Palazzi A Venezia Novembre 2020

Phot hemilykruk

Kapwani Kiwanga Wilfred Almendra Luciano Garbati a New York L’Eroica Galerie Alberta Pane Raul Canibano Ercilla Leon Spilliaert Rémi Uchéd Paroles Passagères Stealing from Saracens Le voyage de Chirico Kinshasa Chronique Enoch Perez & Brigitte Schindler Elizabeth Waterman Dark Angels Esprits Vagabonds Ruée sur l’Art Contemporain Zainab Fasiki Photaumnales 2020 Le fléau du Postmodernisme I Macchiaioli Isabelle Lévenez Sophie Sainrapt Prix Swisse Life 2020/2021 Courtney Mattison Cyb

PALAZZI A VENEZIA Publication périodique d’Arts et de culture urbaine de l’association homonyme régie par la Loi de1901 ISSN/Commission Paritaire : en cours Distribution postale/digitale Président Directeur de la Publication Vittorio E. Pisu Projet Graphique Emmerick Door Maquette et Mise en Page L’Expérience du Futur Correspondance vittorio.e.pisu@free.fr palazziavenezia@gmail.com https://www.facebook.com/ Palazzi-A-Venezia https://www.vimeo.com/ channels/palazziavenezia Trenteunième Année / numéro 11 /Novembre2020 Prix au numéro 5 euros Abonnement annuel 50 euros Abonnement de soutien 500 euros

PRIX MARCEL DUCHAMP 2020

Photo artension

“ Lundi 19 octobre 2020, le jury s’est réuni pour choisir le lauréat du Prix Marcel Duchamp 2020 parmi les quatre artistes nommés pour cette édition : Alice Anderson, Hicham Berrada, Kapwani Kiwanga et Enrique Ramirez.

Ces délibérations ont fait suite à une présentation des artistes par leurs rapporteurs, soit respectivement : Annabelle Gugnon, Jean-Jacques Aillagon, Emanuele Coccia, Ángeles Alonso Espinosa.

Le jury composé de Bernard Blistène, Gilles Fuchs, Chris Dercon, Michèle Guyot-Roze, Gitte Ørskou, Akemi Shiraha et Marie-Cécile Zinsou, a attribué le Prix Marcel Duchamp 2020 à Kapwani Kiwanga.

Née en 1978 à Hamilton au Canada, elle vit et travaille à Paris.

Elle est représentée par les galeries Poggi à Paris, Goodman Gallery à Johannesburg et Tanja Wagner à Berlin. « La richesse et la complexité du projet de Kapwani Kiwanga, aux confins d’une réflexion entre anthropologie et art, ouvre à un vaste programme poétique et politique, véritable laboratoire de la pensée d’aujourd’hui sur la mémoire et l’archive comme sources de transfiguration du monde. », Bernard Blistène, Directeur du musée national d’art moderne . « Que de chemin parcouru depuis vingt ans lorsque l’ADIAF décidait de se mobiliser pour la scène française ! Le Prix Marcel Duchamp incarne aujourd’hui un esprit ouvert et pluriel qu’illustre parfaitement la lauréate de cette 20e édition. », Gilles Fuchs, Président de l’ADIAF.”

Kapwani Kiwanga

vec ce numéro nous espérions en avoir fini ou presque avec la pandémie, finalement il n’en est rien et partout il est question de nous enfermer, de nous empêcher de nous réunir, de faire la fête, d’aller même tout simplement déambuler dans les rues de nos villes.

J’essaie chaque mois de vous proposer des sorties, des découvertes ou des retrouvailles avec des œuvres et des artistes que vous connaissez déjà ou ceux que je viens de découvrir en avouant mon ignorance.

J’espère néanmoins que ces pages vous amusent, vous divertissent, ne serais qu’à la recherche des faute d’orthographe que je ne manque pas de commettre lorsque ce n’est pas tout simplement de la dyslexie des doigts sur le clavier.

Que dire si ce n’est remercier toujours les Artistes qui malgré tout continuent à travailler, à nous proposer leur regard et nous invitent à aiguiser le notre.

Lorsque vous lirez ces lignes les résultats des élections aux États Unis seront connus et j’espère que nous n’aurons pas à regretter de nous retrouver encore une fois avec la mèche orange.

En Europe aussi les choses ne vont pas si bien et finalement on ne sait plus qui faut-il croire entre les scientifiques et les politiques qui nous assènent tout et son contraire, tout en nous proposant des couvre-feux ridicules.

On se demande si cette fin d’année sera comme d’habitudes occupée par les partisans des festivités traditionnelles et leurs farouches adversaires.

Peut-être que cette pandémie mettra tout le monde d’accord, surtout à un moment où même échanger un baiser sur la bouche peut vous mener directe en tôle si cela se passe dans un lieu publique.

Finalement nous allons devenir tous des conspirateurs, organisant en secret des réunions qui devrons nécessairement durer toute la nuit, vu que le couvre feu nous empêche de rentrer aux heures indues.

Mais naturellement ces orgies se limiterons au nombre de six participants, of course, ainsi que les visites aux trop rares expositions et autres manifestation culturelles qui maintenant démarrent à neuf heures du matin.

Cela me rappelle lorsqu’avec ma fille Stéphanie nous allions à 9 heures aux séances du cinéma aux Halles.

Comme quoi ce sont juste des habitudes à prendre, n’est ce pas ?

Il se peut même que je vienne faire en tour à Paris à la fin novembre, histoire de renouer avec quelques interviews filmées d’Artistes, Curateurs et autre Acteurs sans oublier bien entendu les Chefs et Sommeliers.

En vous souhaitant néanmoins des belles journées automnales et en espérant que ces quelques pages vous divertissent et vous proposent des itinéraires intéressants et pourquoi pas jouissifs, je vous donne rendez vous en décembre pour clore dignement cette année bien calamiteuse. V.E. Pisu

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Photo atlantis

WILFRID ALMENDRA

ilfrid Almendra est un sculpteur franco-portugais, qui vit et travaille à Marseille.

Ses matériaux proviennent souvent de l’économie alternative, du recyclage, et de l’échange.

Ils convoquent une esthétique de la classe ouvrière immigrée dont il est issu, et questionnent le désir de confort, et la capacité individuelle d’invention et de poésie trouvée au cœur des structures sociales et économiques les plus normatives.

Cette exposition personnelle, dont le commissariat est réalisé par Cédric Fauq, présente des œuvres spécialement produites pour l’occasion.

Elle est accompagnée d’un programme public conçu par The Winter Office, groupe de réflexion interdisciplinaire qui développe une approche collaborative et artistique pour repenser, en terme de justice spatiale, les méthodologies liées aux champs de l’architecture et du développement urbain dans un contexte d’urgence environnementale.

A l’occasion de sa première exposition personnelle à Marseille, Wilfrid Almendra pose les fondations d’un nouveau tournant dans sa pratique.

Alors qu’il vient tout juste d’établir son atelier dans les locaux d’un ancien fabricant de meuble et tapissier, il recueille non seulement un espace mais aussi une certaine archéologie du/d’un travail, faite de gestes, de méthodes et de matières.

En parallèle, son intérêt pour l’héritage des jardins ouvriers comme territoires à se réapproprier l’ont mené

SO MUCH DEPENDS UPON A RED WHEEL BARROW Curateur

Cedric Fauq avec The Winter Office Partenaires : Le Talus et Adelaïde jusqu’au

28 novembre 2020 Atlantis Lumière 2 rue du Chevalier Roze 13002 Marseille www.atlantis-lumiere.art/

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à concevoir une érotique de l’enclosure (terme anglais), agencée par des architectures précaires et un corps dont la présence est seulement suggérée par des vêtements salis et éparpillés.

A un niveau plus formel, So Much Depends Upon a Red Wheel Barrow s’attache aussi à questionner l’équilibre, la perspective et le contraste. Intervenant directement dans l’architecture de l’espace, l’exposition marque la dernière occupation au 2 rue du Chevalier Roze par Atlantis, ce qui nous donne l’opportunité de penser aux marques qui seront laissées, avant de prendre un nouveau départ.

A l’occasion de l’exposition, et en collaboration avec documentsdartistes. org, des enregistrements sonores du texte de l’exposition, un poème de William Carlos Williams, et des extraits du livre Radical Gardening: Politics, Idealism & Rebellion in the Garden (2011) de George McKay seront mis à disposition en ligne.

Une série d’événements conçue par le collectif The Winter Office (Copenhague), dont le contenu et le calendrier sera annoncé plus tard, se tiendra en Novembre, si les conditions sanitaires le permettent.

L’enregistrement de ces événements sera aussi mis à disposition en ligne. atlantis.lumiere@gmail.com

Photo mvyth

VYTH project et NYC Parks sont heureux de présenter “Medusa With The Head of Perseus” de l’artiste argentin-italien Luciano Garbati dans le parc de Collect Pond, situé sur Centre St, Lower Manhattan, dans le cadre du programme “Art in the Parks” de NYC Parks.

Cette sculpture en bronze de deux mètres de haut inverse le récit de Méduse, la représentant dans un moment d’autodéfense sombrement habilitée.

Dans La Métamorphose d’Ovide, Méduse était une jeune fille dans le temple d’Athéna, qui a été traquée et violée par Poséidon.

Athéna, dans un élan de rage, bannit et maudit Méduse avec une tête de serpent monstrueuse et un regard qui transforme les hommes en pierre.

Méduse est elle-même blâmée et punie pour le crime dont elle a été victime ; elle est rejetée comme un monstre puis, avec l’aide cruelle d’Athéna et de Poséidon, elle est finalement traquée et décapitée par le héros épique Persée, qui affiche sa tête comme un trophée sur son bouclier.

La sculpture de Garbati s’inspire directement du chef-d’œuvre en bronze florentin du XVIe siècle, Persée à la tête de Méduse de Benvenuto Cellini (1545-1554).

A travers cette œuvre, Garbati demande “comment un triomphe peutil être possible si vous battez une victime ?”

Ce récit de l’humiliation

Medusa with the Head of Perseus

Luciano Garbati du 14 octobre 2020 au 30 avril 2021 Collect Pond Park Centre St, Lower Manhattan New York City 10013

www.nyc.gov/parks/art

des victimes dans les histoires de violence sexuelle fait écho à travers le temps, et dans le mouvement “moi aussi” d’aujourd’hui.

En 2018, Garbati a publié une photo de sa sculpture originale sur les médias sociaux.

Cette Méduse réimaginée est devenue un symbole de résistance dans le monde entier, inspirant des milliers de femmes à tendre la main et à partager leurs propres histoires.

La Méduse de Garbati remet en question la caractérisation du personnage mythique en tant que monstre, et enquête sur la femme derrière le mythe.

Medusa With The Head of Perseus sera installé directement en face de la Cour pénale du comté de New York, lieu où se sont déroulées des affaires d’abus très médiatisées, dont le récent procès d’Harvey Weinstein. La Méduse de Garbati se tient face au palais de justice, comme une icône de la justice et du pouvoir de la narration.

Medusa With The Head of Perseus a été coulé en bronze par Vanessa Solomon des Carbon Sculpt Studios à Red Hook, Brooklyn, NewYork et Laran Bronze Foundry à Philadelphie. À propos de NYC Parks’ Art in the ParksLe programme d’art public de NYC Parks, Art in the Parks, a constamment encouragé la création et l’installation d’art public temporaire dans les parcs des cinq arrondissements.

Depuis 1967, des collaborations avec des organisations artistiques et des artistes ont produit des centaines de projets d’art public dans les parcs de la ville de New York.

Pour plus d’informations sur ce programme, visitez le site www.nyc.gov/parks/art.

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Photo alfredoaccatino

L’EROICA

’Eroica (1911-1921 ; 1924-1944) est un mensuel italien de futurisme, d’art, de littérature et de gravure sur bois, fondé à La Spezia au début du XXe siècle.

Fondé et dirigé par Ettore Cozzani, le magazine a pour objectif éditorial de valoriser les forces créatives nationales, en traitant ouvertement de “tous les aspects de l’art et de la vie”.

Publié ouvert à la Sécession viennoise et au rationalisme, il est immédiatement devenu important par son caractère novateur, curieux des nouveaux jeunes talents contemporains, tant italiens qu’européens.

Lorsque le premier numéro est sorti le 30 juillet 1911 avec le sous-titre Rassegna d’ogni poesia, la revue se distinguait par ses qualités formelles : le choix du papier fait main, les couvertures en couleur et les illustrations xylographiques extrêmement précises.

Outre le grand groupe d’artistes, dont Adolfo De Carolis jusqu’en 1914, et l’architecte Franco Oliva, la revue comprend également le sculpteur Magli et le compositeur Pizzetti.

La volonté d’affirmer, de diffuser et de défendre la xylographie aujourd’hui nous donne un aperçu fondamental de cette technique expressive en Italie, reproposée dans la première moitié du XXe siècle.

En fait, la revue est devenue un important point de rencontre pour les bûcherons italiens en organisant, en 1912, la première exposition internationale avec catalogue.

