Edition du Jeudi 3 Juillet 2014

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In memoriam

Bernard de Sariac nous a quittés Le 1er juillet 2014, le Barreau de Paris rassemblé, en l’Eglise Saint Pierre de Neuilly, autour de son Bâtonnier Pierre-Olivier Sur, des anciens Bâtonniers, d’une foule d’avocats en robe, a rendu hommage à Bernard de Sariac décédé le 27 juin 2014. Aristocrate de naissance, il se dégageait de sa personne une impression de puissance qui, servie par une intelligence aussi vive que déliée, fascinait ses interlocuteurs. Madame le Bâtonnier Dominique de La Garanderie a fait avec art, subtilité et finesse l’éloge d’un grand Seigneur du Barreau, celui qu’appelaient les intimes « Monseigneur ». Bernard de Sariac a rejoint, à l’âge de 80 ans, son illustre père, décédé en 1974 à 61 ans des suites d’une maladie incurable ; il en admirait la grandeur. Nous pleurons l’ami et n’oublierons ni sa chaleur humaine ni la force de ses convictions. Nous exprimons notre peine à sa famille à qui nous adressons nos sincères condoléances. Jean-René Tancrède et A. Coriolis

par Dominique de La Garanderie Père Chère Mathé, je m’adresse d’abord à vous. Nous savons ce que représente aujourd’hui pour vous l’absence de Bernard. Nous partageons votre peine et grâce à lui et grâce à vous, nous partageons aussi vos souvenirs. Cette leçon d’amour, d’affection, de tendresse, d’humour, d’admiration que vous avez tous deux transmis à vos amis. La leçon d’une « mélodie du bonheur ». Bernard savait aimer, - sa sœur tendrement chérie et dont il est resté si proche, - ses petits-enfants, Nicolas, présent aujourd’hui, Valentin, et aussi Noémie, - et vous Véronique, sa fille, si chère et si précieuse pour ce père toujours vigilant, inquiet pour votre santé, pour votre vie, pour votre avenir. Bernard aimait et protégeait sa famille avec toute sa vigueur, de tout son cœur et de toute son âme. Tous réunis autour de lui, avec vous, nous nous associons à votre deuil. Le don de soi, Comme il existe de grands serviteurs de l’Etat, existent des dévouements sans limite pour les confrères et pour l’Ordre au service de la collectivité. Bernard était de ceux-là, avec foi, loyauté et panache, c’était un homme engagé, tout d’un bloc. Totalement disponible pour ses amis, ses clients, les avocats, sa deuxième famille, et tout particulièrement, l’Ordre des avocats. Né dans une lignée de famille de robe. Un grand père notaire. René De Sariac, son père, Président de la Chambre des Avoués près le Tribunal de Grande Instance de Paris au moment de la fusion en 1971, intégra le Conseil de l’Ordre avec rang de Bâtonnier. Bernard de Sariac, son oncle, Secrétaire de la Conférence dans la promotion du Président Gaston Monnerville, brillant avocat de l’Opéra, et aussi de Picasso, était le parrain de Bernard. Il lui a appris notamment à apprécier la musique et la peinture. La mort prématurée de son père a bouleversé une vie qui affirmait son indépendance , hors de cette prédestination familiale. Après les 27 mois en Algérie au deuxième régiment d’infanterie, Quelques « piges » pour « Paris Match » le temps d’exprimer son goût pour le journalisme. Il se lance dans la promotion immobilière.

