Catch & Shoot, le mag' (numéro 3)

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CATCH & SHOOT, LE MAG’ EDITION GRATUITE’ DISTRIBUTION EN LIGNE (Photographie © Olivier Sarre)

Pierre Vincent

LE NOUVEAU CHALLENGE. 04

INTERVIEW BEN WOODSIDE 12

IMMERSION 24H AU MILIEU DES JSA BORDEAUX

FOCUS LE BASKET BELGE

16

38

INTERVIEWS CROISÉES GUNN/WRIGHT ET LES COUSINS LESCA

DOSSIER AU COEUR DE LA JSF NANTERRE

54

58


SOMMAIRE 24H AU MILIEU DES JSA BORDEAUX

16

CHEZ NOS VOISINS LES BELGES

38

AU COEUR DE LA JSF 58 NANTERRE

ENTRETIEN PIERRE VINCENT

04

BEN WOODSIDE

12

WRIGHT / GUNN

30

LES COUSINS LESCA

54

OLIVIER KOLB

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REDACTEURS EN CHEF GABRIEL PANTEL-JOUVE ET JULIEN DALCANALE. REDACTION AMAURY BOULAY, GEORGES XOURAS, RYAD OUSLIMANI, VALENTIN PITON, BENJAMIN GUILLOT, PHILIPPE MORIHAIN, JULIE DUMéLIé, BENJAMIN DELALANDE, SIMON HUMEAU, MAXIME JAMBOIS, JOHAN COLLE, FLORIAN DELAGE, SéBASTIEN BUSSIèRE, QUENTIN BOUTHIER ET STEPHEN BARBE. CONCEPTION GRAPHIQUE SYLVAIN JULÉ (sylvain.jule@free.fr) CONTACT (REDACTION) redaction@catch-andshoot.com (PUBLICITÉ) maxime@agencesw.com

REMERCIEMENTS



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Photographie, Š Olivier Sarre


ENTRETIEN

JEUNESSE ET CARRIÈRE « Je suis né à Brioude mais je n’ai rien à voir avec les Auvergnats, je suis juste né là-bas. Mon père est président d’un club de basket à Illas en Gironde, là où j’ai grandi. Du coup, je n’ai pas eu beaucoup de choix. J’ai commencé à entraîner à 11 ou 12 ans. A 15 ans je coachais les seniors puis la sélection départementale, à 17 ans la sélection régionale. Vers 20 ans, alors que je poursuivais mes études, j’ai pris en charge le pôle féminin d’Aquitaine C’est à 13 ans que j’ai vraiment décidé que je voulais entraîner, d’en faire mon métier. La raison, c’est la rencontre - alors que j’étais en sélection départementale - avec un garçon qui s’appelle Patrick Beesley, qui est actuellement DTN (Directeur technique national) adjoint, assistant de Jean-Pierre de Vincenzi. C’était mon entraîneur en sélection et c’est lui qui m’a donné envie de faire ce métier. En rentrant chez moi, j’ai décidé que je serais entraîneur de basket. Après avoir eu mon CAPEPS (Certificat d’aptitude au professorat d’éducation physique et sportive) - avec Patrice Hir -, je suis devenu cadre technique. J’ai eu un poste en PoitouCharentes en 1991. De 1991 à 1993, j’étais à la Rochelle. A partir de 1993, j’ai été nommé à Poitiers où l’on crée le Poitou Charentes Basket Ball et où j’entraîne aussi le club de Nationale 3, qui, à l’époque, est descendu en Nationale 4. Pendant ces années-là, je suis aussi assistant de l’équipe de France cadet (16 ans et moins). Je suis nommé entraîneur de l’équipe de France juniors en 1997. J’arrive à Bourges en 2003 et je cumule avec les Bleues à partir de 2007. »

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PIERRE VINCENT CHAMPIONNAT D’EUROPE JUNIOR 2000 « C’est mon troisième championnat d’Europe en tant que coach principal. J’ai gardé des contacts avec certains joueurs. Plus particulièrement Tony (Parker), mais je vois de temps en temps Boris (Diaw) puisqu’il est de Bordeaux, la même région que moi. Je connais bien sa maman (Elisabeth Riffiod) et je l’ai vu jouer gamin. Tony, je l’ai eu avec ma première équipe junior – il avait deux ans d’avance - et j’ai eu ses deux frères aussi (Pierre et TJ). Donc je connais très très bien la famille Parker. On a gardé des relations assez proches. Mes deux enfants vont au camp qu’il fait l’été et moi aussi j’y suis depuis deux ans. On se contacte de temps en temps. Après, je revois de temps en temps d’autres joueurs, mais malheureusement pas assez souvent (sourire). Comme je ne vais pas beaucoup sur Internet et sur Facebook, je n’ai pas souvent l’occasion de prendre de leurs nouvelles. Je suis allé voir une fois sur Facebook si j’avais quelques messages et j’ai croisé Charles Lombahé-Kahudi, qui joue aujourd’hui au Mans, et que j’ai eu en équipe de France de jeunes. Mickaël (Pietrus), je l’ai revu sur des plateaux télé, des choses comme ça. J’ai vu Ronny (Turiaf) aux Etats-Unis quand je suis allé à San Antonio. Je l’ai croisé un peu plus que les autres parce que l’été, ils

font des petits matchs ensemble, des choses comme ça. Une génération exceptionnelle ? C’est ce qu’on m’a dit quand on a gagné, et après nous, ils n’ont plus rien gagné. Donc ça me « saoulait » un peu à l’époque. Parce que gagner, c’est difficile. Mais on disait « ils ont été champions d’Europe, mais bon, ils ont une génération exceptionnelle », c’est vrai. Par exemple, la génération 1980 espagnole avec les Gasol, Navarro, Reyes, Calderon, Berni Rodriguez, Carlos Cabezas, ils ont été champions d’Europe juniors, champions d’Europe seniors, champions du monde, vice-champions olympiques… Les nôtres, la seule performance c’est en juniors. Ce n’était donc pas si facile que ça. Meilleur souvenir ? C’est toujours compliqué de savoir quel est le titre le plus beau, quand on a la chance d’en avoir déjà gagné quelques-uns. Le plus beau c’est toujours le prochain. Ceux qui sont passés, ce sont de bons souvenirs, de belles expériences. Heureusement pour moi, il y en a eu d’autres et ils n’ont pas plus de valeur les uns que les autres.


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L’EUROLIGUE L’Euroligue, pour nous, avec les moyens que l’on a, c’est extrêmement compliqué. On a fait deux Final Four. On est passés pas loin de deux autres. Cette année, on perd en quarts de finale contre Valence qui est une grosse, grosse équipe. Mais je pense que l’on aura une meilleure équipe l’année prochaine, et qu’on pourra défier les grandes équipes et accéder au Final Four. L’objectif principal ? Disons que dans notre position, c’est déjà compliqué d’être en quarts de finale chaque année. Parce qu’on joue de grosses armadas. On fonctionne par cycles. La première année, quand je suis arrivé, on s’était donné trois ans pour arriver au meilleur niveau. On a tout gagné en France et en Europe on a perdu contre Brno au buzzer sur le dernier tir de Cathy (Melain) dans le coin làbas (il montre le parquet). Et Brno, derrière, est champion d’Europe. On est à la fois très près et aussi très loin des grosses équipes européennes. Au niveau financier ? C’est ce qui fait la différence. Il y a un gros écart économique et sportivement, il n’y a pas le même écart. C’est difficile. On est passés deux fois et paradoxalement, la première fois, c’est vraisemblablement avec une des équipes les plus faibles que j’ai eu. C’est assez amusant. La deuxième année, on a perdu d’un point contre Brno et contre Ekaterinbourg à la dernière seconde.

CONSTANTE : RECONSTRUCTION D’ÉQUIPES JEUNES ET INEXPÉRIMENTÉES A un moment donné, on n’a pas trop le choix, on est dépendant d’un contexte économique. Quand j’ai signé ici, le président ne m’avait pas dit exactement la situation. J’ai compris que la situation que j’avais imaginée ne serait pas la bonne et qu’il fallait repartir avec une équipe

plus jeune, avec un standing un peu moins fort. On a récupéré beaucoup de jeunes joueuses, je pense à Emeline (Ndongue) qui avait 20 ans, Elodie Godin 18 ans, Céline Dumerc, 21 ans, Pauline Krawczyk, 18 ans. Au niveau de la fédération, on ne me proposait rien qui me fasse rêver. Moi, j’avais tellement envie d’entrer dans la carrière de coach que j’ai dit OK.

DIFFÉRENCE TRAVAIL CLUB / SELECTION Non, c’est le contexte qui est différent, pas ma façon de travailler. C’est accéléré parce qu’en club, on a un an et en équipe nationale ça va très très vite. Donc la façon dont on bosse est beaucoup plus concentrée. On filme tous nos entraînements, on fait beau

Au niveau de la fédération, on ne me proposait rien qui me fasse rêver. Moi, j’avais tellement envie d’entrer dans la carrière de coach que j’ai dit OK. LA «MÉTHODE» PIERRE VINCENT

Il faudrait demander aux filles pour comparer. Moi, je ne peux pas puisque je ne sais pas comment fonctionnent les autres. On essaie de travailler car on sait que rien ne se fait sans travail, mais je suppose que les autres travaillent aussi. e fais beaucoup travailler les joueurs là où c’est pertinent. Parce que travailler comme des brutes, tout le temps et partout, ne rend pas les gens meilleurs. Le but, c’est de s’entraîner mieux. Ce que ça veut dire ? J’ai une conception de mon métier au niveau de la cohésion de l’équipe et du staff qui est particulière. J’ai la volonté d’expliquer aux gens que le travail est à faire sur le terrain et en dehors du terrain, qu’on doit faire des efforts pour se comprendre les uns les autres puisqu’on ne fonctionne pas tous pareil. Ça, c’est le côté prof de gym. Il y a une individualisation dans le travail. Chaque athlète est différent, d’un point de vue technique, physique et psychologique aussi. Donc il faut comprendre les gens, communiquer avec eux pour essayer d’en tirer le meilleur parti. C’est sûrement une des choses qui me caractérisent par rapport à d’autres entraîneurs.

coup de vidéo, de débriefings qu’on ne fait pas en club. On fait beaucoup de cohésion d’équipe. Mais les outils sont les mêmes, la méthodologie est la même, c’est dans le timing que c’est différent.

L’AVENIR J’ai encore un an de contrat, mais je suis libre chaque saison. Donc par rapport à un contrat moral qui me lie au président, je peux partir quand je veux. Cette année ? Je ne me pose pas la question, chaque chose vient en son temps (sourire) et pour le moment, je suis là. On a les phases finales à jouer. On fait une super saison. Je suis vraiment très content du travail qu’ont fait les filles. On a renouvelé l’équipe l’année dernière. On a fait venir beaucoup de jeunes joueuses. La première année (20092010) a été délicate, les débuts en particulier où on a perdu (face à Tarbes), en plus on a été éliminés à cause des blessures. Je pense qu’on fait une bonne saison dans l’ensemble, et on valide pas grand chose, par rapport à notre standing. Cette année (2010-2011), on est vraiment très très bien, on fait de grosses « perfs ». En championnat, on a perdu (seulement)


ENTRETIEN

un match, en Euroligue on perd en quarts de finale contre Valence, qui est un des 2-3 gros clubs européens. En plus, on était pas loin du niveau donc je suis très satisfait. Maintenant, si on ne ramène pas de victoire, si on ne ramène pas de titre, ça sera un échec malheureusement.

RETOURNER DANS LE BASKET MASCULIN Oui, bien sûr ça me tenterait. Un club de cœur ? Je suis Aquitain d’origine, donc quand j’étais plus jeune, je rêvais d’aller entraîner un jour l’Élan Béarnais, parce que quand j’étais jeune et étudiant, j’allais voir Freddy Hufnagel jouer à la Moutète. En effet, c’était un peu un club de cœur. Maintenant, tout cela est loin, mais j’y ai toujours mes racines, ma famille, beaucoup d’amis. J’y ai passé toute ma jeunesse, c’est un endroit qui m’est donc cher. Maintenant, je suis à Bourges depuis 8 ans et je m’y sens bien. Je suis quelqu’un de la campagne, c’est une ville à dimension humaine, pour moi c’est parfait.

que c’est la vérité. Mais en fait il n’y a pas une vérité, il y en a plein. Après, il faut construire en fonction de ce qu’on est, de sa façon de fonctionner. C’est une force et une limite puisque j’ai perdu du temps.

JOUEURS ET JOUEUSES MARQUANTS J’ai eu la chance de croiser beaucoup de grand joueurs. Quand je parle du joueur, c’est du sportif en globalité et pas seulement de l’athlète. Donc, Tony (Parker) évidemment, c’est un joueur exceptionnel parce qu’on ne voit pas, parce qu’on ne comprend pas ce que c’est qu’un grand joueur.

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Un grand joueur, c’est quelqu’un qui a le don de rendre ses partenaires meilleurs, qui sait l’être quand c’est important, qui sait mettre en confiance ses partenaires. Donc Tony, de ce point de vue-là, est quelqu’un d’exceptionnel. Bon, il y a Cathy (Melain, qui est dans la salle) qui est une joueuse de sport collectif exceptionnelle. Je pense aussi à Céline (Dumerc), qui est une fille avec beaucoup d’allant. J’ai eu la chance de croiser une fille comme Sandrine Gruda qui est une joueuse hors-normes. C’est une grosse travailleuse, elle a un physique à toute épreuve et un mental dévastateur. Elle développe des compétences de travail et une volonté de

UN MODÈLE Non, je pense que je n’en ai pas. Un des soucis que j’ai eu, c’est que j’étais tout seul dans mon coin, donc je me suis construit un peu seul. Et ça, c’est vraiment une limite pour un entraîneur puisqu’une façon de se développer vraiment importante dans le métier, c’est être assistant, passer du temps avec un coach, puis en passer avec un autre pour construire son « background ». Moi, je me suis débrouillé tout seul avec des articles, des vidéos, des matchs que j’ai regardés, regardés et re-regardés pour essayer de comprendre pourquoi les choses se faisaient et comment elles se faisaient. Donc ça a un côté très positif, ça m’a obligé à m’interroger sur ma pratique, être dans le doute, réfléchir à ce que l’on fait, se poser les bonnes questions. Le côté négatif, c’est que ça prend plus de temps. En même temps, être assistant de quelqu’un, c’est prendre le risque d’être aveuglé, en pensant

Photographie, © Olivier Sarre


ENTRETIEN

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réussir et de vaincre que j’ai rarement vus. Par contre, elle a moins de finesse basket, de justesse de jeu. Boris (Diaw) aussi, mais Boris c’est différent. Boris c’est un personnage. C’est quelqu’un qui aime partager, c’est quelqu’un qui a une philosophie différente, qui est plus dans l’échange, le partage, le vivre ensemble. Il lui manque ce côté un peu « tueur ». On peut le trouver mais il faut aller le chercher, à la différence de Tony par exemple puisque j’ai eu les deux. Tony c’est un compétiteur, il peut pactiser avec le diable pour gagner. Lui, il veut gagner, peu importe avec qui. Il y a des règles et des limites, mais il veut gagner et il conclura un marché avec celui qu’il considère être bon. Il va trouver des qualités, pas nécessairement flashy, même chez un rebondeur ou un passeur.

J’ai réveillé les enfants et je leur ai dit : « ça vous dirait d’aller voir les finales NBA ? » Évidemment oui (sourire). C’était sympa pour les enfants, moi je suis déjà allé voir des matchs aux États-Unis. J’étais content de passer du temps avec Tony évidemment. J’ai pu croiser Gregg Popovich. Je l’ai revu l’année dernière au camp de Tony puisque Popovich y est venu 2-3 jours. Donc on a pu échanger un peu, c’est intéressant, même si je n’ai pas pu voir grand chose. C’est intéressant de venir voir à l’entraînement un peu ce qui se passe, de « tauper » une ou deux idées. J’apprends toujours, c’est une attitude, on n’a pas de limites, la limite c’est celle qu’on veut bien se donner. Mais il n’y a pas de raison qu’on ne puisse pas développer et apprendre pendant toute la vie.

Moi, je suis quelqu’un de « projet », je n’ai jamais été quelqu’un qui venait picorer une année ici, une année là, et basta. UN PASSIONNÉ

La finale de conférence Ouest NBA 2008 : Disons que oui, je suis allé voir les finales de conférence NBA, mais c’est particulier. En fait, je devais partir avec l’équipe nationale et je n’avais pas de vacances communes en famille. C’est marrant parce que les Spurs jouaient les Hornets dans la nuit vers 5 heures du matin. Je me suis réveillé à 6h30 ou 7h pour voir le résultat – oui parce que je ne suis pas resté devant la télé hein, j’ai dormi (sourire) - et quand j’ai vu qu’ils avaient gagné et validé leur ticket pour la finale de conférence, j’ai appelé Tony. Je lui avais dit que je viendrai éventuellement. Il était dans l’avion d’ailleurs. Pour l’anecdote, ils étaient en panne, ils dormaient dans l’avion avant d’aller à Los Angeles. Et je lui dis, « bon écoute, voilà, on arrive ».

Aller voir d’autres entraîneurs ? C’est une limite pour moi. Actuellement, je ne peux pas car je suis tellement investi sur le terrain entre le club et l’équipe nationale que j’ai besoin de mon temps libre pour respirer. Une des richesses d’être entraîneur national, c’est qu’on fait beaucoup de camps à l’étranger. On voyage énormément et on rencontre des adversaires différents. On peut échanger avec les coachs sur les méthodes de travail. J’ai été invité dans certains endroits pour aller faire des clinics, des conférences. Je suis allé deux ou trois fois en Suède, j’ai passé une semaine pour entraîner l’équivalent de l’Insep, donc c’est une richesse parce qu’à la fois on donne ce qu’on a à donner, mais en même temps, on prend tout un tas de choses. Pour moi, c’est la partie la plus riche du métier et c’est un peu ma frustration actuellement parce que je n’ai plus le temps de faire ça. Le jour où je serais

Photographie, © Olivier Sarre

viré, peut-être que j’aurai un peu plus de temps pour aller voir à droite ou à gauche ce qui se fait (rires).