Fermée en 1921, elle a repris ses publications en 1924, sous le régime fasciste, avec des collaborateurs du ni-

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veau d’Adolfo Wildt, mais a changé son style original avec le renoncement au graphisme unitaire (texte/ image) pour un recours croissant à la reproduction photographique des œuvres.

Dans un deuxième temps, L’Eroica a accompagné la publication du magazine en publiant des œuvres littéraires (poésie et fiction), des ouvrages non romanesques, des biographies et, en 1922, le célèbre livre d’artiste Sibilla, un poème dramatique en quatre actes d’Aristide Sartorio.

Après la première période passée dans la ville ligure, Cozzani a décidé de s’installer à Milan où il a poursuivi son activité jusqu’à la fermeture.

Les bombardements de 1943-1944 sur la capitale lombarde ont rendu plus soudaine la fin de cette expérience artistique, et ont endommagé les archives du magazine.

D’importantes expositions d’une valeur documentaire extraordinaire ont été consacrées à L’Eroica, dont il reste les catalogues.

Les collections complètes de la revue sont conservées à la Biblioteca Civica della Spezia et à la Biblioteca di Via Senato à Milan.

A L’Eroica sono state dedicate alcune importanti esposizioni di straordinario valore documentario, di cui rimangono i cataloghi.

Alcune edizioni della rivista vennero stampate a Pescia presso la Stamperia di Artidoro Benedetti. https://scripomarket.com/

Photo lucianalamothe

uciana Lamothe (née en 1975) est une artiste visuelle qui travaille dans la sculpture, l’installation, la photographie et la vidéo.

Sa pratique expérimente l’architecture comme un moyen d’illustrer les valeurs sociales soumises à la rigidité des structures verticales, dans lesquelles le contrôle, l’hégémonie patriarcale et les modèles culturels fortement établis prédominent et influencent les idées de genre.

Lamothe crée des œuvres d’art qui mettent les spectateurs au défi d’établir certaines conditions entre leur corps, l’espace d’exposition et la matérialité des œuvres d’art.

Ses sculptures sont composées de structures verticales qui déclenchent souvent l’instabilité et le vertige, comme une métaphore de la fragilité des structures socialement établies.

En d’autres termes, la pratique de Lamothe met en évidence l’intentionnalité d’exiger l’interaction du spectateur comme un aspect essentiel pour son activation et sa réflexion conceptuelle.

En testant la résistance, la ductilité, la flexibilité et la dureté des matériaux de construction, Lamothe examine leurs possibilités maximales pour démontrer comment la portée d’un pro-

BRANCHES, TOOLS AND HANDS CROSSING

Luciana Lamothe jusqu’au 30 novembre 2020 Galerie Alberta Pane Paris Venezia on line www.albertapane.com/

cessus de transformation peut conduire à une nouvelle représentation.

En ce sens, la technique que Lamothe développe pour “adoucir” ou “fragiliser” les métaux et les bois, est un processus de transformation non traditionnel, puisqu’elle ne fait pas appel aux techniques de sculpture conventionnelles.

Ses sculptures peuvent être rigoureuses et fortes pour représenter la masculinité, mais aussi souples et douces pour représenter la féminité, permettant une transexualité des matériaux constitutifs utilisés.

Et c’est cette même ambivalence des matériaux, et la manière dont ils se rapportent au spectateur, et l’architecture de l’espace d’exposition qui peuvent devenir des termes descriptifs de la valeur des concepts construits de genre, de la politique sexuelle contraignante et provocante, et de l’évaluation patriarcale du pouvoir et du contrôle qui régissent notre société.

Le travail de Lamothe a été exposé dans de nombreuses expositions dans le monde entier et a reçu le premier prix du Lichter Art Award, Francfort ; le premier prix du Itaú Cultural Award, Buenos Aires et a été boursière 2011 du programme d’artistes de l’Universidad Torcuato Di Tella, Buenos Aires.

M. Lamothe a reçu la bourse Pollock-Krasner pour artistes de la Fondation Pollock-Krasner, New York (2019). Elle vit et travaille à Buenos Aires. https://lucianalamothe.com/

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Photo Gayle Chong Kwan

tels que dOCUMENTA, Biennale de Venise, Manifesta, Biennale d’Istanbul et Biennale de Lyon.

En 2017, la galerie a entrepris une aventure éditoriale : Edizioni Alberta Pane.

Cette nouvelle série de publications renforce le rôle de la galerie en tant que promoteur de l’activité artistique, en favorisant l’épanouissement du public et la relation des artistes avec les institutions, les collectionneurs et la production éditoriale.

Ces volumes sont destinés à devenir au fil du temps le témoignage des activités de la galerie, mais aussi des éditions indépendantes des expositions, en ligne avec le rôle éditorial que certains marchands d’art avaient l’habitude d’avoir.

La forme est essentielle, à la limite entre la revue monographique, le pamphlet et le livre d’artiste, dans lequel différents auteurs - et pas seulement des artistes - sont invités à s’exprimer à chaque fois sur un sujet précis.

Alberta Pane Gallery est membre du Comité Professionnel des Galeries d’Art en France et de Paris Gallery Map. En Italie, la galerie fait partie de Venice Galleries View, une initiative composée de galeries de recherche en dialogue pour valoriser et soutenir l’art contemporain dans la région vénitienne. www.albertapane.com/

ondée en 2008 à Paris par Alberta Pane et spécialisée dans l’art contemporain, la galerie soutient énergiquement des artistes internationaux expérimentés et émergents, en valorisant la force conceptuelle de leurs projets.

La galerie encourage également l’expérimentation des artistes dans l’espace et les incite à travailler en équilibre avec leur environnement.

L’interprétation et l’analyse de notre époque est le but principal de leur réflexion.

En mai 2017, la galerie a ouvert son deuxième espace à Venise, une ancienne menuiserie de 350m², transformée en un espace d’exposition évocateur.

Derrière ce choix, il y a l’intention d’Alberta Pane de créer un lieu capable de produire de la culture, afin de se connecter avec la ville et ses habitants non seulement par le biais d’expositions expérimentales et de qualité, mais aussi par des ateliers, des rencontres, des discussions et des recherches sur l’art.

Espace international, en constante évolution, l’Alberta Pane Gallery est un lieu dynamique où les points de vue peuvent être échangés.

Avec plusieurs expositions par an et des foires artistiques internationales, la galerie a réalisé d’importants projets en collaboration avec des musées, des institutions culturelles et des galeries internationales.

Tous les artistes qui collaborent avec Alberta Pane opèrent activement dans les plus importants épicentres de la scène artistique contemporaine mondiale,

INSTRUCTIONS POUR COUPER LES FICELLES

jusqu’au 5 dècembre 2020 Gayle Chong Kwan Gaetano Cunsolo Léonard Martin João Vilhena 47 Rue de Montmorency

75003 Paris info@albertapane.com T. (00)33 172 346 413 M. (00)33 6 11 29 40 94 Ananay Arango ananay@albertapane.com

www.albertapane.com

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Photo raulcanibano

e Cuba du photographe documentaire Raúl Cañibano Ercilla est en noir et blanc ; il est réel, palpitant de vie, comme celui qui coule dans les bras des paysans des plantations de sucre ou de tabac (de la série “Tierra Guajira”, avec laquelle il a remporté le Prix national du Salon de la photographie en 1998) ; et c’est aussi le Cuba de la ville, de La Havane, des travailleurs, des enfants et des personnes âgées, et des plages (de la série “Ciudad”).

La photographie raconte l’histoire de ce que vous voyez et de ce que vous ne voyez pas, ce qui est seulement suggéré, le matériel et l’immatériel.

Il nous guide dans des histoires suggérées et d’autres reconnues.

C’est ce que font les images complexes et en même temps simples du photographe cubain.

Pas de stéréotypes, pas de couleurs vives, pas de célébration du pouvoir

Raul Cañibano PHOTOGRAPHY FEATURES + BLOGS BUY BOOK

CONTACT raulfoto@cubarte.cult.cu https://raulfoto.visura.co

5 2515225 Based in Havana Cuba

politique. Car comme il le dit lui-même : “J’essaie de saisir l’essence de mon pays”.

L’ombre devient matière, comme celle du mur sur la photo prise à Vinales, où elle se manifeste, un gaucho à cheval entre dans le cadre, tandis qu’au premier plan une femme se lave les cheveux dans un seau.

Tout est chargé d’un pouvoir presque symbolique.

A Cañibano, les photos ont de nombreux niveaux différents, et les histoires présentes se touchent, restent séparées ou se mélangent.

Les multiples niveaux et les ombres donnent du dynamisme à ses compositions.

Il y a une chasse aux contraires, entre réel et imaginaire, entre public et privé (entrée dans les maisons, intimité), pauvre et idyllique.

Toujours à nous rendre le quotidien, le commun des mortels, le vrai cœur de sa “Isla”.

Beaucoup des photos proposées sont tirées de “Chroniques d’une île”, l’exposition qui s’est tenue à Londres l’année dernière.

Cañibano a emporté avec lui, lors de son voyage, les négatifs conservés dans une boîte à cigares.

Il a passé de nombreuses années à lutter pour développer les photos, même au début de sa carrière de photographe dans les années 1990, qui a été aggravée par l’embargo économique.

Sa vie a changé dans un laboratoire photo d’un professeur de lycée de son pays natal, Cienfuegos, où il est retourné pour visiter.

La fascination pour le surréalisme du photographe Alfredo Sarabia et de l’artiste Salvador Dalì a ensuite guidé son travail au fil des ans, tout comme Eugene Smith a influencé sa vision humaniste.

Dans son premier plan en 1992 (n° 27), on peut voir l’ombre d’un monument équestre.

Au-dessus du mur, les lampadaires modernes s’orien-

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Photo raulcanibano

tent sans guide vers le ciel stérile, dégagé des nuages.

Il a choisi de couper le général à cheval en deux, afin de faire échouer ce rêve d’un avenir parfait au lendemain de l’effondrement de l’Union soviétique.

Cañibano a exposé dans le monde entier et ses photographies font partie de collections privées et ont été incluses dans la publication CUBA : 100 ans de photographie cubaine. (Debora Valentini) e photographe cubain Raúl Cañibano Ercilla est né en 1961.

Il fait partie des jeunes générations de photographes nés après la Révolution.

Son travail se concentre sur les gens, la vie quotidienne, l’histoire et le socialisme.

Il est actuellement basé à La Havane où il travaille comme photographe publicitaire.

En 1993, il a présenté sa première exposition personnelle, “Lonely Hunter” à la Fototeca de Cuba.

Depuis lors, son travail a été présenté dans de nombreuses expositions à Cuba ainsi qu’au Mexique, au Canada, au Brésil, aux États-Unis, en Espagne, en Grèce, en Italie, en Belgique et au Japon.

Il a fait l’objet de diverses publications, tant dans son pays qu’à l’étranger. En 1999, il a remporté le Grand Prix de l’Exposition nationale de photographie de Cuba pour son projet “Tierra Guajira” (Terre de campagne), qui se concentre sur la vie des travailleurs ruraux.

Peter Marshall, dans un essai sur la photographie cuPALAZZI 9 VENEZIA

baine sur le site www. photography.about.com, décrit son travail.

Une série de ses travaux sur La Havane fait un grand usage du rassemblement de parties d’une scène qui, d’une certaine manière, n’ont pas leur place.

L’ombre d’une statue équestre sur un mur se termine à son sommet, sans tête et sans cavalier.

Au-dessus du mur, un certain nombre de lampadaires modernes élancés s’élèvent vers le ciel.

Une autre photo montre un intérieur presque entièrement rempli par un téléviseur, et la vue audelà de celui-ci et par une fenêtre sur quelques marches d’une maison.

Au sommet de celles-ci, un enfant est pendu, suspendu aux bras d’un adulte qui le balance en l’air”.

Ercilla était l’un des onze photographes sélectionnés pour le concours “Cuba, Si ! Cuba, vu !”, une rétrospective de 50 ans de photographie cubaine au Royal National Theatre de Londres en 2000.

Il fait partie des meilleurs photographes de Cuba, reconnu, publié et exposé à l’échelle internationale, notamment à Cuba, aux États-Unis, en Angleterre, en France, en Norvège, en Australie, au Japon et en Espagne.

Son travail fait partie de la collection du Centre international de la photographie à New York. https://raulfoto.visura.co

Photo terradituttifestivalfilm

éon Spilliaert est l’homme des solitudes inquiétantes, des perspectives infinies. Entre interrogations métaphysiques et culture flamande, il surprend, déroute par des oeuvres inclassables, inventant un symbolisme de la nuit intérieure qui marquera l’art belge.

Il se nourrit des oeuvres picturales d’Odilon Redon ou James Ensor mais aussi des écrits d’Emile Verhaeren et Maurice Maeterlinck.

Toutefois, s’il subit l’influence du symbolisme fin de siècle, son oeuvre s’étend au-delà. Ses visages hallucinés flirtent avec l’expressionnisme ; ses paysages épurés semblent annoncer le minimalisme.

