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Outils numériques et design graphique

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Introduction Avec William Morris et le mouvement britannique des Arts and Crafts de la fin du XIXe siècle, la création graphique est intimement liée avec une idée de production artisanale, d’une maîtrise des outils du début à la fin de la chaîne. Morris était en effet aussi bien imprimeur, calligraphe, graveur de poinçons que responsable de la composition typographique (c’est à dire graphiste, chargé de l’agencement spatial de tous les éléments imprimés, qu’ils soient textuels, iconographiques ou ornementaux), et ce en réaction à la standardisation de la production à laquelle il assistait (nous sommes en pleine révolution industrielle.)

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apitre" 1. PowerPoint est le logiciel majeur de création de présentations projetées édité par Microsoft. 2. TUFTE, Edward R. The Cognitive Style of PowerPoint, Cheshire, Graphics Press, 2006.

3. FROMMER , Franck . La pensée PowerPoint : Enquête sur ce logiciel qui rend stupide, Paris, Éditions La Découverte, 2010.

4. John Maeda est à la fois artiste, graphiste et développeur. Il a été élève de Muriel Cooper (1925-1994), cofondatrice du MediaLab du MIT et pionnière de l’expérimentation visuelle numérique. Maeda est également chercheur et enseignant et a eu une très grande influence sur ses étudiants parmis lesquels on peut citer Benjamin Fry et Casey Reas, initiateurs de Processing.

Aujourd’hui, même si la situation est tout autre, et pour des raisons différentes, on peut faire le même constat que Morris en arpentant les différents expositions et salons spécialisés : la production graphique contemporaine a tendance à s’uniformiser. On peut imaginer que le fait que tous les designers utilisent les mêmes outils, créés par la même société (Adobe), n’est pas sans rapport avec l’homogénéisation de la production. De manière analogue, l’analyse de PowerPoint 1 par Edward Tufte dans The Cognitive Style of PowerPoint 2 démontre que la conception de ce logiciel conduit non seulement à une uniformisation graphique, mais influence surtout les décisions prises par les utilisateurs jusqu’à conduire à des aberrations logiques. Ce constat a été repris très récemment par Franck Frommer dans La pensée PowerPoint : Enquête sur ce logiciel qui rend stupide 3. Nous ne nous intéresseront ici qu’aux outils destinés aux graphistes. Pourquoi, comme William Morris, ne prendrions nous pas nos outils en main ? Avec l’objectif de toujours pousser la recherche graphique, et ce même si les logiciels et le code ont remplacé les poinçons et le plomb, pourquoi ne pas sortir du sentier balisé par Adobe pour arriver à de nouvelles formes ? Certains ont déjà tenté l’aventure, comme les typographes de LettError, le groupe bruxellois Open Source Publishing ou John Maeda 4, figure incontournable quand il s’agit d’interroger les relations entre art ou design, et informatique. Maeda fut en effet l’un des premiers à revendiquer de nouvelles formes visuelles basées sur un développement logiciel hors de toute visée commerciale. 3


Ce mémoire se propose d’analyser la place d’Adobe et de ses logiciels dans la production graphique actuelle, de définir quelques alternatives, puis, tentant d’expliquer le paradoxe de l’ignorance généralisée des graphistes à l’égard des technologies digitales, de démontrer l’importance de la culture numérique pour le futur designer.

4


Logiciels standards et facilité d’utilisation Adobe Systems Incorporated est une société crée en 5. Le langage PostScript est un langage informatique dédié à la communication de documents imprimés (image, typographie, données vectorielles). Le format PDF en est une évolution. Source : Wikipédia - http://fr.wikipedia.org/wiki/ PostScript

6. Un marché captif est un marché sur lequel les consommateurs sont obligés d'acheter un produit à un producteur. Source : Wikiberal - http://www.wikiberal. org/wiki/Marché_captif 7. Tarif toutes taxes comprises au 5 novembre 2010. Source : site officiel d’Adobe - http://www.adobe.com/fr/products/creativesuite/design/

1982 par John Warnock et Charles Geschke pour commercialiser le langage PostScript.5 Cette société édite aujourd’hui, entre autres, les cinq utilisés universellement par l’industrie graphique pour l’édition d’images et de textes, numériques et imprimés à savoir InDesign, Acrobat, Photoshop, Illustrator et Flash. Tout le long de son histoire, elle a racheté en bourse ou évincé ses concurrents et possède depuis 2005 le monopole absolu du secteur, grâce à l’acquisition de la société Macromedia, son dernier concurrent.

