Acteurs publics N°105

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#105 Avril 2014 / 9,80€

FONCTIONNAIRES : PEUT-ON RÉFORMER LE STATUT ?

SONDAGE EXCLUSIF

DES FRANÇAIS SÉVÈRES SUR LA POLITIQUE DE L’EMPLOI LUC ROUBAN

« IL Y A UNE EMPRISE PLUS GRANDE DU POLITIQUE SUR LA VIE ADMINISTRATIVE »


Africa

LANCEMENT

Une newsletter hebdomadaire consacrée à l’information sur les politiques publiques et les nominations du secteur public

d’Acteurs publics Africa 1 seul média pour toucher dès aujourd’hui 100 000 décideurs publics dans 22 pays d’Afrique francophone.

L’actualité des politiques publiques en Afrique est devenue un contenu si riche qu’il nous a semblé nécessaire d’éditer une lettre d’information propre à ce continent. C’est d’abord une façon de remercier nos nombreux lecteurs africains de leur fidélité, mais c’est aussi

notre façon de reconnaître à l’Afrique toute sa place dans l’important mouvement mondial de modernisation du secteur public que nous suivons avec attention à travers toutes nos publications*. Puisqu’il est aujourd’hui parfaitement établi que la réussite d’un pays passe

aussi par la performance de ses services publics, nous espérons ainsi, à notre mesure, par le partage d’information sur les initiatives de tous les acteurs publics africains, contribuer à leur succès. Bruno Botella, rédacteur en chef bbotella@acteurspublics.com

* Voir la rubrique « International » du site acteurspublics.com

14 %

RÉPARTITION DU LECTORAT

Élus

d’Acteurs publics Africa Tunisie

16 %

Maroc

Santé/social, (hôpitaux, OMS, Pnud, ONG)

42 %

Algérie

Administration d’État (gouvernements et parlements, administration, établissements publics et parapublics)

Mauritanie Mali

Niger

Sénégal Chad

Burkina Faso Bénin

Guinée

Djibouti

Côte d’ivoire Togo

Cameroun

Gabon

République centre Afrique

Rep. du Congo Dem. Rep. du Congo

PUBLICITÉ Pierre-Alexandre Vidal pavidal@acteurspublics.com Tél. : 01 46 29 29 04

28 %

Rwanda Burundi

Madagascar

Organisations panafricaines et internationales (Union africaine, Cedeao, BOAD, BAD, Banque mondiale, AFD) GEOATLAS® WORLD VECTOR - GRAPHI-OGRE® - France - 1997

Contact : Jean-Michel Meyer, rédacteur en chef adjoint chargé d’Acteurs publics Africa - jmmeyer@acteurspublics.com - Tél. : 01 46 29 29 09


ÉDITO

Les 50 milliards d’économies pourraient finir dans le

cimetière des slogans gouvernementaux.

Parce que le projet n’a pas l’heur de lui plaire, le ministre du Redressement productif menace – certes à demiPar Pierre-Marie Vidal, directeur de la rédaction pmvidal@acteurspublics.com

mots – de représailles fiscales le patron d’Altice, l’actionnaire de Numericable au motif qu’il vit en Suisse. Peu importe que Numericable soit une entreprise française cotée à Paris et que l’association de son réseau de fibre avec le réseau commercial de SFR ait un vrai sens industriel. Le ministre entend prendre le parti de Bouygues Telecom, et ce quel que soit le coût social d’une fusion avec SFR dont, à l’évidence, le réseau commercial est redondant avec celui de Bouygues. Jusque-là, il ne s’agit que d’une erreur de jugement d’un ministre qui se rêve en Colbert du XXIe siècle. Mais quand Arnaud Montebourg – en complète contradiction avec la démarche du chef de l’État qui faisait récemment les yeux doux aux investisseurs de la Silicon Valley – dissuade clairement un investisseur étranger d’investir dans notre pays, on flirte là avec la faute politique.

Dommage collatéral de la défaite de la gauche aux municipales, le Sénat pourrait basculer à droite dès le renouvellement partiel de septembre.

Le gouvernement aura-t-il le courage de maintenir son projet de 50 milliards d’économies dans les dépenses publiques ? Déjà, face à

Car ce sont 178 sénateurs sur 348 qui seront renouvelés à cette date par un collège de grands électeurs. Or il se trouve que les représentants des communes pèsent pour 95 % des voix dans ce scrutin où le vote est obligatoire. Sachant que la gauche ne dispose à l’heure actuelle que d’une courte majorité de 15 sièges, la partie sera serrée. D’autant que certains conseillers régionaux, généraux ou municipaux de la majorité pourraient aussi, à l’occasion de ce vote, exprimer leurs désaccords avec les choix politiques du gouvernement, notamment la baisse des dotations aux collectivités ou le dernier redécoupage cantonal. Les municipales pourraient donc rebattre, avant l’heure, les cartes au Sénat et priver ainsi le gouvernement du confort de la majorité aux deux chambres. Ce qui aurait inéluctablement pour conséquence de le handicaper dans son action.

la nouvelle augmentation du chômage, des voix s’élèvent pour appeler à la modération. Avec l’idée qu’à partir du moment où l’on accepte des réformes structurelles, la baisse des dépenses publiques ne devrait pas être aussi rapide. Le problème est que ces réformes structurelles évoquées à l’occasion du Pacte de responsabilité semblent, elles aussi, embourbées faute d’autorité politique. Il y a donc fort à parier que de discussion en discussion sur le rythme, le volume, la méthode et les objectifs, l’engagement de réduire la dépense ne finisse lui aussi dans le cimetière des slogans gouvernementaux. Viendra pourtant le jour où la France n’aura plus la possibilité de fuir ses responsabilités. Il est, de ce point de vue, regrettable que ce soit toujours une fois le dos au mur que la gauche accepte d’affronter la réalité.

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 3


105

SOMM

avril

2014

3 8

L’ÉDITO DE PIERRE-MARIE VIDAL ENTREVUE

Luc Rouban : « Il y a une emprise plus grande du politique sur la vie administrative » 14 CHIFFRES DU MOIS 20 OBSERVATOIRE DES POLITIQUES PUBLIQUES

78

Des Français sévères et désabusés sur la politique de l’emploi 27 IDÉES

Services publics collaboratifs et ville intelligente, débat entre Augustin de Romanet et Élisabeth Lulin 30 Réaffirmer la place du service public, débat entre Bernadette Groison et Bruno Collignon 32 Développer l’apprentissage, une exigence pour les collectivités, par Philippe Laurent 33 Le virage de l’open data est pris, mais… par Michel Pinault

VINCENT BAILLAIS

VINCENT BAILLAIS

28

8

ENTREVUE

RENCONTRE AVEC

LUC ROUBAN

> VÉRONIQUE BÉDAGUE-HAMILIUS

34

34 DOSSIER

Fonctionnaires, un statut à réécrire 42 Pas de place de directeur pour les contractuels 44 Bernard Pêcheur : « Beaucoup de chefs d’entreprise aimeraient disposer du statut » 46 2017, fin du statut…

FONCTIONNAIRES

48 EUROPE

UN STATUT

à réécrire

Parlement : une influence française à renforcer 52 SUR LE TERRAIN 52

MEDIAGRAM/FOTOLIA

54

4 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Les villes allemandes en alerte L’administration espagnole au régime sec


MICHAEL TRIPPEL/LAIF/RÉA

AIRE Le défi comptable européen La nouvelle e-boîte aux lettres du Quai d’Orsay 62 Les préfets coincés dans les tuyaux budgétaires 56 58

48

67 LES CLUBS

LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE 72 LE CLUB DES ACTEURS DES TERRITOIRES DURABLES 74 LE CLUB DES ACTEURS DE LA SANTÉ PUBLIQUE

Parlement européen : une influence française à renforcer

67

77 LA FRANCE DES POUVOIRS 78

81 82 85 87

Rencontre avec Véronique Bédague-Hamilius : mo-ti-vée ! Yves Struillou, nouveau directeur général du travail Étienne Guyot, du Grand Paris à la CCI… de Paris Coup de jeune à Radio France État-major Le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique

88 EMPLOI PUBLIC 88 90

Grand oral africain pour l’ENA L’auberge espagnole des hauts fonctionnaires

92 RESSOURCES 94 LIRE, ÉCOUTER, VOIR 96

Exposition : cent ans de mythe Jaurès

98 MÉMOIRE

Une charte pour les communes ABONNEZ-VOUS PAGES 55 et 57 OU SUR ACTEURSPUBLICS.COM

CRÉDITS COUVERTURE : VINCENT BAILLAIS – BAHRIALTAY/FOTOLIA

62

LES PRÉFETS COINCÉS DANS LES TUYAUX BUDGÉTAIRES Acteurs publics www.acteurspublics.com 7 rue Auguste Gervais 92445 Issy-les-Moulineaux cedex Tél. : 01 46 29 29 29 Directeur de la rédaction Pierre-Marie Vidal pmvidal@acteurspublics.com 01 46 29 29 01 Chargée de mission Catherine Pennec cpennec@acteurspublics.com 01 46 29 29 12 Rédacteur en chef Bruno Botella bbotella@acteurspublics.com 01 46 29 29 20 Rédacteurs en chef adjoints Sylvain Henry shenry@acteurspublics.com 01 46 29 29 27 Jean-Michel Meyer (International) jmmeyer@acteurspublics.com 01 46 29 29 09 Priscilia de Selve (Acteurs publics TV) pdeselve@acteurspublics.com 01 46 29 29 34

Rédaction Raphaël Moreaux rmoreaux@acteurspublics.com 01 46 29 29 32 Xavier Sidaner xsidaner@acteurspublics.com 01 46 29 29 21 Pierre Laberrondo (Nominations) plaberrondo@acteurspublics.com 01 46 29 29 26 Jean-Bernard Gallois (Europe) jbgallois@acteurspublics.com Gaëlle Gélébart (Biographies) ggelebart@acteurspublics.com 01 46 29 29 18 Ségolène Griffon du Bellay (Biographies) sgriffon@acteurspublics.com 01 46 29 29 15 Céline Quétier (Biographies) cquetier@acteurspublics.com 01 46 29 29 25 Secrétaire de rédaction Laure Berthier Rédacteur en chef technique Marc Bouder mbouder@acteurspublics.com 01 46 29 29 03 Rédacteur graphiste Johnny Tymen

Publicité et location de fichiers Pierre-Alexandre Vidal pavidal@acteurspublics.com 01 46 29 29 04 Partenariats Bastien Brunis bbrunis@acteurspublics.com 01 46 29 29 24 Abonnements Jean-François Sciarrino jfsciarrino@acteurspublics.com 01 46 29 29 11 Secrétaire générale Margareth Régnier mregnier@acteurspublics.com 01 46 29 29 13 Directeur de la publication Pierre-Marie Vidal Acteurs publics est édité par la Société d’Édition Publique SAS au capital de 200 000 € Actionnaires : CFSS - Pierre-Marie Vidal Prix au numéro : 9,80 € Impression Imprimerie SIEP - Z.A. Les Marchais 77590 Bois-le-Roi CPPAP 0216 T 84324 ISSN 1765-2022 Dépôt légal à parution

© L’usage professionnel des contenus et services requiert obligatoirement l’autorisation préalable de l’éditeur. La liste des opérateurs autorisés de panoramas de presse, piges, clipping et usages professionnels est disponible sur le site du GIE qui gère les droits : www.ppmp.fr. Membre adhérent de la

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MÉDIA GLOBAL AU CŒUR DES POLITIQUES PUBLIQUES : ÉTAT, COLLECTIVITÉS, HÔPITAL

ACTEURSPUBLICS.COM


ENTREVUE LUC ROUBAN

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ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105


ENTREVUE I LUC ROUBAN

LUC ROUBAN

« IL Y A UNE EMPRISE PLUS GRANDE DU POLITIQUE SUR LA VIE ADMINISTRATIVE » Pour le chercheur, spécialiste de l’administration et des fonctionnaires, l’impossibilité de conduire une grande réforme de la fonction publique s’explique par la résistance des grands corps. Luc Rouban estime que face à la contrainte budgétaire, on ne pourra « échapper à une réduction du nombre de donneurs d’ordres ».

Propos recueillis par Bruno Botella et Sylvain Henry Photos : Vincent Baillais

Dans quel état d’esprit les fonctionnaires se trouvent-ils aujourd’hui ? Il est difficile de répondre à cette question de manière globale. Il est clair qu’il y a une véritable déception, de la part notamment des agents de catégorie C, qui perçoivent les plus petits salaires de la fonction publique. Ces derniers ont perdu du pouvoir d’achat ces dernières années, alors qu’ils attendaient probablement un changement de politique après 2012. La prolongation du gel du point d’indice coïncide avec l’augmentation des cotisations consécutive à la réforme des retraites. La conséquence est visible sur le bulletin de paie… On constate aussi une dégradation de la vie professionnelle des agents qui n’est pas seulement due à la réduction des effectifs. La pression accrue de la part des usagers et l’explosion du nombre d’agressions physiques et verbales provoquent de réelles tensions dans certains services.

Les catégories supérieures sont-elles moins déçues ? Il faudrait tirer les conséquences de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) sur les cadres A de la fonction publique. Là, je serais plus nuancé. Dès 2008, c’est-à-dire très vite après le lancement de la RGPP, les cadres A se sont globalement braqués contre ces mesures. Je dis « globalement », car une grosse minorité y était quand même favorable. Ce sont des fonctionnaires, y compris des enseignants, qui voyaient d’un œil positif l’individualisation des carrières et une certaine approche managériale. La RGPP a-t-elle raté son objectif concernant les fonctionnaires ? Oui, la RGPP a raté son objectif mais pas parce que les fonctionnaires seraient hostiles aux réformes

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ENTREVUE I LUC ROUBAN

sur le principe, comme on l’entend parfois. En réalité, il y a eu une méfiance à l’égard des pratiques professionnelles dans lesquelles ce nouveau management allait s’insérer. Loin de créer une situation d’ouverture et de fluidité professionnelle, les principes inhérents à la RGPP se sont heurtés au management à la française, à la logique de corps, à la hiérarchie sociale en place. Ces réformes ont fini par donner plus de pouvoir à ceux qui en avaient le plus et moins à ceux qui en avaient peu.

PARCOURS 1958 Naissance à Clamart (Hauts-de-Seine) 1984 Chercheur au CNRS 1999 Directeur de recherche à Sciences-Po Paris (Cevipof) 2009 Troisième édition de La Fonction publique (La Découverte) 2011 La Solitude de l’isoloir : les vrais enjeux de 2012 (Autrement) avec Pascal Perrineau 2013 La Place des femmes dans les élites administratives (la Revue française d’administration).

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Il aurait donc fallu que la RGPP – comme aujourd’hui la Modernisation de l’action publique – s’accompagne d’une réforme de la fonction publique… On est dans une réforme de l’entre-deux, au moins depuis 2002. Le projet de refondation de Nicolas Sarkozy s’est enlisé rapidement. Ce qui a provoqué des blocages et des incompréhensions, c’est que la RGPP s’est moulée dans des pratiques sclérosées, avec l’illusion d’une gestion des ressources humaines (GRH) qui fonctionne et dans un contexte de réduction des effectifs. Or, si l’on veut vraiment passer à une logique d’ouverture professionnelle à l’anglo-saxonne, il faut être clair et renoncer au moins en partie au concours et il faut que la GRH soit réellement forte, comme dans tous les pays à fonction publique d’emploi. La mise en œuvre de la réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate) est-elle l’exemple à ne pas suivre ? La Réate s’est faite dans la douleur car les gestionnaires doivent gérer des agents venus de corps différents, avec des normes professionnelles différentes, sans autonomie. Plusieurs rapports officiels ont d’ailleurs dénoncé l’absence de prise en compte des ressources humaines dans cette réforme. Les grands corps ont-ils été épargnés par les réformes ? Au sein de la catégorie A et A +, il y a une fracture interne entre les gestionnaires et les membres des grands corps, ces derniers ne se sentant pas vraiment concernés. Au lieu de libérer l’encadrement de la fonction publique, on l’a asservi en technicisant à l’extrême. Et en France, qui dit technique

dit position inférieure par rapport au généraliste… Le haut fonctionnaire généraliste est incarné par les grands corps. De ce point de vue, la situation n’a pas changé, elle s’est même aggravée. On observe deux caractéristiques de la fonction publique qu’on ne trouve qu’en France, ce sont d’une part les grands corps et d’autre part, le fait que les enseignants soient des fonctionnaires de l’État. Pour quelle raison aucun gouvernement n’a-t-il vraiment entrepris de réformer l’organisation de la fonction publique ? Si l’on veut réformer la fonction publique, il faut toucher à la politique de recrutement, aux grandes écoles et aux grands corps. Les grands corps constituent un réseau puissant. De plus, ce sont des institutions et services qui fonctionnement très bien. La Cour des comptes est omniprésente, surtout depuis 2008 et ses nouvelles missions. L’inspection générale des Finances, après un passage à vide dans les années 1990, a redoré son blason et s’est notamment beaucoup investie sur la Révision générale des politiques publiques. Tout le monde le sait, la grande réforme de la fonction publique ne pourrait démarrer que par le haut. Il faudrait donc commencer par les grands corps… Oui, mais cela me paraît impossible compte tenu du poids de ceux-ci dans l’appareil d’État, dans les cabinets ministériels. Le problème est que l’on a une réforme à deux vitesses. On va préserver le noyau dur des grands corps et la réforme, c’est pour les autres ! Les transformations qui touchent la fonction publique depuis plusieurs années concernent les catégories inférieures. Notamment l’idée de contractualiser, qui est au passage une belle illusion : remplacer le statut par des contrats privés coûterait plus cher et l’état de nos finances publiques ne le permet pas. Et cela ne changerait rien à la réalité des métiers. L’autre raison qui explique l’impossibilité de réformer de manière radicale la fonction publique est l’absence de modèle alternatif. Bien qu’évoqué dans plusieurs rapports, le remplacement des corps par des métiers n’a jamais été entrepris. On est clairement confronté, aujourd’hui, à l’absence de modèle social pour la haute fonction publique, qui permettrait de donner


ENTREVUE I LUC ROUBAN

« LA GRANDE RÉFORME DE LA FONCTION PUBLIQUE NE POURRAIT DÉMARRER QUE PAR LE HAUT. » #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 11


ENTREVUE I LUC ROUBAN

un sens à une réforme globale, comme ce fut le cas après la Libération. Le gouvernement recherche des gisements d’économies budgétaires. Le recentrage des missions de l’État constitue-t-il une piste intéressante ? À mon avis, la seule piste réelle pour diminuer les dépenses publiques et réformer la fonction publique est de faire le bilan de la décentralisation. La question du recentrage des missions, c’est avant tout la répartition des compétences entre l’État et les collectivités locales. Les effectifs de la fonction publique territoriale ont beaucoup augmenté, au point de quasiment rattraper les effectifs de l’État. Pourtant, avec 45 000 employeurs, la France, que l’on dit pourtant être le pays des fonctionnaires, n’a pas de politique globale de la fonction publique. Le gouvernement n’a vraiment la main que sur la masse salariale de l’État. Faire un bilan de la décentralisation, est-ce aussi faire la chasse aux doublons entre les services de l’État et les collectivités ? Il y a effectivement un problème de rationalisation, de doublons dans certains cas. D’une manière générale, il n’y a aujourd’hui que deux voies possibles. Soit une nouvelle étape dans la décentralisation avec une régionalisation forte. Mais il faudrait aussi que les élus locaux soient prêts à payer le prix politique de leurs nouvelles prérogatives. Autre voie : si le fameux mille-feuille coûte si cher et n’est pas gérable, il faut réduire le nombre d’échelons et opérer une sorte de recentralisation. Ce serait tirer la conséquence qu’après tout, la France est une région européenne. Le gouvernement ne semble pas prendre ce chemin avec la Modernisation de l’action publique (MAP) et le projet de loi de décentralisation… Avec la MAP, pour l’instant, on est toujours dans une logique de rationalisation. Mais je ne vois pas comment on pourrait échapper à une réduction du nombre de donneurs d’ordres. La France n’a plus les moyens de disperser les ressources. Lors de la campagne présidentielle de 2012, François Hollande avait promis de limiter

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le poids des cabinets ministériels et de s’appuyer davantage sur l’administration et ses directeurs. Rien n’a vraiment changé. Comment l’expliquez-vous ? Depuis une vingtaine d’années, et dans tous les pays occidentaux, on constate un renforcement des états-majors. C’est une tendance lourde qui concerne l’État et les collectivités territoriales. Ce renforcement est quantitatif et qualitatif. Ce pouvoir de plus en plus important s’exerce sur les services et court-circuite les directeurs d’administration centrale et les chefs de service. Cela signifie-t-il que l’administration est de plus en plus politisée ? Il y a une emprise plus grande du politique sur la vie administrative. Le problème est lié au temps politique, de plus en plus court, qui oblige d’une certaine manière à un contrôle étroit sur la communication et sur l’action publique en général. Les cabinets ministériels sont donc toujours aussi bien fournis. Ils sont aussi de plus en plus ouverts aux non-énarques. Les conseillers sont nombreux à venir du milieu associatif, des entourages locaux du ministre ou directement des partis politiques. La politisation s’explique aussi par le changement de nature de l’action publique, qui est devenue programmatique. On parle beaucoup de politiques publiques, mais c’est une notion floue qui exige un travail politique de découpage, de négociation et de synthèse. Enfin, le troisième phénomène est que les hauts fonctionnaires ne sont pas naïfs. Ils sont demandeurs de politisation et n’hésitent pas à solliciter les ministres, les élus ou leurs entourages pour intégrer un cabinet. Le cabinet ministériel est-il toujours un accélérateur de carrière ? Incontestablement, mais ce n’est pas le seul facteur. J’ai fait une étude qui porte sur plusieurs promotions de l’ENA, soit environ 600 hauts fonctionnaires. Quand on regarde les situations professionnelles sur vingt ou trente ans, trois facteurs hiérarchisés expliquent le succès : le corps, le passage en cabinet et être un homme plutôt qu’une femme. Le corps de la fonction publique est le plus déterminant quand on mesure la dynamique de

carrière, ce qui permet de franchir une étape qualitative. Les grands bonds de carrière s’observent par exemple chez les hommes, administrateurs civils du ministère des Finances, passés par des cabinets ministériels. La France ne serait-elle pas prête à adopter le spoils system* ? Le spoils system se heurterait à un obstacle culturel. Cela signifierait l’affirmation explicite d’une politisation de la fonction publique. Or malgré tout, la culture de la neutralité reste bien ancrée. L’instauration du spoils system irait aussi à l’encontre de la logique d’occupation du terrain par les grands corps. Ces derniers sont visiblement à l’aise dans cette zone de l’entre-deux, où l’on s’engage à travers des notes, en tant qu’expert, mais sans être vraiment partisan. Les hauts fonctionnaires savent garder officiellement leurs distances et tiennent à l’autonomie du corps vis-à-vis du monde politique. ■ * Littéralement « système des dépouilles », selon lequel un nouveau gouvernement s’assure de la loyauté des hauts fonctionnaires en nommant des fidèles aux postes de l’administration, ndlr.


ENTREVUE I LUC ROUBAN

« IL Y A UNE FRACTURE INTERNE ENTRE LES GESTIONNAIRES ET LES MEMBRES DES GRANDS CORPS. »


CHIFFRES DU MOIS

7

Basse-Normandie, Bretagne, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Picardie, ChampagneArdenne et FrancheComté. Ce sont les 7 régions françaises qui vont expérimenter une procédure d’autorisation unique pour construire des parcs éoliens et des méthaniseurs produisant du biogaz.

L’objectif : simplifier les démarches administratives. Cette nouvelle autorisation, qui vise les installations classées pour l’environnement (ICPE), concernera à titre expérimental les installations de production d’énergie renouvelables : parcs éoliens et installations de méthanisation. L’expérience, qui permet

1 sur 5 régions

C’est la proportion d’eau, en litres, perdue dans des fuites de canalisations en France, soit un total impressionnant de 1 300 milliards de litres d’eau ou 430 000 piscines olympiques par an, selon une étude de 60 millions de consommateurs.

2,6

MILLIONS D’EUROS 14 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Telle est la somme que le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche va prêter à l’université de Versailles-Saint-Quentin (UVSQ), plongée dans une grave crise financière, pour lui permettre de boucler son budget en 2014. Le ministère a accordé ce coup de pouce sous la forme d’une avance remboursable. Cette décision fait suite aux dysfonctionnements constatés par la Cour des comptes dans les conclusions définitives d’un rapport transmis au ministère. La haute juridiction financière, qui s’est penchée sur les exercices de 2006 à 2012, pointe une augmentation insuffisamment maîtrisée des emplois (+ 15 % entre 2007 et 2012) et s’interroge sur la gestion de deux opérations de partenariats public-privé. Les comptes de l’université de Versailles-SaintQuentin sont plombés par un déséquilibre de 5,2 millions d’euros en fonctionnement.

de remplacer toutes les autorisations distinctes existantes – autorisation de défrichement, dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées, permis de construire, etc. – commencera en avril. Elle vise à ramener à dix mois le délai d’instruction de ces projets.

70 000 FONCTIONNAIRES CHINOIS Formation professionnelle au plus près des administrés pour 70 000 fonctionnaires chinois du Xinjiang. Située sur la route de la soie, quatre fois plus grande qu’un pays comme le Japon, la région autonome ouïgoure du Xinjiang, au nord-ouest de la Chine, a décidé d’envoyer pour trois ans ces 70 000 fonctionnaires dans les régions rurales les plus reculées pour permettre « aux cadres d’accumuler des expériences de base et d’aider à améliorer les conditions de vie des habitants », a justifié Liu Yanmei, membre du comité d’organisation du Parti communiste chinois de la région. Au menu des fonctionnaires en formation : la visite de plus de 8 000 villages, de 700 fermes d’État et pâturages et d’environ 1 000 quartiers. En 2013, près de 40 000 fonctionnaires avaient déjà été envoyés dans les régions rurales du Xinjiang.


JACQUES DEMARTHON/AFP

560 millions À l’occasion de la Journée mondiale de la francophonie, le 20 mars, François Hollande s’est entretenu avec l’ancien Président sénégalais Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie. Quelque 560 millions de personnes parleront le français en 2050 en Afrique.


CHIFFRES I DU MOIS

16

MILLIONS D’EUROS POUR DES TRANSPORTS GRATUITS

La gratuité a un coût. Celle des transports en commun franciliens, instaurée pendant quatre jours en mars en raison d’une alerte à la pollution, a coûté « 4 millions d’euros par jour » à la région Île-de-France, estime son président, le socialiste Jean-Paul

Huchon. Celui qui préside aussi le Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif) a annoncé être « en discussion avec le gouvernement » pour « qu’il prenne sa part de la charge ». Une part qui pourrait être en partie alimentée par les verbalisations pour non-respect de la circulation alternée, mise en place

2,5 %

le lundi 17 mars. Sept cents policiers avaient alors été déployés pour contrôler les véhicules dans la capitale et sa banlieue, la préfecture de police indiquant avoir dressé près de 5 122 procès-verbaux.

La fonction publique emploie seulement 2,5 % des apprentis en France, soit 10 400 contrats, principalement signés dans les collectivités territoriales, selon un rapport de plusieurs inspections générales.

