Les lauriers et la pourpre. La vie de Pietro Bembo (extrait)

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L’auteur souhaite remercier Moreno Berva, Massimo Danzi, Nicolas Ducimetière, Caroline Gibert et Chiara Lastraioli. Sa gratitude va tout particulièrement à Michel Jeanneret pour son enthousiasme, ses conseils et son appui constant.

Couverture : Titien, Portrait de Pietro Bembo, vers 1540, huile sur toile, 94,5 x 76,5 cm, National Gallery of Art, Washington. La Note bibliographique et la Table des illustrations figurent en fin de volume.

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F B-M pour l’étude de la poésie italienne de la Renaissance

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m Traduit de l’italien par Moreno Berva

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P U   R enise, dans le courant de l’année 1487. Une liasse de papiers à la main, un jeune homme est en route pour le tribunal : son père Bernardo, en procès avec un dénommé Simon Goro, est loin, à Rome, et lui a demandé de le remplacer. Par un concours de circonstances, Simon a lui aussi d’autres engagements ce jour-là et a envoyé son neveu Giusto suivre l’affaire à sa place. Un choix peu judicieux : le neveu est un pazzerone qui a jusque-là gaspillé ses années sans faire rien qui vaille. Ce matin-là, son mauvais génie lui conseille de jouer un tour au jeune homme qui s’avance. Il le prend par surprise, lui arrache les papiers des mains et s’enfuit en courant. Le jeune homme, consterné, reste ébahi. Mais, comme il n’y a rien qu’il puisse faire, il décide de rentrer chez lui. Lorsqu’il arrive au Rialto, il croise à nouveau Giusto. Tout le monde le sait, Venise est une petite ville : par le passé comme aujourd’hui, on finit toujours par croiser les mêmes personnes. Autour d’eux, il y a foule, les gens se pressent aux comptoirs des apothicaires et des marchands d’épices, expédient leurs affaires, lisent les feuilles du jour et les nouvelles publications sur les bancs des typographes. Cet art intrigue les Vénitiens, curieux et entreprenants. Il y a moins de vingt ans, un Allemand, Giovanni da Spira, l’a introduit en ville. Par un merveilleux hasard, c’était en 1469 : une année avant la venue au monde de Pietro, le fils de Bernardo. Bien plus tard, devenu célèbre par le biais de cette même invention et parce qu’il croyait profondément aux prémonitions, au destin et aux signes, il a peut-être réfléchi à cette coïncidence qui avait le goût de la prédestination. Mais, à l’époque de notre histoire, tout ceci était encore de la musique d’avenir. Pour l’instant, il n’y a qu’un bon à rien appelé Giusto, prénom presque

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I P   ’    adoue, 1537. Le garçon est maintenant un homme approchant les soixante-dix ans. Le cheveu s’est fait plus rare. Cependant l’esprit, trempé par d’éclatants succès et des deuils douloureux, n’est pas moins solide ni les désirs moins intenses. Il est impatient, Pietro Bembo. Enfin, après une longue attente, le plus brillant des orfèvres va lui rendre visite. Enfin, il aura la médaille avec son portrait qu’il désirait tant. Cinq ans auparavant, son ami Valerio Belli en avait certes réalisé une première. Maintenant, il la regarde, il la soupèse, la retourne entre ses doigts et se répète qu’il n’en est guère convaincu, qu’il n’en a jamais été vraiment convaincu. Trépidant, il attend avec impatience que Benvenuto Cellini frappe à sa porte. Au milieu de sa collection d’antiquités, bustes et médailles, il la parcourt du regard et en pensée. Les visages et les voix des amis, de ceux qui ont disparu et des rares encore en vie, occupent son esprit. Le regard hésite, puis se pose sur la très célèbre Mensa Isiaca, la splendide tablette de bronze représentant la déesse Isis en compagnie d’autres divinités [Illustration pages 1617], la Tabula Bembina, comme elle était également appelée. Tout près, se dresse le gigantesque San Sebastiano de Mantegna, les têtes de Jules César, Domitien, Caracalla, et encore un portrait de son frère Carlo, une statue d’Amour… Des souvenirs de personnes et de passions retraçant une vie entière. Après des années passées ailleurs, à Rome, des années de cour, de soins et de vie loin de sa villa bien-aimée, il vit enfin, au fond, comme il l’a toujours désiré : loin du tumulte des cours, entouré de ses livres. Il ne le sait pas encore, mais il sera bientôt happé dans le tourbillon de la vie active, de nouveau à Rome. Lorsqu’enfin le 15