logiciels standards

Comme toute société, Adobe a besoin d’argent pour poursuivre le développement de ses produits, faire vivre son organisation et ses actionnaires. Elle vend ses programmes à un prix d’autant plus élevé qu’elle détient le marché captif 6 de la production graphique. De manière indicative, le pack Design premium (comprenant uniquement les destinés aux 7 graphistes) de la Creative Suite 5 coûte 2749 euros  pour un seul poste.

logiciels

La cible marketing On admettra que nombre de petites structures ne peuvent investir de telles sommes pour leurs dépenses logicielles. Le marché d’Adobe pour ses produits est donc principalement celui des grosses structures de type agences de publicité. Ces dernières possèdent plus de moyens, ont besoin d’un nombre de licences plus élevé si l’on considère le nombre d’employés et ont bien sûr besoin d’optimiser leur productivité pour être plus rentables. Le service marketing de la firme l’a bien saisi et avance donc logiquement des arguments susceptibles de séduire ces grosses agences : “Optez pour une méthode de travail plus efficace”, “Travaillez plus vite”, “Évitez de perdre du temps”, 7


“Concevez plus facilement”, “Gagnez en efficacité”, “Élargissez la portée de votre travail” 8 La productivité et la facilité d’utilisation sont mises en avant, mais pas un mot sur l’aspect créatif de la production graphique.

8. Extraits du site officiel d’Adobe http://www.adobe.fr

Le graphiste-auteur, contraint d’avoir ces programmes à

disposition à cause de la standardisation des formats de fichiers et de l’interaction avec les autres acteurs du secteur (imprimeurs,

12. “The new computer-generated evironement […] is a space […] where “userfriendliness” overrides the authority of the author”. STAPLES, Loretta. “What happens when the edges dissolve ?”, Eye magazine, no 18, automne 1995.

photographes, développeurs…), se retrouve, quant à lui, soit consommateur forcé, soit dans une situation d’illégalité. Soyons clairs, ces programmes sont exemplaires, permettent de faire beaucoup de choses très intéressantes et la majorité des graphistes s’en satisfait très bien. Le problème est que ces programmes sont et que, comme tout ils ont une empreinte propre. Si est ce qui est produit a tendance à se standardiser.

standards

l’outil

outil,

Pour le designer essayant de mettre en avant sa singularité au milieu du brouhaha graphique ambiant, ces solutions logicielles peuvent être inadaptées à une approche libre de tout carcan. Erik Van Blokland 10, parle de “l’illusion de l’exhaustivité”, “soit l’idée que tout peut être fait en utilisant un menu déroulant  11 et une barre . Cette illusion de liberté créative provient d’un fait simple : tout est dédié à une utilisation donnée, cette dernière limitant les possibilités offertes.

d’outils” outil outils,

Pour que ces si faciles d’accès, produisent un résultat que l’on jugera acceptable instantanément, ils sont paramétrés par défaut lors de la création d’un document vierge. Par exemple, des automatismes permettent d’entrer immédiatement du texte sur une page d’InDesign. Ce texte sera alors automatiquement composé avec un caractère acceptable (Arial), dans un corps acceptable (12 points), avec un interlignage acceptable (120 % du corps) et d’une couleur acceptable (noir). Tout cela est merveilleux pour le novice découvrant le ou pour l’exécutant qui a besoin d’être productif, c’est-à-dire de

logiciel

8

Certes, il est confortable de rester dans la logique prémâchée des éditeurs de mais comme le souligne l’expression “prison-house of art-friendly tools”, il ne faut pas se leurrer, ces enferment. Sous le prétexte de faciliter l’accès au plus grand nombre, la marge de manoeuvre laissée à l’utilisateur est réduite. On peut ainsi lire dans l’article de David Reinfurt publié sur le site d’Adobe, que “les fonctions présentes, les paradigmes et les scénarios d’utilisation sont planifiés pour chaque projet de pour s’assurer de la plus large utilisation possible. En résulte un moyen, qui passe outre les hauts, les bas, les erreurs et les bizarreries.” 13 Toutes les spécificités qui pouvaient préexister durant le développement de ces programmes sont supprimées pour répondre à l’utilisation médiane, la plus large possible, conventionnelle.

