ARTCOTEDAZUR N°9

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MUSIQUES ACTUELLES /// PEINTURE /// DESIGN /// LUTHERIE /// JOAILLERIE

Chacallis peinture volumétrique SUPPLÉMent CULtUReL DeS PetIteS AFFICHeS DeS ALPeS MARItIMeS


making of


ISSN 1962- 3569 Place du Palais 17 rue Alexandre Mari 06300 NICE Ont collaboré à ce supplément culturel : Rédacteurs Faustine Sappa Olivier Marro Alain Amiel Rodolphe Cosimi Direction Artistique François-Xavier Ciais Création Graphique Maïa Beyrouti Photographes Jean-Charles Dusanter Hugues Lagarde Photo de Couverture Louis Chacallis détail ©Hugues Lagarde Contacter la Rédaction : Sidonie Bois Tél : 04 92 47 21 81 Fax : 04 93 80 73 00 sidonie@artcotedazur.fr www.artcotedazur.fr Publicité : Anne Agulles Tél : 04 93 80 72 72 Port. 06 01 75 37 35 anne@petitesaffiches.fr Abonnement : Téléchargez le bulletin d'abonnement sur : www.artcotedazur.fr ou par tél : 04 93 80 72 72 Art Côte d’Azur est imprimé par les Ets Ciais Imprimeurs/ Créateurs « ImprimeurVert », sur un papier répondant aux normes FSC, PEFC et 100% recyclé. La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, cellesci n’engagent que leur auteur. Tous droits de reproductions et de traductions réservés pour tous supports et tous pays.

lecteurs, acteurs, financeurs, et partenaires de notre revue, nous avons réussi cette année à obtenir près de 1 000 abonnés supplémentaires, et désormais 112 000 internautes visitent en moyenne notre site www.artcotedazur.fr chaque mois. Dans ce nouveau numéro, nous vous laissons le soin de goûter à nos belles vendanges culturelles tardives, cette nouvelle décantation est à consommer avec délectation. Toute l’équipe d’Art Côte d’Azur se joint à moi afin de vous souhaiter une Bonne et Heureuse Année 2010, inventivité, fraîcheur, et développement culturel seront au rendezvous dans les prochains mois, afin que soufflent pleinement et sans ombrage, l’Art et la Culture sur notre région. F-Xavier CIAIS

ça sent le sapin La société de consommation Ne tourne plus vraiment rond. Des gens courent en vain, Avec des sacs plastiques, Frénétiques. Il faut acheter, Acheter à en crever, Il n’y a plus de lendemain. Plus rien n’est construit pour durer. Pour le plaisir des marchands, Tout finira par être jeté, Concassé et broyé, Sans ménagement. Au plus vite, Il faut tout engloutir petite. Le saumon éventré, Le foie gras truffé, La maigre dinde, Et ses marrons poilus. Alors qu’on n’en peut plus, Arrive à toute blinde, La bûche glacée Et ses nains déglingués. Des gens se gavent À mort. D’autres en bavent, Et crachent, Sur la crèche Où dorment Dark Vador, L’appareil numérique, Le robot électrique, Les poupées à la bouche tordue, Gonflables ou mal foutues, Les écrans plats ou plasma. Passez-moi le plat, Lâchez-moi le joystick, Avec vos jeux pathétiques, Vos strings en dentelle, Et la belle vaisselle, Tout finira à la poubelle. Une vie passée à crédit, Du Lundi au Samedi. Une vie de locataire, Sans repère. Arnaud Duterque

photos ©J-Ch Dusanter

Art Côte d’Azur Supplément culturel des Petites Affiches des Alpes Maritimes Numéro 3481 du 4 au 10 décembre 2009 Bimestriel

On y est presque tous arrivé….à finir l’année… et à déjouer les cassandres économiques. Telle la vigne qui doit souffrir pour offrir un bon vin, il fallait boire le calice jusqu’à la lie cette année pour que les meilleurs puissent la finir, sans trop y laisser de raisins secs. Le mois de décembre est là, avec sa guirlande de fêtes pour clôturer une année 2009 au demeurant bien particulière. Aurons-nous la force et le courage de ripailler, que nous soyons riches ou misérables c’est en famille ou entre amis que nous tenterons d’oublier avec la modération de Dionysos nos vicissitudes quotidiennes. Ne dit-on pas que c’est aussi en temps de crise ou de disette que les meilleures créativités émergent, voilà qui fera pour 2009, une cuvée certainement exceptionnelle ! Une fin d’année c’est aussi le bon moment pour remercier celles et ceux qui font que nous existons, alors un grand MERCI à tous nos


En Ville 6

HORS LES MURS

Amsterdam, les derniers jours de Van Gogh

10 ANTIBES 12 AURIBEAU SUR SIAGNE 14 TOURETTES SUR LOUP

© H Lagarde

Les Bains douches

Arts Vivants le cirque

© A Amiel

Château Mairie Expo avec le FRAC PACA

16 HYÈRES 18 NICE

Villa Malestevens

Interview Directeur de Ballet Nice Mediterrannée © J-Ch Dusanter

22 SAINT JEAN CAP FERRAT 24 MENTON Villa Santo Sospir

Saison théâtrale et musicale

© P.Tallon


La Vie des Arts 26 PEINTURE 30 BIJOUX CONTEMPORAINS 32 MUSIQUES ACTUELLES 35 Louis Chacallis

© J-Ch Dusanter

Espace Solidor

QUADRICOLOR, SPYFOX, PLAYMATES

dossier Métier A. Yvos, J-P. Besch, et P. Rannou-Cassegrain

© G Taride

COMMISSAIRE-PRISEUR

39 DESIGN

Dominique Zoldaz Gérard Taride

43 LUTHERIE D’ART 45 CREATIONS Kamel CHENAOUY

© H Lagarde

ŒUVRES D’ART A TOUT PRIX !

© H Lagarde


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EN VILLE

AMSteRDAM

Hors les Murs - Expo

Amsterdam, Musée Van Gogh Les lettres de Van Gogh. L’artiste parle. Jusqu’au 3 Janvier 2010

Pour la première fois, plus de 120 lettres originales (particulièrement fragiles et sensibles à la lumière) sont présentées accompagnées d’œuvres en rapport.

Vincent relate à son frère les problèmes qu’il rencontre, ses préoccupations techniques, sa difficulté de vivre, mais aussi ses (plus rares) moments de bonheur, de joie de vivre, d’exaltation.

© A Amiel

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xaltée, enfiévrée, éprouvante, la vie de Vincent Van Gogh s’exprime et se déploie dans ses œuvres mais aussi dans l’impressionnante correspondance, récemment mise à jour, qu’il a entretenue tout au long de sa vie avec son frère, ses amis, sa famille. La correspondance démarre en 1872, mais ne prendra corps qu’à la suite d’un séjour de Théo à La Haye. Si jusque là, les deux frères échangeaient des informations professionnelles, des reproductions, des portraits, à partir de cette visite, les lettres où ils évoquent leurs découvertes, leurs intérêts, leurs soucis, deviennent plus nombreuses et plus personnelles. Vincent relate à son frère les problèmes qu’il rencontre, ses préoccupations techniques, sa difficulté

de vivre, mais aussi ses (plus rares) moments de bonheur, de joie de vivre, d’exaltation. Après la mort de Théo qui a suivi de quelques mois celle de Vincent, sa femme Jo a lu, rassemblé et classé toutes les lettres. Elle les fera éditer une vingtaine d’années plus tard, en 1914, dissimulant au passage des pages celles qu’elle estimait gênantes pour elle, pour la famille ou pour l’image qu’elle voulait donner de la relation intense entre les deux frères. Son fils Vincent (dit l’ingénieur), héritier des œuvres de son oncle, a voulu que tout soit mis à la disposition des chercheurs et des historiens. Une nouvelle édition a été établie en 1960. Néanmoins, quelques lettres, surtout celles des dernières semaines de la vie du peintre, nous manquent cruellement pour comprendre son geste.


AMSteRDAM

EN VILLE

Quinze ans de travail ont été nécessaires pour reclasser, relire et retraduire toutes les lettres retrouvées.

© A Amiel

© A Amiel

© A Amiel

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© A Amiel

Pour la dernière édition scientifique de ses lettres (octobre 2009) qui rassemble enfin toute la correspondance, quinze ans de travail ont été nécessaires pour reclasser, relire et retraduire toutes les lettres retrouvées. Assortie de milliers d’illustrations, annotées soigneusement, accompagnées d’un site Internet très complet (texte original, fac similés, traductions, notes, etc.). Cette édition en six volumes (plus de 2000 pages) permet enfin une approche plus serrée du parcours de Vincent depuis son village natal de Zundert à ses derniers jours d’Auvers sur Oise.

Maintenant tu le proposes et je l’accepte de revenir plus tôt dans le Nord. J’ai eu la vie trop dure pour en crever et perdre la puissance de travailler

Des lettres indispensables pour suivre son parcours et plus tard l’évolution de son regard et de sa technique de peindre. Les quelques 818 lettres (658 sur 818 à son frère Théo) dessinent un monde finalement pas si différent du nôtre. Les réflexions philosophiques, sociologiques, la vision du monde de Vincent montrent une pensée d’une grande modernité : préoccupations politiques, anti-colonialistes, écologiques, critique de la toute puissance de l’argent, de la conception du vendable en art... AA

Derniers jours de Van Gogh Les deux années terribles entrecoupées de crises que Vincent vient de vivre à Arles puis à Saint Rémy l’inquiètent sur sa santé mentale. Ne supportant plus l’entourage de malades mentaux de l’hospice de Mausole où il vit depuis un an, Vincent quitte Saint-Rémy de Provence pour Auvers-sur-Oise où le docteur Gachet, ami des peintres veillera sur lui. Grâce à l’abondante correspondance dans laquelle il évoque ses œuvres et ses états d’âme, nous pouvons suivre au fil des jours comment l’espérance en ce retour « dans le Nord » et les soixante-dix jours de travail intense dans une nature lumineuse se sont achevés dans une

détresse infinie. A travers un récit chronologique et analytique articulant lettres et peintures l’auteur met en lumière les moments essentiels des dernières semaines de la vie de Vincent Van Gogh et tente de rendre plus compréhensibles les déterminismes qui ont entraîné son suicide.

Vincent Van Gogh à Auvers-sur-Oise Préface de Jean-Pierre Béquet Maire d’Auvers-sur-Oise 80 pages 60 illustrations couleur



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antibes

Galerie

Les Bains douches au cœur du renouveau artistique

p L’ancien « Bains douches » et ses salles voutées sont ouverts à la création contemporaine depuis

L’ancienne acropole antique sur la Méditerranée semble douée depuis toujours pour l’accueil des artistes. En 13 ans, la Galerie des Bains douches n’a pas failli à la tradition mais cherche aujourd’hui un nouveau rayonnement.

A

ntibes où la lumière réfléchie par les vieilles pierres semble plus radieuse que nulle part ailleurs a conquis, de Monet à Picasso via Nicolas de Staël, bien des peintres. La ville reste riche en lieux d’art, de mémoire qui racontent ces séjours inspirés comme le Musée Picasso récemment rénové ou la Fondation Hans Hartung véritable disque dur du plus grand peintre de l’abstraction. A la veille d’inaugurer le Bastion Jaume Plensa, la municipalité a revu à la hausse les ambitions d’une galerie plus jeune dans la carrière mais dont la mission est d’importance puisqu’elle est chargée de relayer le talent d’artistes actuels. Une programmation resserrée autour d’artistes professionnels Etablie dans l’ancien bâtisse qui fut jadis un bâtiment militaire puis un établissement de Bains douches municipal, la galerie bien nommée participe activement à l’attrait de la ville depuis 1996. « Ce fut une idée de Jean Gismondi, homme d’art et fondateur du salon des antiquaires d’Antibes, alors qu’il était adjoint à la culture. A l’époque où nous avons donné une nouvelle vie à ce lieu, j’étais moi à ses côtés en tant que délégué aux musées », explique Simone Torres qui a repris il y a deux ans le poste d’adjoint à la culture. Il faut avouer que l’idée s’est avérée pertinente. Sise à deux pas de la porte des remparts, la galerie, qui déploie sous ses voûtes 136 m2, est baignée d’une clarté qui se prête merveilleusement aux accrochages. On ne compte plus le nombre d’artistes qui profitèrent de cette manne en 13 ans de monstration. « La nouvelle politique culturelle veut que cet espace stratégique sis entre le port et la vieille ville soit réservé désormais aux artistes professionnels qui vivent de leur art ». Le député-maire Jean Léo-

p Bustes en glaise réalisés par Ho lui, un artiste d’origine chinoise vivant et travaillant à Antibes.

netti a souhaité également qu’elle relaye les travaux de l’artisanat d’art. L’exposition consacrée en août à Jean-Paul Van Lith, le célèbre maître verrier et céramiste évoluant aux confins de ces deux disciplines en fut un bel exemple. Et puis la galerie n’abrite-t-elle pas dans une de ses salles un ancien atelier de gravure ? « L’atelier du safranier est ici depuis l’origine, c’est Dominique Prévost, enseignant en gravure et dessin, qui y organise des stages toute l’année », explique Christine Pélissier, responsable des lieux. « Nous ferons une entorse au règlement parce que même s’ils ne sont pas encore dans le circuit, leurs exercices méritent d’être montrés. Nous accueillerons ici en juin les élèves de l’école de céramique du lycée Leonard de Vinci », poursuit Simone Torres. Il est vrai que nous ne sommes pas loin du Musée Picasso qui, dans sa collection, possède un fonds unique de céramiques réalisées par le maître durant son séjour antibois. « Quant aux autres salles de 36 m2 chacune, elles permettent d’accueillir tous les mois 2 ou 3 artistes plasticiens sélectionnés par un comité composé d’élus de la majorité et de l'opposition, dont je fais partie », tient à préciser Simone Torres qui s’est investie dans sa mission au point de présenter à chaque vernissage les créateurs invités et leur démarche. « Depuis que nous faisons cet effort, la fréquentation a doublé. La médiation en matière d’art contemporain n’est pas un vain mot. »

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es.

EN VILLE

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p Christine Pélissier (Responsable de la Galerie des Bains douches) et Simone Torres (adjointe du Maire, déléguée à la culture de la ville d’Antibes) devant la Villa Fontaine. © J-Ch Dusanter

photos : © J-Ch Dusanter

depuis

MOnACO

p Simone Torres, une femme d’action et de passion

Sur la Promenade des arts En novembre c’est un duo, étonnamment, qui occupait l’espace. Stéphane Blanchard, avec ses toiles abstraites aux notes vives de couleurs, et le sculpteur chinois Ho lui, antibois depuis plus de 25 ans et qui ne manqua pas d’impressionner le public. « Ho lui est un personnage atypique qui réalisa le bas-relief de Lady Di, sur une pièce de monnaie au moment du mariage royal. Né à Shangaï en 1955, il s’est lancé dans la sculpture pendant la révolution culturelle. C’est à cette époque qu’il édifia les têtes en béton du Grand Timonier dans le chantier où travaillait Zhang Thong Ren, qui n’est autre que l’ami d’Hergé, celui qui lui inspira le personnage de Tchang du Lotus Bleu », commente Simone Torres avant de poursuivre : « La programmation 2010 sera dans la même veine. Avec plus de 70 demandes en attente nous avons de quoi surprendre agréablement les antibois. Personnellement je souhaiterais exposer le travail de Jean-Jacques Ninon que j’apprécie beaucoup ». A l’orée de son 14ème anniversaire, la galerie serait-elle appelée à connaître un nouvel essor ? « Elle se situera bientôt sur le passage de la Promenade des arts que nous sommes en train de réhabiliter ». Ce nouveau parcours sur les remparts accueillera au printemps une installation monumentale de Jaume Plensa ainsi qu’un bastion à son nom destiné à abriter de grands événements.