L’exposition, la première en France depuis près de 40 ans, se concentrera sur les années 1900 à 1919, les plus intenses de Spilliaert, et présentera ses oeuvres les plus radicales.

éon Spilliaert (1881-1946) est né dans la ville côtière belge d’Ostende, un lieu qui a été la principale source d’inspiration pour la plupart des deux œuvres, imprégnées de solitude, de mélancolie et de nostalgie.

Après une formation initiale da autodidatta, il fréquente l’Académie de Bruges ; en 1904, il vit à Paris, où il retourne à plusieurs reprises au cours des décennies suivantes. l s’installe à Bruxelles à l’âge de 20 ans et continue à vivre et à travailler entre les deux villes pour le reste de sa vie.

Ami de Maeterlinck (pour qui il a illustré Les ser(1881-1946) res chaudes) et de Verhaeren, Spilliaert rejoint les groupes d’avant-garde belges (Les Compagnons de l’art, Le Sillon, Sélection) ; il peint, avec une jusqu’au préférence pour l’aquarelle, l’encre de Chine et le 10 janvier 2021 pastel, des œuvres qui mêlent des éléments symCommissaires bolistes et expressionnistes dans un langage synLeïla Jarbouai, conserva- thétique, parfois dans une veine surréaliste. trice arts graphiques au L’œuvre de Spilliaert se caractérise par des permusée d’Orsay spectives dramatiques et une luminescence silenAnne Adriaens-Pannier, cieuse. conservatrice honoraire Il est surtout connu pour une série d’autoportraits des Musées Royaux des énigmatiques et de scènes nocturnes suggestives Beaux-Arts de Bruxelles se déroulant dans les rues d’Ostende.

Ses explorations visuelles, ses portraits introspectifs et ses images puissantes empreintes de 1 rue de la Légion d’Honneur solitude et de mélancolie l’alignent sur la pensée et la poétique de certains des plus grands artistes 75007 Paris européens modernistes et expressionnistes de Tél:+33 (0)1 40 49 48 14 l’époque, tels qu’Edvard Munch et Vilhelm Hammershøi. m.musee-orsay.fr/

Léon Spilliaert

Lumière et solitude

Musée d’Orsay

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Photo lepavillon

es quatre pieds repliés sur son assise à la manière d’un insecte mort, une chaise en tubes d’acier chromé se trouve clouée au mur.

Cet emblème du mobilier standardisé se voit ainsi épinglé par un étrange entomologiste, vraisemblablement désireux de mettre à l’index un spécimen représentatif de l’esthétique de bureau.

La chaise est mise au mur, alors que l’usage nécessiterait de la voir posée au sol, quitte son inscription dans l’horizontalité des objets domestiques pour s’exposer à la verticalité de l’oeuvre d’art, dans tout son caractère transcendant.

De quoi retourne-t-il ici ?

Mise en suspend, au sens propre et figuré, la chaise a perdu sa fonction première, sa raison d’être, pour en endosser une autre.

Mais elle s’en trouve là aussi interdite, en même temps que le spectateur pour lequel elle exhibe une sorte de châssis sans toile. Encadrant un vide, les barreaux de métal se croisent en leur centre comme pour en barrer l’accès. Adoptant une posture iconoclaste, l’objet semble se refuser au regard qui voudrait en pénétrer les secrets, dans un voeux de dénuement esthétique. Que nul n’aille au delà, circulez, il n’y a rien à voir.

L’emploi des tubes de métal standardisés dans la conception du mobilier d’intérieur marque les débuts historiques du design industriel dans les années trente.

L’emploi de ce matériau signifiait la volonté de rationaliser la production en faisant table rase du passé.

Il s’agissait de se tourner vers l’avenir en se débarr-

Rémi Uchéda

PLIER jusqu’ au 20 novembre 2020

Le Pavillon 18 Rue du Congo 93500 Pantin Tél: +33 1 41 71 51 18 http://transverse-art.com/

PALAZZI 11VENEZIA

assant des pesanteurs de la tradition.

Rationaliser signifiait tout à la fois : simplifier la forme pour affirmer la suprématie de la fonction ; exposer la pureté rationnelle de la structure en la débarrassant des impuretés décoratives de l’imagination ; standardiser pour effacer les particularismes culturels et tendre vers une universalité atemporelle ; alléger le mobilier pour qu’il soit réellement mobile et facile à déplacer, à l’image de l’homme moderne ; employer des matériaux industriels en ce qu’ils sont signes de force productive et de nouveauté ; affirmer la prédominance de l’acte volontaire et planifié, qui impose à la matière la droiture de la ligne et de l’angle ; et bien entendu, réduire le coût de fabrication par l’emploi de matériaux produits en grande quantité, qui assurent du même coup un rendement optimal dans la perspective d’une production en série.

Avec l’avènement de la société industrielle, la chaise devait être à l’image de l’homme qu’elle se destinait à porter.

La standardisation des cadres de vie accompagnait la mécanisation des fonctions sociales et des esprits.

Il devait en aller de même des individus et des objets : à chacun sa fonction, sa forme et sa place.

Puisque les propriétés d’un l’objet, ou d’une personne, (suit page 12)

Photo lepavillon

(suit de la page 11) sont déterminées par leur fonction, les notions de fonction et d’identité deviennent à peu de choses près synonymes.

Pour savoir qui l’on est, la question est ainsi de savoir ce que l’on fait, « dans la vie » précise-t-on souvent, pour donner à la fonction occupée dans un champ professionnel une dimension existentielle.

Aussi, lorsque le design tend à enfermer les objet dans une possibilité d’usage unique et que l’ensemble de leurs propriétés formelles n’ont pour raison d’être que d’exprimer cette fonction, interdisant toute autre manière de les considérer, leur caractère univoque peut rapidement générer un sentiment d’ennui, confinant à l’angoisse lorsqu’ils composent la quasi totalité de notre environnement immédiat.

Pour leurs usagers, la fréquentation quotidienne de ces objets contribue par là même à véhiculer l’idéologie dont ils sont l’expression : ils n’existent que pour nous rendre un service et leur omniprésence affirme au quotidien cette logique qui vise à réduire l’objet à sa fonction la plus précise possible.

De là à généraliser aux personnes ce rapport aux choses, il n’y a qu’un pas.

Avec l’habitude de réduire la perception que l’on a des objets à l’expression de leurs fonctions, le pli est vite pris.

Le programme esthétique

défini par le fonctionnalisme rigide contribue à diffuser le goût du prêt à l’emploi.

Et lorsqu’elle s’applique aux personnes, la réduction de l’être à la fonction est, à terme, toujours vécue comme une forme d’oppression.

Quelle que soit l’importance socialement accordée à la fonction occupée, le fait de se voir ainsi résumé dans le regard de l’autre constitue en soi une forme de violence, y compris pour les situations les plus enviables.

Elle est bien sûr d’autant plus forte lorsque, dans un contexte de subdivision avancée des tâches, le rôle que l’on est amené à endosser est lui-même limité.

Au sein d’une société qui se compare volontiers à une mécanique productive, l’individu s’en trouve réifié.

Cette rigidité des cadres engendre alors un impérieux besoin de dissocier être et fonction, besoin qui s’exprime souvent dans le désir de les détruire dans leur matérialité, en s’en prenant aux lieux, aux objets ou aux personnes qui les représentent.

Autre acte libérateur possible, celui de sortir des cadres.

C’est justement ce qu’a fait cette chaise.

Elle a pris sa retraite, se repliant sur elle-même pour se dégager de la fonction à laquelle on la réduisait.

Il est ainsi possible de la reconsidérer avec recul.

Sa mise à plat produit un effet de distanciation qui permet de ne plus projeter sur elle l’image standardisée dans laquelle elle était enfermée.

A force d’être vue sous le même angle, elle n’était plus regardée, tout juste reconnue en ce qu’elle occupait la PALAZZI 12 VENEZIA

place qui devait être la sienne.

Dans son désoeuvrement, libérée de toute considération fonctionnelle, la voilà rendue à la polyvalence, à la polysémie, à l’indétermination de l’être, à tous les possibles.

Sa présence matérielle s’en trouve réaffirmée et le discours tacite véhiculé par les propriétés de ses matériaux se donne de nouveau à déchiffrer.

Elle permet ainsi de voir en quoi l’emploi de l’acier chromé avait à lui seul pu incarner l’idéal de la perfection industrielle, lorsque celui-ci fit son entrée dans la production de masse au début du vingtième siècle.

De par sa solidité, sa brillance inaltérable et l’affirmation tranchée de ses surfaces lisses, ce métal inoxydable en constituait la métonymie.

L’acier chromé était l’image même de la force productive, du dynamisme, de la nouveauté, de la jeunesse.

Dépourvu d’aspérité, son aspect rutilant plaçait l’objet industriel au-delà des contingences du monde, comme s’il pouvait échapper à la corruption des corps, au devenir des choses périssables.

A l’instar du verre, sa surface insaisissable dans le glissement des reflets demeurait étrangère à la rugosité de ce qui s’use.

A ses côtés, le corps humain apparaissait comme un déchet organique, ne pouvant plus qu’aspirer lui-même à devenir métal. On comprend aisément comment, dans la langue courante, l’expression « nickel chrome » est devenue idiomatique, qualifiant n’importe quel objet PALAZZI 13VENEZIA

ou situation jugés parfaits, en fonction d’une attente précise ou lorsque tout s’est déroulé comme prévu, sans accrocs.

Ici encore, le matériau relève de l’affirmation fonctionnelle.

Dépourvu d’irrégularités, l’acier chromé souligne l’application impartiale d’un principe de construction pensé pour répondre de la manière la plus directe à l’usage. Si sa nudité exprime quelque chose, c’est précisément la volonté d’évacuer avec rigueur toute forme expression. Pour l’usager, cette recherche de neutralité limite considérablement les possibilités de projections affectives sur l’objet.

Or, au delà du seul besoin que l’on a de s’assoir pour reposer le corps et dégager l’esprit des tensions musculaires afin de favoriser le travail intellectuel ou de mieux supporter une attente, au même titre que les bancs verts des boulevards, la chaise ne devrait-elle pas répondre à d’autre usages?

Dans notre environnement domestique et professionnel, cet objet est sans doute celui qui incarne le mieux le sentiment de portance, sentiment que l’on a d’être accueilli, soutenu, en sécurité, en confiance.

La fonction première d’une chaise serait ainsi de donner également à son usager de quoi trouver une assise émotionnelle.

Objet refuge, où l’on se replie (suit page 14)

Photo etiennejacobèe

(suit de la page 13) sur soi l’espace d’un moment, objet dans lequel on se pose pour mettre un problème à plat, objet sur lequel une relation se construit le temps d’une discussion ou d’un baiser ; la chaise se fait le support de toutes les émotions que l’on porte avec nous, à condition que ses propriétés formelles soient assez riches, assez polysémiques pour que leur perception soit modulable et qu’elle puissent les accueillir dans toute leur diversité.

Aussi, le fait d’avoir plié cette chaise pour qu’elle soit physiquement impraticable rend littérale l’incapacité première de l’objet à proposer un espace ou l’on peut se poser, s’assoir au sens plein du terme.

Elle met en évidence la manière dont les revendications de l’anonymat esthétique et de la rapidité de conception appellent des usages tout aussi anonymes et temporaires.

Cette oeuvre donne ainsi à voir comment une simple chaise, inflexible dans sa volonté de n’offrir aucune assise affective, refuse à ses usagers toute forme de repos, ignorant la nécessité où l’on peut se trouver de se sentir porté par les objets qui nous entourent.

Elle donne à sentir combien le caractère inexpressif de l’objet d’origine retranscrit la violence des conceptions dont il est le résultat, conceptions qui visent à réduire objets et individus à des fonctions

simples et clairement délimitées. En repliant la chaise pour en démonter la fonction, l’oeuvre propose ouvre la forme à tous les possibles : elle confère à cet objet une expressivité paradoxale, donnant un pouvoir de parole à la norme silencieuse, une singularité à l’impersonnel, s’emparant du produit de la répétition, porteuse de pulsions de mort, pour y réintroduire une part d’indétermination et y insuffler de la vie.

Norbert Godon Ce texte a été publié dans la revue L’évolution psychiatrique Volume 84-N°3 (septembre 2019) pp. 519-521 é en 1969 dans l’Hérault, Rémi Uchéda vit et travaille à Paris après avoir été diplômé des écoles des Beaux-arts de Nîmes puis de Montpellier. Il préside depuis 2016 les ateliers « Babiole », une plateforme de production artistique qu’il a fondé à Ivry.

Avec Rémi Uchéda, les œuvres deviennent des objets, les sculptures des espaces scéniques. Utilisant le système du détournement et du réemploi, il étire les formes et les formats. Dans le temps du glissement et de la trace qu’il laisse, du regard vers l’expérience, de la distance à l’accueil, d’action courte en action longue, il interprète ses sculptures et invite les spectateurs à venir les éprouver et par-delà, peut-être, les réinventer.