logiciels,

outils

standard,

“Prison-house of art-friendly tools” 9

produire rapidement et efficacement un document lisible, mais n’est-ce pas un peu réducteur graphiquement parlant ? Certes, tous ces réglages sont bien heureusement modifiables par la suite, mais n’influencent-ils pas nos choix, quand on oublie de les modifier et ainsi de prendre une décision ? Ces interfaces créent “un espace […] où la facilité d’utilisation prend le pas sur notre autorité d’auteur.” 12

logiciels

9. “Maison prison des outils artistiques faciles à utiliser”. DAVIDSON, Drew. Beyond Fun : Serious Games and Media, Pittsburgh, ETC Press, 2008, p.95

10. Erik Van Blokland est un dessinateur de caractères hollandais. Avec Just Van Rossum, il a fondé la fonderie digitale LettError (http://www.letterror.com). Ils dessinent leurs caractères en intégrant la programmation dans leur processus de création et réalisèrent notamment Beowolf en 1994, un caractère dont les contours se déforment aléatoirement à chaque impression.

13. “Function sets, software paradigms, and user scenarios are mapped out for each software project to ensure the widest possible usability, resulting in an averaged tool wich skips the highs, lows, errors, and quirks.” REINFURT, David. “Making do and getting by”, Adobe Think tank - http:// www.adobe.com/designcenter/thinktank/ makingdo], consulté le 15 octobre 2010.

14. Voir illustration pages

programme,

outil

L’influence évidente de l’outil 14 outils outil

11. “The illusion of completeness”, “The idea that anything can be achieved using dropdown menu and toolbox sidebar”. CROW, David. “Magic box : craft and the computer”, Eye magazine, no 70, hiver 15. HUYGHE, Pierre-Damien. Modernes sans modernité, Fécamp, Éditions lignes, 2010, p. 80

La conception admise des utilisés par les designers est de considérer un comme un objet servant l’expression du créateur, et interférant le moins possible avec l’idée abstraite que l’il souhaite matérialiser. Pierre-Damien Huyghe affirme que “l’ingéniosité […] consiste à obtenir que le travail matériel de construction effectué pas à pas ne vienne pas faire de bruit dans la présence ultime de l’oeuvre” 15. Pour lui, l’ingéniosité, la qualité d’un vient du fait qu’il n’influence pas ce qui est produit, c’est-à-dire l’oeuvre.

outil,

outil

Or c’est se voiler la face que d’imaginer qu’un parfait n’influencera jamais ce qu’il produit. Comme tout pinceau laisse une trace spécifique, tout façonne les décisions

logiciel

9


de son opérateur par la conception même de son interface et par sa logique interne. Cette hypothèse est corroborée par les expériences menées par le docteur Amod N. Damle à l’occasion de sa thèse au département Industrial and Systems Engineering de l’université d’État de l’Ohio.16 “(Ces) résultats indiquent que […] les processus de résolution de problèmes impliqués dans une activité créative comme le design peuvent être influencées de manière fondamentale par les spécificités de mis à disposi-

l’outil

tion.”

17

outil l’outil outil

Si tout laisse sa trace, pourquoi ne pas assumer cela et choisir à utiliser en fonction de son empreinte propre ? Vu les implications expliquées plus haut ne vaudrait-il pas mieux se demander quel il est juste d’employer avant de se jeter sur son usuel ? La vraie question serait : quel conditionnement choisit-on pour mener à bien ce projet ? Il faut ici entendre le mot conditionnement à la fois au sens psychologique, comme un schéma de pensée préétabli par autrui et au sens marchand, désignant le packaging, le contenant du produit.

logiciel

10

17. “These findings indicate that […] the problem-solving processes involved in a creative activity like design can be influenced in fundamental ways by the features of the tool provided”. DAMLE, Amod N. Influence of design tools on design problem solving, The Ohio State University, 2008, Absract.

logiciels

C’est qu’il existe des alternatives aux graphiques Ces alternatives ne sont pas meilleures en terme de rendement ou de facilité d’accès, mais proposent souvent une approche complètement différente du WYSIWYG 18 à la sauce Adobe, influençant directement tant le résultat formel que les prises de décisions auxquelles le designer aura à faire face.

standards.