5

La négociation sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations des fonctionnaires débutera en mai et se poursuivra jusqu’en mars 2015. Cinq grandes étapes de discussions sont prévues, selon le calendrier présenté par la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, aux organisations syndicales mi-mars. En mai et juin : « Améliorer la gestion des emplois. » De juillet à septembre : « Rénover et simplifier l’architecture statutaire. » D’octobre à novembre : « Simplifier les règles et dispositifs de gestion des agents ». De décembre à février 2015 : « Rénover les grilles », qui abordera notamment la place de l’indemnitaire dans la rémunération globale des agents. Et enfin de février à mars 2015 : « Conclure la négociation ».

fonctionnaires fédéraux belges en télétravail

Les chiffres fournis par le secrétaire d’État belge à la Fonction publique, Hendrik Bogaert, montrent une tendance en plein essor, puisque le nombre d’agents recourant au télétravail a augmenté de 62 % entre 2012 et janvier 2014. Parmi ces fonctionnaires fédéraux qui travaillent désormais partiellement au bureau, les services de Hendrik Bogaert ont dénombré 3 787 femmes et 2 345 hommes. Une évolution qui ne présente que des avantages, assure le secrétaire d’État : des loyers en baisse pour les pouvoirs publics, un gain pour l’environnement avec moins de temps de trajets pour les fonctionnaires et un meilleur équilibre entre vies privée et professionnelle.

Un agenda susceptible d’évoluer. Chacun de ces grands sujets devrait donner lieu à un protocole d’accord. Les syndicats pourront donc signer tout ou partie des éléments. « Nous allons regarder l’ensemble de la carrière des agents des trois fonctions publiques, c’est bien d’un travail de dentelle dont il s’agit », a affirmé Marylise Lebranchu. Au total, 19 réunions sont prévues. Il s’agit, selon la ministre, de réaffirmer « une fonction publique de carrière, ses valeurs et son adaptabilité aux valeurs du XXI e siècle. » De leur côté, les syndicats ont demandé au gouvernement, une nouvelle fois, de permettre une revalorisation de la rémunération des agents en « dégelant » le point d’indice, bloqué depuis l’été 2010.

ÉTAPES POUR UNE RÉFORME

16 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

6 132


CEDRIC POULMAIRE/REA

6 000

manifestants pour « l’enterrement de la douane »

« Escrocs, fraudeurs, profitez ! La douane meurt à petit feu » ou « Rien à déclarer : jouets toxiques, faux médicaments ? Bienvenue en France », pouvait-on lire sur les pancartes des 6 000 fonctionnaires de Bercy – douaniers, agents des finances publiques et des fraudes – qui ont manifesté le 20 mars à Paris contre la dégradation de leurs conditions de travail, à l’appel des syndicats CFDT, CGT, FO, Solidaires et Unsa Douanes. Ils étaient 2 800 selon la police. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS17


CHIFFRES I DU MOIS

900 000 salaires de fonctionnaires bloqués

Le gouvernement algérien a repoussé à 2015 la hausse des salaires de 900 000 agents publics en annonçant le maintien de l’article 87 bis du code du travail, qui définit la composante du salaire national minimum garanti, le SNMG (l’équivalent algérien du Smic). Cet article

avait été imposé par le Fonds monétaire international en avril 1994, au plus fort de la crise économique traversée par le pays, alors en cessation de paiements. Il bride les revenus des salariés puisque le SNMG intègre à la fois le salaire de base, les primes et les indemnités. Selon

4 293 231 €

C’est le montant attribué en 2013 par le ministère de l’Intérieur – contre 10,5 millions en 2012 – pour les frais d’enquête et de surveillance attribués aux policiers.

47

MESURES

POUR LES JEUNES 18 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Le second comité interministériel de la jeunesse s’est réuni le 4 mars autour de Jean-Marc Ayrault pour un bilan d’étape en demi-teinte des 47 mesures en faveur des jeunes, priorité de François Hollande. « 27 mesures ont été mises en œuvre ou le sont presque, d’autres ont un peu plus de mal à avancer », reconnaît-on à Matignon, faisant notamment allusion aux « contraintes financières ». Parmi les promesses tenues : la création du contrat de génération, l’expérimentation de la « garantie jeunes » – allocation de 450 euros mensuels – et l’objectif atteint des 100 000 emplois d’avenir. Du côté des chantiers encore en cours, le Premier ministre a cité « le droit à la formation dès le premier emploi » et « la réforme de l’orientation » qui doit être mise en place en 2015, ou encore la volonté de « faciliter l’accès pour les jeunes aux stages en entreprise ».

plusieurs économistes, l’abrogation de cet article du code du travail provoquerait une hausse des salaires pouvant aller jusqu’à 20 %. Le gouvernement s’y est donc refusé. Il faut dire que la fin de l’encadrement des salaires représenterait une facture de 10 milliards d’euros annuels…

24 MILLIARDS D’EUROS : LA FACTURE DE L’ÉCHEC SCOLAIRE Dans une note publiée début mars, le think tank Terra Nova évalue à 24 milliards d’euros par an le coût minimal de l’échec scolaire en France. Un chiffre qui prend en compte le manque à gagner de recettes fiscales liées aux moindres revenus de personnes sans diplôme et des allocations sociales qui leur sont davantage versées. Terra Nova – proche du PS – préconise de rapprocher l’école et le collège et de les placer sous la responsabilité d’une même collectivité locale, dans le cadre de la prochaine loi de décentralisation. Il suggère encore de fusionner le corps de professeur des écoles et celui de professeur certifié. Des mesures chocs qui rencontrent l’hostilité du Snes, le premier syndicat du secondaire. C’est « le seul véritable obstacle », écrit Terra Nova.


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Des Français sévères et désabusés sur la politique de l’emploi Plus de 8 personnes sur 10 interrogées par l’Ifop jugent inefficace la dépense publique en matière d’emploi. La baisse des charges sur les entreprises et une politique plus contraignante pour les chômeurs sont privilégiées comme solutions. À peine 5 % des Français font confiance à l’État pour réduire le chômage.

20 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

nquête après enquête, les Français se montrent extrêmement inquiets de la montée du chômage, dont on sait qu’elle figure désormais au sommet des préoccupations de nos concitoyens. Dans cette perspective, la politique de l’emploi menée par le gouvernement méritait d’être soumise au jugement des Français, notamment pour connaître les inflexions qu’ils souhaitent voir mises en œuvre. Un premier résultat montre le très profond scepticisme de l’opinion quant à la capacité de l’État à agir efficacement pour favoriser l’emploi, héritage d’années d’échec dans la tentative d’inverser la courbe du chômage, et signe d’un affaissement de la confiance des Français dans la capacité des gouvernements successifs à engranger des succès en la matière. Ainsi, 17 % seulement des personnes interrogées estiment que l’argent public consacré chaque année par la France à la politique de l’emploi l’est de manière efficace.

E

Record d’insatisfaction En comparaison avec toutes les enquêtes menées par l’Ifop pour le compte d’Acteurs publics et EY, qui testaient l’efficacité d’autres politiques publiques, le record d’insatisfaction est ici atteint. Dans cette condamnation assez unanime, un léger clivage politique tempère l’intensité des jugements négatifs : ainsi, « seuls » 69 % des sympathisants socialistes (contre 83 % en moyenne) jugent inefficace la dépense publique en matière


OBSERVATOIRE DES POLITIQUES PUBLIQUES Selon vous, l’argent public consacré chaque année par la France à la politique de l’emploi est-il utilisé de manière efficace ou inefficace ?

Âge de l’interviewé 30

Tout à fait efficace

20

14% 15

3%

14% 11%

Plutôt efficace

+ et

65

an s

-6 4

an s

an s 50

-4 9 35

-3 4

18

-2 4

23 %

an s

an s

10

25

Tout à fait inefficace

28%

26%

25

Résultats selon la proximité politique

14 %

35

31%

30 25 20 15

21% 13% 10% 9%

10

Plutôt inefficace

60 %

5

FDG

PS MoDem UMP

FN

Total efficace : 17 % Total inefficace : 83 %

En partenariat avec

d’emploi, alors que ce taux atteint 90 % parmi les proches de la droite. On relèvera aussi un élément assez contre-intuitif, au regard notamment du taux de chômage qui atteint cette tranche d’âge : les 18-24 ans sont un peu plus nombreux que la moyenne à créditer d’une certaine efficacité ces dépenses pour la politique de l’emploi (26 % l’évoquent, contre 17 % sur l’ensemble des Français).

Aspirations libérales Invités à définir les orientations prioritaires de la politique de l’emploi, les interviewés font montre d’une certaine circonspection, leurs réponses se dispersant entre de nombreuses pistes citées dans des proportions assez équivalentes, aucune proposition ne parvenant à être mentionnée par une majorité de répondants. Parmi les plus citées, certaines d’entre elles témoignent toutefois d’aspirations libérales manifestées par une partie non négligeable de la population. Ainsi 35 % des personnes interrogées évoquent la réduction des charges des entreprises sur l’ensemble des salaires, 26 % souhaitent que l’on contraigne davantage les demandeurs d’emploi à accepter les offres qui leur sont proposées, 20 % demandent que l’on réduise les allocations chômage et/ou que celles-ci soient versées pendant moins longtemps, et 18 % appellent de leurs vœux une simplification du code du travail pour permettre aux entreprises d’embaucher et de licencier plus facilement.

D’autres propositions, d’inspiration moins libérale ou plus dirigiste, sont elles aussi assez régulièrement citées : 23 % des sondés réclament une formation professionnelle plus performante et 18 % souhaitent que l’on mette davantage de freins aux licenciements. Sans surprise, la première série de réponses est davantage choisie par les proches de la droite, et la seconde par les sympathisants de gauche. On notera que l’embauche de fonctionnaires ne recueille qu’un taux de citations très marginal (4 %), y compris parmi les proches de la gauche (6 %).

Aucune action efficace S’agissant, pour terminer, des acteurs à qui les Français accordent le plus leur confiance pour réduire le chômage, les réponses s’avèrent particulièrement cohérentes avec la sévérité du jugement porté sur l’action des pouvoirs publics. Ainsi, 5 % seulement des personnes interrogées choisissent de citer l’État, via Pôle emploi, 22 % évoquant les collectivités territoriales (régions, départements, communes). Ce sont les entreprises, avec 51 % de mentions, qui recueillent le plus de citations. On note que 22 % des personnes interrogées n’évoquent aucun des acteurs qui leur étaient proposés, signe d’une opinion particulièrement désabusée quant à la possibilité de mener une action efficace en France en faveur de l’emploi. Dans le détail, quelques différences d’appréciation se font jour selon la catégorie sociodémographique des répondants. Ainsi, les plus jeunes sont sensiblement plus nombreux que la

« Cette enquête traduit une forte méfiance de l’opinion quant à la capacité des acteurs publics à inverser la courbe du chômage. » Damien Philippot (Ifop)

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 21


OBSERVATOIRE DES POLITIQUES PUBLIQUES

Pour réduire le chômage, faites-vous confiance plutôt… ?

Résultats selon la profession de l’interviewé 60

Aux entreprises

58% 51%

51 %

50

44% 40

CSP +

À aucun de ces acteurs

22 % À l’État, via Pôle emploi

Aux collectivités locales (régions, départements, communes)

Du point de vue de la proximité politique, les clivages s’avèrent assez patents. Ainsi, 43 % seulement des proches de la gauche citent les entreprises, 42 % mentionnant l’État ou les collectivités territoriales et 15 % n’évoquent aucun acteur. Les proches de l’UMP sont très nombreux à faire confiance aux entreprises (71 %), à la différence des sympathisants frontistes (43 %), ces derniers se montrant sensiblement plus pessimistes que la moyenne (31 % d’entre eux estiment en effet qu’aucun acteur ne peut contribuer à réduire le chômage). Cette enquête traduit une forte méfiance de l’opinion quant à la capacité des acteurs publics à inverser la courbe du chômage : la politique de l’emploi actuellement menée ne trouve en effet grâce qu’aux yeux d’une infime minorité, sans que l’on ne soit véritablement en mesure de déterminer dans quelle direction les Français souhaiteraient que l’on infléchisse l’action menée. Les entreprises paraissent néanmoins, dans ce tableau assez sombre, constituer une forme d’espoir pour une courte majorité de personnes interrogées. Damien Philippot, directeur des études politiques au département « Opinion et stratégies d’entreprise » de l’Ifop

22 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

80

22 %

63%

70

50

71%

52%

60

40

43 % 27%

30 20

FDG

PS MoDem UMP

FN

L’expertise d’ La tentation peut être grande d’essayer de dupliquer ce qui a réussi chez nos voisins européens. Cela serait néanmoins une erreur de le faire sans prendre en compte les spécificités françaises.

Vincent Petit, associé EY WWW.PHILTYPHOTO.COM

L’État loin derrière

CSP -

Résultats selon la proximité politique

5%

moyenne à évoquer l’État ou les collectivités locales (33 % des 18-24 ans citent l’un ou l’autre de ces acteurs, contre 27 % en moyenne), choisissant moins souvent les entreprises, ces dernières étant davantage mentionnées par les plus de 65 ans (63 %). On relève en outre que les entreprises sont, sans surprise, souvent considérées comme l’acteur de confiance en matière de création d’emploi par les artisans ou commerçants (74 %).

P.intermédiaire

Réduire le chômage malgré des perspectives de croissance faible est possible. L’exemple de l’Allemagne dans les années 2000, qui a réussi à faire baisser son chômage structurel malgré une croissance plus faible qu’en France, en est une illustration. Il existe de multiples mesures pour lutter contre le chômage. La tentation peut être grande d’essayer de dupliquer ce qui a réussi chez nos voisins européens. Cela serait néanmoins

une erreur de le faire sans prendre en compte les spécificités françaises. Par exemple, la proportion d’actifs peu qualifiés est plus importante en France (30 % des actifs de plus de 25 ans ont un niveau de qualification inférieur au brevet des collèges, source OCDE) qu’en Allemagne (14 %) et qu’en moyenne dans l’Union européenne (25 %). Il est donc nécessaire de prendre en compte de telles caractéristiques dans le déploiement des moyens pour lutter contre le chômage. Une autre particularité de la France est le taux de chômeurs de longue durée – 42 % –, beaucoup plus important que dans la moyenne des pays de l’OCDE – 34 % (source OCDE 2013, chiffres 2011).


D’après vous, quelles doivent être les priorités de la politique de l’emploi pour réduire le chômage ? En premier ? Et en second ? Réduire les charges des entreprises sur l’ensemble des salaires Contraindre davantage les demandeurs d’emploi à accepter les emplois qui leur sont proposés Rendre la formation professionnelle plus performante Mettre des freins aux licenciements Réduire les allocations chômage et/ou les verser moins longtemps Simplifier le code du travail pour permettre aux entreprises d’embaucher et de licencier plus facilement

Il est à noter que l’Allemagne a un taux de 48 %, ce qui montre que vouloir dupliquer systématiquement le système allemand en France n’est pas toujours synonyme de réussite. À l’inverse, nous pouvons néanmoins envier nos voisins allemands sur leur réussite pour l’emploi des jeunes qui présentent un taux de chômage de 8 % alors que la moyenne des pays de l’OCDE est de 16 % et celle de la France de 22 % (source OCDE 2013, chiffres 2011). Toujours concernant les caractéristiques françaises, nous avons un nombre très important d’acteurs chargés de la politique de l’emploi. En premier lieu, Pôle emploi, avec ses 50 000 agents, mais également de nombreuses autres structures, telles que les missions locales (accompagnement des jeunes demandeurs d’emploi), les conseils régionaux (finan-

22 % 35 % 12 % 26 % 23 % 10 % 18 % 10 % 20 % 9% 18 %

cement de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi), les conseils généraux (prise en charge sociale et professionnelle des titulaires du RSA), le réseau des Cap emploi avec l’Agefiph ou le FIPHFP (insertion professionnelle des travailleurs handicapés)… Ce dispositif est une vraie spécificité française alors que dans la plupart des autres pays européens, le service public de l’emploi est centralisé autour d’un acteur principal. Les mesures pour lutter contre le chômage sont aujourd’hui nombreuses. Les accords du 11 janvier 2013 ont permis en outre des avancées tangibles avec les notions de « sécurisation des parcours professionnels pour -les salariés », la création d’un droit à une « période de mobilité volontaire sécurisée »,

Réduire les charges des entreprises sur les bas salaires

Mieux cibler les aides publiques aux entreprises

11 %

ou encore la possibilité donnée aux entreprises de signer avec les organisations syndicales des accords dits de maintien dans l’emploi. L’actualité autour du Pacte de responsabilité – principe d’alléger les charges des entreprises, réduire leurs contraintes sur leurs activités, avec des contreparties notamment de création d’emplois – illustre également cette volonté des pouvoirs publics de lutter contre le chômage. D’autres pistes, évoquées par certains, pourraient être explorées en complément : instauration d’un Smic jeune, création d’une clause de bonus-malus sur les cotisations chômage (un dispositif qui existe aux États-Unis, sous le nom d’experience ratings), etc. Enfin, les conditions d’efficacité du « système » passent par une approche plus qualitative que quantitative des

En premier Total des citations

Mieux former les demandeurs d’emploi Embaucher des fonctionnaires

Aucune autre (réponse non suggérée)

demandeurs d’emploi, plus orientée vers les publics ayant le plus besoin d’accompagnement, ce qui a d’ailleurs été mis en œuvre dans le cadre du déploiement du plan stratégique « Pôle emploi 2015 ». Les Français font confiance aux professionnels de santé, avec qui ils ont une plus forte relation de proximité, pour porter la réforme de notre système de santé. L’appui des professionnels de santé en ville ou en établissements, qui conservent une forte crédibilité par rapport aux autres (État, assurance maladie, assurances complémentaires, collectivités locales) est incontournable. Ces derniers acteurs ne peuvent s’affranchir d’un dialogue nourri et continu avec les professionnels de santé afin de construire une image crédible du système de santé français.

9% 19 % 8% 17 % 7% 17 % 2% 4% 2%

Sondage Acteurs publics/Ernst & Young réalisé par l’Ifop pour l’Observatoire des politiques publiques auprès d’un échantillon de 1 015 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession de l’interviewé) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI – Computer Assisted Web Interviewing) du 18 au 20 mars 2014.

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#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 23


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MÉDIA GLOBAL AU CŒUR DES POLITIQUES PUBLIQUES : ÉTAT, COLLECTIVITÉS, HÔPITAL

26 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

ACTEURSPUBLICS.COM


IDÉES

DR

DR

MARC BOUDER

MARC BOUDER

DR

C. LEBEDINSKY/RÉA

Chaque mois, Acteurs publics donne la parole à des contributeurs extérieurs à la rédaction. Un espace de débats, d’analyse et de réflexion sur les politiques publiques et leur mise en œuvre.

28

32

SERVICES PUBLICS

DÉVELOPPER L’APPRENTISSAGE,

COLLABORATIFS ET VILLE INTELLIGENTE Par Augustin de Romanet et Élisabeth Lulin

UNE EXIGENCE POUR LES COLLECTIVITÉS

30

Par Philippe Laurent

RÉAFFIRMER LA PLACE DU SERVICE PUBLIC

33

Par Bernadette Groison et Bruno Collignon

LE VIRAGE DE L’OPEN DATA EST PRIS, MAIS… Par Michel Pinault

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 27


IDÉES SERVICES PUBLICS

SERVICES PUBLICS COLLABORATIFS ET VILLE INTELLIGENTE

O

Augustin de Romanet : Compte tenu du niveau important de dépense publique dans notre pays, les citoyens souhaitent se réapproprier le contrôle des dépenses liées à la vie en société. Pour prendre l’image de l’assemblée de copropriété, on peut dire que jusqu’à aujourd’hui, les gens élisaient un conseil syndical avec un président mais ne se rendaient pas forcément aux assemblées générales, estimant qu’ils déléguaient. Et puis, constatant les charges qui augmentent et les prestations qui ne sont pas à la hauteur, l’ascenseur souvent en panne, ils ressentent la nécessité de se réapproprier l’intérêt collectif. En France aujourd’hui, on constate donc une nouvelle appétence pour la participation à la délibéra-

C. LEBEDINSKY/CHALLENGES-RÉA

n dit les Français de plus en plus individualistes. Croyez-vous vraiment les citoyens prêts à s’engager davantage dans la vie de la cité et notamment dans la coproduction de services publics ? Élisabeth Lulin : Contrairement à une idée reçue, les gens ne sont pas individualistes. Les chiffres sont parlants : 40 % des Français sont impliqués dans des activités bénévoles. Mais cette bonne volonté peut-elle se déployer si ces activités sont pilotées par l’État ou les collectivités locales ? C’est moins sûr car cette implication des citoyens se fait aujourd’hui en marge de l’action publique, quand elle n’est pas dirigée contre elle. Il faudrait une meilleure articulation coopérative entre ce que dirige l’administration et ce que pilote la sphère du bénévolat.

28 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Propos recueillis par Bruno Botella

tion publique, particulièrement chez la jeune génération. Les modèles que vous prônez s’imposent-ils compte tenu de la rareté de l’argent public ? Élisabeth Lulin : Les services publics collaboratifs s’imposent surtout pour des raisons d’efficacité. L’État ne peut pas gérer tout seul les problèmes d’intérêt général qui se posent aujourd’hui. Les bénéficiaires, la société civile, doivent faire leur part du chemin. Cela vaut par exemple pour la politique d’intégration ou la lutte contre les maladies chroniques.

Les citoyens continuent pourtant à se tourner vers la puissance publique… Augustin de Romanet : Il est possible que ce verrou soit en voie d’être levé avec la mondialisation. La France s’est construite sur l’idée que l’intérêt général résultait d’une délibération achevée par l’État et sanctionnée par la loi. Notre pays privilégie donc la loi par rapport au contrat. Il y a aussi, en France, une présomption de ce que l’échange naturel entre les individus est créateur d’inégalités. Donc très vite, l’État a été érigé en instance tutélaire capable de protéger les individus contre eux-mêmes. D’où la surabondance de règlementations, de décrets et de lois. Cela a conduit probablement à donner une part à l’échange

Augustin de Romanet, P.-D.G. d’Aéroports de Paris, président de l’Atelier de la performance publique (Institut de l’entreprise), a publié Smart Cities. Efficace, innovante, participative : comment rendre la ville plus intelligente.


IDÉES I SERVICES PUBLICS

Les smart cities (villes intelligentes) comme les services publics collaboratifs n’impliquent-ils pas une perte de pouvoir pour les élus, les responsables publics ? Élisabeth Lulin : Est-ce que les élus aujourd’hui sont dans l’état d’esprit de pouvoir tout faire ? Ils sont surtout soucieux de continuer à assurer un service public efficace à moindre coût. Donc oui, ils doivent partager le pouvoir. Quant à l’État, il ne délivrera peut-être plus le service jusqu’au bout, mais sera l’organisateur, la plateforme sur laquelle les autres vont venir s’agréger.

Augustin de Romanet : Parfois, on peut se demander si l’État est au service des citoyens ou les citoyens au service de l’État. Dans toutes les situations où il y a des poches de sous-productivité, se créent d e s s i t u a t i o n s d e r e n t e. Évidemment, ce ne sont pas les individus qui sont en cause, mais les organisations. Le débat public doit donc monter en puissance pour élucider paisiblement ce qui relève de la recherche du bien public et ce qui est du ressort de la préservation de rentes. Affronter cela de façon brutale n’est pas la solution, mais grâce au débat, on doit pouvoir faire rentrer dans la tête des décideurs publics et des citoyens que le vrai pouvoir, ce n’est pas de l’exercer soi-même mais de le confier à autrui. Ce qui impose une réflexion sur la fin que l’on poursuit et que l’on sorte enfin de l’ambiguïté. La plupart des élus réalisent qu’entrer dans une démarche collaborative est meilleur pour l’intérêt général et pour eux-mêmes.

Faut-il aussi une implication plus forte des entreprises, au même titre que l’implication des citoyens ? Augustin de Romanet : La question qui se pose n’est pas celle de l’implication des entreprises, mais de leur faible nombre dans notre pays. La France compte trois fois moins d’entreprises de taille intermédiaire – entre 250 et 5 000 salariés – que l’Allemagne. Si l’on exclut les entreprises financières, la distribution, l’immobilier, notre pays compte 700 unités, soit le chiffre terrifiant de 7 entreprises de taille intermédiaire par département ! Les entreprises sont encouragées, courtisées dans les discours politiques. Quant à la traduction de cette entreprise de séduction sur le coût du travail, la fiscalité… Mais pour répondre à votre question, au niveau local, les entreprises sont parfaitement associées. Je ne connais pas un seul maire qui ne soit pas enclin à développer l’accueil des entreprises sur son territoire.

Élisabeth Lulin : Lorsqu’on évoque le service public collaboratif, c’est entre l’administration et les citoyens, mais il est clair que cette démarche favorise clairement l’esprit d’entreprise car le message est : « faites-le vous-même ». L’un des obstacles au développement des smart cities est la capacité des communes à investir. Comment financer ces investissements aujourd’hui ? Augustin de Romanet : La contrainte posée par le niveau actuel des prélèvements obligatoires conduit les collectivités à se tourner vers les entreprises en mesure de préfinancer ces investissements. Si on prend l’exemple des compteurs intelligents, tout le monde admet que les dépenses initiales relèvent des sociétés qui distribuent l’eau et l’électricité.

DR

plus faible que dans les pays anglo-saxons. C’est un handicap dans la compétition mondiale. Élisabeth Lulin : Selon moi, le verrou a commencé à sauter. Les citoyens se tournent moins vers l’État. Prenez le Téléthon, c’est du financement participatif (ou crowdfunding) de la recherche publique par les citoyens. Regardez l’initiative « Voisins vigilants » qui se développe. Le problème est que souvent, l’administration n’a pas un regard bienveillant sur ces initiatives citoyennes.

Élisabeth Lulin est directrice générale de Paradigmes et caetera, ancienne haute fonctionnaire et auteure de Service public 2.0 (Institut de l’entreprise).

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 29


IDÉES RÉMUNÉRATIONS

RÉAFFIRMER LA PLACE DU SERVICE PUBLIC

Propos recueillis par Sylvain Henry

L

Certains affirment que c’est un frein aux évolutions de la fonction publique et cherchent à le vider de son sens. Il y a donc un grand intérêt, pour les agents publics comme pour les usagers, à dire haut et fort que nous avons besoin d’un statut. Mais je le répète : ce projet de loi arrive bien tard, alors que la fonction publique est menacée par la dégradation des conditions de travail et celle des salaires des fonctionnaires. Bruno Collignon : À la Fédération autonome de la fonction publique territoriale, ce texte ne nous effraie pas. Trente ans après la création du statut de la fonction publique, il est utile de rappeler que les fonctionnaires ont des droits mais aussi des obligations. Et que la déontologie fait partie

MARC BOUDER

e gouvernement devrait présenter cet été au Parlement son projet de loi sur la déontologie, les droits et obligations des fonctionnaires. Qu’attendez-vous de ce texte ? Bernadette Groison : Nous aurions aimé qu’il arrive plus tôt au Parlement [il a été présenté en Conseil des ministres en juillet 2013, ndlr]. L’intérêt est qu’il conforte les valeurs fondatrices de la fonction publique. On le sait, le statut de la fonction publique a été malmené ces dernières années.

