Artour 2013 / Métamorphoses

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La neuvième édition de la biennale ARTour est à nouveau l’occasion d’instaurer un dialogue entre l’art contemporain et le patrimoine de la région du Centre. Le concept a fait ses preuves : une quinzaine de sites touristiques et culturels majeurs ouvrent leurs portes à des artistes qui s’imprègnent des lieux et les réinventent en créant in situ des œuvres éphémères. La biennale nous prouve, une fois encore, que l’art contemporain peut trouver des espaces d’expression et s’épanouir en dehors des institutions spécialisées et des cercles d’initiés pour le plus grand bonheur d’un public très large. C’est pourquoi la Province de Hainaut, partenaire fidèle du Centre culturel régional du Centre, s’est associée tout naturellement au développement d’ARTour, en soutenant des projets et en favorisant les coproductions via sa Fédération du Tourisme et son Secteur des Arts plastiques. Excellentes Métamorphoses en région du Centre à toutes et tous ! Fabienne CAPOT Députée provinciale en charge du Tourisme et de la Culture

De l’autre côté du miroir, Alice, pour pouvoir suivre le lièvre de mars, doit se faufiler par une très petite porte. Elle n’y arrivera qu’au prix d’une transformation physique spectaculaire de tout son corps, en gobant un champignon (hallucinogène ?) qui la fera rapetisser... Plus tard, mise en joue par la cruelle reine de cœur, elle se sauvera en avalant un autre champi, qui cette fois la fera grandir... Dans ce Pays des merveilles, terriblement dépaysant pour une jeune fille qui s’ennuie, Alice se retrouve en proie à une véritable crise d’identité, en raison des métamorphoses physiques qu’elle subit, bien sûr, mais aussi à cause de la perte du savoir auquel elle voudrait tant se référer pour tenter de comprendre et de rationaliser le monde nouveau et étrange qui l’entoure. Alice est confrontée à un univers de différences, en tout, absurdes selon les critères d’une Angleterre victorienne strictement codifiée, mais somme toute ni moins ni plus logiques... Ce voyage onirique est, pour la jeune fille presque sage, initiatique, bien sûr. Parce qu’il lui enseigne que le contraire de tout vaut bien autant que lui. Parce qu’il l’emmène dans un univers complètement improbable, où l’impossible devient pourtant possible. Parce qu’il lui montre que l’autre a autant de valeur qu’elle. Au lecteur, il rappelle que le présent n’est jamais qu’un des résultats possibles d’un grand concours d’aléas...

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On peut interpréter le Pays des merveilles de plusieurs façons. On peut le considérer comme un monde surréaliste, coloré et ingénu. À l’inverse, on peut y voir un endroit cauchemardesque qui a piégé Alice, où la logique a été abandonnée au profit de la folie, un monde peuplé de personnages ambigus et inquiétants, hybrides humains, animaux, végétaux : la différence fait peur, tout comme le changement. Nous sommes le produit d’une longue série de transformations. Biologiques, sociales, culturelles. Darwin a expliqué la partie génétique des imperceptibles et pourtant innombrables métamorphoses du vivant. Les philosophes, les historiens, les psychanalystes avancent quantité d’hypothèses pour tenter de cerner nos évolutions morales, politiques, sociétales. Cette neuvième biennale ne sort pas de son domaine, même si elle louche sur quelques planches anatomiques, fouille dans de vieux albums de photos, s’aventure dans la sphère de la robotique... ARTour pose la question de la métamorphose, des métamorphoses, aux artistes d’aujourd’hui. Et offre au public le choix de tous les possibles. Danièle Staquet, présidente Didier Caille, directeur du Centre culturel régional du Centre



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1 Brigitte Desnault. Salle des Dominicains à Braine-le-Comte / 2 Samuel Coisne. Salle des Dominicains à Braine-Le-Comte / 3 Audrey Finet. Musée Gallo-Romain à La Louvière / 4 Lieven Standaert. Musée Ianchelevici à La Louvière

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5 Pierre Larauza. 8,95M. Ascenseur funiculaire de Strépy-Thieu / 6 Panamarenko. Place Communale à La Louvière / 7 Frank Gryffroy. Luc Schuiten. Musée Ianchelevici à La Louvière / 8 Thomas Laureyssens. A la surface. Terril Albert 1er. à à Houdeng-?

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9 Chemin faisant. Centre de la Gravure à La Louvière / 10 Frederik Heyman. Centre de l’Eau à Seneffe / 11 Bean Finneran. Musée Royal de Mariemont

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12 Détours et autour de Pol Bury. Centre Daily-Bul & C° à La Louvière / 13 Vitta Drappa. Café Le Combattant à Morlanwelz / 14 Edurne Rubio. Au Carrefour. Mariemont / 15 Pélerivage. D’une rive, l’autre. Collégiale Saint-Vincent à Soignies

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16 Ephameron. Péniche Scaldis / 17 Laurence Moyens. Château Gilson à La Louvière / 18 Manon Clouzeau. Château Gilson à La Louvière / 19 Jérôme Considérant. Château fort à Ecaussinnes-Lalaing

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La biennale ARTour - art contemporain et patrimoine, se déroule, un été sur deux, à La Louvière et dans la région du Centre depuis 1997. Durant deux mois, musées, sites et édifices remarquables ou espaces publics accueillent de nombreux créateurs. Du 23 juin au 25 août 2013, la neuvième biennale ARTour propose à nouveau un large espace de diffusion et de création à des artistes reconnus ou à découvrir. La biennale ARTour parie sur la mixité de la curiosité. Les expositions, installations et créations originales proposées en différents sites offrent aux amateurs éclairés d’art, aux promeneurs, aux amoureux d’architecture, l’occasion de découvrir la diversité des paysages, des monuments, du patrimoine de la région du Centre. A la source du projet, un groupe de travail détermine une thématique, en relation avec une caractéristique du territoire, qui oriente le choix des artistes sollicités. Chaque proposition, exposition, installation, création originale, tente d’entrer en résonance avec la spécificité des espaces dans lesquels elle s’intègre. En 2013, ARTour s’est choisi pour thème les Métamorphoses, les transformations d’un élément ou d’un être en un élément ou un être différent. Une

option inspirée par les collections du Musée International du Carnaval et du Masque de Binche inscrit cette année dans le parcours de la biennale. Objet exceptionnel de métamorphose, le masque appartient au domaine du paraître, il montre plus qu’il ne dissimule. En transformant son image, l’homme masqué devient l’autre, l’animal, le dieu, la mort ou la fête. Dans un registre proche ou complémentaire, le corps habillé se modifie, couvert de dentelles ou de peaux de bêtes ; le travestissement révèle les possibles de l’apparence, l’ambiguïté de l’être, il forme - ou déforme - l’identité. Des tentatives d’explication du monde, des légendes grecques aux mondes digitaux, des innombrables transformations des dieux de la mythologie aux avatars numériques, le thème des métamorphoses traverse les époques et les civilisations. Métamorphose initiatique, psychologique, physique, de l’œuf à l’imago, de l’homme Samsa au cafard, du végétal au plastique, et cetera. L’ampleur du sujet commande de limiter les points de vue, les approches, à quelques aspects. Masques ou accoutrements, allusions mythologiques, allégories, formes en devenir ou figures hybrides composent les différentes expositions dont le fil rouge évoque la transformation ou les étapes de la modification d’un état, les phases d’un devenir, avec un accent particulier mis sur le rapport entre la figure humaine et le monde animal.

La mythologie grecque et son foisonnement d’êtres fabuleux inspirent les artistes depuis des siècles. Aujourd’hui encore, même si les dieux ont perdu, au fil du temps, quelques plumes, crins ou écailles, justement récupérés par des créateurs contemporains pour inventer de nouvelles figures, de nouvelles formes ! Si nous savons depuis peu, avec certitude, que les sirènes n’existent pas, ni les zombies d’ailleurs (voir le communiqué émis le 4 juillet 2012 par le National Ocean Service, agence du Gouvernement des Etats-Unis chargée des réponses aux changements climatiques et aux risques naturels), le monde digital se peuple, pourtant, d’humanoïdes plus réalistes que nature, mutants parés de griffes ou d’ailes… En attente d’évoluer dans un environnement fusionnant codes génétique et digital ? Prenant racine dans la mythologie et la religion, l’imagerie des métamorphoses se développe à l’envi dans les contes surnaturels, les récits merveilleux, la science-fiction, le cinéma fantastique. Du loup au rocher, du crapaud au prince, de l’homme à l’âne, du clone au cyborg, de la belle à la bête à l’homme ou inversement; les transformations se combinent à l’infini, tous mouvements, toutes formes qui tendent vers un improbable possible. Eric Claus, responsable des expositions au Centre culturel régional du Centre coordinateur de la biennale ARTour

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Hybridation

«Mon esprit me porte à chanter les formes changées en corps nouveaux.» Ovide Les Métamorphoses.

Musée Ianchelevici

place communale 21 / 7100 La Louvière + 32 (0) 64 28 25 30 / www.ianchelevici.be ----------------------------------

Le musée Ianchelevici occupe depuis 1987 le bâtiment de l’ancien Palais de Justice de La Louvière. Construit au début du XXe siècle dans un style néo-classique, ce bâtiment est, avec l’Hôtel de Ville et le Théâtre, l’édifice le plus important de la place Communale. Sa façade présente une alternance de travées dont l’une s’ouvre sur un porche d’entrée. Son parement en briques rouges de Lobbes contraste avec le petit granit de Soignies réservé aux ornements qui délimitent les travées: pilastres aux extrémités, colonnes centrales supportant l’entablement et le fronton, soubassement à bossages et bandeau médian inspirés par l’architecture classique. La justice a été rendue dans le lieu jusqu’en 1977. Lorsqu’en 1983, l’artiste d’origine roumaine Idel Ianchelevici (1909-1994) a émis le souhait de créer à La Louvière une fondation pour promouvoir son œuvre, les autorités communales ont décidé de transformer le bâtiment en musée, de nombreux aménagements y ont été entrepris. Depuis, ce musée communal poursuit une double vocation. Il produit régulièrement des expositions temporaires centrées sur l’a rt contemporain et présente en permanence une soixantaine de sculptures et une dizaine de dessins de Ianchelevici issus d’un fonds de 2200 pièces conservées dans le bâtiment.

Gaetano K. Bodanza Devils’ROCK, sculpture en fibre de verre, taille humaine. Courtesy l’artiste et Galerie moretti&moretti, Paris.