En partenariat avec le Pôle des métiers d’arts d’Est Ensemble dans le cadre de la Biennale Émergences. https://sortir.pantin.fr/tout-lagenda/remi-ucheda-3153 PALAZZI 14 VENEZIA

Cynthia Gurung et Abdeljalil Qadouss : Guitares et Gumbri Mélissa Dehbia Mezdad : Violon Erick Auguste : Voix Traducteurs: Elias Sanbar - Abdellatif Laâbi Olivier Carré (Darwich) André Miquel (Sayyâb)

Contact : erick.auguste@sfr.fr

Tél: 06 60 22 64 44 PALAZZI 15 VENEZIA

Nous sommes prêts

Photo murielle dellepont

Appartements, caves, garages, Jardins, Monts de l’Olympe…Masque ou pas masque

Photo theguardian

lors que la cathédrale Notre-Dame a été engloutie par les flammes l’année dernière, des milliers de personnes ont déploré la perte de ce grand phare de la civilisation occidentale.

Le symbole ultime de l’identité culturelle française, le cœur même de la nation, partait en fumée.

Mais Diana Darke, spécialiste du Moyen-Orient, avait d’autres idées.

Elle savait que les origines de ce majestueux tas gothique ne se trouvaient pas dans les pures annales de l’histoire chrétienne européenne, comme beaucoup l’ont toujours supposé, mais dans les déserts montagneux de Syrie, dans un village situé juste à l’ouest d’Alep pour être précis.

“La conception architecturale de Notre-Dame, comme toutes les cathédrales gothiques d’Europe, provient directement de l’église syrienne de

Les monuments pillés: comment Notre-Dame, Big Ben et St Mark’s ont été volés à l’est Ce sont des phares de la civilisation occidentale.

Mais, selon un livre explosif, les plans des plus grands bâtiments d’Europe ont été pillés du monde islamique tours jumelles, rosaces, plafonds voûtés et tout.

Oliver Wainwright

Qalb Lozeh, datant du Ve siècle”, a tweeté Darke le matin du 16 avril, alors que la poussière s’installait encore à Paris.

Les Croisés ont ramené en Europe au XIIe siècle le concept de la “tour jumelle flanquant la rosace”.

Ce ne sont pas seulement les tours jumelles et la rosace qui ont leurs origines au Moyen-Orient, a-t-elle souligné, mais aussi les voûtes à nervures, les arcs en ogive et même la recette des vitraux.

L’architecture gothique telle que nous la connaissons doit beaucoup plus à l’héritage arabe et islamique qu’aux Goths déchainés.

“J’ai été étonné de la réaction”, dit Darke. “Je pensais que plus de gens savaient, mais il semble y avoir ce grand fossé d’ignorance sur l’histoire de l’appropriation culturelle. Dans un contexte d’islamophobie croissante, j’ai pensé qu’il était temps que quelqu’un redresse la situation”.

C’est ainsi qu’avec “Stealing from the Saracens”, elle a écrit un livre passionnant et méticuleusement documenté qui met en lumière des siècles d’emprunts, en retraçant les racines des principaux bâtiments européens - du Parlement et de l’abbaye de Westminster à la cathédrale de Chartres et à la basilique Saint-Marc de Venise - jusqu’à leurs précédents au Moyen-Orient.

C’est autant une histoire de pouvoir politique, de richesse et de mode que de croyance religieuse, avec des récits de pillages des Croisés, d’évêques soucieux de la mode et de marchands qui parcourent le monde pour découvrir de nouveaux styles et techniques et les ramener chez eux.

“Maintenant, nous avons cette notion d’est et d’ouest”, dit Darke. “Mais à l’époque, ce n’était pas comme ça.

Il y avait d’énormes échanges culturels - et la plupart venaient de l’est vers l’ouest.

Très peu allaient dans l’autre sens.”

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Photo Bertramz Qalb Lozeh

Chef-d’œuvre de géométrie ... l’intérieur exquis de la mosquée-cathédrale de Cordoue. Étant donné leur présence dans les grandes cathédrales d’Europe, on peut facilement imaginer que les arcs de pierre pointus et les voûtes à nervures élancées sont d’origine chrétienne.

Mais la première remonte à un sanctuaire islamique du VIIe siècle à Jérusalem, tandis que la seconde a débuté dans une mosquée du Xe siècle en Andalousie, en Espagne.

En fait, ce premier exemple connu de voûte à nervures est toujours d’actualité.

Les visiteurs de la Mezquita de Cordoue peuvent s’émerveiller de ses multiples arcs qui se croisent en un chef-d’œuvre de géométrie pratique et de structure décorative, n’ayant jamais eu besoin de réparation au cours de ses mille ans d’existence.

La maqsoura voûtée - la partie de la mosquée réservée au calife régnant - a été conçue pour projeter une lueur sacrée sur le chef.

Cependant, le dépliant officiel ne vous dira pas grand-chose sur l’origine islamique du bâtiment, peut-être parce qu’il s’agit d’une église catholique depuis 1236.

L’arc en ogive, quant à lui, était une solution pragmatique à un problème rencontré par les maçons travaillant sur le Dôme du Rocher à Jérusalem.

L’un des sites les plus sacrés du monde musulman, il a été construit en 691 par le souverain du premier empire de l’Islam.

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Le défi consistait à aligner une arcade extérieure d’arcs arrondis avec une arcade intérieure plus petite, tout en maintenant un plafond horizontal entre elles. Pour que les ouvertures s’alignent, les maçons devaient donner à l’arcade intérieure des arcs plus serrés, les forçant à devenir pointus.

Une autre première mondiale est visible plus haut dans le sanctuaire, où le dôme est entouré d’une arcade d’arcs en trèfle, le style d’arc trilobé qui a ensuite incrusté pratiquement toutes les cathédrales européennes, adopté avec voracité comme symbole de la Sainte Trinité.

“Encore et toujours”, dit Darke, “je suis tellement frappé par la quantité de ces choses que nous considérons comme essentiellement chrétiennes et européennes, qui sont basées sur l’ignorance et la mauvaise interprétation de formes islamiques bien plus anciennes”.

Elle souligne que l’énorme influence du Dôme du Rocher est due au fait que les Croisés du Moyen-Âge ont cru à tort que le bâtiment était le Temple de Salomon.

Ils ont utilisé le plan circulaire en forme de dôme de ce sanctuaire soi-disant chrétien comme modèle pour leurs églises templières (comme l’église ronde du Temple de la City de Londres), copiant même l’inscription décorative en arabe, (suit page 18)

Photo stealingfromsaracens

(suit de la page 17) qui châtie ouvertement les chrétiens pour avoir cru en la Trinité plutôt qu’en l’unité de Dieu.

Leurs motifs calligraphiques pseudo-coufiques ont ensuite orné la maçonnerie des cathédrales françaises et les bordures de textiles richement tissés, sans que personne ne sache ce qu’ils signifiaient réellement.

La confusion s’est encore aggravée avec la première carte imprimée de Jérusalem, publiée à Mayence, en Allemagne, en 1486.

Non seulement le Dôme du Rocher y est mal étiqueté comme étant le Temple de Salomon, mais le bâtiment y est représenté avec un fin dôme en oignon - une pure fantaisie orientaliste issue de l’esprit d’un graveur sur bois néerlandais nommé Erhard Reeuwich.

Le livre contenant la carte est devenu un best-seller, réimprimé 13 fois et traduit en plusieurs langues, ce qui a influencé la diffusion des églises à dôme d’oignon dans toute l’Europe au XVIe siècle.

C’est un récit d’identité erronée et de conséquences involontaires digne d’une esquisse des Monty Python.

Le transfert des motifs islamiques vers l’Occident n’a cependant pas toujours été aussi simple.

L’arc pointu a pris un chemin plus détourné.

Darke retrace comment les arcs se sont d’abord

répandus au Caire, devenant plus pointus et plus aigus sous l’empire abbasside, et ont été à leur tour admirés par les marchands de passage du riche port italien d’Amalfi, qui ont canalisé les découvertes de leurs voyages dans leur basilique éclectique du 10e siècle.

Cet édifice exotique a attiré l’attention de l’abbé Desiderius, qui s’est rendu à Amalfi en 1065 pour y faire du shopping et y trouver des produits de luxe rares, et qui a décidé de reprendre le dessin de la fenêtre en pointe de son monastère de Monte Cassino.

Ces fenêtres ont ensuite été copiées pour l’abbaye bénédictine de Cluny en France, la plus grande église du monde à l’époque.

L’abbé Suger, conseiller des rois Louis VI et VII, a aimé la façon dont les fenêtres laissaient entrer plus de lumière et a immédiatement appliqué le même design à sa basilique Saint-Denis à Paris.

Considérée comme la plus ancienne structure entièrement gothique, la basilique fut achevée en 1144 et son architecte travailla ensuite à Notre-Dame.

“Ils l’ont tous copiée”, dit Darke. “C’étaient les églises les plus puissantes d’Europe, donc le style a complètement décollé, comme toutes les modes.

Quand les gens puissants adoptent quelque chose, tout le monde en veut une”.

La liste est longue.

Il y a les premiers minarets carrés, que l’on trouve sur des bâtiments comme la Grande Mosquée de Damas, qui s’amincissent et sont couronnés d’un dôme bulbeux en forme de fleuron.

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Photo stealingfromsaracens

Ces minarets ont inspiré de grandes tours italiennes comme celles de l’hôtel de ville de Florence et du Campanile de Saint-Marc à Venise, préfigurant des siècles de clochers d’églises.

S’appuyant sur les recherches de l’historienne de l’architecture Deborah Howard, Darke montre que Venise est plus arabe qu’européenne, de ses passages étroits et sinueux et de ses maisons à cour avec des terrasses sur les toits, à l’ornementation islamique du palais des Doges (sur le modèle de la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem) et aux dômes en oignon de Saint-Marc.

Tous sont le fruit de voyages effectués par les marchands vénitiens en Égypte, en Syrie, en Palestine et en Perse, favorisant un niveau d’influence qui s’étendait même à la mode : à Venise, les femmes étaient voilées en public et habillées de noir de la tête aux pieds.

“On ne peut pas voir leur visage pour tout le monde”, commentait une source du XVe siècle. “Elles se promènent si complètement voilées que je ne sais pas comment elles peuvent voir pour aller dans la rue”.

Ce livre arrive à un moment où l’architecture prétendument occidentale est mobilisée par des groupes nationalistes de droite pour renforcer leur vision idéalisée d’une identité européenne “pure”.

D’innombrables médias sociaux diffusent aujourd’hui des messages de suprématie blanche déguisés en appréciation du patrimoine, tandis que les récents décrets gouvernementaux sur la tradition et la beauté ont des connotations similaires.

PALAZZI 19 VENEZIA

L’œuvre de Darke donne un coup de massue éloquent à cette propagande ignorante, qui révèle comment les monuments idéalisés par la droite ont leurs racines dans la culture même dont ils se méfient tant.

L’ignorance est répandue, et le plus surprenant dans “Voler les Sarrasins” est peut-être de voir à quel point cela ne devrait pas surprendre le lecteur moderne.

Après tout, tout au long du livre, Darke cite les mots de Christopher Wren, qui était bien conscient des origines moyen-orientales de l’architecture gothique, et des techniques structurelles qu’il utilisait pour la cathédrale St Paul.

“Le gothique moderne”, écrit-il dans les années 1700, “se distingue par la légèreté de son œuvre, par l’audace excessive de ses élévations ... par la délicatesse, la profusion et la fantaisie extravagante de ses ornements ... De telles productions, si aériennes, ne peuvent admettre les lourds Goths pour leur auteur”.

Au contraire, conclut-il, “de toutes les marques de la nouvelle architecture, elle ne peut être attribuée qu’aux Maures ; ou, ce qui est la même chose, aux Arabes ou aux Sarrasins”.

Olivier Wainright Stealing from the Saracens: How Islamic Architecture Shaped Europe by Diana Darke is published

by Hurst on 20 August.

Photo musée de l’orangèrie

ur le côté gauche du tableau, bizarrement décentrée sur une place bordée d’édifices aux arcades arrondies et quadrillée par les ombres qu’ils font bâiller au sol, une statue s’ennuie ferme.

Elle soutient sa tête trop lourde sans se donner la Au musée de l’Orangerie peine d’assumer pleine- à Paris, une monographie ment la posture lascive restitue à l’histoire et aux qu’elle esquisse pourtant. influences de son temps En cause : la poitrine les œuvres de Giorgio de pointue et la silhouette Chirico durant sa courte protocubique que lui a période «métaphysique». faites l’artiste, mais aussi Sans heureusement résl’angle sous lequel il l’a oudre ce mystère insonpeinte, qui jure avec celui dable qui, sous un soleil du socle. de plomb, habite pour Socle dont la perspective toujours ses peintures. est elle-même biaisée par rapport à la ligne d’horizon, plantée de deux palmiers et de l’épais panache de fumée laissé par un train qui passe, unique trace de mouvement dans MUSÉE DE L’ORANGERIE ce paysage urbain figé à Jardin des Tuileries mort.

