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Sport automobile au féminin

« GIRLS ON TRACK »

Elles sont pilotes, officielles, voir même parfois un peu des deux : les femmes sont présentes dans tous les échelons du sport auto, et s’affirment de plus en plus dans un milieu qui conserve encore une image très masculine. Zoé, Simone et Tessy nous livrent leurs visions de la place de la femme en sport automobile.

Le sport automobile tente d’année en année de se montrer plus inclusif, et notamment envers les femmes dont la présence dans les plus prestigieuses compétitions demeure

malgré tout encore trop confidentielle en 2020. C’est pour cette raison que les opérations destinées à promouvoir le sexe féminin se multiplient, avec dernier exemple en date, le « FIA Girls on track - Rising Stars » mis en place par la Fédération Internationale de l’Automobile (FIA) en partenariat avec la Ferrari Driver Academy. L’objectif ? Détecter les futurs talents féminins en monoplace, à l’âge qui est le plus critique dans la transition vers les catégories monoplaces, c’est à dire entre 12 et 16 ans.

Un projet innovant mené de front par le fond d’innovation de la FIA, la commission

Women in Motorsport, et donc la prestigieuse Scuderia Ferrari. Les deux heureuses élues pourront donc bénéficier d’un programme étalé sur quatre ans avec la marque au cheval cabré, dans le championnat de Formule 4. Le programme a débuté au début de l’année avec une détection mondiale parmi les 145 autorités sportives nationales affiliées à la FIA, qui ont nommé de jeunes pilotes prometteuses ayant déjà participé à des compétitions nationales ou internationales. Une vingtaine de jeunes pilotes venues des cinq continents ont donc déjà été choisies. Et dès la deuxième quinzaine du mois d’octobre, ces talents en devenir seront réunis sur le circuit Paul-Ricard pour une première session de deux jours de tests en karting. Les jeunes concurrentes seront évaluées également sur d’autres critères notamment au niveau de la préparation physique et psychologique. Douze pilotes seront sélectionnées ensuite pour une deuxième session de trois jours de tests, où leurs compétences et leurs progrès en matière de pilotage seront jugées. Au final, quatre jeunes filles seront retenues pour se rendre à Maranello en novembre pour le dernier chapitre de l’aventure « Girls on track ».

Michèle Mouton, toujours un exemple

Au Luxembourg aussi, les filles ne sont pas en reste. À l’image de la jeune Zoé Knebler, tout juste vingt ans depuis le 17 octobre dernier, et qui va intégrer l’université de Trèves pour y étudier l’architecture. Licenciée depuis ses six ans, la jeune femme possède une solide expérience de la course : « J’avais juste quatre ans quand mon papa m’a offert mon premier kart, et la passion naquit. J’ai dû attendre deux ans avant de recevoir ma première licence, le virus était déjà bien ancré ! ». Au fil des années, Zoé n’a cessé de progresser, en collectionnant les bons résultats en karting, et elle a même eu l’opportunité de faire un test en Formule Renault sur le circuit de Barcelone. Désormais c’est en X30 Senior que la jeune Luxembourgeoise évolue. Et elle a un conseil tout simple à donner aux jeunes

Tessy Wahl.

filles qui voudraient l’imiter : « Il faut croire en soi, et ne jamais perdre ses objectifs de vue ».

Zoé livre également son avis sur la création de championnats 100 % féminins, comme on a pu le voir avec la W Series, créée en 2019, et qui fait courir exclusivement des femmes dans des Formule 3 : « Tous les championnats ont leur raison d’être, mais je pense que les championnats mixtes aident mieux à progresser, en tant que femme je n’y vois que des avantages, d’autant plus que certains garçons quand ils voient des filles partent à la faute plus rapidement » explique la jeune femme originaire de Sanem. Elle avoue également suivre comme exemple la trajectoire d’une des plus célèbres femme-pilote de l’histoire, la Française Michèle Mouton. Malgré le temps qui passe, l’ancienne pilote de rallye demeure donc une référence.

« Encore trop de stéréotypes »

Mais il n’y a pas que derrière un volant que les femmes sont présentes en sport auto. En témoigne le parcours de Simone Schleimer, commissaire sportive, et présente à la Commission sportive de l’ACL durant une vingtaine d’années, de 1991 à 2010, et même vice-présidente de ladite commission de 1997 à 2007. Simone a même eu le privilège de siéger à la commission de la FIA de 2012 à 2014. Tour à tour commissaire sportive, observatrice, et assistante de direction sur les épreuves FIA, aussi bien sur le plan national qu’international, Simone Schleimer possède une solide expérience de la compétition automobile. Pour Simone comme pour Zoé, les championnats exclusivement féminins ne vont pas forcément dans la bonne direction : « Selon moi il faut encourager la mixité, parce que privilégier des championnats 100 % féminins reviendrait à accepter le fait qu’il est impossible pour les femmes de concourir à armes égales avec les hommes, et ce serait un retour en arrière dans le combat pour l’égalité de tous ».

Admiratrice elle aussi du parcours de Michèle Mouton et de la pilote allemande Jutta Kleinschmidt, Simone Schleimer encourage les jeunes filles à « se lancer, et à vivre leur passion en croyant en elles. Ce qui est important c’est de rester soimême et de ne pas essayer de jouer un rôle car sinon on ne peut pas s’investir à 100 % pour atteindre ses objectifs ». Selon l’ancienne commissaire sportive, le manque de visibilité des femmes au sein du sport automobile est dû « à des stéréotypes, des préjugés, et à un manque d’éducation dans notre société ».

« Oser, oser, oser ! »

Du côté du High Speed Racing Club Luxembourg, Tessy Wahl est depuis longtemps un des visages bien connus par ceux qui fréquentent les évènements organisés par le HSRCL. Depuis plus de dix ans, Tessy occupe un rôle essentiel au bon fonctionnement du club, et elle a dû composer comme tant d’autres organisateurs, avec la crise sanitaire : « Ce n’était pas évident du tout à gérer, on avait planifié sept événements, on a pu en réaliser qu’un seul et encore dans des conditions vraiment restrictives. C’était dur cette année, cela nous a manqué de ne pas pouvoir organiser des choses sur le circuit ».

Elle aussi encourage les autres femmes qui seraient tentés par une aventure dans le sport automobile à croire en ellesmêmes : « Il ne faut pas avoir peur, il faut oser, oser, oser ! Et ne pas croire que c’est quelque chose de réservé aux hommes ». Tessy Wahl voit en revanche d’un bon œil la création de compétitions féminines en sport mécanique : « Je crois que c’est moins stressant, si ce n’est qu’avec des filles. Entre filles on a peutêtre plus l’impression qu’on est plus égales, surtout au début quand on commence. Pour les débuts, c’est bien, mais après la mixité ce n’est pas mauvais non plus car il y a des filles qui roulent bien et qui savent se mesurer aux hommes ».

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Cet article a été publié dans le numéro 4/2020 de « Vroom », le hors-série de Mental!, sur les pages « Les cahiers de l’ACL Sport ».

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