16. Pour son étude, il a formé aléatoirement deux groupes de quinze designers expérimentés. Chaque groupe devait dessiner une lampe en sélectionnant et en combinant deux éléments de chacune des deux autres lampes présentées comme références. Pour créer ce dessin, on a demandé aux participants d’assembler plusieurs segments de droites, de tailles et d’orientations différentes sur un ordinateur. Pour le premier groupe les lignes étaient d’une seule couleur, pour le second elles étaient multicolores. On a pu observer que le second groupe apportait plus d’attention au détail de chaque élément plutôt qu’à la forme globale de la lampe.

18. Une interface utilisateur WYSIWYG permet de composer visuellement le résultat voulu, typiquement pour un logiciel de mise en page, un traitement de texte ou d’image. C’est une interface intuitive : l’utilisateur voit directement à l’écran à quoi ressemblera le résultat final. Source : Wikipédia - http://fr.wikipedia.org/wiki/ What_you_see_is_what_you_get


Effet “cristalisation”

12

Rick Valicenti, affiche de conférence au CSCA, 2005

13


Effet “ombre portée”

14

Büro Destruct, présentation de logos, 2001

15


Effet “lueur externe”

16

Ronald Curchd, affiche pour le théâtre de l’Acte, 2001

17


Effet “biseautage et estampage”

18

Chaz Maviyane-Davies, affiche auto-commissionnée, 2002

19


Effet “trame droite”

20

Jan en Randoald, page 158 de Graphic Mic-Mac catalogue de l’exposition éponyme, 2007

21


Effet “fluidité”

22

Michal Batory, affiche pour l’Arsenal, 2004

23


Logiciel libre, open-source et programmation 19. Mainstream, terme anglais : tendance, courant principal. 20. À ne pas confondre avec la notion d’open-source. Open-source désigne uniquement, comme son nom l’indique que l’accès au code source est ouvert. Le logiciel libre implique, outre un code ouvert, une attitude de développement libertaire et participative.

21. Unix est un système d’exploitation propriétaire developpé en 1969 ayant donné naissance à un grand nombre de système comme Mac OSX ou Linux. Source : Wikipédia - http://fr.wikipedia. org/wiki/UNIX 22. GNU N’est pas Unix 23. Hacker est à l’origine un mot anglais signifiant bricoleur, bidouilleur, utilisé pour désigner en informatique les programmeurs astucieux et débrouillards. Plus généralement il désigne le possesseur d’une connaissance technique lui permettant de modifier un objet ou un mécanisme pour lui faire faire autre chose que ce qui était initialement prévu. Source : Wikipédia -http://fr.wikipedia.org/wiki/Hacker 24. Le code source est un ensemble d'instructions écrites dans un langage de programmation informatique compréhensible par un être humain. Une fois écrit par le programmeur, ce code est compilé pour être converti en langage comprehensible par la machine ordinateur. À partir du moment où un code est compilé, il n’est plus possible de le modifier. 25. Extraits du site officel de GNU : http://www.gnu.org/philosophy/free-sw. fr.html

Les premières choses qui viennent à l’esprit quand on évoque la question des alternatives aux programmes mainstream 19 sont les logiciels dits libres 20. Avant toute analyse, il convient de définir précisément ce qu’est un L’idée même de a été lancée par Richard Stallman quand il travaillait à un système d’exploitation au laboratoire d’intelligence artificielle du MIT en 1983.

logiciel libre. logiciel libre libre

Ce système appelé GNU (acronyme de GNU ’s Not U nix  ) avait pour but d’être parfaitement complet et compatible avec Unix tout en étant pour “ramener l’esprit de coopération qui prévalait dans la communauté hacker 23 dans les jours anciens quand la question de la propriété intellectuelle du n’existait pas et quand tous les codes sources 24 s’échangeaient librement.” GNU donnera plus tard naissance à Linux qui permet à n’importe quel possesseur d’ordinateur d’utiliser sa machine de manière gratuite et comme bon lui semble. Pour assurer une structure logistique, légale et financière à son projet, Stallman crée la Free Software Foundation en 1985 et définit alors les quatre libertés fondamentales que doit remplir un 25 tel 21 22

libre

code

libre,

programme :

• Liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages. • Liberté d’étudier le fonctionnement du programme, et de l’adapter à ses besoins.” (Ceci impliquant un code source ouvert.) • Liberté de redistribuer des copies, donc d’aider son voisin. • Liberté d’améliorer le programme et de publier ses améliorations, pour en faire profiter toute la communauté. (Ceci impliquant également un code source ouvert.)