A l’horloge, il est deux Place de la Concorde heures moins cinq.

75001 PARIS Au vu des ombres et de la lumière jaunâtre et +33 (0)1 44 77 80 07

LE VOYAGE DE CHIRICO

jusqu’au 14 décembre 2020

déclinante, il est au moins quatre heures de plus.

La toile de Chirico, la Récompense de la devineresse (1913), avec toute sa composition de guingois, ses perspectives qui clochent, sa torpeur climatique et sa surface légèrement pâteuse, se place de toute façon hors de tous les fuseaux horaires de l’art et n’est situable nulle part sur la carte du monde.

Elle appartient à une parenthèse ensorcelée dans la production de l’artiste et, au-delà, dans l’histoire de l’art tout entière.

Apollinaire trouva un nom à cet «art intérieur et cérébral»: «la peinture métaphysique».

C’est sur cette période relativement brève (19091918), si on la rapporte à la longévité de l’artiste (mort en 1978) et à sa versatilité picturale, que le musée de l’Orangerie se concentre.

Et à voir ou à revoir, plus d’un siècle après leur apparition à Paris, au Salon d’automne de 1913, ces places publiques désertiques traversées par une armée d’ombres, léchant les flancs de statues, bientôt semées d’objets incongrus, avant que des mannequins ne prennent le pouvoir dans des espaces clos, le charme de ces «peintures métaphysiques» demeure total et leur mystère, insondable.

André Breton, qui vit dans cette période phare de l’artiste une anticipation des visions surréalistes, tout en rejetant la suite de sa peinture, néobaroque, présageait dès 1928 : «Les œuvres peintes par Chirico avant 1918 […] sont encore tout au commencement de leur carrière.»

Effectivement, à l’époque de cette déclaration, Chirico est déjà ailleurs : dès les années 20, il changera radicalement son pinceau d’épaule, abandonnant toute velléité avant-gardiste, trompant son monde en versant dans une peinture néobaroque et pompeuse.

Pour y voir un peu plus clair dans la genèse de la pein-

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Photo liberation

ture métaphysique, l’exposition avance à pas feutrés dans les pas du jeune Chirico, le suivant dans ses nombreuses pérégrinations à travers les différentes scènes artistiques européennes et glissant aux côtés de ses pièces quelques autres, gravures, tableaux ou sculptures qu’il a eues sous les yeux, dont il a pu s’imprégner, ou qui témoignent de l’influence qu’il a pu avoir en retour sur ses pairs. Jamais démonstrative, portée par une scénographie bien tempérée qui commence dans la pénombre, libère de la place aux premiers paysages métaphysiques avant de densifier les cimaises, quand les tableaux eux-mêmes saturent leur propre espace d’objets enchevêtrés, la monographie augmentée que livre le musée de l’Orangerie ne résout heureusement pas l’éternelle énigme posée par cette peinture, mais parvient à la connecter à l’histoire et aux formes de son temps.

Mais d’abord à celles de l’Antiquité grecque, sur les terres de laquelle est né Chirico.

Issu d’une famille gréco-italienne, il passe en effet son enfance en Thessalie, terre de mythologie, havre des argonautes et des centaures.

Après des études à Athènes avec son frère, cet imaginaire-là, le jeune Chirico le cultive à l’académie des beaux-arts de Munich, effervescente capitale d’un romantisme tourmenté et hellénisant, qui connecte l’âme au paysage représenté.

Les œuvres de Böcklin montrées dans la première salle de l’Orangerie, montagnes escarpées creusant entre elles des gouffres où gît un centaure, ou bien

voir la vidéo https://youtu.be/ BzFLvM5f4b4

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Ulysse désemparé face à l’immensité de la mer, marquent la première manière de Chirico: son centaure renversé dans un vallon est très ressemblant à l’autre et ses rochers, tout aussi habités de formes anthropomorphes, évoquant une fusion de l’homme et de son esprit avec la nature.

Si la facture de ces toiles précoces reste vaporeuse, très loin de la touche précise de celles qui suivront, il y a peut-être déjà là, figurée, la quête obstinée mais apaisée d’un infini.

«Dans le mot de métaphysique, je ne vois rien de ténébreux, écrit ainsi l’artiste en 1912.

C’est cette même tranquille et absurde beauté de la matière qui me paraît “métaphysique” et les objets qui, grâce à la clarté de la couleur et grâce à l’exactitude des volumes, se trouvent placés aux antipodes de toute confusion et de toute obscurité, me paraissent plus métaphysiques que d’autres objets.»

Et c’est à Paris, de retour d’Italie, que Chirico adopte ce trait net qui prend le soin de bien distinguer chaque élément.

Au point que tout, statues, bâtiments, personnages minuscules, semble parfaitement étranger.

Avec pour seul point commun de cuire sous un soleil de plomb, jamais peint, mais toujours suggéré par une palette jaune, ocre, terreuse. (suit page 22)

Photo tategallery

(suit de page 21) L’artiste accroît son voisinage insolite.

Dans l’Incertitude du poète (1913), il plante un volumineux régime de bananes au bas d’un buste féminin et laisse toujours un train passer à l’horizon, signe peut-être de la présence de son père dans l’affaire (il était ingénieur ferroviaire).

Un mois après, la Conquête du philosophe place deux formidables artichauts sous un canon. A l’horloge au-dessus, il est une heure et demie.

Le train au loin est à l’heure. Entre les signes, «la solitude des signes», selon l’expression de Chirico, les associations d’idées les moins prévisibles, les plus oniriques peuvent alors circuler. Le peintre se fait voyant dans la lignée de Rimbaud (dont il admira les Illuminations) et livre d’Apollinaire un portrait où l’ombre de son ami se dessine de profil, au-dessus d’un buste d’Apollon portant des lunettes noires, et bordée du dessin au fusain d’un poisson et d’un coquillage, symboles de naissance.

Le poète comme le peintre trouvent le salut en se rendant aveugles aux choses du présent et du réel.

Pourtant, la réalité, avec la guerre, rattrape Chirico, qui s’engage comme volontaire dans l’armée italienne.

S’il combat peu, puisqu’il est interné pour troubles nerveux à Ferrare (Italie), le conflit le touche et affecte sa peinture, qu’il peuple désormais de mannequins.

Désarticulés, amputés, le

visage réduit à rien dans une tête en forme d’ampoule, ils incarnent, pantois et pathétiques, les corps amputés des «gueules cassées».

Mais aussi, parce qu’ils sont parfois cernés des outils du peintre (quand ils apparaissent devant un chevalet), enclos dans des chambres calfeutrées, encombrées de toute sorte d’objets de mesure (réglettes ou équerres), ils figurent le double de l’artiste.

Les toiles, multipliant les cadres dans le cadre du tableau, mettent en abyme la trajectoire de sa peinture Une peinture qui ne cesse de rétrécir l’envergure de ses décors pour mieux les creuser en profondeur, y ouvrir des portes et des fentes qui sont autant de chausse-trapes vers un imaginaire, tour à tour bouché ou foisonnant, minuscule ou grandiloquent. Les espaces peints s’interpénètrent moins qu’ils ne se font de l’ombre. Dans le Rêve de Tobie (1917), un thermomètre qui prend la taille d’une tour s’interpose devant, d’un côté une nature morte au poisson et, de l’autre côté, un paysage d’arcades ; tandis qu’au fond, une composition géométrique grise situe le tout dans une espèce de remise, en sous-sol.

La peinture deviendrait ainsi avec Chirico le lieu d’un stockage d’instruments, de paysages, de mondes, de récits voire d’êtres désincarnés dont on aurait perdu l’usage et dont il reviendrait au spectateur de se ressaisir.

La peinture métaphysique serait alors ce moment d’une quête, mélancolique, tortueuse, tâtonnante, incertaine, pour réenchanter l’existence et revenir, comme Ulysse (héros récurrent dans la production ultérieure de l’artiste) au point de départ. Judicaël Lavrador next.liberation.fr/ PALAZZI 22 VENEZIA

Photo juliedjikey

oixante-dix artistes congolais, membres pour la plupart d’une très jeune génération de créateurs racontent dans cette exposition la complexité et la richesse de la capitale congolaise.

Photographie, BD, performance, vidéo, peinture, slam, etc : leurs travaux offrent de multiples points d’entrée pour penser l’espace urbain kinois. Les oeuvres présentées constituent ainsi une écriture plurielle, novatrice et engagée où s’exprime une lecture de la ville comme creuset des possibles.

Avec ses quelques treize millions d’habitants et 85% de sa surface auto-planifiée et auto-construite, Kinshasa peut, en effet, être perçue comme le révélateur d’une nouvelle façon de produire la ville.

Sur fond de déambulation, l’exposition s’articule autour de neuf chroniques : performance, sport, paraître, musique, capital, esprit, débrouille, futur, mémoire. Les thématiques sont diverses mais n’ont pas pour objectif d’offrir une vision englobante et exhaustive de Kinshasa.

Ces chroniques peuvent d’ailleurs être abordées de manière linéaire ou bien selon l’intérêt et l’envie des visiteurs, en faisant des sauts, des impasses, des allers et retours.

Engagés, à la recherche de manières nouvelles de dire et d’imaginer la ville, tant formellement qu’éthiquement et politiquement, les concepteurs que l’on rencontre dans cette exposition mettent radicalement à mal clichés et images faciles.

Ils disent, par la plastique, par le verbe, par le son, Kinshasa telle qu’elles et ils la voient, la vivent, la questionnent, l’imaginent, l’espèrent, la contestent.

Kinshasa Chronique jusqu’au

11 janvier 2021 Avec (entre autres) Francklin Mbungu Tobe Geraldine Renaud Barret et Eric Androa Mindre Kolo Bienvenu Nanga Gosette Lubondo etc.

Cité de l’architecture

1 Pl Trocadero Et du 11 Novembre Palais de Chaillot 75116 Paris

+33 1 58 51 52 00

PALAZZI 23 VENEZIA

ne approche de la capitale congolaise, troisième ville d’Afrique, née du regard d’artistes dont la pratique est ancrée dans une expérience intime de l’espace urbain. Soixante-dix créateurs (individus, binômes, collectifs) y disent par la plastique, par le verbe, par le son, Kinshasa telle qu’elles et ils la voient, la vivent, la questionnent, l’imaginent, l’espèrent, la contestent ».

Photographes, vidéastes, performeurs, slameurs, rapeurs, peintres, bédéistes envahiront le MIAM pour proposer une déambulation à travers Kinshasa «qui mène les visiteurs de quartier en quartier, l’exposition s’articule autour de neuf chroniques.

Ces chroniques peuvent être abordées comme on aborderait la ville elle-même, de manière linéaire ou, selon l’intérêt et l’envie de chacun, en faisant des sauts, des impasses, des allers et retours ». À l’évidence, « Kinshasa Chroniques» est une exposition incontournable qui mérite plus d’une visite pour en apprécier toute la richesse.

Un guide de visite est disponible à l’accueil.

Il offre les repères nécessaire pour apprécier des démarches artistiques et comprendre le contexte dans lequel elles se sont élaborées. facebook.com/beatrice.soule.5

Photo https://musees-meuse.fr/

ertaines maisons contiennent les passions d’une vie: l’une d’elles est la Casa Mollino, devenue un musée à ​​Turin, la ville où l’architecte Carlo Mollino (1905-1973) a passé sa vie.

C’est dans ce lieu qu’après sa mort, une impressionnante collection de Polaroid a été trouvée, ainsi que d’autres trésors qui ont inspiré les œuvres d’Enoch Perez et de Brigitte Schindler, exposés au centre Collezione Maramotti en Émilie-Romagne.

Architecte, designer, photographe, pilote, moniteur de ski…

Carlo Mollino est l’un des designers et artistes les plus iconiques de l’Italie du XXe siècle.

Parmi ses projets architecturaux les plus connus : le Turin Riding Club (1936-1940), le Palazzo degli Affari (1964-1972) ou le Teatro Regio de Turin (1965-1973).

En tant que designer, Mollino a conçu des meubles en série limitée depuis les années 1930, caractérisés par un haut niveau de savoir-faire et l’utilisation de nouveaux matériaux.

Ses résidences mythiques, de la Casa Miller (19361942) à la Villa Scalero (1956-1962) et à la Villa Zaira (depuis 1962) ont été propices à l’écriture des scénarios de ses photographies, principalement des L’architecte féminins. piémontais n’en finit pas nus Carlo Mollino définissait la photographie comme « d’influencer les artistes, un faux document, fabriqué plus ou moins consciemment et choisi à des fins tendancieuses et personneldont les, saisi de telle sorte que l’objectivité n’en a que l’apparence ». le Portoricain En 1968, il achève la Villa Avondo dans la Via NapioEnoch Perez ne 2, à Turin, où il n’emporte que quelques Polaroids dont il est parmi les premiers à exploiter les possibiet l’Allemande lités expressives.