OBJECTIF CHAMPIONNAT D’EUROPE L’objectif, c’est de se qualifier pour les JO évidemment. Parce que ma motivation profonde par rapport à l’équipe nationale, c’était le projet d’emmener les filles aux JO. Ca fait fantasmer tout le monde, donc, effectivement, c’est un beau projet. Moi, je suis quelqu’un de « projet », je n’ai jamais été quelqu’un qui venait picorer une année ici, une année là, et basta. On est dedans, on le construit, on est dans la dernière ligne droite. Il faut se qualifier et se qualifier direc-


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tement c’est être champion d’Europe. Rien que ça. En sachant que tout le monde va arriver gonflé à bloc parce que tout le monde veut participer aux JO. Donc ça va être très très compliqué. En même temps, ça rend le challenge encore plus beau. En 2009, ça a été une très grande surprise pour tout le monde, nous les premiers. Ce qui est difficile, c’est que nous sommes champions d’Europe et tout le monde nous explique qu’on a un titre à défendre. Ce n’est pas comme ça qu’on gère une compétition. Quand on a déjà gagné, on n’a plus rien à gagner. Nous, on vient pour se qualifier pour les JO, pas pour être champion d’Europe. Si on peut faire la meilleure « perf » possible, on le fera. Mais notre volonté c’est d’être champion olympique (il rectifie), d’être aux Jeux Olympiques. Et pour être aux Jeux Olympiques, et bien il faut se qualifier. Et pour se qualifier, on regarde la marche minimum, c’est la 5e place, c’est-à-dire les quarts de finale. Donc ça veut dire, 1) passer le premier groupe, 2) passer le second groupe, et 3) gagner le quart de finale. Et si on ne gagne pas le quart de finale, on a deux matchs à gagner pour être cinquièmes. Donc voilà, c’est un gros challenge.

FAN D’AUTRES SPORTS ? Non, je regarde beaucoup le basket. Mon fils me fait regarder quelques matchs du Tournoi des 6 nations et j’en suis assez amateur. Quand j’ai le temps, je peux regarder quelques matchs de foot aussi, des grands matchs… Mais je passe suffisamment de temps devant la vidéo pour mon métier. Bon, par contre pour le boulot, je regarde beaucoup de matchs de basket, oui, masculins y compris.


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ENTRETIEN

GÉRER LA VIE PRIVÉE ET LA VIE PROFESSIONNELLE ? C’est un équilibre de vie, différent des joueurs. C’est-à-dire que nous, on travaille beaucoup plus qu’eux, sans leur manquer de respect. Nous, on est là sur le terrain, on est là pour le travail individualisé, on est là pour la vidéo, on est là pour la préparation de l’entraînement, tout ça, c’est vraiment beaucoup de travail. C’est un métier de passion, si ça ne brille pas, si on a pas l’énergie, on ne peut pas faire ce métier-là. C’est un vrai plaisir, de prendre une équipe, de prendre des joueuses, de les rendre meilleures, de construire une équipe chaque année. C’est un projet toujours différent. Cela dépend des saisons, cette année on a essayé de stabiliser l’équipe, ce n’est pas facile. En plus, on n’a pas des moyens extraordinaires donc quand on bouge une pièce, souvent, on est amené à bouger d’autres pièces, parce qu’on n’a pas les moyens de faire autrement.

CE QU’IL REGARDE Je regarde les matchs d’Euroligue, ce soir je vais d’ailleurs voir Real-Valence. Il y a des équipes qui m’intéressent plus ou moins, donc j’y prête plus ou moins d’attention. Je regarde San Antonio, parce que Tony y joue et parce je trouve que le style développé est intéressant. Là, sur un bout de match, je n’ai pas eu le temps de tout voir, il y avait Bogut, le joueur de Milwaukee et j’ai trouvé des trucs intéressants. J’ai raté le match donc ça m’intéresserait de le revoir. Il y a des choses comme ça des fois qui m’intéressent parce qu’il y a des équipes qui sont moins intéressantes que d’autres. Quand je « taupe » une équipe nouvelle que je n’ai pas vu jouer, j’aime bien regarder ce qu’ils font pour voir s’il y a des choses qui m’intéressent, qui m’interpellent, ou pas. Nombre de matchs visionnés par semaine ? Quand on prépare une équipe, on en regarde des matchs.

Donc si je comprends ceux-là, je ne sais jamais combien je regarde d’heures de vidéos pendant la semaine, mais c’est beaucoup (rires). Parce que par exemple, le match San Antonio – Phoenix (3 avril dernier) je l’ai vu en direct, je l’ai enregistré et j’ai fini de le revoir tout à l’heure. Et là j’ai revu Pana-Barcelone avant de venir. Quand j’ai deux minutes, je regarde des matchs. Un régal ? Bien sûr.

L’APPROCHE AVEC LES FILLES ET LES GARÇONS Pour moi, c’est la même méthode, ce sont les mêmes outils, c’est la même façon de travailler. Après ce qui change, c’est comprendre la psychologie féminine par rapport à la psychologie masculine. Un des éléments qui est vraiment majeur, c’est le rapport à l’estime de soi. Ce que j’explique, c’est que les filles, de façon générale, ce n’est pas vrai pour tout le monde, manquent de confiance en elles. Il faut les pousser à être plus agressives, à prendre plus de risques. Les garçons ont plutôt une haute estime de ce qu’ils sont et le travail est plutôt de les pondérer, de les calmer, de partager un peu plus la balle qu’ils ne le font. Mais la méthode, pour moi, c’est la même. Après, dans le travail avec les individus, c’est ça le chantier. On ne traite pas une fille comme Cathy Joens, comme on va traiter une fille comme Paoline Salagnac par exemple. Ce ne sont pas les mêmes individualités. Donc c’est comprendre comment le joueur fonctionne, ses qualités, ses limites, à tous les niveaux, pour les rendre meilleurs. Et c’est notre travail.

LA PLACE DE L’ENTRAÎNEUR : SUR LE TERRAIN AU MILIEU DES JOUEUSES OU DANS L’OBSERVATION TYPE « GENERAL MANAGER » ? Et bien là, ça ne se voit pas là mais je vais y aller (rires). Dans le travail, les assistants ont un rôle, ils ont besoin aussi de vivre, d’exister et d’expérimenter les choses. De gagner de

la reconnaissance par rapport aux joueuses. Donc si moi je fais tout, tout le temps, etc, la position de l’assistant n’est pas motivante et n’est pas valorisée par les joueurs. Parfois, je donne des thèmes, mais il sait ce qu’il a à faire, on a travaillé ensemble avant. Il construit également la reconnaissance de son engagement par rapport à tout ça.

PLUS GRANDE DÉCEPTION ? La déception, elle est encore forte là, ce sont les derniers championnats du monde (2010). Ils ont été difficiles. On a fait vraiment une très belle compétition puisqu’on a eu une préparation très compliquée avec beaucoup de blessures, beaucoup de handicaps dans la jusqu’au dernier moment puisqu’Émilie Gomis se blesse à 40 secondes de la fin du dernier match amical. On avait déjà pris sur la courge. On fait une compèt’ formidable, un dernier match formidable et on se fait « avoir » par les Espagnoles au dernier moment. C’est une grosse frustration, toujours présente. J’ai expliqué aux filles que c’est grâce à de grandes frustrations que l’on construit les grandes victoires. J’espère que cela nous permettra d’aller aux JO et d’y réaliser quelque chose de grand.

Propos recueillis par Sébastien Bussière.


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(Photographie © Pierre Volot) Propos recueillis par Julie Dumélié.


INTERVIEW

Ben Woodside. Un nom qui rappelle à certains de multiples cartons en NCAA. Pour d’autres, c’est avant tout celui que porte l’un des meilleurs meneurs de Pro A. Pourtant, rien ne prédisait un tel parcours pour ce natif du Minnesota. Rencontre

T

u viens d’une petite ville du Minnesota (Albert Lea). Comment fait-on pour arriver à ce niveau quand on joue dans un petit programme ? Je crois que je suis arrivé au niveau où je suis maintenant parce que j’ai travaillé dur avec beaucoup de volonté. Je me suis, sans cesse, poussé à devenir un meilleur joueur de basket. Je me souviens d’une citation de ma maman quand j’étais plus jeune : « Si tu es assez bon, ils vont te trouver ». Venant d’une petite ville, j’ai toujours eu cette phrase dans le fond de mon esprit. En 2003, tu as brillé avec la sélection AAU du Minnesota. Est-ce cela qui t’as permis d’attirer l’oeil des recruteurs ? Jouer au basket AAU a certainement aidé à mettre mon nom en valeur auprès des coaches de lycée. C’était une merveilleuse opportunité de pouvoir jouer différents tournois devant des centaines d’entraîneurs et aussi de voyager dans tous les Etats-Unis. C’était nécessaire pour moi de jouer dans le circuit d’AAU pour obtenir plus de renommée.

Pourtant tu n’as pas reçu beaucoup d’offres d’universités de « première division » à ta sortie du lycée, comment l’expliques-tu ? Un bon nombre d’écoles se sont intéressées à moi mais je n’ai eu que quelques offres de bourses scolaires. Je crois que les gens m’ont sous-estimé et c’était un des facteurs clés qui a fait que je n’ai pas reçu beaucoup de propositions. Pourquoi avoir choisi North Dakota State ? J’ai choisi NDSU parce que le staff m’a vraiment plu, mais aussi parce que j’avais des connaissances de l’AAU qui jouaient dans cette équipe. C’était plus facile pour moi de m’engager avec eux. La première saison, tu es «redshirt» (donc interdit de jouer) puis tu es tout de suite la star de l’équipe. Peux-tu nous décrire ces années pour toi ? Je crois que les autres joueurs me respectaient car j’ai travaillé extrêmement dur pour essayer d’être le meilleur joueur possible. Je voulais représenter North Dakota State au niveau national et non pas juste au niveau local. Je me suis donc efforcé de travailler chaque jour. Je pense que ça a indiqué aux autres joueurs quel type de leader j’étais et ils ont respecté ça.

J’avais des sentiments mitigés après le match. J’étais extrêmement peiné parce que nous avions perdu la 3ème prolongation, mais dans le même temps je réalisais que j’avais écrit l’histoire. Individuellement, c’était un magnifique accomplissement, mais en même temps j’étais vraiment déçu d’avoir perdu le match. Mais tu n’as pas été drafté, tu t’y attendais ? Je ne savais pas si j’allais être drafté ou pas. J’avais fait des workouts avec 12 équipes NBA mais aucune n’a retenu mon nom. Pour moi, ce n’était pas du tout une déception. J’ai continué à travailler dur et je savais que le basket allait être d’une façon ou d’une autre ma profession. Tu as participé ces deux dernières années aux Summer Leagues, la NBA reste ton objectif ? Ca a été une belle expérience. Je pense qu’atteindre la NBA est le plus grand rêve de joueur de basketball donc, bien entendu, ça a toujours été mon but ultime. Mais si les choses ne vont pas dans ce sens, je continuerais à jouer à l’étranger, et j’en serais très heureux. Au final tu as choisi la France... A part Gravelines, tu as reçu d’autres offres en Europe et dans le monde?

BEN WOODSIDE Lors de ton année senior, tu étais une star. Marquer 60 points dans un match, battre le record de 30 lancers francs en un match de Pete Maravich, qu’est-ce que cela fait ?

JE VOULAIS ÊTRE MICHAEL JORDAN


45,2% 38,3% Durant l’intersaison, j’ai reçu des offres de clubs européens. Cependant, je suis très bien ici à Gravelines. Pourquoi avoir choisi Gravelines alors ? J’ai choisi Gravelines parce que je connaissais la situation dans laquelle je m’embarquais. Je connaissais très bien les joueurs et le staff et ça été une belle expérience l’année dernière. Et je savais que ma fiancée serait installée confortablement ici pour sa première année à l’étranger. Etre soudainement à 10 000 km de chez soi, seul, pendant un an, n’est-ce pas difficile pour un homme de 24 ans ? J’étais seul l’année dernière, mais je suis avec ma fiancée cette année. Quand j’étais seul ce n’était pas trop dur J’avais de supers équipiers qui m’invitaient toujours à passer du temps avec leurs familles et m’entraînaient dans leurs déplacements les jours de repos. Ainsi, ces deux années ne furent pas mauvaises du tout. Tu vis depuis deux ans à Gravelines, tu t’y sens bien ?

Je suis à l’aise avec la situation à Gravelines. Gravelines est proche de nombreuses villes où il y a des choses à faire. Vous avez besoin de vous aventurer hors de Gravelines pour s’occuper mais ce n’est pas mal d’y habiter. Visiter les villes alentours, c’est une bonne expérience. Quelle est ta relation avec Christian Monschau ? Je crois que le coach et moi avons une bonne relation. Jouant pour lui depuis 2 ans maintenant, je comprends vraiment son système de fonctionnement et je sais ce que j’attends de lui et ce que lui attend de moi. Je pense que nous avons une bonne communication durant les matchs, et c’est la clé pour un meneur et un coach d’être sur la même longueur d’onde. Quelles sont tes ambitions pour la suite de ta carrière ? Le temps me le dira ! Mais je sais que je vais continuer à travailler dur pendant l’intersaison et essayer de devenir le meilleur joueur possible. Après avoir joué deux saisons à l’étranger, je sais ce dont j’ai besoin pour me développer et devenir un meilleur joueur.

83,0% Que penses-tu du basket français au sens général ? Je pense que le basket français est assez bon. Il y a un certain nombre de bonnes équipes dans le championnat et c’est toujours un plaisir de jouer dans une ligue où il faut jouer de votre mieux pour gagner les matchs tous les soirs. Tu tiens un blog nommé «Inside my world» qui fonctionne plutôt bien. Pourquoi faire cela ? J’avais l’intention d’écrire le blog pour mes amis et ma famille. C’est un excellent moyen pour les personnes

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INTERVIEW

restées à la maison de garder le contact et de comprendre ce que je fais dans un autre pays. Comment occupes-tu ton temps libre ? Durant la saison, je passe mon temps libre à voyager avec ma fiancée et à visiter d’autres villes. Durant les vacances, quand je ne travaille pas, vous pouvez me voir sur les terrains de golf, à la pêche et me détendre. Qu’aurais-tu fais pour vivre si tu n’avais pas été basketteur professionnel ? Les administrations de la santé ou les ventes de médicaments. Quel était ton idole en grandissant ?

Je voulais être Mike ! (Michael Jordan)

Aujourd’hui, quel est ton basketteur préféré ? Actuellement, les joueurs que je préfère regarder sont… Lebron James, Kobe Bryant et Derrick Rose. Y a-t-il un autre sport dont tu es fan ?

Baseball.

PORTRAIT CHINOIS

Un livre : la Bible

Les sites internet fréquentés :

Un homme de pouvoir : Dieu

ESPN, NBA.com, Facebook,

Un pays : Homeland (rires)

MSNBC

Une ville : Chi-town (Chicago)

Ton équipe NCAA : NDSU Bison

Un objet : un ballon de basket Un chanteur: Hillsong United Un plat : Les lasagnes de ma maman. (Photographie © Fabian Michel)


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9h28

« Thé ou café ? ». Sami « Catherine Ceylac » Driss nous accueille à son réveil. Moustache foisonnante, cheveux ébouriffés, démarche nonchalante. Patrick, le photographe et vidéaste qui m’accompagnera pendant une partie de la journée, et moi-même, débarquons dans son appartement cosy, sur les quais de Bordeaux, aux alentours de 9 heures. Sami nous prépare un thé aux fruits rouges. L’écran plat qui trône dans le salon diffuse les images du match 3 des playoffs entre Chicago et Atlanta. Derrick Rose, même de bon matin, semble toujours aussi en forme. Deux jours avant notre rencontre, j’avais promis à Sami d’apporter les croissants. Chose promise, chose due. Le rendez-vous pris la veille, est fixé à 9h30. J’arrive en avance (évènement extraordinaire me concernant). J’appelle Romain, le digicode étant HS. Il m’accueille en mode t-shirt Team USA. Les présentations faites, je pénètre dans l’antre du strasbourgeois d’origine. D’entrée je remarque la caisse de chaussures qui trône

Le récit de Sami Driss Le récit de Romain Dardaine

(Photographie © FocalFixe)

dans le couloir : une bonne vingtaine de pompes de basket, différentes marques, avec prédominance toutefois de la marque-à-la-virgule. Mon hôte me fait visiter les lieux, en commençant par la terrasse. Là, je suis accueillis chaleureusement (et vigoureusement) par Praline, son chien, bouledogue français croisé. Une fois la parenthèse canine refermée, nous continuons la visite des lieux. Dans le salon, l’écran de télé branché sur Ma Chaine Sport, diffuse le match 3 de la série Hawks-Bulls. C’est le 4e quart. Les Bulls sont largement devant et Rose fait un carton. Romain est plutôt Celtics à l’Est et Mavericks de Nowitzki à l’Ouest. Il pronostique d’ailleurs la victoire de Dallas sur les Lakers (l’histoire récente montre qu’il a vu juste).

9h40 C’est l’heure du p’tit dèj. Je salue Johanna, la compagne de Romain, qui vient de se réveiller. Basketteuse également (niveau N2), elle suit surtout un cursus en Intelligence Economique. Elle m’explique en quoi consiste sa formation : un mélange entre collecte d’informations sur la concurrence et protection des données de l’entreprise. On s’installe en terrasse. En grand seigneur, j’ai ramené croissants et « chocolatines ». Du coup, on en


IMMERSION

Vis ma vie de D

ans le cadre du dernier match à domicile de la JSA Bordeaux, le samedi 14 mai, nous avons eu la chance de suivre durant toute la journée Romain Dardaine et Sami Driss. Ambiance décontractée, la montée assurée depuis 3 journées, du réveil à l’après-match, récit d’une journée d’avant match pas comme les autres : Vivez de l’intérieur la journée d’un JSA.

(Photographie © FocalFixe)

profite pour entamer une discussion autour des termes typiques des bordelais : « gavé », « poche », et donc la fameuse « chocolatine ». Romain me dit qu’il se plait plutôt bien ici, mis à part l’aspect pluvieux. La ville lui rappelle Strasbourg. En même temps question situation, Hyères reste pour lui le summum : « Quand on se lève tout les matins et qu’on a vu sur la mer, c’est difficile de faire mieux ». Son jus d’orange terminé, il part se préparer pour la séance de shooting.

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Récit de Thibaud Brouard et Victor Lemée.

JSA


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9h49

10H

Pendant que nous terminons notre thé, accoudés au bar de sa cuisine Américaine, le meilleur arrière de N1 se sert un café, après en avoir fini avec son thé. « Choisir, c’est renoncer » ? Lui choisi…de ne pas choisir ! Après avoir ingurgité son croissant accompagné de carrés de chocolat, le tout baigné dans le liquide opaque, Sami part se changer. Pantalon de survet gris, veste Enyce sur les épaules, sac à dos sur le dos, crème hydratante bien en évidence dans une poche latérale, il est temps de se rendre à la séance vidéo, prévue à 10h30, avant une petite séance de shooting. Si Sami possède une voiture, elle ne sort que très rarement du garage : « j’aime bien marcher, prendre le tram, respirer l’air Bordelais. C’est une ville que j’aime vraiment. Et depuis la réhabilitation des quais, c’est vraiment agréable de se balader sur les bords de la Garonne, mais aussi dans le centre ».