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II «S      ». L    n juillet 1478, l’ambassadeur vénitien Bernardo Bembo fit son arrivée à Florence, où il restera jusqu’en mai 1480; il était accompagné de son jeune fils Pietro. L’époque était sensible : en avril, des membres de la famille Pazzi, banquiers concurrents des Médicis, avaient concocté un complot pour mettre un terme à la domination de leurs rivaux. En effet, bien que Florence fût officiellement une république, Laurent le Magnifique en contrôlait la vie politique comme un seigneur. Les conspirateurs avaient décidé de l’éliminer, lui et son frère Giuliano : dimanche 26 avril, les deux frères furent attaqués par traîtrise au cours de la messe célébrée dans le Dôme. Laurent s’en tira, mais Giuliano périt sous les dix-neuf coups de couteau des assaillants. Il s’en suivit une répression féroce, en grande partie mise en œuvre par le peuple florentin lui-même qui, contrairement aux suppositions des Pazzi – qui pensaient que leurs concitoyens devaient rejeter le pouvoir tyrannique des Médicis –, se montra fidèle à ses seigneurs. Bernardo en était à sa deuxième mission à Florence et dut donc faire face à un contexte fort délicat. Après la conjuration des Pazzi, derrière laquelle se cachaient la longa manus du pape Sixte IV, qui visait les territoires florentins, et son bras armé Federico da Montefeltro, une situation de conflit ouvert s’était déclarée. Le pape, le roi de Naples Ferrante d’Aragon et Federico da Montefeltro avaient lancé une guerre faite de sièges et d’assauts. Les alliés de Florence – la République de Venise et le Duché de Milan – étaient réticents à intervenir, et ce pour des raisons diverses. À Milan, l’assassinat du duc Galeazzo Maria Sforza en 1476 31

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III C   t l’événement arriva. Dans l’impasse où il se trouvait, le sort offrit à Pietro une occasion en or. En 1497, son père fut envoyé à Ferrare pour des missions politiques prestigieuses. Il décida de prendre son fils avec lui, comme ce fut le cas par le passé, à Florence et Bergame, en 1489. Bernardo resta à Ferrare jusqu’en 1499 tandis que Pietro prolongea son séjour. Dans cette ville, il eut l’occasion de suivre les enseignements du philosophe, médecin et naturaliste Niccolò da Lonigo, Leonicenus en latin. Ce vieux maître – né en 1428 – bénéficiait de l’estime d’Érasme et collaborait activement avec Aldo Manuzio, autant dans la recherche de manuscrits d’auteurs anciens (Aristote et Galien : il avait en particulier collaboré à la première édition d’Aristote en grec, publiée entre 1495 et 1498, fondamentale pour rétablir les textes originaux du philosophe) que dans la publication de ses propres œuvres, telles que De epidemia quam Itali morbum Gallicum vocant (De l’épidémie que les Italiens appellent maladie gallique), publié en 1497. L’ouvrage, consacré à la syphilis, était de pleine actualité : la descente des troupes françaises de Charles VIII était à l’origine d’une augmentation significative de la maladie, d’où le nom de morbo Gallico. Leoniceno était aussi un excellent philologue, comme en témoigne son travail de correction de l’Historia naturalis de Pline : il avait consacré à ce sujet un volume – dédié à Ermolao Barbaro – imprimé pour la première fois en 1492. Le séjour de Pietro à Ferrare connut une interruption entre la fin de 1499 et 1501 : comme nous le savons, à cette époque Pietro il fut candidat à de nombreux postes de nature politique, candidatures