25


Hacking et tweaking logiciel

logiciel,

Cette définition donne une éthique au désormais considéré comme un outil de libération détaché de toute logique commerciale, même si ne signifie pas nécessairement gratuit. “Think of « free » as in « free speech », not as in « free beer. »” 26

libre

Le libre n’est pas la panacée En analysant cette définition établie par la Free Software Foundation, on remarque que ces affirmations sont des considérations éthiques. Il semble important de ne pas perdre de vue que dans le cas des graphistes, les logiciels sont des outils de production devant avant tout servir la création. Avec un comme Processing 27, c’est tout un nouvel espace d’expérimentation visuel qui est ouvert, où le design n’est plus WYSIWYG mais piloté par du Cette approche différente implique des processus de création différents, et donc des productions différentes.

libre

26. “Pensez « libre » comme dans « liberté d’expression », pas comme dans «bière gratuite.»” Richard Stallman sur http:// www.gnu.org

programme code. programme

30. HUYGHE, Pierre-Damien. Modernes sans modernité, op.cit., p. 111

logiciel.

pro-

gramme

code.

27. “Processing is an open source programming language and environment for people who want to create images, animations, and interactions” Processing est un langage de programmation open source et un environement pour ceux qui veulent créer images, animations et interactions. Extrait du site officiel de Processing http://www.processing.org

ciel libre

libre).

programme

Je crois qu’il faut vraiment rester vigilant à ce que

l’éthique logicielle ne prenne jamais le pas sur la production visuelle et que le statut d’auteur soit préservé de tout diktat idéologique. Les grandes firmes ont d’ailleurs beaucoup contribué en bien à l’établissement de standards ouverts qui ont émancipé la création graphique comme le PDF (Adobe), un format de document dédié à l’impression ou l’Opentype (Microsoft et Adobe), un format de police universel.

26

28. Notamment des problèmes avec les plaques en tons directs 29. Si ce n’est pour apprendre.

logiciel

Cette attitude libertaire et autonome étant relayée par la culture hacker, spécifiquement numérique, on peut comprendre que les graphistes ne soient pas encore sensibilisés à ces questions (On peut estimer que moins d’un pour-cent des graphistes professionnels utilisent quotidiennement un

logi-

Mais si l’on considère l’exemple de Scribus, un dédié à la mise en page qui n’est rien d’autre qu’une pâle copie d’InDesign version free software, où est l’intérêt graphique ? Ce est non seulement moins pratique que son concurrent, mais aussi incompatible avec tous les formats de fichiers courants et défaillant dans la production de fichiers PDF 28… Alors certes, puisqu’il est sous licence GNU, on a toute liberté de l’améliorer, mais à quoi bon réinventer la roue ? 29

Graphiquement parlant, le n’a d’intérêt que pour sa source ouverte, impliquant un aspect adaptatif permettant de faire le à sa main, en intervenant directement sur le Cette possibilité permet à l’utilisateur, non seulement de modifier le à souhait en intégrant de nouvelles fonctions personnalisées, mais aussi et surtout de comprendre comment fonctionne son outil, d’en connaître exactement toutes les capacités et les limites. Il s’agit d’éviter de “se réduire à la situation d’usagers ou de consommateurs, c’est-à-dire d’êtres versés et tenus dans une certaine passivité technique.” 30 On passe du statut de consommateur de à créateur de

31. Acronyme de Do It Yourself : “Fais le toi-même”. Terme désignant la création d’objets de la vie courante, technologiques ou artistiques ainsi que certains mouvements culturels. Source : Wikipédia - http://fr.wikipedia.org/wiki/ Do_it_yourself

logiciel

Le terme hacking étant aujourd’hui connoté négativement, on pourra aussi employer tweaking ou bending, moins ambigus, et notamment employés dans l’univers DIY 31. Tweaking et bending désignent le fait de modifier les productions standardisées pour en sortir un résultat personnalisé. On parle par exemple de circuit-bending quand un musicien modifie la carte électronique d’un jouet Dictée magique pour en faire un instrument de musique électronique. Comme un tourneur façonne son outil pour tourner sa pièce comme il l’entend, un graphiste-hacker peut créer ses programmes à sa main, pour répondre à ses exigences propres qui participent de son statut d’auteur.

