluer l’impact de mon silence sur la société, et c’est ce qui m’a encouragée à franchir le pas. » Son courage lui a coûté son travail et sa carrière. Ayant reçu des menaces de mort, elle s’est réfugiée au RoyaumeUni avec son fils de 12 ans. Les cadres corrompus ont finalement été condamnés à la prison, mais sans revenu ni économies ou pension, elle s’est retrouvée sans rien : « J’étais littéralement à la rue. J’ai rejoint un groupe de mendiants. Je négociais avec eux : j’écrivais une lettre ou un CV pour eux et, en retour, ils me laissaient le meilleur endroit pour men-

Avec le recul, elle dit de ces moments difficiles : « C’est lorsque nous traversons les moments les plus difficiles de nos vies que souvent nous trouvons notre vraie raison de vivre. Rien n’est jamais fini, nous évoluons constamment. »

toire et ses opinions sur l’éthique dans le monde des affaires : « Si je dois résumer en deux mots, il s’agit de confiance et d’intégrité. » Le traitement inégal des employés est la raison pour laquelle Jane Royston a quitté une grande entreprise d’informatique alors qu’elle semblait être au plus fort de sa carrière. Elle a finalement fondé sa propre entreprise d’informatique, NatSoft, qui s’est révélée être un succès, incorporant ses propres idées et valeurs. Pour elle, le travail d’équipe et le dévouement sont devenus des priorités, et non les bénéfices. Selon Jane Royston, toute entreprise cherchant le succès doit se concentrer sur un avenir à long terme.

Long terme ou court terme ? Le débat d’experts «  Business for Peace » a mis un accent sur le fait que les gouvernements et les entreprises ont de plus en plus d’opportunités de respecter les principes et pratiques de responsabilité sociale dans l’entreprise. Des lignes directrices sur les droits de l’homme et des entreprises ont déjà été définies par de multiples organisations, y compris la « Caux Round Table ». S’il est admis que le rôle des états est de protéger les droits de l’homme, on considère de plus en plus que les entreprises devraient également jouer un rôle protecteur. Jane Royston, entrepreneur et lauréate du prix « Femme d’affaires suisse de l’année », a partagé son his-

Jane Royston, fondatrice de Natsoft SA

Participants lors de la visite de Tergon, une entreprise sociale fabriquant des chaises ergonomiques CAUX RAPPORT 2015  7


GOUVERNANCE ÉQUITABLE POUR UNE MEILLEURE SÉCURITÉ HUMAINE

Construire la confiance pour une gouvernance éthique inclusive 3–8 juillet. Michael Møller, directeur général du bureau des Nations Unies à Genève, a donné le ton pour la conférence « Gouvernance équitable pour une meilleure sécurité humaine ». « Il y a tant de problèmes à résoudre que l’on ne peut plus compter exclusivement sur les gouvernements », a-t-il déclaré. « Nous devons tous collaborer. Chacun d’entre nous a la responsabilité d’apporter sa propre contribution en fonction de son expertise. »

L

es 200 participants étaient venus de 44 pays pour découvrir comment y parvenir. Ils ont parlé d’initiatives destinées à fournir de l’eau propre aux villages indiens, à construire la confiance entre les Chypriotes grecs et turcs, ou à permettre aux femmes de prendre part aux affaires nationales du Mali. M. Møl-

Michael Møller, directeur général du bureau des Nations Unies à Genève 8  CAUX RAPPORT 2015

ler a publié sur Twitter que la conférence « a mis en valeur l’énorme potentiel de la société civile ». Le département fédéral des affaires étrangères a sponsorisé 25 leaders du Mali, du Tchad et du Niger. Nombre d’entre eux sont impliqués dans la résolution de conflits dans leurs pays. Un atelier dirigé par des experts en médiation des Nations Unies a également attiré un public nombreux. Ils ont aussi participé à des ateliers sur les réponses à la violence extrémiste où ils ont été rejoints par des membres du parlement somalien, un haut représentant du Nigéria et des chefs d’ONG d’Afrique et du Moyen-Orient. Des Arméniens et des Turcs sont venus chercher une façon de lutter contre l’hostilité résultant de la brutalité de leur histoire. Les Ukrainiens ont présenté un film sur la guerre dans l’Est de l’Ukraine et ont reçu les excuses émouvantes de l’éminent historien russe Andrei Zubov. Ce dernier a animé avec Alexander Zinchenko, le vice-directeur de l’Institut

ukrainien de la mémoire nationale, l’atelier « Comment gérer le passé », qui s’est concentré sur les évènements tragiques de l’histoire des deux pays et a discuté des étapes à suivre pour arriver à la guérison.

Co-Willing Un réseau africain, appelé Commitment of the Willing ou Co-Willing, a organisé une rencontre lors de cette conférence. Ce réseau a été formé pour travailler pour l’intégrité dans le leadership. Il est formé de personnes actives dans la formation axées sur les compétences, le développement durable et la lutte contre la corruption. Elles sont venues partager leur expérience et apprendre à renforcer leurs propres initiatives et celles des autres. Parmi les participants se trouvaient Hans Herren, qui a reçu le World Food Prize (le prix mondial de l’alimentation), l’avocat d’Afrique du Sud Paul Hoffman d’Accountability Now, et Ekuru Aukot, qui a dirigé le comité d’experts qui a mis au point la Constitution kenyane de 2010.


Daphrose Barampama, Présidente de Femmes artisans de paix

« Nous avons besoin de médias qui peuvent faire les choses différemment. Des médias qui font l’éloge du bien. »

Bedan Mbugua, président-directeur ­général et éditeur en chef de Foundain Media Group Ltd

Participant au «Musa Dagh History Hike Project»

Les médias peuvent-ils non seulement raconter mais transformer les nouvelles ? La façon dont les nouvelles sont racontées pourrait-elle inspirer les lecteurs et les téléspectateurs à lutter contre la corruption, protéger l’environnement, résoudre les conflits ? C’est le défi dans lequel s’est engagée l’entreprise kenyane Fountain Media Group Ltd. Des plateformes telles que Buzzfeed, qui se concentrent sur les nouvelles positives, gagnent en popularité. Dans le monde entier, le public souhaite lire des nouvelles plus positives. Le président-directeur général et rédacteur en chef, Bedan Mbugua, et la célébrité de la télévision kenyane, Johnson Mwakazi, ont parlé de l’importance d’une alternative aux principaux groupes de radio télévision actuels. Ils ont présenté leur approche lors de l’atelier « Le défi des médias : journalisme, intégrité et espoir.» Les deux hommes sont catégoriques : il y a beaucoup de belles histoires qui valent la peine d’être racontées : « Nous avons besoin de médias qui peuvent faire les choses différemment. Des médias qui font l’éloge du bien. » Il est clair pour eux que les problèmes du monde nécessitent également notre attention, mais pas sans potentielle solution: « Même une mauvaise solution vaut mieux que pas de solution du tout », déclare Mwakazi. C’est comme cela qu’est né Fountain Media, avec l’objectif de transformer la nation à l’aide d’initiatives communautaires créatives. Une question qui a beaucoup préoccupé le Kenya est le nombre d’hommes décédés des suites d’une consommation excessive de boissons alcoolisées artisanales illégales. À Kiambu, des femmes

