La Baleine 171 - Entreprises, vous avez dit responsables ?

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RÉGIONS

Limousin L'Etat continue d'imposer son modèle énergétique aux régions Les énergies renouvelables peuvent servir le meilleur comme le pire. C’est aussi sur cet aspect de la transition écologique que la France devra se positionner. Pour l’instant, au-delà des promesses, le gouvernement préserve le centralisme historique. force de persévérance, a abouti en 2010 à la construction d’une première éolienne. Ici, les membres d'une coopérative souhaitaient initialement couvrir une partie de leur consommation énergétique. Pour cela, ils ont rassemblé des partenaires locaux cherchant à diversifier leur activité et acquis le soutien de 90 % de la population, de la commune et des conseils général et régional.

© Baerchen57

Un test grandeur nature

Même dans le renouvelable, l'Etat privilégie le centralisme et le gigantisme.

Monts de Rilhac Lastours et Roc du Doun, deux projets en Limousin qui illustrent à quel point les énergies renouvelables peuvent représenter des visions radicalement différentes de l’intérêt général. Le parc éolien des Monts de Rilhac Lastours en Haute-Vienne est exemplaire de la démarche et des difficultés rencontrées par les projets répondant à un besoin local. Une quarantaine d’agriculteurs élaborent depuis 2003 un parc qui, à

A 130 km de là, la centrale photovoltaïque du Roc du Doun sur la commune de Gros-Chastang en Corrèze illustre le projet type décidé en haut lieu. Dès 2013, la Compagnie du vent compte installer 37 000 panneaux photovoltaïques sur 17,5 hectares, pour une puissance de 12 MW et un coût de près de 30 millions d’euros. L'origine du projet est simple : l’Etat a lancé un appel d'offres pour tester des panneaux innovants qui suivent le soleil. La filiale de GDF Suez a remporté le marché et la centrale sera donc en Corrèze. Elle aurait pu être ailleurs, ça aurait été la même chose. En fait de concertation locale, le dialogue a été minimal et le projet a été retenu aux motifs que des haies cacheraient la centrale et qu’elle serait construite sur une lande et des forêts « peu productives ». Evidemment, la centrale sera peinturlurée de vert ici et là pour masquer son impact sur l’écosystème. Déboisements et emprises clôturées sont supposés être compensés par des haies bocagères et leurs niches écologiques.

Ces deux approches illustrent deux usages extrêmes des renouvelables, non pas par leurs technologies mais par le modèle de société qu’ils servent. A la concertation locale et la mesure répondent le centralisme et le gigantisme. Construit autour de sites de production démesurés reliés aux consommateurs par des autoroutes électriques, le modèle perpétué par l'Etat et les grandes entreprises du secteur ne considère l’environnement que comme une donnée parmi d’autres. En l’occurrence, il s’agit d’atteindre tant bien que mal un objectif issu de négociations européennes : 23 % d’énergie renouvelable en 2020. Au regard des premières conclusions de la conférence environnementale, ce modèle a malheureusement encore de belles heures devant lui. Pour l’éolien comme le solaire le gouvernement a annoncé des appels d'offres (un pour l'éolien offshore et un pour le photovoltaïque innovant) et maintenu les entraves aux petits projets (classement ICPE* pour l'éolien). Les grands projets s’en sortent bien quand les initiatives locales restent bridées par le carcan administratif. C’est une bien piètre transition écologique que le gouvernement nous propose là en soutenant prioritairement les intérêts des industriels.

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pHilippe Collet

* Installations classées pour la protection de l'environnement.

Val-d'Oise Zones humides en péril Le Val-d'Oise est un département qui possède de nombreuses zones humides d'un intérêt patrimonial majeur. Malheureusement, il subit une grosse pression environnementale et certaines de ces zones sont menacées. Quelques unes d'entre elles font quand même l'objet d'une gestion adaptée. C'est le cas du marais de Stors qui combine une zone humide de grand intérêt et une prairie calcaire. Classé réserve naturelle régionale, il bénéficie d'un programme d'administration spécifique élaboré par l'Agence des espaces verts et ses partenaires (communautés scientifiques, associations, municipalités, etc.). Pourtant, cela ne le

met pas à l'abri des pollutions environnantes qu'elles soient agricoles ou chimiques. D'autres zones humides ne profitent même pas de ce genre de plan et risquent de disparaître à très court terme. L'ancienne carrière située à Mours est l'une d'entre elles. Elle possède pourtant une faune et une flore remarquables : on y trouve entre autres le crapaud calamite et le triton à crête, deux espèces protégées par la directive européenne HabitatFaune-Flore de 1992. La zone n'a pas été identifiée à temps et n'a pas fait l'objet d'une protection particulière. Ainsi, des promoteurs ont obtenu

un permis d'aménagement et la mare est soumise à des travaux de comblement avec des déchets dits inertes (selon l'Ademe, les déchets inertes sont des déchets minéraux non souillés dont le caractère polluant et la nature évolutive est très faible). Le permis a été dénoncé depuis par la municipalité, mais confirmé ensuite par le tribunal administratif sur des motifs techniques et non environnementaux. Les Amis de la Terre Val d’Oise étudient actuellement la possibilité d'une action en appel pour faire cesser le comblement de ce site.

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Corinne laFosse

Les Amis de la Terre Val-d'Oise


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