Christine Pélissier et ses deux assistantes assurent l’accueil des expositions et du public à la Galerie. p

« La sculpture monumentale de 8 mètres de haut sera une œuvre semblable à celle composée de lettres en fonte d'aluminium que nous avions installée sur les remparts durant l’été 2007. Dans le même temps, le Musée Picasso consacrera une exposition dédiée à l’artiste espagnol autour de ses dessins ». Ainsi le souhait le plus cher que cultive l’adjointe à la culture serait d’agrandir la galerie des Bains douches en récupérant les bâtiments mitoyens. « Nous pourrions ainsi répondre à ces demandes qui ne cessent de croître ». Une excellente idée qui permettrait à la ville d’y exposer également les travaux réalisés par ses artistes en résidence. Car depuis une quinzaine d’année, la ville d’Antibes reçoit tous les trois mois à la villa Fontaine, sur la commune du Safranier, des créateurs venus du monde entier. « Après avoir accueilli cet été une américaine, Anne-Elisabeth Schalegel, c’est le berlinois Jean-Noël Schramm, (peinture sur huile et calligraphie) qui a investi cet automne la villa, qui fut donnée à la municipalité par une antiboise passionnée d’art. Depuis, cette résidence fonctionne avec les artistes venant des villes avec lesquelles nous sommes jumelés. « Nous en faisons la promotion jusqu’en Australie », conclut l’adjointe à la culture d’une ville qui malgré son lourd héritage artistique ne semble pas vouloir s’endormir sur ses lauriers. OM


E n V ille

R o q u e t t e - sur - S iag n e

Nous avons vécu à cette époque une rupture avec les codes de cet art millénaire. D’abord par la remise en cause du lieu.

Azur piste : Un sacré numéro !

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© J-Ch Dusanter

Azur Piste est la seule école de cirque reconnue par l’Etat en région PACA. Et il s’en passe des choses sous son chapiteau dressé depuis 2004 dans un grand pré de la Roquette-sur-Siagne…

p Atelier de jonglerie sous le plus grand chapiteau de la région PACA

© J-Ch Dusanter

p Patrick Fodella, Co-directeur d’Azur Piste

zur Piste est né en fait il y a 25 ans au moment où le monde circassien faisait son autocritique », explique Patrick Fodella, son fondateur, qui a vécu de l’intérieur cette révolution. « L’école Fratellini et Alexis Gruss au Carré Montfort furent les premiers en 1974 à oser dire aux grandes familles qu’on pouvait apprendre le métier sans être né dans la sciure. » L’étincelle avait mit le feu aux poudres et, au début des années 80, une nouvelle génération de circassiens suivis par d’autres acteurs issus de disciplines connexes décidèrent de créer leurs propres écoles de cirque. C’est le cas de Patrick Fodella, ex gymnaste de l’équipe de France : « Venant du sport de haut niveau, j’avais mis en place en 1984 une activité acrobatie avec une école de danse à la MJC de Mougins. Après y avoir œuvré pendant deux ans aux côtés d’une école de cirque, j’ai décidé de franchir le pas ». Azur Piste voit le jour en 1986, posant les bases de l’apprentissage d’un autre cirque, plus axé sur des valeurs artistiques et sportives que « foraines ». « Nous avons vécu à cette époque une rupture avec les codes de cet art millénaire. D’abord par la remise en cause du lieu. Le cirque Plume refusait le cercle, la troupe Archaos investissait la rue. Et après avoir mis au placard Monsieur Loyal, les animaux disparurent du décor. Le divorce était consommé !» L’autre étape marquante vit la restructuration de la profession. En 1985 naissait le Centre national des arts du Cirque, mettant un terme au règne absolu des grandes familles de chapiteau. « L’annonce fit l’effet d’une bombe dans le rang des tenants de la tradition ». Si l’accès à cette nouvelle école nationale fut facile les quatre premières années, on a dû rapidement refuser du monde. Pour répondre à cette demande, l’état dut déléguer à certaines écoles la préparation au diplôme national. Cinq furent labélisées en France dont « Azur Piste » sur la Côte d’Azur, les autres étant à Lille, Toulouse, Montpellier et Chambéry.

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EN VILLE

p Acrobaties aériennes ou au sol, les feux de la rampe ont pris un coup de jeune avec le renouveau du cirque.

Du loisir à la formation « Azur piste », pionnier du renouveau du spectacle vivant en région PACA, prit ses aises en quittant Mougins pour installer en 2004 ses chapiteaux à la Roquette-sur-Siagne où l’association dispense aujourd’hui son savoir-faire. Toutes les disciplines du cirque y sont enseignées à partir de 4 ans : l’acrobatie, l’aérien, l’équilibre, la jonglerie. « Le trapèze séduit surtout les filles, les garçons préférant l’acrobatie au sol, explique Patrick. Quant au clown, c’est une spécialité réservé au cursus professionnel. Il y a un trop gros travail à faire sur soi-même. » L’école de loisirs draine à elle seule 450 amateurs. 350 à la Roquette-sur-Siagne, une centaine entre Cannes (MJC Picaud) et Nice (Espace Magnan) où Azur Piste dispense ses cours en tant que prestataire de service. Côté formation professionnelle, deux filières sont disponibles. L’une destinée aux artistes circassiens, l’autre aux formateurs, soit deux promotions d’une douzaine de candidats par saison. Outre les cours, la formation comprend deux semaines de stage auprès de professionnels. « Notre rôle est aussi de mettre les élèves en contact avec des compagnies. Elles ne sont pas légion dans le département, le réseau du cirque se développant plus à l’ouest. » Si la Côte d’Azur n’offre que peu de débouchés dans le Cirque, certains élèves en formation se produisent dans les nombreux cabarets et casinos que compte la Riviera. « Le coût de la vie est plutôt un handicap pour ceux qui viennent chez nous en formation. En revanche, ils se rattrapent financièrement avec les nombreuses offres des salles de spectacles ou celles issues de l’évènementiel. » Ainsi le casting d’Azur Piste ressemble-t-il chaque année à un melting-pot. « Cette saison, des Français y côtoient un Anglais, une Suédoise et même un Chilien. En 20 ans, une quarantaine de professionnels du circuit sont passés par notre formation », tient à souligner Patrick.

© J-Ch Dusanter

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Quant au clown, c’est une spécialité réservé au cursus professionnel. Il y a un trop gros travail à faire sur soi-même.

Un chapiteau multipistes A côté de ses activités régulières, l’équipe d’ Azur Piste (25 salaries dont 20 enseignants) propose des stages pour les vacances scolaires. « En termes de loisirs, on touche près d’un millier de personnes par an. Il faut ajouter à cela les 500 ou 800 scolaires qui viennent chez nous ou que nous sensibilisons dans les écoles et lycées des Alpes Maritimes ». Azur Piste a ainsi engagé un travail plus spécifique avec les enfants du Val de Siagne, incluant un spectacle de fin d’année qui fédère 200 élèves comme avec le lycée Tocqueville de Grasse, une ville dont le théâtre est une scène conventionnée pour la danse et le cirque. Depuis deux ans, l’association délivre même une unité d’étude « spectacle vivant » dans la filière management du sport de l’UFR STAPS à l’université de Nice. Mais Azur Piste est également un lieu d’accueil pour les circassiens qui souhaitent répéter. « Nous fonctionnons comme une résidence d’artistes. En échange du lieu, les artistes invités dispensent des cours chez nous. En novembre, Yann Laforge, du Cirque Zanzibar, était à Piste d’Azur pour s’entraîner sur son mât chinois ». Et comme si cela ne suffisait pas, le chapiteau de près de 1000 m2 (14 m au faîte), reconfiguré avec ses gradins, peut recevoir 700 personnes. « Notre haute saison en termes de représentations publiques sont les fêtes de fin d’année et le printemps où nous présentons quelques spectacles d ‘écoles ainsi que nos propres créations avec la formation professionnelle. » Un tel rayonnement sur les arts du cirque a fait de « Azur Piste » un partenaire du « Pôle Azur Provence ». Avec le soutien de la CASA, du Conseil Général et du Conseil Régional, « Azur Piste » est le passage obligé pour ces milliers de jeunes qui, chaque année, souhaitent pénétrer les coulisses du rêve ou participer activement à cet art vivant qui n’a de cesse de se réinventer depuis qu’il a brisé sa coquille. OM

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ROqUette-SUR-SIAGne


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toURetteS-SUR-LoUP

La vie de Château Tourettes-sur-loup, dont le Château mairie est l’un des plus actifs relais du FRAC de la région, cultive outre sa célèbre violette, l’ambition de redevenir un grand village culturel à l’écoute de son temps et de ses habitants. Visite guidée…

 Affiche de l’exposition dédiée à Andrew Mac Donald, peintre emblématique de Tourettes-sur-loup

d’un événement qui ressuscita pendant trois jours de concerts et d’exposition l’artiste et ses amis, Cocteau et Picasso. « Sans moyens mais sans complexe, avec l’association dont je m’occupe, nous sommes allés alors frapper aux portes des Musées Picasso d’Antibes et Cocteau à Menton qui acceptèrent de collaborer gracieusement. nous souhaitons rééditer cet événement en 2013 à l’occasion du cinquantenaire de sa mort. » En attendant, la municipalité s’efforce d’améliorer la signalétique du village afin de faire revivre aux visiteurs cette histoire et bien d’autres qui font de cette cité médiévale à 14 km du rivage, un village d’art au même titre que Saint Paul ou Vallauris. De Garouste à nino Rota Mais le village vit aussi au présent à l’image d’une autre bâtisse de mémoire qui accueille toute l’année derrière sa façade rafraîchie du XVème siècle des expositions d’art plastique. l’ancien Château des Villeneuve où siège depuis plus de 25 ans la mairie est devenu un haut lieu d’expositions depuis sa réfection entreprise par Maximin Escalier, maire de Tourettes, il y a une trentaine d’années. Depuis 2002, le FRAC a conclu un partenariat avec la municipalité pour y exposer dans ses grandes salles une partie de sa collection.

 Evelyne Dubosq devant le bas relief en bois de Robert Roussil

 la façade séculaire du Château mairie

© J-Ch Dusanter

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pporter du sang neuf au village en injectant encore plus d’art dans ses vieilles pierres, c’est le remède prescrit par Evelyne Dubosq, adjointe à la culture depuis le deuxième mandat du maire José Bertaina. Une femme de passion et de partage qui sait de quoi elle parle. Evelyne vit ici depuis 35 ans aux côtés de son époux et de leur fils, tout deux artisans, et pratique le terrain en tant qu’artiste à la tête d’une association de spectacles vocaux. Ce terroir propice à la culture de la violette l’est aussi pour la culture de l’esprit. il suffit pour s’en rendre compte de sillonner ses ruelles pavées qui égrainent leurs galeries d’art ou de recenser tous ces créateurs qui y ont élu domicile. Parmi les plus connus, des grands noms de la sculpture : J-C Fahri de l’école de nice, le Québécois Robert Roussil et l’américain David logan. l’architecte Antti lovag y vit en ermite depuis 1968 dans sa maison bulle classée au répertoire des monuments historiques. Mais l’un des premiers à avoir posé son empreinte fut le grand compositeur français membre du groupe des six. « C’est ici qu’en 1955 s’installèrent les premiers artisans d’art. Un vent de création qui attira dans nos murs, Francis Poulenc. » la maison où le musicien écrivit sa partition du « Dialogue des Carmélites » est encore bien là. En 1993 le Village fêta le trentenaire de sa disparition autour


toURetteS-SUR-LoUP

 Carton d’invitation de l’exposition commençant le 20 novembre de Didier Mencoboni (FRAC PACA), basé sur «les envahisseurs iV», 2007.

« Une proposition qui s’inscrit dans la politique du FRAC visant à sensibiliser les publics les plus larges à l’art d’aujourd’hui », explique Fabrice Albanese, médiateur culturel en charge de l’espace. Ainsi furent présentés dans ces nobles pierres des peintres aussi reconnus que Garouste, Fromanger, Piotr Klemensiewicz ou actuellement Didier Mencoboni. Du 18 novembre 2008 au 24 mai dernier c’est Marie Ducaté qui avait déployé son univers onirique dès l’entrée de l’exposition où une frise de papier de 40 mètres serpentait d’une salle à l’autre. « Cette exposition ludique nous a permis de nous rapprocher de Vallauris où l’artiste exposait parallèlement son travail de céramiste », commente Evelyne Dubosq qui a souhaité récupérer le lieu durant la période estivale. « De mai à octobre, le FRAC se retire et nous jouissons de l’espace afin d’intégrer à nos propositions la vingtaine d’artistes résidant chez nous. » Créer du lien avec les habitants Cet été les cimaises du Château accueillirent ainsi le travail d’une figure locale qui séjourna de 1960 à 1994 dans le village : « Andrew Mac Donald, un peintre doué d’un talent de coloriste aux origines danoises et écossaises, se promenait toujours en kilt

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dans nos ruelles. il a beaucoup peint, peu vendu, mais beaucoup bu et aimé. Après sa disparition, sa famille nous fit don de 120 toiles. Dans son appartement sur les remparts nous avons trouvé un coffre entier de dessins réalisés depuis son arrivée dans le village ». En septembre c’est le collectif « nan’art » qui prit la suite avec un accrochage réunissant six femmes artistes du cru. « Pour l’année prochaine, les débats sont ouverts, je serais tentée par la photographie après avoir accueilli avec le FRAC du 19 novembre au 30 mai 2010 les toiles abstraites de Didier Mencoboni ». Dans tout ce qu’elle entreprend, l’adjointe à la culture essaye de créer une dynamique permettant de fédérer les habitants autour des événements. « On s’est aperçu qu’en mixant les expositions avec des performances musicales, le public qui boude l’art contemporain finissait par se déplacer. nous avons fait un ballon d’essai avec un quatuor de guitare qui s’est déplacé du hall du château aux salles du Frac où était exposé l’œuvre de Garouste ainsi que d’autres toiles assez sombres et tout le monde a suivi ! ». Sur ce principe, l’exposition autour du cirque à travers la collection d’Alain Frère fut relayée par les nuits de Tourettes durant lesquelles les musiciens invités jouèrent des œuvres de niño Rota. « nous avons également profité du succès des Rendez-vous du Château dont les concerts affichent complet pour laisser pendant les entractes les salles d’exposition ouvertes au public ». « Je souhaite que le château redevienne ce qu’il a été : un lieu de culture ouvert à tous », conclut Evelyne Dubosq devant le basrelief en bois sculpté de Robert Roussil qui habille son grand Hall et que la municipalité vient d’acquérir. Rouvrir le chemin de ronde en l’animant d’un parcours de mimes, transformer la tour de l’horloge en résidence d’artistes, l’adjointe à la culture fourmille de projets mais garde la tête sur les épaules car elle sait « qu’il y a encore du grain à moudre » dans ce village historique d’artisans. oM

 Pour l’exposition proposée par le FRAC PACA «sourires masqués» de Marie Ducaté, Paradis à la télé, détail

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 Fabrice Albanese (Médiateur culturel) : Décrochage au Château avant l’accueil de l’exposition de Didier Mencoboni

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La Villa Noailles

Entre les murs ! A travers l’histoire de la Villa noailles c’est tout un pan de l’art, du cubisme au surréalisme qui se lit en trame sépia sur ses murs aux lignes claires. Car Marie-laure et Charles de noailles, furent les derniers mohicans à pratiquer le mécénat particulier à grande échelle. Flash back…