Direction la salle. 10 minutes d’attente pour le tram. Il ne sera pas à l’heure : « C’est pas trop grave. C’est la fin de saison, mais bon je vais me faire chambrer quand même ». Pour être réglo, il envoie un sms au coach. Il m’explique ce qui a fait la réussite de l’équipe cette année. Selon lui, la bonne ambiance dans l’équipe a joué un rôle important, sur et en dehors du terrain. « Cette année, on n’était pas une somme d’individualités. On était vraiment un collectif. Le meilleur exemple c’est notre défense », avec 67 pts encaissés par match, elle est la meilleure du championnat. La réussite est aussi due à la qualité de l’effectif, calibré ProB, qui offre de multiples options à Alex Palfroy : « Un jour ça peut être Sami (Driss) et moi qui scorent, un autre c’est John (Ford) et Gauthier (Darrigand) ». Dans le tram je lui demande s’il est reconnu par le quidam bordelais. La

réponse est négative, hormis les gamins intrigués par son double mètre. Les joueurs de la JSA n’ont pas la côte de popularité des footballeurs des Girondins (quoique cette année on peut en douter vu leur saison). A Bordeaux, seul le microcosme qui gravite autour du basket sait que l’équipe de la ville est en Nationale 1. « J’espère que l’année prochaine, avec la ProB qui arrive, on aura la salle pleine à chaque match à domicile. Même pour le match contre Denain (2e), l’ambiance n’était pas énorme. Forcément c’est difficile de comparer avec Pau » explique celui qui a connu la ferveur des supporters palois l’année dernière. La salle Jean Dauguet est limitée à une capacité de 2500 places. Il faudra s’en contenter jusqu’à fin 2012 avant l’arrivée programmée de la Grand Arena, qui pourra accueillir jusqu’à 15000 personnes.

Dans le tram, lunettes sur le nez, les gens ne semblent pas vraiment interpellés par la large carcasse de Sami. Seule la caméra qui nous filme attire les regards… et les reproches d’une dame goutant peu le fait d’imaginer sa tête passer à la télé. Mais après quelques minutes de négociations, tout rentre dans l’ordre. Passé par l’IUT de Techniques de commercialisation de Paris, Sami sait trouver les mots pour convaincre son auditoire.

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10h07 Scotché dos aux portes du tramway, Sami, grand fan de BD, me parle de son passé de sportif du dimanche. Joueur très complet (ndrl : 12.1 points à 47% aux shoots, 5.9 rebonds, 3.9 passes et 14.7 d’évaluation), il explique son profil par la pratique de nombreux sport lorsqu’il était plus jeune : « j’ai fait du volley, du rugby, du foot etc… je suis un dingue de sport, que ce soit sur le terrain ou à la télé ». Un carnivore d’efforts qui se souvient encore avec douleur de son expérience « rugbystique » : « franchement, c’est un sport que j’aimais bien, mais arrivé à un certain âge, physiquement, c’était plus possible. J’en ai eu marre de prendre des énormes bouchons à chaque contact, alors j’ai changé de sport ». D’une famille de sportif, et de basketteur « mon grand-frère, ma grande sœur et mes parents ont joué

au basket », Sami se tourne donc naturellement vers la balle orange. Et très vite, un trait de caractère se développe chez le natif d’Antony (92): la haine de la défaite. Sami Driss est donc un affreux mauvais joueur : « ça m’est arrivé de m’engueuler avec ma copine alors qu’on jouait aux cartes. Elle a joué un coup qui ne m’arrangeait pas du tout et je lui ai balancé mes cartes au visage » explique t-il, très sérieux. Quand un Tunisien se révolte…« Mais depuis, tout s’est arrangé avec ma copine hein » distille t-il, un sourire coquin en coin. Sur le chemin, le capitaine des JSA évoque avec regret le manque d’engouement du public bordelais pour son équipe : « j’en discutais avec Pierre Ducasse (joueur de foot des Girondins de Bordeaux) lors de la petite fête organisée à la mairie de

Bordeaux pour l’Association 1 maillot pour la vie, et nous étions d’accord sur le fait que nous avions plus à faire à des spectateurs qu’à des supporters ». Si on ne connait pas les chiffres du taux de remplissage et de moyenne de spectateurs en N1 (selon la Fédération, peu de club communiquent sur le sujet…), avec en moyenne environ 2000 spectateurs par match à la salle Jean Dauguet (selon le club des JSA, sur les derniers matchs à domicile), on pourrait penser que les joueurs Bordelais ne sont pas les plus à plaindre. « Des fois, ça manque un peu de folie dans les gradins, c’est dommage » surenchérit le capitaine des jaunes et noirs.

JSA VS YMCA Une folie dont font parfois preuve les joueurs ! « Tu vas voir, après le shooting, il y aura ce qu’on appelle le jeu de la salope » me prévient Sami, dans le tram. « En fait, c’est un concours de shoot du milieu de terrain auquel participent tous les joueurs ». Et celui qui perd doit non seulement apporter les croissants la semaine d’après, mais doit aussi subir les moqueries et les insultes (dont celle de l’intitulé du jeu) de ses partenaires. « J’te promets, faut pas que je perde, parce que quand je gagne, je suis un traqueur ! Et j’en connais un paquet qui veut me le faire payer. Si je perds à ce jeu, les gars n’auront aucune pitié pour moi » prévient t-il, mi blagueur, mi-soucieux.


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10h25 Arrivés à la salle, Romain Caille, Gauthier Darrigand, Mamoudou Sy, John Ford, Robin Caillaut et Laurent Perrin sont déjà présents. Au compte gouttes, Miloud Doubal, Ahmed Fellah, Alioune M’Boup et Martin Diaw suivent peu de temps derrière. Le président Boris Diaw est lui aussi présent. Ca check dans tous les sens. Julien Tauzin, la mine réjouie, et Alex Palfroy suivent le pas. Ne manque plus que Romain Dardaine, et Thibaud, notre reporter catch and shoot. Pendant ce temps là, Miloud Doubal explique comment il a réalisé sa coupe à l’iroquoise, très en vogue chez les nba’ers en ce moment : « j’ai posé un bout de strap depuis le front jusque dans la nuque, et avec la tondeuse, j’ai rasé autour ». Une explication qui provoque le sourire Gauthier Darrigand : « j’en attendais pas moins de ta part » lance t-il avec son accent landais prononcé. Oui car pour le dernier match de la saison, les joueurs ont convenu d’une petite coquetterie : « ceux qui ont de la barbe doivent se laisser la moustache, et les autres doivent se faire une coupe iroquoise ». Une équipe des JSA très YMCA !

« Lui, il a un profil à la Dirk Nowitzki » Avec un quart d’heure de retard, Romain et Thibaud arrivent enfin. Alex Palfroy et Julien Tauzin nous donnent la permission d’assister à la séance vidéo dans une toute petite salle, bas de plafond. Accroupi, je bois les paroles du coach bordelais, qui explique à ses ouailles les spécificités de chaque joueur adverse tout en abordant quelques situations offensives du Puy : « lui, il a un profil à la Nowitzki, dans son apparence et dans ses

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10h45 attitudes. Beaucoup de pump fake dans la raquette… Lui, Pistre, c’est un shooter, il n’a pas peur de prendre des tirs à 9m, donc, à surveiller »… Les joueurs écoutent, tout en dégustant des croissants apportés par Mamoudou Sy (le dernier perdant du jeu de « la femme de petite vertu »). 20 minutes plus tard, tout ce petit monde sort de la salle obscure pour retrouver la lumière de la salle Jean Dauguet.


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11h20 La séance de shooting débute dans une ambiance détendue. Pour l’occasion, les joueurs se sont mis d’accord pour arborer soit la moustache, soit la « mohawk » sur le crâne. Sami Driss a choisis la première option et le moins qu’on puisse dire c’est que le résultat est plutôt insolite (photos). Romain s’est distingué de ses partenaires. Il a rajouté une touche perso sur ses ongles : les trois lettres J.S.A, sur trois doigts différents et sur des tons de couleur flashy que Vincent McDoom n’aurait pas renié. « C’est si jamais je plante des trois points ce soir. » (Il finira la rencontre avec un beau 0/4 derrière l’arc). Alex Palfroy prend ensuite l’équipe pour réviser les phases défensives. Deux ou trois systèmes du Puy sont passés en revue. Pour cinq minutes pas plus. Vient ensuite le jeu hebdomadaire, le concours des samedis matin, appelé le jeu de la salope. Romain m’en a parlé un peu plus tôt dans la journée. Il s’agit de mettre un shoot du milieu du terrain, le dernier qui le rentre est le perdant. La « salope » de la semaine doit amener les croissants tous les jours de la semaine qui suit. Mais aujourd’hui, c’est LE grand concours : le perdant devra, pour le repas du lendemain avec les sponsors, être « l’esclave » de toute l’équipe. Avec obligation de vouvoiement. Romain me lance : « il faut surtout pas perdre ce matin. Le perdant là, il va prendre cher ! ».

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11h55 « Je n’ai jamais perdu à ce jeu » Sami est comme un gosse, enivré rien qu’à l’idée de martyriser sa future victime. Thomas Darnauzan est sollicité, mais refuse l’invitation. « You scared boys ! » lâche John Ford. Ahmed (Fellah), pas encore certain du sort réservé a la « salope », prévient : « Moi je me déguise pas en meuf ! ». Avant de commencer, les joueurs se concertent au centre du terrain, et s’accorde sur les modalités du châtiment qui incombera au perdant. Après quelques minutes de débat, les règles sont établies : « celui qui perd devra être aux ordres de ses coéquipiers, à partir de ce soir minuit et toute la journée de demain ». En d’autres termes, lors de la fête organisée sur une péniche en l’honneur des bénévoles, dirigeants et joueurs du club, le perdant devra respecter les volontés, même les plus étranges, de ses camarades. « Comme on risque de bien picoler, je crois qu’il aura du taff » concède Sami. Avant de débuter, Martin Diaw nous lance, confiant : « je n’ai jamais perdu à ce jeu »… Ahmed Fellah est le premier à rentrer son shoot. Première explosion de joie. « Demain je vais traumatiser quelqu’un ! » crie le meneur. Le soulagement est intense. Suivent Ford, Doubal etc… Après 10 bonnes minutes, ne restent que Darrigand

(qui shoot uniquement de sa mauvaise main, la gauche, car blessé à la droite), Diaw et le jeune Laurent Perrin. Ce dernier laisse vite ses deux partenaires se débrouiller entre eux (voir vidéo). Ceux qui ont déjà rentré leur shoot, Fellah en tête imposent une grosse pression sur les deux malheureux survivants : « t’as la

pression gros !! » à l’intention de Martin Diaw. Rapidement, Darrigand fait « money in da bank » et laisse Diaw seul dans son désarroi. La plupart de ses coéquipiers se jettent sur lui, et le chambrent, déjà (voir vidéo)… Si la confiance en soi est le premier secret du succès, elle a, ce jour là, surtout tué Martin Diaw !


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« New-York, c’est chez moi » Nous passons le chemin du retour en présence de Romain (Dardaine) et Thibaud. Ca tchatche basket, NBA. Au passage, je signale à Romain que sur sa page facebook, ses sportifs préférés sont Griffin, Nowitzki et… Gauthier Darrigand. Ok, Gauthier a largement le niveau Pro B et Pro A, mais de la à militer pour qu’il s’inscrive à la prochain draft… Ca sent la hype à plein nez ! Romain et Thibaud nous ont faussés compagnie à l’arrêt Porte de Bourgogne. Notre voyage s’arrête lui aux Chartons. De voyage, justement, il en est question. En disputant le dernier match de la saison, forcément, Sami pense déjà aux vacances : « je ne pars pas beaucoup à l’étranger. Mais j’avoue que New-York, c’est une ville à part. Là-bas, c’est chez moi. J’y suis allé 3 fois déjà, et je m’y sens toujours bien, à l’aise ». Pas très original me direz-vous, c’est vrai. Mais s’il avait dit « Guéret, c’est chez moi », ça l’aurait moins fait non) ?!

13h Une fois la douche prise, on peut passer à table. On s’installe à l’intérieur, le temps n’étant pas au rendezvous. Le chien est toujours surexcité, comme on l’a laissé en partant le matin. Romain nous dit qu’habituellement pour lui c’est « steack-pâtes » le jour de match. Mais exceptionnellement, Johanna a mis les petits plats dans les grands. Autour d’un bon repas, les langues se délient. Notre hôte nous raconte l’épisode le plus douloureux de sa jeune carrière. Lorsqu’il était espoir à Nancy, durant un entrainement, son fémur se casse. En 3 parties. L’opération dure trois heures. Il était deve-

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«J’étais devenu vert » nu « vert » selon lui, perdant beaucoup de sang. Romain est même resté pendant un moment en fauteuil. Quatre mois après son opération, lors d’un rendez-vous avec le médecin, celui-ci lui avoue qu’il le pensait perdu pour le sport de haut niveau. « Cette période de ma vie m’aide à relativiser. J’ai la possibilité de faire du basket mon métier, ce que j’ai toujours voulu. Beaucoup de gens n’ont pas cette chance ». Il nous avoue également qu’il fait très attention à son hygiène de vie depuis lors. Lien de cause à effet : à la suite de cet accident nancéen, il n’a plus eu de gros pépin physique.

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J’en profite pour parler avec lui de son parcours, qui l’a amené de l’Alsace à la Gironde. « J’ai été repéré à 15 ans et je suis parti jouer pour les cadets de l’ASVEL. Mais quitter à cet âge mes parents et mes amis, ça n’a pas été facile. Je ne me suis pas adapté ». Au bout d’un an, Nancy souhaite l’intégrer dans son centre de formation. Il accepte. Il y restera trois ans, gagnant la coupe de France cadet en 2006. Romain se blesse au fémur en janvier de la dernière année, alors qu’il faisait une saison énorme. Il prend ensuite la direction du sud. Il reste deux ans à Hyères où il joue avec les espoirs, tout en intégrant par ailleurs le groupe pro. Lors de la seconde année, il termine avec la meilleure évaluation du championnat espoir. Il ne joue cependant que des bouts de match en Pro A. Il décide alors, avec son agent, Alain Larrouquis, de descendre d’un échelon et de participer au projet de montée des Palois. Après une période d’essai prometteuse, il espère pouvoir faire sa place dans l’effectif de Didier Dobbels. « J’ai fait des matchs de malade en pré-saison. Le premier match de l’année je joue 20 minutes et après plus rien. J’ai jamais eu d’explications. » De son passage dans le Béarn, il en reste principalement ses rencontres avec Lamine Sambé et Nando Raposo, avec qui il a gardé contact. Dans ce contexte il souhaite prendre un nouveau départ. Par chance, Boris Diaw alors en pleine qualification pour le championnat d’Europe 2009 avec l’équipe de France, est marqué par ses prestations de pré-saison paloise. L’été suivant, le sachant sans club, Boris rappelle Romain pour faire partie de l’effectif bordelais. Sans hésiter, il signe à Bordeaux. « Pour l’instant c’est pas mal : en deux saisons pros, j’ai fait deux montées. Par contre l’année prochaine, ça risque d’être plus compliqué » me dit-il en souriant.

13h08 Trêve de palabres, il est l’heure du repas du guerrier ! L’estomac gronde, et les effluves d’oignons, de steaks et de sauces tomates ne font qu’amplifier ses rugissements. Tout en écoutant un album du coffret des 15 ans de la radio Génération 88.2, Sami s’affère en cuisine. « J’aimerais aller voir plus de concert » explique t-il tout en coupant ses oignons, « mais vu ce qu’il se fume pendant certains d’entre eux, j’évite », les contrôles anti-dopage sont implacables. « J’aime bien le reggae ! J’écoute aussi pas mal de hip-hop, pas mal de trucs en fait ». Sami Driss éclectique. Le repas est aussi l’occasion de parler de ses origines tunisiennes, et de sa sélection en équipe de Tunisie, en 2007. Ou plutôt d’une sélection qu’il ne pourra jamais honorer, la faute à une blessure au genou. « Je suis Tunisien du côté de mon père, et j’avais la possibilité de participer à la Coupe d’Afrique. De voir les autres jouer, de ne pas pouvoir honorer une sélection,

(Photographie © FocalFixe)

c’est assez frustrant. J’ai un souvenir mitigé de cet épisode » peste-t-il. Spécialiste du bœuf bourguignon, Sami nous a concocté pour l’occasion un plat à base de riz, de steak haché, d’oignons, de sauce tomate et d’harissa : « je cuisine un peu, sauf quand j’ai vraiment la flemme ». Une cousine de la flemme, la fatigue, va l’envahir après en avoir fini avec son yaourt, en guise de désert. Confortablement enfoncé dans son canapé, ce sont les bruits de coups de feu du film « Iron Man 2 » qui bercent Sami pour le porter finalement dans les bras de Morphée. Même les formes envoutantes de l’actrice Scarlett Johansson n’arrivent pas à le maintenir éveillé. Et mesdames, au risque de vous décevoir, et d’ébranler le mythe…. Sami Driss ronfle ! Oh attention, pas bien fort. Mais il ronfle. Levé tôt (et couché tard, surtout), je me prends à l’imiter. Je parle de dormir bien sur. Car moi, je ne ronfle pas. 40/45 minutes plus tard, nous émergeons.


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14h20 Intérieur sport, dress code et bières Télécommande en main, Sami zappe entre le rugby, le sport auto, le foot anglais et… le dernier Intérieur sport, sur la Chorale de Roanne ! « C’est frais ça ». Devant l’émission, Sami commente : « Jean-Denis Choulet, j’ai un peu de mal avec lui, il ne fait jouer que des étrangers. En France, on ne fait pas assez jouer les jeunes. Il faut laisser s’exprimer ces jeunes qui sortent des centres de formation, les laisser faire des conneries sur le parquet, sinon, comment tu veux qu’ils apprennent, qu’ils acquièrent de l’expérience ? » En observant Ricky Davis visiter une fabrique de fromage, et en écho à mes propos sur la beauté des images et des paysages capturés par les caméras de Canal+, Sami lâche : « à Roanne, ils ont une bonne équipe de basket, mais sinon, il n’y a rien là-bas ! C’est dingue », tout en dégustant son croissant tout juste baigné dans son café (bis).