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T    

IV T     enise est une ville bienveillante à l’égard des amants et des assassins. Amour et mort, qui forment un bon vieux couple, se donnent volontiers rendez-vous dans ses ruelles labyrinthiques, ses sottoporteghi (portiques) malodorants, ses campielli (petites places) obscurs sur lesquels donnent des maisons pourries, des constructions gauchies en briques qui s’effritent, avec des fenêtres mal protégées par des contrevents érodés qui cachent à peine l’humanité souffrante qu’abritent ces murs. Maisons entassées les unes contre les autres, formant ensemble comme une masse tumorale, encastrées entre elles en un puzzle inextricable. À l’intérieur, gondoliers et porteurs déformés par leur bestial travail quotidien, prostituées infectées par le mal français, la syphilis, soldats défigurés lors de l’une des nombreuses campagnes de la Sérénissime, typographes et imprimeurs aux yeux abîmés par les journées épuisantes à la presse. Ici, personne ne s’inquiète d’apercevoir une flaque de sang couler lentement vers le bas de la ruelle alors que l’on entend encore les pas pressés et rapides de gens en fuite, ni de percevoir un bruit sourd dans l’eau d’un canal annonçant qu’un misérable n’a plus à se soucier de son prochain repas, condamné pour toujours à l’embrassade mortelle des algues de la lagune. Et on se soucie encore moins d’une dame couverte d’un fin voile noir en soie qui rencontre furtivement un jeune gentilhomme. Bien sûr, une certaine prudence était malgré tout de rigueur. Venise grouillait d’espions et, tôt ou tard, tout venait à se savoir. Les boutiques des barbiers, des apothicaires et des épiciers étaient le lieu de tous les ragots : et si même les secrets les plus cachés du gouvernement n’étaient pas à l’abri de ces bavardages, une histoire d’amour illicite l’était encore moins.

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V C M  R  C a vie de Pietro ressemble à une représentation jouée sur la scène des plus grandes cours italiennes de l’époque, avec un excellent scénographe qui aurait habilement manœuvré les ficelles théâtrales afin de glisser derrière lui les décors les plus délicieux. On y rencontre tous les berceaux de la Renaissance : Venise, Ferrare, Urbino, Rome. Et, pendant un long instant, apparaît également l’image d’un petit village de la Vénétie, Asolo. Petit, certes, mais célèbre grâce à une prérogative particulière : il offrait hospitalité à une reine, une vraie reine. Normalement, la présence d’une reine sur le sol de la République de Venise était chose inadmissible. Mais, dans ce cas, il s’agissait d’une souveraine en exil, dépouillée de son royaume, flattée uniquement d’honneurs et d’hommages de façade. Elle s’appelait Caterina Cornaro et appartenait à la famille Corner, descendante en ligne directe de la noble famille romaine des Corneli. Elle avait épousé le roi de Chypre, Jacques II de Lusignan, qui mourut en 1473, la laissant enceinte du futur Jacques III. La République de Venise, désireuse d’établir des échanges commerciaux avec cette zone de la Méditerranée, la déclara solennellement fille adoptive et la prit sous sa protection. À la mort de son fils le roi héritier, la demi-sœur de son défunt mari Jacques II de Lusignan, à qui ce dernier avait usurpé le trône, alliée au roi de Naples Ferdinand d’Aragon et avec la bénédiction du pape Sixte IV, avait intrigué pour prendre possession de l’île : les complots sanglants furent nombreux. Dès que la situation d’urgence fut surmontée et une fois le calme revenu, la République envoya ses propres représentants épauler Caterina qui, de la sorte, fut pratiquement évincée du pouvoir. Cependant, de nouveaux complots 97

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VI L C  V Une fois ouvertes les fenêtres qui donnent sur le mont Catri, ils virent à l’orient une belle aurore de couleur rose se lever. Les étoiles avaient toutes disparu sauf Vénus, qui trace les confins entre le jour et la nuit. L’aurore était suave et fraîche et les concerts des oiseaux commençaient dans les bois proches.