Cette exposition aborde la notion de métamorphose par le prisme du clonage, de la mutation et de l’hybridation des corps à travers le travail de plusieurs artistes belges et étrangers : Gaetano K. Bodanza (I), Berlinde de Bruyckère (B), Oleg Dou (RUS), Jan Fabre (B), Sofi van Saltbommel (B). Loin du goût pour le merveilleux qu’engendre la métamorphose dans la mythologie (Armelle Blary, Jan Fabre, Sofi van Saltbommel), l’idée de mutation génétique obsède nos sociétés contemporaines. Elle est devenue un désir et parfois un pouvoir humain, à la fois fascinant et effrayant, avec ses perspectives vertigineuses et ses dérives possibles… Échappatoire au mal-être (Berlinde de Bruyckère), accès au Moi idéal, peur de l’altérité, la transformation psychique ou corporelle radicale offrirait la possibilité de muer l’être ou de le dupliquer (Gaetano K. Bodanza). Plusieurs médiums sont convoqués pour parcourir la thématique : traitement d’images numériques, morphing, céramiques, sculptures, installations. 13


Armelle Blary

Née en 1969. Vit et travaille à Reims. www.armelleblary.com

Le Bréchet (2012) est considéré dans la tradition populaire comme l’os des vœux : en forme de V, il est ordinairement confié, après découpage de la volaille dorée au four, à deux enfants qui le rompent en essayant d’en remporter le plus gros morceau. [...]Chacun formule intérieurement son souhait le plus cher tandis que le plus chanceux, victorieux du bréchet, est soudain chéri par la Fortune : son vœu, assurément, sera exaucé… Ici, l’os est hypertrophié. Sa taille exagérée invite à une réflexion sur le principe même de mutation. A quel poulet génétiquement modifié pourrait appartenir cet os ? On entre aussi dans l’espace du mythe, du conte. Ce jeu d’échelle touche aux superstitions et aux croyances propres à l’enfance. Aux dimensions héroïques de l’os répondent la foi sans limite de l’enfant et la densité merveilleuse de son souhait. D’après Armelle Blary

L’artiste développe depuis une dizaine d’années un travail plastique inspiré des principes de métamorphose et d’hybridation. Elle utilise régulièrement le corps humain et l’anatomie qu’elle réinvente dans de perpétuels croisements avec l’objet, l’animal ou le végétal. Ses réalisations nourries de références mythologiques et littéraires donnent à voir une poétique de l’entre-deux et du devenir. Les liens d’Armelle Blary avec Les Métamorphoses d’Ovide remontent à ses études de lettres à l’université. Deux mémoires rédigés sur le mythe de Pygmalion et sur la pétrification lui ont fait comprendre les puissants mécanismes de la métaphore, figure de style intimement liée au principe de métamorphose. La poésie des Métamorphoses fait depuis partie de son patrimoine poétique. Elle est une source d’inspiration et de dialogue inépuisable qui permet d’approcher de façon singulière les problématiques de notre monde. Les pièces sélectionnées évoquent de manière directe le processus physique des métamorphoses ou de façon plus implicite l’imaginaire qu’elles suscitent. Daphné (2005) est inspirée du mythe raconté par Ovide. Matérialisée dans une toile à peindre et cousue de fil rouge, Daphné se ramifie. Ses appendices végétaux sont traités comme de la chair. Ses membres mués en une multitude de branches envahissent l’espace autour d’elle, mais son torse est encore bien celui d’une femme. [...]Toile crémeuse bordée de rouge, chair, tissus : la créature draine avec elle la question de l’incarnation. La chair, suturée comme elle l’est, appelle invariablement la dualité. La peau hérissée assemble endroit et envers, bousculant les frontières qui séparent contenant et contenu. C’est la question de l’identité du corps bouleversé dans ses limites qui est évoquée dans cet instantané. Robe de Nuit (2009) fait partie d’un ensemble de sculptures et installations regroupées sous le titre J’attendrai. Inspirées par le couple Ulysse/ Pénélope, les pièces évoquant le phénomène du désir dans la pluralité de ses faisceaux : sentiment amoureux, séduction, fidélité/infidélité, attente, foi, absence, abandon…). La Robe de Nuit est une image de l’altérité. Elle convoque l’ombre et ses possibles : ombre du sommeil où la psyché vagabonde hors de toute maîtrise, ombre du sentiment amoureux où le cœur hésite entre attraction et répulsion. C’est l’inquiétante étrangeté puisée dans le noyau de l’intime où se frottent les pulsions contradictoires qui habitent l’humain.

Berlinde De Bruyckere

Née en 1964 à Gand, où elle vit et travaille.

Figure majeure de l’art contemporain flamand, Berlinde De Bruyckere élabore une œuvre troublante dont la fragilité, la solitude, la souffrance humaine mais aussi, a contrario, la force et le désir, sont les fils conducteurs. Elle façonne dans la cire des corps humains et d’animaux torturés, mutilés, parce que la souffrance est chez elle motif d’élévation. Souvent inspirée par l’idée de métamorphose, l’artiste fige l’instant où l’homme devient animal. Ses lectures des Métamorphoses d’Ovide lui ont permis de revisiter plus d’une fois la légende du chasseur Actéon transformé en cerf par Artemis. La danse contemporaine, en la personne du danseur Romeu Runa, lui a elle aussi permis d’imaginer une étrange symbiose entre l’homme et l’animal. La métamorphose me donne de l’espoir. Celui qu’après ma mort, il y aura quelque chose qui renaîtra, une nouvelle étape dans le cycle de la vie. [...]1

Armelle Blary Daphné 2005, Coton, ouate, fil 130x80x60 cm. Mutations polymorphiques et mythologiques. Entre-deux insaisissable où se télescopent, contre toute logique, mouvement et suspens, figuration et défiguration, même et autre.

Romeu « my deer » est le titre générique de plusieurs travaux inspirés par la figure du cerf. En 2010, l’artiste a demandé un cerf à son père, qui est chasseur et boucher, pour le mouler en cire. La sculpture présente un animal sans tête, le côté entaillé par une plaie béante, gisant face au spectateur. La référence au motif du Christ en Douleurs est implicite. Le cerf éviscéré étend aux animaux une compassion empreinte de religiosité. 1 Guy Duplat, Notre Doge à Venise, La Libre Belgique, 23/03/2013 http://www.lalibre.be/culture/artsvisuels/article/805207/notre-doge-a-venise.html

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Oleg Dou se situe à la frontière entre photographie et image numérique. Le plasticien aborde la notion de mutation et d’hybridation a travers des portraits ultra aseptisés, irréels et hors du temps, ce que l’artiste appelle « post humans » (l’après-humains). L’ensemble du travail de cet iconoclaste russe, l’un des plus en vogue de sa génération, repose sur la question de l’identité. Il photographie des visages puis efface les caractéristiques de l’individu. Il ne garde que les yeux et les lèvres, effaçant cils, sourcils et tout autre signe distinctif. Le visage humain devient l’objet d’investigations minutieuses et de transformations chirurgicales d’une extrême précision. Tout ce qui pourrait rappeler la chair est effacé, gommé, lissé. La transparence de la peau et la déshumanisation des traits font de ces portraits des masques saisissants et dérangeants. Partant de clichés en très haute résolution auxquels il entremêle de la 3D, pour des détails tels que les yeux, celui qui a débuté comme designer de sites internet se plait à brouiller les pistes grâce à un logiciel de traitement d’images. Cubs, impression digitale montée sous diasec, édition de neuf pièces. Ces images sont inspirées par l’esthétique et l’ambiance de portraits funéraires d’enfants tels qu’étrangement en vogue au XIXe siècle. Ces portraits fantaisistes savamment métamorphosés en lapin, en cerf ou en singe procurent un sentiment angoissant de mort. Le choix de transformer des enfants en créatures hybrides provient de douloureux souvenirs. Lors de chaque anniversaire, la maman d’Oleg l’obligeait à se déguiser en animal. «Je ne pouvais pas faire semblant d’être heureux face à la caméra, je détestais être photographié, et finalement l’image reflétait mon malaise et mon chagrin. C’est encore souvent le cas aujourd’hui. J’essaie de recréer l’expression de ce malaise dans mes portraits, seulement, à présent c’est moi qui la provoque. Aussi pour la série Cubs tous les costumes ont été réalisés sur mesure par mère, à partir de mes croquis, comme elle le faisait quand j’étais petit. »

Berlinde De Bruyckere, Romeu my deer IV, 2010. Collection privée, Belgique. Prêt de longue durée au S.M.A.K, Stedelijk Museum voor Actuele Kunst, Gent. Inspirée du nom du danseur portugais Romeu Runa pour lequel Berlinde De Bruyckere a imaginé une performance où trône un cerf statufié, la sculpture évoque la fragilité à travers l’animal mythique réputé pour sa force et sa sagesse.

Plusieurs travaux ont été déclinés sur ce thème, comme ici cette paire de bois de cerf minutieusement modelés dans de la cire mais simplement pendus à un crochet comme une paire d’attributs désuets à moins qu’on y décèle la souvenance de quelques quartiers de viande dans la boucherie paternelle où, petite, l’artiste évoluait entre corps suppliciés et chairs à vif. Cette ambiguïté entre souffrance et rédemption, clé de l’œuvre de la Gantoise, renvoie aussi au double sens du titre, My deer (fr. «mon cerf») qui peut aussi être entendu par homophonie comme «my dear» (fr. «mon chéri»).

Oleg Dou

Né en 1983 à Moscou où il vit et travaille. www.olegdou.com Oleg Dou, Goat,120130 x 89 cm. Collection privée. 15


Jan Fabre

Né en 1958 à Anvers, où il vit et travaille. www.janfabre.be

Gaetano K. Bodanza

Né en 1950 à Udine où il vit et travaille. L’artiste a vécu à Venise, Paris et New York où il fut réalisateur indépendant dans les années 1970. Cette expérience nourrit ses œuvres, critiques ironiques du cinéma hollywoodien mais aussi de la modernité avec ses standards de beauté superficielle. Gaetano K. Bodanza recrée des corps stéréotypés jouant sur les caractères iconographiques de la culture pop. Le sculpteur agit par exagération et hyperbole. La dimension extrême de son approche linguistique et conceptuelle fait de ses modèles des êtres surnaturels d’un hyperréalisme confondant. Le caractère génétique de sa figuration renvoie aux dérives du clonage et aux métamorphoses issues d’éprouvettes de laboratoires.

Donkey, Chapitre XI, 2010, 51,5x37x23 cm. Coll. Lynda et Guy Pieters. « Il ne s’agit pas vraiment d’autoportraits. J’utilise seulement mon visage comme matière première pour étudier toutes sortes de transformations. Ce qui m’intéresse, c’est la rencontre entre l’humain et l’animal.»

Artiste multimédia, dessinateur, plasticien, auteur, performeur, chorégraphe, metteur en scène… Son œuvre polymorphe est marquée par l’idée de transgression. Jan Fabre est depuis toujours passionné par l’idée de métamorphose. Lui-même s’est souvent mis en scène dans de nombreux autoportraits où il se transforme littéralement, adoptant des attitudes ou des attributs de personnages célèbres, de créatures ou d’animaux. Son positionnement entre l’art et la science lui fait inventer des animaux hybrides et étudier les similitudes entre les comportements de l’homme et de l’animal. Les œuvres présentées sont extraites de la série des Chapitres I-XVIII qui compte 18 autoportraits en bronze et en cire, des bustes au faciès humain grimaçant sur lesquels Jan Fabre a greffé divers éléments empruntés au règne animal : bois de cerf, cornes, oreilles d’âne, etc. La tête est chaque fois celle de l’artiste à des âges différents, de son adolescence à sa maturité.

Mamma-Mamma, sculpture en fibre de verre, h. 240 cm. Courtesy l’artiste et Galerie moretti&moretti, Paris. 16


Sofi van Saltbommel

Née en 1973 , vit et travaille à Bruxelles www.sofivansaltbommel.be

Diplômée en sculpture de l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles et en céramique de l’École des Arts d’Ixelles, Sofi Van Saltbommel est une artiste pluridisciplinaire. Elle travaille la terre en étroite connivence avec la matière. Elle associe son expérience du vide, du creux, de la matrice et du moulage aux objets modelés, trouvés ou usinés qu’elle transforme et réinterprète. Le rapport au corps s’exprime à travers la féminité qu’elle dévoile sans jamais l’exhiber. L’artiste intègre depuis toujours la zoomorphie. Ses personnages mi-humains, mi-animaux s’incarnent cette fois dans Les Poupées (2013, céramique, dim. variable) . Ces figurines pour petites filles modèles prennent ici des allures de gorgones. Entre fascination et répulsion, elles sont à la fois poupées vaudou vouées au culte des ancêtres, déesses-mères issues des entrailles de la terre, chimères mythologiques, cariatides ou créatures hybrides, que l’on imagine fort bien issues des amours entre quelques êtres cornus. Si la poupée évoque le monde de l’enfance, l’attirance instinctive et universelle qu’elle suscite révèle aussi l’ambivalence de nos pulsions. Leurs moulages, largement sexués, traduisent l’émotion du corps en transformation. Un lent processus de mutation s’empare d’elles. Pourvues de cornes, de couronnes, de tentacules ou de membres atrophiés, elles se prêtent au mécanisme de la métamorphose. Ces corps tronqués deviennent de nouveaux avatars dont les attributs revêtent de multiples significations. La disposition de chaque poupée sur des coussins moelleux souligne la préciosité de l’objet de même qu’elle joue sur les contrastes entre la matité du tissu et l’émail des figurines.