Brigitte Schindler Il aime les définir comme « des fantasmes d’une vie qui exposent au centre quotidienne impossible ».

C’est un lieu énigmatique, débordant d’émerveillemd’art ent, une « œuvre d’art totale » où se mêlent surréalisme et alchimie.

Après sa mort, elle deviendra le musée Casa Mollino qui se visite sur rendez-vous.

Aujourd’hui encore, son mobilier – chaises, fauteuils, chaises longues – mais aussi ses sculptures et ses photographies y sont conservés.

Dans l’exposition Mollino / Insides qui se déroule jusqu’au 16 mai 2021 à la Collezione Maramotti, des photographies de Carlo Mollino sont présentées, ainsi que des peintures d’Enoc Perez et des clichés de Brigitte Schindler.

L’artiste portoricain Enoch Perez, basé à New York, Tél : +39 0522 382484 qui a visité le musée de la Casa Mollino en septembre PALAZZI 24 VENEZIA

Carlo Mollino

jusqu’au

16 Mai 2021 Collezione Maramotti

via Fratelli Cervi, 66 42124 Reggio Emilia

Photo carlomollino

2019, a pris des photographies de l’intérieur et créé une série de peintures grand format pour cette exposition.

Il transfigure les espaces architecturaux de l’ancienne demeure de Carlo Mollino et introduit des niveaux de lecture et d’interprétation inédits.

Ses intérieurs peints enrichissent son projet à long terme de dresser les portraits picturaux de l’architecture moderniste.

Enoch Perez dépeint des pièces oniriques et évocatrices qui restituent une empathie intellectuelle totale avec l’architecte piémontais.

D’après l’artiste : « Ces espaces émergent d’une culture où le surréel est omniprésent et où l’alchimie est une discipline ; ils sont sages sans être institutionnels. À mon avis, le surréalisme et le modernisme coexistent dans la Casa Mollino.

Je sais que la peinture permet parfois de mieux comprendre ce que je ne peux pas expliquer, juste ce que je vois.

En peignant Mollino, j’espère mieux expliquer ce que je sais que je vois. » La photographe allemande Brigitte Schindler, quant à elle, se concentre sur les détails visiblement moins significatifs et sur leur capacité évocatrice, soulignant leur rôle de clés pour accéder à une réalité visuelle « différente », jalousement gardée.

Chaque plan évoque un scénario implicite sous-jacent à une histoire, un récit à travers des images qui PALAZZI 25 VENEZIA

se révèlent à travers des objets – des miroirs en particulier –, premiers indices impalpables d’un changement de perception onirique.

Selon Brigitte Schindler : « J’ai effectué jour et nuit un intense voyage d’exploration parmi les montagnes de pixels que j’ai captées à la Casa Mollino pour une sélection dense qui reflète les perspectives existantes et qui nous invite à fantasmer – chacun à sa manière – sur un portrait de la maison et sur son message (y compris les contenus cachés) à partir du point de vue de l’artiste, bien sûr, mais aussi de mon point de vue féminin. » h t t p s : / / w w w. a d m a gazine.fr/art/news/ diaporama/une-exposition-sur-larchitecte-turinois-carlo-mollino/

Photo elizabeth watermn

u cours de la dernière décennie, la représentation des strip-teaseuses a beaucoup évolué.

Le trope autrefois populaire de la travailleuse du sexe victimisée a été remplacé par des personnes ayant de l’action et de la volonté, dans des films comme Hustlers (2019), par exemple, et dans des clips vidéo d’anciens artistes de la prostitution, comme Cellophane de FKA Twigs (2019) et Cardi B’s Money (2018).

Ces représentations ont largement contribué à reconceptualiser le pole dancing comme une activité féministe responsabilisante, ainsi qu’à la popularité croissante des cours de fitness qui le promeuvent pour sa capacité à construire un physique fort et tonique.

Pourtant, le strip-tease, comme d’autres formes de travail du sexe, reste l’une des professions les plus stigmatisées au monde, et ces représentations ne plaident pas toujours en faveur des strip-teaseuses de la vie

Dark Angels: Illuminating the beauty and athleticism of strippers Marigold Warner Elizabeth Waterman a visité 25 clubs de strip-tease au cours des quatre dernières années.

Sa documentation présente les nombreuses facettes de la culture du strip-tease et les femmes extraordinaires qui y travaillent. elizabethwaterman.com

réelle, qui reçoivent rarement un soutien en dehors de ces camées de la culture pop.

Leur esthétique est reprise sur les grands écrans et les scènes des journaux, mais les strip-teaseuses ont encore peu de droits et de protection, surtout maintenant, alors que la pandémie mondiale a mis l’industrie du nightlife en sommeil.

En juillet 2020, FKA Twigs a sorti un court métrage, We Are the Womxn, tourné dans l’historique club de strip-tease Black Blue Flame d’Atlanta. Twigs, qui travaillait autrefois comme hôtesse dans un club de gentleman, a été fortement critiquée pour son manque de plaidoyer ou de soutien tangible, et a depuis lancé une collecte de fonds contre la pandémie pour les organisations apportant une aide financière directe aux strip-teaseuses et aux travailleurs du sexe. .

Selon Elizabeth Waterman, une photographe qui a passé les quatre dernières années à photographier la culture du strip-tease, ce geste a été largement apprécié par la communauté des strip-teaseurs.

Il y a d’anciennes célébrités du strip-tease qui ne contribuent pas aux droits des strip-teaseuses ou à leur défense, mais qui se contentent de se laisser porter par la marque “cool” d’une strip-teaseuse”, explique-t-elle.

“Il y a encore un stigmate attaché à ce genre de travail. Les gens veulent souvent prendre les bonnes choses, mais ils ne veulent pas faire face au fait que ces femmes n’ont pas un bon positionnement pour obtenir des avantages sociaux, ou les droits à être respecté par la société, alors ils deviennent faciles à piétiner”.

Waterman a passé les quatre dernières années à voyager à travers les États-Unis et le Mexique, photographiant dans 25 clubs de strip-tease.

“C’est une communauté difficile à pénétrer”, explique la photographe de Los Angeles, qui a commencé le projet alors qu’elle vivait à New York, où elle a essentiellement fait du porte-à-porte.

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Photo elizabeth warren

“Je ne savais pas comment j’allais y accéder, je pensais que j’allais devoir me déshabiller, et laissez-moi vous dire que je ne suis pas une bonne strip-teaseuse”, dit-elle en riant. “J’ai essayé une fois, mais je ne pouvais pas danser et prendre des photos en même temps.”

Finalement, après avoir été refusée dans au moins 10 clubs de la ville, un club du Queens l’a laissée entrer. Entre ses murs noirs et ses sols collants, avec un appareil photo autour du cou, Waterman a été accueillie avec suspicion, mais elle est revenue, semaine après semaine.

Elle apportait des beignets, aidait à collecter les billets de banque sur la scène, et quand elle montrait ses images aux danseurs, “ils aimaient la façon dont je les voyais”, dit-elle.

Les relations qu’elle a nouées dans ce premier club ont ouvert les portes à 24 autres.

“Ils veulent plus de droits, ils veulent plus de visibilité, et ils veulent plus de crédit là où le crédit est dû, parce que les gens les utilisent pour le divertissement et pour la valeur culturelle, chic, mais ils obtiennent la partie courte du bâton” De New York à Miami, Las Vegas et Los Angeles, Waterman a photographié sur scène et dans les coulisses.

Chaque État a ses propres règles, dit-elle, et chaque club a son atmosphère unique. “Las Vegas était tape-à-l’œil et grandiose.

Les clubs étaient gigantesques, très haut de gamme.

A Miami s’était la fète totale.

Il n’y avait pas de règles. Il y avait aussi beaucoup de femmes, comme les enterrements de vie de jeune fille.

C’était loin d’être un club de gentlemen”.

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Beaucoup des strip-teaseuses que Waterman a photographiées n’avaient jamais travaillé avec une femme photographe.

Selon elle, la plupart des clubs ont tendance à engager des hommes pour réaliser leurs images promotionnelles.

“Si vous regardez beaucoup de leurs pages Instagram, c’est juste de l’imagerie sexualisée”, dit Waterman, en référence à des gros plans de seins et de joues de clochard. En réalité, le strip-tease est bien plus qu’un simple étalage d’un corps nu, c’est une question d’endurance, de performance et d’amélioration de la beauté de la forme féminine.

“Je vois ces femmes comme étant belles, fortes et puissantes.

C’est ce qui apparaît sur les photos.

Je suis devenue amie avec elles et j’ai pu capturer des moments qui étaient réels”, dit Waterman. “Avec beaucoup de photographes masculins, ce n’est pas toujours le cas.”

Il existe actuellement plus de 4 000 clubs de strip-tease aux États-Unis, qui font vivre environ 58 000 employés.

Mais, depuis que Covid-19 a secoué l’industrie du divertissement, de nombreuses strip-teaseuses ont été contraintes de se tourner vers d’autres moyens de gagner de l’argent, comme la caméra ou la pornographie.

“Il n’y a pas beaucoup de ressources pour elles, et elles luttent pour obtenir des allocations (suit page 28)

https://www.bjp-online. com/2020/10/dark-angels-elizabeth-waterman/

Photo elizabethwarren

Photo barbarad’antuono

(suit de la page 27) gouvernementales.

Tous ces prêts que le gouvernement américain accordait aux entreprises, il ne les accordait à personne dans l’industrie du sexe”, dit Waterman. “Ces femmes veulent plus de droits, elles veulent plus de protection et elles veulent plus de crédits là où ils sont dus, parce que les gens les utilisent pour se divertir et pour des raisons culturelles et chics, et en général, elles obtiennent ce qu’il y a de moins cher”.

En 2021, Waterman publiera un livre de photos de son travail, qui comprend actuellement plus de 800 images.

En plus de mettre en valeur la beauté et l’athlétisme des danseurs, la série offre un portrait authentique de leur vie.

Le strip-tease n’est pas un métier facile et, “malgré ces dangers, de nombreuses femmes décident d’entrer dans la profession dans le cadre d’une stratégie, comme moyen de rembourser des prêts étudiants, d’acheter une maison ou de prendre une participation dans une entreprise commerciale”, écrit Mme Waterman dans une introduction à son travail.

“Elles trouvent le courage de préserver et de maintenir leur dignité... et sur le poteau, elles semblent transcender tout cela... dans une grâce éthérée et éblouissante.”

Marigold Warner

ESPRITSVAGABONDS

ousant à la main comme d’autres récitent des mantras et ne décidant rien à l’avance, Barbara d’Antuono laisse surgir des images sans cohérence particulière les unes avec les autres, mais auxquelles elle donne corps dans une sorte d’urgence.

Sa rencontre en Haïti avec le Baron Samedi et la mythologie liée au vaudou, ainsi que les éclaboussures traumatiques du coup d’état de 1986 et des exactions dont elle est témoin, la précipitent dans une nécessité de dire l’indicible : « Coudre, suturer, refermer ces plaies, greffer un tissu sur un autre, mais aussi « broder » pour donner un sens, pour témoigner parfois de mon désir profond de réunir les deux cultures qui m’habitent ».

Globe-trotter, elle nourrit son travail de ses voyages, notamment en Afrique où elle retrouve le vaudou et sur les pentes de tous les volcans du monde.

Créatrice d’imaginaire, elle fait naître sous ses doigts un monde jubilatoire, onirique, ironique, carnavalesque et parfois naïf.

Imprégnée de ce savoureux mélange, toute son œuvre se condense dans un syncrétisme baroque flamboyant, où l’humour n’est jamais loin et Haïti toujours présent.

Sur ces images intemporelles, le jeune auteur haïtien Kevin Pierre pose les mots poétiques d’un engagement contemporain pour la dignité de son pays.

Leur échange de fils et de mots parle des choses de la vie et de la mort, du vaudou ancestral et des difficultés d’aujourd’hui.

Pour restituer au lecteur la puissance évocatrice de la langue de l’auteur, les textes sont proposés en version bilingue français/créole haïtien.

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Photo barbarad’antuono

arbara d’Antuono, corse d’origine italienne née en 1961, quitte la France dans les années 80 pour les Antilles et la Jamaïque.

C’est dans le foisonnement artistique d’Haïti, où elle reste 5 ans, qu’elle s’initie à la peinture et à la sculpture, notamment dans l’atelier du peintre haïtien Ronald Mevs.

Se révèlent à elle le magique, ses démons intérieurs et l’esthétique de son travail de plasticienne.

Elle commence son parcours artistique par des assemblages de bois et d’ossement, des collages, des totems, des fétiches… Babette El Saieh, fille du grand collectionneur Issa El Saieh, lui donne sa première chance d’exposer à l’hôtel Olofson de Port-au-Prince.

Après plusieurs expositions à Haïti, elle quitte l’île à la suite du coup d’état de 1986.

Rentrée en France, elle développe sa propre technique alliant sculpture, peinture, graphisme, couture, poésie et musique.