ont lancé une organisation – Mothers Against Drug Abuse (Les mères contre la toxicomanie) – pour lutter contre ce phénomène. Fountain Media s’est rallié à leur cause. Très vite, des milliers de femmes ont manifesté leur soutien et ont recruté d’autres femmes au-delà de Kiambu. Fountain Media Group s’est également penché sur la lutte contre la corruption. Comment avoir un impact sur la corruption généralisée et acceptée dans les ­affaires au Kenya ? Fountain Media a offert de faire de la publicité aux entreprises qui refuseraient de payer les potsde-vin. Certaines ont accepté le défi, offrant une belle histoire à Fountain TV, et la publicité aidant les entreprises en retour. À ce jour, plus de 500 entreprises ont accepté le défi.

Gérer le passé et le présent Pour marquer le centenaire du génocide arménien, des jeunes d’Arménie, de la diaspora arménienne et de Turquie se sont rassemblés pour discuter de leur passé commun et de la façon dont cela les affecte. Les dialogues se sont principalement tenus en privé dans le cadre du Musa Dagh History Hike Project, dirigé par Eugene Sensenig-Dabbous de l’Université de Notre Dame du Liban. Cependant, des ateliers ont eu lieu chaque jour au cours desquels le public était invité à en apprendre plus à travers des documentaires, des chansons et diverses présentations. Fructueux, le dialogue a permis d’engager des discussions profondes sur la vérité, le pardon, l’acceptation et le dépassement de la haine, commençant ainsi un voyage permettant l’acceptation du passé.

CAUX RAPPORT 2015  9


DIALOGUE DE CAUX SUR LA TERRE ET LA SÉCURITÉ

Enraciner le développement durable 10–14 juillet. Le dialogue a examiné le lien entre la restauration des terres, la sécurité alimentaire, la lutte contre la pauvreté et la résolution de conflit. Il s’est concentré sur les solutions qui peuvent permettre de développer les initiatives qui allient construction de la confiance et gestion durable des terres afin d’aider les communautés à échapper au cercle vicieux de la dégradation des terres et des conflits, les remplaçant par des environnements prospères et en paix. Les cinq jours du dialogue ont été remplis par d’intenses questionnements, des conversations animées, des solutions intelligentes, des histoires personnelles et des moments d’introspection.

Dr Michael Schluter, Président et directeur général de Relational Research

L

e dialogue était organisé en partenariat avec « Initiatives Land, Lives, Peace » (Initiatives pour la terre, la vie et la paix), la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD) et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Plus de 100 professionnels des domaines de la construction de la confiance et de la restauration des terres, y compris des agriculteurs, des activistes, des responsables politiques, des scientifiques et des hommes et femmes d’affaires, y ont participé.

10  CAUX RAPPORT 2015

Le dialogue a adopté une approche classique mais complexe centrée sur trois facteurs : les aspects environnemental, économique et social, permettant un échange horizontal et vertical productif entre les spécialistes, les responsables politiques et la société civile. Le deuxième jour, les participants ont examiné des solutions flexibles pour une gestion durables des terres, le troisième jour, ils se sont penchés sur les échanges dans le contexte d’un marché mondialisé, en particulier sur l’utilisation de l’eau, le quatrième jour, ils ont examiné les aspects de la construction de la confiance, enfin, le cinquième jour s’est conclu par un appel à l’action.

University, a parlé de l’utilisation de la psychologie politique dans les questions relationnelles dans le domaine des terres et de la sécurité. Il a déclaré que « les différents groupes ayant expérimenté une histoire de perte ont avantage à travailler ensemble dans des projets concernant les terres, l’eau et l’alimentation, présentant des bénéfices matériels évidents pour tout le monde, y compris leurs enfants, car cela leur donne une vraie motivation pour réussir, psychologiquement, spirituellement et financièrement ».

Parmis les intervenants, le contre-amiral Neil Morisetti (Retd.), du Royaume-Uni, a présenté lors de son discours une vue d’ensemble des dernières tendances en termes de menaces de la sécurité mondiale induites par le changement climatique. Michael Schluter, président et directeur général du «  think tank  » Relational Research, a, lui, présenté le modèle de « pensée relationnelle ». Joseph Montville, directeur du programme « Guérir la mémoire historique » de l’École d’analyse et de résolution de conflits de la George Mason

Contre-amiral Neil Morisetti, Envoyé spécial du Royaume-Uni pour le climat et la sécurité énergétique, 2009–13


Louise Baker de la CNULCD a insisté sur l’agenda de mise en oeuvre, la neutralité de la dégradation des terres étant l’objectif de la communauté internationale. Elle a dit que «Nous devons prendre nos responsabilités», être plus ambitieux et nous ne devrions pas avoir peur de la technologie. Après la Conférence, CAUX – I&C, en partenariat avec World Vision International, a organisé un événement de suivi à la Maison internationale de l’environnement de Genève le 15 juillet. L’événement a permis de partager les conclusions du Dialogue de Caux 2015 avec la communauté environnementale de Genève au sens large, et de continuer les discussions et la réflexion sur l’enracinement du développement durable. Lors de cet événement, la délégation kenyane s’est engagée à organiser un Dialogue sur la terre et la sécurité au Kenya en 2016.

Lancement d’un livre Ilan Chabay, enseignant à l’Institut d’études avancées sur la durabilité de Potsdam, a présenté le nouveau livre qu’il a co-édité, intitulé Land Restoration: Reclaiming Landscapes for a Sustainable Future. Ce livre est né de discussions tenues lors de précédents Dialogues de Caux sur la terre et la sécurité, de nombreux contributeurs étant d’anciens participants/intervenants.

Dialogue entre jeunes et experts Pour impliquer les plus jeunes, le Dialogue de Caux a organisé une discussion entre 40 jeunes écologistes enthousiastes et trois experts, Julia Marton-Lefèvre, ancienne directrice-générale de l’UICN, Luc Gnacadja, ancien secrétaire exécutif de CNULCD et Geoffrey Lean, correspondant pour l’environnement du Daily Telegraph de Londres. C’était une opportunité unique pour un échange entre générations sur les connaissances sur le sujet, les meilleures pratiques, mais également sur les valeurs et les convictions

Délégation du Kenya

personnelles. Dans un contexte de changement climatique et de conflit, les questions de leadership, d’attitude et de prise de décisions ont été les priorités de la soirée.