Sofi van Saltbommel, Poupée, 2013, céramique, dimension variable. Poupée-tentacule inspirée par la légende de La Méduse que la déesse Athéna aurait puni en changeant sa magnifique chevelure en de multiples serpents.

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« Métamorchoses »

Vers blancs, vers luisants, vers libres. Lieu sombre et humide, verre brillant, miroir de la lumière du soleil. A l’abri des mots et des mots à l’abri, mets

Centre Daily-Bul & Co rue de la Loi 14 / 7100 La Louvière + 32 (0) 64 22 46 99 / www.dailybulandco.be ----------------------------------

ta morphose aux appâts, aux appâts au plus haut des lieux. Le Gregor Sampsa et la belle Oterro ne finiront qu’en

Le Centre Daily-Bul & Co est logé dans une maison de maître datée de 1894, laquelle compte trois étages et possède un jardin dominé par un ginkgo biloba centenaire (arbre remarquable recensé par la Région wallonne). Le bâtiment a été acquis par la Ville de La Louvière en 1979, pour accueillir notamment le service des Finances. Alors qu’il avait été question de sa mise en vente, le bâtiment s’est vu affecté en 2009 à ce nouveau centre d’archives, une fois la décision prise par la ministre de la Culture de conserver la mémoire du Daily-Bul là où a pris corps la pensée Bul, à savoir La Louvière, avec pour mission initiale de conserver et valoriser les archives d’André Balthazar, cofondateur du Daily-Bul.

COLLECTIF ARCOPORI Bernard Josse Alexandre Lavallée Vincent Taforeau

AB R I S AB R I AB R AB A

chrysalides ou Dryades au feu de bois... Fumées, poussières et poudre aux yeux. Fabulosa des motamorphoses, en un certain sens le bien est monotone. Ovide meurt à Tomes.

Le collectif Arcopori rassemble trois graphistes enseignant à l’Académie des BeauxArts de Tournai : Bernard Josse, Alexandre Lavallée et Vincent Taforeau. Il propose un regard détaché sur une certaine création contemporaine, sorte de plaine de jeu où s’entrechoquent les images, les formes et le texte. 18


De la plastique à la plasticité, que de colombins où l’on bine. De la coulée vulcanique,

Les Métaphores sont des «bosses» que l’on se fait en se cognant aux parois de cette image fallacieuse de la langue.

Wittgenstein

dérisoire du cyclope entre-

Mallarmé, Proses diverses, réponses à des enquêtes, sur l’évolution littéraire.

tenu par la chaleur, sculptures où le plasticien et l’industriel laissent échapper la valeur, de ces restes (Cérestes). Onctuosités figées, plastries arrêtées, saisie de l’arrêt sur image, un élan surgelé au « return »

(...) Si on est arrivé au vers actuel, c’est surtout qu’on est las du ver officiel (...) Où est l’inspiration, où est l’imprévu, et quelle fatigue (...) .

Cloporte et porte close. «Un cloporte doit être ouvert ou fermé.»

Les Métamorchoses.

Il n’y a qu’un monde réel, et une seule pensée langage qui est son miroir.

Aldey Morisun

polaire, gelateria clef sur porte au risque, de s’étonner de la richesse formelle de ces fragments grotesques, mis au jour de notre regard « poly », d’étendues organicoglassico-modestes. Pouvoir des certitudes d’avoir affaire au jeu des combinaisons, matiéristes et maniéristes de nos arts et du hasard.

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«Tous les hommes, disait celui-ci, ont eu l’âge de Chérubin : c’est l’époque où, faute de Dryades, on embrasse sans dégoût le tronc des chênes.» Baudelaire, Le Spleen de Paris Dryades / Nymphes des forêts vivant sous l’écorce des chênes.

Dans le jardin classé de la maison du Centre Daily-Bul & C° se trouve un abri souterrain en métal datant de la Seconde Guerre mondiale. L’intervention d’ARCOPORI prend appui sur ce patrimoine anecdotique pour faire le rapport entre deux notions de conservation : Conservation physique et Conservation immatérielle (archives littéraires du Centre Daily-Bul & C°). Au passé du patrimoine, le regard vers l’avenir de la langue et des lettres, des mots mis en culture sous terreau. Sémantique. Semer, mettre en terre, mettre en sens, vrai semblant à faux semblant. Neuf cents armatures de fer à béton cintrées et formant une chrysalide de 9 mètres de long dans laquelle se trouvent des petites installations en rapport avec le livre et l’écrit. Une seconde installation va prendre place dans l’abri en métal situé au fond du jardin. L’ensemble de l’exposition sera ponctué d’aphorismes et petits textes rédigés pour l’occasion.


Métamorphose incomplète Outlandish, plateforme ouverte aux photographes (www.outlandish-photo.be), présente une exposition qui réunit quatre générations d’artistes qui traitent dans des séries d’images le sujet de la modification de l’apparence de l’homme et de son environnement. Dans les séries proposées, réalité et fiction se Maison du Tourisme du Parc des Canaux et Châteaux place Jules Mansart 21 - 7100 La Louvière www.parcdescanauxetchateaux.be

---------------------------------La première Maison du peuple de La Louvière a existé dès 1889. Propriété de la famille Pourbaix, la maison est achetée en 1889 par la coopérative du Progrès et transformée en Maison du Peuple et pharmacie. A l’arrière, une salle des fêtes est construite, permettant non seulement les réunions politiques mais aussi des représentations théâtrales, des concerts, etc. L’état de vétusté de la Maison du Peuple incite, en 1927, Le Progrès à construire un nouveau bâtiment. Le Palais du Peuple est inauguré le 19 août 1929. La vocation du bâtiment est avant tout politique. La grande salle accueille, au moment des grèves comme à l’occasion des échéances électorales, des assemblées nombreuses et d’une grande intensité. Par la suite, l’a.s.b.l. La Rose au Poing assure la gestion de la Maison du Peuple jusqu’en 1993, puis la met en vente. Le bâtiment passe entre les mains d’un particulier, puis de la Générale de Banque, avant d’être acquis par la Ville de La Louvière grâce à la politique fédérale des grandes villes. A partir de 2003, cette dernière procède à d’importants travaux qui remodèlent complètement l’intérieur du bâtiment, qui accueille aujourd’hui la Maison du Tourisme et la Maison des Associations. Extrait de « Itinéraire de découverte des lieux de mémoires ouvrière » - Jacques Liébin, Michel Host – USC La Louvière.

confrontent dans différentes approches du thème de la métamorphose. A travers ces portraits, des questions philosophiques se posent : parcours de vie tracé et

«IT» Carrying the inferno. Performance,1995.

imprévus, résignation et protestation, activité et passivité, etc. Ria Pacquée montre un travail réalisé dans les années ‘90. Il s’agit d’enregistrements de performances ou d’actions dans lesquelles elle prend le rôle de It, auquel elle s’identifie; ni homme ni femme, un individu inadapté. Dans l’espace public It commet des actes qui sont à la fois incompréhensibles et absurdes. A travers cette métamorphose, elle remet en question notre relation à l’environnement, les codes de nos structures sociales occidentales. Sommes-nous toujours en interaction avec notre environnement ; ou sommes-nous enfermés dans une bulle ? Une question qui après 20 ans semble être toujours d’actualité.

Ria Pacquée

Vit et travaille à Anvers www.riapacquee.be The day «IT» took an initiative. A story of unsuccessfull experience. Performance, 1993. 20


Renato Abreux

Né en 1983 au Brésil, vit et travaille à São Paulo www.renatoabreu.com

Revelation.

Grâce au travail de Renato Abreux on peut se demander si l’aspect extérieur, par définition, reflète une image exacte. Peut-on avoir foi dans la façon dont nous lisons et interprétons les choses? 21


HRP-2 #1 [Kawada], Promet Developed by AIST, Tochigi, Japan, 2010. 22


Charlotte Lybeer

Vincent Fournier

Née en 1981 à Roeselare www.charlottelybeer.be

Né en 1970 à Ouagadougou, vit à Paris www.vincentfournier.co.uk

Bondje.

Bunny.

Nous entrons vraiment dans un monde fantastique avec les œuvres de Vincent Fournier. «Histoire naturelle» présente les planches encyclopédiques d’un futur proche, entre mémoire et projection, où différentes espèces vivantes sont modifiées pour répondre aux évolutions de nouveaux environnements. La série «The Man Machine» montre comment la machine est de plus en plus en cours de profilage humain. Charlotte Lybeer pose un autre regard sur la tendance « capsulaire » actuelle. Dans son travail, l’homme et son environnement se métamorphosent pour se libérer de la réalité. Les personnages d’un grand jeu de rôle cherchent refuge dans un monde fantastique, où des villes métamorphosées ont adopté une allure carnavalesque : des parcs à thème hollandais en Chine et en Turquie. Et des gens en costumes étranges évoluent sous l’œil critique de Lybeer... 23

Pink.


Le loup-garou est un homme comme tout le monde. Il peut faire de la balançoire, des cumulets, jouer au football, tomber à la renverse et en rire. Loup-garou ou homme-loup ?

Centre culturel régional du Centre Espace à voir place Jules Mansart 17-18 - 7100 La Louvière +32 (0) 64 21 51 21 - www.ccrc.be ---------------------------------L’édifice qui abrite les bureaux du Centre culturel et la salle Le Palace fait partie, comme beaucoup de constructions de la place Jules Mansart, des bâtiments ayant existé antérieurement à La Louvière en tant que commune distincte. En 1865, on y trouve le café de l’Union appelé aussi Les Trois Suisses, local de l’opposition catholique, adversaire politique du libéral Amand Mairaux. Plusieurs commerces occuperont conjointement le bâtiment durant plusieurs années (peinture, bijouterie, etc.) Dans la partie partie droite, vers 1912, s’installe « L’Impérial cinéma ». En 1919, le nom se change en « Palace ». Par après, le bâtiment sera entièrement dédié aux spectacles et à la boisson (dancing familial, cabaret aristique, bals, soupers d’associations...) Fin des années 60, le cinéma périclite. La salle se loue de moins en moins, elle a besoin d’une restauration. Une fois celle-ci accomplie, l’endroit abritera désormais une salle où régulièrement se déroulent des spectacles intimistes, conférences ou autres débats : il s’agit de la Maison de la culture Jean-Pierre Hubert, devenue Centre culturel régional du Centre.

Alors que les derniers loups ont quitté nos contrées il y a plus d’un siècle, nos contemporains ne cessent de réinventer l’animal en une vision extrêmement riche et plurielle. Au cœur de cet imaginaire, la merveilleuse fabrique d’images que nous conservons en nous, c’est un loup nouveau qui semble émerger, en lien étroit avec les préoccupations et la sensibilité écologiques de notre temps. Paradoxalement, c’est également une représentation ancestrale de l’animal qui est reproduite, un loup qui paraît dès lors sous un jour ô combien sombre. Si l’image du loup est extrêmement contrastée, fruit de l’histoire commune de l’homme et de l’animal, notre vision du loup-garou est empreinte de crainte et d’effroi. Le loup-garou, ou lycanthrope, désigne un être humain ayant la faculté de se métamorphoser en loup, partiellement ou totalement, à moins de conserver l’apparence humaine en se contentant de revêtir la peau de l’animal. C’est au Moyen Age que le loup-garou, par sa double nature, humaine et animale, est perçu par la société comme manipulé par le diable. Aux XVIe et XVIIe siècles, le loup-garou est plus qu’un personnage de légende. Il représente une réalité suffisamment puissante pour que les autorités le soupçonnent, l’arrêtent et le jugent en tant que suppôt du démon. Il existe trois grandes catégories de lycanthropes : le sorcier qui, en vertu de ses pouvoirs magiques, possède la faculté d’opérer la métamorphose ; le monstre involontaire, bien que coupable, prisonnier du diable avec qui il a un jour pactisé ; la victime d’un châtiment infligé pour une faute extrêmement grave, comme le fait de ne pas avoir dénoncé un loup-garou de son entourage. Le loup-garou se retrouve partout en Wallonie. Leu-warou au Pays de Liège, léwérou en Ardennes ou encore leup-wareu dans le Borinage, on le rencontre de nos jours dans le Pays des Collines, où l’art et les traditions populaires ne cessent de le réinventer. A deux pas de chez nous, sur les places de Braine-le-Comte, Steenkerque ou La Louvière, l’homme-loup se fond dans la population, en costume cravate ou sur le point de prendre le train. Ces figures de bronze sont l’œuvre de Claire Kirkpatrick, artiste installée entre le Bois de la Houssière et la Forêt domaniale de Silly, des lieux fréquentés par les leûs il n’y a pas si longtemps encore…

Berger et son troupeau, peinture à l’huile retouchée à l’encre .120 cm / 60 cm. 2012. 24

Loups à l’école , affiche retouchée à l’encre . 83 cm / 63 cm. 2012.