Génération 88.2, Fifa 2011 et ronflements Le repas terminé, la table débarrassée, on s’installe dans le salon. Je lui demande à Romain ce qu’il à l’habitude de faire avant ses matchs : « en général pas grand-chose. Je fais un tour sur les sites de basket, l’Equipe, basketusa, catch&shoot. Je ne lis pas trop en dehors des magazines lorsqu’il y’a des interviews intéressantes. Je regarde la télé, je joue à la console et puis je fais une sieste d’un peu plus d’une heure. » Je lui propose

14h de relevé le défi : un petit match Fifa. Première rencontre, Inter-Chelsea. Drogba vendange. Résultat, je me prends 3-0. Revanche, OM-Valence. Même résultat, un gros 3-0 et encore ça aurait pu être plus méchant. Même « j’ai-pas-touché » Brandao met un but. Je décide d’arrêter le massacre. « C’est pas forcément un bon signe. Je préfère perdre à la console pour être bon sur le terrain. On verra ce soir ! »

Le soir, les joueurs et certains membres du staff se rendent dans une boite de nuit très « sélect » de Bordeaux. Dress code obligatoire ! Basket-jean-chemise, streat-wear classe. Ça va se déchaîner sur le dance floor ! Alors que nous sortons pour aller nous balader dans les rues de Bordeaux, comme Sami en a l’habitude avant les matchs, son téléphone ne cesse de sonner. Ça sent le grand soir. Sur le parquet, et après l’effort : « mec, sape toi bien ce soir, c’est sélect comme boite ! Non, ne met pas tes chaussures blanches mec, tu sais bien que tu vas te faire charrier pendant toute la soirée ». Après avoir flâné une bonne demiheure dans les entrailles de Bordeaux, sous une chaleur moite, assez désagréable, nous prenons place à « L’alcazar », un bar situé rive


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droite. Sami me demande ce que je veux boire, tout en se permettant de guider mon choix : « si j’étais toi, je prendrais une bière ». Et comme j’ai pour principe de ne jamais discuter les choix d’un capitaine, je m’exécute sans moufter ! Lui préfère prendre un café… avant qu’un ami d’enfance ne nous rejoigne et lui soumette l’idée d’une bonne bière ambrée. Café + bière = 13 points, 8 rebonds, 8 passes décisives le soir même. Mélange détonnant ! Il fallait y penser.

18h10 DJ Ronny Turiaf À notre arrivée à la salle, c’est un peu la cours de récré. L’équipe dirigeante, du président Denis Lacampagne (qui en profite pour nous dire que la « rumeur Michon à Bordeaux » est infondée) aux bénévoles qui s’activent en coulisse pour que l’avant, le pendant et l’après match soit réussi. Des pancartes aux jeux de mots bien

sentis fleurissent le long des tribunes. Ronny Turiaf, présent pour l’occasion, s’occupe de la sono. Du Rick « Ricky Rozay » Ross résonne dans Jean Dauget. Après s’être improvisé DJ, Ronny rejoint Hamed Fellah et plusieurs dirigeants et bénévoles au milieu du terrain pour un concours de shoot. Pas de doutes, sa place est bien dans la peinture. La salle se remplit. Pour ce dernier match de championnat, le club des JSA a décidé de distribuer à tous les spectateurs un t-shirt noir et blanc, au couleur des JSA avec l’inscription « JSA Bordeaux, Champion de France de N1 ». Cap’tain Sami semble lui aussi détendu, serein. Il prend même la pose pour les photographes pendant qu’il s’étire. Sa moustache, très « Hitlérienne », intrigue. Gauthier Darrigand a lui aussi opté pour la moustache, mais lui semble avoir adopté un style plus rétro encore. Le speaker débarque de nulle part, déguisé en Batman (ndlr : mais pourquoi ??!). La température, déjà élevée à l’extérieure, monte encore d’un cran dans la salle.

19h49 Un match, des bières (bis) et des naïades Après avoir remercié le public de son soutien, Boris Diaw va trouver place juste derrière le banc, aux côtés de Thomas Darnauzan et Ronny Turiaf. Les deux joueurs NBA, et notamment le pivot des Knicks, avaient, semble-t-il, un petit creux durant le match. Vérines et autres encas leur sont servis. Le plateau comportant les mets est vite désert. Une vérine dans la bouche de Ronny Turiaf, c’est comme mettre Earl Boykins à côté de Manute Bol, ça paraît minuscule !


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20h Le coup d’envoi fictif est donné par Boris et Ronny. Le dernier match de la saison peut débuter. Les Bordelais, sans doute moins concentrés qu’en temps normal, se font dominer lors du premier quart (17-24), notamment à cause du 3/3 de Damien Pistre longue distance. Les joueurs d’Alex Palfroy resserrent la défense dans le second quart et reviennent au score (34-34). Et après une entame compliquée, les JSA vont vite prendre la mesure de leur adversaire, notamment grâce à la polyvalence de Sami Driss (13 points, 8 rebonds, 8 passes décisives donc), à l’adresse intérieure de John Ford (15 points et 6 rebonds) et extérieure de Miloud Doubal (14 points à 3/7 à 3 points). Score final : 78-63. Les joueurs reçoivent le trophée de champion de N1 et sont lancés pour une nuit de folie…

22h30 Après les traditionnelles photos souvenirs des vainqueurs, exposées le lendemain dans les journaux locaux, tout ce joli petit monde, Sami en tête, rejoint les vestiaires. 15 minutes plus tard (ou 40mn pour d’autres…), Sami sort une première fois, bière à la main, sourire jusqu’aux oreilles. Dans le même temps, de charmantes demoiselles, Naïades parées de leurs plus beaux habits d’apparat, se massent autours de Thibaud et moi. Nous ne nous doutions pas que notre pouvoir

de séduction était si puissant. Très vite, nous déchantons. Ces dames ne sont pas là pour nous. Elles ont d’autres desseins pour la soirée. Et nous n’en faisons pas partie. Tant pis. De toute façon, nous sommes fatigués…


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23h Romain sort le dernier de la douche, « comme à son habitude » d’après Johanna. « Je n’aurais pas du gagner à Fifa, je l’avais dit. Je finis à 6 pts. » Peu importe les statistiques, les joueurs vont pouvoir fêter (avec excès ?) une belle saison conclue par une victoire ce soir. Le rendezvous est donné l’année prochaine, un étage au-dessus. Avant de tirer notre révérence, nous saluons nos « siamois respectifs », Sami Driss et Romain Dardaine. Mais avant, Romain repart dans les vestiaires pour nous offrir son sur-maillot et celui de John Ford (ndlr : des sortes de robes de chambre, pour le commun des mortels, enfin ceux qui n’ont pas la tête dans les nuages). Martin Diaw, MVP de la nuit.


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23h La journée s’achève pour nous. Nous passons le flambeau aux joueurs de JSA, qui comptent dans leurs rangs des « MVP de la nuit » (en plus d’en posséder un sur le parquet). « Martin, c’est de loin le plus fêtard d’entre nous ». Le capitaine sait ce qu’il dit, il connait bien ses troupes. Sami est à la tête d’un collectif soudé, sur et en dehors du parquet. Le 5 de départ, Darrigand-Driss-Doubal-Dardaine et Ford (tous en Pro B l’an dernier à l’exception de Sami) retrouvera la Pro B, avec la ferme intention de s’y faire une place, cette fois-ci. Avec la naissance du centre de formation, l’arrivée de l’Arena, un entraineur de renom et un président de choix, l’équipe du capitaine « couteau-suisse » semble filer vers un avenir radieux. Et comme dit le dicton : « quand la mer est tranquille, chaque bateau a un bon capitaine. » Les JSA possèdent le leur. Et il se nomme Sami Driss.

(Photographie © FocalFixe)

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WRI VS G Depuis deux ans en Pro A, Rasheed Wright et Tommy Gunn forment un duo ultra complémentaire sur les lignes extérieures du PB86. Avant la fin de saison et le probable départ de Tommy Gunn, ils se sont livrés à une interview croisée.


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IGHT GUNN Le choc US de Poitiers !


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Q

uels sont les défauts et les qualités de Tommy Gunn ?

dormir me permet de trouver un peu de paix en moi.

Rasheed Wright : Il n’a pas de défauts, c’est un bon mec. Il n’a que des qualités. C’est un bon pote, un bon coéquipier. Il est très athlétique. Il a un gros cœur.

R.W : On a un petit jeu de mains avant le match mais sinon, je ne crois pas que Tommy ait de rituel. Je tape le cœur de chacun de mes coéquipiers avant que la partie débute. Je ne le fais pas très fort mais solide (rires) . C’est juste pour dire « On y va ! »

Et inversement Tommy quels sont les défauts de Rasheed ? Tommy Gunn : «Les défauts... il est moche (rires) ! Non sincèrement les qualités, c’est un shooteur, un scoreur ! Je pense qu’il sait tirer le meilleur de lui-même et de ses coéquipiers. Selon moi, c’est une qualité parce qu’il n’est jamais facile de trouver la bonne alchimie dans une équipe. Celle qui fait gagner. En dehors du basket, c’est un bon ami. J’apprécie sa famille. C’est toujours plus facile de lier de telles amitiés quand on est entourés de gens biens, dans le basket ou en dehors.» «Pensez-vous être complémentaires l’un et l’autre ?» T.G : Oui ! Sur le terrain et en dehors. Il n’y a aucune raison pour que notre amitié s’arrête avec le basket. On est de vrais amis, et pas qu’au basket. R.W : Oui parce que son point fort, c’est mon point faible et inversement. Il pénètre et moi je tire, ça marche ensemble. C’est beaucoup plus facile pour moi quand Tommy est sur le terrain. Tout le monde fait gaffe à ses pénétrations et je peux prendre des tirs ouverts. Vous avez des rituels d’avant match ? T.G : J’essaie de faire une sieste avant le match, C’est une chose que je fais tout le temps, cela me donne plus d’énergie. Si je ne le fais pas, je pense sans arrêt au match alors que

T.G : Il y a autre chose aussi concernant Rasheed.. A chaque fois qu’il

enlève son t-shirt (Tommy Gunn commence à imiter une personne qui se la raconte, montre ses muscles), il pense qu’il est sexy (rires) ! (Tommy continue son imitation, ce qui fait beaucoup rire Rasheed Wright) Il est fou ! (rires) Vous avez un surnom au sein de l’équipe ou en dehors ? T.G : Hum, les gens m’appellent « The machine ».

RASHEED WRIGHT

27,9 mn 11,9 pts 3,1 rbds

38.3% 36.4%

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1,1 pds 8,0 eval


FACE A FACE

Pourquoi ? T.G : Je ne sais pas (rires) d’où ça vient mais j’aime bien ! R.W : The machine Gunn, c’est juste un jeu de mot sur son nom. Moi c’est Sheed ! Tout le monde m’appelle comme ça dans ma famille. C’est mon seul surnom.

Pourquoi avez-vous choisi Poitiers ?

mn 19,7

T.G : La première fois que je suis venu ici, c’était un petit club mais ils voulaient gagner. Ils jouaient dur et très bien. Quand j’ai eu l’opportunité de venir, j’ai vu qu’ils gardaient à peu près la même équipe donc c’était déjà un bon point en ce qui concerne l’alchimie et mon intégration. Il y avait aussi mon coéquipier d’alors, Kenny (Younger qui a joué à Brest en même temps que Tommy ndlr) qui était là. Donc pourquoi ne pas venir ici avec lui ? Je suis venu ici une première

TOMMY GUNN

pts 7,8 rbds 2,4 pds 1,3 eval 6,4

44.3% 38.3%

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Photographie, © Alexis Réau

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fois et la raison pour laquelle je suis revenu ou plutôt d’abord la raison pour laquelle je suis parti est simplement parce que je voulais jouer en Pro A. On a perdu la finale de Pro B en 2008 face à Besançon et ils m’ont donné l’opportunité de les rejoindre. Dès que Poitiers est monté en Pro A, j’espérais vraiment qu’ils m’appellent. Ils l’ont fait. Je suis revenu tout de suite.» R.W : J’ai choisi Poitiers car, avant mon arrivée, il y avait déjà une bonne base. Il y avait déjà un groupe de joueurs qui avait l’habitude de gagner ensemble. L’année où Tommy jouait ici, il avait perdu en finale. Il y avait juste Tommy et Thomas (Darnauzan) qui étaient partis. C’était une équipe où je pouvais gagner et jouer mon jeu. Après une expérience assez mauvaise en Pro A, je voulais prouver quelque chose. Quand vous avez su que Tommy Gunn revenait, qu’avez-vous pensé ? R.W : J’étais content qu’il revienne. J’avais toujours entendu que c’était un bon joueur, très athlétique, qui pouvait marquer des points. En plus, il connaissait les joueurs, le système, tout. C’est un plus ! Vous êtes vraiment proches de Kenny, non ? T.G : Oui, je connais Kenny depuis plusieurs années maintenant. C’est l’un de ces mecs à qui l’on peut parler quand on en a besoin. R.W : C’est ma troisième année avec Kenny mais j’ai aussi une relation spéciale avec les autres joueurs. Avant que j’arrive ici, je les ai joués souvent avec Saint-Vallier en Nationale 1 et en Pro B. Quand je suis arrivé, je connaissais déjà un peu tout le monde. C’était plus simple. C’était


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FACE A FACE

un peu bizarre de les retrouver mais c’est bien aussi. Par exemple avec Sylvain (Maynier), on a souvent joué face à face. Je l’ai donc découvert comme compétiteur. Il y a d’autres joueurs dont vous êtes proches ? T.G : Oui, alors déjà ici sur le terrain, tout le monde est cool, tout le monde comprend le jeu. En dehors du terrain, ils sont cools aussi. On ne voit pas les joueurs français autant que l’on se voit entre Américains mais on est comme une famille. Vous savez, les Américains ont tendance à plus rester entre eux ici à Poitiers. C’est pourquoi je pourrais être bien plus proche des joueurs français de l’équipe mais bon, tout le monde est vraiment cool au basket et en dehors. C’est vraiment comme une famille. Quelle est votre salle préférée en France ? R.W : C’est une question difficile. À Saint-Vallier, j’ai quelque chose qui m’est resté de là-bas mais je dois dire Lawson-Body. En 2009, on est montés en Pro A, c’était une saison magique dans cette salle. Les supporteurs étaient presque sur le terrain avec nous. Comme on a gagné là-bas et qu’on n’a pas rejoué dans cette salle depuis, ça reste magique. T.G : En France. sûrement Bercy ! (rires) Bercy est vraiment bien, c’est très grand. La-bas, les meilleurs joueurs qui ont joué ici en France s’y sont affrontés donc c’est forcément quelque chose d’y jouer. Mais sinon, je dois dire que je suis d’accord sur Lawson-Body, c’est une salle où tout le monde était à fond derrière nous et l’ambiance nous donnait énormément d’énergie pour se surpasser. Pourtant à Bercy, vous aviez perdu ? T.G : Oui ce n’était pas une bonne expérience ! (rires) J’ai quand même de bons souvenirs là-bas. Vous pratiquez d’autres activités que le basket-ball ensemble ?

T.G : Oui, on essaie pleins de choses différentes comme le bowling. Je suis le meilleur presque partout ! (rires) R.W : On joue à la console aussi. Des fois Kenny gagne, des fois Carl gagne, des fois je gagne : c’est compétitif. Il y a deux jours, j’ai gagné deux fois ! Photographie, © François Pietrzak

Pourquoi vous sentez-vous ici comme dans une famille ? T.G : Je pense que c’est surtout parce qu’ici, il y a le même noyau de joueurs depuis un moment déjà. Il existe donc une alchimie entre nous qui nous rend meilleurs. Les autres équipes dans lesquelles j’ai joué, elles changeaient souvent de joueurs et c’était difficile alors de tisser de vrais liens. En fait, je n’ai jamais vu ce genre de choses autre part qu’à Poitiers.

Quel est ton sentiment par rapport à cette saison qui est moins bonne que les précédentes ? R.W : C’est frustrant. C’est la première fois depuis que je suis en France que je perd plus que je ne gagne. C’est une saison où plein de choses sont arrivées. Il y a eu des blessures, on a commencé la préparation tard. Avec tout ça, on perd plusieurs matches de peu de points. Ça, c’est le plus frustrant car ça veut dire que l’on est en forme mais qu’on arrive pas à faire les choses en plus pour gagner le match. Tout les sportifs ont des moments difficiles. Nous, on a eu beaucoup de succès avec cette équipe mais cette saison, on ne réussit pas ce que l’on veut. T.G : Selon moi, on a fait une saison un peu décevante. On a perdu beaucoup de matchs de très peu de points. Il y a des saisons comme ça, vous savez, où l’on doit faire avec les blessures, certains changements dans l’équipe et d’autres choses de ce genre. Mais je ne demande qu’une chose, c’est de revenir la saison prochaine et aider le club à passer un nouveau cap. Pourquoi pas rejouer les play-offs ? On doit garder confiance en ce que l’on fait et c’est mon cas.

En ce qui concerne votre saison en particulier ? T.G : Je pense que je dois être encore meilleur. Je suis quelqu’un de toujours plus exigeant avec moi-même. Je dois continuer à progresser. J’ai eu des problèmes de blessures cette année donc j’ai connu des hauts et des bas mais vous savez, parfois vous gagnez, parfois vous perdez, vous ne pouvez pas toujours être bon mais il faut garder confiance en soi. R.W : Je ne suis pas du tout content de ma saison. J’ai été opéré au pied cet été. J’avais pensé que quand je reviendrais, les choses seraient beaucoup plus faciles, que je n’aurais plus mal. Sauf que j’ai sans doute compensé avec le reste de mon corps et j’ai été blessé de partout. Je n’arrive pas à faire ce que je veux. Des choses ont changé dans l’équipe. Je ne pense plus à moi mais uniquement au collectif. Je suis toujours le même mais les choses sont différentes (lutte pour le maintien ndlr) et on ne joue pas pareil. Je dois m’adapter à ça. Même des choses simples auxquelles je ne pensais même pas avant, aujourd’hui, elles deviennent compliquées. Peut-être que je pense trop. C’est comme ça mais je dois prendre les opportunités


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quand elles arrivent à moi. La révélation à Poitiers cette saison, c’est Evan Fournier. Pensezvous qu’il peut devenir un grand joueur ? T.G : Oui, il travaille dur. Il est très concentré aux entrainements, aux matchs, dans sa préparation. Je pense qu’il sera un très bon joueur. Vous pensez qu’il peut devenir un joueur NBA ? T.G : Je pense que oui, il va grandir encore un peu je pense. Il va prendre de l’expérience en faisant des camps aux États-Unis et en travaillant avec différents coachs. Ici aussi, il joue avec des joueurs plus âgés que lui qui peuvent lui apporter beaucoup. Je pense qu’il pourra vraiment jouer en NBA et surtout réussir là-bas.