Dès 1995, elle expose régulièrement à Paris, en Allemagne...Elle participe à plusieurs expositions collectives, dont une en hommage Wilfredo Lam à L’Unesco.

Reconnue par les galeries Art Factory et l’Art de Rien, elle a exposé plusieurs fois au Lavoir moderne Parisien ainsi qu’à la Chapelle du Collège de Carpentras.

ESPRITS VAGABONDS un livre une exposition

Barbara d’Antuono

Tableaux Textiles du 26 novembre au 23 décembre 2020 du lundi au samedi de 11h à 19h

Vernissage jeudi 26 novembre à partir de 18 h L’œil de la femme à barbe en partenariat avec Galerie Claire Corcia sur des

Inspirations haïtiennes 323 rue Saint Martin 75003 Paris loeildelafemmeabarbe.fr

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En 2014, elle présente quelques tableaux aimantés, tableaux textiles et poupées fétiches dans l’exposition collective “Suivez mon regard”, qui marquait l’acte de naissance de “L’œil de la femme à barbe”. evin Pierre est né en 1993 à Port au Prince en Haïti où il vit actuellement.

Après des études classiques, il suit des formations en art dramatique – écriture et jeu d’acteur – et en écriture poétique.

Comédien, danseur, percussionniste, il s’est déjà produit dans de nombreux spectacles et festivals ; il anime également des émissions de radio.

En 2019 il publie “Mak pye solèy”, un premier recueil de poèmes sur la mort, le vaudou, l’environnement, l’amour, le sexe.

C’est par l’intermédiaire de l’artiste Catherine Ursin (qui a réalisé le dessin de couverture du recueil) qu’il fait la connaissance de “L’œil de la femme à barbe” et de Barbara d’Antuono.

Il rencontrera ces trois femmes pour la première fois en France l’hiver 2019, à l’occasion de l’exposition d’artistes haïtiens que Catherine Ursin a organisée à Lyon à la galerie La Rage et où elle l’a invité à présenter son livre.

Photo artprice

e Marché de l’Art contemporain n’est plus ce qu’il était il y a 20 ans.

Il a profondément changé structurellement, avec de plus en plus d’artistes (de 5.400 artistes à près de 32.000 aujourd’hui), de plus en plus d’oeuvres (on est passé de 12.000 lots offerts à 123.000).

Il s’est étoffé et étendu géographiquement, passant de 39 à 64 pays actifs aux enchères.

Il s’est accéléré, avec la fluidification des transactions à distance, pour finalement s’imposer comme le segment le plus dynamique et le plus profitable de l’ensemble du Marché de l’Art. En 20 ans, le nombre de maisons de ventes participant au Marché de l’Art contemporain a presque doublé, le nombre de sessions spécialisées a triplé, le nombre de lots vendus a été multiplié par six.

Autrefois minoritaire, le segment contemporain

pèse désormais 15% du Marché de l’Art global. Au seuil des 2Mrd$ de résultat – contre moins de 92 millions en 2000 – il surpasse la période des Maîtres Anciens et celle du XIXème siècle. Récemment, une oeuvre de BASQUIAT a dépassé le résultat mondial de l’année 2000, en se vendant pour plus de 100m$, c’est dire combien l’échelle de valeur a évolué. Basquiat pourrait de nouveau passer ce palier de prix dans le futur, et il se peut qu’il ne soit pas le seul. D’ailleurs, une poignée de nos créateurs contemporains sont déjà consacrés comme des “valeurs” aussi importantes que les plus grands modernes, de Monet à Picasso.

Basquiat encadre les records de ces 20 dernières années.

Il est l’auteur de la première œuvre contemporaine millionnaire (1998) comme du dernier record mondial (2017).

Entre temps, les prix n’ont cessé d’être tirés vers le haut: son record est passé de 1,7m$ à plus de 110m$.

Il a donc été multiplié par 65 en 20 ans.

Sur cette même période, le prix moyen d’une œuvre contemporaine a triplé (passant de 7.430$ à 25.140$), enregistrant la hausse la plus importante de l’ensemble du Marché de l’Art, toutes périodes de créations confondues.

En entrant dans le XXIème siècle, l’Art Contemporain est ainsi devenu le premier moteur de croissance du Marché de l’Art global.

Pour la première fois, le secteur contemporain dépasse le milliard de dollars de chiffre d’affaires annuel et atteint les 15% du Marché de l’Art mondial qu’il tient encore aujourd’hui.

L’un des premiers leviers de la croissance est l’arrivée massive d’acheteurs chinois.

Ceux-ci vont transformer en profondeur le Marché.

Avec l’explosion de l’économie chinoise, de riches PALAZZI 30 VENEZIA

Ruée sur l’Art Contemporain

Le Marché prend un nouveau virage au début du XXIème siècle avec l’afflux de nouveaux acheteurs millionnaires et l’arrivée de la Chine sur l’échiquier.

Photo artprice

entrepreneurs se prennent au jeu de la collection, tandis que d’autres achètent des oeuvres pour diversifier leurs placements.

Le business de l’art bat rapidement son plein en Chine avec l’émergence de fonds d’investissements spécialisés. Sur le modèle boursier, il est possible d’acheter des “parts” d’oeuvres dans l’optique de faire d’importantes plus-values, rapides si possible.

Des afflux massifs de capitaux se dirigent d’abord sur les artistes chinois, faisant considérablement grimper leurs prix si bien que, en 2011-2012, la Chine vend deux fois plus d’oeuvres à plus de 100.000$ que dans toute l’Europe.

Au fil des années, certains acheteurs chinois deviennent de redoutables collectionneurs, comme Jack Ma, fondateur du géant de l’e-commerce Alibaba, Adrian Cheng ou Lin Han, qui collectionnent aussi des artistes internationaux.

Certains d’entre eux ont créé des musées privés pour accueillir des collections devenues considérables, à l’image de Budi Tek avec son Yuz Museum à Shanghai.

L’embellie n’est pas que chinoise. Elle s’affirme comme une tendance générale de la globalisation en cours du Marché de l’Art. Les prix explosent aussi bien pour les artistes indiens PALAZZI 31 VENEZIA

de premier plan (Anish KAPOOR, Subodh GUPTA), pour les artistes du Moyen-Orient (Christie’s donne du marteau à Dubaï depuis 2006), que pour les Occidentaux.

A New York et à Londres, les records extraordinaires s’enchaînent: l’oeuvre “Green car crash” de WARHOL part pour 71,5m$, deux fois l’estimation haute de Christie’s; Damien Hirst dépasse les 19m$ avec “Lullaby Spring”, une oeuvre estimée entre 6 et 8m$; Peter Doig devient le deuxième peintre le plus coté derrière Jean-Michel Basquiat avec plus de 11m$ obtenus pour “White Canoe”, dont Sotheby’s attendait au mieux 2m$ selon l’estimation; Koons, enfin, affirme son statut d’artiste vivant le plus cher après la vente, pour 23,5m$, de sa sculpture Hanging Heart (Magenta/gold).

Au terme de cette année 2007, certains pensent que le Marché de l’Art contemporain a atteint son point culminant.

Il n’en n’est rien. Jeff Koons va battre son propre record à sept reprises dans les années suivantes.

Avant son premier pic de croissance en 2008, le produit de ventes de l’Art Contemporain progresse de +1.640% (20002008), puis il s’affaisse en réaction à la crise américaine des subprimes, dont les répercussions sont mondiales.

Photo ren-zong

De la croissance à la contraction, l’année se joue en deux temps: les prix de l’art se maintiennent jusqu’aux ventes d’été, puis le Marché plie en septembre, après une vente consacrée à Damien Hirst chez Sotheby’s.

L’euphorie se poursuit au cours du premier semestre, et ce malgré la dégradation de l’économie mondiale due à la crise des subprimes.

Jusqu’à mi-septembre, l’art campe sur sa position de valeur refuge, avec d’excellents résultats à la clef. Christie’s et Sotheby’s enregistrent de nouveaux records, aussi bien pour les grands modernes, que pour les artistes d’après-guerre et contemporains. Christie’s vend un Bassin aux Nymphéas de Claude Monet pour 71,8m$; une toile de Mark Rothko pour 50m$ (contre 11 millions en 1999, No. 15, 1952); une autre de Lucian Freud pour 33m$ (Benefits Supervisor Sleeping, 1995); une sculpture de Koons au seuil des 26m$ (Balloon Flower (Magenta), 1995/2000).

Sotheby’s fait encore mieux, cédant un triptyque majeur de Francis Bacon pour plus de 86m$ le 14 mai. L’acheteur est l’oligarque russe Roman Abramovitch, nouveau propriétaire du Benefits Supervisor Sleeping de Freud acheté la veille.

La société américaine renouvelle aussi les records des contemporains Richard Prince (Overseas

Nurse, 8,4m$), Antony Gormley (Angel of the North, 4,5m$), Anish Kapoor (Untitled, 3,8m$), Takashi Murakami.

Après l’été, elle reçoit 21.000 visiteurs lors de l’exposition “Beautiful inside my Head forever” de Damien Hirst.

Le Marché ne vacille qu’après cette vente record.

L’ascension fulgurante de Takashi MURAKAMI est emblématique des transformations rapides du Marché de l’Art contemporain.

Quasi absent des radars en 2000, il rejoint déjà le top 10 mondial en 2008 (produit de ventes annuel). Signe précurseur de son succès, le prix de ses sculptures de Mr Dob se trouve multiplié par 10 entre la fin des années 90 et le début des années 2000.

Mais le marché de Murakami bascule véritablement dans les plus hautes sphères avec la vente de My Lonesome cowboy #l-4647578 (Sotheby’s).

A la fois trash et kawaii, cette sculpture d’un grand éjaculateur, inspiré des mangas et des Otaku, ouvre à Murakami les portes du Marché américain en s’envolant pour 13,5m$, 10 fois son estimation.

Présent dans la salle pour assister à son propre record le 14 mai 2008, l’artiste en profite pour acheter une importante sculpture de son ami et compatriote Yoshitomo NARA , Light my Fire (2001), pour 1,1m$.

Avec la vente de My Lonesome cowboy et l’achat du Nara, Murakami vient de faire entrer l’Art Contemporain japonais dans la bataille du capitalisme, aux côtés de l’américain Jeff Koons et du britannique DaPALAZZI 32 VENEZIA

mien Hirst, tous deux rompus aux codes de la communication et du Marché.

Mi-septembre, l’étendard des Young British Artists (YBA) écrit un nouveau chapitre du Marché de l’Art en vendant directement ses œuvres chez Sotheby’s, passant outre le circuit habituel des galeries.

Plus de 200 oeuvres sorties de l’atelier de Damien HIRST sont proposées aux enchères.

C’est le jackpot: seulement 1,5% d’invendus, 45 coups de marteau millionnaires, dont des résultats exceptionnels pour des œuvres en formaldéhyde tout juste sorties de l’atelier: 18,5m$ pour The Golden Calf (2008), 17,1m$ pour The Kingdom (2008), 5,3m$ pour Here Today, Gone Tomorrow (2008), 4,7m$ pour The Black Sheep with the Golden Horn (2008)…

Cette série d’animaux (mouton, poissons, requin, veau) plongés dans des aquariums de formol est un travail initié par Hirst en 1992 et financé à l’époque par Charles Saatchi.

D’autres oeuvres emblématiques partent pour plusieurs millions, dont ses fameux cabinets de pilules.

Cet événement fait la fortune de Hirst et renforce encore la renommée de celui qui est le premier artiste à prendre un rôle si déterminant dans la commercialisation de ses oeuvres.

La vacation fut un succès malgré un contexte économique alarmant: le coup d’éclat de Damien Hirst coïncide en effet avec la faillite de la banque Lehman Brothers le 15 septembre 2008.

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Le Marché se contracte ensuite fortement: faute de clients, Sotheby’s ravale cinq oeuvres importantes des YBA le 11 novembre.

Elle parvient à en vendre deux, mais sous les estimations basses.

Entre septembre et décembre 2008, le taux d’invendus de l’artiste explose, passant de 11% à 55%, et son indice de prix s’effondre (-65% entre 2008 et 2010).

Il n’est évidemment pas le seul artiste à pâtir des répercussions de cette crise.

La crise financière liée aux subprimes impacte fortement mais brièvement le Marché de l’Art. Dans les mois suivant la vente “Beautiful inside my Head forever”, 65% des œuvres contemporaines sont adjugées sous leurs estimations basses (contre la moitié les années précédentes).

Après des marges de progression phénoménales, le climat économique est bouleversé, les marchés financiers plongent, les banques cessent leurs crédits pour l’achat d’oeuvres, une vague de licenciements touche le monde de l’art…

Dans ce contexte, le volume d’affaires des maisons de ventes chute, inexorablement.

L’Art Contemporain perd deux tiers de son résultat en 2009 (588.000$ contre 1,6m$ en 2008).