Selon la typologie classiquement admise, les créatures de Claire Kirkpatrick ne sont pas à proprement parler des loups-garous, des hommes à qui notre imaginaire a fait subir une métamorphose aussi spectaculaire que redoutée. Ses loups de terre, de bronze ou peints à la couleur noire ne se différencient pas de l’espèce humaine, mais se confondent avec elle. Tour à tour vertueux, tendres ou courageux, ils peuvent aussi révéler les instincts les plus abjects. Un loup ambivalent, mystérieux et imprévisible, à l’image de l’homme. Dans le cadre de la Biennale ARTour, l’artiste revisite une iconographie jusque-là bien sage : les affiches et tableaux qui, jadis, ornaient les classes de nos écoles primaires et les salons de nos grands-mères. Sur les toiles réinvesties par le pinceau de Claire Kirkpatrick - à première vue d’innocentes scènes pastorales - le loup ne fait probablement que revêtir l’habit du berger. Car derrière la figure du Bon Pasteur, sensible au sort de la brebis égarée, il faut peut-être entrevoir celle, beaucoup moins bienveillante, du prédateur attiré par sa proie. A y regarder de plus près, les braves « petits loups » qui s’ébattent dans la cour de récréation sont-ils véritablement « à croquer » ? Jouant sans cesse avec nos codes et représentations, nos références culturelles ou simplement notre quotidien, l’artiste réinterprète également de façon impertinente et jubilatoire le conte du Petit Chaperon rouge, infect personnage dont l’homme-loup aurait mieux fait de se méfier. Au-delà d’un second degré salutaire, le travail de Claire Kirkpatrick pose des questions pertinentes car dérangeantes, interrogeant et ébranlant au passage nos certitudes les mieux ancrées. Car derrière le loup, c’est avant tout chacun de nous qu’elle peint sur le vif, avec notre part d’ombre et en pleine lumière. Avec l’homme-loup, le Bien n’a jamais été aussi proche du Mal ; nature et culture s’unissent pour le meilleur et, aussi, pour le pire... Benoît Goffin


Claire Kirkpatrick Née à Uccle en 1956, vit et travaille à Steenkerque

Loup degueulant des chaperons rouges, terre cuite, H 100, L 95 l 34 cm, 2013. 25


HÉLIO... gravures

Impressions de l’Atelier de gravure, Moutier (Suisse) L’héliogravure sous le signe de la métamorphose La métamorphose s’inscrit au cœur des phases complexes de transfert qui caractérisent l’héliogravure. A sa source, pas d’intervention directe de l’artiste sur une matrice - au contraire des autres procédés de gravure - mais une image photographique préexistante ou des éléments soumis à une lumière projetée sur du papier gélatiné photosensible. Ces éléments - comme dans un photogramme - sont placés au-dessus du papier gélatiné; leurs ombres formeront l’image lors de l’insolation (ill. 1).

Centre de la Gravure et de l’Image imprimée de la Fédération Wallonie-Bruxelles

rue des Amours 10 - 7100 La Louvière +32 (0) 64 27 87 27 - www.centredelagravure.be ---------------------------------Un musée vivant et mouvant créé en 1984, totalement rénové et agrandi en 2010. Le Centre de la Gravure est un lieu multiple de rencontre, de création et de recherche entièrement dédié à l’estampe contemporaine. Des expositions temporaires sont, entre autres, montées à partir de son étonnante collection de 11.000 æuvres de plus de 700 artistes belges et étrangers, témoins de cet art de la seconde moitié du XXe siècle à nos jours.

Un partenariat entre le Musée jurassien des Arts de Moutier, l’Atelier de gravure de Moutier et le Centre de la Gravure et de l’Image imprimée de La Louvière. Exposition organisée dans le cadre de l’accord de coopération entre la République et Canton du Jura et Wallonie-Bruxelles, avec le soutien de la République et Canton du Jura et de Wallonie-Bruxelles International.

Ainsi, la première phase de l’héliogravure est déjà dominée par le transfert - projection d’image ou d’ombre, générée par la lumière. Un second transfert suit, de la feuille gélatinée sur une plaque de métal grainée, comme dans l’aquatinte. Lors de l’acidulation, la plaque est mordue différemment selon les zones d’ombres et de lumière. Grâce à cette morsure dans laquelle l’encre va se loger, l’image héliogravée, sœur de la photographie, prend un relief inédit apprécié par les artistes pour sa présence picturale. De plus, les mélanges, les nuances subtiles de teintes, la variété des noirs et le velouté issu du grainage de la plaque métamorphosent l’image source, loin des échelles limitées du développement industriel en photographie.1

Œuvres de la métamorphose Si le processus de métamorphose est inhérent à l’héliogravure, certains artistes l’intègrent comme sujet. C’est ce que souligne une des sections de l’exposition HÉLIO…gravures, dont voici deux exemples. Avec sa série Jellyfisch (Méduse) (ill. 2), Pascal Danz joue sur la métaphore entre image et titre : son lustre de cristal personnifie une méduse. Transparence et tirage bleuté participent de cette évocation maritime. La métaphore génère l’ambiguïté. La beauté luxueuse du luminaire est contaminée par la toxicité de l’animal. L’artiste interroge ainsi l’ambivalence de la beauté. Plus loin, pour le spectateur francophone, un autre type de contamination pourrait surgir : celui de la figure mythologique de Méduse. Le luminaire se ferait l’écho de la chevelure - serpents de cette Gorgone, métamorphosée par Percée. Ses éclats de lumière évoqueraient son regard : dans la tradition littéraire «la figure de Méduse incarne ( ) l’ambivalence du regard féminin, qui attire et ensorcelle, séduit et condamne»2. Le lustre-méduse de Pascal Danz semble alors susurrer : Lustre - luxe - luxure 3

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Jacques Bélat, de la série Humanités & Cie, 2008 19 héliogravures, 19 x (56 x 38 cm). Edition «du goudron et des plumes»


ill. 1 Béatrice Gysin, de la série Sans titre, 2009 héliogravure, série de 9 estampes, 9 x (43.5 x 55 cm). 27


Markus Raetz a détourné le cliché-verre sur un mode pictural pour sa série Ombre (ill. 3, 4). Une suite énigmatique d’images diversifiées - paysages, balayements de pinceau ou nourriture - sans fil narratif évident. Pourtant un des paysages, soumis au jeu de la métamorphose, en fournit la clé : une vue maritime à travers deux entrées de grottes. La circularité étrange de ces entrées les transforme en instruments de la vision, orbites humaines ou jumelles de vue. Les modalités du regard, les méandres de la perception sont au cœur de la démarche de l’artiste. C’est ce que vient encore confirmer le mot «lu» qui apparaît également dans cette série. Ainsi le sujet d’Ombre n’est pas ce qui est figuré, mais le reflet de diverses dimensions de la perception du réel, éclairées par des références dans l’histoire de l’art et de la vision.4 Valentine Reymond, conservatrice du Musée jurassien des Arts, Moutier (CH) commissaire de l’exposition

1. Sur le procédé de l’héliogravure, voir: Atelier de gravure Moutier, Moutier, Musée jurassien des Arts / Atelier de gravure, 2013 (publication accompagnant l’exposition HÉLIO...gravures, La Louvière, Centre de la Gravure, 2013) 2. Laurence Roussillon-Constanty, Méduse au miroir : esthétique romantique de Dante Gabriel Rossetti, Grenoble, Ellug, 2008, p. 31. 3. Sur les œuvres récentes de Pascal Danz, voir http://pascaldanz.tumblr.com/: présentation par la Kusseneers Gallery, Anvers (The Solo Project, Bâle, 2012) (consultée le 18.4.2013). 4. Sur l’œuvre de Markus Raetz, voir : Rainer Michael Mason, A trois mains. Une partition libre, in: Markus Raetz: les estampes – die Druckgraphik – the Prints, 1957 – 1991, Genève, Cabinet des estampes, Berne, Kunstmuseum, Zurich, Galerie & Ed. Stähli, 1991; Bernhard Bürgi, « Gesichtskreise », in: Markus Raetz, Biennale di Venezia 1988 Svizzera, Zurich, Stähli, 1988, non pag.

ill. 2 Pascal Danz, Jellyfish, 2009

Jacques BÉLAT - Alexandre VOISARD - Romain CRELIER (artiste et maître-imprimeur à l’Atelier de gravure DE Moutier) Pascal DANZ - Charles–François DUPLAIN Béatrice GYSIN - Arno HASSLER (artiste et maître-imprimeur à l’Atelier de gravure de Moutier) - Katrin HOTZ - Cécile HUMMEL - Daniela KEISER - Wolfgang LAIB Max MATTER - Hiromi MIYAMOTO - Jean-René MOESCHLER Claudio MOSER - Markus RAETZ - Reto RIGASSI - Julia STEINER - Monika STUDER - Christoph VAN DEN BERG - Cécile WICK - Uwe WITTWER - Véronique ZUSSAU

héliogravure en 2 couleurs, série de 5 estampes, 5 x (55 x 76.5 cm).

ill. 3 Markus Raetz, de la série Ombre, 2007 héliogravure en 1 ou 2 couleurs, pointe sèche, chine collé, coffret de 17 estampes, 17 x (37.5 x 30 cm). 28


ill. 4 Markus Raetz, de la série Ombre, 2007 héliogravure en 1 ou 2 couleurs, pointe sèche, chine collé, coffret de 17 estampes, 17 x (37.5 x 30 cm).

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résidences secondaires

Fred Penelle

Né en 1973, vit et travaille à Bruxelles www.penelle.be

Château Gilson

rue de Bouvy 11 - 7100 La Louvière ----------------------------------

Au carrefour de la gravure et de l’installation, il y a une déviation vers le jardin des curiosités. C’est là que Frédéric Penelle nous attend, au tournant de son bestiaire polymorphe et de ses friandises militaires. Sa cruelle fantaisie court sur les murs, fait grincer les portes et la Nature elle-même se repent de ses anomalies. Pourtant on se perd avec plaisir dans cet univers ludique où l’espace est apprivoisé comme un terrain de jeu, un champ de bataille.

Construit en 1912, le château Gilson est une belle construction classique, simple et régulière, sans surcharge décorative. L’édifice porte le nom d’Augustin Gilson (1848-1921), qui a été bour-gmestre de La Louvière de 1891 à 1895.

En 1957, la Ville de La Louvière transforme la propriété en musée communal, qui accueillera une importante collection de peintures et de sculptures. Ensuite, le rez-dechaussée du bâtiment abritera successivement la Médiathèque, la Maison du Tourisme, les bureaux du PACO et finalement, les Ateliers la tête en l’air (centre d’expression et de créativité du Centre culturel régional du Centre) et un espace voué à l’art contemporain.