’aube d’un jour d’hiver à Urbino. Au Palazzo Ducale, la duchesse Elisabetta Gonzaga entretient ses invités tout au long de la nuit par une conversation agréable : un jeu, dans cette nuit de carnaval, pour mettre à l’épreuve les gentilshommes invités, y compris Pietro. Elle voulait savoir s’ils étaient en mesure de façonner le parfait homme de cour, le parfait Cortegiano. Une journée ensoleillée s’annonçait sur Urbino, mais les personnes présentes avaient toutes le pressentiment que des jours sombres et sans lumière s’approchaient. Ce soir-là, le duc Guidubaldo, vrai prodige de courtoisie et de savoir, le mélancolique, fragile et très courageux fils de Federico, était resté dans ses appartements. Depuis un certain temps, il était frappé de divers maux qui le conduiraient à la mort moins d’une année après. Comme l’écrivit Baldassarre Castiglione dans une lettre adressée au roi d’Angleterre Henri VIII, Urbino parut alors précipitée dans le noir glacial d’une éclipse sans futur; dans la nuit de la mort, et pendant les jours suivants «les astres […] s’étaient obscurcis […] et tout ce que représentait la Nature sentait la mort et l’horreur». Guidubaldo était une sorte de génie : il disposait d’une mémoire hors du commun et ses connaissances étaient très étendues : même à la guerre, en digne héritier de Federico da Montefeltro,

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VII L   lors que Pietro se préparait à quitter Urbino, un homme qui avait suivi le pape Jules II dans une campagne militaire malheureuse contre le duc de Ferrare poursuivait son chemin pour se rendre à Venise, où il avait des intérêts et différentes affaires en cours. Entre autres, il devait organiser son deuxième mariage : en cette année 1511, il avait quarante-cinq ans et le temps commençait à filer. Il avait posé les yeux sur Margherita, fille illégitime de Federico, marquis de Mantoue. Mais les choses traînaient. À Venise, le destin manifesta toute sa puissance et bouleversa ses plans. Francesca Ordeaschi était une jeune femme d’une très grande beauté : si belle que notre homme eut le désir de ne plus la quitter et, donc, de l’emmener avec lui à Rome. En homme entreprenant, il transforma son désir en acte sans aucune hésitation. Après l’avoir par prudence hébergée dans un couvent, il la fit enfin transférer dans un lieu de merveilles, une villa au bord du Tibre dans laquelle œuvraient alors les meilleurs artistes de la place : Sebastiano del Piombo et Baldassarre Peruzzi. Mais pour lui, il en fallait encore plus. Il voulait le meilleur et il pouvait se le permettre. Et le meilleur, à cette époque, s’appelait Raphaël. L’homme dont on parle est Agostino Chigi, l’homme le plus riche de son temps. Dans cette villa, que nous connaissons sous le nom de Farnesina, les principes architecturaux évoquant explicitement Vitruve et une décoration de grande envergure intellectuelle, totalement inspirée des Métamorphoses d’Ovide, se fondaient dans une célébration de l’amour et de la sensualité. Raphaël voulait rendre éternel cet amour fabuleux qui brisait de façon effrontée les barrières sociales, à travers son idéalisation dans une image en même temps 137

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VIII L    e 10 décembre 1503 fut une journée glaciale. À Venise, un vent du nord implacable soufflait sans relâche. Trois gentilshommes marchaient en rasant les murs. Ils se rendaient pour le déjeuner chez un ami commun qui tenait à fêter avec eux son anniversaire. Dans la maison de Carlo Bembo, la grande cheminée allumée fut un vrai soulagement pour Federico Fregoso, le Magnifico Giuliano de Médicis et Ercole Strozzi. Surtout pour ce dernier, malade et infirme. Après le repas, Ercole s’approcha à nouveau de la cheminée : nous l’imaginons tendre ses mains vers la flamme crépitante. Soudain, une discussion, en apparence futile, s’engagea entre les amis. Le Magnifico Giuliano venait de se plaindre de ce rovaio qui pénétrait implacable par les minuscules fissures des fenêtres aux verres plombés. Qu’était donc ce rovaio ? À Venise, à Ferrare et à Gênes, régions d’origine des interlocuteurs, on n’avait jamais entendu ce mot qui signifiait, en fait, tramontane. Ainsi, en discutant de la langue parlée à Florence, les quatre amis fondèrent la langue italienne telle qu’elle sera parlée pendant des siècles. C’est du moins ce que veut nous faire croire Bembo dans la fiction de ses Prose della volgar lingua [Illustration page 156]. Imprimée en 1525, l’œuvre fut régulièrement revue et corrigée, et ce jusqu’au dernier moment. Dans la fiction, elle est présentée comme émanant de ces discussions lointaines et se veut rédigée dans ses parties essentielles avant 1515. Vers la moitié des années 1520, Bembo avait besoin d’une consécration définitive. Il voulait offrir aux Italiens une œuvre qui, à travers une exemplification très riche, puisse constituer un manuel de grammaire de la meilleure langue possible. En même temps, ce livre devait être une sorte d’histoire de la littérature italienne 155