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Code = design Il faut alors considérer la programmation logicielle non plus comme une technique dans son sens réducteur, mais comme faisant partie du processus de design. Créer son outil, c’est faire des choix qui détermineront le résultat final, comme n’importe quel choix de conception. David Crow parle de “The craft of programming” 32, au sens anglais du terme craft comme on peut l’entendre dans le mouvement des Arts and Crafts, c’est-à-dire avec une relation à l’artisanat, aux métiers manuels. Le est une matière à modeler comme peut l’être un pain de terre glaise ou un bloc de texte.

code

Programmer, c’est faire s’articuler des structures logiques, en les appliquant à des données, ce qui génère un résultat. Il faut bien comprendre que le travail de programmation ne regarde pas tant les données de bases, ni le résultat, mais bel et bien le traitement de ces données par l’enchaînement des instructions logiques. “La puissance créative, c’est écrire le du filtre, c’est décider comment il marche, ce n’est pas l’utiliser,” 33 c’est en cela que le est une matière modelable.

De manière plus pragmatique, un symptôme évident de ce changement est la création du métier de dev-designer, contraction de développeur-designer. À la fois créateur de d’événements logiciels et de matière visuelle, principalement pour le Web et le Flash, un disposant d’un langage de programmation interne. Il suffit de regarder la quantité incroyable d’offres d’emploi et la rémunération moyenne de ceux qui répondent à cette double compétence pour se convaincre que c’est là un des devenirs probables du métier de graphiste. Malgré l’engouement actuel pour le livre d’art et l’édition bien pensée 35, il serait vraiment illusoire de penser que nous, génération digital native, ne serons jamais confrontés à une commande sur média numérique.

code,

logiciel

32. “La fabrication de l’acte de programmation”. CROW, David. “Magic box : craft and the computer”, Eye magazine, op.cit., p. 24 35. On peut observer depuis queleques années une multiplication des salons d’édition d’art indépendants (salon Light à Paris, Motto Fair à Berlin...) ainsi qu’un intérêt particulier des étudiants pour le livre imprimé.

programme

code

code

Graphisme et développement ont un avenir lié

33. “Creative power comes from writing the code of the filter, deciding how it works, not from using it”. Extrait du texte de présentation de la typographie Robotfont éditée par LettError - http://www.letterror.com/content/nypels/robotfont.html

N’ayant pas été enfants avec un ordinateur entre les mains, on peut comprendre que le de par sa nature abstraite, ne soit pas considéré comme un outil pour les designers par les générations précédentes (à quelques exceptions près). Mais nous, apprentis graphistes nés entre 1985 et 1990 qui ont grandi avec un ordinateur et l’essor d’Internet, ne pouvons plus raisonnablement aborder les outils numériques comme des éléments ne participant pas du processus de design. Il faut s’assumer comme une “nouvelle génération de designers créant un futur pour le graphisme où la création est intégrée dans la

code,

programmation.” 34 28

34. “This new generation of designers is fashioning a future for graphic design where craft practice is integrated into the coding itself”. CROW, David. “Magic box : craft and the computer”, op.cit., p. 24

29


Culture numérique et apprentissage Comme on n’imagine même pas travailler sur des formes papier sans connaître les processus d’impression, comment penser pouvoir produire des formes numériques sans en maîtriser les rouages ? Comment envisager sérieusement la création d’un site Internet si l’on n’est pas familier, d’une part avec le média luimême, et, d’autre part, avec la part de réalisation technique c’est à dire la programmation ? Entre papier et écran, les questions sont différentes, et les problématiques de mise en page, typographie, couleur changent du tout au tout : prenons l’exemple classique d’un site Internet : il doit fonctionner pour plusieurs résolutions 36 (format et proportions variables), avec un contenu dynamique 37 (textes de longueurs variables, impliquant des blocs de longueur variable, pas de maîtrise du drapeau, etc.), une typographie et des couleurs dépendantes de la configuration de l’utilisateur. Dans un livre, tout est fini, déterminé une fois pour toutes et donc maîtrisable.

format,

36. On parle de résolution d’un écran pour exprimer le nombre de pixels qui composent l’affichage. Cette résolution est très variable, de 1024x768 pour les plus petits moniteurs jusqu’à 2560x1600 pour les modèles hauts de gamme. (rapport de 1 à 4 ) 37. Par contenu dynamique, il faut entendre contenu indexé dans une base de données, pouvant être modifié par l’administrateur d’un site internet.