Photographie, © Seb Jawo

R.W : Oui. Il travaille dur, il a confiance en lui. Il va apprendre beaucoup déjà en France. Avec son talent, il sera surement le joueur qui va représenter la France dans les prochaines années. Il peut devenir un grand.

On est de vrais amis, et pas qu’au basket.

Vous pensez être ici l’année prochaine ? R.W : Il est trop tôt pour dire ça. Ce que j’ai envie, c’est de rester en Pro A. Quand tout ça sera fini, on verra. Et vous Tommy ? T.G : J’aimerais rester. Quoi qu’il en soit, j’aimerais rester en Pro A. J’aime beaucoup le niveau de ce champion-


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nat et je pense que je peux encore très bien jouer à ce niveau là. J’espère sincèrement rester ici l’an prochain. Pourquoi France ?

avez-vous

choisi

la

T.G : Ce choix s’est présenté à moi. Mon agent m’a donné l’opportunité de venir ici. Il m’a dit que la France était vraiment un bon pays pour jouer, que la compétition y était bonne. Ça a été une très bonne expérience pour moi et je me réjouis de vivre dans ce pays. R.W : Ce n’est pas moi qui ait choisi la France, c’est elle qui m’a choisi. J’ai fait un camp avec plein de scouts de tous les pays et ce sont les Français qui m’ont demandé de venir. Qu’est ce qui vous plait dans ce pays ? R.W : Plein de choses. Comme aux États-Unis, il y a plein de choses que je trouve positives et d’autres moins. Vous prenez le temps pour votre famille, pour votre vie. Aux USA, on est beaucoup plus travailleurs. Ça peut être positif comme négatif mais je vous trouve beaucoup plus humains. J’adore ce pays, c’est ma deuxième maison ici ! T.G : J’aime apprendre d’autres cultures que la mienne. Aux EtatsUnis, on entend beaucoup parler de la culture française. On en apprend un peu à l’école. Mais découvrir cette culture par soi-même, c’est autre

chose. Vous vous faites votre propre point de vue et vous vous faites votre propre «bagage culturel». Venir ici et découvrir tout ça, c’est vraiment ce qui m’a plu.

Que pensez-vous du championnat français de basketball ? T.G : Je pense que c’est un bon championnat, dur à gagner. Vous savez ce n’est pas comme s’il était composé de mauvais joueurs français et d’Américain moyens. Non, les joueurs qui jouent ici et qui viennent

Je n’ai jamais vu ce genre de choses autre part qu’à Poitiers.


FACE A FACE

37.

L’œil de RUDDY NELHOMME

C

Photographie, © Alexis Réau

ici sont de bons joueurs et j’aimerais vraiment le gagner. R.W : C’est un bon championnat. C’est très athlétique. Ce n’est pas le meilleur. C’est sûrement l’Espagne et l’Italie mais ça, c’est une question d’argent. Le niveau d’excellence est là aussi. Si tu fais une bonne saison ici, tu peux aller où tu veux. Aujourd’hui on montre souvent les Américains du doigt pour justifier les performances moyennes de certaines équipes. Que pensezvous de cela ? R.W : Je ne suis pas d’accord avec ça. Pour moi, le basket reste le bas-

ket avec n’importe quel joueur. Quand tu peux jouer, tu peux jouer. Ce n’est pas une question de nationalité. En France, c’est une question de nationalité, pas comme aux USA. Pour moi, cela devrait rester une question de niveau car cela met un mur entre Français et Américains. Les JFL, c’est une connerie parce que pour moi si tu mets un certain nombre de Français et d’étrangers, ça veut dire que les Français ne sont pas capable de jouer... Pour moi, ce n’est pas vrai. Si tu as un niveau de Pro A, tu joues en Pro A , si tu as un niveau de Pro B, tu joues en Pro B, etc.

e sont des joueurs que j’apprécie beaucoup car on a partagé des très bons moments ensemble. La montée avec Rasheed et la montée en puissance du club collectivement avec Tommy. Ce sont des joueurs qui se complètent, qui sont différents. L’un c’est l’explosivité, la capacité à faire la différence sur le premier pas. Rasheed est un joueur beaucoup plus complet, qui vit et meurt par son shoot. Il le fait très bien par moment. Ce sont deux joueurs qui ont été très importants dans la montée en puissance du club et qui ont su aussi prendre la philosophie de ce que l’on fait aujourd’hui à Poitiers.

T.G : Pour moi ce n’est pas un problème. C’est le choix de l’équipe, estce qu’on veut un ou deux ou encore plus d’Américains. De toute manière, on doit jouer avec les règles que l’on nous impose mais je ne crois pas que le problème soit une question de nombre. Une équipe qui veut gagner cherche le plus de talent possible et c’est normal. Le problème se trouve plutôt dans la formation des joueurs.

Propos recueillis par Florian Delage.


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CHEZ NOS VOISINS LES BELGES Par Georges Xouras. Photographie : belgianlions.com Š D.Dumoulin


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G

ravelines n’est qu’à 75km d’Ostende, et pourtant on ne sait que très peu de choses sur nos voisins belges, hormis que Joseph Gomis joue à Charleroi et Luc Louves à Gand. Face au foot, au tennis, au cyclisme et même à la F1, le basket belge a du mal à vivre médiatiquement malgré des résultats en hausse sur la scène européenne, tant en clubs qu’avec la sélection. Visite au pays du surréalisme et du compromis.

L’HISTOIRE L’essor du basket belge peut se situer dans les années 80, dominées par le tandem Ostende et Malines qui s’est partagé tous les titres entre 1980 et 1995 ! Toujours prétendants, les Castors de Braine n’auront jamais eu de titre à épingler à leur palmarès, ce qui aurait récompensé un basket apprécié de tous, et une ambiance incroyable dans son chaudron ! Promu en 1989, le Spirou de Charleroi ne met que 7ans à décrocher son premier titre, après avoir échoué trois fois consécutivement en finale ! Les Carolos ne s’arrêteront pas en si bon chemin, et remportent les 3 titres suivants. Les années 2000 sont donc marquées par la mainmise et le duel au sommet entre Charleroi (5 titres) et Ostende (4) seulement interrompus en 2000 par Anvers (fusionné avec Malines) et en 2005 par l’étoile filante

nommée Bree. Pour autant, tout ne tourne pas rond en Belgique. Après le grand boom des années 2000, où 14 équipes étaient encore en lice, le championnat a péréclité et ne se joue désormais plus qu’à 9 ! Si certaines étaient limitées sportivement, (Huy, Tournai,..), même Bree le champion 2005 et vice- champion 2006, en proie à des difficultés financières, a dû mettre la clé sous le paillasson, faute de licence.

Cette formule a ses partisans et ses détracteurs. Si les managers préfèrent affronter 4 fois les grosses écuries, générateurs de rentrées financières, entraîneurs et joueurs ont du mal à se motiver à une saison interminable où ils jouent constamment contre les mêmes équipes. Avec la Coupe de Belgique, et une finale en 5 manches, certaines équipes pourraient se rencontrer 11 fois sur une seule saison !

Un an auparavant, c’est l’Atomia, club de la capitale bruxelloise qui a dû cesser ses activités en N1, faute de sponsoring pouvant assurer le financement complet d’une saison en N1. Louvain, relégué cette saison-là, a été repêché en N1… à la condition de pouvoir rester au moins deux ans en N1.

Mais que faire ? Le championnat est à la dimension du pays et il est déjà très difficile d’avoir 9 équipes compétitives et financièrement saines (budget de 3millions d’euro en moyenne). Ouvrir un championnat à 12 ou à 14 risque de provoquer une compétition à deux vitesses entre les ténors et les petits poucets. Pour le public, pour les enjeux, pour les rentrées, mieux vaut assister à quatre Mons-Charleroi qu’à deux matchs contre Huy.

Le championnat est donc devenu, de facto, une ligue fermée, Sans pour autant soulever de protestations de la part des pensionnaires de N2, peu d’entre eux voulant prendre le « risque » d’évoluer en N1. La première équipe pouvant réunir un budget conséquent pourra participer au championnat. Cette année, sur les cendres de Bree, un projet limbourgeois a failli voir le jour tandis que les Bruxellois attendent toujours que la Ville mette la main à la poche.

LE FORMAT A l’image de sa situation et de sa structure politique, l’Ethias League est assez alambiquée. Avec seulement 9 équipes, une phase classique de championnat en aller/retour finirait en janvier. La saison régulière se déroule donc en double tour, chaque équipe s’affrontant 4 fois, pour un total de 36 matchs joués avant les play-offs. Les premiers tours se déroulant au meilleur des 3 manches, la finale au meilleur des 5 manches.

Mais des propositions existent, pourquoi ne jouer tous les play-offs au meilleur des 5 manches ? Pourquoi ne pas créer l’équivalent d’une « Semaine des As » ? Pour pimenter le fond de classement, vu qu’il n’y a pas de descendant, les play-offs sont ouverts jusqu’à la 6e place…sur 9 ! Il faut donc 36 journées pour décider de 6 des 9 équipes ! Les 1er et 2e sont exemptés de premier tour, les 3e affronte le 6e tandis que le 4e rencontre le 5e. Alors que le championnat était dans sa 4e phase, 5 des 6 équipes participantes étaient déjà connues. La dernière place qualificative se jouant entre trois équipes, ayant un maigre bilan avoisinant les 35% de victoires ! Oui 35%, la Belgique est le seul pays européen où le classement est établi suivant le pourcentage de victoire. Difficile à lire pour les supporters peu habitués à ce système, mais plus en phase cette année dû aux nombreuses remises de match des équipes participants aux compétitions européennes (Charleroi en Euroligue, Ostende au Final Four de l’Eurochallenge,…)


DOSSIER

Le calendrier s’en trouve surchargé de matchs d’alignement, à tel point qu’Ostende encore engagé sur 3 fronts, a enchaîné un match de championnat le 22 avril, la finale de la coupe le 25, le Final Four de l’Eurochallenge le 29 et 1er mai…et encore un match de championnat le 5 mai ! 5 matchs décisifs pour le club côtier en 10 jours !

LE RENOUVEAU DU BASKET BELGE… ?

Charleroi qui ne fait pas que de la figuration en Euroligue, Ostende au Final Four de l’Eurochallenge, l’équipe nationale qualifiée pour l’Eurobasket pour la première fois depuis 1993, la Belgique enfin sur la carte basket ? A nuancer. Si les parcours de Charleroi et d’Ostende sont remarquables, ceux-ci s’appuient principalement sur un roster majoritairement composés d’étrangers. 5 Belges doivent être couchés sur la feuille de match mais ceux-ci quittent rarement le banc.

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Seuls Christophe Beghin (23min de jeu pour le Spirou) et Quentin Serron (13min) peuvent se targuer d’être des éléments importants de leur équipe. Le championnat est surtout « américain », et composés de joueurs qui ne font que passer, rares sont ceux qui y passent plusieurs saisons. Commencer en Belgique pour espérer aller plus haut, ou y passer pour rebondir. Un coup d’œil sur les plus connus d’entre eux ne fait que confirmer cette impression : Mike Batiste (Charleroi) JR Holden, Ramunas Kaukenas (Ostende) Omar Cook (Mons) Doron Perkins (Bree). Les Belges ont du mal à percer, et les meilleurs s’en vont rapidement sous d’autres cieux. Hervelle,, Tabu, Lauwers, Mbenga, Van Den Spiegel ont rapidement quitté le plat pays pour tenter leur chance à l’étranger, certains avec plus de réussite que d’autres.

L’ÉQUIPE NATIONALE Pour la première fois depuis 1993, la Belgique participera à l’Eurobasket. Qualifiés selon l’ancien système en vigueur (16 équipes participantes), les Belgian Lions ont fini premier de leur groupe devant la Géorgie, la Bulgarie, la Pologne et le Portugal. Versés dans le groupe D à Klaipeda, la Belgique y retrouvera justement la Bulgarie et la Géorgie. Russes, Slovènes et Ukrainiens viennent compléter le groupe. Tirage assez clément, la Belgique peut secrètement espérer accrocher la 3e place du groupe, derrière les Russes et les Slovènes qui semblent hors de portée. Sous l’impulsion de Jacques Ledure, manager national, le chemin a été long mais il a porté ses fruits (info de dernière minute, Jacques Ledure vient d’être confirmé dans sa fonction pour les deux prochaines annéees) .

Photographie : belgianlions.com © D.Dumoulin

Entretien avec l’homme l’équipe nationale.

fort

de


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Le travail paie toujours, et après une campagne solide, on se qualifie en finissant en tête de notre groupe avec 6 victoires et seulement 2 défaites dans un groupe homogène. (Géorgie, Portugal, Pologne, Bulgarie).

Vous prenez en mains la destinée de l’équipe nationale en 2002, un grand chantier, une tâche difficile, par quoi commencez-vous à l’époque ? En effet, un grand chantier à l’époque. J’ai d’abord commencé par observer, voir ce qui n’allait pas. Il faut savoir que depuis la dernière qualification de la Belgique à l’Euro 93, tout était sans dessus dessous, des clans, des conflits, la fédération était désintéressée, découragée, les joueurs ne voulaient plus jouer pour la sélection, c’était une punition d’être sélectionné ! A l’époque, j’étais président de la Ligue depuis 5 ans et je prends en main l’équipe en milieu de campagne (qui se jouait encore en deux phases à l’époque). Coach et manager sont licenciés, vous prenez Giovanni Bozzi. Bozzi venait d’arrêter à Charleroi, il était motivé, et pendant un an, nous avons géré l’équipe, il était important d’observer avant d’agir. Malheureusement, il signe à Liège qui refuse le cumul des deux fonctions. Je discute avec Eddy Casteels, et on repart à zéro, on va essayer de reconstruire quelque chose. On a fait le compte des joueurs, et tout ceux qui ne voulaient plus jouer, sont hors de la sélection. Il ne nous restait même pas de quoi constituer une équipe ! Beghin et Hervelle commençaient tout juste, Roel Moors, Dimitri Doum Lauwers Jef Van der Jonckheid, Wim Van de Keere (aujourd’hui secrétaire

de la Ligue), on a été voir en D2 et D3 avec Pirlo, Lhoest, Bosco et Collette. Les deux premiers ont disparu de la circulation, Bosco joue toujours à Gand et Collette à Liège. Bosco a d’ailleurs quasi commencé sa carrière en équipe nationale. Pas le plus talentueux, mais un joueur important, teigneux, courageux ! Que leur dites-vous à ces joueurs ? On leur annonce directement « vous n’êtes pas ici pour vous faire de l’argent ». Heureusement personne ne venait pour ça, et tout le monde avait le même montant, système toujours en vigueur actuellement et apprécié par les joueurs. On leur dit aussi que l’équipe nationale est un moyen pour se valoriser, de se faire voir. Comment ont réagi les clubs ? Les clubs étaient bien sûr contre, point de vue de l’assurance. J’ai donc souscrit une assurance spéciale (50.000 FB, € 1250) et le problème était résolu. Les clubs ont aussi vu que l’on se professionnalisait. Et sportivement ? Cela a pris du temps, mais cela a toujours eu une courbe ascendante. On s’est extrait de la division B, et depuis on a toujours été en division A. Avant on gagnait deux matchs par an, puis on est monté au fur et à mesure. En 2006, on perd en Tchéquie de 20points, puis on gagne en Belgique contre les Russes de plus de 10points..on se croit lancé… mais on perd tous les autres matchs. Nous

jouons pas mal mais nous sommes inconstants, on ne parvenait pas à jouer convenablement tout le match. Sur 12 mi-temps, les résultats étaient bien meilleurs. En 2007, on était encore en course pour le barrage mais on a fini derrière Israël, juste pour une différence de points. En 2009, on s’en rapproche encore plus, avec le barrage contre la France, avec une victoire en Belgique avant de prendre une rouste en France. (92-54). Vous étiez proches ? Oui, et là on se dit, si ce n’est pas pour 2011, ce sera pour 2013. Finalement ce sera 2011 et la consécration… Le travail paie toujours, et après une campagne solide, on se qualifie en finissant en tête de notre groupe avec 6 victoires et seulement 2 défaites dans un groupe homogène. (Géorgie, Portugal, Pologne, Bulgarie). Vous vous qualifiez, et la Fiba annonce une semaine après que 24 équipes participeront au tournoi. Comment avez-vous vécu cette décision ? Très mal bien sûr. Un véritable scandale. Malheureusement et comme trop souvent avec la Fiba, on subit. On change les lois juste avant l’Euro, et on n’a qu’à se taire ou payer les amendes. On est très mal défendu auprès de la Fiba, et pas que nous les « petits ». On aurait pu éviter une campagne éreintante physiquement pour les joueurs qui auraient pu passer l’été à se reposer, et on aurait pu épargner de l’argent, une campagne de qualification coûte tout de même dans les € 350.000 ! Vous en tirez néanmoins du positif ? Oui car on a la fierté de s’être qualifié selon « l’ancien système ». On aura jamais à se poser la question si on se


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Photographie : belgianlions.com © D.Dumoulin

serait qualifiés, on l’a fait, et pour moi c’est important. C’est l’aboutissement du travail de ces quasi 10 dernières années. A quoi attribuez-vous ce succès ? A un ensemble de facteurs, à tous points de vue. En ce moment, nous avons une bonne génération de joueurs, personnifié par Axel Hervelle. Axel a également joué un rôle de catalyseur, il a toujours été là. Grâce à lui, des joueurs comme Guy Muya, dont la personnalité a évolué, et Tomas Van den Spiegel, dégoûté de l’équipe nationale, sont revenus. Il y a eu un effet « Si Axel y va, nous aussi ». Pour cela, on lui sera reconnaissant pendant longtemps. La signature de Jacques Stas, comme assistant a été importante. Lorsque Eddy Casteels a signé, j’ai eu comme seule condition d’imposer Jacques Stas. Après une année d’observation, je me suis rendu compte du fossé qui existait entre les dirigeants et les joueurs. Peu de dialogue, pas d’osmose, il fallait créer un lien entre les deux. Il y a bien une génération entre les joueurs et le coach et moi… voire deux (rires). Le coach s’occupe de la technique, mais à côté de cela, il y a les petits soucis personnels, la psychologie, les contacts, et Jacques Stas a rempli ce rôle avec brio. Dans ce succès, il ne faut pas oublier les joueurs de D2 et D3 qui se sont joints à certains moments des campagnes, les stages organisés à Dallas, pas si déterminant sportivement mais extrêmement important dans la construction du groupe. Tout le monde a apporté sa petite pierre à l’édifice. Et l’avenir ? Il faut continuer ce travail de construction, mais bientôt on aura une période de reconstruction. Les joueurs commencent à approcher ou dépasser les 30ans. Certains poussent derrière mais ne sont pas vraiment aidés par

les fédérations wallonne et flamande. A part l’équipe A, il faut savoir que certaines compétences sont gérées soit par la fédération wallonne, soit par la flamande. Certains joueurs se découragent rapidement, et plutôt que de faire banquette en D1 rejoignent rapidement la D2, pour jouer et se faire un petit bas de laine. Pas l’idéal pour l’équipe nationale. Et votre avenir ? Mon contrat de deux ans se termine juste après l’Euro. J’ai toujours exigé des contrats de deux ans, pour ne pas s’enfermer, autant pour moi que pour la fédération, ainsi que l’autonomie, un seul patron et c’est tout. Personnellement, la motivation est toujours intacte et si tout le monde est d’accord, j’aimerais continuer. La fédération n’est pas bête et je pense que tout le monde sera reconduit après l’Euro. Le projet est difficile, avec une équipe « ambulante », sans sa propre salle, sans un énorme bud-

get, mais j’aime ce que je fais, et puis quand c’est difficile, c’est plus amusant. Parlons du présent et de l’Eurobasket 2011. Le tirage a été assez clément, que peut espérer la Belgique dans le tournoi ? Rêvezvous du 2e tour à Vilnius ? La grande question est de savoir quelle équipe on emmènera. Hervelle veut venir mais son club n’est pas chaud, Van den Spiegel est gêné par des pépins physiques, quid de Mbenga ? Le noyau est assez large mais pas autant que la France par exemple, où lorsque un joueur déclare forfait, 3 autres sont prêts. On espère gagner 3 matchs dans notre groupe, mais nous ne sommes pas les seuls à penser cela. Il faut être réaliste mais ambitieux, on y va pour le 2e tour.


