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Paroles de militant: Simon, professeur en secondaire à Braine-le-Comte
from Syndicaliste n°970
by ACVCSC
«LE MONDE POLITIQUE A TRÈS PEU DE CONSIDÉRATION POUR LE MÉTIER DE PROF. SI J’EN SUIS À MA 5ÈME RENTRÉE, C’EST PARCE QUE JE ME SUIS ACCROCHÉ.»
J’ai un master en anthropologie et une agrégation en sciences politiques. Je peux donner cours en sciences sociales, mais en réalité, je donne cours de sciences humaines et sociales en techniques de qualification et cours de géo dans le général en 4e secondaire, une branche en pénurie de profs. J’ai le titre de pénurie et suis moins bien rémunéré pour ces heures-là alors que ça me demande plus de travail que quelqu’un qui est formé et que les nouveaux programmes sont difficiles à comprendre, même pour des profs attitrés.
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En ce 25 août, je suis assuré d’avoir 4 heures de cours. Je devrais avoir en plus 16 heures d’intérim qui m’ont été proposées au conditionnel parce qu’elles sont conditionnées au départ de collègues, à des certificats médicaux ou au fait que certains réduisent leur temps de travail… Cela implique que je ne commencerai pas l’année avec toutes les heures. Elles vont arriver petit à petit une fois que toutes les démarches seront faites. J’y crois parce que j’ai la garantie de mes collègues et je sais que la direction fera les démarches pour que ce soit moi qui soit pris. Chaque école fixe ses règles, mais, après les priorités liées au titre et à l’ancienneté, elles priorisent ceux qui ont déjà travaillé dans leur établissement.
J’ai participé à la manif des personnels de l’enseignement à Bruxelles l’année dernière. J’ai donc fait grève ce jour-là, ce qui n’a pas posé problème à la direction, alors que certains collègues me mettaient en garde comme jeune prof, quand les places ne sont pas encore établies. Mais en faisant grève, j’exerce mon droit et j’en assume les potentielles conséquences. La direction a d’ailleurs marqué son adhésion aux revendications des manifestations. Les revendications étaient très larges et très vastes, on s’y perdait un peu. Celle qui avait le plus de sens pour moi était la surcharge administrative: depuis le début de ma carrière, on nous en demande toujours plus et ça ne profite pas à mon travail avec les élèves en classe. Par exemple, on nous demande de faire des rapports de compétences individualisés par élève, ce qui est sensés nous protéger des recours, mais ne sert pas vraiment l’élève. Ce qui me tient aussi à cœur, c’est la valorisation du métier d’enseignant pour les jeunes: si j’en suis à ma 5ème rentrée, c’est parce que je me suis accroché par amour du boulot. Mais c’est un métier où on est fort seuls, ce qui n’est pas évident comme jeune quand on commence. De plus, financièrement, c’est très compliqué au début. Il y a une incertitude en début de chaque année: l’année dernière, après 3 ans dans l’école, on m’a annoncé le 16 juillet que l’école n’avait plus aucune heures à me donner. La 2ème année (la 1ère année de Covid), j’ai été éducateur à partir de janvier pour compléter mon horaire.
Attendre le 15 septembre ou plus tard pour savoir si on aura des heures, c’est insécurisant. De plus, passé le 10 du mois, le payement est reporté au mois d’après. Tu fais quoi pour payer ton loyer? La délégation syndicale est très utile dans mon boulot: elle apporte des infos concrètes aux collègues, en salle des profs par rapport aux contacts avec la direction, à tout ce qui se passe au CE, au CA. On reçoit des rapports écrits ou oraux de ces réunions et de la vie de l’école et du fonctionnement interne de l’institution. Les représentants syndicaux rapportent les demandes, les intentions, les plaintes des travailleurs dans les instances. Ils ont travaillé sur le nouveau règlement de travail. Ils nous donnent aussi des infos sur les grèves, les actions…
TEXTE Donatienne Coppieters | PHOTO Aude Vanlathem