MEMOIRES D'UN VIEUX CHASSEUR

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MEMOIRES D’UN VIEUX CHASSEUR

A la levée du camp de Sailly, le 39ème revenait à sa garnison de Valenciennes, qui fournissait des détachements à Avesne, Bouchain, Tondé, Landrecies, Maubeuge et Le Quesnoy. Dans l'été de 1845, étant fourrier de voltigeurs à Maubeuge, je demandai une permission de deux jours pour aller voir deux compatriotes MMrs Petitcher et Ernest Dubas, employés des Contributions Indirectes à Marly près Valenciennes. Ayant passé fort gaiement un dimanche avec eux, je comptais prendre le Lundi vers deux heures la voiture qui faisait le service de Valenciennes à Maubeuge; je fus très désappointé lorsque le conducteur me déclara que le chiffre réglementaire des voyageurs était complet; je dus partir de mon pied léger de voltigeur et pour ne pas rentrer en retard, je pris le pas gymnastique; j'ai parcouru à cette allure 30 kilomètres environ, dépassant dans les montées la diligence qui me dépassait à son tour en terrain plat; il ne restait plus guère que 1.200 mètres pour être à la ville, lorsqu'on m'offrit une place devenue vacante; je la refusai tenant à lutter jusqu'au but; je suivais la voiture à quelques pas lorsqu'elle s'arrêta sur la place; un voyageur descendant précipitamment, vint me tendre la main et me félicitant sur mon tour de force, m'offrit gracieusement un verre de punch au café Obozenki; je rentrai au quartier, satisfait d'être à l'heure, mais littéralement fourbu; le lendemain, très souffrant de courbature, je dus garder le lit; mon Capitaine me fit paternellement des reproches, me disant que je ne pouvais être puni en rentrant en retard par suite d'un cas de force majeure. Au mois d'Août 1845, le 39ème quittait le Nord pour aller tenir garnison à Nancy. De passage à Verdun, à 7 kilomètre de Dugny, je demandai une permission de 48 heures pour aller voir mes parents; j'emmenais avec moi mon collègue Guéry, fourrier de Grenadiers; nous passions la journée du Dimanche à Dugny; dans l'après midi ce brave Guéry, voulant faire preuve d'agilité, s'avisa de franchir d'un bond le petit cours d'eau qui séparait notre jardin de la prairie; ayant mal calculé son élan, il tomba au milieu du ruisseau ayant de l'eau jusqu'à la poitrine. Le bain par lui-même n'avait rien de bien désagréable, mais mon ami dut se déguiser en bourgeois, afin de faire sécher et brosser sa tenue militaire. Le lendemain Lundi, mon père nous conduisit en voiture à St Michel, où nous devions rejoindre le Btn; le village d'Ancemont se trouvait sur notre route; je fus heureux d'embrasser en passant Bon Papa Zambeaux et la bonne Tante Julie; c'était le lendemain de la fête patronale; on nous fit emporter des brioches et le Grand-Père me garnit le gousset, afin, disait-il, de me permettre d'offrir aux camarades quelques flacons de vin de Thiaucourt, fameux vignoble de la Meuse, où nous devions passer le lendemain. A St Michel je conduisis mon Père au logement de Mr Delessart, mon Capitaine, auquel il tenait à faire une visite; nous fûmes accostés ensuite par un autre Capitaine, Mr Lamairesse, presque notre compatriote; il était originaire de Thâlon (Marne); il dit à mon Père qu'il avait des vues sur moi, qu'il comptait me demander au Colonel pour remplacer son sergent-major, qui était sur le point de le quitter pour passer dans une Compagnie d'élite; en effet, moins de deux mois après, les circonstances lui permettaient de tenir sa promesse.


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