30 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

intégrante des valeurs qu’incarnent les fonctionnaires au quotidien dans les trois versants de la fonction publique. Il y a là un prolongement apporté à la loi sur la transparence de la vie publique, avec un niveau d’exigence que nous considérons comme salutaire y compris vis-à-vis de nos employeurs. C’est dire en quelque sorte que les agents eux aussi doivent s’inscrire dans un cadre qui garantisse des valeurs fondamentales en matière d’exercice de la fonction publique.

Lors de ses vœux aux agents publics, en janvier, Jean-Marc Ayrault a déclaré : « Il n’y aura pas de redressement de notre pays sans les services publics, c’est-à-dire sans les fonctionnaires. » Le gouvernement semble à l’écoute de la fonction publique… Bernadette Groison : Certes, les vœux aux fonctionnaires du Premier ministre sont importants puisqu’ils marquent une attention particulière à la fonction publique et plus globalement aux services publics. Mais il a fallu attendre la deuxième conférence sociale pour que le gouvernement précise que les services publics participent à l’activité de notre pays ! La reconnaissance de la fonction publique passe aujourd’hui un cap. Le gouvernement doit dire ce qu’il entend faire : quels sont les

Bernadette Groison est secrétaire générale de la FSU.


IDÉES I RÉMUNÉRATIONS

essentiels, formulés de plus en présence de monsieur Anicet Le Pors, ancien ministre de la Fonction publique de François Mitterrand et père du statut. Ces vœux ont été relayés par madame Marylise Lebranchu. Nous avons vu là un encouragement à poursuivre dans la politique qu’elle entreprend dans la défense du service public et des valeurs qu’il incarne. Il semblerait que nous soyons en face d’un gouvernement qui ait envie d’accompagner, d’encourager, de porter et de développer le service public. Et en même temps, la société française semble parfois frileuse et mal informée sur la fonction publique. Quand on nous dit qu’elle a un coût, dont acte ! Mais elle est aussi créatrice d’emplois : plus de 5 millions d’agents sur les trois versants. À la FA-FPT, nous pensons que le service public a toute sa place dans la société française, et pour encore de très très nombreuses années. Je m’interroge par ailleurs sur les 50 milliards d’euros d’écono-

mies évoqués récemment par François Hollande, dont chacun a pu s’accorder à penser qu’ils pourraient se retrouver au sein des trois versants de la fonction publique. Il se trouve que les résultats des entreprises du CAC 40 représentent, selon certains journaux spécialisés, quelque 50 milliards d’euros de bénéfices. Nous pouvons nous en réjouir. Mais là ou cela pose quelques difficultés, c’est que 39 de ces 50 milliards d’euros de bénéfices ne sont pas investis pour créer de l’emploi, mais redistribués sous forme de dividendes. Qu’allez-vous demander à Marylise Lebranchu dans les mois à venir ? Bernadette Groison : D’abord de sortir du flou. La FSU a écrit au président de la République sur la question du Pacte de responsabilité qui va avoir des répercussions sur la fonction publique qu’elle soit

Bruno Collignon est président de la Fédération autonome de la fonction publique territoriale (FA-FPT).

territoriale, hospitalière ou d’État. Comment cela va-t-il se passer en termes d’emploi public et de rémunération ? Va-t-on enfin faire évoluer la fonction publique pour répondre aux besoins de la société sur l’ensemble du territoire ? Quel avenir pour le secteur public ? Je le redis : un cap clair est nécessaire. Bruno Collignon : Il faut que la ministre [Marylise Lebranchu, ndlr] continue avec la même détermination. L’avenir de la fonction publique se joue, de notre point de vue, dans les prochains mois. Des questions importantes se posent : la dépendance fera-t-elle partie du champ du secteur public ou va-t-on la confier au secteur privé ? Voilà une vraie question de société. Aujourd’hui, un professeur des écoles ou un infirmier est recruté à un niveau de rémunération inférieur au niveau médian. Le gouvernement doit apporter des réponses en matière de rémunérations. Plus généralement, il doit réaffirmer la place du service public dans l’avenir de notre pays, dans l’intérêt de chacun de ses citoyens.

MARC BOUDER

services publics qui doivent être développés ? Comment doivent-ils l’être ? Un certain nombre de projets de loi sont en préparation ou ont déjà été votés, tels que la refondation de l’école ou l’adaptation de la société au vieillissement de la population. Ces textes demandent un investissement de la fonction publique. Nous avons besoin des agents pour mener toutes les mutations en cours. Alors que la ministre [de la Fonction publique, ndlr] Marylise Lebranchu ouvre des discussions sur les parcours, les carrières et les rémunérations, il y a une attente très forte de nos organisations. Les discours très généreux de la ministre et du gouvernement ne suffisent pas : les agents doivent être revalorisés et leurs situations améliorées. Bruno Collignon : Lors de ses vœux, le Premier ministre a réaffirmé des éléments

L’intégralité du débat sur acteurspublics.com/videos

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IDÉES FORMATION

DÉVELOPPER L’APPRENTISSAGE, UNE EXIGENCE POUR LES COLLECTIVITÉS

Par Philippe Laurent

DR

L Philippe Laurent, maire de Sceaux, est président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT)

e Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) a approuvé à l’unanimité, lors de sa séance plénière de décembre, un rapport visant à développer l’apprentissage dans la fonction publique territoriale. Ne se contentant pas de rappeler que ce dispositif permet à plus de 8 000 jeunes femmes et hommes de tous niveaux d’acquérir un savoir-faire précieux au sein des collectivités locales et qu’une très large majorité d’entre eux trouve rapidement un emploi à l’issue de sa formation, ce document de plus de 50 pages* expose de façon pragmatique les principales solutions qui permettraient à ce dispositif de se développer davantage encore.

32 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Partant du constat que de nombreux verrous – financiers, structurels, institutionnels – entravent le développement souhaitable de l’apprentissage, les auteurs de ce rapport n’ont de cesse d’indiquer les solutions permettant à un plus grand nombre de jeunes d’intégrer cette voie qui a fait ses preuves et dont le bénéfice est aussi celui des collectivités elles-mêmes. Ainsi, à titre d’exemple, il apparaît nécessaire de clarifier le statut de l’apprenti, dont les contours, contrairement au secteur privé, sont insuffisamment définis. De même, il apparaît essentiel d’établir

de véritables partenariats avec l’ensemble des acteurs de la formation diplômante que sont l’éducation nationale (lycées, universités), les centres de formation d’apprentis (CFA), l’Association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), les maisons familiales et rurales et tous les organismes certifiés dans le domaine en question et de renforcer l’implication des conseils régionaux sur ce dispositif. Les collectivités, en ayant recours à ce dispositif, non seulement répondent à une exigence de service public – permettre au plus grand nombre d’acquérir une formation solide et reconnue, afin d’accéder à un emploi

pérenne, dans un climat où le chômage des jeunes va crescendo –, mais également, pour certaines, développent par là même une véritable politique de gestion prévisionnelle des emplois, en s’assurant le recrutement futur de talents qu’elles auront contribué à former et qui, outre une technicité avérée, posséderont une véritable connaissance du milieu local. Pour les autres, elles auront permis à ces jeunes de s’assurer un débouché professionnel auprès d’autres administration ou dans le secteur marchand. On le voit, ce rapport est avant tout pratique et contient un ensemble de principes concrets qui, s’ils sont mis en place rapidement, permettront à un dispositif noble et efficace de se renforcer et aux collectivités qui s’y impliqueront de participer à une action d’emploi public pertinente et constructive. * Le rapport sur l’apprentissage du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale est disponible sur www.csfpt.org.


IDÉES ADMINISTRATION

LE VIRAGE DE L’OPEN DATA EST PRIS, MAIS…

DR

L Michel Pinault est l’ancien président du Conseil d’orientation de l’édition et de l’information publique (Coepia).

’ open data représente un changement complet de paradigme pour l’administration. À l’origine, les données produites par l’administration le sont pour son propre usage ou pour celui de quelques fonctionnaires qui ont la main sur ces données. Les bases ainsi constituées devaient avant tout servir à l’accomplissement des missions de service public et n’avaient pas pour objet d’être diffusées à l’extérieur au bénéfice de tiers. Il est normal que l’administration, gardienne de ces données et responsable de leur intégrité, ait perçu le mouvement Open data avec une certaine réticence, ce qui est moins vrai aujourd’hui. Les ministères sont en effet davantage présents sur le portail d’Etalab et vivent moins la mise en ligne de données comme une contrainte. Le portail Etalab « version 2 » a une dimension d’échange et de

coproduction très intéressante pour l’administration. D’autres acteurs peuvent enrichir les données publiques, les agréger et contribuer au rayonnement du travail effectué par l’administration. Cela est très positif. Mais si le virage de l’ open data est pris, tout n’est pas pour autant réglé. La grande majorité des administrations, hormis celles qui produisent et exploitent de la donnée, comme l’Insee notamment, n’est pas organisée pour les diffuser. En amont, un travail nécessaire d’identification et de mise en forme est nécessaire pour pouvoir les rendre accessibles et réutilisables. Ce travail est lourd, tout comme l’est celui représenté par l’anonymisation. L’administration doit y procéder elle-même ou faire appel à un prestataire extérieur, mais en aucun cas

Par Michel Pinault

l’anonymisation ne peut relever du réutilisateur. Beaucoup de fichiers comportent des données personnelles, qu’il s’agisse des données fiscales ou de santé publique. Dans un contexte de réduction des crédits budgétaires, ces tâches sont d’autant plus lourdes à réaliser. Les administrations doivent en effet assumer leurs missions de service public et en même temps mettre à disposition leurs données. Faut-il créer un organisme unique qui se substituerait aux administrations pour développer à leur place la politique d’open data ? Je ne crois pas car ce serait le meilleur moyen de déresponsabiliser les administrations. La réutilisation des données, qui a pour cadre juridique la loi de 1978 sur l’accès aux documents administratifs, devra évoluer. La question du droit d’auteur des agents publics n’est aujourd’hui pas

complètement stabilisée et cela crée un risque d’insécurité juridique pour le réutilisateur. La mise en ligne de contenus vidéo ne peut qu’accentuer ce risque. Tôt ou tard, il nous faudra revisiter les règles en vigueur, tout en restant fidèles aux principes très solides qui en sont les fondements. La transposition de la directive européenne sur la « réutilisation des informations du secteur public », qui doit intervenir d’ici juillet 2015, pourrait donner l’occasion d’une telle réflexion.

Retrouvez l’intégralité de l’interview acteurspublics.com

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DOSSIER

MEDIAGRAM/FOTOLIA

STATUT

34 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105


FONCTIONNAIRES

UN STATUT

à réécrire Élément central de la gestion des agents, le statut de la fonction publique fait débat. Alors que le gouvernement s’apprête à le « dépoussiérer », ses détracteurs le jugent responsable de tous les maux. Il offre pourtant un cadre permettant la réforme de l’action publique, à condition que les employeurs exploitent toutes ses potentialités. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 35


DOSSIER I STATUT

FONCTIONNAIRES,

un statut

À RÉÉCRIRE ls ne se cachent même pas ! » Un syndicaliste de la Place Beauvau n’en finit plus de s’étrangler depuis que le ministère de l’Intérieur a mis en ligne sur son site officiel une série d’offres d’emplois ouvertes « aux candidatures externes ». « Des postes à pourvoir au ministère dans les métiers de l’informatique », pouvait-on lire fin mars, avec fiches de postes et « perspectives professionnelles ». Les contractuels sont donc les bienvenus à la direction des services informatiques (DSI) de l’Intérieur, où on leur assure qu’ils pourront faire carrière ! Alors que le gouvernement s’apprête à présenter, normalement avant l’automne, son projet de loi sur la déontologie, les droits et les obligations des fonctionnaires, voilà bien la preuve, clament les contempteurs de la fonction publique, qu’il y a quelque chose de pourri au royaume du statut. Car quand les contractuels et autres emplois aidés s’imposent dans le secteur public, grimpant de 14 % à quelque 20 % des effectifs publics ces dix dernières années – malgré des plans de titularisation – en s’appuyant sur des dispositifs relativement récents tels le « CDI public », c’est toute la construction statutaire qui tangue. Décrit par ses détracteurs tel un bloc monolithique incapable de s’adapter aux nouveaux besoins des usagers – particulièrement en matière de nouvelles technologies –, le statut des fonctionnaires, vieux de trente ans, serait un frein tenace à toute évolution de l’action publique. Et ne comptez pas sur des organisations syndicales arc-boutées sur la défense de leurs privilèges pour mettre de l’huile dans le moteur. Voilà pour les clichés et autres stéréotypes. Ils contribuent à donner de l’écho à ceux qui, à droite, militent pour sa limitation aux seules missions régaliennes : sécurité, défense, justice, impôts, budget, diplomatie. Soit quelque 700 000 agents de souveraineté nationale.

I

AFP

DATES CLÉS

1946 Le premier véritable statut de la fonction publique est instauré le 19 octobre, alors que Maurice Thorez est viceprésident du Conseil en charge de la fonction publique. Il pose les grands principes toujours actuels : distinction du grade et de l’emploi, avancement, gestion des personnels au sein d’organismes paritaires… Il garantit aux 900 000 agents publics concernés la liberté d’opinion et le droit syndical.

36 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

« Est-ce qu’un agent administratif doit nécessairement bénéficier d’un emploi à vie et du statut ? s’interroge ainsi le député UMP Xavier Bertrand, candidat déclaré à la présidentielle de 2017. Que les règles de droit privé s’appliquent à la fonction publique en dehors du cœur régalien ne me pose aucun problème. » Chargés de plancher sur le projet UMP de la prochaine présidentielle, les députés Hervé Mariton et Éric Woerth sont sur la même ligne. « Il ne serait pas choquant que les personnels publics soient plus nombreux sous contrat », confie le premier. « Le statut doit s’appliquer à moins de fonctionnaires, prolonge le maire de Chantilly. Les agents pourraient avoir le choix entre contrat et statut. »

Davantage d’agents sous contrat Le statut au régime minceur ? À voir. Car le texte rédigé en 1983 – la loi du 13 juillet portant droits et obligations des fonctionnaires – par le ministre communiste de la Fonction publique Anicet Le Pors a survécu à toutes les alternances. « Depuis trente ans, il a été modifié 210 fois législativement et 300 fois réglementairement, sourit-il. Peu de textes ont été autant retravaillés. Il a fait preuve de sa vitalité. » Critiqué et malmené, le statut perdure, continuant de régir les conditions de travail de plus de 4 millions de fonctionnaires. Au point qu’il a progressivement été érigé en figure totémique, que même Nicolas Sarkozy n’a pas pris le risque de revisiter en profondeur, lui qui promettait pourtant au début de son quinquennat, en septembre 2007, de laisser le choix aux « nouveaux entrants » du secteur public entre statut ou contrat de droit privé négocié de gré à gré. « Cela donnerait de la souplesse et du sang neuf », affirmait-il. Au-delà de la menace d’une fronde syndicale, pourquoi le prédécesseur de François Hollande a-t-il reculé ? Peut-être parce que le statut est « un cadre souple permettant de faire évoluer le secteur public pour répondre aux attentes des usagers », répond Anicet Le Pors. « C’est un ensemble de droits et de devoirs qui offrent à l’agent une grande indépendance

1959 L’ordonnance du 4 février 1959 procède à un simple toilettage du statut en distinguant ce qui relève du domaine réglementaire de ce qui relève de la loi, sans toucher au fond. Le statut est conforté pour les agents de l’État.


DOSSIER I STATUT

RÉA

Le gouvernement a mené une large consultation pour préparer son projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

1983-1986 Anicet Le Pors, ministre délégué à la Fonction publique dans le gouvernement de Pierre Mauroy, signe le premier texte détaillant les droits et obligations pour l’ensemble des fonctionnaires de l’État, mais aussi des collectivités locales. Entre 1984 et 1986, plusieurs textes sont votés, finalisant un statut unique pour chacun des trois versants de la fonction publique.

1987 La loi Galland, du nom du ministre délégué à l’Éducation Yves Galland, crée le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). Dirigé par des élus et des représentants syndicaux, l’établissement gère la formation des agents territoriaux et l’organisation des concours. Le texte précise les particularités propres aux fonctionnaires territoriaux.

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DOSSIER I STATUT

FONCTIONNAIRES,

un statut

À RÉÉCRIRE

à l’égard du pouvoir politique », précise Pierre Bauby, enseignant à Sciences-Po Paris et directeur de l’observatoire de l’action publique de la Fondation Jean-Jaurès. Parce qu’ils exercent une mission relevant de l’intérêt général, les fonctionnaires bénéficient d’une protection particulière. Mais cette protection s’accompagne d’obligations très contraignantes. « Le statut est un corpus de règles d’origine législatives et réglementaires qui placent l’agent dans une situation d’adhésion, observe Didier Jean-Pierre, professeur de droit public à l’université Lyon-III. Il n’y a pas de place pour la négociation : il doit accepter ce régime juridique. »

Organisation sclérosée

CHIFFRES

5,4 MILLIONS DE FONCTIONNAIRES

20 % DE NON-TITULAIRES

L’une des règles essentielles, dit-il, relève de la distinction du grade et de l’emploi : « Le fonctionnaire dispose d’un droit à faire carrière, mais pas d’un droit à l’emploi à vie. » Il n’est donc pas propriétaire de son emploi : il peut être muté, changé de service au gré d’une réorganisation ou d’une restructuration, réaffecté sur un nouvel emploi, voire licencié dans l’hypothèse, certes politiquement explosive, d’une loi dite « de dégagement des cadres », destinée à réduire drastiquement les effectifs publics. Des dispositions qui font dire au conseiller d’État Bernard Pêcheur, auteur d’un rapport sur l’avenir de la fonction publique remis fin 2013 au Premier ministre, que le statut est un levier dont aimeraient disposer les chefs d’entreprise (lire pages 44-45)… Lors de l’instauration du premier statut de la fonction publique, en 1946, les organisations syndicales n’avaientelles pas marqué leur hostilité, la puissante CGT en tête, lui préférant alors le principe du contrat de travail, qu’elles jugeaient beaucoup plus protecteur ?

DERRICK CEYRAC/AFP

( SUITE )

DATES CLÉS

1989

38 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Michel Rocard, Premier ministre, publie une circulaire sur le « renouveau du service public ». Un titre entier est consacré à une « gestion plus dynamique des personnels ». C’est le point de départ du dialogue social dans la fonction publique. Syndicats et ministères sont priés de travailler ensemble pour aboutir à des accords sur les conditions de travail.

Le statut est un environnement juridique qui a permis à l’État de mener sans heurts certaines grandes réformes publiques : transfert de 135 000 ouvriers spécialisés de l’État (TOS) vers les collectivités en 2004, changement de collectivité de rattachement pour 900 000 agents dans le cadre de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » de 2009… « Le contrat est créateur de droits subjectifs contraignants tandis que le cadre statutaire, avec la séparation du grade et de l’emploi, est plus efficace pour conduire les mutations », soulignait en début d’année le vice-président du Conseil d’État, JeanMarc Sauvé, dans les colonnes d’Acteurs publics. « Le secteur public n’est pas un employeur protecteur pour tous ses agents », acquiesce l’universitaire Émilie Biland, qui cite le recours aux vacataires payés à l’heure, l’intérim dans les hôpitaux, les CDD de six mois qui dérogent aux règles du code du travail… Atout plutôt que frein à la réforme de l’action publique, le statut est pourtant assimilé à un régime figé et ultraprotecteur. Que lui reproche-t-on ? Didier Jean-Pierre cite en vrac : « Son caractère rigide qui a rendu nécessaire la constitution de centaines de statuts particuliers, le recrutement par concours qui interdit les recrutements “latéraux”, son organisation sclérosée en corps qui empêche la mobilité, sa préférence pour le grade au détriment de la fonction. » « Le champ statutaire n’a jamais cessé de gagner du terrain, et par là même de la complexité », prolonge Arnaud Freyder, ancien conseiller « fonction publique » de François Fillon à Matignon et auteur de l’ouvrage La Fonction publique : chronique d’une révolution silencieuse. Le ver aurait été introduit dans la pomme lorsqu’a été instaurée la possibilité de déroger au statut au travers de statuts particuliers. « Ils se sont naturellement multipliés », remarque-t-il.

Faire évoluer les pratiques Mais surtout, Arnaud Freyder met en avant les mauvaises pratiques de la gestion publique qui ont dévoyé le statut général, comme lorsque certains employeurs publics recourent aux contractuels uniquement parce que cette procédure de recrutement est plus rapide. Car certes, il est aujourd’hui

2003 Le Conseil d’État consacre à la fonction publique son rapport annuel, rédigé par le rapporteur Marcel Pochard. Membre actuel de l’Association du droit de la fonction publique, le haut fonctionnaire pointe les lourdeurs et le cloisonnement de la fonction publique et appelle à une rénovation en profondeur du système. L’idée du contrat y est timidement introduite.


UN FREIN OU UN MOTEUR POUR RÉFORMER ? Par Sylvain Henry

PROTECTION

OBLIGATIONS

SALAIRES

GESTION

Le statut n’a jamais empêché de mener une réforme et les agents y adhèrent d’autant plus aisément qu’ils savent qu’une mobilité, certes forcée, n’influe ni sur leur rémunération ni sur leur avancement.

« Le lien statutaire permet plus facilement d’imposer des décisions, alors que le contrat privé lie l’employeur », estime l’universitaire Nicolas Sautereau. Les agents doivent par exemple s’adapter sans rechigner à une réorganisation de service.

En supprimant le statut général, l’État employeur devrait aligner les rémunérations sur le secteur privé. Il lui faudrait alors sortir son carnet de chèques pour certaines professions qui, à niveau de diplômes égal, pourraient voir doubler leurs salaires (universitaires, médecins…)

Le statut permet le licenciement pour insuffisance, le blocage de l’avancement… « Les potentialités du statut offrent une grande souplesse de gestion, observe l’ancien ministre UMP Éric Woerth. Mais elles ne sont pas suffisamment utilisées. »

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Facteur de stabilité, le statut est aussi perçu comme une lourdeur administrative. « Les règles sont si protectrices qu’elles ne permettent pas toujours la promotion des meilleurs », estime l’agrégé de droit public Didier Truchet, qui regrette la trop grande rigidité du dispositif.

Au plus haut niveau de l’État, chaque corps est attaché à son statut et à son influence et surveille de près ce qui se passe ailleurs. Pas question d’accorder certains avantages aux uns et pas aux autres. Pas facile, dans ces conditions, de faire bouger les lignes, même si cela relève de la pratique et non du statut en lui-même.

Le statut ne permet pas toujours de répondre à l’évolution rapide de certaines filières techniques, tels les services informatiques. « Et certains recrutements sous statut ne seront demain plus adaptés aux besoins », relève le député UMP Jean-François Mancel. « Quand vous recrutez des professeurs d’allemand pour quarante ans et que l’allemand est en recul auprès des élèves, vous disposez d’enseignants en surnombre », résume-t-il. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 39

BEACHBOYX10 /FOTOLIA

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DOSSIER I STATUT

« DEPUIS TRENTE

FONCTIONNAIRES,

un statut

ANS, LE STATUT A ÉTÉ MODIFIÉ 210 FOIS LÉGISLATIVEMENT ET 300 FOIS RÉGLEMENTAIREMENT. IL A FAIT PREUVE DE SA VITALITÉ… » RÉA

À RÉÉCRIRE

plus que nécessaire de rénover les règles et l’architecture statutaires pour redonner à la gestion davantage de fluidité. C’est ce que préconise le rapport Pêcheur, notamment via la création de cadres professionnels communs à deux ou trois fonctions publiques et de statuts d’emploi transfonctions publiques (lire pages suivantes). Un souffle nouveau auquel devrait (en partie ?) répondre le projet de loi « Déontologie, droits, obligations des fonctionnaires » de la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, qui prévoit de doper les mobilités. Cependant, cette loi très attendue qui réaffirme le statut comme élément central de la gestion publique des ressources humaines ne solutionnera rien si les pratiques ne changent pas. « L’administration n’utilise pas toutes les possibilités offertes par le statut », regrette l’énarque et ancien

Anicet Le Pors, « père » du statut de la fonction publique

président de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) Éric Verhaeghe. Les administrations n’oseraient pas avoir recours à la rémunération au mérite, à une gestion RH individualisée, au blocage de l’avancement, voire au licenciement d’agents pour insuffisance professionnelle. Les potentialités du statut sont très nombreuses. « La question du management se pose dans la fonction publique, analyse le député PS Olivier Dussopt, fin connaisseur des rouages du secteur public. Il est nécessaire que les hauts fonctionnaires deviennent de vrais managers. » Mais cela dépasse, ajoutet-il, la question du maintien ou de la suppression du statut. Car si sa pérennité n’est pas aujourd’hui remise en cause, il est urgent de revoir son usage.

DENIS/RÉA

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DATES CLÉS

2008

40 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Sylvain Henry avec Xavier Sidaner et Raphaël Moreaux

2013 Jean-Ludovic Silicani, conseiller d’État, remet un livre blanc sur l’avenir de la fonction publique au ministre du Budget, Éric Woerth, en pleine vague RGPP. Principale préconisation : instaurer une fonction publique dite de métier. C’est un bouleversement : les fonctionnaires seraient classés par grandes filières, délaissant au passage leur appartenance à certains corps de la fonction publique.

Bernard Pêcheur, conseiller d’État, remet son rapport sur l’avenir de la fonction publique. Si le statut a fait preuve de sa solidité au fil des ans, écrit-il, le statu quo n’est néanmoins pas possible.


LE CLUB DES ACTEURS DES TERRITOIRES DURABLES

Un Club de la rédaction d’Acteurs publics pour associer experts et acteurs de l’aménagement du territoire à la réflexion sur les enjeux du développement durable dans les territoires. Pour toute information sur le Club des acteurs des Territoires durables et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com


DOSSIER I STATUT

PAS DE PLACE DE DIRECTEUR POUR LES CONTRACTUELS Le statut est une condition indispensable, ou presque, pour s’installer à un poste de la haute fonction publique d’État. Les syndicats veillent. ncore un jugement contre une nomination irrégulière aux finances ! » D’un communiqué lapidaire, la CFDT Finances applaudit, en ce début d’année, la décision du tribunal administratif de Paris d’annuler le recrutement d’une contractuelle, Mireille Colas, au poste de directrice adjointe du service des achats de l’État (SAE). Ancienne élève d’HEC, cette spécialiste de l’achat avait intégré en 2010 le SAE, structure interministérielle rattachée à Bercy chargée de professionnaliser l’achat public, après vingt années passées dans le privé, de Danone à Louis Vuitton, en passant par Campbell Soup. Elle avait été nommée en septembre 2012 au poste de directrice adjointe. Seulement voilà : les postes permanents de l’État sont exclusivement réservés à des fonctionnaires, « en application du statut de la fonction publique » et ce poste de directrice adjointe ne correspond à « aucune des exceptions prévues », rappelle la CFDT. Pas de statut = pas de poste de directeur. Quand bien même Mireille Colas avait été jugée la plus compétente pour assumer ce rôle stratégique. Absurde ? La CFDT rejette toute idée de chasse aux contractuels au plus haut niveau de l’administration. Mais elle prévient qu’elle ne cessera pas son combat pour faire respecter le statut de la fonction publique… Comme la CFDT, l’ensemble des organisations syndicales sont très sourcilleuses sur le respect des règles statutaires et plus

E

42 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

encore lorsque les postes de direction sont concernés. De fait, l’écrasante majorité des postes de directeurs en administration centrale sont occupés par des fonctionnaires. Pas de contractuels à la tête de la dizaine de directions de Bercy – le polytechnicien et directeur de la DGCIS Pascal Faure est même le seul à avoir débuté sa carrière dans le privé –, aux trois directions générales de l’Agriculture, aux cinq directions de l’Écologie ou aux quatre directions générales de la Culture, dont tous les organigrammes sont détaillés dans la base de données d’Acteurs publics.