Première mondiale

Joseph Montville, Directeur du ­Programme pour la guérison de la ­mémoire historique à l’école d’analyse et de résolution de conflit, George ­Mason University

Le jour du 30ème anniversaire du concert Live Aid en Éthiopie, le réalisateur primé Mark Dodd (The Man who Stopped the Desert) et le protagoniste Tony Rinaudo de World Vision Australie, ont présenté le film « Ethiopia Rising : Red Terror to Green revolution » (L’ascension de l’Éthiopie : De la terreur rouge à la révolution verte). Le film raconte une entreprise de restauration des terres incroyablement réussie en Éthiopie à travers l’histoire émouvante d’un homme, Aba Hawi, qui a mobilisé sa communauté pour sauver leur village de l’extinction, et lutter contre la famine, la sécheresse et la guerre.

Louise Baker, Coordinatrice des ­Relations extérieures, politiques et ­négociations à la CNULCD

CAUX RAPPORT 2015  11


FORUM INTERNATIONAL DES BÂTISSEURS DE LA PAIX

Transformation non violente des conflits : dignité, participation et inclusion 16–19 juillet. Le Forum international des bâtisseurs de la paix 2015, organisé en partenariat avec l’« Institute for Conflict Transformation and Peacebuilding » (ICP), a réuni approximativement 70 participants du monde entier travaillant dans le secteur de la construction de la paix et a fourni une plateforme pour l’échange de meilleures pratiques et d’expériences dans la transformation non violente des conflits.

« Ne vous contentez pas de rêver la paix, faites-là »

P

armi les événements clés du forum on peut mentionner : • une discussion d’experts sur l’application des principes de dignité, de participation et d’inclusion, menée par Koenraad van Brabant d’Interpeace, Ajsa Hadzibegovic de Civic Alliance, Catriona Gourlay de PeaceNexus, et Daphrose Ntarataze Barampama des Femmes Artisans de paix • une présentation par Abbas Aroua, directeur de la Fondation Cordoue de Genève, sur les perspectives de l’Islam/du monde arabe sur la transformation non violente des conflits • et une série de quatre ateliers dirigés par des experts leaders dans le domaine de la construction de la paix. L’atelier d’Ajsa Hadzibegovic a examiné les facteurs réduisant l’autonomisation des jeunes et les empêchant de militer pour la construction de la paix. L’atelier de Simon Fisher, expert en résolution de conflicts à l’Université d’Oxford Brookes a analysé comment nous nous voyons dans notre travail sur les conflits. L’atelier de Jean Brown et de Shoshana Faire a encouragé les participants à l’introspection pour comprendre les histoires que nous transmettons aux futures générations. Enfin, l’atelier de Tanja Mirabile, co-directrice de ICP, a analysé le rôle du modérateur dans un dialogue efficace pour la transformation non violente des conflits. Alors que le forum touchait à sa fin, les participants ont eu l’opportunité de réfléchir sur les idées développées et les manières dont ils pourraient les appliquer à l’avenir dans leur travail. 12  CAUX RAPPORT 2015

est une source d’inspiration et de force, et a permis aux participants de quitter Caux inspirés et remplis d’une énergie nouvelle. Koenraad van Brabant, conseiller ­principal en consolidation de la paix, Interpeace

Certains participants ont déclaré que le forum les a encouragés à considérer les conflits sous un nouvel angle et à utiliser de nouveaux outils dans leur travail, tels que l’analyse des champs de force (Force Field Analysis). D’autres, inspirés par les trois principes de dignité, d’inclusion et de participation, ont expliqué qu’ils veulent désormais impliquer toutes les parties prenantes dans des zones de conflits, y compris celles qui sont les plus difficiles à atteindre. Le soutien offert par un solide réseau de personnes partageant les mêmes idées

La paix commence chez soi Le Forum met la personne au centre de la construction de la paix grâce à des séances interactives, d’échanges et des exercices de groupe. Cette approche a ainsi permis aux participants de réfléchir à leurs propres pratiques. « Comment pouvez-vous promouvoir la paix si vous vous trouvez vous-mêmes impliqués dans des conflits personnels ? » « Comment puis-je aider les autres à guérir de leurs blessures si les miennes sont à vif ? », a conclu un participant. Ce forum s’est révélé être une excellente opportunité pour les participants de découvrir et d’appliquer un principe fondamental d’I&C : « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde. »


Considérant ce principe au niveau organisationnel, Catriona Gourlay de PeaceNexus a abordé une question très importante et pourtant souvent ignorée : en tant qu’organisation de construction de la paix, appliquons-nous les principes que nous cherchons à promouvoir ? Comment gérons-nous le conflit à l’interne ?

Les Cercles de paix Cet été, des Cercles de paix et une formation pour facilitatrices ont été offerts en français et en anglais par le programme d’I&C Femmes Artisans de paix. Ce programme, qui fêtera son 25ème anniversaire l’été prochain, rassemble principalement des femmes pour promouvoir la paix, en commençant par elles-mêmes. Nina, une jeune Suissesse âgée de 18 ans, a participé à un Cercle de paix, ainsi qu’à la formation. Elle partage ici son expérience :

Catriona Gourlay, directrice générale, PeaceNexus Foundation

Abbas Aroua, directeur de la Fondation Cordoue de Genève

Cela peut être très difficile mais c’est également fondamental. « Les bénéficiaires de notre travail nous voient comme des exemples. Vous devez être un bon exemple pour votre propre crédibilité au sein d’une communauté. Les donateurs apprécient aussi beaucoup cela. » Elle a insisté sur le fait qu’appliquer les principes que l’on promeut est aussi essentiel pour l’efficacité d’une organisation. L’organisation pourrait bien

nécessiter des changements, ou même un réexamen complet, et certains s’y opposeront, mais « même si vous devez être flexible dans la mise en œuvre, restez déterminés ». Le Forum était l’occasion parfaite de rappeler que la paix commence chez soi.

« Un Cercle de Paix rassemble 10 à 12 personnes – chacune d’entre nous partage avec les autres ce qu’elle se sent de partager. Pour certaines personnes c’est très difficile de parler de leur vécu. On aborde des sujets touchants ; des histoires d’exils, d’abus sexuels, de meurtres … Ces moments sont forts en émotions – on finit toutes un peu par pleurer. Personnellement, il ne s’est rien passé de tragique dans ma vie. Ce que j’avais à dire était un peu futile comparé aux autres – mais une vie n’a pas besoin d’être tragique pour qu’elle soit racon-

Nina, participante à un Cercle de paix

tée et pour qu’elle soit écoutée. Personne n’est jamais vraiment en paix – nous avons tous des choses à partager. Etant la plus jeune du groupe, j’ai surtout beaucoup appris des autres, je me suis imprégnée de leurs histoires personnelles. J’ai vraiment ressenti une connexion mutuelle entre les participants. Nous nous faisons confiance, et nous respectons cette confidentialité. »

CAUX RAPPORT 2015  13


POUR RELANCER UNE EUROPE INACHEVÉE

Comprendre les enjeux, construire des valeurs et des centres d’intérêt communs 16–19 juillet. Cette conférence était organisée dans le cadre d’un projet sur quatre ans visant à engager des citoyens européens de tous les milieux dans des actions destinées à développer un esprit de partenariat et de solidarité dans tout le continent.