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LA MÉDIATISATION

TV Même si beaucoup de travail reste à faire, la médiatisation du basket est en augmentation. Il y a quelques années, le basket se résumait à quelques rapides images montées en fin du Week-end sportif, l’émission dominicale de la RTBF (chaîne nationale publique). La RTBF a innové avec la création de Basket One, première émission consacrée au basket belge. Depuis 2005, toutes les télévisions régionales francophones diffusent en direct l’affiche du weekend, la chaîne nationale de la RTBF diffusant un résumé de la rencontre dans Basket 1, intelligemment placée juste avant la diffusion de Studio 1, émission diffusant les résumés de football, un peu comme si TF1 remplaçait Auto-Moto par une émission de basket. A noter également E.K. TV , chaîne de télévision diffusée sur internet, qui a un partenariat avec le club de Mons. Diffusion de match hors championnat (Coupe, Eurochallenge) , interview, reportages inside, tout pour faire le bonheur des supporters montois.

Photographie : belgianlions.com © D.Dumoulin

Ecrasé par le football, le cyclisme, le tennis, le basket belge a du mal à se vendre médiatiquement. Hormis les sites généralistes des plus grands quotidiens, difficile de trouver son bonheur en télévision ou sur la toile.


DOSSIER

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LA TOILE Le fan trouvera quelque peu son bonheur sur http://www.sidelinebasketball.be/ : un excellent site géré par des passionnés qui tentent le pari de se positionner comme site de référence sur le basket belgo-belge. Mais faute de temps et de moyens, l’excellent podcast vidéo a dû être arrêté, et les news commencent à se faire rare. A suivre tout de même. Toujours sur la RTBF, l’ancien joueur Duke Tshomba tient une chronique « Langue de bois » dans la section sport du site de la RTBF. De plus, la personnalité médiatique basket de référence tient également une rubrique vidéo où il explique différents aspects du basket, exercices et mises en situation à l’appui. A découvrir sur http://www.rtbf.be/sport/basket News, photos, résultats, CV des joueurs, … le site de référence de l’équipe nationale, et dans les deux langues nationales. Tout cela sera mis à contribution pour l’Eurobasket. www.basketfeminin.com le site de référence du basket féminin belge, régulièrement mis à jour, très complet. www.ethiasleague.com site en 3langues, mais pas assez fourni en news. Idéal pour suivre l’évolution des matchs en temps réel. Enfin, faute technique à http://www. basketbelgium.be/ , le site de la fédération, qui rien qu’à sa page d’accueil, ne donne pas envie de cliquer ! Manque d’ergonomie, de visuels, bref, de presque tout.


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LA FORMATION Comme dans la plupart des disciplines en Belgique, cette compétence est communautarisée. A savoir qu’il y a donc une aile wallonne et une aile flamande qui ont leur propre centre de formation. On compte également des centres de formation pour certains clubs de N1 (Mons, Liège, Ostende), les jeunes ont la possibilité de se former dans d’autres clubs, en N2, ou via la Belgian Development League. Rencontre avec David Putterie, directeur technique des jeunes au sein de l’Excelsior Bruxelles, pensionnaire de N2.

David Putterie

Le championnat a ressorti la ligue de développement des cartons, mais celle-ci peine. Quel regard portez vous sur la BDL ? (Belgian Development League) La ligue de développement est toujours en construction. Il faudra encore attendre quelques années avant qu’elle ne soit réellement au top. Un point que je ne comprends pas bien, c’est le fait de jouer autant de matchs qu’en N1. Ne prend-on pas le risque de les brûler physiquement, sachant que ces jeunes jouent encore 1 voire 2 matchs en plus sur le week-end. D’autres parts, il serait nécessaire de préciser ce que l’on entend par « espoir ». Cette année nous étions en présence de joueurs ayant un niveau de juniors régionales Malheureusement, les jeunes ne reçoivent pas leur chance en N1 et préfèrent jouer en N2. Pour des jeunes joueurs, jouer en N2 est très intéressant pour différents raisons. Même si l’écart entre les deux divisions est immense, c’est le niveau juste en-dessous du top. Contrairement à la ligue espoir, c’est un championnat avec descente et play-offs. De plus, ils côtoient déjà le monde adulte et pas mal d’excellents coachs belges ayant un goût pour la formation y officient (Fassotte, Bastianini, Vervaeck, Marnegrave, Wilmot) Un jeune a-t-il plutôt intérêt à s’asseoir sur un banc de N1 ou jouer en N2 ?


DOSSIER

Le plus important pour un jeune, c’est de jouer à un niveau élevé, et de disposer de temps de jeu, donc il est mieux pour lui de jouer en N2 plutôt que de cirer le banc en N1. D’un autre côté, en N1, le jeune s’entraîne avec le top niveau, mais sans temps de jeu il y aura un manque. Il y a heureusement des exceptions, comme Gillet (Liège), Serron (Ostende), Libert (Mons-Hainaut) et Steinbach (Alost) qui jouent régulièrement en N1 et, pour certains d’entre eux, ils jouent encore dans la deuxième équipe du club.

La N1 est une ligue fermée, quel est l’intérêt de devenir champion de N2 si personne ne monte ? Etre champion de N2 ce n’est pas rien. L’enthousiasme serait évidemment encore plus grand si le gagnant des playoffs pouvait accéder à la N1. Et puis, de manière générale, l’intérêt d’un sportif est de gagner ! D’ailleurs, peu importe la division qu’on occupe, être champion génère de superbe émotions. Je n’ai jamais vu une équipe championne tirer la gueule.

« La ville de Bruxelles a débloqué énormément de moyens mais toujours à l’égard des mêmes dirigeants. » La N2 se joue encore «classiquement» en 1 phase aller/retour. Quel regard portez-vous sur le format de la N1 ? Le problème de la N1, c’est le manque d’équipe. Bien sûr, avoir un championnat à 12 équipes seraient plus intéressants, mais à condition d’avoir 12 équipes de niveau. Plusieurs clubs ont envie de monter en N1 mais n’ont pas les moyens financiers pour se dire « on fonce ! ». Les derniers échecs (Bree, Atomia,…) ont refroidi plus d’un dirigeant, et aucun ne veut se précipiter à monter sans avoir un portefeuille assez solide. Il y a là matière à réfléchir au niveau des moyens (infrastructures, finances, …) mis à disposition par les régions et les communes.

La plupart des grandes villes belges sont présentes en championnat, sauf Bruxelles. Pourquoi n’y a-t-il pas/plus de grand club à Bruxelles ? Premièrement, il y a une difficulté de fidéliser un public nombreux. Probablement que cela peut s’expliquer en partie par le nombre d’activités possibles au sein de la capitale un samedi soir ou un dimanche après-midi. Et puis, de manière générale, il n’y a que très peu de relais au niveau des médias. Pour revenir à Bruxelles, les échecs du passé (Maccabi, Atomics, Atomia) n’arrangent pas les choses, le public reste méfiant avant de s’identifier à un club, des joueurs. Ce qui est dommage, c’est que la ville de Bruxelles

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a débloqué énormément de moyens mais toujours à l’égard des mêmes dirigeants. Il est difficilement compréhensible que certains dirigeants qui n’ont pas réussi à relever ce défi, sont toujours en place à ce jour. Dans le secteur privé, je doute qu’un administrateur qui amène sa société en faillite soit reconduit dans ces fonctions. L’Excelsior Bruxelles a-t-il vocation à constituer un dossier pour une place en N1 ? Bien sûr, l’Excelsior aimerait accéder à la N1, mais le budget, la structure et les infrastructures du club doivent encore grandir. D’un point de vue sportif, ca n’aurait aucun sens de voir Bruxelles en N1 sans pouvoir constituer une équipe compétitive. Je suis persuadé que les jeunes Bruxellois n’attendent que cela, de pouvoir s’identifier à une équipe de leur ville. Il serait également opportun que des joueurs bruxellois évoluent dans cette équipe.

PS : A l’heure de publier cette interview, David Putterie, ainsi que 2 autres DT, ont donné leur démission, faute de moyens.


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LES JOUEURS

Roel Moors 1m90, 32ans (Anvers)

Maxime De Zeeuw 2m04, 24 ans (Gand)

Christophe Beghin 2m07 31ans (Charleroi)

International, ce distributeur bien bâti (95kilos) a pas mal bourlingué en Belgique, et a joué à l’ASVEL.

International, l’ailier-fort de Gand a été rookie de l’année 2009.

Joueur de l’année en 2002,2009 et 2010, le pivot de l’équipe nationale belge est une valeur sûre du championnat. Très solide à l’intérieur.

LES MEILLEURS ÉTRANGERS

Stefon Jackson 1m96 25ans (Verviers-Pepinster) Meilleur marqueur du championnat, ce combo 2-3 réaffiche en Belgique ses bonnes moyennes aux points qu’il avait dévoilé lors de sa carrière universitaire à UTEP.

Andrija Stipanovic 2m07 24ans (Liège) Le pivot croate fait du bien au secteur intérieur liégeois avec ses 14pts et 7rbds de moyenne.


DOSSIER

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LES MEILLEURS BELGES EN ETHIAS LEAGUE

Photographie © Walter Saenen

Guy Muya 1m93 27ans (Liège)

Tomas van den Spiegel 2m14 32ans (Ostende)

Natif de Kinshasa, le comboguard est de retour à Liège où il est une des valeurs sûres, après un intermède espagnol de deux ans.

Vainqueur de deux Euroligues avec le CSKA, le pivot est de retour à Ostende où il finira vraisemblablement sa carrière.

Demond Mallet 1m86 32ans (Charleroi) MVP de l’année, sans doute le joueur le plus talentueux actuellement en Belgique, Demond Mallet s’est fait une réputation en Allemagne, avant de gagner la Coupe du Roi et l’Uleb Cup avec Joventut.

Matt Lojeski 1m98 (Ostende) MVP 2009, Ostende comptait beaucoup sur lui pour gagner l’Eurochallenge. Inconnu à son arrivée, Lojeski s’est imposé comme une des valeurs sûres du championnat (15pts de moyenne cette saison). Un temps pressenti à l’Asvel.

Joseph Gomis 1m80 32ans (Charleroi) Faut-il encore présenter Gomis ? Après ses soucis physiques qu’il a connu ces dernières années, Joseph Gomis est à Charleroi pour se relancer.


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THOMAS VAN DEN SPIEGEL O

n présente plus Tomas Van Den Spiegel, pivot de 2m14, qui a pas mal voyagé en Europe (Bologne, Rome, Moscou, Sopot, Mariupol, Madrid, Milan), se constituant au passage l’un des plus beaux palmarès (2 Euroligues, Champion de Russie,…). De retour en Belgique après près de 10ans d’absence, Catch & Shoot l’a rencontré.

Tomas, te voilà de retour en Belgique, après 9ans d'absence, qu'est-ce qui a motivé ton retour à Ostende ? Plusieurs choses en fait. J’ai presque 33ans, j’ai joué à l’étranger pendant 10ans, bougeant souvent d’un pays à l’autre, d’un club à l’autre. Je voulais de la stabilité et le projet d’Ostende m’a plu. Après ces 9ans, le championnat belge a-t-il changé à tes yeux ? Je crois qu’il n’y a plus de matchs faciles. Les équipes du top sont toujours aussi fortes mais les autres sont beaucoup plus équilibrées. Sans doute dû au fait que lorsque je suis parti, le championnat se jouait à 14 équipes. Comment se passe ce retour actuellement ? Retrouves-tu le rythme ? J’ai encore besoin d’un peu de temps mais je sens déjà beaucoup de progrès alors que je ne me suis entraîné que quelques semaines. J’ai subi une entorse au début qui m’a freiné également. Justement, ces dernières saisons,

tu as été miné par quelques pépins physiques, comment gèrestu cela ?

3 mois plus tard on gagnait tout. Et à cette époque, nous n’étions pas du tout les favoris. Quelle joie !

Je me sens assez bien, je connais mon corps par cœur. Et avec JeanMarc Jaumin, j’ai un coach qui comprend mieux tout cela, car il sait ce que c’est d’avoir été joueur et de devoir gérer son corps. (NDLR : Jaumin a joué à Malaga, avec qui il gagna la Coupe Korac en 2001, devenant le premier belge à soulever un trophée européen)

Quels conseils donnerais-tu au jeune Tomas Van Den Spiegel qui commence sa carrière ?

Tu as pas mal voyagé durant ta carrière, quels souvenirs gardestu de ces différentes expériences ? Je pourrais écrire un livre. J’en garde un paquet de souvenirs, positifs comme négatifs. Toutes ces expériences m’ont formé comme joueur mais surtout comme personne. Tu as sans aucun doute le plus beau palmarès d'un joueur belge, Deux Euroligues, Champion de Russie, de Belgique, si tu devais ressortir un seul moment lequel serait ce ? La première Euroligue en 2006. J’étais arrivé à Moscou en février et

Je lui dirais de faire plus ou moins le même parcours et de mieux écouter son corps, j’ai souvent trop forcé. Parlons du championnat d'Europe, tu participeras pour la première fois à un grand tournoi avec la sélection, quel effet cela fait ? Super, tout le monde adore faire partie de ce groupe-là. C’est vraiment une bande de potes et on meurt d’envie de réussir cet Eurobasket. Quelles sont les ambitions de la Belgique à ce tournoi ? où peutelle finir ? peut-elle prendre part au 2e tour à Vilnius ? Qu’on se soit qualifié est déjà extraordinaire. Tout ce qui vient maintenant est du bonus. Attention, on y va pour gagner le plus de matchs possibles, ça c’est clair !


DOSSIER

Photographie : belgianlions.com Š D.Dumoulin

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LUC

LOUVES A

vec Joseph Gomis, Luc Louves forme le contingent français en Belgique. Entretien avec l’ailier-fort de Gand.

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DOSSIER

Tu as quitté Orléans pour avoir plus de temps de jeu, pourquoi avoir choisi la Belgique et le club de Gand ? Je souhaitais changer d’environnement, découvrir un autre jeu en Europe. La Belgique était une des possibilités. J’ai eu des contacts avec Pepinster et Ostende, mais j’ai privilégié Gand, car c’est un petit club et j’y avais plus de chances de jouer. Comment se passe ton acclimatation en Belgique ? Autant sur le plan sportif que dans ta vie sociale ? Cela se passe très bien. Sportivement, je me sens de mieux en mieux et plus en confiance, notamment depuis le changement de coach. (NDLR : Yves Defraigne a remplacé Erez Bittman début janvier) Socialement également, Gand est une très belle ville, et c’est agréable d’y vivre. Le néerlandais n’est-il pas trop difficile ? Prends-tu des cours ? Incompréhensible (sourire). Au club, j’essaie de me débrouiller en anglais et ils comprennent assez bien le français, donc ça va. Mais je ne compte pas prendre de cours non, c’est bien trop difficile. Que penses-tu du niveau du championnat belge ? Quelle différence avec la Pro A ? J’ai été surpris. On dit souvent que le niveau est beaucoup plus faible qu’en Pro A mais pas tellement finalement. Certaines équipes sont difficiles à jouer, avec un jeu très dur. Des équipes comme Charleroi, Anvers, Ostende pourraient très bien jouer en France sans grandes difficultés. La différence se situe au niveau athlétique. Ca joue dur, mais c’est moins puissant qu’en France. Si ton temps de jeu a effectivement augmenté, (5,6min en 7 matchs à Orléans, 14,6 en 24 matchs, les

résultats de Gand ne suivent pas. 4v-21d (Statistiques arrêtées au 10 avril 2011) Comment vis-tu cela ? En tant que compétiteur, ce n’est vraiment pas facile et ça en devient énervant. Gand a des difficultés depuis quelques saisons déjà. Mais on continue de travailler plus dur à l’entraînement, on se donne à fond, le travail finira par payer. Quelles sont tes impressions sur le format du championnat belge ? (ligue fermée, 2phases a/r, 6 équipes sur 10 en PO) C’est interminable. On joue 4 fois contre toutes les équipes, c’est très étrange. On joue tellement contre les mêmes équipes qu’on connaît trop bien les joueurs, leur jeu, leurs réactions, et du coup, le jeu est un peu bloqué. Mais bon, en même temps, le championnat est adapté aux nombres d’équipes. En une seule phase aller/retour, il n’y aurait pas assez de matchs. A la fin de cette saison, il te restera encore un an de contrat, as-tu déjà pensé à la suite ? resignature, transfert en Belgique vers un club plus huppé, retour en France ? Quels sont tes objectifs en cette fin de saison ? J’envisage de participer à quelques workouts NBA durant l’été, mais ce n’est pas sûr. Hormis cela, je me sens très bien à Gand, je progresse bien. J’ai déjà assez manqué de temps de jeu l’année dernière, ce n’est pas le moment de partir, une année professionnelle de plus ici ne pourra me faire que du bien. Quelles équipes et quels joueurs t’impressionnent le plus en Belgique cette saison ? Anvers, Charleroi et Ostende sont de bonnes équipes, le bon parcours européen de ces deux dernières en est une preuve. Dans les joueurs, c’est Christophe

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Young, d’Alost, qui joue au même poste que moi, même si lui est plus un 5 qu’un 4 . Il est très puissant, et bien mobile. Il n’est pas l’un des meilleurs rebondeurs de la ligue pour rien (NDLR : 3e avec 7.8 de moyenne, à 0.1 de la 1ère place) Gardes-tu contact avec tes anciens coéquipiers d’Orléans ? Encore avec certains oui, spécialement Frédéric Adjiwanou, qui joue maintenant en Pro B à Boulazac. Et Gomis ? L’autre Français en Belgique ? Ça reste courtois, faut dire qu’on se connaît pas vraiment et qu’on est pas de la même génération. Quand on se croise sur les parquets, on se salue, on discute un peu. Que dirais-tu à un jeune joueur Français qui rejoint le championnat belge ? Faut pas s’attendre à ce que ça soit facile, qu’on va débarquer et dominer. Je trouve que le championnat est sous estimé, c’est bien plus difficile que ce que l’on croit. Faudra s’attendre à s’arracher, à jouer dur pour se faire une place.