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31 réaction aux stimulis #12-6

2-6 #1 mulis

aux sti n réactio


LE buffet Sur un territoire en mutation

Gare de La Louvière centre Bd des Droits de l’Homme 7100 La Louvière ---------------------------------L’actuelle gare de La Louvière centre a été inaugurée en 1964. L’édifice réalisé d’après les plans de l’architecte Dubus, employé de la SNCB, reprend certains critères typiques de l’esprit Expo 58. Tout d’abord, sa façade principale se rythme de grandes baies vitrées séparées par des éléments massifs verticaux. A son niveau supérieur, celle-ci se tord tel un boomerang dont les lignes arquées s’imposent à la fin des années 50. La silhouette énergique de cet objet animera fréquemment l’architecture et le design de cette période marquée par l’optimiste de la sortie de guerre. De même, la diversité de son parement, béton lissé associé à la brique ou à la pierre, renvoie aux choix architecturaux de l’époque. Une fois dans le hall, nous voilà confrontés au passé glorieux de la cité. Une œuvre murale en grés émaillé surplombe l’entrée. Elle a fait l’objet d’une commande auprès d’Ernest Hossche, premier conseiller artistique de la faïencerie Boch. Cette céramique témoigne d’un temps accompli où les industries minières, la sidérurgie, l’agriculture battaient leur plein pour s’imposer comme les richesses du Hainaut.

La station de La Louvière centre occupe un site qui porte les ultimes marques d’une vie industrielle révolue. Aujourd’hui, siège d’un territoire en rénovation, elle voit disparaître les derniers vestiges qui emportent avec eux la mémoire du passé pour projeter la cité vers un futur urbanisé. Le boulevard des Droits de L’Homme qui longe la gare de La Louvière centre recouvre de son asphalte le ruissèlement d’une rivière qui a contribué au développement manufacturier du lieu. Au XIXe siècle, de nombreux charbonniers, préconisant le transport de leur minerai par voie fluviale dans un souci de rentabilité, réclamèrent que le tracé du Canal du Centre soit relié par plusieurs embranchements. En 1839, ces cours d’eau, alors accessibles, attireront le long de leurs berges bon nombre d’entreprises familiales comme la faïencerie Boch, les verreries Daubresse, les usines Boël, et bien d’autres… C’est grâce à ce déploiement industriel du hameau de Saint-Vaast qu’en 1869 la Ville de La Louvière verra le jour.

Un vivarium pour le passé

Ancien embranchement de La Louvière du canal du Centre. Vers 1900. Collection de l’Ecomusée du Bois-du-Luc.

Les temps se métamorphosent. Aujourd’hui, il n’y a plus d’eau, plus de fumée et d’hommes au labeur qui s’agitent dans ce quartier de La Louvière. Le buffet de la gare, lieu de détente où ils aimaient prendre un verre entre deux voyages, est vidé de son activité. Ce territoire est devenu un no man’s land à perte de vue d’où surgissent de nouvelles constructions qui promettent un possible renouveau. Les badauds n’y font plus que passer. Ils laissent le souvenir se perdre sous l’asphalte dans l’espoir, un jour, de pousser, face à l’étiolement, leur cri de soulagement.

Aurélien Dendoncker (Mouscron, 1981), jeune plasticien diplômé de l’Académie des Beaux-Arts de Tournai, propose au travers de son installation artistique de vivre une dernière fois l’effervescence de ce passé glorieux. Pour donner une nouvelle image au buffet, il s’est inspiré spontanément de ce vécu. Sur les parois et sur les vitres de la taverne, la faune et la flore oubliées de l’ancien embranchement du Canal du Centre grouillent, bien déterminées à réinvestir le site. Une manière de réveiller l’histoire et de lui permettre de reprendre le dessus, à une époque où l’industrie louviéroise s’estompe. Pour l’artiste, le recouvrement du cours d’eau est une forme métaphorique de cette disparition qu’il propose aujourd’hui de mettre à découvert. A présent, subsiste dans la salle une étrange sensation de voir remonter à la surface cette rivière avec tout son écosystème, sa vie industrielle, ses émanations et l’exhalation de ses hommes. Une nostalgie contemporaine de ce temps que nous a dépeint Ernest Hossche en 1964. Le travail d’Aurélien Dendoncker s’exécute dans la frénésie d’un artiste urbain. Bandes adhésives, peinture au pochoir relevée de dessins au crayon noir transforment l’espace public en un lieu domestique couvert d’une tapisserie luxuriante. Il faut s’en approcher, contempler par les ouvertures, pour voir l’espace basculer dans une atmosphère plus mélancolique. Le Buffet, espace vitré sur plusieurs de ses façades, se transforme en un vivarium à taille humaine dans lequel le plasticien s’adonne à la culture de ce passé en tentant d’y reconstituer son milieu naturel. Adèle Santocono Province de Hainaut - Hainaut Culture Tourisme, secteur des Arts plastiques Julien Maquet (dir.), La Louvière. Le patrimoine d’une métropole culturelle, Namur, Institut du Patrimoine Wallon, 2012. www.keramis.be

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Aurélien Dendoncker

Né à Mouscron en 1981, vit et travaille à Horrues www.aureliendendoncker.com

Projet pour la gare de La Louvière Centre.

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«Seconde, Papillon !»

Ecomusée du Bois-du-Luc

ce microcosme où se croisent quête de bien-être et contrôle social… Car face à la cité : le château directorial, poste de surveillance, matérialise les principes de ce paternalisme qui au Bois-du-Luc s’exprime sous des traits singuliers.

Le site minier du Bois-du-Luc est un témoignage exceptionnel de l’ère industrielle. Exceptionnel de par l’intégrité et l’authenticité de son héritage patrimonial, illustration éloquente de l’impact de l’industrialisation aux niveaux technique, paysager, architectural et social.

La préservation du patrimoine tant fonctionnel que social dans son intégrité (équipement et outillage encore maintenus) de toutes les strates socioprofessionnelles (du mineur au directeur) confère au site minier du Bois-du-Luc une place emblématique dans le terrain de l’archéologie industrielle et ce, à l’échelle internationale. Depuis 1983, le premier écomusée de Belgique occupe le site minier dans le but de sauvegarder et de valoriser le patrimoine industriel dans ses dimensions tangibles et intangibles. Aujourd’hui, il est possible de découvrir au fil d’une agréable balade les lieux de travail (bureaux, cour des ateliers et fosse SaintEmmanuel) ainsi que les lieux de vie : le village ouvrier et une maison au cœur de la cité, porte d’entrée dans le quotidien ouvrier.

Patrimoine mondial de l’Humanité rue Saint-Patrice 2b - 7110 La Louvière (HoudengAimeries) - 32 (0) 64 28 20 00 ----------------------------------

Le site minier appartient à l’histoire d’une société charbonnière qui se distingue par sa longévité. Née en 1685, elle ferme ses portes en 1973. C’est en 1846 que s’ouvre la fosse Saint-Emmanuel dans le lieu-dit du Bois-du-Luc. Celle-ci forme le noyau fondateur d’un complexe industriel et social remarquablement conservé. A la suite des grèves de 1893, les lieux de travail sont protégés par des portes à guillotine qui assurent une fermeture rapide et hermétique en cas de menaces de rébellion. En face des lieux de travail : un remarquable village ouvrier qui comprend une cité et un ensemble d’équipements sociaux, culturels, festifs et religieux bâtis de 1838 à 1923. Ainsi, l’ouvrier peut habiter, se nourrir (épicerie, boucherie…), se soigner (hôpital et hospice), prier (église Sainte-Barbe), s’instruire (écoles et bibliothèque), se divertir (salle des fêtes, parc et kiosque) dans l’enceinte de

Sylvie Pichrist

Née en 1970 à Binche, vit et travaille à Bruxelles www.sylviepichrist.com

Sylvie Pichrist pratique l’art de la performance. Par des moyens minutieusement choisis, elle crée des univers poétiques et des situations envoûtantes où le spectateur peut se laisser aller, comme dans un endroit familier. Toutefois, la beauté rassurante de l’environnement créé, et la simplicité de la situation jouée, font vite place à une tension sourde. Dans le trompe-l’oeil d’une mise en scène méticuleuse, Sylvie Pichrist s’engage physiquement dans des actions dont l’issue est incertaine. C’est sur le fil qu’elle se place, défiant l’équilibre et nous entrainant avec elle. L’onirisme joyeux se juxtapose au mauvais rêve et le spectateur retient son souffle en attendant une chute, toujours imminente, et toujours contenue. Une fois l’action passée, Sylvie Pichrist relie les débris et témoignages de ses performances, les réutilise et les magnifie, dans des mises en abymes qui explorent les tréfonds de la matrice dont ils sont issus. Son travail artistique rencontre et épouse donc parfaitement le thème de la biennale 2013. Sylvie Pichrist investit l’Ecomusée dans lequel elle nous donne à voir une nouvelle performance et confronte nos regards à ses déclinaisons. Dans cette interface entre les entrailles de la terre et l’air libre, entre le noir et la lumière, entre le charbon et la fumée, Sylvie Pichrist a choisi de rejouer la transformation de la chenille en papillon. Elle nous invite à vivre ce moment unique, ce moment fragile et incertain où tout se joue. Comme le cocon délaissé témoigne de la métamorphose qui y a eu lieu, Sylvie Pichrist laisse le spectateur face à une installation vidéo, reliquat tangible de la performance qu’elle a réalisée sur place. Par des jeux de miroirs, elle fait entrer le spectateur dans les strates de son univers, et piège son esprit dans les mailles d’un tulle, entre matière et vide, entre noir et lumière, entre captivité et liberté... Au pays des merveilles, par l’expérience simple et magique du papillon, le spectateur ressort transformé ! Frédéric ROLLAND frederic-rolland.net

Des fonds archivistiques exceptionnels (fonds des Charbonnages du Bois-du-Luc, de Ressaix, Baume & Marpent, Boch, Solvay, etc.) sauvegardés par l’Écomusée, permettent de sonder toutes les facettes de l’expérience industrielle de la Wallonie. Le site, sa mémoire et le patrimoine archivistique sont aussi des ressources précieuses pour éclairer le présent à la lumière de ce passé. Karima Haoudy Conservatrice de l’Ecomusée du Bois-du-Luc

Collaboration vidéo : Katia krylova (www.katiakrylova.com) Collaboration photo : Jonathan Steelandt (www.jonathans.be)

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Seconde Papillon ! captures d’écran. Vidéo 2013.

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OFFSPRING

BOBVAN

Né en 1952 à Ostende, vit et travaille à Bruxelles www.bobvan.net Explorateur d’un imaginaire balisé par les métaphores de la science et de la sciencefiction, Bob Vanderbob a.k.a Bobvan (Be) développe un univers sonore, visuel et conceptuel qu’il appelle Artificial Mythology, une «tentative de catalyse d’une mythologie dans le contexte de l’accélération technologique actuelle».

OFFSPRING

Dans le cadre de son projet Artificial Mythology, Bobvan nous invite à partager son univers de science-fiction poétique. En passant un immense portail métallique, nous pénétrons dans les entrailles d’une machinerie industrielle et cosmique. Des galaxies en rotation se reflètent dans l’eau d’un lac étrange où des bébés-cyborgs, progéniture artificielle, nous renvoient à nous-mêmes et à notre devenir. Au rythme du passage des bateaux dans l’ascenseur, des masques d’ancêtres surgissent du fond des âges. Présent, passé et futur se fondent en une expérience onirique et totale.