Tentative d’ouverture En théorie, la haute fonction publique cherche pourtant à s’ouvrir à de nouveaux profils. En février 2010, une circulaire du Premier ministre François Fillon vise ainsi à diversifier les recrutements aux postes les plus élevés de la hiérarchie administrative de l’État et de ses établissements publics. « Il conviendra d’apprécier s’il est opportun de susciter des candidatures extérieures à l’administration », indique la circulaire. Quatre ans plus tard, cela semble donc tout sauf opportun… La preuve des limites et des lourdeurs du statut général des fonctionnaires ? C’est le constat d’Agnès Verdier-Molinié, viceprésidente de l’Ifrap, think tank très libéral qui prône la limitation du statut aux fonctions régaliennes : « Quelqu’un venu du privé ne serait pas capable de travailler dans une administration ? On


DOSSIER I STATUT

PAS DE CONTRACTUELS À LA TÊTE… … des 12 directions de Bercy … des 4 directions centrales de la Culture … des 5 directions centrales de l’Écologie

La solution ? « Sortir de la fonction publique les postes de hauts fonctionnaires en administration centrale », avance Éric Verhaeghe, ancien président de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). À l’image du top management pratiqué dans certains pays anglo-saxons comme la Nouvelle-Zélande, où les cadres administratifs supérieurs sont recrutés depuis les années 1990 par petites annonces et sur contrat à durée déterminée. Pour postuler, les hauts fonctionnaires expérimentés partent sur la même ligne que les postulants venus du privé. Un rapport du Sénat français sur le sujet s’étonnait ainsi du parcours d’un directeur adjoint du Trésor japonais venu s’installer en terre néo-zélandaise quelques années avant son recrutement. Impensable en France. L’ancien ministre communiste de la Fonction publique Anicet Le Pors, père du statut de 1983, estime, lui, qu’il fallait exclure Mireille Colas du service des achats de l’État. « Un fonctionnaire occupe un emploi permanent, martèle-t-il, il est propriétaire de son grade. Ce n’est pas le cas des contractuels, qui ne devraient pas exercer des fonctions d’autorité. » Les positions sont donc tranchées et le statut n’offre pour l’heure aucune perspective – ou presque – pour les contractuels sur les postes les plus importants. « Il suffit d’un recours des syndicats pour que le recrutement soit annulé, constate l’universitaire et agrégé de droit public Didier Truchet. C’est à double tranchant : ça passe ou ça casse. » Pour l’instant, ça casse. Sylvain Henry Avec Pierre Laberrondo et Raphaël Moreaux

CONTRA CTUEL « IL FAUT OUVRIR LES PORTES ET LES FENÊTRES ENTRE PUBLIC ET PRIVÉ. » Éric Woerth, ancien ministre de la Fonction publique

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ASSEMBLÉE NATIONALE

Directeurs en CDD

JESADAPHORN/FOTOLIA

parle de diversité, mais cela ne reste que des paroles. » « Il faut ouvrir les portes et les fenêtres entre secteurs public et privé », acquiesce l’ancien ministre de la Fonction publique Éric Woerth. À l’écouter, les accès seraient aujourd’hui verrouillés autant par les procédures statutaires que par une culture administrative hostile au privé. Des portes par ailleurs farouchement gardées par les organisations syndicales. « Il existe une suspicion à l’endroit des hauts fonctionnaires ayant exercé dans le privé », confiait le polytechnicien et président d’Eurotunnel Jacques Gounon. La suspicion est encore plus forte pour les prétendants aux postes d’encadrement qui ne seraient pas fonctionnaires.


DOSSIER I STATUT

INTER VIEW BERNARD PÊCHEUR

Vous constatez dans votre rapport que le statut de la fonction publique peut accompagner la réforme de l’action publique. Quels sont ses avantages ? Le choix de doter notre pays d’une fonction statutaire, de carrière et à caractère national remonte, pour l’État, à la Libération. Il s’agissait alors d’un compromis historique entre le gouvernement du général de Gaulle et les syndicats, qui n’étaient pas, au départ, favorables au statut. La création de la fonction publique poursuivait alors trois objectifs : disposer d’une fonction publique intègre, compétente et loyale à l’égard des pouvoirs publics comme des citoyens. Un choix

44 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

réitéré en 1983 après la décentralisation et ap p l i q u é a u x f o n c tions publiques territoriale et hospitalière. En rédigeant mon rapport, je me suis posé

Auteur d’un rapport remarqué sur l’avenir de la fonction publique, le conseiller d’État veut insuffler « de la réactivité » au statut des fonctionnaires.

lité, comme les moyens de les atteindre. Mais faut-il réformer le cadre statutaire ? Il faut le faire évoluer assurément, mais il

est la garantie d’un bon fonctionnement de l’action publique. R e g a rd e z c e r t a i n e s réformes menées depuis dix ans : la loi « Hôpital, patients, san-

« Beaucoup de chefs d’entreprise aimeraient disposer du statut » la question : les objectifs assignés au statut ont-ils été atteints et sont-ils toujours d’actualité ? Très honnêtement, je considère que oui. Notre fonction publique a fait preuve de son intégrité, de sa compétence et de sa loyauté. Ces exigences sont toujours d’actua-

faut surtout insuffler davantage de réactivité dans les systèmes de gestion, mettre en œuvre des politiques beaucoup plus déconcentrées en matière de ressources humaines dans les services de l’État, favoriser la mobilité. La fonction publique de carrière

té, territoires » (HPST) a entraîné en 2009 le changement de collectivité de rattachement de 900 000 agents ; l’acte II de la décentralisation a, en 2004, provoqué le transfert de 135 000 fonctionnaires de l’État vers la territoriale ; la Réforme d e l ’ a d m i n i s t ra t i o n


DOSSIER I STATUT

VINCENT BAILLAIS

territoriale de l’État (Réate) a modifié en profondeur l’organisation déconcentrée de l’État. Des blocages statutaires ont-ils été constatés qui ont fait obstacle à la mise en œuvre de ces processus ? Non ! Le statut général n’est donc pas un obstacle au changement. Au contraire. Le statut impose des droits contraignants qui permettent plus facilement certaines évolutions… C’est en effet un levier dont beaucoup de chefs d’entreprise du secteur privé aimeraient disposer. Car croyez-vous que le c o d e d u t r av a i l e s t plus souple ? Le cadre juridique offert par le statut (la distinction du grade et de l’emploi, le caractère unilatéral du statut, le pouvoir réglementaire du chef de service…) n’est pas un frein à la réforme et certains dysfonctionnements constatés – je pense notamment à la mobilité ou à l’avancement – relèvent davantage de « dérives coutumières ». Statut et management sont deux choses différentes et on impute parfois a u p r e m i e r, l e s t a tut, des insuffisances qui sont avant tout managériales.

Peut-on limiter le statut aux fonctions régaliennes ? De quelles fonctions régaliennes parle-t-on ? En incluant la justice, la police ou les corps enseignants, il ne rest e ra i t a l o r s q u e l e s « administratifs », les personnels de ministères ou de préfectures qui, selon moi, sont des agents régaliens. Par ailleurs, il faudrait, en cas de basculement plus radical, que l’État gère deux ensembles : un ensemble de droit privé pour les contractuels et un ensemble de droit public pour les fonctionnaires. Je ne le souhaite à personne… Et que ferait-on des collectivités territoriales ? Certaines missions régaliennes ne leur ont-elles pas été transférées ? La fonction publique italienne, qui est censée avoir basculé dans le droit privé en 1993, est-elle plus efficace que la nôtre ? Je laisse chacun en juger. Quant aux économies budgétaires attendues, elles sont hypothétiques. Nombre d’agents recrutés sur contrat de droit privé devraient bénéficier de rémunérations aussi importantes, voire plus i m p o r t a n t e s. C e n e serait donc pas synonyme d’économies. Propos recueillis par S. H.

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 45


POPAYE/FOTOLIA

DOSSIER I STATUT

2017, FIN DU STATUT… Privés de statut, les agents seraient rattachés au droit du travail et gérés par de grandes conventions collectives. ai 2017. Quelques minutes après avoir été officiellement investi par le président du Conseil constitutionnel, le nouveau chef de l’État prend la parole depuis la salle des fêtes du palais de l’Élysée. « Le statut de la fonction publique sera supprimé avant la fin de l’année. » Les organisations syndicales décrètent immédiatement la mobilisation générale. Les agents débrayent, les services publics sont bloqués, les esprits s’échauffent. Mais le gouvernement ne cède pas… Comment la suite de ce scénario de politique fiction s’écrirait-elle ? Avec quelles conséquences pour le fonctionnement du secteur public ? Les avis sont tranchés. « Ce serait comme en Allemagne, estime l’ancien ministre communiste et « père » du statut Anicet Le Pors. Quelques centaines de milliers d’agents à droits syndicaux réduits seraient centrés sur des missions régaliennes avec éventuellement interdiction du droit de grève et du droit syndical. » Les autres agents publics seraient gérés par des grandes conventions collectives. « Ce serait un retour au XIXe siècle, lorsque l’État s’investissait seulement sur les enjeux de sécurité et de fiscalité, redoute Pierre Bauby, chercheur en sciences politiques et président de l’observatoire de l’action publique de la Fondation Jean-Jaurès. Progressivement,

M

46 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

l’État a joué un rôle fondamental pour l’intérêt général, la cohésion sociale et le développement équilibré des territoires. » À l’écouter, cet équilibre serait alors remis en cause. Du côté de la gestion RH, deux pistes pourraient se concrétiser. « On pourrait avoir des agents qui feraient le choix de travailler sous statut et d’autres sans statut, préconise l’ancien ministre UMP de la Fonction publique Éric Woerth. Ils ne seraient pas soumis aux mêmes aléas dans le déroulé de leur carrière. » Une gestion différenciée inédite et probablement complexe à mettre en œuvre. Plus radical : le basculement de l’ensemble des agents non régaliens sur des contrats de droit privé, soit près de 4 millions de personnes, si l’on considère que les fonctions « vitales » de l’État sont assumées par quelque 700 000 à 800 000 agents (sécurité, diplomatie, budget…). Ceux-là dépendraient alors des dispositions du code du travail.

Demi-révolution Professeur de droit public à l’université Lyon-III, Didier JeanPierre relativise les effets de cette révolution administrative. « Le basculement dans le code du travail d’agents œuvrant au sein du service public aboutit souvent à un droit hybride mixte, constatet-il. Ces personnels ne sont jamais complètement alignés sur le droit des salariés du secteur privé. » Une demi-révolution qui braquerait cependant les organisations syndicales. De la CGT à la CFE-CGC, en passant par FO, Solidaires, la CFTC, la FSU, l’Unsa, la FA-FPT ou la CFDT, toutes ont martelé, ces derniers mois, leur attachement viscéral au statut des fonctionnaires. Alors ne parlez pas de scénario fiction aux syndicats… Sylvain Henry


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UNE INFLUENCE FRANÇAISE À RENFORCER ous avez vu ? J’ai préféré suspendre la séance pour recadrer quelques points avec mes collègues. » Sourire au coin des lèvres, Pervenche Bérès savoure son effet. Après avoir bavardé avec trois eurodéputés, la présidente de la commission de l’emploi et des affaires sociales glisse quelques mots à l’oreille de son attaché parlementaire, puis retourne s’asseoir à la tribune. Cinq minutes plus tard, le rapport est voté à une large majorité de la vingtaine de députés membres de la commission. « C’est une redoutable négociatrice », commente un élu de droite. Élue depuis 1994 au Parlement européen et travailleuse acharnée, la socialiste a pourtant sauvé de justesse son siège en Île-de-France, voici quelques semaines, grâce à son poids à Strasbourg et à Bruxelles… Plus quelques appuis bien placés à Paris, rue de Solférino. Le casse-tête des listes a en revanche été fatal à nombre de députés sortants. Avec un taux de renouvellement de ses listes à 50 %, le Parti socialiste a battu des records.

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Absentéisme, manque de motivation, cumul des mandats, habitudes « hexagonales »… Les eurodéputés français semblent en perte de vitesse au Parlement. Analyse des clés du soft power dans l’Hémicycle.

« Je veux dire aux prochaines têtes de liste qu’il faut investir dans le mandat européen et faire un travail soutenu avec trois jours par semaine à Bruxelles et une semaine par mois à Strasbourg », a écrit solennellement Catherine Trautmann, responsable de la délégation socialiste française à Bruxelles. Comme un message subliminal envoyé à Harlem Désir, tête de liste en Île-de-France, qui figure parmi les eurodéputés les moins assidus (743e sur 752). Mais les autres partis français ne sont pas en reste. « Recasage » d’anciens ministres, tremplin pour un futur maroquin, avantages du statut : les fauteuils européens présentent bien des qualités. Résultat : tous les cinq ans, les eurodéputés sortants, peu présents à Paris, font les frais des jeux d’appareils. Spécialiste de la propriété intellectuelle, Marielle Gallo n’a pas été reconduite par Alternative (UDIMoDem) après son premier mandat, alors que le droit d’auteur sera l’un des plats de résistance de la prochaine législature. Cette situation a inquiété jusqu’au Cercle de l’industrie, le très


MARIO FOURMY/RÉA

EUROPE I PARLEMENT

Depuis 2009, le Parlement européen a gagné en influence, une évolution que la classe politique française ne semble pas avoir prise en compte.

discret lobby des entreprises du CAC 40, qui s’est fendu, fin 2013, d’une note aux partis politiques pour réclamer davantage de compétence. En vain. Pas un futur eurodéputé français spécialiste pour peser sur les débats du paquet « Télécoms », en discussion l’année prochaine.

Expertise politique À Bruxelles, ce jeu de chaises musicales français étonne les Allemands et les Britanniques, piliers de l’Hémicycle. Car c’est là que se votent 80 % des lois nationales, transpositions de directives européennes. En outre, depuis 2009, le Parlement européen a gagné en compétence et en influence. Il est codécideur avec le Conseil de l’Union européenne de près de 90 % des nouvelles propositions législatives qui lui sont soumises, dans des domaines aussi prioritaires que la gouvernance économique ou la régulation des activités financières. Tout continue pourtant comme si la classe politique française restait sourde à

ces évolutions. « Aucun parti français n’a de véritable stratégie de ressources humaines, à la différence des grands groupes européens, regrette Alain Lamassoure. La priorité devrait être d’envoyer au Parlement européen des personnalités susceptibles d’avoir une influence importante. » Président de la commission des budgets, il se présente à un cinquième mandat de député européen, une anomalie en France, comparée à ses voisins. Outre-Rhin, un adage dit que « le premier mandat est pour apprendre, le deuxième pour exercer et le troisième pour transmettre ». Les Britanniques ont coutume de parler du Parlement européen comme de l’assemblée où l’on travaille (working parliament) par opposition à celle où l’on parle (talking parliament). Pour ces deux nations majeures, l’expertise politique et l’ancienneté comptent plus que l’ancrage national ou le vote. Certains Français en ont fait les frais lors de leur arrivée. Pour sa première intervention en 1989, Valéry Giscard d’Estaing #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 49


EUROPE I PARLEMENT

s’est vu couper le micro au bout de deux minutes… comme pour tout eurodéputé. En 2009, Rachida Dati avait fait inutilement le forcing pour avoir un rapport en commission économique. « Que vous soyez ancien ministre de votre pays n’a aucune importance. Pour votre voisin suédois ou polonais, c’est votre travail de fond qui est essentiel, explique un élu hexagonal. Les députés de l’Assemblée nationale qui vivent de ce combat politicien, avec ce côté tribun, sous l’œil permanent des médias, sont perdus en arrivant à Bruxelles. » La feuille de route des néodéputés européens pourrait ainsi se résumer : travail, assiduité, humilité et collégialité. « Et maîtrise de l’anglais, ajoute Sylvie Goulard, eurodéputée du groupe ADLE depuis 2009. Pour tout nouveau député, l’essentiel est de bien choisir sa commission. Les commissions économiques sont à préférer car elles ont du poids. »

Luttes feutrées À la base, la stratégie du député dépend de la politique de sa délégation nationale. Au pouvoir en France, le Parti socialiste doit composer avec les Allemands, au sein du groupe européen « Socialistes et démocrates », pour faire entendre sa petite musique. « Avec 13 députés, je considère que nous avons gagné de l’influence, estime Catherine Trautmann, la cheffe de délégation. Nous sommes parfois soupçonnés d’avoir des votes très en phase avec notre groupe mais nous avons contribué à construire des positions au sein du groupe. Nous avons fait un pacte dès le début avec Martin Schultz, le président du Parlement. Il fallait que nous soyons dans les commissions économiques, les affaires sociales, le budget, les questions environnementales, la protection du consommateur. Nous y sommes. » Au sein de chaque commission, une bonne partie de l’influence du député se joue également dès les premières semaines avec la distribution des rapports. « Chaque année, la cinquantaine de rapports législatifs à rédiger par commission donne lieu à des luttes feutrées, raconte Charles de Marcilly, responsable du bureau de Bruxelles de la Fondation Robert Schuman. Avoir un rapport est l’assurance de peser au sein d’une commission. » Sauf que les Français partent avec un handicap de taille. Les coordinateurs, qui accompagnent la position de leur groupe politique au sein de chaque commission et donnent le tempo des amendements… sont aussi ceux qui défendent les rapports de leurs collègues. Or les coordinateurs français n’étaient que 9 en 2014, contre 25 pour l’Allemagne et 21 pour le Royaume-Uni. Si on ajoute que l’intérêt du coordinateur est d’avoir un rapporteur qui connaît suffisamment le sujet pour le rendre en temps et en heure, il semble difficile au nouvel impétrant de peser. Mais pas impossible. Stéphanie Auconie, eurodéputée UDI, a rédigé plus d’une vingtaine de rapports de sa propre initiative. Certes, souvent des textes d’une dizaine de pages… Mais elle s’est fait connaître. « Il n’y a pas besoin de cinq ans pour comprendre le fonctionnement du Parlement », estime Sylvie Goulard. « Nous 50 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

LES FRANÇAIS, MAUVAIS ÉLÈVES DE L’HÉMICYCLE Dans une étude parue en janvier et intitulée « L’influence de la France au Parlement européen », la Fondation Robert Schuman compare l’implication des élus européens de 2009 à 2013. Le résultat n’est pas brillant. L’expérience des Français est plus faible, avec un nombre moyen de mandats de 1,8, contre 2,4 pour un député allemand ou britannique. Leur implication n’est pas meilleure. En calculant le cumul des mandats (un bon indicateur), la Fondation relève que 40,5 % des eurodéputés français cumulent plusieurs mandats contre 22,2 % pour les Allemands ou 4,1 % pour les Britanniques. Le score est toutefois en diminution de 20 points par rapport à 2009. Enfin, les Français sont 18 % à abandonner leur mandat, un taux près de cinq fois supérieur à celui des Allemands (4 %)

et trois fois supérieur à celui des Polonais et des Britanniques (6 %).

ne sommes pas là pour nous faire plaisir mais pour obtenir des résultats, renchérit Pervenche Bérès. Mon conseil à un nouveau député est de ne pas se laisser disperser, de choisir deux ou trois sujets, de les bosser à fond, de se fixer des objectifs et de ne pas en démordre. » Un collaborateur ayant accompagné plusieurs élus souligne que « tout l’art du député européen est de créer du compromis. Plus le sujet est sensible, plus il faut créer de larges majorités, au sein de sa commission, puis du Parlement ».

Faire avancer les dossiers Cette attitude, peu habituelle dans les travées de l’Assemblée nationale, s’explique aussi par la mécanique et le rythme de l’adoption des textes. Entre la proposition de directive lancée par la Commission et son adoption en plénière à Strasbourg, il peut s’écouler de neuf à dix-huit mois. La machinerie


MICHAEL TRIPPEL/LAIF/RÉA

EUROPE I PARLEMENT

À partir des prochaines élections européennes, les chefs d’État et de gouvernement proposeront au Parlement un candidat « en tenant compte des élections au Parlement européen ». Il devra ensuite être approuvé par le Parlement à la majorité de ses membres.

européenne est très lourde avec ses allers-retours entre Commission, Parlement et Conseil de l’Union européenne, ses amendements et trilogues. Faire la synthèse au sein de chaque grand groupe politique et composer avec 28 États de sensibilités différentes semble relever du grand écart. « Tout l’art est d’actionner les bons leviers auprès des députés influents en conservant son cap politique », sourit un orfèvre en la matière, qui a poli son langage après deux mandats. Pour arriver à ses fins, le député n’est pas seul. Encadré par un groupe, il doit également choisir avec soin ses attachés parlementaires. Souvent trentenaires, dépassant rarement les 40 ans, généralement au nombre de deux (jusqu’à trois, dit le règlement), les assistants partagent un espace d’une trentaine de mètres carrés avec leur député. Ils constituent la pierre d’angle de l’influence au quotidien et se répartissent les rôles.

Un premier collaborateur gère l’agenda bruxellois et hexagonal de l’élu, le second est plus politique. « Je suis le premier filtre d’accès au député, explique un trentenaire passé par une grande école. Mon travail est de défendre la ligne de mon député au sein du groupe et de travailler avec les collaborateurs des groupes politiques. Comme mon député a de l’influence, les gens vont m’écouter. Je donne la pichenette pour que les dossiers avancent. » Faire avancer ses dossiers, l’eurodéputé ne pense qu’à cela durant les cinq ans de sa législature. Qu’il soit une pièce maîtresse ou plus accessoire du Meccano européen, il a souvent besoin d’un deuxième mandat pour jouer pleinement son rôle. Mais c’est au sein de son parti politique national qu’il devra convaincre l’état-major. Et pour cela, il aura à jouer une tout autre partition. Sans forcément être écouté. Jean-Bernard Gallois, à Bruxelles

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SUR LE TERRAIN

L’administration espagnole au régime sec Le Premier ministre espagnol s’est félicité du premier bilan de la vaste réforme de l’administration, qui doit faire économiser 28,8 milliards d’euros à l’État d’ici fin 2015. Mais la grogne syndicale dans la fonction publique et la résistance de certaines provinces pourraient freiner l’enthousiasme gouvernemental.

ix mois après le lancement d’une réforme historique de son administration, Mariano Rajoy (photo), le Premier ministre espagnol, s’est réjoui des résultats d’un premier bilan d’étape. Très affûté, le rabot ibérique a déjà permis à l’État d’économiser plus de 7 milliards d’euros. Au total, a précisé le chef du gouvernement, ce seront « 28,8 milliards d’euros » qui seront épargnés « à fin 2015 ». Tout a commencé en 2012. L’Espagne, qui a bénéficié d’un sauvetage par l’Union européenne et le Fonds monétaire international de son secteur financier à hauteur de 41,3 milliards d’euros, est obligée de réduire son déficit public. Une Commission de réforme de l’administration publique (Cora) est créée, fin 2012, pour faire un état des lieux de chaque organisme dépendant de l’État, des régions autonomes et des municipalités. En juin 2013, un rapport de 700 pages présente 218 mesures qui visent à rationaliser l’administration publique.

S

15 000 immeubles de l’État vendus Cela passe tout aussi bien par la vente de 15 000 immeubles de l’État que par la centralisation de la gestion et des achats publics (l’État espagnol détient 4 823 comptes bancaires), le renforcement de l’administration électronique et de la dématérialisation des services ou encore la suppression de postes de travail. Le gouvernement a insisté sur le fait qu’« aucune mission essentielle » ne serait

touchée (santé, éducation). « Ce que le Premier ministre présente comme unique réussite devant l’Union européenne constitue une destruction de plus de 553 000 postes de travail dans le secteur public depuis un an », rétorque la Fédération des services publics (FSP). Le gouvernement assure que le pays est sur la bonne voie. « Toutes ces mesures sont déjà engagées et 23 % sont entièrement finalisées », s’est félicité Mariano Rajoy, à la mi-février. Mais les objectifs seront-ils réalisables ? La suppression, par exemple, des 90 agences des communautés autonomes, faisant double emploi avec l’échelon central (météorologie, énergie, tribunaux des comptes…), a peu de chances d’aboutir. Car aucune loi ne permet d’imposer ces réductions aux 17 communautés autonomes espagnoles. Et la Catalogne ou l’Andalousie s’opposent ouvertement aux mesures proposées. Le gouvernement veut croire à leur soutien. Il rappelle que ces provinces ont déjà fait des efforts importants. « Nous leur avions demandé de supprimer près de 500 organismes publics, elles en ont supprimé 535 », a rappelé le ministre des Finances, Cristobal Montoro. Reste à voir si elles tiendront le rythme de dégraissage prévu par la Cora. Le gouvernement fera un prochain point d’étape en juin. Jean-Bernard Gallois

52 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

PETER MUHLY/AFP

INTERNATIONAL


Africa

LANCEMENT

Une newsletter hebdomadaire consacrée à l’information sur les politiques publiques et les nominations du secteur public

d’Acteurs publics Africa 1 seul média pour toucher dès aujourd’hui 100 000 décideurs publics dans 22 pays d’Afrique francophone.

L’actualité des politiques publiques en Afrique est devenue un contenu si riche qu’il nous a semblé nécessaire d’éditer une lettre d’information propre à ce continent. C’est d’abord une façon de remercier nos nombreux lecteurs africains de leur fidélité, mais c’est aussi

notre façon de reconnaître à l’Afrique toute sa place dans l’important mouvement mondial de modernisation du secteur public que nous suivons avec attention à travers toutes nos publications*. Puisqu’il est aujourd’hui parfaitement établi que la réussite d’un pays passe

aussi par la performance de ses services publics, nous espérons ainsi, à notre mesure, par le partage d’information sur les initiatives de tous les acteurs publics africains, contribuer à leur succès. Bruno Botella, rédacteur en chef bbotella@acteurspublics.com

* Voir la rubrique « International » du site acteurspublics.com

14 %

RÉPARTITION DU LECTORAT

Élus

d’Acteurs publics Africa Tunisie

16 %

Maroc

Santé/social, (hôpitaux, OMS, Pnud, ONG)

42 %

Algérie

Administration d’État (gouvernements et parlements, administration, établissements publics et parapublics)

Mauritanie Mali

Niger

Sénégal Chad

Burkina Faso Bénin

Guinée

Djibouti

Côte d’ivoire Togo

Cameroun

Gabon

République centre Afrique

Rep. du Congo Dem. Rep. du Congo

PUBLICITÉ Pierre-Alexandre Vidal pavidal@acteurspublics.com Tél. : 01 46 29 29 04

28 %

Rwanda Burundi

Madagascar

Organisations panafricaines et internationales (Union africaine, Cedeao, BOAD, BAD, Banque mondiale, AFD) GEOATLAS® WORLD VECTOR - GRAPHI-OGRE® - France - 1997

Contact : Jean-Michel Meyer, rédacteur en chef adjoint chargé d’Acteurs publics Africa - jmmeyer@acteurspublics.com - Tél. : 01 46 29 29 09


SUR LE TERRAIN INTERNATIONAL

ERDE/FOTOGLORIA/RÉA

La ville de Francfort est au capital de 35 sociétés d’intérêt économique général gérant les services publics locaux et employant 12 500 salariés en 2012.