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Photographie © Colas Declercq

FLORIAN

&

RÉMI

DEUX LESCA POUR PERPÉTUER LA TRADITION !

L

orsque l’on aborde le sujet de la tradition familiale ou de la formation de jeunes talents en devenir au sein de l’Elan Béarnais, deux noms reviennent avec insistance : deux fratries à vrai dire, avec les frères Gadou (Didier et Thierry) et les Pietrus (Florent et Mike) ! Suite au départ des deux Guadeloupéens (à Malaga et Golden State), la tradition béarnaise qui consistait à réunir une fratrie sous le même maillot a eu tendance à disparaître.


INTERVIEW

Bonjour Messieurs ! Afin de mieux vous connaitre, pouvez-vous nous dire quels sont vos parcours respectifs, de votre première licence à votre arrivée au centre de formation de l’Elan Béarnais ? Florian Lesca : J’ai commencé le basket dans mon village des Landes, à Sort-en-Chalosse jusqu’en minimes. Je suis parti à Dax pour ma première année en cadets. J’ai ensuite effectué ma dernière année cadets à l’Espoir Chalosse et Gaujacq avec Rémi. Et j’ai ensuite intégré le centre de formation de l’Elan. C’est ma quatrième saison ici à Pau.

FLORIAN LESCA

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Depuis l’arrivée dans le Béarn des Lesca en 2007, le club palois a renoué avec une coutume chère au coeur du peuple béarnais et landais : réunir de nouveau sous la tunique verte et blanche deux membres d’une même famille. Petite entorse à la tradition, ce ne sont pas deux frères mais deux cousins ! Pour s’imprégner de la culture et de l’Histoire de ce club du Sud-Ouest, Catch&Shoot est parti à la rencontre des cousins Lesca !

4,4 eval

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en commun, en comptant nos quatre saisons à Pau ! Justement, vous jouez sous les mêmes couleurs aujourd’hui. Estce un objectif que vous vous étiez fixés ? F-L : L’Elan nous a contactés et on est partis en même temps. Nous étions trois avec Romain Hillotte (qui évolue avec l’équipe de Nationale 2 de l’Elan). On a joué ensemble en Espoirs à Pau mais on n’a pas fait une fixation sur ça, ce n’était pas forcément un objectif. Quelles différences faites-vous entre le niveau que l’on peut retrouver en Nationale 2 et la Pro A ? R-L : Déjà, il y a une différence physique. On dit toujours que les petits niveaux sont plus durs mais ce n’est pas la même dureté physique. Les écrans sont mieux posés, plus légaux en Pro A, alors qu’en Nationale 2, ce sont plus des petits coups vicieux. Après plus le niveau monte, plus les arbitres sifflent aussi. Et comment fait-on pour adapter son jeu à des niveaux de championnats et d’équipes bien différents d’un week-end à l’autre ?

Rémi Lesca : J’ai toujours été à l’Espoir Chalosse depuis tout petit jusqu’en seconde année en cadets où on a joué ensemble en Nationale 3 à Gaujacq et c’est également ma quatrième année à l’Elan.

R-L : Pour s’adapter, on a la chance que les différents coaches parlent entre eux. Les systèmes sont à peu près les mêmes. La philosophie de jeu reste identique à tous les niveaux au sein du club. Lors des entraînements par exemple, il faut que les systèmes de jeu soient les mêmes que pour l’équipe première, sinon, on aurait du mal à s’adapter.

Avant de porter le même maillot, en l’occurrence celui de l’Elan, estce que vous avez déjà évolué, chez les jeunes par exemple, dans une même équipe ?

En début de saison, tu étais capitaine de l’équipe de Nationale 2 de l’Elan Béarnais. Qu’est-ce que ça fait de signer son premier contrat dans un club comme Pau ?

F-L : Oui, on a joué ensemble, moi pour ma dernière année cadets, pour Rémi, c’était la deuxième, à l’Espoir Chalosse et Gaujacq en Nationale 3. C’est donc notre cinquième année

F-L : Ma signature à Pau a été un aboutissement. Notamment la récompense de mon travail au centre de formation. C’est énormément de satisfaction et une récompense pour


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INTERVIEW

moi et tout ceux qui m’ont permis d’y arriver. Que ce soit mes coaches en espoirs, le coach de la Nationale 2. Une grosse satisfaction en tout cas. Que représente pour vous le fait d’évoluer sous la tunique paloise, alors que plus jeune, vous veniez voir les matches de l’Elan au Palais des Sports ? R-L : C’est un rêve depuis tout petit. Vu que Pau est à quarante minutes de Dax, c’était facile de venir voir l’Elan. On venait avec Florian et on se disait que ce serait trop bien d’y jouer mais étant petit on ne se rend pas compte de tout ce qu’il faut faire pour y être. Maintenant qu’on y est, c’est que du bonheur ! F-L : L’Elan a toujours été en quelque sorte un guide, le modèle. C’est une fierté aussi de pouvoir porter les couleurs de ce club et on en est très contents.

choix est vite fait.....Si je peux rester toute ma vie ici, j’y resterai ! F-L : Je n’ai pas de plan prédéfini. Je ne peux pas prévoir ma progression. Si je peux rester ici, je le ferai, si j’ai d’autres opportunités, peut-être que je les saisirai. Dans quel aspect de votre jeu devez-vous vous améliorez ? F-L : Je dois apporter plus défensivement et m’aguerrir sur le plan physique. J’ai une marge de progression et ce sont ces aspects-là que je dois travailler. R-L : Être davantage dans mon rôle

Photographie © Colas Declercq

RÉMI LESCA

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Si vous deviez prendre une qualité chez l’un et l’autre, quelle seraitelle ? R-L : Ses qualités athlétiques. Il est déjà assez grand (Florian mesure 1,94m), il est plutôt athlétique, donc je lui prendrais bien sa détente.

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F-L : Sa niaque, sa tonicité, sa vitesse. Après la fratrie des Gadou ou des Pietrus, voici les cousins Lesca, afin de perpétuer la tradition, qu’estce que ça représente pour vous ? Comment appréhendez-vous cette situation ? F-L : On se dit que si nous arrivons à faire la même carrière que ceux qui sont passés par l’Elan, ce serait parfait. Comme les Pietrus par exemple, même si nous ne sommes pas frères, on va essayer de suivre leur exemple, de prendre la relève. Quels sont vos objectifs respectifs ? Avez-vous un plan de carrière ? R-L : Me concernant, ce qui est sûr c’est que si on me demande de faire un choix entre rester ou partir, le

C’est une fierté aussi de pouvoir porter les couleurs de ce club et on en est très contents.

Si je peux rester toute ma vie ici, j’y resterai !


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de meneur. Faire plus jouer les autres. Maitriser et mieux comprendre le jeu pour faire bien jouer mes équipiers. Savoir à quel moment enclencher tels ou tels systèmes etc... Jouer dans ce Palais des Sports de Pau procure quelles sensations ? R-L : C’est une grande chance. C’est le plus beau Palais de France, la plus belle salle et l’avoir aussi près de chez nous est une réelle chance. F-L : Jouer dans un tel Palais, ça fait toujours du bien et c’est un avantage considérable lors des matches. Et être proche de chez nous est aussi une bonne chose.

Et si vous n’aviez pas été basketteur ? Qu’auriez-vous fait ? F-L : Me concernant, je ne sais faire que ça (grand éclat de rire) ! On prépare tous les deux un BTS commerce. C’est notre deuxième année. Pour ma part, j’ai un bac STG Gestion et Communication et là, on est en BTS et je suis dans la continuité de mes études.

Propos recueillis par Philippe Morihain.


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Nanterre LA BELLE AVENTURE ! Par Barbara Youinou Photographie Š Claire Macel


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N

anterre monte pour la première fois de son histoire en Pro A. Un fait qui ne doit rien au hasard…

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alais des Sports de Nanterre. Quelques couloirs à arpenter et l’on arrive dans la salle de basket de la JSF. Nate Carter puis Mykal Ryley arrivent, suivis des autres joueurs. L’équipe est au complet pour l’un des derniers entraînements de la semaine. Le tout dans la bonne humeur et la déconnade. On apprend dans l’équipe se cacherait un futur pompier. Cette alchimie est le résultat d’une stratégie de construction d’équipe. « On a réussi car on a gardé 9 joueurs sur 11. Donc ça voulait dire pas beaucoup de travail en quantité de recrutement […] J’avais guetté l’opportunité de prendre Jo (ndlr : Passave-Ducteil) depuis quelques temps. Il ne jouait pas beaucoup à Limoges et il fallait qu’il se relance. Et après il nous fallait un 4 facilement polyvalent. Donc on a pris Will Daniels. » explique Pascal Donnadieu, l’entraîneur de la JSF. L’équipe a rapidement trouvé ses marques. Sur les cinq premiers matches du championnat, Nanterre en a remporté quatre pour une seule défaite à Lille (71-68). Des résultats qui ont de suite montré que la formation du 92 serait plus qu’un challenger face aux grosses cylindrées. Ca tombe bien, l’équipe ne s’était pas fixée de barrières.

UN TRAVAIL MINUTIEUX La JSF fait aussi confiance à de jeunes joueurs. Les sempiternelles critiques autour de la frilosité des coaches français n’ont pas lieu d’être à Nanterre. Les récents passages d’Adrien Moerman, Edwin Jackson et Evan Fournier l’an dernier ont montré que le risque n’en était pas forcément un. Cette année, l’équipe a une moyenne d’âge de 24 ans. Ce qui suppose un travail plus important. « Loic Akono, Marc Judith, Antoine Gomis, Jérémy Nzeulie ou Alexis Desespringalle. Tout ça, ce sont des très jeunes joueurs. Avec eux, il faut un petit peu plus de patience. Mais être dans une équipe qui est première de Pro B, dans une équipe qui domine, ça prouve qu’ils ont un niveau intéressant aussi », analyse le coach.

vaillé lors de séances hebdomadaires de scouting chaque vendredi. Nanterre est une équipe résolument tournée vers l’offensive. « On a la meilleure attaque du championnat et de loin. On a la meilleure évaluation. On a le meilleur pourcentage à 2 pts et 3 pts » ajoute Pascal Donnadieu. Les faiblesses sont à chercher au niveau des aspects défensifs. Pour la JSF, c’est le rebond. Dans ce secteur, l’équipe se positionne dans le milieu de tableau de la Pro B. Pour autant, « défensivement ça ne veut pas dire qu’on se repose. Il y a du potentiel. »

Je suis convaincu, pour en avoir discuté avec leurs agents, que la plupart des joueurs auront envie de continuer l’aventure avec Nanterre en Pro A

Cette dynamique, l’équipe la travaille chaque semaine à l’entraînement selon un schéma bien précis. Au programme du lundi : beaucoup de travail physique et un mix entre perfectionnement individuel et travail collectif. Plus le jour du match se rapproche, plus l’accent est mis sur le jeu à cinq en fonction du profil de l’adversaire du week-end. Patients, le duo Donnadieu/Le Goff (assistant) ne laisse rien passer, travaillant sur le détail ce qui occasionne parfois quelques frictions inhérentes à la vie de tout groupe professionnel. Dans un championnat particulièrement dense, rien ne doit être laissé au hasard. Et sûrement pas l’observation du jeu adverse tra-

« PAS DE LA MAUVAISE VOLONTÉ »

La façon dont la JSF a géré son coup de mou de décembre-janvier a été l’une des clés de son accession en Pro A. Après avoir joué en surrégime fin 2010, l’équipe a connu un premier contrecoup après une défaite face à Bourg-en-Bresse (75-69) début janvier. Un passage « obligé » qu’ont traversé également leurs adversaires. Pour Nanterre, les blessures de deux intérieurs, Will Daniels et Johan Passave-Ducteil, n’est pas étrangère à cette mauvaise période. Avec un


FOCUS

effectif limité, certains joueurs ont du tirer sur la corde à l’image de Nate Carter qui a fini par s’épuiser. « En janvier, on a eu un gros trou entre Boulogne et Nantes. On a perdu à Boulogne et contre Nantes chez nous. Ce n’était même pas de la mauvaise volonté, c’est qu’on était rincés. Après, le reste… ». Le reste, c’est la défaite à domicile du 19 mars au Palais des Sports contre Charleville (8862). Le seul match où « les joueurs savent qu’ils ont fait une erreur ». Piqué au vif, Nanterre se reprend la semaine suivante lors de son voyage au Portel (90-79). « Il n’y avait pas de raison de douter. Les autres équipes connaissaient aussi des faux-pas. C’est un championnat qui est difficile. Il n’y a pas de place pour les états d’âmes. La preuve, n’étant pas toujours très bons et avec une baisse de régime, on a fini premiers. Ca veut dire qu’il faut s’accrocher et ne pas

douter quand on perd un match ».

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EN ROUTE POUR UNE PREMIÈRE

ment rejoindre la division supérieure. En 2005-2006, l’exemple de Brest, monté en Pro A pour la première fois de son histoire et redescendu aussi sec, rappelle que la transition entre les deux divisions n’est pas toujours évidente. «Si on monte en Pro A il n’y aura pas de problème. Il y a quand même des choses fortes qui se sont passées depuis deux saisons. Je suis convaincu, pour en avoir discuté avec leurs agents, que la plupart des joueurs auront envie de continuer l’aventure avec Nanterre en Pro A ».

La montée vient récompenser un club solide, présent depuis sept ans en Pro B. Dans l’antichambre de la Pro A, la JSF s’est construite par paliers. 5 participations aux play-offs, demifinaliste l’an dernier, finaliste de la Coupe de France… le club n’est donc pas là par hasard. Inévitablement va se poser la question avec qui et com-

Mis à part Xavier Corosine, Guillaume Pons et Loic Akono, aucun n’a jamais joué dans la division supérieure. Un sacré défi pour des joueurs qui n’arriveront pas en terrain conquis et où le danger sera de ne pas réussir à s’adapter et/ou de se faire couper au bout de quelques journées de championnat.

La possibilité d’une montée ne s’est jamais transformée en pression négative. Le club n’en a pas un besoin économique absolu. « A Rouen il y’a de gros enjeux économiques liés à l’arrivée au Palais des Sports. Nous, on n’avait la pression de personne ».

Photographie © Claire Macel


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Johan Passave-Ducteil

Comment es-tu arrivé à Nanterre ?

pour dire que j’étais un bench player mais j’ai profité de tout. La preuve, j’ai eu l’opportunité de jouer contre Nanterre en demi-finale. Et après, j’ai pris ce que j’avais à prendre. Mais j’aurais perdu deux finales de suite a Bercy et vécu la montée en pro A. Donc, niveau expérience, c’est pas mal.

ohan Passave-Ducteil est la tour de contrôle de la JSF Nanterre. Il revient pour nous sur son parcours et son arrivée au sein du club.

J’ai d’abord eu la chance de jouer au CSP Limoges, où, la première année, j’étais avec un coach, Olivier Cousin, qui m’avait choisi. Avec lui, j’étais dans un projet sportif et collectif. Donc, jusque là, tout va bien. Malheureusement pour moi, il s’est passé ce qu’il s’est passé. Ils l’ont coupé juste avant les play-offs. Eric Girard est arrivé, un coach de Pro A avec son expérience et tout. Ce qui c’est passé pour moi, c’est que j’ai été conservé dans l’effectif davantage car j’avais deux ans de contrat que par envie de m’avoir. Heureusement pour moi, j’ai réussi à profiter un peu du temps de jeu qu’on me donnait. Donc, au final, la première année s’est bien passée. Au niveau des statistiques, j’étais aux alentours de ce que j’avais fait à Saint-Etienne. J’étais blessé. Par contre, c’est vrai que la deuxième année, je n’avais même pas 15 minutes par match. Et ce n’est pas pour ça que je suis allé à Limoges.

En tant qu’ancien de la maison, à quoi attribues-tu la saison compliquée du club en Pro A ? Moi j’ai une explication toute claire. Les trois dernières équipes qui sont montées, elles ont toutes gardé une ossature. Le problème, Fred Forte il le sait, c’est qu’ils ont cassé l’équipe. Ce qui me gêne, c’est qu’ils n’ont pas gardé au moins des gars comme John Mc Cord ou Alhaji Mohammed. Après tu me diras, c’est peut-être une histoire d’argent, on ne sait jamais.

Que retires-tu de ton expérience au sein du CSP ?