Ascenseur funiculaire de Strépy-Thieu rue Raymond Cordier 50 - 7070 Le Roeulx www.strepy-thieu.be ---------------------------------Situé à la limite territoriale entre La Louvière (Strépy-Bracquegnies) et Le Roeulx (Thieu), l’ascenseur doit sa dénomination à la contraction du nom des entités concernées : StrépyThieu. L’ouvrage appartient au Canal du Centre qui s’étend entre Mons et Seneffe, sur une longueur de 27kilomètres. Les travaux de modernisation du Canal du Centre font suite à une loi dite des 1.350 tonnes programmant la mise à grand gabarit des principales voies navigables du pays. Le nouvel ouvrage remplace deux écluses et quatre ascenseurs hydrauliques à 300 tonnes, il permet de franchir une dénivellation de 73 mètres. Au sein du réseau belge, le Canal du Centre et son ascenseur permettent de franchir la crête de partage entre les bassins de l’Escaut et de la Meuse. Il est un maillon important de la dorsale wallonne. Le Canal du Centre s’intègre dans les voies navigables d’intérêt européen en figurant sur l’axe transnational nord-sud, dans le delta industriel Escaut-Meuse-Rhin. Dans l’avenir, le transport par voie d’eau est appelé à jouer un rôle croissant, car il offre, en matière de mobilité, de nombreux avantages : amélioration de la sécurité, respect de l’environnement, allègement du trafic routier.

OFFSPRING (Progéniture) En biologie, la progéniture est le produit de la reproduction, un nouvel organisme produit par un ou plusieurs parents. La progéniture humaine est appelée enfant. Les enfants de sexe masculin sont des fils, ceux de sexe féminin des filles. Certains auteurs dans le domaine de la robotique et de la science-fiction évoquent un futur postbiologique où les robots sont considérés comme la progéniture artificielle de l’humanité, ou Enfants de l’esprit.

L’ascenseur de Strepy-Thieu est un miracle d’ingéniérie. Trait d’union, articulation, interface entre deux niveaux de canaux, il s’inscrit dans un paysage complètement transformé/conçu par l’homme, complètement artificiel. C’est ce paysage qui, à notre sens, confère au lieu toute sa dimension symbolique mais aussi prophétique, annonciatrice d’un avenir où tout ce qui subsiste du monde naturel est potentiellement destiné à faire partie d’un projet d’ingénierie (digues contre la montée des eaux, dômes pour protéger les villes des radiations, abeilles-robots pour assurer la pollinisation, projets de géoingénierie pour stabiliser ou mitiger le climat etc.), où l’Homme, seul pilote à bord du vaisseau Terre, devient responsable de tout (survie ou extinction des espèces, sauvegarde des écosystèmes) et où tout devient «projet», tout devient intentionnel : la fécondité de nos esprits garante de la fécondité de la biosphère, l’ingéniosité humaine comme parade - toujours provisoire - à l’extinction. L’univers est un processus qui se déploie et dont nous faisons partie. Le monde est terrifiant et imprévisible, l’homme est un work in progress dans un univers en gestation. Pourrons-nous l’accepter ? Et... à quoi ressemblera notre progéniture ?

In L’ascenseur à bateaux de Strépy-Thieu, Coll. Ouvrages d’Art, Ministère wallon de l’Equipement et des Transports. Plaquette n°8.

Bobvan Coproduction : Fédération du Tourisme de la Province de Hainaut ASBL, Transcultures/City Sonic, Des Airs Production, Centre culturel régional du Centre . En collaboration avec Les Voies d’Eau du Hainaut ASBL, le SPW et la SOFICO.

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Simulation. Projet Offspring 2013. 37


Masques : entre eux et nous COCO FRONSAC

www.cocofronsac.com www.cargocollective.com/cocofronsac

Un couple d’un autre temps, posant en vêtements du dimanche, cliché noir et blanc, se transforme en êtres hybrides merveilleusement inquiétants. Une famille temporaire expose sa galerie si subrepticement frondeuse, si suavement anticonformiste. Et d’un Musée international du Carnaval et du Masque ---------------------------------Ancien hôtel particulier d’une noble famille binchoise, les Lalaing, l’actuel musée du Masque est racheté en 1570 par le chanoine Jean Duquesne pour en faire un collège. Passé en 1757 aux mains des Augustins, le bâtiment rebaptisé « collège des Augustins » n’ acquiert qu’en 1778 l’aspect général qu’on lui connaît aujourd’hui. La révolution française impose un enseignement laïc jusqu’en 1880, date de la reprise en main par les catholiques de la désormais école moyenne communale, rapidement déménagée vers l’actuel collège Notre-Dame de Bon Secours. Devenu cette fois un athénée royal, l’édifice change définitivement de fonction en 1975 : le folkloriste Samuël Glotz, soutenu par le député-bourgmestre Charles Deliège, obtient l’autorisation d’y fonder le Musée international du Carnaval et du Masque dont il devient le premier conservateur. Dans les trente années qui suivirent, ce premier conservateur puis son successeur, Michel Revelard, n’eurent de cesse d’enrichir, par de nombreuses et exceptionnelles acquisitions, les collections de cette institution unique en son genre. Aujourd’hui, le Musée du Masque, avec plus de 7000 pièces, n’est plus seulement un musée dédié aux carnavals de Binche et de Wallonie mais surtout un centre de recherche, de documentation et de conservation des traditions masquées dans toutes leurs fonctions sur les cinq continents.

flash, vous devenez objet du regard : d’un rien, vous voilà transformé, métamorphosé et immortalisé pour la postérité. Le parcours initiatique vers le monde des masques passe aussi par la photographie… d’hier et d’aujourd’hui. Mais parle-t-on bien de masque ? Réinterprétation dans un contexte improbable ou détail imperceptible qui chatouille l’œil. Indubitablement, ni masque de carnaval ni accessoire d’un rituel ancestral. Plutôt un masque quotidien, inavouable, insaisissable, insoupçonnable, qui se matérialise tout à coup. La Femme-Corbeau laisse apparaître sa force contenue par une délicatesse feinte, dans un regard nostalgique jeté sur le passé. Une famille imaginaire affirme une différence à ce point discrète qu’elle en devient une évidence criante. Laissons donc la parole aux artistes. Introduction par Emilie Botteldoorn, Musée international du Carnaval et du Masque

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Sans titre. Photo gouachée.

La femme corbeau. Photo gouachée.

Chimères et Merveilles par Eric Lorach Hommage aux dadas, démarche inspirée, vision surréaliste. Rapprochement audacieux d’art esquimau et de photos 1900, travail sur la mémoire collective, construction et reconstruction d’un passé qui n’a pas vécu… Comment aborder le sujet ? Il y a le support : les photos anciennes, plus ou moins figées, qui chassent l’expression pour mieux s’uniformiser. Témoins d’un temps révolu, Coco Fronsac les collectionne par passion depuis des lustres. Il y a la technique : de la gouache mélangée à un peu de gélatine pour mieux tenir et se mêler à la photo. Il y a les motifs : le masque ethnique, porteur de l’âme et de l’expression. Qu’il soit Yup’ik ou Bakwélé, il a pour fonction de relier le monde des hommes à la naturalité. C’est peut-être une piste, mais, à bien y regarder, le masque vient-il en contraste ou épouse-t-il la photo ? Le résultat est déconcertant et fascinant. Miniatures, vous continuez à nous toiser de haut… Pas d’interprétation facile, il faut s’y résoudre, impressionné. Ces petites scènes d’argentiques et de gouaches mêlées vous regardent droit dans les yeux et vous fascinent. Sur le spectateur, elles prennent sans cesse le dessus et l’ensorcèlent pour mieux lui échapper et vivre leurs vies à leur gré. Coco Fronsac a créé quelque chose de merveilleux, d’enchanté. Un regard sur la vie plein de profondeur et de tendresse, un vrai travail sensible, une œuvre toute en finesse qui touche droit au cœur. Formée aux Arts Appliqués de Paris, lithographe, passionnée d’arts premiers et de surréalisme, Coco Fronsac est une artiste protéiforme. Des globes érotiques aux ex-votos en passant par les sculptures chamanes ou les mises en bouteilles, elle explore de nombreux mondes qui sont autant d’invitations à découvrir son univers onirique et atemporel.


Beautiful Wedding. Photo gouachĂŠe. 39


Jennifer Defays née en 1979

Leslie Mannès née en 1982

Manon Santkin

née en 1982 vivent et travaillent à Bruxelles. www.by-product.be

By Product 5 et intervention « Do-it-yourself » By Product - Présentation par Anne-Esther Henao, Iselp

By-Product, c’est un collectif : deux danseuses, Manon Santkin et Leslie Mannès, et une styliste, Jennifer Defays. Au centre de leur pratique, une exploration artistique se noue entre le corps, le vêtement et la représentation. Ensemble, elles investiguent les qualités évocatrices du corps habillé et jouent de ses glissements. Trouées, fentes, protubérances, dissymétries, déformations sont les mots se rattachant au champ lexical des costumes de By-product. Les genres se mélangent, les seins se multiplient, les poils se répandent, la peau se transforme en tissu trop organique, une aisselle devient un antre érotique, un orteil se révèle soudainement obscène. Les trois artistes reconsidèrent la normalité établie par les codes vestimentaires occidentaux en les mettant subtilement à mal. Dans une démarche hybride alliant performance, artisanat, photographie, vidéo et interventions participatives, By-product questionne les notions de déguisement, de normes et d’apparence. La mise en valeur d’anomalies ou d’excroissances parasitant la plastique corporelle, cadrée dans une représentation socialement convenue, vient semer le trouble chez le spectateur. Le collectif joue sur le fil d’une ambivalence perceptive. Tantôt ludique, tantôt monstrueux ou contemplatif, le projet de By-product se travestit lui-même en prenant de nouvelles formes à chaque présentation. Au Musée international du Carnaval et du Masque, le collectif présente son By-product 5, une série de portraits d’une famille fictive, et invite le visiteur à agrandir cette « By-product family » avec les accessoires Do-it-Yourself et l’installation d’un studio photo le jour du vernissage. Dans la série photographique, les trois artistes incarnent donc les membres d’une famille imaginaire. Ces portraits, résultant d’un long temps de pose, durant lequel ils restent immobiles le regard plongé dans l’objectif, manifestent un enjeu troublant qui touche à l’intime. Le déguisement, le moment de la pose, l’expression qu’on y met, le regard de l’autre sont les composants d’une œuvre à la fois discrète et provocante. La dimension participative importe beaucoup au collectif,

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qui considère les portraits comme des expériences à vivre mais aussi comme une possibilité pour le visiteur de s’approprier le travail au point d’y contribuer lui-même concrètement. Plutôt que d’être le témoin d’une représentation, il en devient ici l’acteur. La proposition Do-it-Yourself, lors du vernissage, est la suivante : on choisit un accessoire parmi les kits proposés, on le glisse sous son vêtement, on s’installe en face du photographe et on pose en regardant l’objectif. On reçoit un exemplaire de la photo et un autre rejoint la galerie, où peu à peu, la famille s’agrandit. En passant par la fiction, By-product propose de se réapproprier l’image et les possibles de l’apparence. Les silhouettes incarnées sont les étendards d’une rébellion ludique et ambivalente révélant des micro-métamorphoses aux détails déroutants, comme autant de revendications implicites.

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Sculptures # métamorphoses Le Musée royal de Mariemont participe à ARTour sans interruption depuis 1997, et propose au public des interventions de très grande qualité. Le plus souvent, le Musée a cherché à instaurer un dialogue entre les œuvres des artistes invités et celles de ses collections permanentes. La céramique, mode d’expression plastique universel traversant l’histoire et les cultures, a le plus souvent constitué la toile de fond de ces rapprochements. Ces dernières années, la céramique et Mariemont ont donné sérieusement rendez-vous à ARTour avec Johan Creten (2007), Bean Finneran (2011) et cette année, Clémence van Lunen.

Keramis - Musée royal de Mariemont chaussée de Mariemont 100 - 7140 Morlanwelz www.musee-mariemont.be ---------------------------------Qui pourrait deviner que passées les grilles monumentales de l’entrée du Domaine, vous pénétrez dans l’univers d’un collectionneur ? Les essences rares et les statues vous conduisent tout naturellement à l’écrin conçu par Roger Bastin pour les richesses rassemblées par Raoul Warocqué. Amateur éclairé et éclectique, il promènera sa passion des livres rares à des œuvres représentatives des grandes civilisations d’Europe et d’Asie, ou du passé de sa région. Les collections rassemblées par Raoul Warocqué sont actuellement présentées dans un musée inauguré en 1975 et construit par l’architecte belge Roger Bastin. Son architecture, sobre, crée un climat propice à la contemplation. La qualité et l’éclectisme des œuvres présentées en font l’un des premiers musées de Wallonie. Ce sont, en effet, de véritables trésors que Raoul Warocqué a rassemblés au cours de sa vie, réunissant grâce à sa fortune colossale des oeuvres convoitées par les plus grands musées du monde. Aujourd’hui, le Musée royal de Mariemont, établissement scientifique de la Fédération WallonieBruxelles, poursuit l’œuvre de son fondateur par l’étude et la mise en valeur, mais aussi l’enrichissement, des collections qui lui sont confiées.