38. “Anyone involved in cultural production on, in or around a computer should know how to read, write and think about programs”. DAVIDSON, Drew. Beyond Fun : Serious Games and Media, op.cit., p. 81

Au-delà de la connaissance du média que l’on traite, il convient de toute manière de maîtriser les outils que l’on utilise. Selon Michael Mateas “quiconque serait impliqué dans la production culturelle, avec, pour, ou autour d’un ordinateur devrait savoir comment lire, écrire et penser les programmes informatiques.” 38 Une connaissance de l’ordinateur et donc par extension, de la programmation parait être nécessaire pour nos générations (et a fortiori pour les suivantes). Malheureusement, la réalité est tout autre et il est vraiment paradoxal de constater que malgré le fait que tous les graphistes travaillent sur un ordinateur toute la journée, seule une infime poignée perçoit ce que cela implique, en cerne les enjeux, ou plus simplement, a une vague idée de la logique informatique. C’est que la machine est très souvent considérée comme une black box, mystérieuse, hermétique, compliquée quand ceux qui en saisissent la logique ne sont pas taxés de techniciens, de petites mains, ou d’exécutants…

31


Une question d’éducation

design

design

On peut avancer l’hypothèse générationnelle pour expliquer cette ignorance généralisée et imaginer que d’ici quelques années, quand les digital natives seront à leur tour enseignants, “les designers ne traiteront plus l’ordinateur comme une boîte noire mystérieuse. Un statut d’auteur et une relation plus riche se développeront entre la programmation, le et le public.” 39 Il semble nécessaire que chacun soit sensibilisé aux tenants et aux aboutissants de l’utilisation d’un ordinateur et il n’est pas aberrant de penser que “les enfants devraient être initiés à la programmation informatique dès le plus jeune âge.” 40

de-

sign

Ces cursus dits media sont axés sur l’art contemporain et n’abordent pas les questions de typographie, de mise en page ou de publication, propres au graphique. Quelle que soit la voie choisie par les étudiants graphistes à la sortie de l’école, ils seront confrontés à la création sur support numérique. Or il est nécessaire que “les designers et les développeurs soient placés en équipe uniquement si chacun a une connaissance du champ d’expertise de l’autre.” 41 On ne parle pas ici de former des développeurs professionnels, mais des graphistes suffisamment autonomes techniquement pour développer des prototypes, faire rentrer la création de programmes informatiques dans leur processus de ou simplement comprendre ce qu’est un ordinateur ou un site Web.

Pour un apprentissage collaboratif

39. “Designers will no longer treat the computer as a mysterious ‘black box’ ; we will have authorship, and a richer relationship bewteen coding, design and the audience will develop”. CROW, David. “Magic box : craft and the computer”, op.cit., p. 25

41. “Only practitioners who combine procedural literacy with a conceptual and historical grounding in art and design can bridge this gap and enable true collaboration.” Seuls les praticiens possédant à la fois des techniques de programmation et un fondement historique et conceptuel en art et en design peuvent passer le cap et engager une veritable collaboration (avec les devellopeurs). Ibid, p. 101

Un premier élément qui pourrait expliquer ce déficit d’offre de formation serait la difficulté ressentie par un débutant pour arriver à un résultat en employant la programmation. Si l’on observe une courbe d’apprentissage caractéristique des techniques de programmation qui met en rapport la difficulté ressentie par l’utilisateur pour arriver à un résultat, avec la complexité objective de ce résultat, on constate que la courbe a une forme de plateau, c’est-à-dire qu’il est difficile d’aborder frontalement la programmation sans se décourager. Il me semble que la motivation individuelle de chaque à réaliser un projet est le meilleur moyen d’apprendre à programmer. C’est en effet dans ce cadre que les étudiants sont les plus motivés et donc les plus susceptibles de passer la première marche de la courbe d’apprentissage. Malgré tout, la réalisation de projets individuels dans le contexte d’un cours collectif est difficile à mettre en oeuvre, chaque demandant une attention technique spécifique. Dans ce contexte, l’intervention du professeur se réduit souvent à programmer à la place de pour l’aider dans son projet. Le projet avance, mais ne sait pas mieux programmer.

