Buzbuz #38

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CULTU RE PO P’ RECUEILLI PAR LAURENT PERRIN PHOTO GWAEL DESBONT

LA BARBE ET LE CHEVEU, UNE HISTOIRE DE MODE À l’époque de papa, c’était rasage tous les jours, et after-shave bon marché pour calmer les brûlures. Aujourd’hui, l’homme prend davantage soin de son style, d’après Panzer.

Quand il a ouvert son salon de coiffure pour hommes, barbier à l’ancienne, (Crazy Hair, à La Possession), les grossistes lui ont ri au nez. L’homme, personne n’y croyait. Ils avaient tort. Quels sont les modèles qui reviennent le plus ? “C’est souvent les mêmes. On ne m’a pas encore demandé Neymar. C’est toujours Ronaldo (Cristiano, ndlr), pas mal de footballeurs. Des coupes avec des crêtes, des dessins. Les ados à douze ans ont déjà un smartphone, et peuvent choper leurs modèles sur Internet. Et ils ont les bouquins au salon, bien sûr. Il y a un style assez prédéfini : le trait sur le côté, dégradé américain sur les côtés et la nuque, plus long au dessus, contours. Et chacun ajoute sa signature. Les styles ont-ils tendance à s’uniformiser ? Chaque époque a ses modes. Et le cheveu parle toujours. Il y a eu le grunge dans les années quatre-vingt-dix, les punks, rasés

avec la crête au milieu dans les années quatre-vingt, les hippies dans les années précédentes. On dégage ses idées par le cheveu. Deux personnes avec les cheveux longs, l’une où ils sont attachés et tressés, propre sur elle, l’autre grunge, avec la veste en velours et la barbe de trois jours, n’ont pas la même personnalité. Le golden boy aura les cheveux gominés plaqués en arrière, le timide mettra ses cheveux vers l’avant pour se cacher. Comment évolue le rapport des gens à leurs coupes ? Les CSP+, les vingt-cinq, cinquante-cinq ans, s’entretiennent plus qu’avant. Jusqu’ici, c’étaient les ados qui pouvaient se permettre des dessins, des fantaisies. Aujourd’hui, on observe que la classe travailleuse se met à la barbe, les cheveux à la hipster. Ça passe

mieux au travail, parce que c’est dans l’air du temps. Comme le tatouage, la boucle d’oreille, qui étaient exclus autrefois. Il y a une tolérance du patronat vis-à-vis de leurs employés. La société évolue, les gens ne veulent plus ressembler à leur père. Même les geeks gardent un look de jeune. Conseillerais-tu ce métier à un jeune ? Oui, mais en ayant en tête que les barber shops, il n’y a pas que ça dans la coiffure. Il n’y a pas que du “rasé” et des dessins. Il y a des jeunes qui viennent me demander du travail. Ils sont de la culture du quartier, la culture barber shop, coiffeur la kour. Ils savent très bien faire ce qu’on leur demande, mais ils ne savent faire qu’une coupe, la coupe barber shop avec un dessin. Il ne faut pas s’enfermer, se ghettoïser dans certaines choses.”


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