P

our les participants venus des quatre coins de l’Europe, la conférence était l’occasion de réfléchir et d’échanger leurs idées sur les valeurs européennes et les questions d’actualité : telles que conflits récurrents, les vagues de migration massives, la fragilité des droits des minorités et la façon de gérer le passé. En groupes, les participants ont pu discuter de leurs inquiétudes et de leurs espoirs, et faire des propositions pour l’avenir. Beaucoup de temps a été consacré à la vision et aux idées de deux des pères fondateurs de l’Europe, Monnet et Schuman, avec la visite de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe de Lausanne et une présentation par son directeur, Gilles Grin, ainsi que par Jeff Fountain, directeur du Centre d’études et de recherches européennes Robert Schuman.

Aurora ­Martin, Faculté des sciences politiques, Université de B ­ ucarest et conseillère ­principale auprès du gouvernement de Roumanie, et C ­ athy Nobles, fondatrice et directrice de la Reconciliation Walk Community

Les intervenants principaux de la séance plénière d’ouverture étaient les suivants : Ahmet Shala, ambassadeur du Kosovo au Japon et ancien ministre des finances; Stephanie Hofmann, professeur adjoint du Graduate Institute de Genève; Cathy Nobles, militante pour la construction de la paix; et par vidéo­ conférence depuis l’Italie, Leoluca Orlando, le maire de Palerme en Italie.

Gilles Grin, directeur de la Fondation Jean Monnet 14  CAUX RAPPORT 2015

Christoph Spreng, délégué d’I&C auprès du Conseil de l’Europe, a évoqué le 60ème anniversaire des Déclarations de Bonn-Copenhague et le rôle qu’y a joué le changement personnel. Margaret Smith, de la Faculté pour la paix internationale et la résolution des conflits de

l’American University de Washington, a, elle, prononcé un discours très émouvant, explorant les questions théoriques pour la construction d’un récit européen commun et les moyens pratiques de transformer les tensions à travers le changement social. Le dernier jour, les participants se sont engagés à agir pour continuer à relancer l’Europe inachevée pour l’année à venir. Certains ont exprimé leur intention de lancer des initiatives comme jouer un rôle plus actif dans le rassemblement des groupes minoritaires en Europe. Un projet spécifique a été évoqué : un voyage pour la paix dans toute l’Europe en 2018. Ce projet comprendrait la vi-


Exposition photographique : Au-delà de mes murs L’exposition photographique itinérante d’Undine Groeger, « Au-delà de mes murs » (Within My Walls and Beyond), a été inaugurée au cours de cette conférence. L’exposition présente un cheminement personnel pour comprendre le passé de l’Allemagne en représentant trois générations qui ont connu la construction et la chute du mur de Berlin. En parallèle, elle ouvre une fenêtre sur un lieu rappelant l’ancienne Allemagne de l’Est, la Transnistria, une zone de conflit gelé de l’ère post-soviétique entre la Moldavie et l’Ukraine. Cette exposition sera visible à Caux Expo jusqu’au 16 janvier 2016 et invitera les visiteurs à engager un dialogue sur les murs qui existent encore en nous et dans les communautés.

site d’endroits où des conflits ont eu lieu (ou ont encore lieu) afin de partager des histoires pratiques pour la construction de la confiance et la résolution des conflits.

Rencontrez les jeunes ­ambassadeurs : la perspective des jeunes sur l’Europe Cette année, la conférence a également lancé son programme pour les jeunes ambassadeurs : 35 ambassadeurs âgés de 18 à 25 ans, représentant 24 pays. Pour Lina, jeune ambassadrice d’Albanie, la conférence était une excellente opportunité de découvrir sur quels projets les autres jeunes travaillent pour construire une Europe meilleure. Elle a déclaré : « Malgré notre diversité, nous avons des valeurs communes. Il existe un grand besoin de coopération entre les pays européens et de promotion d’une plus grande cohésion sociale. » Pour elle, être une jeune ambassadrice lui a permis « de débattre de manière positive et constructive avec d’autres jeunes originaires de régions en conflits ». Elle est rentrée chez elle avec un fort désir de rester engagée en développant son organisation Breaking Barriers, dont l’objectif est de lutter contre les stéréotypes raciaux et religieux et de développer une plateforme en ligne pour des articles et des blogs abordant les défis et les espoirs de l’Europe.

Pour Bastian, jeune ambassadeur originaire d’Allemagne, participer à la conférence l’a aidé à mieux comprendre l’identité de l’Allemagne. C’était également l’occasion de discuter des défis auxquels l’Europe fait face et de construire un réseau d’individus de tous âges et de tous milieux pour aborder ensemble ces problèmes et prendre des initiatives. Il a conclu : « Nous allons rester en contact pour travailler sur nos

idées et les mettre en œuvre. L’approche de Caux est très holistique. Ce que j’ai appris ici m’a changé d’un point de vue personnel et un jour j’utiliserai ces expériences sur le plan professionnel. »

La mobilité : un droit inaliénable ? Le maire de Palerme en Italie, Leoluca Orlando, a marqué les participants de la Rencontre. Ce politicien anti-mafia de longue date défend maintenant une autre cause qui inquiète directement tous les pays européens : les migrants. M. Orlando a expliqué que, pour lui, la mobilité devrait être un droit inaliénable. Il est de notre devoir d’accueillir ceux qui fuient leur pays pour sauver leur vie, car « nous ne choisissons pas où nous sommes nés mais nous pouvons choisir où nous voulons vivre et mourir ». C’est pourquoi il a « tiré la sonnette d’alarme face à une Europe qui semble trahir les raisons mêmes pour lesquelles elle est née. »

Bastian, jeune ambassadeur d’Allemagne

Ses paroles, puissantes et déterminées, ont renforcé le désir de la conférence d’une Europe plus inclusive et ouverte aux autres. Grâce à M. Orlando, le conseil municipal de Palerme a approuvé la Charte de Palerme sur la mobilité humaine internationale. Il défend actuellement ses idées pour une Europe plus humaine et plus respectueuse. CAUX RAPPORT 2015  15


LES ENFANTS, ACTEURS DE CHANGEMENT DE LA SOCIÉTÉ

Enfants et adultes, partenaires pour le changement ? 27 juillet – 2 août. La conférence intitulée « Les enfants, acteurs de changement de la société » (CATS) a été organisée en partenariat avec Initiatives et Changement France, Eurochild, Universal Education Foundation et Child to Child. L’objectif principal de CATS 2015 était de mettre au jour les différentes formes de collaboration et de partenariat possibles entre enfants, jeunes et adultes afin de garantir que l’implication des enfants soit vraiment respectée à tous les niveaux de la société.