Les villes allemandes en alerte En cas d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis, les communes allemandes redoutent la concurrence inégale des géants privés américains dans les services publics locaux.

plus concurrentielles car exemptées de certaines contraintes propres aux réglementations des pays européens. « L’accord pourrait conduire, à travers, par exemple, une obligation d’accès au marché, à ce que des entreprises privées puissent répondre à des appels d’offres. En raison de la pression sur les coûts, les communes seraient obligées de recourir à des fournisseurs moins chers, mais de qualité moindre », s’inquiète Uwe Becker, directeur du service financer de la ville de Francfort-sur-le-Main.

Manque de transparence ’Union européenne et les États-Unis sont à nouveau montés sur le ring. Un quatrième round de négociations a opposé, du 10 au 14 mars à Bruxelles, environ 200 experts des deux bords de l’Atlantique pour tenter de faire avancer l’accord de libre-échange entre les deux continents. Mais après les Français sur l’exception culturelle, c’est au tour des maires de villes allemandes de sonner le tocsin européen pour défendre la notion de services publics locaux, redoutant les conséquences des négociations en cours depuis l’été dernier. Ulrich Maly, le président de l’Association des villes allemandes (Deutscher Städtetag) n’hésite pas à parler d’« une vague de libéralisation », dont les infrastructures au service des citoyens feraient les frais. Au cœur des préoccupations des élus locaux, les activités de réseau, comme la distribution d’électricité, de gaz et d’eau, les transports publics locaux, le traitement des déchets, l’eau potable et le traitement des eaux usées, ou encore l’éducation et la culture. Elles pourraient subir les assauts des sociétés privées américaines dans les services,

L

54 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Une inquiétude légitime. La survie d’une activité économique majeure est en jeu. La ville de Francfort détient ainsi des participations dans 35 sociétés d’intérêt économique général de droit privé, réparties entre 5 secteurs (social, culture, logement, transport et traitement des déchets, développement économique). En 2012, elles ont réalisé un chiffre d’affaires total de 3,6 milliards d’euros et employaient 12 500 salariés. Pour résister à ce qu’ils appellent la menace « transatlantique », les maires ont rappelé en février au gouvernement qu’il a fait de la préservation des services d’intérêt général l’un de ses engagements. Depuis, la Fédération des associations de villes bavaroises (Bayerischer Städtetag) a reçu l’assurance timide d’un émissaire de la Commission européenne que les services communaux seraient exclus des discussions avec Washington. Mais Ulrich Maly regrette toujours, au nom des élus communaux, le manque de transparence qui accompagne cet accord de libre-échange, les villes n’ayant pas été invitées à la table des négociations. Marie E. Bonte


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SUR LE TERRAIN

Le défi comptable européen Eurostat veut instaurer une norme comptable commune à l’ensemble des pays européens. réer un référentiel comptable commun à l’ensemble des États européens. C’est l’initiative ambitieuse lancée par Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne, pour tenter d’harmoniser les pratiques à l’échelle de la zone euro. Une mission tout à la fois complexe, sensible et hautement stratégique puisqu’il existe aujourd’hui une grande diversité dans les normes utilisées par les États européens. « La lisibilité des comptes publics a des conséquences sur l’économie réelle », observe-t-on à Eurostat, où l’on rappelle que c’est une mauvaise interprétation comptable de la situation financière grecque qui a masqué les risques encourus par les investisseurs et abouti au défaut de paiement du pays. À l’heure des économies interdépendantes, il est aujourd’hui nécessaire, insistet-on, de développer des standards garantissant la fiabilité de l’information financière des États. « L’amélioration de la qualité de cette information financière et l’harmonisation des normes comptables doivent permettre d’exercer plus efficacement la surveillance des politiques budgétaires et de restaurer la confiance, estime de son côté Jean-Louis Rouvet, associé responsable de l’activité secteur public/santé au sein du cabinet d’audit et de conseil PwC. Au-delà, une donnée financière fiable permet d’accompagner la prise de décisions. » Et de piloter au mieux l’utilisation des dépenses publiques.

C

Avancées diverses PwC a été chargé par Eurostat de plancher sur l’harmonisation des comptabilités européennes et d’estimer le coût de leur transformation. « Les États sont diversement avancés en matière de réforme financière », constate Jean-Louis Rouvet. Certains gouvernements, l’Allemagne notamment, appuient encore à certains niveaux leurs comptes sur une comptabilité dite de caisse, qui permet aux gestionnaires de suivre la trésorerie et l’exécution budgétaire sans toutefois apporter 56 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

GINA SANDERS/FOTOLIA

STATISTIQUES

EUROSTAT Office statistique de l’Union européenne, Eurostat a été créé en 1953. Il se veut « le premier fournisseur de statistiques de qualité sur l’Europe ». Les démocraties, insiste cette institution basée à Luxembourg, ne sont pas en mesure de fonctionner correctement si elles ne peuvent s’appuyer sur des statistiques « fiables et objectives ».

de vision globale et à long terme de leurs finances publiques. D’autres travaillent à partir d’une comptabilité d’exercice, qui enregistre les transactions lorsqu’elles surviennent, assurant une vision plus complète de l’ensemble des actifs et des passifs concernés et offrant ainsi une meilleure lisibilité de la performance financière d’un État. Des lectures distinctes. « Il faut aller plus loin en instaurant une lecture commune plus aboutie au travers de normes comptables intégrant pleinement les spécificités des États », analyse Jean-Louis Rouvet. La France semble appartenir aux bons élèves de la transparence comptable depuis l’instauration de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), qui s’applique à l’ensemble de l’administration de l’État depuis 2006. « Mais attention, nuance l’ancien ministre du Budget et “père” de la Lolf Alain Lambert, si les comptes de l’État sont aujourd’hui d’une très grande limpidité, il n’en va pas de même avec les comptes sociaux et ceux des collectivités locales, notamment dans leur consolidation avec les comptes de l’État, aujourd’hui impossible. » Pour Alain Lambert, c’est une évidence : « Le socle de la démocratie repose sur la connaissance des comptes publics, il est donc indispensable que l’on voie clair dans les finances publiques des autres États autant que dans les nôtres. » C’est même, dit-il, d’une « urgence avérée ». Sylvain Henry


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SUR LE TERRAIN E-PUBLIC

La nouvelle e-boîte aux lettres du Quai d’Orsay Le ministère des Affaires étrangères lancera cet été son nouveau portail pour la correspondance en ligne des ambassades, baptisé Diplomatie. En espérant décloisonner la communication au sein de son administration.

ans les bureaux du service informatique du Quai d’Orsay, une dizaine d’agents travaille depuis dix-huit mois à l’élaboration d’un nouveau portail Internet : Diplomatie. Un nom sobre pour une petite révolution. Télégrammes diplomatiques, notes ou courriels : l’ensemble de la communication diplomatique sera accessible à partir de juillet sur un point d’entrée Web unique. Hors Quai d’Orsay, les agents d’autres ministères qui s’appuient sur le réseau diplomatique pour mener à bien leurs missions – Bercy, la Culture et la Défense notamment – disposeront eux aussi d’un accès à cette information de première importance. La société civile, dans une moindre mesure, sera également invitée à prendre part à ces échanges. Un tel service dématérialisé est unique dans les annales de l’administration. Certes, la direction générale de l’aviation civile, avec son portail Bravo Victor, a fait office de pionnière. Mais sans faire injure aux ingénieurs de l’aviation, Diplomatie est d’une envergure supérieure. Le ministre Laurent Fabius a ainsi qualifié le projet de « spectaculaire » lors de ses vœux en début d’année. De quoi s’agit-il ? D’un projet de portail Internet initié en 2011 qui s’inscrit dans la démarche d’innovation adoptée par le ministère depuis quelques années.

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58 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Le Quai d’Orsay est à la pointe des administrations publiques sur le champ des réseaux sociaux – Facebook, YouTube, Twitter – et a développé des solutions d’accès à distance pour les fonctionnaires du ministère à partir d’ordinateurs portables. Diplomatie prolonge cette stratégie en simplifiant la correspondance, le « cœur de métier » des diplomates, selon Nicolas Chapuis, le directeur des systèmes d’information (DSI) du ministère et initiateur du projet.

Décloisonnement Cette correspondante est lourde et complexe malgré les améliorations de ces dernières années. En poste à Madrid, l’ambassadeur Jérôme Bonnafons en témoigne : « Chacun passe un temps infini à aller chercher l’info dans la forêt de télégrammes que l’on reçoit », confie-t-il à Acteurs publics. Face à cet excès d’information, « nous n’avons pas toujours le temps de faire la sélection », observet-il. Le télégramme diplomatique, ce sont 350 000 documents par an au total dans lesquels il faut nécessairement faire le tri. « Il faut savoir si un télégramme vous informe de l’évolution de la situation ou requiert une démarche pour faire valoir une position française de votre part », développe Jérôme Bonnafons.


WIKTOR DABKOWSKI/AFP

SUR LE TERRAIN I E-PUBLIC

Le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius (ici à Bruxelles en mars), a salué en Diplomatie une innovation « spectaculaire ».

Nicolas Chapuis, directeur des systèmes d’information du Quai d’Orsay

DES COMMUNAUTÉS OUVERTES À LA SOCIÉTÉ CIVILE

DR

« TOUT AGENT A VOCATION À VOIR L’ENSEMBLE DE LA CORRESPONDANCE DIPLOMATIQUE. »

Entreprises, ONG, philosophes, journalistes… Les faiseurs d’opinion pourront être invités à échanger au sein du portail Diplomatie. « La société est demandeuse », estime le directeur des services informatiques du Quai d’Orsay, Nicolas Chapuis. « Les experts de la société civile nous apporteront leur expertise, leurs points de vue et nous, l’information en temps réel », avance-t-il. Un bon vecteur de la diplomatie d’influence, ou soft power. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 59


SUR LE TERRAIN I E-PUBLIC

D’un seul coup d’œil, l’utilisateur du portail Diplomatie aura accès à une information classée par ordre de priorité.

En plus de la masse des télégrammes, les ambassades sont destinataires d’environ 40 millions de mails, répartis sur les 250 postes à l’étranger, selon les estimations du directeur des systèmes d’information. Nicolas Chapuis, lui-même diplomate, a fait le calcul : « Les mails, cela représente trois heures par jour, rien que pour les ouvrir, y répondre ou les transférer. » À cela s’ajoute une quantité de notes et d’informations papier, difficilement chiffrable, mais suffisante pour accaparer le temps des diplomates, en proie à quelques difficultés dans le maniement des outils. « Schuman », le canal par lequel transitent les télégrammes est à bout de souffle, estime Nathalie Berthy, secrétaire générale de la puissante CFDT du ministère. Trop cloisonnée, l’information a du mal à circuler dans une administration marquée par « un cloisonnement très vertical », poursuit-elle. Abattre les murs, c’est justement l’ambition poursuivie à travers Diplomatie, qui instaure un mode de communication plus ouvert et horizontal. Une rupture au sein du ministère. « Tout agent a vocation à voir l’ensemble de la correspondance diplomatique », souligne Nicolas Chapuis. Diplomatie s’affiche comme un véritable réseau social professionnel, sorte de Facebook +, lieu d’échange d’informations entre agents, désormais désignés comme membres d’une « communauté ».

Diffusion restreinte Chaque direction devient communauté : la DSI, le cabinet, le secrétariat général, une ambassade… Mais aussi la direction du Trésor ou le ministère de la Culture, qui disposent d’un réseau à l’étranger. Chacune de ces communautés fonctionnelles est organisée par un directeur, sorte de super-community manager chargé d’attirer les agents et de choisir qui disposera ou non d’un passeport pour entrer dans une autre communauté. Ainsi, un directeur ou sous-directeur en

60 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

administration centrale qui a été en poste à l’étranger peut légitimement vouloir garder un lien avec son ancienne ambassade et faire partie de « sa » communauté. L’idée, à travers Diplomatie, est aussi que « l’expertise ne se tarisse pas », expose Nicolas Chapuis. À condition toutefois que les vieux réflexes de chapelles ne reviennent pas au galop. C’est ce que redoute Nathalie Berthy. « S’ouvrir à d’autres horizons est intéressant, remarque-t-elle, mais il n’est pas certain que le degré d’ouverture des communautés soit aussi fort qu’avancé par le ministère. » Il n’est pas toujours facile, au sein d’une « petite maison » comme le Quai d’Orsay, de faire circuler les informations facilement. Par ailleurs, des garde-fous existeront. Ainsi, en plus de se prononcer sur l’entrée dans une communauté, le community manager aura un autre rôle non moins stratégique, celui de délivrer des droits de diffusion. L’information sera par défaut accessible aux agents issus de la même communauté, sauf si l’émetteur diffuse son message en mode restreint. Seules les personnes habilités pourront alors lire le message. Nicolas Chapuis est catégorique : « Diplomatie va faire émerger un mode de management beaucoup plus participatif ». Destinataires d’une information davantage ciblée en fonction de sa qualité et de leurs centres d’intérêts, les agents recevront des messages intitulés « pour action » ou « pour information ». Ils pourront « liker » les informations de leurs confrères et les partager, comme sur n’importe quel réseau social professionnel. Reste à savoir de quelle manière ils vont s’emparer de l’outil, aussi perfectionné soit-il, pour faire tomber les cloisons entre services. Malgré des séances de formation, appréciées des syndicats, les agents ne sont pas tous des geeks en puissance. La technique est aussi « question de génération », analyse Nathalie Berthy, qui craint « quelques erreurs de manipulation ». Xavier Sidaner


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SUR LE TERRAIN SERVICES DÉCONCENTRÉS

Les préfets coincés dans les tuyaux budgétaires Désignés responsables des budgets des programmes déconcentrés depuis fin 2013, les préfets de région peinent à prendre la main sur les crédits régionaux. Ils dénoncent l’attitude tatillonne des ministères.

ne décision importante. » C’est ainsi que le préfet de la région Aquitaine, Michel Delpuech, analyse la décision du gouvernement de lui confier, à lui et à ses pairs, la main sur les budgets opérationnels de programme. En langage technique, ces « BOP » regroupent l’essentiel des crédits de fonctionnement, d’intervention et de personnels relatifs aux politiques publiques relevant des différents ministères : infrastructures de transports, immigration, paysage, eau et biodiversité, etc. Or, jusqu’à présent, le préfet de région n’était que l’ordonnateur secondaire, sorte de superviseur de ces fameux budgets de programme, donnant des délégations de signature aux directeurs régionaux des services déconcentrés pour faire tourner les services. Avec la décision du Cimap, « on franchit une étape dans le contrôle du préfet sur ses services », souffle un expert. Une belle ambition qui a sensiblement contrarié les directeurs centraux, inquiets, dit-on, à l’idée de perdre leurs prérogatives au bénéfice du préfet de région. Une régionalisation également pointée du doigt par les syndicats. De nouveaux horizons s’ouvrent pour les préfets. Désormais, « il aura un vrai pouvoir de décision et ne se contentera plus en quelque sorte de signer les chèques ou d’apposer son visa en bout de course », relève un directeur finan-

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62 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

cier de préfecture. Mieux, il prend la main bien plus tôt, s’invitant au stade du « dialogue de gestion » duquel il était jusqu’à présent exclu, ou auquel il était très imparfaitement associé. Ce sont en effet les directeurs régionaux qui étaient en contact direct avec les directeurs centraux, ou « responsables de programme », pour déterminer les moyens alloués aux services déconcentrés. Fini le petit tête-à-tête à deux. Le préfet, qui avait tout le loisir d’échanger avec ses directeurs régionaux, participera désormais collégialement et de manière active aux réjouissances. Un tel dialogue à trois est prévu et expérimenté depuis l’automne dans 5 régions*. Jean-François Carenco, préfet de la région Rhône-Alpes, n’y voit que des avantages : « Cela permet d’améliorer les rapports en amont et d’exposer ainsi nos priorités en direct avec les directeurs centraux », détaille-t-il. Un autre préfet se montre plus direct : « Si cela permet d’avoir à éviter de râler après coup pour obtenir des crédits en cours d’année, tant mieux ! » L’objectif est que les préfets de région puissent, en s’appuyant sur leurs directeurs, mettre en adéquation les moyens avec les missions qui sont les leurs sur leur territoire. Reste à transformer l’essai, en espérant que chacun des acteurs joue le jeu, pour dépasser le stade expérimental. Et faire en sorte que la déconcentration prenne tout son


JEAN-CLAUDE MOSCHETTI/RÉA

SUR LE TERRAIN I SERVICES DÉCONCENTRÉS

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, signe le pacte d’avenir pour la Bretagne avec le préfet de région, Patrick Strzoda (à gauche), le 13 décembre 2013.

sens. Car arrêter les crédits, c’est bien, mais encore faut-il pouvoir les répartir au mieux pour faire vivre au quotidien les services, et finalement appliquer les politiques publiques. « Répartition des crédits », « information », « gestion », « exécution » : l’ensemble de ce processus est censé conforter la coordination et la cohérence des politiques publiques. Sur ce plan, tout reste à faire, tant la gestion des services est complexe.

Absence de fongibilité Un seul chiffre. Malgré quelques assouplissements, en 2007, le nombre total de budgets était de 2 165, contre un peu plus de 1 000 encore aujourd’hui. Certaines directions départementales en gèrent encore une quinzaine, relevant de périmètres ministériels différents, mais parfois, ce chiffre grimpe jusqu’à 30. Trop nombreux, ils sont aussi cloisonnés verticalement, ce qui limite les possibilités de redéploiement des crédits entre programmes. « Il faut plus de souplesse », martèle Michel Delpuech. Cette absence de fongibilité paraît regrettable, d’autant que les administrations centrales prennent un malin plaisir à flécher les crédits dans « un luxe de détails », indique le préfet d’Aquitaine. « Il reste encore des instructions en

direct, ceci peut être justifié dans certains cas, mais cette pratique doit être limitée », complète Dominique Bur, ancien préfet de la région Nord. Répartir les crédits ne coule pas de source pour les préfets. Un directeur financier décrypte : « Vous pouvez obtenir 30 millions d’euros de l’administration pour une action relevant d’un BOP, mais l’administration va flécher les crédits par sous-actions, voire pour chaque ligne budgétaire en vous demandant de justifier chaque dépense. » Agaçant. Matignon, au courant de ces pratiques, souhaite y mettre un terme. À l’issue d’un comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (Cimap), en juillet 2013, décision avait été prise de simplifier la « cartographie » des BOP. « Le ministre du Budget est mandaté pour faire des propositions pour lutter contre le fléchage des crédits par les administrations centrales et pour donner plus de visibilité sur les moyens alloués en cours d’année », précisait le compte-rendu du Cimap. Les préfets disent être dans l’expectative. Tout aussi impatients aussi de pouvoir faire jouer la fongibilité en matière de gestion des ressources humaines. À l’heure actuelle en effet, les préfets de région n’ont pas toute latitude pour affecter les fonctionnaires en fonction des priorités locales. Le fait que les agents déconcentrés relèvent encore de leur ministère de rattachement #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 63


SUR LE TERRAIN I SERVICES DÉCONCENTRÉS

UNE EXPÉRIENCE PILOTE EN BRETAGNE

FRED TANNEAU/AFP

Épisode sensible sur un plan politique, la manifestation des « bonnets rouges » en Bretagne, à l’automne dernier, aura au moins été un bon test pour renforcer la coordination des politiques publiques. Comme l’explique le préfet de la région, Patrick Strzoda, « nous avons fait coïncider notre dialogue de gestion avec le pacte d’avenir pour la Bretagne ». Ainsi, le préfet, qui s’est personnellement impliqué sur 5 des 9 budgets opérationnels de programme (BOP) identifiés comme les plus stratégiques, a fait valoir, dit-il, ses « priorités, et demandé des moyens supplémentaires ». Un exercice bénéfique auquel ont participé collégialement les directeurs régionaux et le secrétaire général aux affaires régionales (Sgar). Au final, 5 postes ont ainsi été ouverts.

« IL RESTE ENCORE DES INSTRUCTIONS EN DIRECT, CETTE PRATIQUE DOIT ÊTRE LIMITÉE. » Dominique Bur, ancien préfet de la région Nord

complique la donne. Toute mutation d’un agent relevant de tel BOP vers un autre budget est impossible. Pas question, par exemple, de faire passer un agent du ministère de l’Éducation sur une mission relevant du ministère de l’Agriculture et vice-versa. Statut, procédures, suivi… Tout est compliqué. À l’intérieur d’un même BOP en revanche, les préfets retrouvent un peu d’air. Exemple : en cas de déséquilibre, ils peuvent diriger des agents d’une direction des territoires vers une direction régionale de l’environnement ou inversement. Le préfet de Bretagne, Patrick Strzoda, souligne : «Après consultation, je peux 64 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

très bien redéployer les postes budgétaires d’agents au niveau régional et faire passer un poste, relavant du ministère du Logement, sur l’un ou l’autre des quatre départements de la région, à condition de respecter le même domaine d’activité ministérielle. »

Syndicats aux aguets Mais même dans ce cas, « il faut en passer par plusieurs caps pour transférer un agent d’une mission à une autre », explique un préfet. « Il faut que tout le monde soit d’accord : les salariés comme les responsables hiérarchiques », pointe Alain Parisot, secrétaire national de l’Unsa, qui rappelle que les préfets sont tenus au respect des plafonds d’emplois. Les syndicats, aux aguets, s’attendent à davantage de va-et-vient de personnels dans les territoires dans les prochains mois. En cause, le programme de 50 milliards d’euros d’économies qu’élabore le gouvernement et que vont suivre les préfets. « Ils vont certainement devoir faire des économies importantes en rendant beaucoup de postes, mais ils auront toute latitude pour le faire à l’échelle de tous les services de l’État de la région », prédit Pascal Pavageau, secrétaire confédéral de Force ouvrière. Une inquiétude pour les syndicats, un véritable défi pour les préfets. Xavier Sidaner * L’expérimentation est menée dans 5 régions : Aquitaine, Bretagne, Rhône-Alpes, Martinique, La Réunion.


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LE CLUB DES ACTEURS

DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

RENCONTRE

ÉCHANGE D’EXPÉRIENCE

Le Club organise tout au long de l’année des rencontres informelles entre ses membres et des acteurs publics de premier plan.

En toute indépendance, acteurs et observateurs de premier niveau y débattent du contenu et des effets de l’action publique.

RETROUVEZ LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE sur www.acteurspublics.com/club/club-des-acteurs-de-la-performance-publique LES MEMBRES DU CLUB

ACTION Véritable laboratoire où s’analysent les initiatives d’aujourd’hui et les stratégies de demain, le Club est une base pour l’action. VOTRE CONTACT : BASTIEN BRUNIS AU 01 46 29 29 24 BBRUNIS@ACTEURSPUBLICS.COM


LA PAROLE

de la performance publique dans La Newsletter d’Acteurs publics et sur www.acteurspublics.com

Didier Menusier rejoint Capgemini Consulting

L’INTERNET OF EVERYTHING, LEVIER DE VALEUR POUR LE SERVICE PUBLIC

Didier Menusier, 49 ans, ingénieur Arts et Métiers, prend la tête du pôle « Secteur public » du cabinet Capgemini Consulting, l’entité de conseil en stratégie et transformation du groupe Capgemini. Directeur associé, il rejoint l’équipe mondiale des vice-presidents de Capgemini Consulting. Présent dans plus de 40 pays, Capgemini est l’un des leaders mondiaux du conseil, des services informatiques et de l’infogérance. Les 3 600 consultants de Capgemini Consulting travaillent avec tous types d’organisations pour les aider à relever les défis de la transformation numérique. www.capgemini-consulting.com

Dans un contexte où le secteur public doit à la fois optimiser ses dépenses et améliorer ses performances, une étude Cisco vient confirmer l’enjeu de l’Internet of Everything (IoE), c’est-à-dire la connexion des personnes, processus, données et objets, pour les services publics. Pour le service public français, il représenterait un potentiel de plus de 130 milliards d’euros de levier de valeur. L’étude de Cisco identifie un potentiel de 3 300 milliards d’euros* de valeur pour le secteur public dans le monde d’ici 2022. En Europe, la France serait le pays qui aurait le plus à gagner de l’IoE, avec précisément 131,5 milliards d’euros (128 milliards d’euros pour l’Allemagne et 124,9 milliards pour le Royaume-Uni). Ce bénéfice repose sur des applications et usages concrets générant économies et bénéfices pour les services publics et leurs usagers. Ainsi, en France, les 5 premiers leviers identifiés sont la mobilité et la collaboration des agents du secteur public (58,4 milliards d’euros), le suivi des maladies chroniques (12,3 milliards d’euros), la cybersécurité (10,6 milliards d’euros), le télétravail (7,3 milliards d’euros) et l’éducation (6,1 milliards d’euros). Pour Paris et l’Île-de-France, le potentiel de l’IoE est évalué à lui seul à 32,7 milliards d’euros. Pour Robert Vassoyan, directeur général de Cisco France, cette étude démontre que l’IoE constitue un enjeu pour notre économie, y compris pour le secteur public. C’est pourquoi, tout gouvernement, toute administration, toute collectivité doit dès maintenant intégrer l’IoE comme élément stratégique de sa gestion et de son développement. Au-delà de la qualité du service aux usagers, la performance du secteur public d’une région, d’une ville est aujourd’hui prise en compte par les investisseurs étrangers. L’attractivité et la compétitivité de la France dépendent de notre capacité à mettre en place des infrastructures performantes et innovantes.

Didier Menusier didier.menusier@capgemini.com

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VINCENT BAILLAIS

AUX EXPERTS

Retrouvez chaque mardi les tribunes des membres du Club des acteurs

* Le rapport Cisco sur l’Internet of Everything : http://goo.gl/i5pQax

Police et médias sociaux Lors de l’attentat du marathon de Boston en avril dernier, la police a tweeté en temps réel pour informer les habitants et annoncer l’arrestation de l’auteur. Des initiatives similaires commencent à voir le jour en France. Ces nouveaux outils sont un puissant canal de communication entre la police et les citoyens et un formidable outil de lutte contre la délinquance. Mais les internautes sont-ils prêts à suivre ? Quels sont les bénéfices pour la police ?