C’est à Hyères, en 1887 que Stephen liégeard inventa le terme « Côte d'Azur » louant le rivage pour « ses dons bénis au service de la maladie et de l’espérance. » Une telle aura hygiéniste eut tôt fait d’y attirer le gotha aristocratique en quête de remède aux maladies pulmonaires. Ainsi après leur mariage en 1923 à Grasse, Charles Vicomte de noailles et Marie-laure Bischoffsheim issue de l’aristocratie financière et descendante du Marquis de Sade, reçurent en cadeau un terrain sur la colline hyéroise afin d’y construire leur maison de vacances. Un paquebot cubiste signé Mallet-Stevens Commandité pour en faire une résidence d’hiver, l’architecte Robert Mallet-Stevens livrera l’ouvrage 5 ans plus tard en 1928 au moment où la villégiatura en Riviera passera en mode estival. « Sur ce plan la Villa noailles fut un bâtiment obsolète à sa naissance » ironise Stéphane Boudin-lestienne, historien des lieux, avant de poursuivre : « C’est pourquoi toutes les pièces, même les salles de bain ouvrent plein sud comme des tiroirs pour aller chercher la lumière au lieu de s’en protéger » Qu’importe nos deux tourtereaux mécènes disposent désormais pour recevoir leurs amis artistes de 1800 m2 de bâti dont quinze chambres et quinze salles de bains « Des maison satellites se sont rajoutées, le parc floral et son parcours d’art s’est agrandi au rythme des artistes invités comme les frères Giacometti. la ferme avoisinante a été intégrée en 1933 pour faire des communs. « Conçu

d’abord comme une maison familiale on s’est rapproché progressivement de l’idée d’un grand hôtel puis en rajoutant une piscine couverte, un squash et un gymnase privé on a fini par avoir une sorte de paquebot de croisière avec ses ponts de promenade » explique Stéphane. Si la consigne originelle de Charles noailles était l’économie et l’épure la construction du site comme sa décoration convoquèrent les artistes les plus en vue du moment : Mondrian, Eileen Gray, Francis Jourdain, ou encore Djo-Bourgeois, qui composa le mobilier avec les lignes minimalistes. Des horloges intégrées dans les murs sont toutes commandées par une centrale électrique, des baies vitrées s’escamotent dans le sol. la Villa noailles marque le début de l’architecture moderne en France mais elle est également l’œuvre d’un artiste « C’est un parcours pensé de haut en bas. De tous les endroits, on a des points de vues différents sur l’ensemble. C’est comme un jeu cubiste. le jardin triangulaire de Gabriel Guevrekian qui se terminait en figure de proue sur un bronze de Jacques lipchitz renforce cette volonté. Tout y a été composé selon des rythmes rigoureux, c’est en cela que ce bâtiment reste fascinant 70 ans plus tard »

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la Villa noailles serait-elle vivante ? En tous cas des années folles aux années Jazz elle bruissera de vie au fil de tous ses hôtes qui marquèrent l’histoire de l’art moderne. Le film d’une vie les noailles cultivaient un appétit féroce pour tous les arts, leur collection personnelle en témoigne, mais il en est un qui leur sembla plus intéressant, parce qu’il était neuf et complet : le cinéma. Charles et Marie laure qui disposent d’une salle de projection dans leur hôtel particulier parisien, pour se faire plaisir s’achètent un film. Pas un bouquet de fleurs ! Souhaitant faire partager à tous leurs amis ce qu’ils vivent à Hyères il commande en 1927 un court métrage à l’assistant de Marcel l’Herbier, Jacques Manuel « Monté comme un film de famille et de fiction, Biceps et bijoux alterne des séances de jeu à la piscine ou dans la


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salle de gymnastique et quelques courses poursuites à la Chaplin où les époux jouent le rôle de cambrioleurs » explique Stéphane. l’année suivante ils demandent à Man Ray qui a fait des portraits de Marielaure d’y réaliser cette fois un film d’art. Le Mystère du château de dé préfacera ainsi l’arrivée du surréaliste dans le monde rationnel cubiste. Quand les noailles visionnent le film en public Man Ray a pris soin de programmer en 1ere partie « le chien andalou » l’œuvre d’un jeune réalisateur espagnol, luis Buñuel et d’un peintre peu connu Salvador Dali. Un choc pour nos mé-

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 « Du jardin triangulaire à la piscine couverte, c’est un parcours pensé de haut en bas comme un jeu cubiste ! »  portrait couleur : J.P Blanc, Directeur de la Villa noailles

cènes qui décident de soupalité sous la condition tenir Dali en lui versant une que le parc Saint Bernard rente annuelle et de financer soit ouvert au public, elle le deuxième métrage sulfusera inscrite en 1975 et reux de Buñuel. Avec l’âge 1987 aux monuments hisd’or, ils font vraiment œuvre toriques. Après une londe producteurs, ils contigue période d'abandon la nueront avec le sang d’un Villa noailles est restaurée poète de Cocteau. lors les pour devenir un centre surréalistes jouent à domicid'art et d'architecture en le à Hyères. Une amitié forte  Portait de groupe devant la Villa 1996 sous l’impulsion de en 1932 (Henri Sauguet, se noue avec René Crevel et Jean Desbordes, luis Buñuel, son actuel directeur JeanPoulenc, Christian Bérard, sur le parvis de la Villa dé- Francis Pierre Blanc soutenu par de Alberto Giacometti) file Breton, Max Ernst, Gide, grands noms de la mode Aldous Huxley (qui habitait à Tamaris) comme Karl lagerfeld. Depuis 2003, époFrancis Poulenc venu à l’occasion du festival que où la communauté d’agglomération de de musique que les époux organisent « les Toulon décide d’intégrer ce patrimoine aux noailles ont aidé les artistes émergeants. grands lieux culturels qu’elle gère, l’assoils furent les premiers à leur acheter des ciation a pris un nouvel essor. Aujourd'hui, pièces, de Giacometti en 1928 à César dans la Villa noailles abrite chaque année le Fesles années 60 à qui Marie-laure confia sa tival international de la mode et de la phovoiture pour en faire une compression » tographie, Design Parade fédérant ainsi la Des œuvres d’art qui furent récupérées nouvelle génération des créateurs autour en 1970 par la famille après la mort de de ses murs de légendes. oM Marie-laure. Une disparition qui signe un autre âge pour la Villa. Cédé par Charles, www.villanoailles-hyeres.com botaniste distingué, en 1973 à la munici-

La villa Noailles est aujourd’hui le rendez-vous international de la Mode, du Design et de la Photo  Maxime Simoens, "Kaléidoscope". Photo: © Amira Fritz  Marite Mastina & Rolands Peterkops, "Private detective". Photo: © Amira Fritz  Steven Meisel, Vogue italia, Juillet 2005


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ERIC VU-AN LE CORPS AU DIAPASON

Interview réalisée par Rodolphe Cosimi 12 Novembre 2009 - Nice

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La Direction du corps de Ballet de l’opéra de nice vous a été récemment confiée. Comment s’est passée cette première mise en contact ? En effet, je suis arrivé le 1er septembre et j’ai découvert un Ballet en souffrance, quelque peu décimé, surtout au niveau des effectifs qui ne comptaient pas plus de la moitié de ce que j’avais pu connaître dans le passé. Une équipe relativement démotivée puisque depuis près de trois ans, il n’y avait plus de Directeur de Ballet. Comment pensez-vous apporter un nouvel essor à cette compagnie ? Etant arrivé avec un projet totalement différent et autonome, j’ai pu rencontrer la Ville de nice et j’ai accepté de faire cohabiter ce projet artistique et humain avec la partie du Ballet qui restait. J’ai été encouragé par l’assurance que la Ville de nice favoriserait des recrutements qui ont, en partie, déjà eu lieu. Une première audition a déjà été assurée fin octobre et l’on devrait, pour l’année prochaine, en prévoir une seconde, au mois de Mars. Malgré les temps difficiles que nous connaissons, il est encourageant de voir qu’il y a une volonté de Christian Estrosi, des adjoints à la Culture et de la Direction

Eric Vu-An, ex-danseur de l’Opéra de Paris au parcours impressionnant, vient tout récemment de prendre les rênes du Ballet nice Méditerranée. Cette rencontre avec le nouveau Directeur artistique invite à saisir ses orientations et avant tout à découvrir son projet, doublé d’un challenge à relever : que le Corps de Ballet puisse conquérir son autonomie et gagner en perspective. culturelle de la Ville de nice, de donner un essor significatif à l’art chorégraphique, et lui donner la possibilité d’exister dans un écrin magnifique comme l’Opéra, mais lié à une vraie identité et à une forme d’autonomie aussi bien budgétaire qu’identitaire. Aujourd’hui, il s’agit du Ballet nice Méditerranée. Cette nouvelle appellation de la compagnie veut traduire une idée forte d’ouverture aux cultures ? Tant au niveau des sujets que des artistes, je voudrais trouver une véritable synergie avec les acteurs des pays qui bordent la Méditerranée, être l’ambassadeur en région mais aussi sur un plan national et international. nous possédons un creuset commun, une histoire commune, aussi bien au travers des religions que de l’antiquité et cela peut permettre des points de convergences au travers d’une langue que je souhaite avant tout classique, néo-classique, sans oublier les créations contemporaines. C’est peut-être également une façon de tisser des liens ? Oui. il ne s’agit pas seulement pour la compagnie d’avoir une appellation diffé-

rente mais à travers elle, j’essaie de tisser des liens. Par cette dimension méditerranéenne, j’ai envie de travailler en réseau. Jean-Christophe Maillot m’invite à danser le Prélude de l’Après-midi d’un faune à Monte-Carlo les 11 et 12 décembre prochain ; c’est une opportunité de venir avec mes danseuses du Ballet pour faire les nymphes de cette pièce de nijinski. Je veux me rapprocher aussi de l’Ecole Rosella Hightower dirigée par Paola Cantalupo, avec qui je compte travailler. De cette Ecole de Cannes, certaines danseuses vont nous rejoindre dans les Sylphides. Ce lien avec Cannes n’est pas le seul dans les rapprochements que je souhaite sur la Méditerranée. nous avons des projets avec l’italie, notamment avec le Directeur du Théâtre Massimo de Palerme pour une pièce que nous devons monter cette saison. Le public sera t-il au rendez-vous ? Je trouve qu’il est bien, sur la Côte d’Azur, que le public cherche à voir des choses différentes et découvre ce qu’il n’a jamais vu, parce qu’il est vrai qu’un grand répertoire et certains chefs-d’œuvre du langage classique, n’ont plus été vus depuis longtemps.


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 Eric Vu-An, Directeur Artistique du Ballet nice Méditerranée, en répétition dans une pause du Faune.

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pièce dans laquelle les danseurs, déjà au milieu du 19ème siècle, pouvaient voir techniquement où ils en étaient. C’est un ballet qui impose les bases d’une technique classique qui a évolué. Pour le public, tout comme pour les danseurs, c’est un moyen de voir où l’on se situe. Aujourd’hui, l’individualité prend le corps sur beaucoup de choses. Voir qu’un corps de Ballet est, quant à lui, capable de trouver une certaine forme d’harmonie, une certaine forme d’unité aux travers de certains pas est essentiel.

région, Jean-Christophe Maillot m’a lancé une invitation pour me demander de venir danser. Pour le Ballet «Conservatoire», je reçois le décor de toile de l’Opéra de Paris grâce à Brigitte lefèvre, Directrice de la danse. C’est bien de pouvoir compter sur des amitiés comme celles-là. nanette Glushak, Directrice du Ballet de Toulouse, avant même de voir la compagnie, a accepté de venir pour une pièce de Balanchine «Allegro Brillante» sur une musique de Tchaïkovski. il y aussi des costumes du Ballet national de Marseille, où j’avais monté «Conservatoire» qui vont nous être prêtés à nouveau.

Votre expérience est certainement une source d’énergie qui va vous aider à relever ce défi ? J’ai la chance et le bonheur d’avoir autour de moi pas mal de personnes qui sont mes pères : Dès que je suis arrivé dans la

en quoi le choix de la première pièce du programme «Conservatoire» est-elle décisive pour annoncer un renouveau de la compagnie ? Cette pièce permet de situer le niveau et de donner la température, car c’est une

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Comment abordez-vous ce challenge ? C’en est un, en effet et qui a débuté dès le premier jour. Pour cela, tous les matins, je suis avec les danseurs, et au cours avec eux. il ne s’agit pas d’exemplarité parce qu’il faut avoir de l’humilité, mais du dernier danseur entré dans la compagnie jusqu’à l’étoile, si on a foi en son art, la danse, on remet tous les matins son «instrument», son corps, en ordre de marche, on le réaccorde. Ce travail quotidien, cette volonté sont des choses auxquelles je crois pour remotiver la compagnie. Ce n’est pas toujours facile parce que beaucoup ont perdu une certaine confiance. Mais d’autres danseurs vont arriver avec leur enthousiasme à partager, je serai donc ravi de continuer avec ceux qui auront envie de prendre ce train.

et vous comptez de cette manière remotiver les troupes ? Oui. il s’agit de travailler de manière à ce que les artistes qui viennent d’entrer ou ceux qui ont des variations aient, pour un moment, les mêmes choses à faire, un langage commun. Pour ceux qui en ont la force, la volonté et qui y croient, la porte est ouverte. La danse peut-elle être plus accessible aujourd’hui ? il y a un public qui demande à être nourri de pièces qu’il aura choisi de venir voir, et non pas celles pour lesquelles on leur aura dit que c’est bien ou que c’est intelligent… Je veux que nous ayons la possibilité d’avoir un forme d’exotisme en osant proposer des choses que d’autres ne proposent plus maintenant, des pièces que le public souvent me réclame. Des énergies sont en mouvement pour le bien culturel de la Ville et je pense que c’est le minimum que nice peut ambitionner de par la position qu’elle a par son tourisme et son passé ; elle a beaucoup a faire !

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Qu’est ce qui peut rendre la danse plus proche des gens ? le Ballet fera des répétitions et des représentations scolaires. nous aurons aussi un lieu, qui pourrait être couvert au Conservatoire et devenir un studio dédié au ballet, afin d’y travailler de façon permanente. Sa dimension d’agora est très intéressante car il y a beaucoup d’artistes, et avec eux, nous favoriserons les échanges, nous organiserons des colloques, nous montrerons des films. Ce serait un lieu où l’on rendrait moins ésotérique l’art chorégraphique. Votre parcours vous a fait rencontrer beaucoup de danseurs, chorégraphes, interprètes : certains d’entres-eux serontils associés à vos prochains projets ? Cela va être une question de budget mais nous allons essayer d’avoir une forme d’autonomie et d’exister par nous-mêmes. Des étoiles de l’Opéra de Paris m’ont déjà donné un oui de principe pour venir participer à certaines représentations ; de grands chorégraphes également, dont un chorégraphe italien avec qui j’ai fait plusieurs créations, qui sait raconter des histoires et mettre le public dans un univers, comme le faisait Béjart. Les quatre pièces qui seront jouées dès janvier prochain rassureront-elles le public ? Faire découvrir à un public ce dont il n’a jamais entendu parler comme certains des chefs-d’œuvre du passé, fait partie des choses qui m’intéressent ; Dans ce premier

programme, j’ai vraiment la sensation que ces quatre pièces maitresses que sont «Conservatoire», «Allegro Brillante», «l’après-midi d’un faune» et «les Sylphides» peuvent contribuer à cette découverte. n’est-ce pas un répertoire un peu trop classique ? nijinski n’est pas du tout classique, c’est le chorégraphe le plus contemporain de son époque, rappelons qu’il a été sifflé en son temps. Ce premier programme n’est pas uniquement classique. la danse classique est une langue ; Avec les danseurs pour l’instant, je veux utiliser cette langue pour installer la personnalité de cette compagnie, sa qualité, son excellence. Au fur et à mesure, on pourra découvrir de nouveaux rivages. l’important est que le public soit content, donc rassuré. Aura-t-on la chance de vous retrouver sur scène ? Je suis là avant tout pour servir la compagnie avec cette nouvelle pensée. Si l’on me demande de danser et comme on me le demande déjà, je ne refuserai pas, si cela peut être utile et servir de carte de visite. Je continue à danser. J’aime venir prendre mon cours le matin. J’aime être là pour me remettre au diapason. Pour ce qui est de la scène, j’ai eu tellement de moments extraordinaires, - et j’espère en avoir encore-, que j’ai plus envie, aujourd’hui, de transmettre. Je voudrais faire que certains jeunes danseurs et danseuses accouchent d’euxmêmes à travers leurs propres expériences, dans un répertoire que j’ai eu la chance de défendre et qui m’a beaucoup nourri. C’est donc la passion qui vous anime avant tout ? il est essentiel pour moi de me nourrir dans les œuvres du passé. Si elles ont survécu deux ou trois cents ans, c’est que ces

œuvres avaient bien autre chose à exprimer au-delà de la simple esthétique ou de la technique. Parler de la danse, résonner avec mes danseurs sur une histoire, une forme classique, permet une spiritualité qui commence à exister. C’est important que les danseurs, chorégraphes ou interprètes sachent que cela existe pour leur créativité propre afin de nourrir leur propre imaginaire. J’aime cette citation d’Henry James «D’abord continuer, ensuite commencer», parce qu’il ne faut pas oublier que nous ne sommes pas une génération spontanée. il faut réussir à parler aux gens, à partager et l’on peut commencer quelque chose à partir du moment où on a une continuité. Que le danseur soit toujours un être humain, qui dans sa constante de rapport à la douleur, à l’amour, au parcours de la vie, puisse faire résolument voyager.