L

a participation était au cœur du programme de CATS où tous les participants ont pu partager leurs expériences, échanger concepts et idées, et discuter de leurs connaissances sur la participation des enfants au sein de la société, le tout dans un environnement de confiance à la fois ludique, interactif et respectueux de chacun. Les principaux intervenants ont été une source d’inspiration pour tous en racontant leurs histoires de lutte pour la défense des droits et de la participation de l’enfant dans la société. CATS a en effet accueilli des représentants d’institutions internationales, comme Kirsten Sandberg, ancienne présidente du Comité des droits de l’enfant au sein des Nations Unies; Judith Diers, directrice de la section développement et participation des Adolescents à l’UNICEF ou encore Julie Ward, députée européenne et fervente défenseur des droits de l’enfant au Parlement européen. Dimitri Avramopoulos, Commissaire européen 16  CAUX RAPPORT 2015

chargé de la migration, des affaires intérieures et de la citoyenneté, avait quant à lui spécialement enregistré un message vidéo diffusé lors de la conférence.

sentiels soulevés lors de la conférence et insistant sur l’importance de faire entendre la voix des enfants sur les questions politiques.

L’intervention d’une autre personnalité, Nkem Orakwue, fondatrice du parlement des enfants et directrice générale d’une chaîne télévisée dédiée aux enfants au Nigéria, a également marqué les esprits. Durant cette semaine de conférence, les participants ont eu la chance d’apporter leur contribution au Commentaire Général des Nations Unies sur les adolescents commissionné par le Comité des droits de l’enfant, grâce à un atelier dirigé par Gerison Lansdown et Darren Bird, tous deux consultants internationaux spécialisés dans les droits de l’enfant. Parallèlement, les rapporteurs de chaque atelier se sont réunis pendant la semaine pour mettre au point la présentation qu’ils allaient faire devant le Parlement européen abordant les points es-

Kesz Valdez, lauréat du Prix ­international de la paix pour les ­enfants et co-fondateur de C3 ­Championing Community Children


La conférence s’est avérée être une expérience concrète de la participation des enfants. Un jeune participant a confié : « La conférence CATS nous a rappelé l’importance de l’esprit d’équipe et de la coopération entre adultes et enfants dans nos vies. Nous avons pu en vivre tous les aspects grâce aux activités de CATS, que ce soit par les jeux, les tâches ménagères, les groupes communautaires ou les temps de partage. »

Kesz Valdez Un intervenant a particulièrement impressionné les participants avec son histoire, émouvante et source d’inspiration à la fois. Kesz Valdez est originaire des Philippines. En 2012, à seulement 13 ans, il remporta le Prix international de la paix pour les enfants. Il est également le co-fondateur de C3 Championing Community Children, une ONG qui vient en aide aux enfants des rues. Alors qu’il n’était qu’un enfant, son père l’envoyait fouiller les ordures d’une décharge de Cavite, aux Philippines. Pour échapper aux violences familiales, il fuit, mais continua à vivre sur la décharge dans des conditions précaires. Quelques années plus tard, il tomba accidentellement sur un tas de pneus en feu et fut secouru par un travailleur social qui le prit sous son aile, puis l’adopta. Kesz découvrit alors ce que cela signifie de vivre décemment, en sécurité, sans connaître la faim et surtout, entouré d’amour. Il n’oublia cependant jamais ses compagnons d’infortune qui vivaient encore dans la rue. Convaincu qu’il pouvait les aider en dépit de son jeune âge, il passa à l’action. Pour ses 7 ans, il distribua des sandales à des enfants des rues pour qu’ils ne se blessent plus les pieds.

Bibliothèque Humaine Un matin, le grand hall de Caux s’est transformé en bibliothèque. Mais au lieu de livres de papier, les participants étaient attendus par des personnes prêtes à leur conter une histoire. La Bibliothèque Humaine fonctionne sur le même modèle qu’une bibliothèque traditionnelle. Les « lecteurs » peuvent emprunter des livres et les rapporter à la bibliothèque une fois lus. A une différence près : les « livres » sont des personnes qui racontent des histoires liées aux droits et à la participation des enfants. Chaque lecteur a eu la chance de pouvoir écouter trois histoires. A l’issue de chaque histoire, un dialogue entre « livres » et « lecteurs » s’engageait. Cette idée créative a permis de nouer un lien très fort entre les participants, lien que seul le partage d’histoires personnelles rend possible. Peu de temps après, il créa sa propre organisation, C3-Championning Community Children, qui vient en aide aux enfants des rues en leur enseignant des notions d’hygiène, de santé et de droit. Elle les encourage aussi à s’engager dans la vie de la communauté. C3 leur offre des kits d’hygiène mais également, dans la mesure du possible, des chaussures, des jouets et du matériel scolaire. Depuis sa création en 2006, C3 est venu en aide à plus de 10 500 enfants au sein de 48 communautés différentes, a soigné plus de 3000 blessures et distribué quelque 4000 brosses à dents.

Le récit de la vie de Kesz et sa détermination à mettre tout en œuvre pour venir en aide aux enfants des rues ont été ovationnés par l’audience. Égal à luimême, Kesz est resté humble, porté par la volonté d’agir. Il souhaite suivre des études pour devenir travailleur social, comme son père adoptif, et pouvoir ainsi continuer à défendre et protéger les enfants des rues. Son témoignage a suscité une grande admiration et nous espérons qu’il aura permis au public de se rendre compte qu’il n’est jamais trop tôt ou trop tard pour s’engager.

Le Prix international de la paix pour les enfants a offert à C3 une notoriété et une aide financière internationales.

CAUX RAPPORT 2015  17


GRAINES D’INSPIRATION

Partager l’inspiration qui façonne nos vies 4–9 août. « Graines d’inspiration » 2015 a offert aux participants une expérience hors du commun au cours de laquelle ils ont pu tisser des liens et s’imprégner de l’histoire de Caux. Des ateliers, des productions théâtrales, des rencontres et des groupes de discussion ont ouvert les esprits à de nouvelles possibilités.