Une enquête menée par Accenture en Europe, aux États-Unis et Canada révèle que plus de 70 % des internautes souhaitent pouvoir interagir et établir un réel dialogue avec la police via les canaux numériques et près de 90 % estiment qu’ils sont des leviers importants dans la lutte contre la criminalité. Les médias sociaux permettent en effet une diffusion ultrarapide de l’information et sont un mode de communication complémentaire des médias traditionnels. La police

peut ainsi partager des conseils de prévention, établir des relations de confiance avec la population et joindre des groupes de citoyens spécifiques. La pratique des médias sociaux, associée aux technologies appropriées, permet surtout l’accès à une quantité incroyable d’informations, de nombreux citoyens vivant désormais une partie de leur vie en ligne. Les médias sociaux sont déjà utilisés par le crime, ils devraient donc logiquement avoir une place de choix dans l’arsenal

tactique de la police. La grande quantité d’informations à disposition des services de police peut leur permettre d’identifier et localiser des témoins ou suspects comme lors des émeutes de Londres. Et grâce à des outils d’analyse, la police peut aller plus loin et dresser des tendances, appréhender une ambiance sociale. Jérôme Vercaemer, directeur exécutif, activité service public et santé d’Accenture jerome.vercaemer@accenture.com

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 67


2014

LES RENCONTRES DES ACTEURS PUBLICS

les

1 I2 I 3 juillet 2014

au Conseil économique, social et environnemental

LE RENDEZ-VOUS ANNUEL DES DÉCIDEURS

DES TROIS FONCTIONS PUBLIQUES ÉTAT - TERRITORIALE É T - HOSPITALIÈRE Programme et inscription sur acteurspublics.com/rencontres


RENCONTRE AVEC

VINCENT BAILLAIS

Laurent de Jekhowsky

VINCENT BAILLAIS

ASSURER LA COHÉRENCE DES SERVICES DE BERCY Le secrétaire général des ministères économiques et financiers, Laurent de Jekhowsky, a présenté aux membres du Club la démarche de modernisation et de rationalisation engagée à Bercy.

Assurer le pilotage, l’animation et la gestion de 25 services regroupant près de 150 000 agents – dont 10 000 au niveau central – placés sous l’autorité de 4 ministres et de 3 ministres délégués. Telle est la mission confiée à Laurent de Jekhowsky, que le secrétaire général des ministères économiques et financiers a lui-même présentée, le 18 mars, aux membres du Club des acteurs de la Performance publique réunis à Bercy. Les services des ministères sont lancés depuis plusieurs mois dans une démarche de rationalisation et

LE PROCHAIN RENDEZ-VOUS DU CLUB

de modernisation. Le défi principal consiste pour le secrétaire général à faire converger les exigences de la Modernisation de l’action publique (MAP) et la nécessaire rénovation des structures de Bercy dans un contexte de fortes contraintes budgétaires. Pour cela, il s’appuie sur l’évaluation transversale de plusieurs politiques publiques : l’aide économique aux entreprises, la gestion de la sécurité sanitaire des aliments ou encore le pilotage en faveur de l’économie sociale et solidaire. Plusieurs chantiers de simplification sont également en marche,

à l’image du « Dites-le nous une fois », qui vise à supprimer les redondances dans les demandes d’information adressées par l’administration. L’autre grand dossier de Laurent de Jekhowsky est celui de la rationalisation de la gestion publique. Il s’agit notamment de diminuer les délais de paiement, de renforcer la mutualisation des ressources, de revoir la politique immobilière de l’État et sa politique d’achats et d’optimiser la chaîne de gestion de la paie des fonctionnaires. Des missions hautement stratégiques.

Julien Rencki, secrétaire général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) MALENFER

Laurent de Jekhowsky, secrétaire général des ministères économiques et financiers

Alors que la Modernisation de l’action publique entre dans une nouvelle phase avec l’objectif de 50 milliards d’euros d’économies d’ici 2017, Julien Rencki, secrétaire général pour la modernisation de l’action publique, sera l’invité du Club en avril. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 69


LA PAROLE AUX EXPERTS

Randstad Awards

2014 Et l’employeur public de l’année est…

Le ministère de la Culture et de la Communication est désigné employeur public 2014. C’est le résultat des Randstad Awards, qui distinguent chaque année les employeurs les plus attractifs auprès du grand public.

PHOTOS : DR

Le groupe Randstad France, deuxième acteur mondial en ressources humaines, organise chaque année les Randstad Awards, destinés à élire les employeurs français les plus attractifs de l’année. La cinquième édition du palmarès a été dévoilée le 20 mars dernier.

Marc Oberlis, sous-directeur des métiers et des carrières au secrétariat général du ministère de la Culture et de la Communication, et Abdel Aïssou, directeur général du groupe Randstad France. 70 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

Les critères de la marque employeur Cette étude de référence est réalisée par ICMA, institut indépendant. Plus de 11 000 personnes représentatives de la population active se sont prononcées sur près de 250 grandes organisations françaises, pour évaluer 17 critères majeurs dont le salaire, la sécurité de l’emploi, les perspectives de carrière, la responsabilité sociale… Pour la troisième année consécutive, l’attractivité employeur des ministères a été mesurée. Comme en 2013, le ministère de la Culture et de la Communication a été désigné comme le plus

attractif parmi l’ensemble des ministères français, preuve de son excellente image auprès du grand public. 50 % des personnes interrogées connaissent l’instituion et 60 % souhaiteraient y travailler, dont 67 % de femmes. Pour François Béharel, président du groupe Randstad France, « la marque employeur est un travail de longue haleine qui, pour être payant, nécessite davantage qu’une conjoncture favorable ». P o u r t o u t e m p l o y e u r, l a marque employeur constitue ainsi un élément essentiel du rayonnement d’une structure. Service public : les ministères toujours aussi attractifs L’ é t u d e s ’ i n t é r e s s e à l’attractivité globale des employeurs (publics et privés) – c’est d’ailleurs Airbus qui remporte le Randstad Award de l’entreprise privée la plus attractive. Cependant, si les entreprises privées sont attractives pour 35 % des personnes interrogées, on


CLASSEMENT 2014 1 Ministère de la Culture et de la Communication 2 Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche 3 Ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et de la Vie associative 4 Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie 5 Ministère des Affaires étrangères 6 Ministère de la Défense 7 Ministère des Droits des femmes 8 Ministère de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme 9 Ministère des Outre-mer 10 Ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social constate que les ministères le sont encore plus, avec 53 % d’attractivité déclarée (48 % en 2013). De là à dire que 53 actifs sur 100 souhaitent devenir fonctionnaires, il n’y a qu’un pas. Et la sécurité de l’emploi n’est pas le seul critère pris en compte par les personnes interrogées. Toujours aussi populaires, les ministères bénéficient ainsi d’une attractivité dont le socle repose sur des valeurs intangibles, indépendantes des cycles économiques. Il s’agit notamment des valeurs d’égalité et d’intérêt général, inhérentes à leurs missions de service public. Cet atout indéniable pour attirer les talents, Abdel Aïssou, directeur général du groupe Randstad France et ancien haut fonctionnaire, estime que les ministères doivent le mettre davantage au service de leur capacité à recruter. « Les ministères enregistrent leurs taux d’attractivité les plus faibles auprès de deux catégories stratégiques :

les plus jeunes, c’est-à-dire les 18-24 ans (44 %), et les plus diplômés, soit celles et ceux dont le niveau d’études est supérieur à bac + 5 (42 %). Ces scores doivent inciter les ministères à développer et déployer leur marque employeur auprès de ces populations en appui sur les nouveaux outils, numériques notamment. L’enjeu est de préserver leur capacité à attirer les jeunes diplômés à l’heure où les départs à la retraite vont aller croissant et les recrutements devenir plus contraints sous l’effet des options budgétaires. » Le public comme alternative pleine et entière au privé Autre point saillant de ce volet des Randstad Awards, la comparaison public-privé. Parmi les cinq critères qui, selon le grand public, déterminent leur attractivité respective, les entreprises et les ministères en partagent quatre, soit un de plus qu’en 2013 : ces deux employeurs sont perçus comme étant financièrement sains,

offrant des emplois intéressants et des formations de qualité avec, à la clé, des perspectives de carrière. Ces similitudes semblent conforter la thèse d’un effritement de la barrière qui a longtemps prévalu entre deux secteurs souvent opposés dans le discours commun. Les personnes interrogées perçoivent les ministères, et avec eux l’ensemble du service public, comme une alternative pleine et entière à une carrière dans le privé. Conclusion : en termes RH, la dichotomie public-privé est sans doute inopérante. Les ministères les plus attractifs dirigés par des femmes Si le ministère de la Culture et de la Communication se succède à lui-même en tête du palmarès, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche se hisse en deuxième position. À noter que, cette année comme l’an passé, les ministères du top 3 ont tous une femme à leur tête.

LE TOP 5 DES CRITÈRES D’ATTRACTIVITÉ LES PLUS COMMUNÉMENT ASSOCIÉS AUX MINISTÈRES 1 Sécurité de l’emploi 2 Emplois intéressants 3 Perspectives de carrière 4 Santé financière 5 Formations de qualité

Découvrez les Randstad Awards et accédez au détail de l’étude sur http://www.randstad.fr/ randstad-awards

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 71


le club des acteurs

DES TERRITOIRES DURABLES Quelles actions pour un développement durable des territoires ? Quels modèles ? Quelles perspectives et quelles solutions pour l’avenir ? Pour l’imaginer et en débattre, Acteurs publics a créé le Club des acteurs des Territoires durables. Pour toute information sur le Club des acteurs des Territoires durables et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com

FRED MARVAUX/RÉA

précision les conditions dans lesquelles les pratiques d’alternance sont mises en œuvre afin d’éviter des catégorisations erronées, particulièrement lorsqu’il s’agit d’un premier contact avec l’entreprise et plus largement avec un univers professionnel.

L’ALTERNANCE DANS L’ÉDUCATION La part insuffisante réservée à la découverte professionnelle dans l’acquisition des connaissances ne permet pas à l’alternance d’être une pratique à même de faciliter les processus apprentissages et de contribuer à l’amélioration des choix d’orientation professionnelle. Établie sur des fondements définis avec rigueur, l’alternance, pratiquée dans le cours de l’acquisition du socle des connaissances de compétences et de culture, et poursuivie lors de l’extension de ce socle, présenterait le double avantage de favoriser les acquisitions et de faire apparaître l’alternance comme une voie naturelle de formation tout au long de la vie et cela pour tous les niveaux de qualification ou de diplôme. DES ÉCHANGES ORGANIQUES L’alternance doit impérativement construire sa pratique sur des échanges organiques entre les professionnels du monde du travail et les professionnels de l’enseignement. Il convient de définir avec

72 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

UN ENCADREMENT MÉTIER La formation professionnelle par alternance requiert, à la fois, un encadrement académique et un « encadrement métier ». Le premier, pour situer les connaissances impliquées par les tâches professionnelles dans la chaîne des connaissances acquises ou à acquérir. Le second, pour les qualifier, aménager le cadre de leur accueil et proposer le scénario pertinent pour leur utilisation et leur développement en fonction de l’objectif professionnel poursuivi, leur donnant ainsi, par l’expression même de leur utilité, une signification sociale. Cela implique la mise en place de structures de concertation étroite entre le monde académique et le monde économique. UNE DÉMARCHE PÉDAGOGIQUE Soutenue par des formations initiales, équipées des mêmes principes pédagogiques, la formation par alternance, par la vertu de son rapport à l’action en milieu professionnel, devrait être en mesure d’infléchir voire de corriger certaines des trajectoires qui éloignent de nombreux jeunes de la maîtrise des connaissances, de la qualification et, in fine, de l’insertion professionnelle. Le Conseil économique, social et environnemental prône l’alternance comme une démarche pédagogique en mesure, non de résoudre tous les problèmes soulevés, mais d’enrichir les contextes d’acquisition des connaissances afin de permettre a tous les jeunes de bénéficier de perspectives de réussite plus nombreuses. Jean-Marc Monteil, personnalité associée au CESE, section de l’éducation, de la culture et de la communication, rapporteur de l’étude sur l’alternance dans l’éducation, professeur titulaire de la chaire « Sciences du comportement et applications » au Conservatoire national des arts et métiers


RENCONTRE AVEC

VINCENT BAILLAIS

Bruno Léchevin

L’ADEME, ACTEUR INCONTOURNABLE DANS LES TERRITOIRES Grand spécialiste des questions énergétiques, Bruno Léchevin n’a pas usé de la langue de bois pour faire partager ses convictions aux membres du Club des acteurs des Territoires durables réunis le 6 mars au Conseil économique, social et environnemental. L’ancien dirigeant syndical CFDT et ex-membre de la Commission de régulation de l’énergie a succédé en mars 2013 à François Loos à la présidence de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Le Premier ministre avait alors déclaré : « Son engagement en faveur de la protection des consommateurs et des économies d’énergie, ainsi que pour la lutte contre la précarité énergétique le désignent

LE PROCHAIN RENDEZ-VOUS DU CLUB

pour l’exercice de cette mission ». Devant les membres du Club, Bruno Léchevin a détaillé les défis auxquels est confronté l’opérateur public qui, depuis sa création en 2003, est incontournable. HOMME D’ENGAGEMENT

En période de disette budgétaire, le président de l’Ademe a souligné en substance que l’agence n’était pas à vendre, ni globalement ni par appartements. Il est vrai que dans le cadre du débat sur le futur texte de décentralisation, les représentants des régions avaient fait valoir qu’elles seraient prêtes à récupérer les antennes régionales de l’Ademe… Or pour Bruno Léchevin, l’une des forces de l’Ademe est

précisément son implantation à la fois nationale et régionale. L’agence, dont les ressources sont très convoitées (2,6 milliards d’euros sur trois ans pour soutenir les investissements d’avenir), va jouer un rôle très important dans le futur débat sur la transition énergétique. Un rendezvous que Bruno Léchevin attend avec impatience et qu’il espère placé sous le signe de l’ambition et du pragmatisme. L’important, selon lui, est d’avoir un cap clair. Et parce qu’il reste un homme d’engagement, Bruno Léchevin en a profité pour évoquer son action auprès de l’ONG Électriciens sans frontières, dont il est membre fondateur et vice-président.

VINCENT BAILLAIS

Tout juste un an après sa nomination à la tête de l’Ademe, le président de l’opérateur public a détaillé ses priorités, ainsi que les enjeux de la future loi sur la transition énergétique.

Bruno Léchevin, président de l’Ademe, a rencontré les membres du Club le 6 mars.

Éric Delzant, délégué interministériel à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (Datar) Alors que les territoires sont au cœur de la modernisation de l’action publique et que le gouvernement crée le futur Commissariat général à l’égalité des territoires, Éric Delzant sera l’invité du Club le 28 avril. #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 73


le club des acteurs DE LA SANTÉ PUBLIQUE

Acteurs publics a créé le Club des acteurs de la Santé publique pour permettre à tous les acteurs de la santé publique et de la protection sociale de contribuer à la réflexion sur l’avenir du système social français. Pour toute information sur le club des acteurs de la Santé publique et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com

ANNE-CHRISTINE POUJOULAT/AFP

Système de santé

La dernière étude Deloitte sur la perception du système de santé par les Français met en évidence leur intérêt grandissant pour la prévention, la coordination des acteurs, l’accessibilité aux soins et l’e-santé. Cinq enseignements peuvent être tirés de cette étude*. Favoriser la maîtrise du budget santé et l’accessibilité aux soins. 89 % des Français se disent intéressés par un service d’accès à un réseau de professionnels de santé à des tarifs avantageux ou négociés par leur mutuelle. 48 % d’entre eux seraient d’ailleurs prêts à payer un supplément pour bénéficier d’un tel réseau. Assurer une meilleure efficience de la coordination des acteurs, du premier recours, de l’action sanitaire et du médico-social grâce à une refonte du parcours santé. 73 % des Français jugent les professionnels de santé comme étant les plus à même de communiquer sur la prévention et l’éducation ; les médecins référents restent pivots

de l’accompagnement du patient dans le parcours santé et sont considérés comme la source d’information privilégiée dans le choix d’un établissement par 75 % des Français. Renforcer et rendre plus visible la prévention santé pour mieux gérer les risques. Pour 92 % des Français, la prévention retarderait l’entrée en dépendance et peut aider à réduire déficit de l’assurance maladie et les coûts des traitements. Les mutuelles apparaissent comme des acteurs légitimes en matière de prévention et les Français attendent fortement de leur part des services dans ce domaine. Proposer des services innovants et à forte valeur ajoutée pour le patient : l’e-santé à la traîne en matière d’usages. En effet, deux Français sur trois considèrent que l’e-santé peut limiter les coûts liés aux transports sanitaires et à leurs déplacements par leurs propres moyens, et 82 % des Français estiment qu’elle est un moyen efficace pour améliorer la coordination des professionnels de santé. Répondre aux enjeux de l’ANI grâce à la supplémentaire santé. La surcomplémentaire santé présente un potentiel très intéressant : en effet, 49 % des Français pourraient y avoir recours pour augmenter le niveau et 26 % pour bénéficier de nouveaux services, comme par exemple la coordination des soins, des services d’assistance, de prévention, des services d’accompagnement des personnes dépendantes. Étude coordonnée par Michel Sebbane, associé conseil secteur public santé et social chez Deloitte Jean-François Poletti, associé conseil secteur santé, assurances et mutuelles chez Deloitte * Étude administrée par l’Ifop à partir d’un panel de plus de 2 000 Français sur leur perception du système de santé et leurs opinions en matière de potentielles voies d’amélioration

PROTECTION SOCIALE DES AGENTS TERRITORIAUX L’Observatoire social territorial (OST) de la Mutuelle nationale territoriale vient de publier sa nouvelle étude : « La reconnaissance non monétaire au travail, un nouveau territoire managérial ». Une étude qualitative pour comprendre les ressorts de la reconnaissance au travail liés aux attentes des agents et donner des pistes d’action aux managers territoriaux. 74 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105


87 % des Français plébiscitent la prévention et 40 % d’entre eux sont prêts à payer un supplément à leur mutuelle pour bénéficier de services de prévention 88 % des Français souhaitent la mise en place de structures de proximité regroupant plusieurs professionnels de santé Plus de 80 % des Français sont favorables à l’utilisation de l’e-santé 90 % des Français jugent essentielle la limitation des dépassements d’honoraires L’accord national interprofessionnel (ANI) est très bien accueilli par 78 % des Français et 49 % d’entre eux pourraient avoir recours à une surcomplémentaire

Découvrez la synthèse de l’étude : http:// goo.gl/QBb67r

BSIP/AFP

EN CHIFFRES

FONCTION PUBLIQUE HOSPITALIÈRE : QUELLES ÉVOLUTIONS ? Le vieillissement programmé de la population française entraînera-t-il une augmentation des effectifs de métiers de la santé ? La nouvelle approche de ce fait démographique a-telle déjà des conséquences sur les profils recherchés ? UNE FILIÈRE D’AVENIR À l’image de la population qu’elle soigne, la fonction publique hospitalière change. Alors que 6,5 millions de Français seront âgés de 80 ans ou plus à l’horizon 2035, les pouvoirs publics prennent depuis le début des années 2000 la mesure des besoins qui seront nécessaires pour faire face aux besoins de cette population. Le Rapport Broussy, le conseiller « personnes âgées » de la campagne électorale de François Hollande, indique que la silver economy pourrait créer 300 000 emplois à terme sur le territoire français. La Loi HPST de 2009 a introduit la possibilité de recruter aux postes de direction des établissements de santé des

profils non fonctionnaires, pouvant bénéficier d’une expérience dans le secteur privé. Malgré une certaine « rigidité » fustigée par le Rap p ort Hénart d e 2 0 1 1 , le secteur public médical cherche à se rénover, mais peine toujours à recruter. Les postes d’infirmiers et d’aidessoignants sont ainsi en pointe des profils recherchés. D’autre part, la Fédération hospitalière de France s’est ainsi engagée à proposer 9 700 jeunes en emplois d’avenir d’ici fin 2015, afin d’ouvrir ses portes à de nouveaux profils moins qualifiés dans les personnels techniques. NOUVELLES TECHNOLOGIES, NOUVELLES COMPÉTENCES L’évolution, pour la fonction publique de la santé, n’est pas seulement quantitative, mais aussi qualitative. L’apport des TIC dans la politique de soins n’est plus à prouver, mais tend à résoudre aujourd’hui un nombre toujours plus grand d’équations de l’hôpital : soins à distance

pour pallier le manque de lits disponibles, diagnostics plus précis et suivi optimal et assisté des patients sont les exemples les plus parlants. Ce recours plus fréquent à la technologie entraîne l’apparition de profils auparavant peu courants dans le secteur médical : responsable de systèmes d’informations, informaticien, biostatisticien… Les formations ne sont pas en reste, puisque de plus en plus d’instituts, à l’instar de Sup’ Santé à Lyon, proposent désormais des modules de « data management » pour préparer ses étudiants à leurs futures responsabilités. À l’image de la société et de la population, les besoins de la fonction publique hospitalière changent, et offrent bien des perspectives d’emploi pour aujourd’hui et pour les années à venir. Gilles Cavallari, directeur général de Monster France, Espagne, Belgique et Luxembourg Gilles.cavallari@monster.fr

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 75


CHAQUE JOUR LA FRANCE

DES POUVOIRS

SUR TOUS VOS ÉCRANS

ACTEURSPUBLICS.COM 76 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105


Rubrique réalisée par Pierre Laberrondo

78

> VÉRONIQUE BÉDAGUE-HAMILIUS

82

81

LE PRÉFET DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

81

LE CHAMBELLAN DU MINISTÈRE DU TRAVAIL

Étienne Guyot, toujours parisien

83

EY débauche à la DGFIP

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UNE « BUDGÉTISTE » RECRUTÉE AU SAMU SOCIAL

85

COUP DE JEUNE À RADIO FRANCE

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 77


LA FRANCE DES POUVOIRS RENCONTRE AVEC

> VÉRONIQUE BÉDAGUE-HAMILIUS 78 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105


VINCENT BAILLAIS

u’on se le dise, Véronique BédagueHamilius est mo-ti-vée. À 50 ans, la patronne de l’administration de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris pendant sa seconde mandature (2008-2014) ne boude pas son plaisir alors que débute sa nouvelle mission : fusionner les deux opérateurs du commerce extérieur, Ubifrance et l’Agence française pour les investissements internationaux. L’un des gestes forts du pouvoir « hollandais » pour tenter de reconquérir le monde des entreprises. Après l’alternance du printemps 2012, cette haute fonctionnaire issue de l’ENA et de l’Essec aurait pu prétendre à une destinée plus classique, pourquoi pas la prestigieuse direction du budget à Bercy ? Seulement voilà, Véronique Bédague-Hamilius s’est piquée de social. « Ce que j’aime, c’est gérer les équipes. Le dialogue social, écouter, convaincre, j’adore ça ! » lâche-t-elle. Cette ancienne économiste du Fonds monétaire international n’avait pas encore pris ses nouvelles fonctions qu’elle

Q

MO-TI-VÉE ! Secrétaire générale de l’administration de la mairie de Paris pendant le second mandat de Bertrand Delanoë, Véronique BédagueHamilius est aujourd’hui chargée de piloter la fusion sensible de deux opérateurs de Bercy.

Adjointe au chef du bureau « Budget des ministères de l’Industrie » à la direction du budget

Économiste auprès du FMI à Washington

1992

1994

recevait déjà les dirigeants de ces deux opérateurs et se faisait raconter par le menu l’histoire de leurs institutions, aux cultures très différentes. Qui se rappelle par exemple qu’Ubifrance a déjà connu deux plans sociaux ces vingt dernières années ? Pour l’instant, l’exécutif ne lui a pas demandé de tailler dans les effectifs – 1 525 agents pour les deux opérateurs. La priorité immédiate reste la fusion sur le plan juridique : « On va sans doute me demander de bouger des choses, mais je bougerai quand je saurai ou je vais », assure-t-elle. À elle aussi de repenser les relations avec les partenaires, comme les chambres de commerce et d’industrie ou les régions. Et bien sûr aussi avec les réseaux du Trésor et des ambassadeurs, alors même que Bercy et le Quai d’Orsay se livrent une guéguerre d’influence aux conséquences peu prévisibles.

Mais la navigation par gros temps, Véronique Bédague-Hamilius connaît bien. Gérer l’administration de Paris, la plus grosse collectivité de France (50 000 agents) n’avait rien d’une sinécure. Bertrand Delanoë lui a fait confiance et elle lui en sait gré, d’abord en la nommant à la tête de la direction des finances, en 2002. Alors qu’elle songe sérieusement à aller tâter les finances privées à Londres, le maire lui propose après sa réélection de 2008 le poste de secrétaire générale, fonction prestigieuse pour laquelle elle n’était pas pressentie. Reprise en main de la com’ interne Cette mère de deux enfants a très vite compris que pour réussir, il lui fallait d’abord reprendre la main sur la communication interne. Histoire de ne plus apprendre le matin dans Le Parisien les dernières péripéties de l’empire municipal… « Je découvrais ce qui ne se passait pas bien dans la page “Paris”. Ce n’était pas possible. Je ne savais pas qu’il y avait un chantier, je ne savais pas qu’il était arrêté ni pourquoi ! » La création d’un tableau de bord rempli tous les vendredis soirs par ses 22 directeurs afin d’organiser la remontée d’informations lui a permis de respirer. Quitte à rogner un peu sur leur autonomie. « Le fait de savoir permet de “transversaliser”, d’anticiper et de prévenir les dysfonctionnements. » Dans le même style, la secrétaire générale adorait se rendre, un après-midi tous les quinze jours, sur le terrain à la rencontre des agents, parfois aiguillée par les syndicats. « Au début, ça semait la panique pendant cinq minutes. Et puis, ils se sont habitués… » sourit-elle. À l’écouter raconter son expérience parisienne, se dessine le portrait d’une femme d’autorité qui a aimé s’imposer à sa place de « SG » dans un écosystème de pouvoir complexe où chaque composante interagit l’une avec l’autre : le maire et son cabinet, les adjoints, les maires d’arrondissement, les directeurs. Une « jungle » dont Véronique Bédague-Hamilius est sortie renforcée. Voilà cette sémillante quinqua armée pour la suite… Pierre Laberrondo

Conseillère des ministres Laurent Fabius et Florence Parly à Bercy

Directrice des finances et des affaires économiques à la ville de Paris

Secrétaire générale de la ville de Paris

Chargée de la fusion de l’Agence française pour les investissements internationaux avec Ubifrance.

2000

2002

2008

2014

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 79


DROIT

DÉFENSE

Caroline Martin a pris la présidence de la 8e soussection de la section du contentieux du Conseil d’État en remplacement d’Alain Christnacht.

Le commandement de la mission de l’Union européenne d’aide à la formation et la réorganisation des forces armées maliennes a été confié au général de brigade français Marc Rudkiewicz.

Conseiller à Bercy des ministres Pierre Moscovici et Bernard Cazeneuve, Laurent Martel obtient, à 31 ans, le poste de sous-directeur de la gestion fiscale des entreprises.