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A cette époque où il suffisait de vouloir travailler pour exercer une activité professionnelle choisie, Bernard répondant à une petite annonce, intègre le groupe de la Compagnie Financière Edmond de Rothschild. Il y restera 10 ans au sein de Cogifrance maîtrisant parfaitement le droit immobilier et celui de la copropriété. Le Bâtonnier Bernard Lasserre lui conseilla de rejoindre le Cabinet de son père malade. Bernard de Sariac aura la prestation de serment la plus rapide de l’histoire de l’Ordre. Son père meurt le 12 juin 1974, c’est la veille des vacances judiciaires, il n’y a plus d’audiences. Le rapport pour la prestation de serment est fait en trois jours par notre confrère Yves-Frédéric Jaffré, pas besoin de certificat de moralité. Le Président Dechezelles décide d’une audience spéciale et tout seul, en présence des Bâtonniers Baudelot et Lasserre, il prête serment le 2 juillet 1974, il y aura 40 ans demain. Il ne quittera plus cette robe d’avocat sur laquelle il portera avec honneur ses insignes de Commandeur de l’Ordre du Mérite et d’Officier de la Légion d’Honneur. Il sera définitivement et complètement au service de ses clients et de son Ordre. Participant activement à la campagne pour le bâtonnat de Guy Danet, il est élu triomphalement au Conseil de l’Ordre en octobre 1983, le premier jour au premier tour à la majorité absolue. Investissement de son temps et de son énergie sans compter… Il aura un rôle important souvent en binôme avec Elisabeth Deflers, Secrétaire du Conseil, qui est devenue l’amie dans laquelle il a mis toute sa confiance jusqu’à son départ et même au-delà. Coordinateur des Commissions de l’Ordre, il travaillera avec leurs secrétaires, pour la Commission prospective, les futurs Bâtonniers Jean-René Farthouat et Georges Flécheux, ainsi que Michel Gout, pour la Financière Jean-Pierre Cordelier, puis Michel Lamotte et la Commission de Déontologie Georges Beaux, puis Denys Duprez. Il s’agissait de déterminer à la fois le cap c’est-àdire, le maintien de la tradition et de nos valeurs, et l’évolution de notre profession avec pour boussole l’éthique et l’intérêt collectif. Dans le même temps, spécialiste des voies d’exécution de la saisie immobilière, des liquidations immobilières dans les procédures collectives, il participait aussi à de nombreux colloques et congrès en compagnie de nos plus talentueux confrères. Présent sur tous les fronts, il était naturel que soit évoquée l’opportunité de sa candidature au bâtonnat. Bernard déclarait avec une certaine satisfaction, voire coquetterie, que Georges Flécheux et JeanRené Farthouat l’avaient interrogé sur ses intentions

Bernard de Sariac

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Un Seigneur du Barreau nous a quittés

avant de présenter leur candidature au Bâtonnat. Dans cette profession facilement critique, Bernard de Sariac est passé hors du champ des remarques désagréables. Il savait aimer. Il était aussi aimé et respecté. Bernard s’adressait à tous en majesté. Sa stature, sa carrure, sa voix de stentor (dont il se plaisait à rappeler que c’est un organe), ses propos directs, quel que soit son interlocuteur, participaient d’une mise en scène qui ne dissimulait, qu’un instant, son amour des autres. Forte personnalité avec une teinte d’humilité, un bémol, correctif dû à son humour et sa lucidité. Né dans une lignée de gascons, il en était digne. Il empruntait à Edmond Rostand, homme de théâtre, sa superbe et à Cyrano, sa capacité d’abnégation et de tendresse. « Il a vécu sans pactes, libre dans sa pensée autant que dans ses actes ». Bernard aimait le verbe haut et la formule. Tous ceux qui l’ont vu travailler ont su apprécier combien ses provocations verbales aussi tonitruantes soient-elles, valaient autant test d’affection que de complicité future. Il développait une énergie permanente, en alerte sur tous les fronts, performant dans ses relations avec les magistrats, les confrères, les membres du Conseil, les collaborateurs de l ordre. Président de Droit et Procédure, siégeant dans plusieurs Commissions, élu au Conseil National des Barreaux en 1997. Lorsque le Bâtonnier Philippe Lafarge décida de donner à la salle de la délibération de la Chambre des Avoués le nom de René de Sariac, son père, Bernard fut ému aux larmes. Il y présida la commission de

Les Annonces de la Seine - Jeudi 3 juillet 2014 - numéro 29


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