K

wame Reed est un jeune acteur et poète qui vient d’un quartier défavorisé de Londres. Il a commencé à repenser sa vision de « l’homme [qu’il] souhaite être ». Yasmine Kamel, également originaire de Londres, a entamé « son propre cheminement, poussée par la curiosité d’apprendre qui [elle est] et qui [elle veut] véritablement être ». Hitomi Mitsutake, professeure du Japon, se décrivait comme « très introvertie » a découvert « la joie de communiquer avec les autres ». Quant à l’acteur anglais Steve Stickley, il a redécouvert « la beauté de l’Islam ». Les ateliers ont proposé des activités très variées, allant de la sculpture japonaise sur bois à la compréhension de l’électricité, de la danse à un dialogue sur l’inclusion, de la spiritualité de la musique à une marche silencieuse. En soirée, le programme comprenait  : le tumultueux « Nora’s Ark » de Janet Stickley; l’adaptation pour marionnettes de « Don Quichotte » par la Commedia Gillet; « Race »,

le one-man show de Steve Stickley sur les Jeux olympiques de Berlin de 1936; enfin, « Lunacy or the pursuit of the goddess », véritable tour de force de June Boyce-Tillman. L’Intermission Youth Theatre (IYT) a captivé l’audience avec une série de sketchs intitulée « Family Drama », une réflexion sur les défis de la vie familiale dans les villes anglaises contemporaines. Parmi les intervenants, on peut citer Lillian Cingo d’Afrique du Sud, ancienne responsable du Phelophepa Train, une association qui propose des services de santé dans des communautés rurales reculées, ainsi que trois Somaliens issus de clans rivaux qui ont commencé un dialogue. Mohamed Mumin a évité les Somaliens pendant les 18 premières années qu’il a passées en Europe. Il a expliqué qu’il a pu changer grâce à I&C. « Si vous détestez, c’est que vous êtes malade. Pour guérir, il faut vous libérer vous-même, aimer, pardonner, être positif .»

M. Mitsuhisa Kato, d’I&C Japon

Commémoration d’Hiroshima Le troisième jour de « Graines d’inspiration » avait pour thématique : « Entendre des voix cachées : Commémoration d’Hiroshima ». Pour le 70ème anniversaire du bombardement, le maire d’Hiroshima a envoyé une lettre à Initiatives et Changement. Dans sa lettre, il lance un appel à la paix et évoque le rôle que

Intermission Youth Theatre (IYT) IYT a vu le jour au printemps 2008 et s’est donné pour mission de travailler avec des jeunes potentiellement sujets à la délinquance, des délinquants ou encore des jeunes sans perspectives d’avenir. Ils s’inspirent de pièces de Shakespeare et les réinventent en ajoutant des expressions de la rue au texte d’origine, créant ainsi leur propre interprétation, profondément contemporaine. Par ce travail, ces jeunes ren-

forcent leur créativité théâtrale, gagnent en confiance et font preuve d’ambition. Cette année, des fonds ont été récoltés afin d’offrir aux membres du Youth Theater 2015 la chance de participer à « Graines d’inspiration ». Le Caux Palace a offert un cadre très différent des quartiers de ces jeunes. Là-bas, ils sont trop souvent confrontés à la nouvelle qu’une tragédie a encore touché l’un des leurs. Certains membres de la troupe

quittaient pour la première fois le Royaume-Uni. L’éloignement géographique leur a ouvert de nouvelles perspectives et l’énergie qu’ils dégageaient a fait vibrer la Rencontre. De nombreuses amitiés se sont nouées et comme le dit si bien l’IYT : « Il suffit de la rencontre entre deux mondes pour que de belles choses surviennent. » Pour en savoir plus : www.intermissionyouththeatre.co.uk


l’organisation a joué pour restaurer la confiance au Japon après la guerre. Les participants et organisateurs se sont souvenus des nombreuses victimes de la bombe atomique aux côtés de la délégation d’I&C Japon. M. Mitsuhisa Kato, le représentant d’I&C Japon, a lu la lettre de Kazumi Matsui, le maire actuel d’Hiroshima. M. Matsui y appelle à un désarmement nucléaire total, car les armes atomiques sont « le mal absolu ». Il encourage aussi les « personnes du monde entier [à] aller témoigner et [à aller] au-delà des différences de nationalité, de race et de religion ». Dans sa lettre, M. Matsui raconte aussi que les maires de Nagasaki et d’Hiroshima se sont rendus à Caux en 1950, alors qu’ils faisaient face au défi de la reconstruction du Japon après la guerre. Ils ont été profondément influencés par ce qu’ils ont appris lors de leur visite. «  Si chaque personne écoute sa conscience, elle peut s’orienter dans une direction positive et apporter des changements bénéfiques non seulement au

sein de sa famille, de son travail, de son école, de sa communauté et de sa nation, mais aussi au sein des relations entre les hommes et les pays .» Un autre membre de la délégation japonaise, Nobuko Nakajima, a profondément ému l’assistance en racontant l’histoire d’une de ses enseignantes. Cette femme avait eu la vie sauve grâce à un arbre qui l’avait protégée de l’explosion. Quelque temps plus tard, alors que trouver du sens à sa vie lui était devenu difficile, elle a marché près du même arbre et y a vu une petite pousse. « Surprise et émue par la force de cet arbre qui essayait de vivre », elle a trouvé dans cette pousse le courage de recommencer à zéro. Dès lors, elle s’est donné pour mission de raconter cette histoire à ses élèves et de les inciter à ne jamais perdre espoir. Cette séance très émouvante s’est finalement tournée vers l’avenir, avec l’espoir que la paix s’installe durablement et que le monde ait la détermination de ne plus jamais répéter les mêmes erreurs.

Haïkus Après les commémorations, chacun a retrouvé son groupe communautaire pour partager ses impressions et ses réflexions. Un groupe a décidé d’écrire des haïkus. Un haïku est une forme poétique traditionnelle au Japon ; elle est considérée comme la forme la plus brève au monde. Écrire des haïkus a permis aux participants d’exprimer leurs sentiments avec concision. En voici deux exemples : Dis-moi pourquoi quelque chose d’horrible doit se passer pour nous apprendre que l’on a besoin de paix. Bo Giss, Suède Des milliers de grues en papier, nous rappellent des douleurs mais un vœu de paix demeure. Nik Dee Dahlstrom, Suède

CAUX RAPPORT 2015  19


IMPACT INITIATIVES CHALLENGE

Inspirer, former et mettre en relation la prochaine génération d’acteurs du changement 10–15 août. La deuxième édition d’Impact Initiative Challenge (IIC) a regroupé des jeunes acteurs du changement de tous milieux et pays d’Europe. L’objectif de cette conférence était d’encourager les participants à réfléchir sur leur identité et leurs aspirations pour les aider à développer leurs propres idées et à les réaliser.