UN CONSEILLER DE VICTORIN LUREL REJOINT UN RÉGULATEUR

Boken recrute au Conseil d’État

M

embre du Conseil d’État, *Hugues Hourdin* a rejoint le cabinet privé Boken en qualité d’avocat associé pour y développer l’activité de conseil et de contentieux en droit public. Juriste depuis sa sortie de l’ENA en 1981, il a d’abord officié dans les juridictions administratives. Chargé de mission auprès d’Alain Juppé au secrétariat général du RPR de 1989 à 1991, Hugues Hourdin a ensuite travaillé avec Édouard Balladur, à son cabinet à Matignon, en 1993, comme conseiller pour les affaires sociales. Il a ensuite été promu au Conseil d’État au tour extérieur. Sous la Présidence Sarkozy, ce haut fonctionnaire a à nouveau travaillé avec Édouard Balladur, en 2007 et 2008, comme rapporteur général du comité de réflexion sur la modernisation des institutions, puis du comité pour la réforme des collectivités. Membre de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) en 2008, Hugues Hourdin a présidé, de 2010 à 2013, la Société autoroute et tunnel du Mont-Blanc. DR

M

80 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

FISCALITÉ DR

ILS BOUGENT

DR

LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

agistrat de la Cour des comptes, conseiller pour les affaires économiques et la lutte contre la vie chère au cabinet du

ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, *Thierry Dahan* s’est vu confier l’une des 4 vice-présidences de l’Autorité de la concurrence. Les 3 autres vice-présidents – Élisabeth Flüry-Hérard, Emmanuel Combe, Claire Favre – n’étaient pas concernés par ce renouvellement. Le président, Bruno Lasserre, vient lui aussi d’être renouvelé à la tête de cette autorité administrative indépendante chargée de détecter et sanctionner des pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position dominante), de contrôler des opérations de concentration (comme en ce moment dans la téléphonie), ainsi que d’émettre des avis, des recommandations publiques afin d’améliorer le fonctionnement des marchés. Thierry Dahan connaît bien le sujet de la concurrence pour avoir été rapporteur général auprès du Conseil de la concurrence – ancêtre de l’Autorité – pendant sept ans (2002-2009). Thierry Dahan, qui a débuté sa carrière comme enseignant au lycée français de Casablanca (1983-1987), évolue à la Cour des comptes depuis sa sortie de l’ENA en 1991. Délégué général aux affaires culturelles et au sport de la ville de Lyon en 1996, il conseille ensuite Élisabeth Guigou au ministère de la Justice (1999-2002). Depuis l’alternance socialiste, il était revenu en cabinet ministériel, auprès du ministre des Outre-mer, Victorin Lurel.


LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

EMPLOI

ENVIRONNEMENT

SANTÉ

La magistrate de la Cour des comptes Françoise Bouygard a été nommée directrice de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares) des ministères sociaux.

Adjoint au directeur général adjoint « administration, finances et gestion » de Pôle emploi, Jérôme Rivoisy devient directeur général adjoint chargé de la direction « Maîtrise des risques ».

La présidence de la sixième section (services et personnels) du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) a été confiée à Jean-Claude Ruysschaert.

Une inspectrice générale des affaires sociales, Véronique Wallon, prend la tête de la direction générale de l’agence régionale de santé (ARS) de Rhône-Alpes.

DR

SOCIAL

Le préfet de la sécurité routière e poste de délégué interministériel à la sécurité routière et de délégué à la sécurité et à la circulation routières est confié au

DR

L

préfet *Jean-Robert Lopez*, la place étant libre depuis le départ de son titulaire, le préfet Frédéric Péchenard, parti à l’inspection générale de l’Administration, place Beauvau. Ce proche de Nicolas Sarkozy, qui fut le patron de la police nationale sous le quinquennat précédent, s’est lancé dans la bataille

des municipales à Paris au côté de Nathalie Kosciusko-Morizet. Jean-Robert Lopez a fait partie des hauts fonctionnaires que le gouvernement Ayrault a promus dans le corps des préfets lors de l’alternance. Issu de la préfectorale, il occupe depuis août 2012 son premier poste de préfet de département et officiait dans le Territoire-de-Belfort, fief politique de l’ancien ministre de l’Intérieur Jean-

ACTEURSPUBLICS.COM

Pierre Chevènement. Jean-Robert Lopez a été, au cours de sa carrière, le chef de cabinet d’Alain Richard au ministère de la Défense de 1998 à 2001. Cet ancien inspecteur du Trésor avait rejoint l’administration de la ville de Paris après la victoire de Bertrand Delanoë aux municipales de 2001 et y a travaillé comme secrétaire général adjoint, puis comme inspecteur général de la ville. En 2009, il était revenu dans sa maison d’origine, le ministère de l’Intérieur, comme directeur de projet chargé de piloter au sein du ministère la Révision générale des politiques publiques (RGPP) pendant trois ans.

LE CHAMBELLAN DU MINISTÈRE DU TRAVAIL e ministre du Travail, Michel Sapin, vient de remplacer JeanDenis Combrexelle au poste de directeur général du travail

L

par *Yves Struillou*. Cet énarque de 53 ans, membre du Conseil d’Etat, qui officie depuis 2011 comme conseiller à la Cour de cassation en service extraordinaire, est aussi, depuis octobre dernier, membre du Conseil national de l’inspection du travail. Jean-Denis Combrexelle, 60 ans, conseiller d’État, avait été nommé en 2001, sous le gouvernement Jospin, directeur des relations du travail au ministère de l’Emploi puis, en 2006, directeur général du travail. Il fut maintenu à son poste sous la Présidence Sarkozy. Une longévité rare pour ce type de position

dans la haute fonction publique. Ces derniers mois, il a été en première ligne dans le dossier très sensible de la réforme de l’inspection du travail, contestée par certains syndicats et que le Sénat vient de retoquer. Dans ce contexte, le choix d’Yves Struillou ne passe pas inaperçu puisqu’il fut, dans une première vie, inspecteur du travail à la section d’inspection dans le département de l’Essonne (19841990). Par la suite, il réussit le concours de l’ENA et sort, à l’issue de sa scolarité en 1994, au Conseil d’État. Yves Struillou a ensuite conseillé Martine Aubry au ministère de l’Emploi sur les dossiers touchant à l’emploi (1998-2000).

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 81


LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

SOCIAL

Le docteur Carole Cretin, ancienne directrice départementale de la cohésion sociale de Paris, rejoint la Croix Rouge française comme directrice de l’action sociale.

L’universitaire et ancien recteur de l’académie de Guadeloupe Serge Guinchard a été porté à la présidence de la Mutuelle autonome générale de l’éducation.

DR

HUMANITAIRE

Conseiller général des établissements de santé à l’inspection générale des Affaires sociales, François Maury prend la direction générale de l’agence régionale de santé de Poitou-Charentes.

DR

ILS BOUGENT

SANTÉ

UNE « BUDGÉTISTE » RECRUTÉE AU SAMU SOCIAL DR

C

Un « trésorien »chez les mutualistes depuis 2010, *Paul Esmein*, 33 ans, quitte Bercy et rejoint le groupe d’assurance mutualiste privé Covéa au poste de directeur des acceptations en réassurance au sein de la direction générale « santé et prévoyance ». Cet ingénieur des Mines, formé sur les bancs de l’École nationale de la statistique et de l’administration économique (Ensae) et de l’Institut des actuaires, a débuté sa carrière en 2004 à l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (Acam) en tant que commissaire-contrôleur des assurances. En 2008, Paul Esmein entre à la direction générale du Trésor. D’abord comme adjoint au chef du bureau « Épargne et marchés financiers » en charge de la gestion d’actifs et de la titrisation puis, à partir de 2010, comme chef du bureau « Entreprises et intermédiaires d’assurance ».

82 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

DR

C

hef du bureau « Entreprises et intermédiaires d’assurance » à la direction générale du Trésor à Bercy

onseillère de synthèse au cabinet du ministre délégué au

Budget, Bernard Cazeneuve, *Caroline Maleplate* quitte Bercy et prend le poste de secrétaire générale du Samu social de Paris, organisé en groupement d’intérêt public et dirigé depuis décembre dernier par Christine Laconde, ex-directrice de cabinet de Marie-Arlette Carlotti au ministère délégué aux Personnes handicapées et à la Lutte contre l’exclusion. Fondé par le docteur Xavier Emmanuelli en 1993, le Samu social de Paris, présidé depuis octobre dernier par Éric Pliez, propose et développe une approche professionnelle pour lutter contre l’exclusion à l’origine des personnes dites isolées, mais également aujourd’hui des personnes en famille sans domicile fixe. Caroline Maleplate, X-Ensae, évoluait dans les cabinets de Bercy depuis l’alternance, d’abord au cabinet de Jérôme Cahuzac au Budget, puis à celui de Bernard Cazeneuve. Auparavant, cette haute fonctionnaire a débuté à la direction du budget à Bercy. Rédactrice au sein du bureau de la politique budgétaire en 2005, elle a ensuite été rédactrice au sein du bureau de l’emploi et de la formation professionnelle (2007-2008), puis cheffe du bureau des recettes en charge du suivi des recettes de l’État, du déficit public et de la politique des jeux d’argent et de hasard (2008-2010). Caroline Maleplate a ensuite occupé les fonctions de secrétaire générale de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais (RMN-GP), de 2010 à 2012.


FINANCES

ÉDUCATION

RÉGULATION

Sylviane Tarsot-Gillery, directrice générale déléguée de l’Institut français, s’est vue confier la direction générale de la Bibliothèque nationale de France.

Le patron de la Caisse des dépôts et consignations, Jean-Pierre Jouyet, a promu sa directrice de cabinet, Catherine Mayenobe, au poste de secrétaire générale de cet établissement.

Le gouvernement a nommé un nouveau recteur à l’académie de Dijon : Denis Rolland. Il était jusqu’ici recteur de la Guyane.

Chef du contrôle général économique financier, un corps d’inspection de Bercy, Charles Coppolani a été nommé président de l’Autorité de régulation des jeux en ligne.

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CULTURE

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LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

éinvesti par la gauche de son pouvoir de nomination des patrons des chaînes de télévision et des stations de radio publiques, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a désigné

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*Mathieu Gallet* à la présidence de Radio France. Il était le plus jeune des 6 candidats – 37 ans – et jusqu’ici patron de l’Institut national de l’audiovisuel (INA). Un choix qui

Coup de jeune à Radio France marque une volonté d’indépendance puisque Mathieu Gallet a réalisé une partie notable de sa carrière dans les cabinets ministériels de droite, sous les présidences de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy. Ce dernier l’avait nommé à la présidence de l’INA en mai 2010. Extérieur à la haute fonction publique, Mathieu Gallet avait rejoint l’INA après quatre ans en cabinet ministériel.

Conseiller technique au cabinet du ministre délégué à l’Industrie François Loos en 2006, il est appelé, après l’élection présidentielle de 2007, comme conseiller technique au cabinet de la ministre de la Culture et de la Communication Christine Albanel. Lors de l’arrivée de Frédéric Mitterrand rue de Valois en 2009, Mathieu Gallet est promu directeur adjoint de cabinet du ministre.

LE FINANCIER DE LA GENDARMERIE e poste de directeur des soutiens et des finances de la direction générale de la gendarmerie nationale vient d’être confié à un inspecteur général de l’administration de la

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ACTEURSPUBLICS.COM

Place Beauvau : *Philippe Debrosse*. Ce haut fonctionnaire remplace ainsi le général de corps d’armée Pierre Renault, qui était en place depuis trois ans. Cette direction est plus particulièrement chargée de l’approvisionnement et du soutien des formations de la gendarmerie. Philippe Debrosse, 55 ans, évolue à l’inspection générale

Mathieu Gallet a débuté comme adjoint au directeur du marketing et de la promotion internationale chez Erato Disques (Warner Music Group) en 1999. Responsable de l’administration des ventes internationales chez Pathé en 2000-2001, il est contrôleur de gestion au sein de Studiocanal au groupe Canal + (2001-2004), puis chargé de mission aux relations institutionnelles au sein du groupe Canal + (2004-2006).

d’Administration (IGA) depuis sa sortie de la promotion Averroes de l’ENA, en 2000. Cet ancien élève de l’école de commerce de Strasbourg a fait ses premières armes durant seize ans dans le privé, dans les secteurs de la grande distribution, puis de la vente par correspondance (1981-1997). Après sa sortie de l’ENA à l’IGA en 2000, Philippe Debrosse a officié dans ce corps d’inspection pendant quatre ans, avant de rejoindre Bercy et la direction de la réforme budgétaire, au sein de laquelle il a été chargé de la mise en place, par les opérateurs de l’État, de la loi organique relative aux lois de finances, la Lolf (2004-2006). Philippe Debrosse a ensuite travaillé à la Cour des comptes comme rapporteur extérieur (2004-2006). Il travaillait à nouveau à l’IGA depuis 2006.

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TRANSPORTS

INTÉRIEUR

Préfet délégué pour l’égalité des chances auprès du préfet de la région Nord-Pas-deCalais depuis trois ans, Pascal Joly vient d’être promu préfet du Territoire-de-Belfort.

Réseau ferré de France enregistre l’arrivée en son sein d’une nouvelle directrice générale adjointe « finances et achats » : Odile Fagot, une experte comptable venue de la SNCF.

Porté au mois de janvier à la présidence d’Adoma, Cyrille Schott devient le directeur de l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice.

*Serge Mucetti* se voit confier l’ambassade de France à Djibouti. Ce diplomate avait été remplacé en Centrafrique par Charles Malinas, jusqu’alors directeur de cabinet de Yamina Benguigui au Quai d’Orsay. Ce changement était intervenu au moment où la France s’apprêtait à dépêcher à Bangui près d’un millier de soldats français pour une durée de l’ordre de six mois. De la même manière, le gouvernement avait remplacé l’ambassadeur au Mali lors de l’intervention française dans ce pays. Serge Mucetti, qui a réalisé toute sa carrière au ministère des Affaires étrangères, avait obtenu son premier poste d’ambassadeur au sortir de la présidentielle de 2012, ce après avoir dirigé le cabinet de David Douillet (2011), puis d’Édouard Courtial au secrétariat d’État chargé des Français de l’étranger durant la dernière année de la Présidence Sarkozy. Il a aussi été consul général de France à Rabat, puis à Bruxelles.

UN FRANÇAIS DANS L’ÉQUIPE RENZI

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L’ambassadeur à Djibouti Écarté le 21 février de son poste de président du directoire de la Société du Grand Paris (SGP), le préfet *Étienne Guyot* rebondit à la direction générale de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Paris Île-de-France. Étienne Guyot a été remplacé à la tête du Grand Paris par Philippe Yvin, jusqu’alors conseiller du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et par ailleurs proche du président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, à qui l’on prête l’intention de briguer la présidence de la future métropole. L’opposition avait dénoncé un limogeage.

ouveau défi pour *Fabrice

Bakhouche.* Ce magistrat de la Cour des comptes, conseiller technique pour la communication et l’économie numérique au cabinet du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, depuis l’alternance de mai 2012, quitte Matignon et rejoint l’équipe du tout nouveau président du Conseil italien, le jeune et ambitieux Matteo Renzi. Ce dernier a pris les rênes

84 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

du gouvernement italien après avoir contraint son rival, Enrico Letta, à la démission. La mobilité à Rome de Fabrice Bakhouche, en lien avec la future présidence italienne de l’Union européenne – prévue au second semestre de 2014 –, avait été actée avant le départ d’Enrico Letta et confirmée après la nomination du nouveau président du Conseil. Spécialiste du numérique et des

FRED VIELCANET

PRÉFECTORALE DR

ILS BOUGENT

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LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

Étienne Guyot, Étienne Guyot avait été porté à la tête de la SGP en septembre 2011 alors qu’il était, depuis un an, le directeur de cabinet du ministre chargé des Collectivités territoriales Philippe Richert (2010-2011). Il a aussi été le directeur de cabinet du ministre de l’Espace rural et de l’Aménagement du territoire Michel Mercier, en 2009-2010. Étienne Guyot, ancien administrateur de la ville de Paris a, au cours de sa carrière, conseillé la secrétaire d’État aux Transports Anne-Marie Idrac (1995-1997), avant d’officier comme conseiller technique auprès du délégué

médias, Fabrice Bakhouche, 39 ans, a déjà derrière lui une riche carrière. Après avoir réussi le concours de secrétaire adjoint des affaires étrangères en 1998, cet ancien élève de l’IEP de Paris a fait ses premières armes à la direction des Amériques et des Caraïbes du Quai d’Orsay. Reçu au concours de l’ENA en 2001, il se forme au sein de la promotion René Cassin. Sorti de l’ENA à la Cour des comptes,


LA FRANCE DES POUVOIRS I NOMINATIONS

ARMEMENT

COMPTABILITÉ

La présidence de l’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) a été confiée à Philippe Ledenvic.

Adjoint spécialisé « innovationtransformation » au directeur de la stratégie à la direction générale de l’armement, Norbert Fargère devient le chef de l’inspection de cette direction.

Sous-directeur en charge des dépenses de l’État et des opérateurs au service comptable de l’État à la direction générale des finances publiques à Bercy depuis six ans, François Tanguy a été promu chef de ce service comptable.

SOCIAL Le pilotage du secrétariat général de la commission des comptes de la Sécurité sociale vient d’être attribué au magistrat de la Cour des comptes Christian Charpy, ex-patron de Pôle emploi. DR

ÉCOLOGIE

ACTEURSPUBLICS.COM

a direction générale des finances publiques (DGFIP), à Bercy, reste une administration très prisée par le secteur privé. La société d’avocats EY (ex-Ernst & Young) vient de procéder au recrutement, au sein de sa société d’avocats, d’un inspecteur général des finances,

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toujours parisien

Fabrice Bakhouche travaille pendant quatre ans rue Cambon. Il effectue ensuite une première mobilité à Bercy et officie comme chef du bureau « La Poste et France Télécom » à l’Agence des participations de l’État (APE), de 2008 à 2011. En 2011, il rejoint l’Agence FrancePresse (AFP) comme directeur général adjoint, aux côtés du patron de l’agence, Emmanuel Hoog. Il a ainsi travaillé sur les projets de développement dans le domaine

EY DÉBAUCHE À LA DGFIP

de la vidéo, du mobile, du sport, ainsi que sur la gestion des filiales de l’Agence, jusqu’à son entrée à Matignon en mai 2012. THOMAS COEX/AFP

à l’aménagement du territoire et à l’action régionale à la Datar (1997-2000). Sous-directeur de l’administration territoriale à la direction de l’administration territoriale et des affaires politiques au ministère de l’Intérieur en 2000, cet ancien élève de l’IEP de Paris conseille ensuite, au ministère de l’Intérieur, les ministres Nicolas Sarkozy (2002-2004), puis Dominique de Villepin (2004-2005). Promu préfet du Gers en 2005, Étienne Guyot a aussi été préfet des Landes (2007-2009), puis préfet de Meurthe-etMoselle en 2009.

*Jean-Pierre Lieb.* Il était, depuis six ans, le chef du service juridique de la fiscalité de la DGFIP. Cet énarque de 52 ans prend la responsabilité de l’activité « Tax Policy and Controversy » au niveau EMEIA (Europe, Middle East, India and Africa). « L’arrivée de Jean-Pierre Lieb au sein d’EY Société d’avocats confirme le pouvoir attractif de notre cabinet, ainsi que notre volonté d’inscrire EY Société d’avocats comme le cabinet leader d’une pratique responsable et durable de la planification fiscale en France », indique Éric Fourel, associé responsable d’EY Société d’avocats, en France et au Luxembourg. Début janvier, c’est une autre structure du réseau EY, le département « Secteur public » du cabinet de conseil, qui a débauché un autre ancien cadre de la DGFIP, Philippe Rambal. Ce dernier a, lui, le titre d’associé au sein de ce département du cabinet. Cet inspecteur général des finances, ancien conseiller de Christine Lagarde à Bercy, a occupé le poste de directeur, adjoint au directeur général des finances publiques en charge du pilotage du réseau et des moyens de la DGFIP de 2008 à 2013. De son côté, Jean-Pierre Lieb a débuté à l’inspection générale des Finances à Bercy, avant de rejoindre la direction générale des impôts comme chef du bureau CF1 (études, animation, procédures et méthodes du contrôle fiscal) en 1993. Six ans plus tard, il devient sous-directeur en charge de la fiscalité des entreprises et des droits d’enregistrement à la direction de la législation fiscale. Entre 2005 et 2008, Jean-Pierre Lieb est responsable du service en charge de l’animation et du reporting de la fonction contentieuse et juridique de l’administration fiscale.

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LA FRANCE DES POUVOIRS I ÉTAT-MAJOR

Le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique

Retrouvez l’intégralité de sa biographie

JULIEN RENCKI, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL POUR LA MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE

PHOTOS : DR – OLIVIER CHATEL – PIERRE CHABAUD

Créé en octobre 2012, placé sous l’autorité du Premier ministre et mis à la disposition de la ministre en charge de la Réforme de l’État, Marylise Lebranchu, le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) impulse, coordonne et accompagne l’ensemble des transformations des administrations pour un service public plus efficace, dans le respect de la trajectoire des finances publiques. Il contribue aussi à l’évaluation et à la rénovation des politiques publiques. À sa tête, Julien Rencki, énarque et ancien conseiller de Jean-Marc Ayrault sur l’économie, assure le suivi des décisions du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (Cimap). Il est assisté d’un adjoint, Serge Bossini, fin connaisseur des enjeux du secteur public, puisqu’il a dirigé le cabinet de Marylise Lebranchu, ainsi que d’un directeur de cabinet, Thierry Courtine. Nicolas Conso dirige le service « Innovation et usagers », qui a pour but de simplifier les relations avec l’administration et de promouvoir l’innovation. Un autre service, dont le chef est en cours de recrutement, assure la direction de l’équipe d’appui aux administrations, ainsi que le pilotage des évaluations de politiques publiques. Laurent Gravelaine, chef du service « Coordination », assure la cohérence des chantiers engagés. Le SGMAP rassemble aussi plusieurs acteurs interministériels de premier plan. La direction interministérielle des systèmes d’information et de communication de l’État (Disic), dirigée par Jacques Marzin, pilote la modernisation des systèmes d’information de l’État. La mission Etalab, créée en 2011 et dirigée par Henri Verdier, assure la transition des administrations vers l’open data.

SERGE BOSSINI, DIRECTEUR ADJOINT AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

THIERRY COURTINE, DIRECTEUR DE CABINET ET CHEF DU SERVICE « MISSION SYNTHÈSE ET SOUTIEN »

HENRI VERDIER, DIRECTEUR DE LA MISSION ETALAB

JACQUES MARZIN, DIRECTEUR INTERMINISTÉRIEL DES SYSTÈMES

NICOLAS CONSO, CHEF DU SERVICE

LAURENT GRAVELAINE, CHEF DU SERVICE

D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION DE L’ÉTAT

« INNOVATION ET USAGERS »

« COORDINATION »

acteurspublics.com

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 87


EMPLOI PUBLIC INTERNATIONAL

Grand oral africain pour l’ENA Près d’un millier d’Africains se forment chaque année à l’École nationale d’administration, à Paris. L’établissement a par ailleurs noué une dizaine de partenariats sur le Continent noir et cherche aujourd’hui à moderniser cette coopération héritée du passé.

lin d’œil de l’histoire au 2 avenue de l’Observatoire, à Paris, dans les bureaux de l’École nationale d’administration (ENA). Situé au cœur de la capitale, là où sont formés, ainsi qu’à Strasbourg, les futurs hauts fonctionnaires français, le bâtiment a été édifié en 1895 pour accueillir l’École coloniale, devenue en 1934 l’École nationale de la France d’outre-mer. Puis l’Institut des hautes études d’outremer de 1959 à 1966. Le Sénégalais Léopold Sédar Senghor, le Camerounais Paul Biya ou le Nigérien Hamiani Dori, premier président de la République de son pays, comptent parmi les figures célèbres qui ont enseigné ou étudié dans ces murs. Aujourd’hui encore, « près d’un millier d’Africains » poussent chaque année la porte de l’institution pour suivre des cycles courts et longs ou des formations sur mesure, précise Pierre Thénard, le directeur des relations internationales de l’ENA. Avec 222 anciens élèves, le Maroc est par exemple le deuxième pays, derrière l’Allemagne (400 anciens élèves), a envoyer ses meilleurs éléments sur les bancs de la prestigieuse école. Produit d’appel pour le made in France avec la formation de milliers de fonctionnaires étrangers, l’ENA est également un produit d’exportation. Maroc, Tunisie, Éthiopie, Tchad, Niger, Madagascar, Cameroun, Gabon… L’école a conclu des programmes de coopération avec une dizaine d’ENA africaines ou

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88 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

d’écoles équivalentes, portant sur la formation des cadres dans la fonction publique ou sur des opérations sur le terrain. C’est en République démocratique du Congo que Max Brunner, le directeur adjoint des relations internationales de l’ENA, pilote le projet de coopération le plus emblématique du moment : la relance de l’ENA à Kinshasa. « Il y a une réelle volonté politique, explique-t-il. C’est un pays en sortie de crise, il a des besoins énormes en matière de formation des fonctionnaires car près de 40 % d’entre eux vont partir à la retraite très prochainement. Il faut créer une école de formation des hauts fonctionnaires en partant de rien. Ils font donc naturellement appel à notre expertise », explique-t-il. Après deux ans d’échanges, la première promotion de 60 énarques congolais devrait voir le jour avant la fin de l’année.

Relation empirique Mais si importante que soit la relation de l’école avec l’Afrique, elle est avant tout empirique. « C’est un portefeuille un peu baroque, touffu. C’est un empilement de sollicitations, un héritage de l’histoire et d’initiatives des directions qui se sont succédé », résume Pierre Thénard, en poste depuis près d’un an. Et l’école de revoir sa copie, dans le cadre de la Modernisation de l’action publique (MAP). Les enjeux sont clairs. Les


FRÉDÉRIC MAIGROT/RÉA

25 salariés de la direction internationale de l’ENA, sur un effectif total de 200 personnes, génèrent un chiffre d’affaires annuel compris entre 4 et 5 millions d’euros. Dont une part minime provient de l’Afrique. « On a l’impression d’une forte proportion d’actions dans cette partie du monde, c’est là que nous avons une majorité d’élèves et de projets et, pourtant, cela ne fait que 10 % de notre chiffre d’affaires, observe le directeur des relations internationales. De plus, la plupart du temps, ce sont des actions, notamment en Afrique subsaharienne, appuyées sur des crédits de coopération des ambassades de France. »

Financements multilatéraux Et comme l’activité de la direction internationale ne relève pas de la mission première de l’ENA – la formation des élèves français –, elle ne bénéficie pas par ailleurs de la dotation de l’État. « À chaque fois que l’on mène une action, souligne Pierre Thénard, on doit la financer. On ne part jamais avec un budget à dépenser ! » D’où la nécessité, insiste-t-il, de repenser l’action : « Il y a trop de pilotage automatique et extérieur car finalement, ce sont les services de coopération et d’action culturelle de nos ambassades qui viennent nous trouver pour tel ou tel projet de formation. Mais le volontarisme de l’ENA, la capacité d’initiative dans cette partie du monde est assez peu mise en œuvre.