BALLet nICe MÉDIteRRAnÉe Janvier 2010

Ven. 29 20h Sam. 30 20h Dim. 31 14h30

Conservatoire Chorégraphie d'Eric Vu-An d'après Auguste Bournonville Musique Holger Simon Paulli Allegro Brillante Chorégraphie George Balanchine Musique Piotr ilyitch Tchaïkovsky L’après-midi d’un faune Chorégraphie Vaslav nijinsky remontée par Eric Vu-An Musique Claude Debussy Les Sylphides Chorégraphie Michel Fokine recréée par Eric Vu-An Musique Frédéric Chopin Avec la participation de Elisabeth Cooper, piano location et renseignements 04 92 17 40 79 Tarifs de 7 à 20 € Opéra de nice 4 & 6 rue Saint-François de Paule, 06300 niCE www.opera-nice.org



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Villa Santo Sospir

Et Cocteau tatoua une villa Surplombant le versant ouest du Cap Ferrat, entre route et rochers à pic, la Villa Santo Sospir est marquée pour toujours par l’empreinte du génie de Jean Cocteau. Entre 1950 et 1951, l’artiste a fait bien plus que décorer les murs de la maison de son amie Francine Weisweiller : il les a tatoués. la plupart des fresques sont inspirées de la mythologie grecque.

C’

est par une cheminée trop blanche que tout a commencé. Au cours de l’été 1950, Jean Cocteau fut invité par son amie et mécène Francine Weiweiller, rencontrée peu de temps avant sur le tournage des Enfants terribles, à séjourner dans sa villa du Cap Ferrat. il lui demande alors l’autorisation de réaliser un dessin au-dessus de cette cheminée qui trône dans le salon. le mythe du Soleil y trouve sa place, entouré des pêcheurs de Villefranche auxquels Cocteau rend ici hommage. Au loin, on devine la Ci-

« Quand on décore un mur, on décore les autres » Toujours dans le salon, ça et là, des oursins et des fougasses, les deux aliments préférés de Francine. la fougasse, pain traditionnel de Biot, Antibes et Grasse, est aussi appelée la « main de Picasso ». C’est d’ailleurs ce dernier qui a poussé Cocteau à poursuivre son œuvre au-delà de cette pièce. « Matisse a dit « quand on décore un mur, on décore les autres », il avait raison, raconte Cocteau dans son film. « Picasso a ouvert et fermé toutes les portes. Restait de peindre sur les portes, c'est ce que j'ai essayé de faire ». Des portes qui, en les cachant, ont protégé les pigments naturels utilisés par l’artiste pour colorer les dessins qu’il réalisait à main levée, avec la technique a tempera : un artisan italien lui préparait les pigments qu’il délayait dans du lait cru. « Mais les portes donnent dans les chambres, les chambres ont des murs, et si les portes sont peintes, les murs ont l'air vide ». En six mois, Cocteau aura donc tatoué l’ensemble des murs de la villa, en utilisant l’espace tel qu’il était. les crochets des moustiquaires donnent ainsi leur forme aux yeux des boucs dans  Des murs aux objets courants de la vie, Cocteau a marqué de son empreinte d’artiste toute la villa Santo Sospir. la Chambre des Sages, les personnages entadelle… Sur un autre mur de la pièce, une jeune femme se repose dormis posent leur tête sur un angle de porte. l’été suivant, il au soleil couchant que l’on aperçoit derrière ses genoux figurant s’attaquera aux plafonds. les trouvant trop blancs, il les colorie au les collines de nice. « la nuit dans son Char parlant à Mercure, pastel dans des tons très doux, et notamment en jaune. comme dans Amphitryon », indiquera Cocteau dans un court mé- Dans la chambre qu’Edouard Dermit, amant puis fils adoptif de trage tourné en 1951 dans la villa, avant de préciser « j’avais oublié Cocteau, partagera plus tard avec Tania, c’est le mythe de narcisse le mythe de la lune ». le voici donc qui prend forme en la personne se regardant qui est choisi. Sur les quatre murs de la pièce, on voit d’un pêcheur assoupi. « On dort beaucoup sur ces murs. » On y vit la déesse Echo répéter inlassablement son nom. l’effet est saiaussi. Et ce n’est pas seulement la télécommande négligemment sissant : on jugerait l’entendre aussi. Selon l’heure de la journée, laissée sur l’accoudoir du canapé par Carole, la fille de Francine, les rayons du soleil viennent jouer avec l’ombre des lits niçois du propriétaire actuelle des lieux, qui donne cette impression. ici, pas 18è siècle, disposés là par Madeleine Castaing, chargée par Frande villa-musée. la vie est partout. Dans les plantes qui investissent cine de la décoration de la maison. Une dimension supplémentaire l’immense jardin dominant la mer, dans l’accueil joyeux du chien ajoutée à cette fresque mettant la vue et l’ouïe en éveil. du responsable de la maison, Eric Marteau, mais plus encore dans Dans la chambre de Carole adolescente, Cocteau illustre l’initiale graphisme du trait, ligne signifiante, l’emportant sur les couleurs. tion de deux jeunes femmes par les bacchantes, ces demi-déesses Mais si ces dernières sont quelque peu passées, soumises à l’œuvre qui déchiquetèrent Orphée et qui célébraient les mystères de Dyodu temps, elles sont aussi la preuve que la villa respire. « Une jeune nisos-Bacchus. Ce dernier dort, face au lit. Clin d’œil ou hasard : femme habite Santo Sospir. il ne fallait pas habiller les murs, il fal- Carole aime à raconter que c’est Cocteau qui lui a appris à boire. lait dessiner sur leur peau : j’ai traité les fresques linéairement avec « il se mettait derrière le bar et préparait ses fameux cocktails »… le peu de couleurs qui rehaussent les tatouages. » Au fond du petit couloir adjacent, Cocteau donne vie à un per© Photos : H lagarde

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 Tous les « tatouages » ont été réalisés directement à main levée sur les murs et colorés avec des pigments naturels.

Un patrimoine protégé

sonnage de son invention : le Chevalier Saint-Soupir, coiffé à la manière d’un Pisanello renaissant. Car ce n’est pas ce héros qui a donné son nom à la villa, mais une carte maritime du 12è siècle achetée par Francine et révélant qu’à cette époque, Cap Ferrat s’appelait Santo Sospir… Quand la poésie fait le mur Pendant dix ans, Jean Cocteau est venu à la villa, sept à huit mois par an, pour y peindre, y écrire et y tourner des films, comme le Testament d’Orphée. Pour lui, être poète consiste « à confier publiquement ses secrets ou, mieux, à parler tout haut dans son sommeil. » Tout, ici, témoigne de ce « véritable attentat à la pudeur ». Cette fresque, la seule peinte, représentant l’ange Heurtebise, joué au théâtre par Jean Marais, aux couleurs à la Chagall et aux personnages inspirés des baigneuses de Renoir, dans un escalier étroit où Cocteau est souvent tombé à la renverse en y travaillant… Ces céramiques réalisées à Vallauris… Ces dessins sur les lampes… Jusqu’à la tapisserie de trois mètres sur trois mètres cinquante représentant Judith et Holopherne, dont Cocteau avait fait le carton quelques an-

Construite entre 1931 et 1935, et acquise par Alec Weisweiller, le mari de Francine, en 1948, la Villa Santo Sospir est inscrite à l’inventaire des Monuments Historiques depuis 1995. Une rénovation est prévue prochainement. Elle devrait également très bientôt entrer

dans le giron du Conservatoire du littoral. Carole Weisweiller souhaiterait en faire une maison d’artistes et le point d’orgue de la « route Cocteau », qui partirait de Fréjus et jalonnerait la région au gré des œuvres qu’il y a laissées.

Visites par petits groupes uniquement sur rendez-vous au 04 93 76 00 16

nées auparavant. Accrochée dans la salle à manger, elle a nécessité cinq années de travail dans les ateliers d’Aubusson de la part des « harpistes », comme Cocteau les surnommait, « car elles jouent sur des harpes de fils ». Cocteau dit un jour à Carole : « quand je travaillais à Santo Sospir, je devenais moi-même murs et ces murs parlaient à ma place ». Et ils parlent encore aujourd’hui. Décédé en 1963, Cocteau est enterré à Milly-la-Forêt, dans l’Essonne. l’épitaphe sur sa tombe aurait tout aussi bien pu figurer sur un des murs de la villa : « Je reste avec vous ». FS

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 « Santo Sospir » était le nom du Cap Ferrat au 12ème Siècle. Parmi les représentations récurrentes dans les « tatouages » : la mythologie grecque.


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Menton

Une saison théâtrale et musicale ouverte à tous La ville aux sept jardins d’exception accueillera, pour sa saison culturelle 20092010, des rendez-vous forts théâtraux, avec de belles têtes d’affiche, et de grands concerts autour du thème du violon. Et toujours avec un même mot d’ordre : trouver un équilibre pour répondre aux envies les plus diverses des publics.

S

i le piano et la Russie ont enchanté la précédente saison musicale de la Ville de Menton, cette année mettra à l’honneur un instrument fascinant : le violon. « Nous suivons les choix et les initiatives de Paul-Emmanuel Thomas, directeur du Conservatoire et jeune chef d’orchestre talentueux, précise Martine Casério, ajointe à la Culture de la Ville de Menton. Il est le plus à même de connaître l’actualité et les disponibilités des musiciens, ainsi que de juger la qualité de leurs spectacles. » Dynamique et ouvert à toutes les musiques, y compris dans ses formes les plus actuelles, PaulEmmanuel Thomas est à la tête d’un établissement qui compte pas moins de 550 élèves et 29 professeurs. La

pratique de tous les instruments ou presque y est enseignée, ainsi que l’art dramatique, le chant et la danse. Et pour lancer cette nouvelle saison musicale, une idée de génie : Beethoven ! Le 7 novembre dernier, l’Orchestre Symphonique de San Remo a ainsi joué la 7è symphonie et l’ouverture de Coriolan devant près de 500 spectateurs. Quant au concerto pour violon, il a été interprété par David Grimal, l’un des plus grands violonistes français d’aujourd’hui. Prochaine étape : le concert du Nouvel An. « Devenu incontournable, il est un peu notre petit Vienne à nous », s’amuse Martine Casério. Au total, 1 400 personnes viennent écouter chaque année ce concert et apprécier le ballet. Et

La perruche et le poulet, une comédie policière anti-morosité, se jouera le 17 janvier au Théâtre Francis Palmero de Menton. A l’affiche : Jean-Pierre Castaldi et Claude Gensac.


 Directeur de l’Ensemble baroque de Nice qu’il a créé en 1982, Gilbert Bezzina assure par ailleurs, depuis 2004, la direction artistique du « Vieux-Nice Baroque en Musique ».

Menton

 L’Ensemble baroque de Nice, qui a fêté en 2007 ses 25 ans d’existence, précurseur du renouveau du violon baroque en France, se produira le 17 février à Menton.

 « Harpe Riviera Quatuor », né à la Fondation SophiaAntipolis, s’était produit à la salle Saint-Exupéry de Menton lors d’une précédente saison musicale.

pour fêter l’arrivée de 2010, elles devraient être comblées : l’Orchestre Philharmonique du Piémont sera en effet accompagné du Ballet classique de Turin. Nous pratiquons à la fois André Malraux et Jack Lang Autre rendez-vous musical important : l’Ensemble baroque de Nice, qui a fêté en 2007 ses 25 ans d’existence, précurseur du renouveau du violon baroque en France, se produira le 17 février. Enfin, Menton accueillera, en avril, Pierre Blanchard. Après une tournée de deux ans avec Thomas Dutronc, il revient sur scène en leader avec son spectacle Appassionata, qui célèbre le

violon dans tous ses états à travers les multiples amours musicales du violoniste, de Django aux musiques traditionnelles en passant par le jazz et la musique sud-américaine. « Ce type de programmation nous permet d’attirer de plus en plus de jeunes, notamment des classes de musique comme celle d’art dramatique, dans l’optique d’ouvrir la culture à un public le plus large possible, se félicite Catherine Gourdet, directrice des affaires culturelles. « Nous pratiquons à la fois André Malraux et Jack Lang, résume pour sa part Martine Casério, la démocratisation de la culture et la démocratie culturelle ! » Une politique qui se ressent également dans la programmation théâtrale. « Nous

essayons de trouver un équilibre entre de la comédie, du one man show et du classique, poursuit l’adjointe à la Culture, tout en tenant compte de nos contraintes budgétaires ». En avril, la ville accueillera ainsi Roland Giraud, « un habitué de Menton, qui passe très bien auprès de notre public », pour la pièce Bonté divine, de Frédéric Lenoir et Louis-Michel Colla. Autres têtes d’affiche à investir les lieux, cette fois en janvier : Jean-Pierre Castaldi et Claude Gensac, pour La perruche et le poulet, de Robert Thomas. Le Théâtre Francis Palmero accueillera ensuite, en mars, la pièce Venise sous la neige, de Gilles Dyrek, dont les critiques parisiens n’ont de cesse de faire l’éloge. « Parallèlement, nous travaillons depuis une dizaine d’années en partenariat avec une association, Le Lavoir-Théâtre, dont la programmation vient compléter notre offre », ajoute Catherine Gourdet. Une programmation qui ne laisse pas le jeune public à l’abandon puisqu’elle propose grâce au Théâtre Chou de nombreuses pièces, « contes goûters » et autres spectacles de marionnettes, remplissant à chaque fois de joyeux bambins les 120 places de la salle Saint-Exupéry. Preuve que le grand défi que les services culturels se sont lancés, « familiariser les jeunes générations au théâtre », a été relevé ? FS

Catherine Gourdet, à gauche et Martine Casério à droite.

© H. Lagarde

Billetterie en ligne www.menton.fr/saison-theatre

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La vie des arts

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Les figures libres de

uis Chacallis a Lo r, e lg a à 3 4 9 Né en 1 ice. s décoratifs de N rt a s le té n e u q é fr dans son appare ill va a tr y t e t vi il y s du Port. C’est tement atelier prè te 197O que l’artis dans les années i travail qui allait lu peintre initia un en oger la peinture rr te n ’i d re tt e rm pe mettre en cause re e d t e r u e d n profo n plane. sa représentatio

A

u début des années 197O, les préoccupations des artistes se portaient sur une possible prolongation de l’acte de peindre. Les notions figuration/abstraction devenus caduques, les perspectives s’ouvraient autour de la représentation. Fin du motif, fin du sujet ? Beaucoup de questions défrichèrent de nouveaux horizons et de nouvelles pratiques apparurent. C’est à cette époque de profonde mutation où l’art plastique repoussait sans cesse ses limites, prenant comme tête de turc les figures imposées, que Louis Chacallis s’imposa en tant qu’acteur du renouveau de la peinture sur la scène nationale. La question de "l'espace du tableau" s’y posait en tant qu'objet. Un credo qui vit l ‘éclosion du courant Supports/Surfaces. Un mouvement qui ouvrit en 1968 son chapitre au cœur du village de Coaraze la même année où l’exposition « Inter VENTION » à Saint-Paul-deVence marquait avec Alocco la formation du groupe 70 où Louis Chacallis s’était engagé avec Max Charvolen, Vivien Isnard, Serge Maccaferri, et Martin Miguel. Dans ce terrain arable, Chacallis commença à développer des séries courtes permettant de garder l'intensité dans l'œuvre tout en lui conférant des formes susceptibles de travailler la profondeur de la couleur dans l'espace. Après une période de recherche qui l’amène à concevoir des œuvres sur forme de questions, de possibilités (tableaux, boîtes à idées, etc.), l’artiste engagera ses premières déconstructions des 1972 avec la série « les indiens ». Un choix qui lui permit de confronter les signes culturels appartenant à l'Orient et à l'Occident mais surtout de poser un premier jalon dans sa volonté de donner d’autres formes à la peinture. Le deuxième jalon se fera une dizaine d’années plus tard avec les anamorphoses. Cet « art de la perspective secrète » dont parle Dürer a connu depuis que Piero della Francesca l’initia des applications diverses dans le domaine de l’architecture et du trompe-l’œil. Chacallis, fasciné par le Quattrocento, s’en accapara pour faire le tour complet de l’œuvre picturale toujours à la recherche du « point de vue » idéal.


artiste

Alors que l’école de Nice vient de réaliser 40 ans plus tard de nouvelles performances mais cette fois sous le marteau du commissaire priseur Patrick Rannou-Cassegrain lors de la vente aux enchères du 31 octobre, Louis Chacallis, qui y présentait entre autre son fameux « Derviche tourneur », s’est confié à nous.