L

es premiers jours de la conférence étaient dédiés au développement personnel, avec des thèmes comme : « Être soi-même », « Définir ses objectifs » et « Aspirations », et préparaient les participants à la seconde partie consacrée, elle, à l’action avec des sessions intitulées «  Engagement  » et « Etapes suivantes ». En posant la question : « Qui suis-je ? », le premier jour a donné le coup d’envoi au cheminement intérieur. Les intervenants Mami Veza, coach en développement personnel, et Pierre-Antoine Barraillé de la Fondation Praneo ont partagé leurs histoires personnelles, toutes deux marquées par une profonde transformation intérieure. Puis, ils ont invité chaque participant à entreprendre ce voyage intérieur par la pratique de la réflexion, de courtes méditations et d’échanges. Tous les après-midi, les participants pouvaient se plonger dans le concret et développer de nouvelles compétences en assistant à l’un des quatre ateliers proposés : « Développement personnel pour entrepreneurs », « Entrepreneuriat social », « Des idées à la réalité : visualiser votre histoire (pensée visuelle) » et un espace ouvert aux personnes ayant des questions précises. Chaque atelier répondait à un besoin spécifique et permettait aux jeunes acteurs du changement d’aborder les questions de manière très concrète. On leur a ainsi demandé de schématiser une idée et de la promouvoir ou encore de sortir de leur zone de confort pour renforcer leur confiance en eux. Après avoir appris que la persévérance et le courage étaient les clés du succès, ils ont pu mettre ces notions en pratique 20  CAUX RAPPORT 2015

en montant jusqu’aux Rochers-de-Naye. Certains s’y sont attelés le soir, passant la nuit là-haut; d’autres l’ont fait le matin suivant. Au sommet, Tessa Wernink, co-fondatrice de Fairphone, a exploré la thématique du jour : « Aspiration : l’art de se fixer des objectifs et des ambitions », avec, en arrière-plan, la superbe vue sur les Alpes suisses. IIC peut être perçue comme la première étape pour définir et réaliser ses objectifs. Deux anciens participants de la conférence 2014 l’ont bien prouvé en présentant « Mosquée verte », un projet qui ne cesse de se développer. Cette année, les participants pourront continuer à recevoir du soutien après leur séjour à Caux. Pour leur permettre de rester en contact les uns avec les autres, une communauté virtuelle sera créée et des conférences téléphoniques et des rencontres seront organisées. Les participants pourront ainsi s’aider mutuellement à avancer dans leurs projets qui visent tous à construire un monde plus juste, durable et en paix.

Exprimer visuellement ses pensées La « pensée visuelle » n’est peut-être pas un concept familier, mais c’est un outil de réflexion et d’organisation précieux. Au cours de l’atelier « Visualiser votre histoire : des idées à la réalité », les participants ont appris à s’en servir et ont compris comment un tel outil pouvait les aider dans leur vie professionnelle et personnelle.


La pensée visuelle et la facilitation graphique consistent à utiliser des images et des dessins pour organiser ses pensées, mais aussi pour trouver de nouvelles idées et les clarifier. Cette méthode s’appuie sur l’écoute approfondie, de simples dessins et des méthodes de facilitation pour visualiser des processus compliqués et contribuer à mettre de l’ordre dans la complexité de la pensée. Comme l’a expliqué Tamar Harel qui a animé les sessions, ce n’est pas la qualité du dessin qui compte, mais le fait qu’il « apporte de la clarté à des situations opaques ». Trop de personnes s’interdisent de dessiner, simplement parce

qu’elles ne se sentent pas suffisamment douées. Mais, même si l’on n’est pas très bon, il peut être extrêmement utile de dessiner dans le cadre de la pensée visuelle. Après le premier atelier les participants étaient déjà capables d’organiser leurs pensées et leurs idées en dessinant. Ils ont été aidés par des techniques, des modèles, un accès à une banque d’images gratuites et l’analyse de leurs dessins. Tout cela leur a permis de s’améliorer et de voir précisément à quel point la facilitation graphique est un outil utile pour transformer ses idées en projets plus concrets.

Un soutien pratique aux entrepreneurs sociaux Pour pouvoir participer à l’atelier sur l’entrepreneuriat social, il fallait déjà avoir une idée d’entreprise. Tout au long de la semaine, cet atelier a aidé les participants à mieux définir leur projet et à apprendre à le défendre devant une audience. Avec le soutien d’un coach professionnel, ils ont réfléchi à leur projets évaluant leurs forces et leur faisabilité. Ils ont aussi discuté de leurs motivations et compris que c’est la passion – et non l’argent – qui est la véritable clé du succès. L’atelier a encouragé les participants à s’appuyer sur le « Business Model Canvas » pour affiner leur projet. Cet outil de gestion stratégique et entre-

preneuriale permet de décrire, dessiner et mettre à l’épreuve un business model. Il aide les jeunes entrepreneurs à affiner leurs plans en leur faisant se poser les bonnes questions, comme : « Quel est votre produit ? Est-ce qu’il répond aux besoins de vos clients ? » A la fin du séminaire, les jeunes entrepreneurs sociaux ont présenté leur projet aux autres participants. Ils ont dû défendre leurs idées et en démontrer la valeur. Entre autres projets, on peut citer l’application smartphone pour donneurs de sang et l’entreprise sociale de fabrication de smoothie. Ces deux projets seront lancés cette année avec le soutien des coaches impliqués. Pendant l’atelier, les participants ont pris

conscience de l’importance d’avoir un retour sur leur projet. Ils ont aussi ­réalisé que discuter de ses idées et même demander de l’aide peut résoudre de nombreux problèmes. Mais surtout, cela peut aussi ouvrir de nouvelles perspectives et renforcer la motivation à se lancer. Car, après tout, la première cause d’échec est de ne pas avoir essayé.

CAUX RAPPORT 2015  21


EN PARALLÈLE AUX RENCONTRES

Le Caux Scholars Program (CSP) Vingt étudiants de seize pays différents ont été sélectionnés pour participer à cette formation de quatre semaines sur la transformation des conflits et la consolidation de la paix. Ce programme annuel forme des étudiants à l’analyse des conflits, à la compréhension des facteurs qui les créent et les alimentent et leur apprend des méthodes pratiques de résolution des conflits.

Q

u’est-ce qui fait du CSP une expérience unique, bien différente d’une formation académique classique ? La réponse est simple : ce sont les gens qui font toute la différence. Qu’il s’agisse des participants ou des organisateurs, ils ont pour point commun d’être visionnaires et totalement engagés pour la promotion de la paix. À travers ses différents ateliers et formations, le programme s’attaque à des enjeux universels, comme la consolidation de la paix et la transformation des conflits, et re-

met en question les schémas traditionnels. Le CSP place l’individu au cœur des processus de paix et les participants qui proviennent de zones de conflit en sont la parfaite incarnation. Le programme de 2015 a rassemblé des participants issus de pays « ennemis », en conflits les uns avec les autres. Mais comment ces participants-là ont-ils pu dépasser la méfiance ? Comment ces « ennemis » ont-ils pu devenir amis ? La réponse réside dans cette humanité commune que chacun découvre et dans

Bourses AIESEC

C

haque année, la Fondation offre cinq bourses à des étudiants en Suisse qui sont membres d’AIESEC, la plus grande association d’étudiants au monde et pour laquelle la Fondation or-

Rebecca Jiménez, bénéficiaire d’une des bourses pour les membres d’AIESEC en Suisse

ganise régulièrement des ateliers. Les bourses de la Fondation couvrent les frais d’inscription, l’hébergement et les repas, permettant ainsi aux lauréats de participer à une des conférences. Cette année, Rebecca Jiménez, étudiante en anglais, géographie et ethnologie à l’université de Zurich, a ainsi pu participer au Forum. Nous lui avons demandé ce qu’elle retiendrait de son séjour à Caux : « J’ai énormément appris sur les processus de paix. Désormais, j’en appréhende mieux les problématiques et j’ai aussi pu vivre de nouvelles expériences. Caux est un monde en soi. Bien sûr, le cadre est à couper le souffle, mais Caux est surtout un lieu où des personnes qui poursuivent le même but peuvent se rencontrer, un lieu qui nourrit le changement grâce aux échanges et au soutien offert. »

la transformation personnelle que le programme déclenche. En 2015, les Caux Scholars ont eu de nombreuses occasions d’apprendre les uns des autres et d’en savoir plus sur les enjeux globaux. Ils ont aussi co-organisé la rencontre intitulée « Gouvernance équitable pour une meilleure sécurité humaine », ce qui leur a permis d’échanger avec des experts de la consolidation de la paix et de la bonne gouvernance, mais aussi d’élargir leur réseau.