Les œuvres en céramique de Clémence van Lunen créent un lien avec les collections asiatiques du musée. Les nombreux séjours en Chine de l’artiste lui ont permis de saisir une sorte de climax qui habite l’art et la culture de ce pays. Elle opère une synthèse esthétique - et davantage une contraction sémantique et formelle qu’une métamorphose en tant que telle - entre l’art contemporain européen et les arts et traditions du pays. Deux céramiques chinoises des collections de Mariemont sont rapporchées des œuvres exposées, elles nous placent face à l’évidence : l’une comme l’autre évoquent un paysage chinois que Clémence matérialise dans ses sculptures monumentales. Par ailleurs, en montrant trois fleurs de sa série Wicked Flowers, Clémence est intimement proche du cadre naturel somptueux qui donne son écrin au musée. Depuis ces quinze dernières années, Clémence Van Lunen est parvenue à construire un univers singulier ancré dans la pratique de la sculpture et de la céramique. Au cours de ses années d’études, Clémence van Lunen pressent que l’art conceptuel et le minimalisme, mouvements dont on faisait alors grand cas, ne seront pas ses moyens d’expression privilégiés et qu’il existe d’autres voies. Son but est d’échapper à la bipolarité, à l’opposition entre monde sensible et monde intelligible qui caractérise l’Occident. En voyageant en Orient (Japon, Inde, Chine…), elle découvre des modes de pensée totalement différents, se référant davantage à l’immanence des minéraux, des végétaux et des animaux qu’à une transcendance liée à un dieu unique ou au monde des idées et des concepts. Cémence van Lunen appartient à un nouveau courant de la sculpture qui apparaît comme un contrepied au matérialisme des années 1980 incarné par des artistes comme Jeff Koons et Allan McCollum.

Clémence van Lunen

Née en 1959 à Bruxelles, vit et travaille à Paris www.clemencevanlunen.eu

Dragon dans les nuages, grès. Editions Manufacture de Sèvres, H. 90 cm, 2007. 42


La vague, grès lustré, H. 45 cm, 2008. 43


En 1983, lors d’un voyage en Extramadure à Salvatierra de los Barros (Espagne), un potier traditionnel fait découvrir à Clémence les rudiments du tournage. Déjà, elle se passionne pour les métiers traditionnels et les savoir-faire ancestraux, un point de référence qui ne la quittera pas. Entre 1985 et 1992, elle s’adonne aussi à la taille directe dans les carrières de pierre bleue belge des Avins-en-Condroz tout en sculptant sur bois et en s’initiant à la céramique. Viennent alors quatre séjours au Japon en 1995 et 1996, à l’invitation de Shigeo Toya, sculpteur abstrait sur bois. De cette rencontre naît chez Clémence van Lunen un indispensable besoin d’exprimer la résonnance entre l’homme et la nature. En mai 1997, elle montre ses grandes œuvres en bois : des sections de troncs ou de branches d’essences différentes suggérant tant des arcs, des ponts ou des êtres progressant par grandes enjambées. L’artiste ne se cantonnera pas au bois et à la pierre, elle va rapidement explorer des matériaux industriels (PVC, treilli métallique). En 2005, elle s’envole une première fois pour Jingdezhen en Chine pour y transposer en porcelaine des projets de sculptures réalisés dans des matériaux industriels. La cité millénaire, berceau de la porcelaine, produit un nouveau choc. L’atelier du Maître Liu lui apporte des solutions techniques à la réalisation d’œuvres-clés comme La Grande Fleur (2007) qu’elle montre à Vallauris en 2008. Cette œuvre en porcelaine est obtenue par moulage d’un modèle cousu en Bulgomme, un matériau populaire à la mollesse et au motif caractéristiques. En 2012, un ensemble de grands formats en référence aux éléments et au principe du paysage oriental sont réalisés dans les ateliers de l’EKWC (European Ceramic Work Centre) à S’Hertogenbosch. Cette série la situe parmi les représentants d’une nouvelle céramique décomplexée de l’histoire de la discipline. Mais si, en céramique, le plus souvent, le feu fige, chez Clémence van Lunen, il crée un état intermédaire. Ses Dragons décrivent des formes mouvantes, évoluant dans l’espace par de multiples circonvolutions. Ils sont plus proches de l’air et du feu que des matériaux qui les constituent. Ses Cascades et ses Vagues sont des éléments de paysage. Des Doodles (litt. griffonnages) font aussi leur apparition. Il s’agit de constructions ou de figures dressées ou en position assise exprimant probablement un état physique ou mental. Avec ses Wicked Flowers (terribles fleurs), une nouvelle fois, Clémence nous surprend. Sans sortir des grandes lignes de sa réflexion, en l’occurrence le thème de la vitalité de la fleur exploré antérieurement, elle reprend un vieux thème des arts décoratifs en lui donnant une interprétation des plus insolite. A l’étroit dans le monde de l’art contemporain intellectualisé et marchandisé, Clémence van Lunen apporte un regard neuf sur la sculpture en céramique. Ses céramiques dépassent les sources auxquelles elles se réfèrent pour tendre à des réalités nouvelles, à des formes et des interprétations jusqu’ici non révélées au monde sensible. C’est en cela que l’œuvre de Clémence van Lunen est une aventure dans l’inconnu et, notamment, une métamorphose de la pratique de la sculpture. Ludovic Recchia - Catherine Noppe, commissaires Cascade à la Lune, grès, H 56 cm, 2011. 44


Métamorphose

Chinese Landscape, grès, H. 118 cm, 2010. 45


MIroir de l’absent Présence de l’absent, Absence du présent. Errance. C’est la création d’un monde erratique, De l’oubli. Une métamorphose du Non-Etant, d’un faux passé, d’un faux futur. Château fort d’Ecaussinnes rue de Seneffe 1 - 7191 Ecaussinnes-Lalaing + 32 (0) 67 44 24 90 www.chateaufort-ecaussinnes.be ----------------------------------

L’éperon rocheux sur lequel le château fort est construit revêt une importance stratégique depuis l’Antiquité. Les premiers véritables seigneurs du lieu en portaient le nom : tels Wicart, Eustache ou Oste d’Ecaussinnes. En 1357, c’est le seigneur Simon de Lalaing qui, en épousant Jeanne d’Ecaussinnes, devint seigneur des lieux. Jean de Croÿ, chevalier de l’Ordre de la Toison d’or, devenu seigneur d’Ecaussinnes par son mariage (1428), entreprit des transformations, poursuivies par son fils Michel, qui donnèrent au château son aspect actuel. De 1624 à 1854, ce sont les Van der Burch qui se succèderont au château fort d’Ecaussinnes. Il sera ensuite vendu au Duc d’Arenberg, qui n’y habitera pas. En 1920, le chanoine Puissant, de Mons, le rachètera, le sauvant des ruines. En 1928, c’est le comte Adrien Van der Burch qui rachète le château de ses aïeux et achève de le restaurer. En 1948, il crée la fondation Van der Burch qui en est l’actuel propriétaire. C’est lui qui a rassemblé les riches collections de verres, de porcelaines et de grès d’art qui en font un musée, autour du thème « Industrien d’art du Hainaut ». Au nombre des multiples centres d’intérêts qui agrémentent la visite du château, mentionnons : salles meublées, grand salon, chambre à coucher, oratoire. Deux magnifiques cheminées du XVIe siècle, aux manteaux sculptés, dont l’une décore le grand salon, l’autre la salle d’armes. Collections de tableaux, sculptures, céramiques, verreries, porcelaines, meubles, armes…

C’est une rêverie sans miroir. Ce sont les peurs passées de l’Autre connu, futures du Soi Inscrites dans les limbes. C’est une rêverie pour qui se regarde dans un cadre ...

Masque, technique mixte, vitrine, résines, feuille d’or, escargots, 2011-2013. 46

Voleur d’enfants, détail, résine, escargots, 2013.


PATRICK GuAFFY

Né en 1956 à St Maur des Fossés (France), vit et travaille à Bruxelles www.patrickguaffi.be

La métamorphose est langage et perception. A la fois disparition et fracture permettant l’évolution d’un état au d’un autre, elle est liée au temps de l’être, au souvenir de l’avoir été et du deviendra. Elle peut ainsi dans l’imaginaire lier passé-présent-futur, l’Autre et le nous. Elle peut être peur du devenir potentiel, métaphore de l’être, évolution biologique. Dans le château d’Ecaussinnes j’aimerais proposer, présenter des pièces pensées comme perceptions évolutives, non comme fractures. Des pièces qui prennent en compte les lieux, les modifications de leurs diverses représentations ainsi que les perceptions-émotions qu’ils ont incitées dans mon imaginaire. Je pense évolution du lieu mémoriel passif en lieu actif par l’introduction « d’images-extérieures ». Comment représenter une existence autre dans un lieu stabilisé, devenu a-temporel puisque lieu mémoriel de pensées, de représentations de passés restructurés au multiples sources devenues inertes ? Dans ces lieux aux oublis, aux évanescences multiples peuvent apparaître des pièces d’ombre, d’intégrations aux discours d’oubli. Quelles peuvent être ces ombres ? Des traces immatérielles, marques planes de volumes, des existences liées à la soustraction d’une valeur sensitive de l’espace et du temps, à savoir la lumière. Ces traces peuvent être également métamorphoses ou mémoires incertaines d’éléments disparus. Mais avant toutes choses ce sont des présences d’Absent.

Passe-muraille, marbre, mannequin, résines, escargots, 2009

Bassin, marbre, résine, escargots, feuille d’or, 2012. 47


FAntastique bestiaire / bestiaire fantastique L’immense répertoire des animaux et des monstres composites du bestiaire chrétien étonne. Beaucoup de ses figures, dont le sens initial est peu connu, dérivent de traditions antiques et/ou leur sont empruntées pour leur valeur ornementale, exotique, pittoresque. L’inventivité formelle, la fantaisie qui s’y manifestent « doublent » leur signification religieuse. Collégiale Saint-Vincent Grand’Place - Tribunes de la Collégiale www.collegiale-soignies.be ----------------------------------

Commencé au début du XIe siècle, ce monument est l’expression la plus ancienne du courant roman qui s’est développé dans la partie occidentale de l’actuelle Belgique (aire tournaisienne), sous l’influence de l’architecture du Nord de la France et de la Normandie. Son envergure s’explique par le fait qu’il s’agissait d’un lieu de pèlerinage à saint Vincent, un noble mérovingien du VIIe siècle converti à la vie religieuse, et de l’église d’une importante communauté de chanoines, qui a exercé des droits seigneuriaux sur la cité sonégienne jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. L’édifice en moellons bruts n’a pas été remis en question ni dans sa disposition ni dans ses volumes depuis mille ans. L’essentiel de sa charpente remonte d’ailleurs toujours à l’époque romane. Seules quelques chapelles ou la sacristie se sont ajoutées à la croix latine initiale au cours des siècles. La décoration a, quant à elle, été largement refaite au XVIIe siècle dans les styles Renaissance (jubé, tourelle eucharistique) et baroque (stalles, lambris sculptés avec bancs, chaire de vérité, autels), offrant une riche parure à une architecture qui tient toute sa force de sa sobriété. Parmi les œuvres d’art les plus précieuses figurent une émouvante Mise au Tombeau du milieu du XV e siècle et une très belle Vierge allaitant l’Enfant du XIV e siècle.