On dit souvent que l’enfance est déterminante, quels souvenirs gardez-vous de la vôtre ? J’ai quitté à 16 ans l’Algérie, je ne garde que très peu de souvenir de la guerre. Comme mon père tenait un agence maritime, nous avons beaucoup voyagé. J’ai vécu un temps au Yémen. C’était alors un pays vivant reclus sur lui-même comme au Moyen Age. Il y régnait un climat de violence qui, ajouté à une forte homosexualité, ne rendait pas la situation sûre pour le jeune homme que j’étais. Un jour que je me promenais dans la ville de Sama avec les deux gardiens yéménites qui ne me quittaient jamais, j’ai découvert au détour d’une place des pieds et des mains coupés. Certaines parties étaient sèches, d’autres encore sanguinolentes. Cela devait être les membres de voleurs à qui l’on avait fait subir ce châtiment de circonstances à l’époque. Cet épisode m’a profondément bouleversé, j’ai dû faire une pièce il y a quelques années pour me libérer de cette vision. Les années 70 furent un véritable laboratoire d’expériences, certaines ont-elles eu une influence sur votre travail ? Ce qui est sûr, c’est que les problèmes ethniques culturels étaient abordés par

la plupart des créateurs. C’était un thème récurrent, surtout chez les artistes américains. Je me suis moi aussi imprégné de ces problématiques de déracinement, de transplantation, comment voyage-t-on avec ses racines ? Mais cela tenait aussi de ma propre expérience : j’ai toujours été en mouvement, je suis un apatride. Un critique a dit de moi que je vivais un double exil, celui par rapport à mon pays natal et celui de la peinture. La figure de l’Indien est venu à ce moment-là s’inscrire dans votre projet. Vous regrettez parfois que cette figure à forte coloration ethnique soit devenue aussi envahissante quand on aborde votre œuvre. Oui, dans la limite où ce n’était qu’une étape dans ma réflexion sur la peinture, une étape que l’on a souvent mal interprétée. J’ai emprunté ce thème au climat ambiant et au discours qui régnait à cette époque mais ce n’était qu’une béquille, ce n’est pas tant l’indien et sa culture, ses vêtements, le fétichisme qui l’accompagne qui m’intéressaient que le travail que je pouvais tirer de tout ça sur le plan formel pour poursuivre ma quête de déconstruction de la toile.

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artiste

Y a-t-il des artistes qui vous ont dans ces années là impressionné ? En 1969 à Paris, j’avais vu une expo consacrée aux artistes abstraits américains. L’un d’eux peignait des grands aplats de couleurs avec beaucoup de matière sur des châssis compacts. Je sentais que ces peintres avaient besoin de donner de l’épaisseur à leurs œuvres. Quand on regardait bien on pouvait presque y voir un objet. Cela m’a conforté dans mon envie de donner du volume à l’image, de faire quitter la peinture de son cadre habituel. Vous parlez souvent de peinture, mais les pièces que l’on voit dans votre atelier semblent plus proches de la sculpture ? Ce ne sont pas des sculptures mais bien des peintures. La question ne se pose plus pour moi depuis des années mais elle s’est posée et se pose effectivement encore aujourd’hui pour les autres. A un galeriste qui me posait déjà cette question à mes débuts, j’ai répondu : est-ce que pour voir, il ne faut pas concevoir d’abord ? Je m’explique : pour voir les choses il faut s’en imprégner longtemps. Vous ne pouvez voir une chose que vous ne concevez pas. Prenons un exemple concret. Les Egyptiens faisaient des basreliefs, ils étaient peints mais si vous enlevez les formes vous ne voyez plus rien, ne comprenez plus rien. Quand Paolo Uccelo inventa la perspective ce fut une révolution. Quelques siècles plus tard, le cubisme proposait une autre façon de voir en tournant autour de la figure. Votre travail met en avant une autre perception, non ? Certainement, dans la mesure où la technique du cubisme en peinture est restée une représentation à plat des volumes, donc assujettie à la toile. J’ai voulu aller plus loin. Depuis 68, mon travail a pris des formes différentes mais l’idée de fond est toujours demeurée la même. J’ai commencé par les boîtes à idées. Je partais du travail de Duchamp qui a mis en boîte la peinture, moi j’ai mis en boîte des idées. J’en ai réalisé une centaine qui ont pour support visuel des œuvres capitales

pour voir les choses il faut s’en imprégner longtemps. Vous ne pouvez voir une chose que vous ne concevez pas.

Quadriparticrux, 150x 150cm, marériaux divers, 2007

dans l’histoire comme « les Demoiselles d’Avignon » de Picasso, ou « le Radeau de la Méduse » de Géricault. Je suis passé à la thématique des Indiens tout de suite après. Mais peu de gens ont vu la relation entre ces deux travaux. Après il y a eu les arcs, là je voulais mettre le tableau sous tension, tendu sur un châssis courbé. J’ai fait ensuite des bouillonnés, des tissus peints et froissés puis des drapés et enfin des tableaux soufflés. L’idée était de déformer la peinture. Je peignais à plat deux toiles posées l’une sur l’autre. Ensuite tout cela était mis sur une matrice, tendu et durci avec de la résine. Cela devenait une pièce rigide présentant plusieurs dimensions au regard du spectateur. Avec l’anamorphose, vous franchissez une autre étape, qui pose avec encore plus de radicalité la question : comment faire de la peinture sans avoir recours à la surface plane de la toile ? Le recours à la technique de l’anamorphose était plus pour moi un moyen de justifier une démarche entamée depuis longtemps que de proposer de la nou-

veauté. En fait la peinture vous pouvez la voir différemment, j’ai souhaité proposer de la peinture en perspective, rendre sensible l’idée de profondeur dans la 3ème dimension. Les tableaux ne m’intéressant plus, mon obsession était de réinventer l’espace de la peinture. C’est pour cela d’ailleurs que j’ai emprunté et détourné avec les anamorphoses les thèmes et certaines œuvres à la peinture classique comme la chaise de Van Gogh. J’ai exploré la technique avec toutes ses variantes : le point de vue, le tableau, la figure humaine, la couleur, les vues latérales, etc. Le tableau s’est relevé sous des angles inusités, les anamorphoses permettant d’avoir plusieurs lectures d’une œuvre. En tournant autour, le spectateur pouvait faire et défaire la scène, le sens, la peinture elle-même. Si on pousse le raisonnement, vous avez anticipé à votre façon le règne de l’image en trois D que l’on nous promet depuis le nouveau millénaire. D’autres avant moi ont ouvert des pistes dans ce sens-là. Popoff est un artiste niçois qui m’a marqué dans ce domaine. Il


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a été tué en Belgique suite à une relation qu’il entretenait avec une l’épouse d’un ministre égyptien. Il était souvent présenté à la galerie de Paris où il a créé avant les années 80 une exposition incroyable avec le soutien du philosophe Gilles Deleuze. Il avait numérisé toute l’exposition qu’il avait ensuite projetée grâce à un procédé dans la galerie. On pouvait voir les œuvres et visiter l’exposition virtuellement alors que l’espace était en réalité vide. L’idée d’affranchir le contenu de son contenant m’a toujours fasciné. Bon nombre de ces techniques de représentations virtuelles ont été créées dés le 19ème siècle pour le théâtre comme les dioramas ou le Panorama Bourbaki à 360°. C’est vrai ! Il faut savoir que l’italien qui a inventé la toile venait lui-même du théâtre. Bientôt l’image cinématographique sera elle aussi débarrassée de l’écran. Tout cela, même si cela concerne une autre génération, m’intéresse beaucoup. Ceci dit, ces techniques suscitent plus d’applications commerciales que de propositions d’artistes.

Quelles directions prennent vos travaux plus récents ? C’est effectivement un nouvel enjeu qui prend en compte les espaces vides. Je ne voudrais pas trop déflorer ce sujet qui fera l’objet d’une exposition au printemps 2010 à la galerie Sapone. Disons que je suis revenu aux figures avec une technique mixte. Ce qui y sera montré est un travail sur la croix, sur sa forme plus que sur le fond. Cela n’a aucun rapport avec la religion, c’est juste le support qui m’a intéressé. « Pourquoi les artistes s’encombrent-ils à chercher des idées au travail, la Croix Chrétienne se suffit à elle-même », disait Tapies. Le personnage christique reste secondaire, il varie d’ailleurs selon les propositions. C’est l’effet qui préside à cette œuvre qui a retenu mon attention. Le signe est réduit à quatre images-fragments, essentielles au travail sur le corps et ses expressions : les mains, les pieds, le visage. Les espaces qui les séparent participent à cette nouvelle déconstruction. Je suis vraiment curieux de voir la réaction des gens. OM Photos : (Sauf Quadriparticrux) © H. Lagarde

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j o a i ll e r i e

Espace Solidor Bijoux, cailloux, hiboux… Chanteuse française, actrice et romancière, Suzy Solidor (1900-1983) s'est installée en 1960 à Cagnes-sur-Mer où elle tint jusqu'en 1967 un cabaret et un magasin d'antiquités. 50 ans plus tard, sa résidence du Haut-deCagnes est devenue l’un des plus beaux musées du bijou contemporain.

C

agnes-sur-Mer n’est plus seulement célèbre pour ses courses hippiques, c’est aussi la nouvelle cité du bijou contemporain. Sur la place du Château, lui-même haut lieu de l’art, l’Espace Solidor accueille dans un écrin rénové le fleuron de ces créateurs qui réinventent de par le monde l’art du bijou actuel « Nous avons commencé à défricher ce créneau en 1997 avec la nouvelle municipalité. Il existait auparavant un atelier loué à deux jeunes artisans bijoutiers mais quand ces derniers sont partis pour voler de leurs propres ailes, l’activité a cessé. En 1997, Louis Nègre, maire de Cagnes-sur-Mer, et moi-même, soutenus par quelques orfèvres dont Claude Pelletier de Biot, avons décidé de donner un nouvel essor à l’activité et à cet espace pour lequel j’ai eu un véritable coup de foudre », explique Roland Constant, adjoint à la Culture de la Ville. Souhaitant ouvrir un lieu identifiable dans le paysage national, la Ville a investi afin de réaménager l’espace en jachère sur la place du Château. Un enjeu de taille car il n’existe en France que deux musées de ce type, l’un à Baccarat dans les Vosges, l’autre à Paris. « Nous avons mis dix ans pour façonner l’Espace Solidor tel que nous le souhaitions, avec le concours de l'architecte et Exposition en cours de l’artiste Marianne Anselin © Liliane Diaz

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élu François Poutaraud. Pour lui offrir un écrin à la mesure de nos ambitions, nous avons repoussé les murs en unifiant trois bâtiments dont l’ancienne maison de Suzy Solidor. » Résultat : outre son jardinet et son hall aux voutes écarlates, ses galeries noir jais qui enfilent comme des perles 35 cabinets de lumière, une résidence d’artistes accueillera ses premiers occupants début 2010. Une maison d’artistes dotée de 5 logements ateliers qui fonctionnera un peu comme une résidence réservée aux jeunes plasticiens de moins de trente ans.


© H. Lagarde

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Voyage aux antipodes Au rythme de trois expositions annuelles, l'Espace Solidor a pris son allure de croisière en offrant un panorama sans frontière de créateurs présentant leurs pièces souvent en première mondiale. « Les expositions qui se sont succédées ont toutes été très différentes. Nous avons d’abord initié des invitations collectives mettant à l‘honneur un pays, une culture, tentant de dégager les grandes tendances des cinq continents, l’Asie et ses bijoux combinant le papier, l’Australie et son brassage pluriethnique. Cet été nous serons les premiers à mettre à l’honneur la nouvelle vague israélienne ». Pour Marianne Anselin, qui a investi les lieux jusqu’au 17 janvier, le cas est différent. « C’est notre première monographie. Parvenus à une certaine notoriété, nous nous devions de donner un coup de pouce aux créateurs émergeants. Au départ, la thématique était « le maître et son élève », mais Marianne a fait preuve d’une telle maestria que son parrain, le Maître d’art Gilles Jonemann, s’est retiré pour lui laisser la quasi totalité de l’espace. » L’artiste âgée de 28 ans qui œuvre sur des objets de récupération ou dérobés à Mère nature a également participé à des ateliers avec le Centre de Loisirs de Cagnes-sur-Mer. « Nous essayons de faire venir les enfants avec leurs parents. Ce type de travail dépassant le cadre du bijou traditionnel, notre public est très varié. Autant de femmes que d’hommes, de curieux que d’amateurs éclairés. Ma plus belle récompense c’est de voir débarquer au moment de la grande exposition estivale tous ces collectionneurs venus d’Allemagne ou d’Italie. »

Les photos des vitrines de l’expo sur l’Australie.

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Signe extérieur de culture Il est vrai que lorsque l’on découvre dans leurs alcôves vitrées les travaux de cette nouvelle génération d’orfèvres, on est surpris. Assemblage de matériaux hétéroclites : pièces industrielles détournées, végétaux, minéraux, pierres précieuses ou pas, techniques et formes proches de la sculpture, c’est clair, le bijou contemporain a pris ses distances avec le sautoir ou le gamay d’antan pour dialoguer plus intensément avec la matière. Plusieurs courants d’inspiration s’y croisent : l’ethnique, le végétal, l’archéo-métallurgie, le nomade, le minimal, le récup’ art. La discipline s’est développée avec le nouveau siècle en même temps que l’espace Solidor a pris son envol. La ville a ainsi constitué sa propre collection qui témoigne du pluralisme d’un artisanat moderne dont elle est la plus zélée des ambassadrices. « Chaque fois que nous accueillons un créateur, nous nous efforçons de lui acheter une pièce. Un fonds qui s’élève aujourd’hui à près de 80 œuvres ». C’est une vingtaine d’entre elles que l’adjoint à la Culture avait emmenées en novembre au Carrousel du Louvre lors du salon International du Patrimoine. La Ville, qui partageait avec quatre autres cités azuréennes labélisées « Ville des métiers d’arts », présenta ainsi l’avancée de son engagement. « Aujourd’hui, nous avons acquis une reconnaissance internationale qui devrait nous amener bientôt à faire voyager nos expositions. Lorsque le Docteur Robert Baines, professeur et coordinateur du programme d'orfèvrerie au RMIT à Melbourne, un institut qui fait référence, évoque le bijou contemporain, il parle de Cagnes-sur-Mer. Cette notoriété, nous la devons à nos efforts mais aussi à notre commissaire d’exposition considérée comme la papesse du bijou contemporain en Europe : Olga Biro, qui tient une galerie à Munich. » Et si Roland Constant regrette parfois que certains Cagnois n’aient pas encore pris la peine de visiter l’espace Solidor, il ne fait aucun doute que le Bijou contemporain s’est installé durablement à Cagnes-sur-Mer. Un bijou du nouveau millénaire qui, dégraissé de son luxe ostentatoire et mis en résonance avec la sculpture, le design et l’architecture, ne sera bientôt plus considéré comme un signe extérieur de richesse mais bien comme un signe extérieur de culture. OM

Gilles Jonemann, En matière de bijoux contemporain, un maitre d’art qui fait référence

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MUsiQUes aCtUeLLes

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Prochains concert MJC Picaud le 12 décembre pour la sélection du Printemps de Bourges et le 30 janvier (500è de L’oreille qui gratte).