Interns Leadership Programme

J

ane est l’une des participantes au Programme de leadership pour les stagiaires de Caux. Ce programme de cinq semaines est proposé chaque année deux fois à des jeunes âgés de 18 à 30 ans. L’objectif est de développer leurs compétences en leadership grâce à des ateliers et leur participation bénévole au bon fonctionnement du Caux Palace. Ce programme est une composante essentielle de l’approche de Caux de l’apprentissage par l’expérience. Jane a accepté de nous en dire un peu plus sur le programme et de partager son expérience : «Le stage se base sur trois éléments fondamentaux : les ateliers, les temps de travail et les temps de réflexion en silence. Cette année, nous sommes 30


Les bénévoles des Rencontres de Caux

jeunes venus des quatre coins du monde. Au début, nous parlions sans cesse de la vie dans nos pays respectifs. J’ai par exemple beaucoup appris sur la vie au Liban, j’ai même appris quelques rudiments d’arabe. Les ateliers nous incitent à l’introspection et à l’échange avec les autres. Grâce à cela, je me sens plus ouverte au monde, j’ai développé une profonde

compréhension des différences culturelles. Ma manière de percevoir les gens a radicalement changé. J’avais tendance à mettre les personnes dans des cases et ce stage m’a appris à m’ouvrir au monde et à donner une chance à chacun. Une chose est sûre, une fois mon stage terminé, je reviendrai à Caux en tant que bénévole ! »

Caux Artists Program Cinq jeunes artistes avaient été sélectionnés pour participer au Caux Artists Program qui cette année mettait à l’honneur la formation vocale : Lisa Yasko (Ukraine), Shakti Pherwani (Inde), Anna Bychkova (Ukraine), Mer Ayang (Soudan du Sud) et Alexandra Nabokina (Ukraine). Ils ont été encadrés par les professeurs Kathy Gardner (USA), Grace Carter (Royaume-Uni) ainsi que par Bev Appleton (USA), le directeur du programme.

F

orts d’une certaine expérience dans différents styles musicaux (opéra, comédie musicale, jazz, classique ou pop), ces artistes étaient désireux d’apprendre des techniques qui rendraient leur travail plus professionnel. Certains artistes ont même pu travailler sur leurs propres compositions. Ce programme de quatre semaines était composé de cours de chant (travail en binôme), de répétitions communes et de soirées-concerts. Chaque jour, du temps était consacré pour participer aux acti-

vités de la conférence, se forger un réseau parmi les autres participants, travailler seul, se reposer, ou assister au Montreux Jazz Festival qui se déroulait non loin du Caux Palace. Les artistes ont pu jouer lors du « Dialogue de Caux sur la terre et la sécurité » devant l’Assemblée Globale d’I&C ainsi que lors de quatre spectacles supplémentaires. Lisa a par exemple chanté « Don’t cry for me Argentina » en hommage à son pays d’origine, l’Ukraine, tandis que Mer a interprété ses propres compositions sur la lassitude du peuple soudanais face au conflit. Les professeurs ont également foulé les planches en interprétant la comédie musicale The Apple Tree, une parodie moderne truculente de l’histoire d’Adam et Ève. Les spectateurs ont été conquis par ces représentations, offrant une pause créative et dynamique aux participants et aux volontaires. Le prochain Caux Artists Program aura lieu en 2017.

Cet été, 217 bénévoles sont venus à Caux pour aider au fonctionnement du centre pendant les rencontres. Parmis eux, Bukiwe Maseko, originaire d’Afrique du Sud. Elle était responsable des tâches ménagères pour la sixième année. « Travailler à Caux est une réussite dans mon chemin de vie, parce que j’aime m’occuper des autres, et cela m’aide à mieux comprendre le monde, les différentes cultures et religions, et les normes politiques d’autres pays. Je ne suis pas ici pour l’argent mais pour l’épanouissement de mon esprit, de mon âme et de mon cœur. Chaque année, je m’enrichis. J’apprends des autres, en particulier des jeunes stagiaires et je me fais des amis pour la vie. Il y a également l’esprit de la maison. Cet endroit est tellement chaleureux et accueillant. Vous avez le temps d’écouter les autres et de développer un véritable esprit d’équipe. Surtout, vous vous sentez épanoui de prendre soin des autres. Car c’est ce dont le monde a besoin. Nous avons besoin de prendre soin les uns des autres. Et ici vous en avez l’opportunité. » Un grand merci à tous les b ­ énévoles !

CAUX RAPPORT 2015  23


Rencontres internationales de Caux 2016 Explorer le facteur humain dans le changement global 29 juin – 3 juillet Dialogue de Caux sur la terre et la sécurité 5 – 10 juillet Confiance et intégrité dans une économie mondialisée 12 – 17 juillet Gouvernance équitable pour une meilleure sécurité humaine 19 – 23 juillet Forum international des ­bâtisseurs de la paix – et – Pour relancer une Europe inachevée 26 juillet – 1 août Les enfants acteurs de changement de la société (CATS) 4 – 10 août Vivre la paix: 25 ans de Femmes Artisans de paix 12 – 17 août Graines d’inspiration

Initiatives et Changement (I&C) est un mouvement mondial d’individus de tous milieux et cultures qui s’engagent à transformer la société en changeant les comportements humains, en commençant par les leurs. CAUX – Initiatives et Changement: Centre de Rencontres Rue du Panorama 2 1824 Caux, Suisse P +41 (0)21 962 91 11 F +41 (0)21 962 93 55

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Révision: Stéphanie Buri, Elodie Malbois Traduction de l’anglais: Marie-Louise Bautista et Elisabeth Deprez Textes et Photos: Stéphanie Buri, Elodie Malbois, Céline Hintermeister, Sabrina Lüthi, Maïlys Fourcade, Andreina Ravani, les équipes des conférences, Cecilia Segar, Mbindyo Kimanthi, Undine Groeger Mise en page et impression: Brunner AG, Druck und Medien, 6010 Kriens, Switzerland, Novembre 2015


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