Caritas Sozialalmanach 2014 "Schwerpunkt: Recht op Aarbecht"

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Le troisième choc subi par le monde du travail s’est concrétisé à travers l’idéologie du tout marché. La crise de 2008 en a révélé les aberrations. La primauté de la rentabilité financière à travers une spéculation débridée a encore amplifié le partage entre salaires et profits, au détriment des salaires et de l’emploi, augmentant fortement les inégalités. Les investissements productifs créateurs d’emplois ont souvent cédé la place aux investissements spéculatifs sur les marchés financiers aux produits explosifs et échappant à tout contrôle. Des entreprises procédant à des licenciements massifs et à des fermetures d’unités de production profitables ont vu leurs cours en bourse faire des bonds. Dans cette économie à la quête désespérée du rendement à court terme, la logique financière s’est de plus en plus imposée. Le nouveau crédo de la compétitivité s’est focalisé sur le seul coût salarial. On a délibérément négligé le fait que le travail a aussi une fonction de répartition à travers laquelle le travailleur perçoit le prix de son travail. Le pouvoir d’achat des salariés est une grandeur macro-économique essentielle qui détermine pour une large part la demande, donc la croissance économique et par là l’investissement productif et l’emploi. Il faut donc saluer le fait que les inégalités croissantes, que la problématique des salaires trop bas, voire en baisse reviennent en force dans le débat public. Même le Fonds monétaire international reconnaît que l’explosion des inégalités met en danger le potentiel de croissance et la stabilité économique. Le Président Obama plaide vigoureusement en faveur d’un relèvement substantiel du salaire minimum que le nouveau gouvernement allemand va enfin introduire. Il y a donc un retour vers la conception que la valeur « travail » est au cœur de l’économie et que le travail a une valeur qu’il est dangereux de méconnaître. La crise en Europe et notamment dans la zone euro ne pourra pas être maîtrisée en faisant du travail, respectivement des salaires la principale variable d’ajustement. Les politiques sévères de dévaluation interne – c’est-à-dire de réduction massive des salaires – ont d’abord eu pour conséquence une explosion du chômage, et tout particulièrement du chômage des jeunes, une destruction massive d’activités, notamment au niveau des PME, une véritable paupérisation de larges pans de la population. Il est de même illusoire que la flexibilisation outrancière du marché du travail qui consiste à faciliter les licenciements puisse combattre le chômage et favoriser l’emploi. Il est donc urgent de réhabiliter la « valeur travail », comme il est nécessaire de faire de l’emploi un véritable objectif des politiques économiques et monétaires et non seulement une résultante. Dans cette optique le droit au travail mérite d’être remis au centre des politiques, non pas de façon abstraite ou déclaratoire, mais comme un objectif essentiel et central des politiques économiques et sociales. Le droit au travail est en effet l’un des droits de l’homme proclamé à l’article 23 de la Déclaration universelle de 1948. Il a été repris dans de nombreux textes constitutionnels, dans la Charte sociale européenne de 1961 ainsi que 160


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