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as vraiment car les temps changent, et nos « new Beatles » n’apprennent plus forcément à « gratouiller » au fond d’un garage. Les premiers flirts de Guillaume (chant et claviers) avec la muse remontent à 4 ans, face à un piano et, pour Billy (guitariste), à 8 ans avec … une clarinette. Puis c’est la spirale infernale et nos apprentis ès composition finissent par se retrouver en 2008 sous la bannière de « Quadricolor » avec david (bassiste) puis Xavier (batteur), tous deux recrutés eux aussi au Conservatoire à Cimiez. Une institution où Fréderic Luzignan qui dirige la classe « Musiques actuelles » présidera à l’accouchement. « C’est grâce à ses cours que je suis passé de la clarinette à la guitare. Mais le classique m’a permis de développer mon oreille et le sens du rythme », explique Billy. Même constat pour Guillaume qui vient de réussir son prix de conservatoire. « Les cours de compo nous ont aidés à progresser plus vite ». Pour leur défense, nos deux virtuoses défroqués ont été bercés très près des vinyles de papa : Police, Pink Floyd, Beatles, Led Zeppelin, aCdC, Hendrix, Queen et d’autres plus de leur âge (Muse, radiohead). Un brouet bien digéré : « On voulait mélanger des influences folk et rock, électro et pop ». résultat : à l’écoute du eP « euphonie » sorti cet été, on se trouve comme pris dans les cordes des 4 de Liverpool. a nouveau on se surprend à être parcouru par ce doux frisson. Ce miel de guitares on le doit à ces 4 azuréens qui auront tout juste dix-huit ans en 2010 mais qui jouent comme si, avant eux, rien n’avait existé. audace, innocence, élégance, un cocktail qui donne des ailes faute d’avoir son permis de conduire. Car une fois sorti de son écrin, le jeu des quatre couleurs fait illico presto des adeptes. d’abord sur le web grâce à quelques reprises « unplug » mises en ligne de Late Of the Pier, Kaiser Chiefs ou encore de Wax taylor. Ce dernier se fendant même d’un message d’encouragement sur le « my space » du groupe. Puis avec le premier eP"4.04" fin 2008, le tsunami submerge la scène locale du volume au sezamo via le théâtre Lino ventura où le combo assure la première partie d'asiaN dUB FOUNdatiON. 2009 c’est l’année du sacre ! Quadricolor fait mouche sur tous les tremplins : MJC Picaud, Cybertremplin adeM 06 et même celui organisé par les inrockuptibles (ray Ban rock Battle CQFd 2009), « Un trophée qui nous a permis de jouer au social Club, au showcase à Paris et d’avoir un papier élogieux dans le magazine », souligne Billy. et après un été chargé en live (Les enfants du rock, Les Nuits du sud) et un automne ponctué d’une date clé à l’Omega live de toulon, Quadricolor cherche, pour er son 1 LP, un label à la mesure de son talent. La Pop, faut que ça brille, non ?…OM


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sPyFoX

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grâce de la a l’heure du retour en vos oreilles Pop music, ouvrez bien riches et la car il y a les nouveaux me salado noblesse terrienne. Jérô me catégorie. fait partie de la deuxiè

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on projet baptisé « spyfox », clin d’œil à la chanson « Fox in the snow » du groupe anglais « Belle et sébastien » n’est pas né d’hier. il a muri depuis qu’ado ce toulonnais taquinait sa six cordes et bien avant qu’il ne débarque à Nice où il évolua au sein de supercolors. Le concept fut orchestré en 2006 par notre trentenaire devenu multi instrumentiste, (par ailleurs talentueux graphiste illustrateur), pour en finir une bonne fois pour toutes avec le jugement de dieu et des Beatles ! et fi , la pop ne connaît pas la crise ! Pour raconter ses histoires abracadabrantes à la Lewis Carroll, nous balader de l’autre côté du miroir Jérôme convoque sur son premier LP « Monster », outre le traditionnel trio basse / guitare / batterie, quelques cuivres bien briqués par Patrick Mirete, directeur artistique de l’agence de communication Pole Company (ça balance !) et rien moins qu’une section de cordes dirigées er par Florent audibert, (1 prix des Conservatoires de Nice et Paris). Cerise sur le gâteau arnaud Maguet, artiste plasticien (professeur à la villa arson) et fondateur des cultissimes éditions « Les disques en rotin réunis » s’immisce dans la Garden party avec d’improbables instruments : glockenspiel, ukulélé et tèrémine (l’ancêtre soviétique du synthétiseur) résultat : une bubble-Pop rusé comme un renard qui crève avec jubilation l’oreiller et change l’écume des jours en grand cru de champagne mais toujours avec la distance réglementaire entre innocence et dandysme, farce et nostalgie, Lemond curd et absinthe. Bienvenue dans cet étrange parc d’attraction ou l’on croise tim Burton, les frères Mael des sparks, Marc Bolan (Un autre qui incluait des instruments d'enfants dans ces compositions), bienvenue dans cet étrange manège où Jérôme avec sa voix de tête dévoile la monstrueuse parade. Ce fan de divine Comedy, nourrit à la musique classique règle désormais ses comptes en fanfare dans les clubs niçois du volume (où il fit un bœuf avec les « Quadricolor ») au sezamo où il se produira encore en décembre. Quant aux premières treize bulles de Jérôme elles se dégustent sur son site mais aussi en vidéo clip (« Monster ») sur dailymotion en attendant après de belles louanges dans les inrockcuptibles qu’un label se penche sur le cas spyfox. OM www.myspace.com/spyfoxmusic


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M u s i qu e s a c t u e ll e s

n u r e h t n o s e t a m y a a 46, elle aime la n e l il s, n P a 4 2 e e Bêt Elle n’a qu sique e et la angas, lui, la mu La bell

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24 ans, elle a déjà tout d’une grande, la délicieuse Felicity qui débarqua à Nice à l’âge de six ans. Quand vient la nuit, elle se change en Gali, une héroïne de mangas qui visite d’étranges univers avec son complice Pits instrumentalise. Et comment ne pas suivre la fiancée du pirate à la voix douce comme un « Quality street » au-delà du miroir. Car de la perfide Albion où elle naquit en 1985, Gali a hérité d’un goût sûr pour la théâtralité et d’un sens inné de la Pop. Pits, lui, est né à Vichy. Sa cure, il la prend dans son bunker digital derrière ses synthés et ses guitares. Leur rencontre remonte à 2005 lorsque notre homme, de retour de Londres (pas de l’ombre !) où il passa dix ans en pleine vague techno, trainait son spleen dans la cour des Diables bleus. Et depuis le pirate qui a fourbi ses armes à l’école de Throbbing Gristle ou de Front 242 et l’Anglaise romantique (licenciée en littérature) plus portée sur Radiohead filent le parfait amour sur les plages électro-clash. Entre les deux, la combustion instantanée ! « Un mois après nos premières répétitions on donnait nos premiers concerts. Le nom ? On l’a trouvé ensemble. Gali a proposé playmate j’ai rajouté on the run pour l’idée d’urgence et qui en français peut se traduire par « en cavale ». Et la cavale, ça les connaît ! Nos playmates sont toujours par monts et par vaux, se produisant dans les clubs ou les scènes alternatives de Nice à Paname via la Suisse. « On est souvent en résidence au Volume où nous aimons jouer et préparer nos albums ». Le duo fonctionne d’ailleurs aussi bien en live qu’en studio. Pas une mince affaire quand on n’est que deux en scène et dopé aux machines. Mais il y a eu de brillants précédents depuis Adam et Eve. Pits et Gali suivront- ils la voie royale de Eurythmics, The Kills, ou du duo frenchy des eighties « Kas Product » (Mona Soyoc et Spatz), plus dans leurs cordes. Quoiqu’il en soit, le duo prépare déjà la sortie de son prochain album, après en avoir sorti deux (dont un double LP remixé par 30 Dj’s), signé la BO d’un métrage canadien (Retour à Dresden) et affiché à leur compteur une centaine de gigs en Europe. Les addicts à ce bonbon rose fourré aux acides attendent déjà avec gourmandise la suite des aventures de l’Alice aux cent visages (qui écrit ses textes) et de son hacker dont le flow ardent donne à ces Playmates cavaleuses et à leurs comptines post atomiques, une saveur sexy douce amère et unique. OM © J-Ch Dusanter

© J-Ch Dusanter

© J-Ch Dusanter

les m pop anglaise et elle, morts, elle est b e d s te tê s le t e en indus mon, on l’a vue é d le r a p é d é ss o il est po bie… c’est le du m o z n e i lu t e s infirmière bable mais le plu ro p im s lu p le électro-rock e actuelle. affûté de la scèn

En concert le 19 décembre au Volume (Nice) et le 10 février à la MJC Picaud (Cannes).


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Commissaire-priseur Jean-Pierre Besch « Je suis un arbitre entre le vendeur et l’acheteur »

«C

’est en fonction de ses goûts personnels, de la région et des circonstances que l’on se spécialise dans ce que l’on aime », pose Jean-Pierre Besch. Quand il était à Lyon, et au démarrage de son activité à Cannes, le commissaire-priseur fils d’antiquaires se définissait comme un « généraliste du mobilier du 18è siècle ». L’évolution de son activité l’a amené aujourd’hui à se consacrer presque exclusivement à la peinture et sculpture du 20è siècle, aux vins (avec une forte prédilection pour le Bourgogne), aux bijoux et montres. Si, quand il s’est lancé dans la vente aux enchères de vins, seulement une poignée de cabinets officiaient sur ce créneau, sa société y occupe aujourd’hui la deuxième place. « J’ai eu la chance de pouvoir me démarquer des autres en faisant ce qui me plaît le plus, se félicite Maître Besch. Les caves privées nous arrivent de partout en France pour être évaluées par notre expert Pascal Kuzniewski, le critère le plus important étant les conditions de conservation. 70 % des ventes de vins sont réalisées auprès d’acheteurs internationaux. » Mais le cabinet s’est également démarqué par son mode de fonctionnement. « J’ai souhaité sortir

d’un système avec une salle des ventes (98 % de nos ventes ont lieu dans les salons de l’Hôtel Martinez) pour me rapprocher d’un fonctionnement plus parisien que provincial, indique le commissaire-priseur. Cannes, ce n’est pas la province ! Nous avons en fait la chance d’être à la fois en province et d’être un peu comme le 21ème arrondissement de Paris ! Cette ville est aujourd’hui un marché qui compte dans le secteur des enchères. » Paris, le camembert et… Cannes ! Jean-Pierre Besch l’affirme : être à Cannes est une carte de visite importante pour se « frotter » à d’autres maisons, souvent plus grandes. Et ses visées sont nationales, voire internationales. « Notre force visà-vis de structures plus importantes et plus impersonnelles est d’avoir su garder notre identité et notre responsabilité locale. » Car le cabinet Besch conserve sa fonction de commissaire-priseur « de tous les jours » : le matin est réservé aux inventaires de successions, l’après-midi aux rendez-vous pour les ventes. « Notre vrai plaisir est de sortir des collections privées des objets qui ont une âme et auxquels se raccrochent de jolies anecdotes. » Et Maître Besch de citer

© H Lagarde

Installé à Cannes depuis 1989, Jean-Pierre Besch a fait de son étude de commissaire-priseur la deuxième société de ventes aux enchères de vins en France. Persuadé que la Côte d’Azur est un atout formidable dans l’exercice de son métier, il a choisi un mode de fonctionnement « à la parisienne ».

 Jean-Pierre Besch à son étude

ces 150 pièces de l’Ecole d’Amérique du Sud de 1950 à 1970, issues d’une collection privée, dont il avoue aisément ne pas du tout être spécialiste… « Nous avons dû trouver un expert, faire des recherches sur Internet, car ces pièces sont vendues essentiellement à l’étranger, explique-t-il. Nous avons mis deux ans avant d’être prêts à vendre cette collection, mais nous sommes les premiers à avoir affiché des résultats pour cette Ecole en France. Et cela, c’est la Côte d’Azur qui l’a permis : nos interlocuteurs, principalement américains, ont comme image de la France Paris, le camembert et… Cannes ! » Si être présent sur la Côte d’Azur peut être un atout indéniable, c’est à condition d’avoir su faire ses preuves. « Beaucoup de


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dossier Métier

collectionneurs privés installés récemment dans la région avaient gardé leurs références parisiennes. Il a donc fallu gagner leur confiance en leur démontrant notre professionnalisme. On ne peut pas se contenter d’être une étoile filante ! » un médecin généraliste entouré de spécialistes et pour ce faire, il a fallu s’ouvrir à d’autres domaines d’expertise, en faisant appel à des experts sur chacun des domaines. « Je suis comme un médecin généraliste qui s’adosse à des spécialistes pour affiner son diagnostic. » Car ce qui compte, pour le vendeur, est d’avoir la certitude de ne pas être passé à côte de quelque chose. « Et, pour l’acheteur, d’être assuré qu’on ne lui a pas menti sur

la valeur annoncée. » Un point d’ailleurs été l’un des premiers à établir un calendrier couvert par une garantie décennale obliga- avec trois rendez-vous dans l’année qui, toire. « Tout le monde sait vendre une fois s’ils étaient plutôt inattendus au début, sont aujourd’hui attendus par que la vente est préparée, BESCH tous : le 15 août, le 30 dépoursuit Maître Besch. Je cembre et le dimanche de suis donc un arbitre enPâques ! Les ventes respectre vendeurs et acheteurs, 1989 - 2009 tent toujours le même orafin que les deux parties dre : d’abord les tableaux, soient gagnantes. » s’il y a puis les bijoux, et enfin les quinze ans, les commissaivins. « La préparation de la res-priseurs attendaient le vente est le moment le plus produit pour faire la vente, décisif et le plus excitant, aujourd’hui, le produit vient Vente Anniversaire relate-t-il. On y rencontre à eux. « A condition d’avoir 20 ans de ventes de prestige sur la Croisette des gens aussi divers que une spécialisation et une passionnants, et c’est là le certaine reconnaissance. » vrai piment de ce métier : C’est une autre caractéris- Couverture du catalogue de la vente anniversaire du cabinet Besch : 20 ans tique de Maître Besch. il a de ventes de prestige sur la Croisette. l’humain. » Fs

20 Years

COMMISSAIRE-PRISEUR 45, LA CROISETTE - CANNES

C A N N E S - H O T E L M A RT I N E Z - S A M E D I 1 5 A O Û T 2 0 0 9

Patrick Rannou-Cassegrain « Au moment d’entrer en scène, je deviens quelqu’un d’autre »

Le 31 octobre dernier avait lieu la vente aux enchères de 230 œuvres de l’ecole de Nice, orchestrée par Patrick rannou-Cassegrain. en véritable amateur d’art contemporain et de design, ce commissairepriseur officie à l’Hôtel des ventes de Nice et vit son métier la passion chevillée au corps.

