plane; elle présente une surface fort peu accidentée, et les ingénieurs n'ont pas eu à surmonter de très grandes difficultés. Mais, à présent, de sérieux obstacles vont se dresser, pour ainsi dire, à chaque pas devant eux; ils vont avoir à franchir de hautes montagnes rocheuses qui atteignent des altitudes de t 800, de 2 ~oo et même 6oomètres, et l'on ne saurait déterminer d'avance le nombre d'ouvrages d'art, de tunnels et de ponts qui devront être construits. On peut donc s'attendre à voir de nouveaux retards se produire dans l'exécution des travaux; les progrès seront dorénavant moins rapides, et le service technique ne parviendra plus à poser, comme par le passé, 200 mètres de rails par jour. Il faudra, d'autre part, compter avec le manque d'eau et de nourriture, les énormes difficultés du transport, le caractèremalsain du climat et l'absence presque complète de main-d'œuvre indigène. Ce n'est qu'après avoir franchi les monts Mau et dans le voisinage du Victoria Nyanza que le sol, reprenant l'aspect d'une plaine, facilitera le travail. On espère que la voie sera entièrement livrée au trafic dans deux ans au plus tard. En Angleterre, on se plaint fort de ces lenteurs, mais c'est parce qu'on y oublie les difficultés matérielles de la tâche, ou qu'on y ignore les dégâts faits aux travaux par les pluies dilu-
viennes de la saison hivernale. Cependant, on peut être certain que la construction du chemin de fer se poursuivra, quels que soient les sacrifices en hommes et en argent qu'elle imposera aux Anglais. Ceux-ci ne s'occupent, en effet, que des résultats que donnera l'entreprise, et chaque pas en avant provoque parmi eux de nouveaux enthousiasmes.Une des qualités du caractère anglais est de ne jamais se laisser rebuter par les mécomptes et les obstacles qu'on rencontre dans les entreprises coloniales, surtout lorsqu'il s'agit, comme c'est le cas pour le chemin de fer de l'Ouganda, d'une œuvre vraiment « impériale », c'est-à-dire d'une œuvre propre à assurer la domination de la Grande-Bretagne en Afrique, tout en augmentant à la fois sa prospérité économique, sa grandeur et son prestige dans le monde. Les soins que nos rivaux apportent aux stations installées le long de la voie ferrée de l'Ouganda indiquent combien toute œuvre de ce genre leur est chère. C'est avec une ardeur fébrile qu'ils édifient les gares et différents bâtiments. Les maisons sortent de terre comme par enchantement, et sur des coins de désert où naguère il n'y avait rien se dresseront bientôt, sinon des villes populeuses, du moins des localités d'une certaine importance.
Les
Causes morales du Conflit Anglo-Transvaalien
r\ANS nos récentsarticles, nousavons exposécomment l'impérialisme intransigeant de M. Chamberlain exigeait la mainmise de l'Angleterre sur les deux républiques sud-africaines,Transvaalet État d'Orange.
On ajoute, non sans une apparence de raison, que si les impérialistes anglais sont si excités sur la question du Transvaal, c'est que les énormes richesses minières de ce pays leur semblent une proie tentante. Ce point de vue éminemment pratique d'une question politique a été fort bien mis en lumiéte par M. Etienne Buisson, dans un article du Figaro M. Buisson a résidé au Transvaal. Ses explications si claires et si autorisées méritent de retenir l'attention. D'après lui toutes les difficultés sont venues de l'esprit étroit des Boers, de leurs habitudes pastorales, de leurs goûts antiindustriels. Le malheur, dit-il, a peuple de bergers sans ambivoulu que les Boers tion ni désir de bien-être se soient fixés dans un pays aride et désolé à la surface, mais dont le soussol contenait des gisements aurifères considérables. les anglais pour la plupart Des aventuriers découvrirent et achetèrent à vil prix aux propriétaires boers les parties de ces grandes étendues désertes qui leur parurent les plus riches. Aussi quels ne furent pas le ressentiment et la convoitise des Boers pour les nouveaux venus, lorsqu'ils comprirent, peu après, qu'ils s'étaient défaits à vil prix de trésors inestimables Sans chercher à tirer profit des mines elles-mêmes en y travaillant soit comme ouvriers, soit comme employés, ils se tinrent délibérément à l'écart du mouvement d'affaires créé par le flot montant des étrangers, et ils concentrèrent
toute leur activité à chercher parquel moyen détourné ils pourraient se rendre maîtres d'une partie de ces richesses légalement perdues pour eux et que d'autres retiraient de leur sol. Et c'est ainsi que furent prescrites par le gouver nement du Transvaal une série de mesures vexatoires contre les immigrés et contre l'industrie minière les taxes personnelles sur les blancs et sur les nègres employés dans les mines, les droits d'entrée sur le
matériel minier et sur les objets de première nécessité (alimentation, habillement, habitation), les droits de sortie sur l'or extrait des mines, et surtout les gros monopoles de la dynamite, de l'eau, etc. ce fut tout un faisceau de règlements, de décrets, ayant tous pour but de remplir largement les coffres-forts de la République, mais dont chacun augmentait l'irritation des
uitlanders ou étrangers. Telle fut l'origine du conflit qui commença peu de temps après la découverte des mines, c'est-à-dire vers 1884. Avec le temps, il n'a fait que s'accentuer encore davantage l'industrie minière s'est considérablement développée la richesse et la puissance des Uitlanders se sont accrues. Les Boers; toujours à l'écart de ces grandes affaires, en ont ressenti plus d'envie encore que par le passé. Ils ont une intelligence encore assez fruste, ils ne cherchent guère à s'instruire ou à se mêler au flot des affaires qui se font à côté d'eux; aussi craignent-ils beaucoup les étrangers dont ils
sentent grandir la supériorité numérique, autant qu'ils se sentent menacés par leur supériorité intellectuelle. Les Anglais, au contraire, sont arrivés, depuis une quinzaine d'années, dans les différents districts aurifères et en particulierdans ceux de Witwatersrand. Ils en ont exploré les richesses, ils ont fondé des sociétés pour les exploiter et y ont intéressé des cap