La coopération avec le continent africain est à dynamiser avec de nouveaux axes de développement. » L’institution veut se recentrer sur son cœur de métier, « au plus près des problématiques de la fonction publique, de la modernisation de l’État et de la gestion des administrations », précise le directeur international. Et pour accroître ses recettes, l’ENA veut se mettre en ordre de bataille pour répondre à des appels d’offres supérieurs à 5 millions d’euros – le maximum auquel l’école peut postuler avec ses moyens humains aujourd’hui – et qui reposent sur des financements multilatéraux (Banque mondiale, Banque africaine de développement…). Autre priorité, plus politique : « accompagner la politique étrangère de la France. Là ou la diplomatie est à l’œuvre, l’école a vocation à faire partie du paysage. Si par exemple le Mali ou la Centrafrique ont besoin de former leurs hauts fonctionnaires, l’ENA sera au rendez-vous », assure Pierre Thénard. Enfin, l’école veut se tourner vers les pays anglophones d’Afrique : Égypte, Nigeria, Afrique du Sud, Éthiopie… Mais aussi, plus largement, vers la péninsule arabique, avec des pays qui ont d’énormes moyens pour financer la formation de leurs fonctionnaires. « Il n’y a pas de raison de les laisser dans un face à face exclusif avec les méthodes anglo-saxonnes », conclut le directeur international de l’ENA. Jean-Michel Meyer #105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 89


EMPLOI PUBLIC ÉCHANGE

L’AUBERGE ESPAGNOLE

des hauts fonctionnaires Avec le programme « Bellevue », des fonctionnaires d’État issus de pays européens vivent une année d’expérience dans une administration étrangère. Un moyen d’élargir leur horizon et d’enrichir leur parcours.

n arrivant en France, au ministère de l’Écologie et du Développement durable, Telma Branco, haute fonctionnaire portugaise de 32 ans titulaire d’un master en administration publique, s’attendait à subir un certain choc. « Les agents de la fonction publique française représentent à peu près la moitié de la population portugaise [le Portugal compte 11 millions d’habitants, ndlr]. Les deux administrations sont difficilement comparables », confie-t-elle. Après cinq années passées à la direction des affaires européennes et internationales du ministère portugais de l’Environnement, elle saisit « l’opportunité unique » proposée par le programme Bellevue : battre le pavé d’une autre administration européenne. Développé par l’Allemagne et financé par une fondation privée, Bellevue fête en 2014 ses dix ans d’existence. L’échange s’adresse à des fonctionnaires d’État de catégorie A en début ou milieu de carrière. Ceux qui sont sélectionnés après l’appel à candidatures lancé chaque année par la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) sont « mis à disposition » pour quinze mois et continuent d’être rémunérés par leur administration d’origine. Ils obtiennent un poste pour un an dans l’un des 9 pays participants, à savoir l’Espagne, la Hongrie, l’Italie, l’Irlande, la Pologne, le Portugal, la Slovénie,

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90 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

l’Allemagne et la France, qui a rejoint le programme en 2011. L’Hexagone a, depuis, accueilli 5 fonctionnaires étrangers et a envoyé 2 des siens en Italie et en Pologne.

Séminaires et cours de langue L’objectif de ce programme réservé à une petite élite – chaque pays a droit à 4 candidats et 12 participants sont sélectionnés en tout – est de « favoriser la coopération institutionnelle » et de « promouvoir l’idéal européen », détaille une circulaire du ministère français de la Fonction publique. « Il se crée un vrai réseau de collègues étrangers », confirme Telma Branco, qui a pu « développer des compétences très vastes » en France. Car il ne s’agit pas d’aller faire du tourisme. Les participants suivent trois mois de cours de langue pour se mettre à niveau avant leur prise de fonction et assistent à 4 séminaires pendant leur année à l’étranger. Au-delà de ces rendez-vous, l’immersion dans une nouvelle administration est la première source de découvertes au quotidien. Ce qui a le plus frappé Telma Branco à son arrivée en France ? La mobilité des fonctionnaires. « J’ai vu plusieurs arrivées et départs. Au Portugal, cette mobilité interne n’est pas tellement encouragée. Je l’ai pourtant trouvée positive,


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EMPLOI PUBLIC I ÉCHANGE

PIXELBLISS/FOTOLIA

« IL SE CRÉE UN VRAI RÉSEAU DE COLLÈGUES ÉTRANGERS. » Telma Branco, haute fonctionnaire portugaise

aussi bien pour les services que pour les agents », juge-t-elle, notant également le « fort engagement à la formation des fonctionnaires français ». Son poste au ministère s’inscrit dans la continuité de ses missions au Portugal. Celle qui s’occupait, à Lisbonne, de préparer les réunions des ministres de l’Environnement du Conseil de l’Union européenne s’attache en France à la mise en œuvre du programme « Life », un instrument financier pour accompagner les actions communautaires en faveur de l’environnement. « Suivre la négociation d’une proposition législative du point de vue de deux États membres est un exercice passionnant », décrit-elle.

Différences marquantes Même continuité dans le parcours professionnel de la Française Samira Irsane, juriste spécialisée en droit public. Après quinze ans d’expériences aux Nations unies, à la Commission européenne, puis aux ministères des Affaires étrangères, de la Justice et enfin de l’Écologie à Paris, cette mère de deux enfants a pris, avec le programme Bellevue, la direction de l’Italie. Chargée en France de coordonner des actions de coopération bilatérale dans les domaines des transports et de l’énergie, elle se voit confier à Rome la rédaction d’un rapport

d’information du ministère des Transports sur les financements du gestionnaire italien d’infrastructures ferroviaires. « Je voulais développer une nouvelle expertise technique qui me sera notamment utile pour la prochaine présidence italienne de l’Union, dont les transports seront une priorité », explique-t-elle. Les différences avec la France sont aussi marquantes. « Sur la prise de décision, le système français est davantage fondé sur une consultation administrative collective, alors que le processus italien laisse une part plus importante à l’individu », observe Samira Irsane. Traduction concrète : le ministère des Transports italien est autonome, alors qu’en France, il dépend du périmètre de l’Écologie. Une autonomie qui « obtient également d’excellents résultats, fait valoir la haute fonctionnaire. L’Italie a été le premier bénéficiaire des financements européens pour les transports en 2013 ». Le modèle d’organisation parfait n’existe pas et là est l’utilité du programme Bellevue. Les administrations s’enrichissent mutuellement et chaque haut fonctionnaire trouve dans l’échange une diversité de pratiques qui lui permet d’affiner son expertise concernant les autres pays européens. Une vraie auberge espagnole de la haute fonction publique… Raphaël Moreaux

#105 AVRIL 2014 ACTEURS PUBLICS 91


L’AVANCÉE TECHNOLOGIQUE DE L’AP-HP L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) déploie depuis la mi-mars une application pour tablette mobile à destination des soignants en hospitalisation à domicile (HAD). Élaborée en partenariat avec Microsoft, elle permet à quelque 650 professionnels de gérer, depuis le domicile d’un patient, son dossier personnel et d’informatiser ses prescriptions. Une avancée dont doivent bénéficier près de 800 patients. www.aphp.fr

RESSOURCES Par Sylvain Henry

ouvert aux cadres des secteurs privé et public.

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Absentéisme

avril 5-11

Développement

Organisateur : ONU Habitat – Lieu : Medellin – Site : wuf7. unhabitat.org

Une délégation de l’Agence française du développement et du Quai d’Orsay participera au Forum urbain mondial à Medellin, en Colombie, qui portera sur « l’équité urbaine en développement, des villes pour la vie ».

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Entreprise

Organisateur : IGPDE – Lieu : Paris – Site : www.institut. minefi.gouv.fr

« Le made in France, une problématique récurrente ? » C’est le thème de la conférence organisée par l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE) dans le cadre de son séminaire « Regards croisés sur l’entreprise »,

Organisateur : FHF – Lieu : Paris – Site : www.fhf.fr

Comment réduire l’absentéisme des personnels hospitaliers ? Un enjeu sensible abordé à l’occasion de cette journée d’échanges organisée par la Fédération hospitalière de France (FHF), pendant laquelle les personnels d’encadrement présents proposeront des plans d’action.

mai 5-7

International

Organisateur : Inap – Lieu : Madrid – Site : www.inap.es

L’Institut national d’administration publique d’Espagne – membre du réseau European Reciprocal Training – propose un colloque sur l’Espagne et « son paysage social, économique et politique au sein de l’Union européenne ». Un échange ouvert aux fonctionnaires européens.

+ d’événements sur acteurspublics.com 92 ACTEURS PUBLICS AVRIL 2014 #105

AVOCATS Retenu pour être l’un des pionniers du « .paris », l’Ordre des avocats de Paris deviendra en mai le premier barreau au monde à bénéficier du nom de domaine d’une ville. www.avocatparis.org

GASTRONOMIE Le conseil régional d’Aquitaine a mis en ligne un guide inédit qui inventorie son riche patrimoine gastronomique : piment d’Espelette, pruneau d’Agen, foie gras du Sud-Ouest… www.gastronomie.aquitaine.fr/produitsregionaux

E-DIPLOMATIE Avec sa nouvelle console Twitter, le Quai d’Orsay offre une vision d’ensemble de l’activité du réseau diplomatique français sur Twitter. http://consoletwitter.fdip.fr


L’APPLI ÉDUCATIVE DE L’IGN Destinée aux enseignants du primaire et du secondaire, l’application « Édugéo » propose des continus pédagogiques liés aux programmes scolaires. Conçue par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale, elle permet d’accéder aux données géographiques de l’Institut, d’importer des données cartographiques, de mesurer des distances… www.ign.fr et www.edugeo.fr

Auteur : DGAFP Nombre de pages : 64

Téléchargement : www.fonctionpublique.gouv.fr

OCDE Le nouveau compte Twitter « OECDgov » publie toute l’actualité relative aux questions de la gouvernance publique de l’OCDE : dépenses publiques, e-gouvernement, innovation dans le secteur public, lutte contre la corruption, services publics… @OECDgov

LA GESTION DES HAUTS FONCTIONNAIRES À L’INTERNATIONAL

Première ! L’hôpital de Rouen propose sur sa page Facebook des rendezvous entre internautes et professionnels du CHU sur des thèmes de santé publique. Récemment, des médecins ont ainsi échangé pendant une heure sur les thèmes de la prise en charge des AVC ou sur des opérations de chirurgie. Une première en France. Facebook, « CHU Rouen »

Améliorer la gestion de l’encadrement supérieur, accompagner le parcours professionnel des hauts fonctionnaires, diffuser les bonnes pratiques managériales. Telles sont quelques-unes des préoccupations communes aux secteurs publics de l’Allemagne, de la Belgique, des États-Unis, du Québec, du Royaume-Uni et de Singapour. Six pays sur lesquels a planché la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) dans cette très riche analyse comparative internationale. Les évolutions récentes sont similaires : développement du tutorat pour favoriser la transmission des connaissances, individualisation des systèmes d’incitation financière, simplification administrative… Dans ces États, les postes supérieurs sont ouverts aux candidats des secteurs public et privé, notamment pour diversifier le profil des candidats. Mais ils sont, dans la pratique, généralement pourvus par des agents du secteur public.

Science

Auteurs : Charlotte Halpern, Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès – Nombre de pages : 522 – Éditeur : Les Presses de SciencesPo – Prix : 35 euros

QUELLES INSTRUMENTATIONS DE L’ACTION PUBLIQUE ?

L’informatisation des services de probation, la sectorisation de l’enjeu de la dette publique, les usages institutionnels et sociaux de la carte sociale… Tels sont quelques-uns des dispositifs sur lesquels se penche l’essai collectif L’instrumentation de l’action publique, controverses, résistances et effets. Ou comment l’action collective s’organise à partir d’outils et de mesures qui analysent tous les champs de l’action publique. Un ouvrage technique et éclairant.

Le CNRS a lancé début mars un nouveau site d’information scientifique. L’objectif : éclairer les grands débats de société en rendant accessibles les résultats scientifiques les plus récents. Les contenus se déclinent en 6 rubriques : « Terre », « Numérique », « Vivant », « Matière », « Sociétés » et « Univers ». www.lejournal.cnrs.fr

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Pages réalisées par la rédaction d’Acteurs publics

LIRE Auteur : Paul Poudade Éditeur : Michel Lafon Nombre de pages : 252 Prix : 17,95 €

Auteur : Pascal Lamy Éditeur : Odile Jacob Nombre de pages : 176 Prix : 17,90 €

QUAND LA FRANCE S’ÉVEILLERA

DANS L’OMBRE DU PRÉSIDENT

Ce bref essai de Pascal Lamy est à la fois inquiétant et vivifiant. Inquiétant car il démontre à quel point la France se trompe en pensant que la mondialisation serait une calamité. Vivifiant car il souligne que le pays a des atouts indéniables et peut les faire valoir à condition de changer de focale. « Les Français tentés par le repli et l’isolement occultent le fait que les faiblesses majeures de l’économie et de la société n’ont que peu de rapport avec les “menaces” de la mondialisation et les “impérities” de l’Europe », écrit l’expatron de l’OMC, partisan d’une grande décentralisation en faveur des régions.

Diplomate de carrière, entré au Quai d’Orsay en 1971, Paul Poudade quitte le monde des ambassades pour épouser le poste de chef de protocole de l’Élysée à la fin du septennat de Jacques Chirac, en décembre 2001, avec la bénédiction de la première dame. Durant trois ans, celui qui précède le chef de l’État lors de ses déplacements s’attacha à mettre en musique chacun des rendez-vous présidentiels, en évitant les couacs. Une mission de haute voltige, décrite dans un livre qui met la lumière sur une facette méconnue de la diplomatie.

Auteur : Antoine Glaser Éditeur : Fayard Nombre de pages : 218 Prix : 20 €

AFRICAFRANCE Politique, renseignement, diplomatie, business… Pour les inconditionnels des coulisses de la Françafrique, l’ancien directeur de La Lettre du continent, Antoine Glaser, est un metteur en scène des mots confirmé. Une pluie continue d’anecdotes, connues et méconnues, éclaire les relations entre Paris et 9 pays africains de l’ancien pré carré. En revanche, la thèse de l’auteur peine à convaincre : la Françafrique a fait place à l’AfricaFrance, car les dirigeants africains sont désormais les maîtres du jeu. Un empilement d’anecdotes, datant en grande partie de l’époque Foccart, ne constitue pas une démonstration.

VOIR

Le 8 avril à 20 h 30

Le 8 avril à 20 h 50 DOCUMENTAIRE (France, 2014) Durée : 1 h 22 Réalisateur : Antoine Vitkine

« Populisme, l’Europe en danger » Les municipales de mars en ont donné un avant-goût : l’extrême droite a le vent en poupe. Les européennes de mai pourraient en apporter une démonstration autrement plus fracassante. Car les dirigeants des mouvements populistes, surfant sur l’adhésion de populations angoissées par les effets de la crise, ont adopté une véritable stratégie pour conquérir le pouvoir à l’échelle européenne. Le documentaire d’Antoine Vitkine montre notamment comment la présidente du Front national, Marine Le Pen, et le chef de file de l’extrême droite néerlandaise, Geert Wilders (photo), ont choisi de s’allier dans l’objectif de constituer un groupe influent au Parlement de Strasbourg.

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ROCHE PRODUCTIONS

DR

DOCUMENTAIRE (France, 2014) Durée : 52 minutes Réalisateur : Vincent Nguyen

« Une femme à Paris » Retour sur la campagne des municipales à Paris, théâtre d’un duel féminin sans précédent. Vincent Nguyen a suivi pendant plusieurs mois Anne Hidalgo, « la coureuse de fond », et Nathalie Kosciusko-Morizet, « la sprinteuse ». Filmant seul, le reporter s’est glissé, au plus près des deux candidates, dans les cafés parisiens, sur les plateaux des médias, à Rungis, au Conseil de Paris ou à l’Assemblée nationale, captant même quelques scènes de vie familiale. Le documentaire, bien qu’équitable en temps de parole et d’image, fait la part belle à « NKM » qui, en veine de fantaisie, révèle « son côté Chirac », tandis qu’Anne Hidalgo est dans une représentation plus sage et contrôlée.


DVD

Réalisateur : Bertrand Tavernier Durée : 113 minutes Bande originale : Philippe Sarde, Bertrand Burgalat Récompenses : César du meilleur acteur dans un second rôle (Niels Arestrup) Distributeur : Pathé Distribution Prix : 19,99 €

Quai d’Orsay Portrait humoristique du fonctionnement d’un ministère des Affaires étrangères en ébullition, par le prisme d’un jeune énarque embauché comme plume du ministre, l’adaptation cinématographique de Bertrand Tavernier des bandes dessinées Quai d’Orsay est à présent disponible en DVD.

Auteur : Lionel Jospin Éditeur : Seuil Nombre de pages : 237 Prix : 19 €

ÉCOUTER

LE MAL NAPOLÉONIEN Ancien Premier ministre de 1997 à 2002, Lionel Jospin publie un ouvrage inattendu sur l’expérience napoléonienne et l’empreinte durable qu’elle a laissée dans l’imaginaire national. La démystification du bonapartisme, méthodique, est implacable. L’auteur revisite tous les aspects du régime – « un césarisme surplombant des notables » – en plongeant dans les détails sombres de l’épopée bonapartiste – la première comme la seconde. Le lecteur termine l’ouvrage sur un avertissement d’une actualité brûlante : « Pas plus que le bonapartisme hier, le populisme, ce bonapartisme sans Bonaparte, n’offre aujourd’hui de solution. »

COUP DE CŒUR LIRE

Auteur : Jean Haëntjens Éditeur : FYP Éditions Nombre de pages : 160 Prix : 17,50 €

« L’Esprit public » : Les élections européennes et la désignation du président de la Commission Durée : 59 minutes Présentateur : Philippe Meyer Invité : Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations

Avec le traité de Lisbonne, signé en 2009, le mode d’élection du président de la Commission européenne a été légèrement modifié. Si le Conseil européen garde la main sur la désignation du successeur de José Manuel Barroso, il devra le faire « en tenant compte du résultat des élections au Parlement » du 25 mai prochain. Geste symbolique ou véritable avancée démocratique ? L’ancien secrétaire d’État aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet réagit au micro de Philippe Meyer pour donner sa version du déficit institutionnel de l’Union européenne, alors que l’absentéisme et la montée des populismes risquent à nouveau d’enregistrer des records.

Les villes au secours de l’État « Après un XIXe siècle dominé par les empires et un XXe régi par les États-nations, le XXIe siècle s’apprêterait à être piloté par des cités-territoires. » Cette hypothèse, avancée par beaucoup d’économistes outre-Atlantique, est brillamment défendue par Jean Haëntjens. Contre toute idée d’affaiblissement du premier échelon démocratique, ce fin spécialiste des stratégies urbaines montre, preuves à l’appui, comment le bloc communal est le « moteur sociétal » idéal pour affronter les défis du XXIe siècle. Qu’il s’agisse de transition écologique, des mutations numériques ou de mondialisation des échanges, les 36 000 communes de France sont autant de laboratoires pour expérimenter des solutions innovantes. Et les intercommunalités, des alliées solides pour structurer leur action. Nul doute que les maires nouvellement élus trouveront dans cet ouvrage une précieuse source d’inspiration pour élargir leur champ des possibles.

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PHOTOS : ARCHIVES NATIONALES

CENT ANS DE

L

L’Humanité n° 3758, du 1 août 1914, titre sur 5 colonnes à la une (encadrée de noir) sur la mort brutale de son fondateur. er

Jaurès Lieu : Archives nationales, hôtel de Soubise, 60 rue des Francs-Bourgeois, Paris 3e Dates : jusqu’au 2 juin 2014 Horaires : du lundi au vendredi de 10 h à 17 h 30, les samedis et dimanches de 14 h à 17 h 30, fermeture le mardi et les jours fériés Tarifs : 6 € /4 € (plein/réduit)

EXPOSITION À droite, le visage le plus « connu » de Jean Jaurès. À gauche, l’une des rares photographies le montrant imberbe (vers 16 ans).

Les verriers de Carmaux, en grève, en octobre 1895. Député socialiste de la circonscription, Jaurès soutient leur initiative de créer une verrerie ouvrière à Albi, qui est inaugurée l’année suivante. Une séance à la Chambre des députés, tableau de René Achille Rousseau-Decelle montrant Jaurès à la tribune du Palais-Bourbon (1907).

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e marbre de la table est classé monument historique. C’est là que le directeur de L’Humanité s’effondre, atteint d’une balle à la tête, au soir du 31 juillet 1914. Il était attablé au café du Croissant, au centre de Paris, avec ses collaborateurs du journal et s’apprêtait à rédiger un ultime appel contre l’entrée en guerre. Le lendemain, la mobilisation générale est décrétée et les premiers soldats français vont partir au front quelques jours plus tard. Jaurès, le pacifiste assassiné. Devant la fameuse table, le visiteur de l’exposition consacrée au chef de file socialiste mort il y a cent ans, à 54 ans, est replongé d’entrée de jeu dans l’ambiance, sonore et visuelle, de cet épisode traumatisant. Le parcours de vie ensuite retracé par les Archives nationales et la Fondation Jean-Jaurès, en quelque 200 documents et objets, invite à comprendre les origines du culte jaurésien.

LES IDÉES ET LE TERRAIN Normalien, agrégé de philosophie, Jean Jaurès aurait pu se destiner à une brillante carrière universitaire, mais ce républicain épris de justice sociale se fait très vite happer par la politique, où il s’engage « pour voir se réaliser ses idées », souligne Gilles Candar, président de la Société d’études jaurésiennes, l’un des trois commissaires de l’exposition. Élu à 26 ans dans son Tarn natal, réélu six fois (parfois de justesse) sous l’étiquette socialiste et battu à deux reprises, « Jaurès était le député par excellence : assidu, travailleur, connaissant les dossiers » et ne cumulant pas les mandats dans une IIIe République où le Parlement est « le lieu essentiel du pouvoir », relate l’historien


MYTHE JAURÈS

Conférences

Laure Berthier

Les jeudis de 18 h 00 à 19 h 00 à l’hôtel de Soubise 3 avril « Jaurès et la guerre » 10 avril « Jaurès et Guesde » 17 avril « Jaurès et Péguy » 24 avril, « Jaurès internationaliste » 15 mai « Jaurès et la classe ouvrière » 22 mai « Les haines contre Jaurès »

DEUX BATAILLES PARLEMENTAIRES Parmi la « considérable activité parlementaire » accomplie par Jaurès en plus de vingt années de députation, l’exposition se focalise sur deux lois qui ont marqué son combat politique. La première est la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, à laquelle, selon l’historien Romain Ducoulombier, « il donne une inspiration ouverte et libérale ». La seconde est la loi de 1913, dite des trois ans. Il s’agit de faire passer la durée du service militaire de deux à trois années, en prévision du conflit qui se prépare. Jaurès, dont la famille compte plusieurs officiers hauts gradés, s’y oppose vivement. Il défend l’idée d’une armée citoyenne, défensive, contre celle d’une « armée de casernes ». Mais le texte est finalement voté en août 1913. L’assassin de Jaurès expliqua à la police que l’opposition de l’homme politique à cette loi en avait fait à ses yeux « un traître ».

Biographies

Romain Ducoulombier, également commissaire de l’exposition. Son éloquence, illustrée par un tableau d’Albert Éloy-Vincent, en fait « un député redouté, redoutable, efficace, révéré même par ses adversaires », qui pourtant en viennent parfois aux mains, comme lors des débats sur l’affaire Dreyfus. Le combat pour les idées passe aussi par la fondation de L’Humanité, un « journal socialiste » que Jaurès veut dégagé de toute emprise financière lorsqu’il lance le quotidien en 1904. Le numéro 1 et le manuscrit du tout premier éditorial figurent en bonne place dans l’exposition. Mais tout intellectuel qu’il est, « Jaurès est un homme du concret. La réalité nourrit sa politique et son socialisme », rappelle Magali Lacousse, conservatrice en chef du patrimoine et troisième commissaire. Dans sa circonscription de Carmaux, Jaurès soutient les mineurs grévistes, dont il affronte le patron dans les urnes, et la création d’une verrerie ouvrière à Albi. Ce sont les ouvriers de Carmaux qui, en 1924, poussent le char pavoisé transportant le cercueil de Jaurès vers le Panthéon. Défenseur inlassable de ce que l’exposition présente comme ses « trois valeurs fondatrices » – justice, fraternité et paix –, le député n’en est pas moins durement critiqué et férocement caricaturé, à droite comme à gauche, où l’on n’oublie pas ses origines bourgeoises. Si ses prises de position prodreyfusardes ou anticolonialistes lui attirent des inimitiés, c’est bien sa campagne acharnée pour la paix qui lui valut les plus violentes attaques, jusqu’à lui coûter la vie.

La SFIO, qui rassemble les différents partis socialistes, est créée en 1905. Jaurès adhère à la fédération du Tarn et à la section de Carmaux.

Jean Jaurès Auteurs : Gilles Candar et Vincent Duclert Éditeur : Fayard 688 pages, 27 €

Hors série du Monde « Jean Jaurès, un prophète socialiste » Prix : 7,90 €

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MÉMOIRE DÉCENTRALISATION

UNE CHARTE POUR LES COMMUNES

ROGER-VIOLLET

La « loi municipale » de 1884 consacre leur autonomie.

V

ingt-six jours de débats, étalés sur deux mois, furent nécessaires au Sénat, après de multiples délibérations à la Chambre des députés, pour aboutir au vote, si l’on peut dire de guerre lasse, de la loi du 5 avril 1884. Cette « loi municipale » marque le point de départ de l’affirmation progressive des communes vis-à-vis du pouvoir central en leur conférant, treize ans après les départements, un statut de collectivités territoriales. Si les communes bénéficiaient d’une relative autonomie à leur création, à la Révolution, le

centralisme napoléonien avait ensuite placé les maires sous la tutelle de préfets tout-puissants. Dans le contexte décentralisateur de la III e République, la loi de 1884 donne d’abord, en faisant élire le conseil municipal au suffrage universel (pour quatre ans, jusqu’en 1929), une réelle légitimité démocratique au maire qu’il choisit. Celui-ci est de fait le premier représentant de la commune, et son organe exécutif. Du point de vue juridique, petits villages et grandes villes (comme

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Toulouse, dont le célèbre hôtel de ville est photographié ci-dessus vers 1890) sont placés sur un pied d’égalité, avec un régime identique. Au long de ses 168 articles, la loi détaille le mode d’organisation des communes. Elle leur accorde surtout une autonomie inédite, par son article 61, dont le premier alinéa dispose que « le conseil municipal règle, par ses délibérations, les affaires de la commune », une phrase passée à la postérité comme l’acte fondateur de la clause de compétence générale. Ce principe de libre administration est aujourd’hui inscrit dans la Constitution.

Les débats au Sénat tournent notamment autour des dépenses des communes, dont certaines sont listées dans la loi comme « obligatoires ». Un sénateur s’oppose en ces termes à la publicité des conseils municipaux, qui sera finalement adoptée : « Dans un nombre considérable de communes rurales, la publicité est matériellement impossible. (...) Ce seraient de nouvelles dépenses analogues à celles que nous avons faites et que nous avons encore à faire pour les écoles. » Le budget, sujet déjà sensible… Laure Berthier



2014

LES RENCONTRES DES ACTEURS PUBLICS

les

1 I2 I 3 juillet 2014

au Conseil économique, social et environnemental

LE RENDEZ-VOUS ANNUEL DES DÉCIDEURS

DES TROIS FONCTIONS PUBLIQUES ÉTAT - TERRITORIALE É T - HOSPITALIÈRE Programme et inscription sur acteurspublics.com/rencontres


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