I

l y en a un plexi, conçu spécialement pour sa première vente, un autre du 18è siècle avec le manche en bois et la tête en ivoire, un troisième sculpté dans une ombrelle du 19è siècle. « Selon mon humeur, je prends l’un ou l’autre. » son outil de travail ? Le marteau. sa manière de sceller une vente ? « Adjugé ! Dire « vendu », c’est pour le folklore ! » avant d’entrer en scène, le trac l’envahit. Pourtant, le métier de commissaire-priseur est fait pour lui. « De nature timide, dès je monte sur l’estrade, je deviens quelqu’un d’autre et j’adjuge. » et il le fait avec un sens certain de la cadence, un vrai talent pour garder le rythme. alors s’il considère que les ventes directes en ligne sont l’avenir du métier de commissaire-priseur, « nous en ferons bientôt », à 51 ans, Maître rannou-Cassegrain regrette toutefois la perte inévi-

table de convivialité que cette évolution engendre. « C’est un peu triste de ne plus tout à fait pouvoir exercer mon métier d’acteur. » avec six autres commissairespriseurs, il est à l’origine de la création du site www.interencheres.com qui annonce notamment toutes les ventes en France et présente les produits. Le succès de ce site est phénoménal, preuve que les ventes aux enchères sont mieux connues du grand public et moins craintes ! « La connotation négative datant du code civil napoléonien, « à vendre ! », a quelque peu disparu et les particuliers sont rassurés sur la qualité de nos prestations, notamment en raison de la garantie décennale. » il y dix ans déjà, Maître rannou-Cassegrin avait tenté l’aventure des ventes sur internet. « Mais les moyens dont nous disposions n’étaient pas encore suffisants, se souvient-t-il. Les ventes étaient

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 Patrick rannou-Cassegrain officie à l’Hôtel des ventes de Nice.

très longues et il y avait un décalage avec les personnes qui faisaient monter les enchères à partir de leur clavier d’ordinateur. » Une salle avec quinze lignes de téléphone et au moins autant d’ordinateurs connectés, on imagine assez bien le métier perdre un peu de son humanité. « Il faut donc trouver un équilibre avec un vrai public, car une vente doit vivre, il doit y avoir de l’émotion. »


dossier Métier

sa technique : accepter les petites montées et niveau décharges d’adrénaline, Maître rannou-Cassegrain en connaît un rayon ! « Dans mon métier, il faut savoir décrypter les signaux, souligne-t-il. Par exemple, une personne qui, durant toute la vente, aura son stylo appuyé sous le menton, puis le pose, veut me dire « j’arrête ». Parfois, un seul regard suffit. C’est une question d’habitude ! » C’est lui qui définit la fourchette de montée de enchères. et sa technique : accepter les petites montées. « Sur un objet à 200 000 euros, on monte plus haut si c’est de 100 en 100 que de 1 000 en 1 000, car cela fait moins peur. La vente est plus longue, mais c’est le résultat qui compte ! » avant la vente, les acheteurs ne se dévoilent jamais. « On se sait rien ! La seule chose que nous pouvons deviner, au vu du nombre de téléphones ou d’emails, c’est que ça va monter. Alors quand nous avons dix téléphones sur un même objet, c’est jouissif ! Et quand le marteau tombe sur un prix très haut, ça l’est encore davantage ! » et le 31 octobre dernier, Maître rannouCassegrain s’est vraiment fait plaisir. six mois de travail ont été nécessaires pour préparer la vente de 230 œuvres de l’ecole de Nice (période 1960-1980). « Nous aurions pu l’organiser à Paris (ndlr : Hôtel des ventes Nice riviera y a un bureau et est la seule entité régionale à posséder des parts à drouot), mais Arman et César, par exemple, n’y auraient pas atteint ces

La vie des arts

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prix, indique-t-il. Les principaux acheteurs personnelles sont très variées. « Je ne refuse presque rien, car c’est un et souteneurs sont locaux. HÔTEL DES VENTES NICE RIVIÉRA domaine où la créativité se Nice est un marché formirenouvelle sans cesse. cesse » dable, avec une vraie clienLes ventes volontaires retèle et un potentiel énorme, présentent 60 % de l’acmême si les plus grosses tivité de l’Hôtel des venpièces finissent par partir tes Nice riviera. Le reste à l’étranger. » Pourtant, concerne le judiciaire. C’est le commissaire-priseur reaussi ça qui fait l’aspect connaît qu’être à Nice n’est humain du métier, quand pas toujours facile. il accompagne les familles dans des moments sou« on trouve des trésors, vent douloureux. « Nous à nice » S 16 2009 avons choisi de garder les il y est arrivé en 1984, en deux casquettes du métier, commençant sa carrière Couverture du catalogue de la vente du 16 mai 2009. mises en place par la réfordans un cabinet d’expertise-comptable. « C’est un travail de lon- me de 2002 : l’officier ministériel, nommé gue haleine pour gagner la confiance des par le Garde des Sceaux, et la société de acteurs locaux. Les notaires font appel à vente aux enchères volontaires, qui a donné nous pour les évaluations de patrimoines un coup de pouce au marché. » Peu à peu, et, avec mon associé Yves Wetterwald, nous le système français tend vers le modèle réalisons tous les jours 3 à 4 inventaires anglo-saxon. « Je ne suis pas forcément de succession ou de tutelle chacun, précise pour de nouvelles réformes, qui autoriseMaître rannou-Cassegrain. Par ce biais, raient notamment les ventes à l’amiable, nous entrons dans les collections privées. » indique Maître Rannou-Cassegrain. Or, ce et il y trouve des trésors, comme ce tableau n’est pas notre métier. » Un modèle dont du pré-Matisse ou ce cabinet florentin du les meilleurs exemples sont sotheby’s et 18è siècle, vendus fin novembre, l’un des Christie’s, qui rachètent aujourd’hui des deux grands rendez-vous du mois, réalisés galeries. « Donner des cotes aux artistes, en plus de la vente hebdomadaire. « Les pé- ce n’est pas non plus notre travail, estime riodes fastes sont les mois de mars, avril, le commissaire-priseur. C’est celui des gamai et juin, puis octobre, novembre et dé- leristes. Pour que le système fonctionne, il cembre. » L’autre marotte du commissaire- faut pouvoir créer une alchimie entre l’enpriseur, ce sont les bijoux. et ses sélections semble des acteurs. » Fs Yves WETTERWALD & Patrick RANNOU-CASSEGRAIN Commissaires-Priseurs Associés

AMEDI

Arnaud Yvos

MAI

L e g o û t d e s be l l e s c h o s e s

en 7 ans, à raison d’une quarantaine de ventes annuelles, l’étude d’arnaud Yvos à saint-raphaël a pris du poids auprès des amateurs d’art. rencontre avec un jeune commissairepriseur qui, à 37 ans, a converti nos voisins varois au noble art de traquer la perle rare sous le marteau de buis. à la profession. Nous sommes à peine 20 par promotion chaque année à décrocher ce concours. en tout, 500 commissaires priseurs exercent en France. Un chiffre dérisoire au vu du nombre de notaires ou d’avocats.

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Comment devient-on commissaire priseur ? Pour ma part, j’ai passé ma maîtrise à aix, mais il faut au minimum une licence en droit, et au moins un deUG en histoire de l’art. Ce double diplôme filtre l’accès

 arnaud Yvos à son étude


la vie des arts

dossier métier

Et dans la région ? Il n’y a que trois études dans le Var contre une douzaine dans les Alpes-Maritimes. C’est ce qui vous a décidé à ouvrir une étude à SaintRaphael ? Quand j’ai passé mon diplôme, j’avais 26 ans et j’habitais à Cannes. 4 ans plus tard, je décidais de m’installer dans le Var où il y avait une niche. Mais il m’a fallu mettre les bouchées doubles depuis l’ouverture de mon étude à Saint-Raphael en 2003 afin d’obtenir la confiance des vendeurs et des acheteurs locaux. Les varois ne connaissaient pas le métier de commissaire-priseur et encore moins tel que je le pratique. Car contrairement à mes confrères, « Var enchères » ne fait pas de liquidation judiciaire mais uniquement des ventes volontaires sur le marché de l’art. Comment définiriez-vous votre métier ? Faire une prisée signifie estimer le prix de quelque chose. Un commissaire priseur se doit d’être un bon généraliste en art pour ne pas passer à coté de la perle rare. Selon quels critères se fait l’estimation ? La valeur esthétique, l’état de l’objet, sa rareté. S’il possède déjà une cote, c’est plus facile. Si l’objet n’est pas identifiable par mes soins, je fais appel à des experts en arts, livres anciens, philatélie, bijoux. Il y a aussi des modes. Le 18ème siècle et sa commode grand-mère Louis Philippe sont en chute libre. Au contraire, l’Art déco et le design très recherchés. Le 19ème siècle où les ébénistes abusèrent de matériaux clinquants a trouvé sa clientèle « bling bling ». L’activité doit varier selon les régions. Quelles sont les particularités locales ? Le contenu des maisons reflète nos modes de vie. Ici c’est un peu brouillé par la grande mixité de résidents. Malgré l’opulence apparente, les intérieurs n’y sont pas forcément plus riches qu’ailleurs. Il y a plusieurs raisons à cela. On vit ici plus vers l’extérieur. Avec les cambriolages les gens évitent de stocker des valeurs chez eux. Beaucoup de résidences secondaires entre Saint-Tropez et Saint-Aygulf sont quasiment vides. La recherche doit donc occuper une bonne partie de votre travail. Nous avons des partenaires comme les notaires qui nous sollicitent pour des inventaires de succession mais la communication

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reste notre fer de lance. Pour annoncer nos ventes nous utilisons les pages de Nice ou Var Matin ou des supports plus ciblés comme la Gazette de l’hôtel Drouot que les collectionneurs épluchent.

Vos plus belles adjudications ? Un bronze de Rodin mis a prix 60 000 euros vendu à 115 000. Un tableau du peintre orientaliste Jacques Majorelle estimé à 50 000 est parti lui à 150 000 euros. Idem pour une table art déco du ferronnier Edgar Brandt. Et puis il y a eu cette pendule mise à prix 4 000 euros. En fait c’était l’œuvre d’un horloger réputé en Angleterre dont certaines pièces sont en musée à Londres. Des anglais qui avaient fait le déplacement sont montés jusqu’à 48 000 euros.

Comment monte-t-on une vente ? Après avoir estimé l’objet, nous déterminons une fourchette de mise à prix entre le prix le plus bas dit « de réserve » et celui maximum. Ses honoraires étant proportionnelles au prix d’adjudication, le commissaire-priseur va tout faire pour que l’objet se vende le plus cher possible. C’est la grosse différence avec un marchand d’art.

Quels sont vos outils ? Il y a le fameux marteau en buis ou en ivoire qui sert à adjuger. J’ai choisi le premier. Le plus important c’est de savoir se mettre en scène, c’est un peu la commedia del arte, une salle de vente. Des personnalités comme Cornette de Saint Cyr qui a soutenu les artistes ou Tajan ont eu une influence notable sur ma génération.

Où ont lieu les ventes ? Le plus souvent à mon étude, nous délocalisons parfois. Ce weekend j’en ai organisé une au Golf de Valescure, cela peut aussi se faire au domicile du client si l’on juge que c’est mieux de voir l’objet dans son contexte.

Pourquoi avoir choisi ce métier? Le goût des belles choses, le plaisir de les toucher et de les valoriser. On ne peut faire ce métier si l’on n’est pas amoureux des objets d’art.

Sont-elles toutes de même nature ? Non, il y a des ventes thématiques pour les grands vins par exemple et des ventes mixtes où l’on présente un peu de tout. Var Enchères réalise 4 à 5 ventes cataloguées par an qui drainent plus large. Mon métier c’est aussi de classer les objets selon leur qualité puis d’organiser le type de vente le mieux adapté. Quel est le profil des acheteurs ? Il y a de tout même des oisifs qui ne se consacrent qu’à ça. On a beaucoup de marchands d’art très actifs dans le Var, d’autres viennent du 06. Avec la Gazette de l’hôtel Drouot diffusé jusqu’aux Etats-Unis on touche une clientèle internationale.

Vous auriez pu être collectionneur ? A condition de ne pas le faire dans mon étude, je peux acheter partout. J’ai des objets d’art chez moi, je ne peut pas vivre sans ! J’aime particulièrement la peinture italienne et celle du 19ème siècle. Pour finir, comment se porte votre petite entreprise ? Très bien ! Je suis le seul sur ce segment à pratiquer une sélection aussi drastique parce que les gens sont devenus plus exigeants. Il y a 10 ans, tout se vendait. La crise a touché de plein fouet l’objet moyen mais dans le haut de gamme on continue de battre des records. Il faut avouer que sur la Côte, nous bénéficions d’un gros turnover de clients potentiels. OM


design

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Gérard Taride Dans le mille du Mass Market

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Son « Happy Colt » à pois roses en témoigne, Gérard Taride est un enfant de la balle ! Plus sérieusement, c’est après avoir goûté au nouveau réalisme et au Pop Art que l’artiste multipistes embrassa une carrière de concepteur designer …

 Happy Colt

P

longez à 6 ans un fils de plasticien dans un bain créatif et il recevra une poussée égale au poids, etc. Car l’aventure qui a conduit Gérard Taride (né en 1963) au design débute avec la percée de l’Ecole de Nice. Son père sculpteur l’amène alors dans les vernissages de ses amis. De l’atelier Foutrac de Ben à celui « accumulatif » d’Arman, Gérard découvre les coulisses. « J’ai été bercé par l’univers d’Arman et de Farhi, les provocations de Fluxus, connu Sosno à ses débuts ». Sous l’influence de cette effervescence, l’ado fonde « Plein Sud », un grou-

 Série Zaza (Découpes et impressions sur Plexi)

pe au sein duquel il évoluera comme batteur pendant 10 ans, le temps de quelques albums à succès. Quand l’aventure s’épuise, le trentenaire verse avec autant de passion dans la décoration, le cinéma, la photo de mode. Faisant son miel de toutes ces expériences, le design s’impose bientôt à lui comme la solution pour fusionner tous ces savoir-faire glanés à l’école de la vie comme à celle de son père, « aussi érudit en art plastique qu’en jazz ». Gérard Taride crée alors le concept de l’enseigne XXL, 15 boutiques en France, dont la première ouvre

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design

© G Taride

la vie des arts

© G Taride

 Shoe Glitter

 Colbert I

Zoladz ou la photo au mètre cube

 Starway to Heaven

La photo mène à tout à condition d’en sortir. Dominique Zoladz, photographe, plasticien, designer en est la preuve, lui qui a bâti une étrange collection de meubles et d’objets en détournant le 8ème art de son objectif.