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IX F      : P, ’  le de Šipan, octobre 1559. Monseigneur Ludovico Beccadelli échange un regard silencieux avec son aumônier Pellegrino Brocardo. La fresque que ce dernier est en train de peindre progresse rapidement : seuls les portraits de Reginald Pole et de Iacopo Sadoleto manquent encore. Tout un monde d’amitiés, d’affections, de passions littéraires et religieuses vivrait ainsi une deuxième fois sur les murs de la petite église de ce lieu d’exil où le féroce Paul IV avait relégué Monseigneur. Dans la fresque figuraient «nos MM. Contarino et Bembo, et Fracastoro et Sannazaro, et Navaiero, avec Venise toute proche, et parmi eux notre M. Michel-Ange est vivant et on dirait qu’il pense». Ensemble, les protagonistes de l’évangélisme italien poursuivaient ici leurs réflexions sur une saison débordante de renouvellement spirituel, lorsqu’il était possible de croire à une Église enfin pure, dans laquelle les lettres auraient contribué au perfectionnement de l’homme, édifié par des exemples de beauté immortelle. Ils étaient tous morts, ou lointains, ou alors réduits au silence : les nouvelles années avaient apporté les censures, les condamnations, le mépris de la poésie. Bembo, le grand Bembo, pour les nouveaux censeurs arrogants et grossiers, pour les rêches dépositaires de l’orthodoxie, n’était qu’un impie sensuel qui avait scandaleusement attribué aux femmes aimées des adjectifs réservés à Dieu. Non est tolerandum! Ses livres méritaient la punition, peut-être même l’interdiction.

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N  Pour toutes les citations des Asolani-Azolains, nous nous sommes référés à la traduction de M.-F. Piéjus, Paris, Les Belles Lettres, 2006. Je n’ai pas voulu alourdir ce travail de notes de bas de page systématiques. Je trouve néanmoins utile de fournir au lecteur une note bibliographique qui, sans être exhaustive, peut permettre de s’orienter dans la vaste littérature concernant Pietro Bembo. Cette note fournit également les informations concernant les sources citées dans le texte. Les citations du Sogno et des Rime proviennent de l’édition des Rime, A cura di A. Donnini, Roma, Salerno Editrice, 2008. Pour les Stanze, j’ai utilisé P. B, Stanze, Edizione critica a cura di A. Gnocchi, Firenze, Società Editrice Fiorentina, 2003. L’édition des Motti de Vittorio Cian (1888) a été reproduite avec introduction et index dans P. B, Motti, A cura di V. Cian, Premessa di A. Gnocchi, Note al testo e Indici a cura di G. Raboni, Milano, Sylvestre Bonnard, 2007. Les Leggi della compagnia degli amici se trouvent dans P. B, Prose e rime, A cura di C. Dionisotti, Torino, U.T.E.T., 1966, pp. 699-703 (= Prose e rime); dans ce même volume se trouvent également les Prose della volgar lingua, disponibles aussi dans une édition qui compare l’editio princeps avec le ms. autographe Vat. Lat. 3210 : P. B, Prose della volgar lingua. L’editio princeps del 1525 riscontrata con l’autografo Vaticano latino 3210, Edizione critica a cura di C. Vela, Bologna, C.L.U.E.B., 2001. J’ai consulté les Asolani dans l’édition suivante : P. B, Gli Asolani / Les Azolains, Traduction et présentation de M.-F. Piéjus, Préface de M. Pozzi, texte italien et notes par C. Dionisotti, Paris, Les Belles Lettres, 2006. L’édition critique se trouve dans P. B, Gli Asolani, Edizione critica a cura di G. Dilemmi, Firenze, Presso l’Accademia della Crusca, 1991. Le De Ætna et la lyrique latine sont dans P. B, Lyric poetry. Etna, Edited and translated by M.P. Chatfield, Cambridge (Mass.) & London, Harvard University Press, 2005. Du dialogue De Urbini Ducibus existe une édition bilingue italien-latin : P. B, I Duchi di Urbino. De Urbini Ducibus Liber, Edizione critica, traduzione e commento a cura di V. Marchesi, Bologna, I libri di Emil, 2010. Le texte en langue vulgaire est dans P. B, Volgarizzamento des Dialogs De Guido