Ça a été très difficile mentalement. Mes matches, c’était les entraînements. Tu apprends à connaître la frustration. Après, mis à part ça, j’étais dans un groupe très très bien avec des joueurs d’expérience. Donc j’en ai appris sur le poste d’intérieur avec des gens comme John Mc Cord ou John Ford. Je me suis même fait pousser par Fred Weis. Franchement, pour moi qui ai un petit CV de basket car j’ai commencé tard, je pourrais dire à ma fille que j’ai joué avec Fred Weis. Et en plus, il m’a mis sur le banc (rires). C’est pas mal. Tout ça

Oui. J’ai été surpris et heureusement pour moi, les coachs de Pro B me connaissent, eux. Donc j’ai eu des propositions. J’ai eu Le Portel où il y avait un beau projet. Plus des touches un peu partout. Mais les seuls qui ont été concrets, c’était Le Portel et Nanterre. Après, Nanterre, moi je suis de Paris, je viens du 13e, j’habite la rue du Château des Rentiers, la rue de la Ligue donc, forcément, venir du coté de Paris, déjà, pour ma famille, c’était bien. Mais j’avais besoin après une saison comme celle-ci de temps de jeu et qu’on me fasse confiance dans un rôle majeur. Parce que j’avoue qu’à Limoges, on me donnait l’impression que je n’avais pas le niveau pour y jouer. Aujourd’hui, je n’ai toujours pas la réponse. J’aurais envie de demander à Girard « Mais pourquoi tu ne m’as pas fait confiance ? ». Mais ça, je ne le saurais jamais de toute ma-

On a des intérieurs de feu, des extérieurs de feu de feu. Le danger peut venir de n’impor

Forte, c’est un mec qui a le CSP dans la peau. Après, je ne critique pas ses choix, on n’en sait rien mais je trouve ça dommage quand tu commences une aventure avec un groupe de ne pas garder une ossature. La preuve, c’est qu’ils le payent. Ils ont eu un ticket pour aller en Pro A et ils redescendent. Alors que sur les trois dernières années, les équipes qui sont montées ne sont pas redescendues. Après cette saison 2009-2010, tu avais eu des contacts avec d’autres clubs ? Qu’as-tu-privilégié ?

nière. Donc voilà, je ne me prend pas la tête. J’avais besoin de jouer et d’avoir confiance, j’avais l’impression de ne plus avoir le niveau de Pro B. Raconte-nous tes premiers pas à Nanterre… Je suis dans une équipe qui a été conservée à 80% et dont je connaissais tous les joueurs. D’ailleurs, si on m’a recruté, c’est en partie aussi grâce à mon ami et coéquipier Guillaume Pons (connu à SaintEtienne). Je suis arrivé en même temps que Will Daniels. Ma pré-sai-


u, des meneurs rte où.

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Photographie © Claire Macel


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Photographie Š Claire Macel


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son n’est pas très bonne, un manque de confiance peut-être. Et là, premier match de championnat, je bats mon record en carrière (ndlr : 21 pts contre Aix-Maurienne). Un coach qui vous dit « Tu vas regarder le cercle putain ? ». Alors qu’en une année, j’avais tout perdu. Mes repères, c’était écran, passe, aller retour sur le banc, machin …. C’était un rôle, tu es là, tu apportes de l’énergie. Etre catalogué joueur défensif, ça ne me dérange pas. Mais en sortant de Saint-Etienne, c’est vrai que j’aspirais à autre chose. J’avais montré quand même que j’avais des mains. Je n’ai pas pu m’exprimer pleinement. Et là j’arrive à Nanterre. Equipe de shooteurs à 3 pts, rebonds offensifs, des petits écrans, des petits smashs, des petits paniers faciles… Première fixation de l’équipe, c’est magnifique. Et pourtant je défend pareil. Au niveau de l’entraînement qu’est-ce-que ça t’apporte de travailler avec un intérieur comme Nate Carter ou les joueurs extérieurs de l’équipe ? Je me sens bien seul car je suis le seul à ne pas shooter à 3 pts. C’est des intérieurs qui défendent bien, qui peuvent s’écarter, shooter. Ils ont de la masse musculaire, tu vois qu’ils envoient. On a des intérieurs de feu, des extérieurs de feu, des meneurs de feu. Le danger peut venir de n’importe où. Et ça se traduit vraiment au niveau des statistiques.

Tout le monde a des points, tout le monde a des passes, tout le monde a des rebonds, tout le monde a tout en fait. Un soir c’est Nate qui va exploser et mettre je ne sais pas combien de points, le match d’après ça va être Mykal Ryley, le suivant Xavier Corosine. Et c’est génial pour l’équipe. Et les deux coachs, ils sont comment ? Y en a un (ndlr : Pascal Donnadieu, head coach) dont on pourrait dire que sur les dernières années, c’est un peu comme le Arsène Wenger du basket français. Tous les jeunes joueurs qui ont joué pour lui ont pris confiance. Ils ont trouvé des bons clubs après. C’est aussi un club familial qui est, je pense, très bien pour les joueurs français comme moi qui était en perte de confiance. En plus, le club a de l’ambition donc c’est encore mieux. Souvent, on dit que les clubs comme ça n’ont pas d’ambition alors qu’ici, c’est loin d’être le cas. Comment caractériser le jeu de Nanterre ? Déjà, moi ça me fait bizarre car j’ai toujours été dans des équipes défensives. Là, on est clairement portés sur l’attaque. Donc, si tu veux, quand tu as eu Alain Thinet, Fabien Romeyer, surtout Olivier Cousin, Eric Girard… Alors je ne pourrais pas t’expliquer mais on a une identité offensive. On sait que quoi qu’il arrive, on marquera. Le club a-t-il selon toi les moyens de franchir le cap Pro B-Pro A ?

68.8%

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Le problème, on le connait plus ou moins, c’est le budget. Après, j’ai confiance envers le président (ndlr : Jean Donnadieu). Je sais qu’il fait tout ce qu’il peut. Le problème majeur, ça va être ça mais tu ne peux pas leur enlever la montée. Combien de petits clubs sont montés en Pro A ? Après c’est sûr que ça va jouer s’ils n’ont pas un budget minimum. Mais j’ai confiance envers le président, il m’a dit qu’il allait faire le boulot. Et je le crois.

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21,4 mn 10,8 pts 5,4 rbds 1,3 pds

14 eval

C’est aussi un club familial qui est, je pense, très bien pour les joueurs français comme moi qui était en perte de confiance.


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Fabien Dubos A

près treize ans de carrière dans le basket et 35 sélections en équipe de France, Fabien Dubos a réussi sa reconversion. Le fruit d’un parcours exemplaire qui l’a mené à Carcassonne. Par Quentin Bouthier

PALMARÈS Vainqueur de la Coupe Korac avec le Sluc Nancy (2002) Champion de France avec PauOrthez (1996, 1998, 2001, 2003 et 2004) Vainqueur de la Semaine des As (2003) Vainqueur de la Coupe de France (1999, 2003 et 2005) Sélectionné au All-Star Game LNB (1996, 2001 et 2002) Sélectionné au All Star Espoir (1999) 2e du scrutin pour élire le MVP français (2001/02) MVP Espoir Pro A (1996)

Photographie © Olivier Sarre


PARCOURS

L’après-carrière des sportifs professionnels. Ces mots évoquent tantôt la reconversion brillante des Yannick Noah et autres Lizarazu ; et plus souvent la galère de ceux qui ont tout misé sur le sport et se retrouvent brutalement dans l’anonymat. Du haut de ses 2,07m Fabien Dubos vient contredire ces clichés. Dès le début de sa carrière pro, à 17 ans, il s’est posé la question de l’après-basket. Aujourd’hui cela fait trois ans et demi qu’il a ouvert un établissement de restauration rapide à Carcassonne et ses affaires marchent bien : depuis 2009 il en tient un second à Perpignan.

35 sélections en équipe de France sénior - 5.4 points de moyenne (Euro 1997 en Espagne) International Cadet (U16) : 29 sélections (Euro Cadets 93) International Junior (U18) : 39 sélections (Euro Juniors 94 - Mondial Junior 95) International Espoir (U20) : 10 sélections (Euro Espoirs 96) International U22 : Euro 1998

RECORDS EN LNB 42,0 eval Avec Cholet contre Toulouse (98/99)

17,7 eval moyenne Avec le Sluc Nancy (01/02)

31 pts Avec Cholet contre Toulouse (98/99)

18 rbds Avec Cholet contre Chalon (98/99)

7,0 pds Avec Nancy contre Limoges (01/02)

Tout débute lorsque le jeune Fabien intègre la sélection départementale de basket du Gers. Il est repéré, intègre le Pôle région de Toulouse, puis l’Insep où il côtoie Frédric Weis et Ali Bouziane. A 18 ans, déjà sous contrat pro à Montpellier, le basketteur obtient son bac S avec une mention bien. Loin de prendre la grosse tête, il se questionne sur son avenir. « A l’époque je me voyais bien prof de maths ».Il décide donc d’entreprendre une Licence de mathématiques, qu’il obtiendra, non sans difficultés. «J’ai mis cinq ou six ans à la passer ; je n’avais que les cours papier à cause des entraînements et des déplacements.» Il faut dire qu’il ne chôme pas sur le plan sportif : champion de France à cinq reprises avec Pau-Orthez , il jouera dans les plus grands clubs de Pro A. «J’ai toujours été conscient que ce n’était qu’éphémère. Les gens qui te tapent dans le dos en te congratulant, du jour au lendemain ils ne sont plus là.» Une blessure au genou l’éloigne des parquets pendant quatre mois, vers l’âge de 26 ans. Comme une piqûre de rappel. «Dans ces moments-là, tu cogites, tu te demandes ce que tu vas faire après». Petit à petit, il remet en question son projet d’enseigner les maths. «J’avais gagné de l’argent pendant ma carrière et je voulais être indépendant. Et puis j’avais envie de faire un métier où il y ait de la pression». A 29 ans, Fabien entame ce qui sera sa dernière saison, à Limoges. La réflexion sur l’après-carrière se précise. Il postule dans diverses enseignes de restauration rapide pour devenir franchisé à moyen terme. «Au niveau du basket, j’étais dans une phase moyenne, mais je pensais arrêter vers 33 ou 34 ans.» Hasard du destin, à l’intersaison 2007 Quick propose au basketteur de prendre la tête de l’établissement qui ouvre à Carcassonne en décembre. Fabien Dubos n’a pour le moment

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CARRIÈRE SPORTIVE 1992-93

INSEP (N3)

1993-94

INSEP (N2)

1994-95

Lourdes (Pro B, 14.3 d’eval à 17 ans) ; dépose le bilan en décembre 94. Montpellier (Pro A)

1995-98

Pau-Orthez (Pro A)

1998-01

Cholet (Pro A)

2000-01

Pau-Orthez (Pro A)

2001-02

Nancy (Pro A)

2002-04

Pau-Orthez (Pro A)

2004-06

Gravelines-Dunkerque (Pro A)

2006-07

CSP Limoges (Pro B)

2008-09

SOC Carcassonne (Prénationale - 1ère division régionale)

2009-10

SOC Carcassonne (régionale 1 - 2e division régionale)

2010-11

SOC Carcassonne (Prénationale - R1)

reçu aucune proposition pour la saison malgré de bonnes statistiques à Limoges (13.5 points à 52.6% et 6.5 rebonds en Pro B). «J’ai réfléchi, et puis j’ai décidé de saisir cette opportunité. Aujourd’hui je ne regrette pas mon choix.» S’il ne retrouve pas l’adrénaline d’un match à guichet fermé, le challenge et la quête perpétuelle de nouveaux objectifs qui sont le lot du sportif l’animent toujours au quotidien. Il joue encore un peu au basket avec le SO Carcassonne «pour le loisir, pour faire du sport». Mais la page est bel et bien tournée, sans regrets. «Il ne faut pas vivre dans le passé. Vous ne verrez pas des posters de basket dans ma chambre.»


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OlivierAKolb

uteur d’une excellente saison à l’Ada Blois en Nationale 1 (12 points à 61.4%, 5.7 rebonds et 1.2 contre pour 14.4 d’évaluation), le jeune pivot Olivier Kolb (2m06, 24 ans) vient de remonter d’un étage en s’engageant à Châlons-Reims en Pro B. Formé à Mulhouse puis Dijon, l’Alsacien a continué sa progression en NM1. Avant sa signature au CCRB, il est revenu pour Catch & Shoot, le mag’ sur son parcours.


INTERVIEW

Comment as-tu commencé le basket ? J’ai débuté à l’âge de 10 ans dans le club de Schiltigheim, à coté de Strasbourg. J’y ai joué un an puis je suis passé par le club de Sélestat durant cinq ans. Tu as ensuite été formé à Mulhouse. Raconte nous. A Mulhouse, ça a été la découverte de la vie sans les parents et les débuts en cadets France 1ère division ainsi qu’en Espoirs Pro B. J’ai beaucoup progressé cette année-la, grâce

aux deux ou trois entraînements par semaine avec les Espoirs. Avec l’équipe cadet, on s’est qualifiés pour les plateaux de quarts et demi-finales de Coupe de France. Ce fut une très bonne année pour moi et j’en garde de très bons souvenirs. Puis tu as pris la direction de Dijon. Pourquoi ce choix ? J’ai dû quitter Mulhouse car les Espoirs Pro B allaient disparaître. La SIG et la JDA m’ont contacté pour intégrer leurs centres de formation. J’ai choisi Dijon car c’est un centre de formation reconnu et que je voulais voir autre chose que l’Alsace. Comment se sont passées tes années à la JDA ? Quelles sont les personnes qui t’y ont marqué ? A Dijon, j’ai énormément progressé avec Jean François Evert, mon coach cadets France et Espoirs Pro A. J’étais dans une famille d’accueil durant 2 ans. C’était un cocon où j’avais juste à aller en cours et à m’entrainer. Tout était fait pour que je sois dans les meilleures conditions possibles pour progresser. J’ai eu la chance d’intégrer le groupe Pro A. Ce fut une très bonne expérience où j’ai encore beaucoup appris. Les personnes qui m’ont marqué, Jean François Evert donc, Jacques Monclar et Laurent Sciarra.

Je suis passé de vingt à plus de trente minutes par match et j’ai pu m’exprimer en tant que joueur majeur dans une équipe qui aurait dû être meilleure.

Photographie © Tuan Nguyen

Penses-tu que tu aurais mérité d’y avoir du temps de jeu ?

Avec Jacques Monclar, je jouais de temps en temps car il y avait des blessés. Puis Jacques a été coupé. Randoald Dessarzin est arrivé. J’ai discuté avec le club qui m’a

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dit que l’année suivante, le dernier contrat pro français se jouerait entre Iba Koma et moi. Alors, je me suis dis que ça pouvait être une grosse opportunité pour moi et j’ai décidé de rester une année de plus. Lors des trois premiers tournois de pré-saison des pros, on me dit de rester avec les Espoirs… J’ai vite compris que le contrat ne serait pas pour moi. Puis, après la trêve hivernale, Ali Bouziane a demandé à partir. Ils ont perdu un contrat français et on me l’a proposé. J’ai signé puis j’ai joué. Je me rappelle notamment d’un match pour le maintien où je joue 11 minutes. C’était a Orléans alors je pense qu’au moins la dernière année, j’aurais pu jouer plus, oui. Tu as fait le choix de descendre de deux divisions pour jouer. Quel bilan fais-tu de ton année à PrisséMâcon ? Déjà, ça n’a pas été un choix mais plus une obligation. J’aurais préféré trouver en Pro B mais ça n’a pas été le cas. Prissé-Macon, ça a été très dur pour moi. Tu sors de Dijon et tu te retrouves dans un club amateur. Ca fait un choc mais j’avais du temps de jeu pour m’exprimer. Hélas, les résultats sportifs de l’équipe n’étaient pas bons. J’ai appris ce qu’était le rôle de joueur majeur et c’est déjà pas mal. La saison passée tu as évolué à Châlons-en-Champagne. Même question, tu en retiens quoi ? A Chalons, j’ai retrouvé les infrastructures d’un vrai club pro avec une équipe compétitive. Sur le plan personnel, j’ai fait une bonne année. Je sortais du banc mais j’avais de grosses responsabilités. Tout notre jeu était basé sur les intérieurs donc j’ai pu beaucoup m’exprimer. Dommage qu’on n’ait pas fait une meilleure saison. On a fini dans la souffrance à la cinquième place et on a perdu en quarts de finale contre Boulogne, chez nous. Pourquoi n’avoir pas tenté de retrouver un niveau supérieur à l’in-


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INTERVIEW

tersaison 2010 ? J’ai tenté de chercher en Pro B mais ça n’a pas marché et je ne voulais pas vivre un été dans l’incertitude comme l’année précédente où j’avais signé deux jours après la reprise à Chalons. Blois s’est tout de suite positionné avec un bon projet sportif et j’ai signé avec eux. Comment as-tu son à Blois ?

vécu

ta

25 mn 12,0 pts 5,6 rbds

61.9% 25.0%

1,5 pds

63.2%

14,4 eval

sai-

Très longue, on a marché en séries, qu’elles soient de victoires ou de défaites. Quand tu gagnes trois-quatre matches, tout va bien mais quand tu enchaînes quatre défaites, c’est douloureux. Sur le plan individuel, je ne cache pas que j’ai eu la chance que Chris Grimm se blesse. Je suis passé de vingt à plus de trente minutes par match et j’ai pu m’exprimer en tant que joueur majeur dans une équipe qui aurait dû être meilleure. Je peux dire qu’une suite de noms ne fait pas une équipe. Blois en est l’exemple même. Après, les rumeurs de fin de saison arrivent et pas mal de monde a peur pour son avenir, ça nous a fait vraiment du mal tout ça. J’ai envie de dire dommage car je suis sûr qu’on aurait pu faire vraiment beaucoup mieux mais il y a eu des perturbations de toutes parts qui ont vraiment tué l’équipe.

Tu es un des joueurs dominants de la division, tu penses qu’il est temps de viser un voire deux niveaux au dessus ? On va y aller doucement et déjà voir un étage au dessus. Le but de ma venue à Blois était de confirmer ma bonne saison à Châlons et de faire monter le club. Eventuellement, trouver un club de Pro B au terme de ma première année de contrat car j’ai signé deux ans avec une clause libératoire jusqu’au 15 juin pour jouer en LNB. Sur quels plans dois-tu le plus progresser dans ton basket ? Je dois absolument acquérir un shoot fiable à l’extérieur de la raquette voire même à trois points. Ca va être mon travail de l’été ainsi que la dureté et la vivacité. As-tu des clubs où tu aimerais particulièrement jouer ?

que j’ai atteint un très bon niveau de jeu. Pour finir te considères-tu plus 4 ou 5 ? Actuellement, j’avoue que je préfère jouer au poste 5 car il me manque un shoot extérieur et de la vivacité. Mais je vais travailler tout ça pour pouvoir réellement apporter une menace sur les deux postes.

Je suis sûr qu’on aurait pu faire vraiment beaucoup mieux mais il y a eu des perturbations de toutes parts qui ont vraiment tué l’équipe.

Comme ça, je dirais Mulhouse car je viens de là-bas. Dommage qu’il soient descendus si bas. Peut-être dans quelque temps, ils sont en train de très bien remonter (en N2). Sinon pas de club particulier. Quels sont tes modèles ? Je ne vais en citer qu’un que j’ai eu la chance de côtoyer, c’est TJ Lux avec qui j’étais à Dijon. Si, un jour, je pouvais avoir ses qualités, je me dirais

Propos recueillis par Gabriel PantelJouve.


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Photographie Š Tuan Nguyen


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