Ces représentations de la faune réelle ou imaginaire relèvent d’un goût pour le merveilleux, autant que de la nécessité d’une pédagogie des textes sacrés.

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Tantôt bénéfiques, tantôt « mal famés » les animaux révèlent la proximité du règne animal et de l’espèce humaine. Leurs images se nourrissent du même instinct vital que leurs interprètes illustrateurs et conteurs d’aujourd’hui.

Jean Pierre Denefve.

Le bestiaire chrétien dans la collégiale Saint-Vincent à Soignies. 1 . Un animal fantastique. A voir au dessus de la porte du cloître. Lambris en chêne. 2. Un dauphin. Banc en chêne. Les poissons - excepté l’ichtus, poisson générique des premiers chrétiens - sont peu présents dans le bestiaire chrétien. L’univers marin est le domaine des puissances du malin. Le dauphin fait exception. Il bondit hors de l’eau pour guider les navires. Echoué mort sur la côte, il paie de sa vie une tentive de ramener sur terre les âmes des marins morts. 2 48


« Au Moyen Age, la zoologie mystique voit se côtoyer l’étrange, le fictif, comme le naturel le plus naïf et le plus simple.» « Métamorchoses »

Les saints et leurs attributs animaux Abeilles

Chien

Faucon

Ambroise

Roch

Bavon

Bernard

Bernard

Licorne

Agneau

Dominique

Justine

Baptiste

Colombe

Lion

Agnès

Basile

Gérôme

Aigle

Grégoire

Marc

Jean

Coquille

Janvier

Biche

Jacques

Poissons

Gilles

Corbeau-

Raphaël

Bœuf

Corneille

André

Sylvestre

Paul

Zénon

Thomas d’Aquin

Benoît

Porc

Cerf

Erasme

Antoine

Julien

Dragon

Taureau

Eustache

De nombreux saints

Sylvestre

Hubert

Georges

Eustache

Cheval, ou à cheval

Marguerite

Vache

De nombreux saints

Marthe

Brigitte

Georges Image pieuse, 12x8 cm - Depiuis le XIe siècle, Saint Ghislain est populaire en Hainaut. Fondateur de l’abbaye dans la ville du même nom, il est fêté le 10 octobre. L’ours est peu présent dans le bestiaire chrétien. Il symbolise l’Espérance quand il réapparaît après l’hiver. La racine « bern » - l’ours – est présente dans les noms de St Bernard et St Bruno, mais l’ours n’est pas leur attribut. 49


ill.2

ill.1

Alain Regnier

Né en 1964 à Soignies, vit et travaille à La Louvière www.raeditions.net

Pierre Larivière

Né en 1951 à Bruxelles, vit et travaille à Louvain-la-Neuve

Dominique Maes

Né en 1957 à Bruxelles, vit et travaille à Bruxelles www.dominiquemaes.net

Travail de gravure et de typographie à trois mains autour du bestiaire de l’art roman. Douze animaux sont présentés comme des découvertes archéologiques qui auraient pu appartenir au bestiaire de l’art roman et qui auraient été en quelque sorte oubliées par les historiens. Edition de douze planches représentant les animaux et un texte expliquant leur histoire. L’ensemble est accompagné de douze sculptures sous la forme de fossiles attestant de l’existence de ces douze animaux ainsi que des douze matrices ayant servi à l’impression des estampes. Illustrations de Dominique Maes et Alain Regnier. Sculptures de Pierre Larivière. Gravures exécutées par Alain Regnier. Textes écrits par les trois intervenants. ill.1 et 2 Gravures d’Alain Regnier ill.3 Gravures de Dominique Maes ill.4 et 5 Illustrations extraites de Bestiaire fantastique. Linogravures et textes originaux d’élèves de sixième artistique de l’Athénée Provincial de La Louvière et de quelques-uns de leurs professeurs. Imprimé sur les presses d’Alain Regnier à Ecaussinnes en juin 1999. R.A. EDITION. ill.3 50


ill.4 Vertigo Paroxystimus Benignus. Anne Gline et Geneviève Capiau

Enlèvement de Ganymède par Zeus. Bois et mortier à base de plâtre et de fibre de verre. 200x70x34cm.

Mythes et légendes font depuis toujours partie des sources d’inspiration de John Bulteel qui sait que l’identification de l’homme et de la bête remonte aux plus lointaines origines, nourrissant les fables d’hier et d’aujourd’hui. ill.5 Le loumpawa. Laetizia Marotta

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JOhn Bulteel

Né en 1945 à Sint Denijs, vit et travaille à Comines www.johnbulteel.be


le rêve des icares

Espace culturel Victor Jara Place Van Zeeland 31 - 7060 Soignies www.centre-culturel-soignies.be ---------------------------------Cet outil a pour vocation d’être le «centre nerveux» de la vie culturelle sonégienne. Idéalement située en plein centreville, à proximité de l’actuel Centre d’Art et de Culture, de la Bibliothèque La Régence et de nombreux parkings, cette infrastructure est un des maillons du «pôle culturel» de Soignies. La salle à vocation culturelle polyvalente propose une interprétation très urbaine de la notion de spectacle, en rayonnant largement sur son environnement, et au public d’opérer une appropriation du bâtiment sur des modes multiples et ludiques, même lorsque celui-ci est fermé. La rivière « La Senne », qui trace les origines historiques de la ville, est enfouie en bordure du site. Sa présence invisible, autant que la proximité de la collégiale dans sa massivité guerrière, ont invité les architectes (L’Escaut ) à décliner le projet comme une topographie accompagnant ces éléments premiers. Le projet est habillé de croûtes de pierre brute et ses formes évoquent un étrange rocher surgi du sol, racontant le lien originel de la ville avec sa pierre. Les espaces intérieurs prolongent cette logique sculpturale, pondérée dans la salle par les ambitions d’un outil à haut niveau d’exigence, permettant d’envisager pour la ville une politique culturelle à l’échelle régionale. Cette infrastructure a pris le nom d’Espace culturel Victor Jara.... Tout un symbole !

L’Icare, quel que soit sa position dans la phrase, s’écrit avec Un aile majuscule et Un singulier nominatif renvoyant directement au mythe d’Ovide dans Les Métamorphoses, livre VIII, an sept ou huit de notre ère. D’aucuns prétendent même que ce serait en l’an neuf, bon et après ? Après, il faut attendre aux alentours de 1558 pour que Pierre Bruegel l’Ancien en donne une version picturale très controversée sur son authenticité d’époque. Et quatre cent-cinquante ans plus tard, les historiens de l’art s’accordent à peine sur sa signification symbolique. L’orgueil ou la liberté. La gravité terrestre ou la légèreté du vent. L’obéissance aux conseils de Dédale ou la transgression de la loi patriarcale. L’envie de voler trop haut et de se brûler les ailes. De caresser le soleil du bout de ses rêves mal fagotés, par inadvertance, insouciance ou dérisoire croyance dans l’astre le plus convoité au monde et le plus craint. Simple échappatoire géniale à la divine comédie humaine ou parthénogénèse syllabique frémissante. L’important, c’est la chute. Infinie et souriante selon un poète, c’est une Muse qui me l’a dit. Bon, et après ? Le mythe de l’infinie puissance des hommes face à celle de la nature est tenace, enraciné profondément à la lave de la vie. Nous sommes presque sept milliards d’Icares à gratter la mémoire de la terre et à vouloir s’en évader chaque jour, un peu plus. Quête délicieusement improbable aux horizons de jouissances apaisantes. Inlassablement, éternellement, les Icares de tous poils déminent leur cœur des brisures entassées pêle-mêle en colifichets de bonheur au déroulé des années. Eperdument, les hommes et les femmes se méta-morphosent en bafouille d’ex-voto chamanisant, spirituel ou agnostique. L’hallucination se tient dans l’œil qui jargonne. Le rêve se traduit en toutes les langues obscures et plonge dans l’écume des cendres estampillées made in live. Les masques sont permanents et translucides. Jacques Pyfferoen 27 mai 2013

Rêve des Icares, 2013. 52


JACQUES PYFFEROEN

Né en 1954 à Charleroi, vit et travaille à Seneffe

Rêve des Icares, 2013.

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Catalogue édité à l’occasion de la neuvième biennale

ARTour - Art contemporain et Patrimoine Du 23 juin au 25 août 2013

Métamorphoses www.artour.be

Groupe de travail Vanessa Bebronne Collaboratrice scientifique chez Kéramis, Centre de la Céramique de la Fédération Wallonie-Bruxelles Catherine de Braekeleer Directrice du Centre de la Gravure et de l’Image imprimée de la Fédération Wallonie-Bruxelles Eric CLAUS Responsable des expositions au Centre culturel régional du Centre, coordinateur de la biennale ARTour

Valérie FORMERY Conservatrice du Musée Ianchelevici

Thierry Vandenbussche Coordinateur d’Outlandish – Platform for photography

Philippe FRANCK Directeur de Transcultures, Centre interdisciplinaire des cultures électroniques et sonores

Daisy VANSTEENE Directrice de l’Écomusée du Bois-du-Luc

Anne Esther Henao Commissaire d’exposition à L’iselp, Institut supérieur pour l’étude du langage plastique

Jacques Deveseleer, Conservateur du musée du Chapitre de la collégiale Saint-Vincent à Soignies Benoît Goffin, Historien

Avec nos remerciements à

Valentine Reymond, Conservatrice du Musée jurassien des arts de

Yves DE BRUYN Coordinateur du Centre Daily-Bul & Co

Lucie KNOCKAERT Chargée de production et médiation chez Transcultures, Centre interdisciplinaire des cultures électroniques et sonores

Christel Deliège Directrice du Musée international du Carnaval et du Masque

Anne-Sophie Mortier Graphiste à l’Écomusée du Bois-du-Luc

Vincent Dierickx / Nicolas Delys

Jean-Pierre DENEFVE Responsable de la Galerie Koma ASBL

Ludovic RECCHIA Administrateur délégué - Coordinateur de Keramis, Centre de la Céramique de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Fabien DE REYMAEKER Coordinateur de projets, Hainaut Culture Tourisme

Adèle SANTOCONO Responsable du secteur Arts plastiques, Hainaut Culture Tourisme

Moutier (CH)

Communication Graphisme

Catherine Chalon

Crédits photographiques

Alain Breyer, pages 5, 6, 7, 8 et 9. Bernard Vanroye, page 34. Michel Lechien, pages 42 (œuvre), 43, 44 et 45. Yves Peeters, pages 46 (œuvre) et 47. Marie-Paule Stokart, pages 40 et 41.

Organisation : Centre culturel régional du Centre, Centre Daily-Bul & Co, Centre de la Gravure et de l’Image imprimée de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Fédération du Tourisme de la Province de Hainaut, Galerie Koma asbl, Kéramis - Centre de la Céramique de la Fédération Wallonie-Bruxelles, L’iselp-Institut Supérieur pour l’Etude du Langage Plastique, Musée Ianchelevici, Musée international du Carnaval et du Masque de Binche, Secteur des Arts plastiques, Hainaut Culture-Tourisme, Transcultures/City Sonic - Centre interdisciplinaire des cultures électroniques et sonores, Des Airs Production, Outlandish - platform for photography. En collaboration avec l’Association pour la Gestion et l’Exploitation touristiques et sportives des Voies d’Eau du Hainaut, le Centre culturel de Soignies, l’Ecomusée du Bois-du-Luc, la Maison du Tourisme du Parc des Canaux et Châteaux, le Musée du Chapitre à Soignies, la SNCB Holding. Avec le soutien de Centritudes - Agence Conseil en Développement Culturel de la région du Centre, de la Province de Hainaut, du Service des Arts plastiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Ville de La Louvière. Avec Antenne Centre Télévision, La Première et La Deux. Une initiative du Centre culturel régional du Centre / Place Jules Mansart 17 - 7100 La Louvière - +32 (0) 64 21 51 21 D / 2013 / 7097 / 1

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