L

es créations que Zolaldz a accumulées dans son appartement niçois racontent un parcours atypique. Celui d’un photographe né en Pologne, exilé à Paris qui commença par s’intéresser aux traces laissées par les autres. Tel un chasseur, il traquera ainsi, sur les murs des cités, la peau du temps : affiches, ” tags” et “graphs” superposés comme autant de témoignages laissés par l’homme. « Ces scarifications ou palimpsestes contemporains reflètent un besoin pressant de liberté d’expression comme l’histoire d’une société en couches. Une chance au grattage, une chance au tirage en somme ! » C’est pourquoi, installé en Riviera dés 1980, Zoladz chassera ces mémoires murales au fil de ses voyages. L’Italie restant son terrain de prédilection. C’est aux environs de Rome qu’il réalisera un autre travail l’éloignant encore un peu plus de la photo traditionnelle. « Séduit par le côté surnaturel du Jardin de Bomarzo, j’ai décidé de renforcer son atmosphère ir-

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en 1997 à Villeneuve-Loubet. « C’est là que j’ai commencé à dessiner du mobilier et des objets ». En 2008, il se retire et conçoit avec sa société « Pure design » la scénographie de bon nombre d’événements comme « Le salon de la décoration » à Nice Etoile et signera en 2010 un Design corner à la Foire de Nice. « Cette vitrine des tendances déclinée par thèmes, Pop, baroque, nature, jettera une passerelle entre le design et la mode », explique celui qui, à l’instar de Warhol, aime croiser arts mineurs et arts majeurs et se jouer des codes esthétiques via les technologies actuelles. « Mon outil c’est le numérique et l’ordinateur ». Découpant et détournant les matières avec une prédilection pour le plexiglas, l’artiste inscrit à son tableaux de chasse Jésus, Mao, Mona Lisa, des sculptures et des toiles en technique mixte qui mêlent non sans provocation objets du

La vie des arts

culte et de la consommation sur fond de néo psychédélisme. Aujourd’hui dans sa « Factory » de Saint-André, comme le Petit Poucet, Gérard a semé ses cailloux. Au fil de l’entrepôt dédale : un studio de musique, un atelier de photo, un autre de découpe. C’est ici que l’artiste qui alterne travaux personnels et commandes a conçu cette année la scénographie d’un centre commercial à Montpellier, une nouvelle série de luminaires présentés au salon « Maison et Objets » à Paris et qu’il pense déjà à sa prochaine exposition « Une salle complète pour développer un projet avec musique, images, objets et créations plastiques ». Que du bonheur pour ce créateur pluridisciplinaire en quête d’une expression libérée de tout code, où seul l’esprit demeure : « l’idée que l’art peut être aussi un spectacle pour tous ! » OM

© J-Ch Dusanter

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design

réelle en colorisant les photos de sa statuaire. » Les clichés noir et blanc sont alors recouverts de papier de soie et colorés au pinceau et à l’encre de couleurs. En même temps, l’artiste œuvre sur l’idée de l’accumulation et réalise des panneaux, des « Mosaïques » déclinant en série le même cliché parfois légèrement colorisé. Tout y passe, des sièges du Camp Nou de Barcelone, des arènes, des clapiers à lapins, même sa propre fenêtre : « C’est à partir de ce travail graphique que j’ai commencé à me définir comme photographe plasticien. »

 De la statuaire aux Totems

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design

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 Zoladz devant son portrait croqué par le dessinateur Edmond Baudoin

Puis, un beau jour, l’artiste franchit une autre étape qui le libèrera de ses amarres. Ses Mosaïques, au lieu de les décliner à plat, Zoladz les décline en volume en les montant en cubes. « Le cube, c’est ludique, un retour à l’enfance, mais surtout cela me permettait d’offrir une vison en trois D de mon travail. » Un, deux, trois cubes empilés et les totems apparaissent, confirmant son désir d’accumulation, ouvrant de nouvelles perspectives. « Je pouvais tout faire moi-même. Alors j’ai tâtonné, lestant parfois de l’intérieur les cubes en carton bois pour les rendre plus stables. » Et l’artiste qui a l’œil aussi vif que la main – il a réalisé des maquettes d’architectes - décide de s’attaquer à la création de meubles. Ainsi naissent au printemps des étagères, des tables et consoles puis des luminaires. « J’avais envie de faire des objets à la fois utilitaires mais aussi des objets d’art à double lecture. De loin, on dirait une tapisserie abstraite, de près se révèlent les signes figuratifs », tel ce banc d’anchois qui recouvre entièrement une table et ses tabourets. « Avec ce procédé, les perspectives sont multiples en termes de design et de décoration d’intérieur, fauteuils, canapés, toutes les fantaisies sont possibles sur demande », commente Dominique qui présentera ses totems et palimpsestes au Centre culturel de la Providence du 26 janvier au 4 avril. OM  Les mille et une métamorphoses du cube photo


lutherie d'art

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A 62 ans, Kamel Chenaouy n’est pas près de prendre sa retraite. Si cet artisan pionnier dans la lutherie électrique a fermé son atelier niçois, ville où il est arrivé en 1990, ses deux fils ont décidé de rester dans la course : ils commercialisent les modèles créés par les mains en or de leur père, avec la même passion  qu’il y a 35 ans. « J’ai beaucoup œuvré pour améliorer

Kamel Chenaouy L’orfèvre des guitares électriques

l’ergonomie et le confort des guitares », rappelle Kamel Chenaouy, maître luthier.

sont pensées scientifiquement, sans perdre l’harmonie de l’ensemble. » Et ce sont les réflexes d’utilisateur de ce guitariste professionnel qui le guident dans ses recherches. « J’ai beaucoup œuvré pour améliorer l’ergonomie et le confort des guitares. Ainsi, j’ai été le premier à calculer le centre de gravité pour un meilleur équilibre du musicien ! » Confort et innovation technologique Dès 1976, Kamel introduisait également le talon ergonomique, épousant la forme de la paume de la main, ou le manche Delta, traversant tout le corps de la guitare. Le meilleur symbole de ces innovations : la guitare Concorde, ainsi surnommée par les fans en raison de son profil effilé, en réalité inspiré par la colombe de la paix stylisée figurant sur le drapeau de l’UNESCO de l’époque… Aujourd’hui, une fois le prototype terminé, il est envoyé dans un atelier en Chine où sept personnes le fabriquent à la main. Bientôt, la société travaillera avec un atelier de douze personnes en Roumanie, pays qui a un savoir-faire ancestral en matière de lutherie et des forêts avec les meilleurs érables. La capacité de production est de 300 guitares par mois pour la Chine et d’au moins autant pour la Roumanie. « Il était hors de question d’utiliser des machines automatisées, souligne Kamel. Je ne veux pas entrer dans la compétition des guitares cheap. » Et cela a toujours été le cas. A la fin des années 70, les guitares de Kamel

Photos : © H. Lagarde

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ntre des planches d’essences de bois précieux, une vieille guitare décortiquée, des plans sur papier millimétré et une caisse à outils géante, Kamel Chenaouy finalise sur son établi sa dernière création avec la minutie d’un joaillier. « Je travaille mes modèles de guitares comme des bijoux ». Entre ses mains, l’amarante et le bois d’amourette du corps tranchent avec le wengé et le palissandre utilisé pour les touches. « Regardez comme l’éclat du bois et du dessins des veines est révélé par le vernis ! » Son véritable atelier, installé pendant une quinzaine d’années rue Biscarra, à Nice, est aujourd’hui fermé. Pourtant, Kamel Chenaouy a gardé un petit appartement, dans le quartier de la gare, où s’adonner à son métier de passionné. « Si j’arrête de créer, je meurs. » Internationalement connu dans les années 70 et 80 pour ses innovations technologiques, il revient aujourd’hui sur le devant de la scène de l’univers de la guitare électrique. Sous l‘impulsion de ses fans de la première heure, ses deux fils, Alex et Gaby, ont décidé de relancer la production de nouveaux modèles. « Moi, ce qui m’intéresse, c’est ma planche à dessin, pas l’aspect commercial », confie Kamel. La société KCPI exploite donc la marque déposée Kamel Chenaouy et les guitares Apex, elles aussi inventées par leur père. Chaque modèle, il met trois ans à le concevoir. « Je travaille de la même manière qu’un bureau d’études : on ne met pas n’importe quelle droite avec n’importe quelle courbe ! Les formes

 Kamel Chenaouy dessine ses modèles pendant plusieurs mois avant de les sculpter dans le bois.


la vie des arts

lutherie d'art

 Ses derniers modèles sont constitués d’assemblages de bois précieux.

Et là, tout s’est enchaîné. Kamel a révolutionné le monde l’électrique en inventant la guitare à mémoire programmable. valaient trois fois plus cher qu’une Gibson et quatre fois plus qu’une Fender. Et pourtant, entre 1977 et 1987, avec 7 000 guitares vendue en France, notre luthier était numéro un, devant les deux marques légendaires. « Après Woodstock, l’esprit avait changé, se souvient-il. Nous vivions un tournant culturel décisif et les gens étaient prêts à découvrir d’autres choses. » Kamel travaillait à l’époque avec un atelier au Japon qui pouvait produire jusqu’à 400 guitares par mois. « La demande était trop forte, je ne pouvais plus assumer la fabrication tout seul. Il fallait produire huit modèles sur trois séries, le tout multiplié par deux avec les basses et avec… 24 teintes ! » Et notamment le violet et le fuschia, qui restent encore aujourd’hui ses couleurs de prédilection. L’inventeur de la guitare à mémoire programmable Qui aurait pu prédire un tel succès au guitariste qui faisait danser les touristes dans les boîtes de nuit tunisiennes ? Venu rejoindre son épouse à Paris, Kamel reprit des études d’informatique et devint ami avec deux frères qui tenaient un magasin de musique à vocation acoustique. « Ils m’ont tout appris : du commerce à l’importexport, en passant par la gestion et, bien sûr, la lutherie. Ils ont ensuite créé une boutique dédiée à l’électrique et m’ont très vite mis à sa tête ! » Et là, tout s’est enchaîné. Kamel a révolutionné le monde l’électrique en inventant la guitare à mémoire programmable. « Un guitariste professionnel qui joue de la variété est confronté à de nombreuses sonorités différentes : jazz, blues, rock, etc., explique-t-il. Il faudrait cinq guitares pour couvrir la palette de sons nécessaires ! Là,

 Les deux parties du corps de la guitare sont assemblées avant de passer aux finitions.  En 1976, il fut le premier à introduire un composant « push-pull » dans une guitare électrique.    Il fut aussi le premier à proposer des teintes originales, telles le violet ou le fuschia.

 Chaque détail est étudié avec minutie.

la guitare possède 10 sonorités, programmées électroniquement (et la programmation manuelle peut aller jusqu’à 72 !). La mémoire permet au musicien de déterminer lors des répétitions la mise en place des sons, c’est-àdire ce qui fait la couleur du morceau, et de les restituer à l’identique une fois sur scène, y compris tels qu’il va en avoir besoin chronologiquement dans le morceau. » Ce ne fut pas la seule invention du luthier : en 1976, il fut ainsi le premier à utiliser un composant « push-pull » dans une guitare électrique, système répandu aujourd’hui. « Ce n’est pas brevetable car le composant existe, précise Kamel. C’est un simple commutateur mettant en marche un préamplificateur pour augmenter les possibilités de l’instrument et du micro sans prendre de place. » Il suffisait d’y penser ! Aujourd’hui, s’il cherche toujours de nouvelles idées, il accompagne aussi ses jeunes pairs, en écrivant des livres et en animant sur le net des forums dédiés à la lutherie. « Je suis conscient d’être dépositaire d’un savoir-faire universel que je me dois de transmettre. Sinon, le métier disparaitra. » FS

Photos : © H. Lagarde

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Créations

LaPUNK

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C’est lors d’une résidence au Logoscope de Monaco que le marseillais denis Brun, artiste multimédia et céramiste explorant les cultures alternatives, créa ces créatures hybrides à tête de lièvre et corps de nounours. Nés d’un clash génétique entre Lewis Carroll et sid vicious, ludiques et dérisoires, les Lapunk symbolisent le désenchantement des générations de l’after « No future ».

Le Petit Niçois Pour ne pas oublier vos papilles en ces fêtes de fin d’année, pensez à déposer sur la table quelques chocolats parfumés. d’une ganache à la pulpe de mandarine laissez-vous transporter par ce « Petit Niçois » aux allures princiers ! 70 € le kilo www.oiseaudor.com L’oiseau d’Or, 20 rue Hôtel des Postes tél. 04 93 92 47 82

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25 € Métal peint H: 7 cm

galerie Ferrero 2, rue du Congrès tél : 04 93 88 34 44

Les di rosa sont deux frères artistes du mouvement de la Figuration Narrative: Hervé, le peintre et richard, dit Buddy, le sculpteur se complètent pour créer un bestiaire et un univers loufoques. Cette petite poule est caractéristique du travail de Buddy. existe en différentes couleurs.

Baby King

400 € véronique Guerrieri artiste sculpteur Baby King en vivant et travaillant à Nice a souhaité résine peinte existe transmettre à travers ce bébé bouddha en rouge, en or et aux formes rondes et lisses, sans en 3 formats dont aucune aspérité l'idée de pureté et un tirage d'innocence. Une ode à la sagesse qui 15 cm limité fait parti de son travail sur l'idée de à 100 exemplaires l'enfant unique chinois « Chaque petit galerie Ferrero être vivant est l'héritier d'une histoire photo Michel Coen familiale, il est la transmission d'une génération à une autre. après avoir créé cette sculpture on me proposa d'exposer à artfair shanghai en 2008 ce qui me permit de développer cette thématique sous des angles différents »

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de L’art à tout prix pour vos fêtes de fin d’année Créations uniques et originales, les idées qui vous sont présentées feront de vos fêtes de fin d’année, une performance artistique ! allant de l’ambiance de votre lieu festif à vos cadeaux surprises, les séries limitées proposées illustrent le travail de créateurs de renom de notre région ! alors laissez vous tenter… et offrez de l’art à ceux que vous aimez !!!!

sapin vu par Valérie Arboireau artiste éclectique et hors normes, valérie arboireau réalise de singulières performances aux rouge à lèvres où l'on retrouve sa passion d'accumuler les petits riens pour en faire de grandes choses. Noël c'est se retrouver, faire don de soi, s'embrasser... un simple baiser multiplié des milliers de fois traduit l'image de ce débordement d'affection "Merry Kiss'Mass" milliers de baisers aux rouges à lèvres représentant un sapin rouge.

2000 € 280 x150 cm toile enduite www.merrychristal.com


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créations

Les bijoux Made in Moma 60 € fleurs au cœur de cristal et perles de Bohême

500 € pièce céramiques, toutes différentes, H: 22 cm.

Rouges à Lèvres

www.moma-nice.com L'atelier situé à Nice regorge de trésors de fille : perles, fleurs, pampilles, rubans... Valérie Arboireau y crée des parures de princesse pour les grandes filles en mal de contes de fées...

Galerie Ferrero 2, rue du Congrès de Giorgio Laveri Tél : 04 93 88 34 44 Accessoire de séduction chargé de symbole, le rouge à lèvres devient objet d'art avec le céramiste italien Giorgio Laveri. Déclinés dans toutes les tailles, de 22 à 180 cm, les rouges à lèvres sont des pièces uniques faites à la main.

Pièce unique, sur rendez-vous à la MOMA.

Mobilier et objets Vintage, créations Made in Moma, œuvres d'art, bijoux de princesse... Que des pièces uniques rien que pour vous !

750 € pièce

Verrerie d’art érotique XXAW

Tête carrée

Edition en pâte de verre Daum, 500 exemplaires, H: 16 cm.

Galerie Ferrero 2, rue du Congrès. Tél : 04 93 88 34 44

de Sacha Sosno Deux signatures pour le prix d'une! La désormais classique "Tête Carrée" de Sacha Sosno - le monument niçois contemporain le plus célèbre au monde - est maintenant disponible en petite taille en pâte de verre Daum. Cette grande marque de luxe co-réalise avec les plus grands artistes du moment des éditions limitées en verre dans différentes teintes.

à Vallauris Toutes les pièces réalisées par la verrerie d’art érotique signées XXAW sont livrées avec un certificat d'authenticité. Elles sont travaillées dans la masse, à la main levée (et non moulées), et, pour la plupart, habillées de feuilles d'or. Divers sextoys de 9 à 45 cm de hauteur Petit modèle : 50 € Moyen modèle : 180 € Grand modèle : 950 €

Le modèle Sextoy Chantilly est particulièrement voué à la déco chic.

Jeu de matière Après un passage à l’art brut et le détournement de vieux outils, l’artiste William Puel s’oriente à travers ses sculptures, vers son sujet favori, l’abstraction. Ici, la matière est vrillée ou découpée, griffée ou effrangée. Chaque sculpture accroche la lumière et joue avec les vides. Les oppositions animent son travail : mat brillant, poli rouillé, souplesse rigidité. De 300 à 600 € la sculpture Tel : 04.94.40.15.62 www.atmos-fer.com

Des vœux timbrés ! L’Office des Emissions de Timbres-Poste de Monaco propose une carte de vœux originale : un encart personnalisable à votre guise (illustration, texte, logo…) comprenant de vrais timbres. A partir de 1,93 € l’unité Pas de quantité minimum. Passez-vite vos commandes !

Office des Emissions de Timbres-Poste de Monaco +377 98 98 41 24 www.oetp-monaco.com

A partir de 1000 € www.smarin.net Tél : 04 93 52 89 26

Les Nenuphars de Smarin. Un paysage abstrait à visiter et à vivre, des sphères et des demi-sphères de toutes les couleurs dans lesquelles s’asseoir confortablement pour oublier le temps

Paysages intérieurs

On trouve sur ces petites œuvres gravées un personnage, un drôle d’animal, une créature… des bouts d’histoire, des rêves éveillés, qui font miroir et nous ramènent à nos propres territoires intimes. Une peinture d’où jaillissent des instants d’enfance mêlés de joies éclatantes et d’errances lumineuses. Sophie Cohen Scali.

Gravure 80 € Tel : 06 10 94 58 96



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