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T   Couverture : Titien, Portrait de Pietro Bembo, vers 1540, huile sur toile, 94,5 x 76,5 cm, National Gallery of Art, Washington. p. 9 : Francesco Guardi, Le Grand Canal de Venise avec le palais Bembo, vers 1768, huile sur toile, 47 x 76,5 cm, J. Paul Getty Museum, Los Angeles. p. 11 : Copie d’après Raphaël, Portrait de Julien de Médicis, e siècle, tempera et huile sur toile, 83,2 x 66 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. p. 16-17: Mensa Isiaca ou Tabula bembina, 1er siècle après J.-C., tablette en bronze, 142,24 x 91,44 cm, Musée des antiquités égyptiennes, Turin. p. 21 : Valerio Belli, Médaille de Pietro Bembo, vers 1532, bronze, diam. 4 cm, Victoria and Albert Museum, Londres. p. 23 : Giulio Bonasone, Portrait de Pietro Bembo, 1572, gravure, 23,3 x 17 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. p. 24 : Titien, Portrait de Pietro Bembo, vers 1540, huile sur toile, 94,5 x 76,5 cm, National Gallery of Art, Washington p. 35 : Domenico Ghirlandaio, Histoire de saint François d’Assise : le pape Honoré III approuve l’ordre franciscain, vers 1482-1485, fresque, chapelle Sassetti, basilique Santa Trinita, Florence (détail : Angelo Poliziano). p. 44 : Pietro Bembo, Petri Bembi De Ætna ad Angelum Chabrielem liber, Impressus Venetiis, in ædibus Aldi Romani mense februario MVD, c. Ai r, Cambridge University Library. p. 58 : Pietro Bembo, Le cose volgari di messer Francesco Petrarcha, Impresso in Vinegia nelle case d’Aldo Romano, nel anno M D I del mese di Luglio, c. Ai r, Bibliothèque nationale de France, Paris. p. 59 : Pietro Bembo, Le cose volgari di messer Francesco Petrarcha, Impresso in Vinegia nelle case d’Aldo Romano, nel anno M D I del mese di Luglio, c. Ziii r, Bibliothèque nationale de France, Paris. p. 65 : Raphaël, Portrait de Fedra Inghirami, 1514-1516, huile sur bois, 89,5 x 62,8 cm, Galerie Palatine, Florence. p. 81: Bartolomeo Veneto, Portrait de gentilhomme, vers 1512, huile sur bois, 73,5 x 53 cm, Galleria Nazionale d’Arte antica, Rome. p. 85 : Cheveux de Lucrèce Borgia (1480-1519), 1928. Veneranda Pinacoteca Ambrosiana, Milan. p. 88 : Pinturicchio, Dispute de sainte Catherine d’Alexandrie, 14921494, Palais apostolique, appartements des Borgia, Vatican (détail : portrait présumé de Lucrèce Borgia). p. 95 : Lorenzo Costa, Allégorie à la cour d’Isabelle d’Este, e siècle, huile sur toile, 164,5 x 197,5 cm, Musée du Louvre, Paris. p. 99 : Pietro Bembo, Gli Asolani di Messer Pietro Bembo, Venise, Alde, 1505, f. [1] r°. Édition originale. Fondation Barbier-Mueller pour l’étude de la poésie italienne de la Renaissance, Université de Genève. 196

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Direction éditoriale : Professeur Michel Jeanneret, président du Conseil de la Fondation Barbier-Mueller pour l’étude de la poésie italienne de la Renaissance, et Nicolas Ducimetière, secrétaire du Conseil de Fondation Iconographie : Caroline Gibert Graphisme : Dominick Emmenegger, Vitamine Traducteur : Moreno Berva Photogravure et impression : Musumeci SpA, Quart (Aoste) Imprimé en Italie (Union Européenne) ISBN 978-2-7572-1037-6 Dépôt légal : août 2016

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