40. “Children should be introduced to computer programming at an early age”. MATEAS, Michael, “Procedural Literacy : Educating the New Media Practitioner”, On the Horizon, vol. 13, no1, 2005. p. 101

étudiant

Si l’on prend l’exemple de l’apprentissage du logiciel Processing (relativement facile d’accès) dans les formations francophones, on constate que les formateurs se comptent sur les doigts d’une main. On peut tous les citer : Jeff Guess (enseignant à l’école nationale supérieure d’arts de Cergy), Jean-Noël Lafargue (enseignant à l’université Paris 8, à l’école supérieure d’arts du Havre), Douglas Stanley (enseignant à l’école d’art d’Aix-en-Provence et à la haute école d’art et de de Genève) et Marc Wathieu (enseignant à l’école de recherche graphique à Bruxelles).

étudiant

design

l’étudiant l’étudiant

L’étudiant qui cherche à réaliser son projet sera

Dans l’énumération ci-dessus, on constate que les écoles

d’arts appliqués ou que les cycles de formation courts sont absents (il y a bien quelques workshops, mais pas de cours réguliers avec Processing). On peut remarquer que la quasi-totalité de ces cours de programmation font partie de cursus artistiques

42. Un wiki est un site web dont les pages sont modifiables tout ou partie par les visiteurs du site. Il permet ainsi l’écriture et l’illustration collaboratives de documents. Source : Wikipédia - http:// fr.wikipedia.org/wiki/Wiki

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43. Un forum est site web proposant un espace de discussion publique (ou au moins ouvert à plusieurs participants). Les sujets y sont archivées ce qui permet une communication asynchrone. Source : Wikipédia - http://fr.wikipedia.org/wiki/Forum

destinés aux étudiants artistes et non aux étudiants graphistes.

design,

plus aidé par les différentes structures participatives comme les wikis 42 ou les forums 43. Sur ces sites, une aide est dispensée par la communauté qui met à disposition des éléments de code source. En modifiant et en adaptant le code d’autrui à son projet, un peut progresser seul. Cette démarche est très for-

étudiant

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matrice dans la mesure où corriger et modifier implique de déchiffrer parfaitement ce qui est écrit. Historiquement parlant, nous avons la chance unique d’avoir un accès gratuit à une quantité illimitée d’information. Grâce à la mutualisation des savoirs sur Internet, jamais les connaissances humaines n’ont été aussi bien partagées. Même s’il est admis depuis une quinzaine d’années que les designers devraient être à l’aise avec leur outil (l’ordinateur), la réalité est tout autre. Mais depuis 2007, le développement social d’Internet est exponentiel et de véritables communautés de designersdéveloppeurs-artistes se concentrent autour d’initiatives comme Github 44 , Processing ou Arduino 45. Tous ces nouveaux lieux sont autant d’endroits possibles pour repenser les relations entre programmation et apprentissage.

design,

44. Github est un service web d’hébergement et de gestion de développement de logiciels, Le site fournit également des fonctionnalités de type réseaux sociaux : flux, suivi de personnes ou de projets, graphes de réseau pour les dépôts, etc. http://www.github.com 45. Arduino est une plateforme opensource de prototyage électronique basée sur du materiel et un logiciel flexibles et faciles à utiliser. Il est destiné aux artites, designers, passionnés ou à n’importe qui intéressé par la création d’objet ou d’environnement interactifs.

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Ce mémoire a été composé avec l’aide d’un programme conçu pour l’occasion permettant de faire varier le corps de chaque mot en fonction du nombre de répétitions dans chaque chapitre. Cette variation permet de mettre en avant les mots les plus récurrents et donne ainsi un aperçu global du thème abordé. Le code de ce programme est imprimé sur les parties fluo, à l’intérieur des pages et sur la couverture. Merci à Jean-Noël Lafargue pour ses conseils.

Suivi de mémoire : Catherine de Smet, Isabelle Jégo et Jérome Saint-Loubert Bié Typographies : Theinhardt (François Rappo) et Fedra Mono (Peter Bil’ak) Papier : Fluorama 90g Impression laser monochrome 10 exemplaires Mars 2011 Kévin Donnot étudiant en 5e année communication, mention design graphique à l’école des beaux-arts de Rennes



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