Mais cette baisse est aussi violente que brève, et les indicateurs repar-

tent vite à la hausse. Fin 2010, l’Art Contemporain pèse à nouveau son milliard (1,1Mrd$), puis 1,5Mrd$ en 2011 (contre 1,59Mrd$ en 2008).

L’opulence revient avec la confiance, et le Marché repart vers son deuxième pic, celui de 2014.

Damien Hirst n’a jamais retrouvé l’euphorie de “Beautiful inside my Head forever” mais son Marché s’est réajusté depuis.

Les oeuvres importantes passent le million (notamment les Spot paintings et les Pill cabinets) à un rythme moins soutenu.

L’artiste a par exemple remporté cinq enchères millionnaires entre janvier 2019 et juillet 2020, contre 65 au cours de l’année 2008.

Mais à l’échelle des 20 dernières années, il s’est imposé comme le troisième artiste le plus performant (695m$ d’oeuvres vendues), derrière Basquiat et Koons.

Une activité sans précédent agite le Marché en 2014: plus de 100.000 oeuvres contemporaines affluent aux enchères, du jamais vu. 64.000 d’entre elles sont absorbées (un record), et le produit de ventes gagne un milliard en deux ans, pour atteindre 2,4Mrd$.

Un sommet en lien avec la santé générale du Marché de l’Art, dont les recettes annuelles s’élèvent à 16,4Mrd$, toutes périodes de création incluses.

Entre temps, la Chine a pris une part beaucoup plus active.

Portée par une croissance extrêmement rapide, elle devient un nouveau centre névralgique face aux Etats-Unis (qu’elle surpasse notamment en 2010).

L’eldorado chinois attire toujours plus les investisseurs internationaux, dont la première société de ventes mondiale, Christie’s, qui prend le pari d’opérer ses ventes à Shanghai.

Annoncée comme un événement aussi important que son ouverture à New York en 1977, la première vente de Christie’s en Chine continentale a stratégiquement lieu au moment où Shanghai facilite les opérations d’entrées et de sorties temporaires des oeuvres sur son territoire (fin septembre 2013), grâce à une nouvelle politique de libre-échange facilitant l’import et l’export d’œuvres d’art (SHFTZ, Shanghai Free Trade Zone). Sotheby’s fait pour sa part une courte tentative pour développer des ventes à Pékin (entre 2013 et 2015).

Mais c’est à Hong Kong, où les œuvres peuvent entrer librement, que bat le coeur du Marché asiatique.

Place de marché mineure avant 2000, Hong Kong est rapidement devenue incontournable.

La péninsule pèse 10% du Marché de l’Art contemporain en 2014, un chiffre toujours d’actualité.

L’activité y est particulièrement intense cette année-là chez Sotheby’s, avec des niveaux de prix exceptionnels pour deux stars du Marché: Zhang Xiaogang et Fang Lijun.

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Le premier, dont les oeuvres se négociaient autour de 5.000$ en 2000, est auréolé d’un nouveau record à hauteur de 12,1m$ pour Bloodline: Big Family No.3 (1995), une toile payée 6m$ en 2008, année déjà faste pour les artistes chinois.

Le prix de l’oeuvre a donc doublé en six ans.

Le nouveau record de FANG Lijun est quant à lui établi à 7,6m$, au double de l’estimation moyenne, avec Series 2 No. 4 (1992).

Les chiffres d’affaires hongkongais de Christie’s et Sotheby’s s’envolent, grâce à la flambée des artistes chinois dans un premier temps, puis avec le succès que remportent enfin de grands artistes occidentaux.

En 2011, les deux sociétés rivales vendent pour 236m$ d’oeuvres contemporaines à Hong Kong, contre 558.000$ en 2000.

Leur résultat cumulé a explosé de 42.000% en une dizaine d’années. Phillips finit par suivre le mouvement à partir de 2016.

L’activité des trois sociétés représente désormais 86% du résultat hongkongais (2019), avec une nette avance de Sotheby’s qui tient à elle seule la moitié du Marché de l’Art contemporain de la péninsule (164,3m$ d’oeuvres contemporaines vendues en 2019).

Forte de ses 10% de recettes mondiales, Hong Kong est aujourd’hui la troisième place de Marché pour la vente d’Art Contemporain, derrière New York et Londres. https://fr.artprice.com/artprice-reports/le-marche-de-lart-contemporain-2020/ PALAZZI 35 VENEZIA

ainab Fasiki a 25 ans, les cheveux courts, et est diplômée en ingénierie mécanique. À sa naissance, elle est la plus jeune de six frères et sœurs : toujours réprimandée, toujours surveillée afin qu’elle n’apporte pas le déshonneur à la famille par son comportement.

Elle regarde autour d’elle, à Fès, une ville du Maroc, et comprend vite les hypocrisies et les tabous auxquels les gens croient: la nudité est l’un d’entre eux - ou plutôt, l’un des plus macabres - et puis Zainab s’enferme dans sa chambre et commence à se dessiner nue.

Le dessin est sa passion, mais à l’université, il choisit la faculté de génie mécanique.

Un monde s’ouvre à elle, et elle ne l’aime pas : ses collègues masculins ne la prennent pas au sérieux, ses professeurs ne la respectent pas, elle est maltraitée pendant les stages.

Sa brillance passe au second plan car, après tout, c’est une femme.

C’est à cette époque qu’elle commence à partager ses dessins sur les réseaux sociaux, suscitant une grande appréciation, tandis que les premiers clients qui veulent les acheter commencent à arriver.

Elle découvre que l’ingénieur n’est pas vraiment ce qu’elle veut faire, et devient dessinatrice indépendante.

Zainab a travaillé sur plusieurs projets visant à éveiller les consciences et à sensibiliser l’opinion publique à la discrimination raciale au Maroc.

“J’essaie de dire que vous pouvez regarder une femme nue et trouver cela normal. (suit page 36)

Photo zainabfasiki

(suit de la page 35) Cela n’a rien à voir avec le sexe. Ce n’est qu’un corps”, a-t-elle déclaré au Times, qui l’a incluse dans la future génération de dirigeants.

Ce qu’elle veut avant tout, c’est secouer les femmes marocaines et les inviter d’abord à reconnaître que la vie qu’elles sont contraintes de mener n’est pas juste.

Il n’est pas juste de ne pas pouvoir porter une robe dans la rue, au risque d’être attaqué.

Il n’est pas juste d’être obligé de se marier et de quitter son emploi pour s’occuper de sa famille.

Selon Zainab, la situation au Maroc est pire que dans les années 60 ou 70 : on parle aussi d’une meilleure situation pour les femmes marocaines que pour les femmes saoudiennes, mais en fait il y a peu de différences, selon la designer.

La composante islamique au sein du gouvernement est plus forte et la religion imprègne tous les aspects de la vie, même les consciences : Zainab Fasiki avoue qu’elle reçoit beaucoup plus d’attaques de la part des femmes, désireuses de s’attribuer la bienveillance de Dieu en étouffant son exemple de moralité déviante.

Le dernier projet de Zainab est le roman graphique Hshouma, un titre qui pourrait être traduit avec honte.

Dans le livre, ses dessins imaginatifs s’entremêlent à des informations sur la sexualité et à des réflexions sur la violence sexiste.

Son intention n’est pas de scandaliser, mais d’éduquer : en raison de la censure au Maroc, il n’existe pas de volumes dans lesquels on peut apprendre les questions de genre, même dans les écoles.

Hshouma est entièrement en noir et blanc, afin de ne pas distinguer les différentes couleurs de la peau.

Après tout, son message est universel.

Hshouma est anthropoformée dans le livre, elle est représentée comme une femme pratiquant la magie noire, rappelant une figure traditionnelle qui suscite la peur dans l’imaginaire collectif.

Dans ses dessins, les femmes n’ont souvent pas d’yeux. “Je vois les femmes de ma société comme des statues” dit-elle, “et je voudrais les libérer”.

Mais elle-même ne se sent pas en sécurité au Maroc : bien qu’elle soit restée vivre à Casablanca, lorsqu’elle quitte la maison, elle doit faire très attention à ne pas être attaquée publiquement.

Après tout, la violence, même lorsqu’elle est signalée, tombe sur la tête de la victime, qui est coupable de l’avoir provoquée.

En 2018, Zainab Fasiki a collaboré avec l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, en produisant des dessins animés documentant le voyage de quatre réfugiés d’Afrique subsaharienne, dont une femme qui avait subi des mutilations génitales.

Zainab dénonce tout cela : l’interdiction de l’avortement pour les femmes, la défense acharnée de la virginité avant le mariage, mais aussi la discrimination à l’encontre des personnes d’orientation sexuelle différente.

Chaque fois qu’il veut aborder un sujet tabou, dit-il, il utilise le rouge : rouge de la violence, rouge du sang.

Selon Zainab, son âge aide beaucoup : il crée un lien de millénaire en millénaire avec les nombreux jeunes qui participent aux présentations de son travail.

Pour briser tous les tabous ensemble. Michela La Grotteria http://losbuffo.com/2020/08/29/zainab-fasiki-fumettista

PALAZZI 36 VENEZIA

ans le cadre du festival les Photaumnales 2020, l’école d’art du Beauvaisis présente une exposition des travaux des élèves adultes en photographie. « Flux, d’écrans en écrans » présente des créations travaillées à distance les uns des autres, durant le confinement printanier, mais reliés par leurs écrans sur des propositions.

Durant cette période d’isolement, la pratique de la photographie s’est révélée être un vecteur d’émotions et de sensations : elle a ouvert des fenêtres sur le monde extérieur et aussi de l’intérieur.

Dans « l’atelier photographie », encadré par Sophie Goullieux, chacun des participants a ainsi pu expérimenter la notion de cadre dans le cadre, pour exprimer le passage du réel à l’imaginaire, et de la réalité vécue comme une source d’inspiration.

ECOLE D’ART DU BEAUVAISIS Espace Culturel François Mitterrand, 43 rue de Gesvres 60000 Beauvais Tel. : +39 03.44.15.67.06

Flux d’écrans en écrans jusqu’au 12 décembre 2020

Entrée libre Ouverture les mardis 9h30-12h et 13h30-19h, les mercredis 9h-12h et 13h30-19h, les jeudis et vendredis 13h30-19h et les samedis 13h30-18h

A.S.C.A. Association Culturelle Argentine 8 avenue de Bourgogne

60000 Beauvais Tél : +33 03 44 15 67 06 eab@beauvaisis.fr www.ecole-art-dubeauvaisis.com

PALAZZI 37 VENEZIA

ous confinés pendant deux mois, nous avons appris à nous protéger et à vivre à distance, mais aussi à inventer de nouvelles formes d’échanges et de partage.

Nous avons fait le choix, avec nos partenaires, de maintenir la 17e édition des Photaumnales, sur de nombreux lieux culturels de la région des Hauts-de-France.

Lorsqu’en 2018, le Centre national des arts plastiques, le CRP/ Centre régional de la photographie Hauts-de-France de Douchy-les-Mines et Diaphane proposent comme thématique de la commande photographique nationale : FLUX, une société en mouvement, nous étions loin de penser que cette notion serait au coeur de l’actualité médiatique et du chaos sociétal provoqué deux ans plus tard par la Covid-19.

Les quinze artistes ou duos d’artistes retenus pour cette commande explorent la notion de flux.

La diversité des sujets choisis ainsi que les approches photographiques mises en oeuvre témoignent de la vigueur de la création contemporaine française.

Une seconde exposition FLUX, le discret et le continu, présentée au Quadrilatère, explore nos relations visibles ou invisibles aux flux.

Dans les transports humains ou de marchandises, les communications, les échanges de données numériques, les flux sont partout. (suit page 38)

Photo iai-tv

(suit de la page 37) Toujours plus rapides, ces flux accélèrent les temporalités et catalysent les effets de la mondialisation.

Toujours proche du public sur les territoires, la programmation du festival se déploie sur l’ensemble du sud des Hauts-de-France en partenariat avec des lieux culturels.

Le MUDO – Musée de l’Oise à Beauvais, comme le Musée de la Nacre et de la Tabletterie à Méru revisitent leurs collections et confrontent leurs oeuvres à des photographies contemporaines.

L’espace Séraphine Louis à Clermont, l’espace Matisse à Creil, la galerie du Chevalet à Noyon, la Maison de la Culture et le Safran à Amiens constituent des lieux de mixité culturelle, propices aux rencontres avec le public.

Ce maillage des lieux de diffusion s’appuie également sur les galeries d’art situées dans les établissements scolaires, qui s’inscrivent dans une démarche de sensibilisation à lacompréhension des images pour le jeune public, en complément d’actions auprès des enseignants.

Dans un flux d’images de plus en plus dense le festival des Photaumnales et Diaphane affirment la volonté de nous retrouver autour de la photographie et de ses créateurs, pour défendre les valeurs de partage et d’éducation aux images, qui restent au coeur de nos missions.

Commissariat général : Diaphane, Pôle photographique des Hauts de France https://www.photaumnales.fr/

n peut dire que le monde n’a jamais eu autant besoin de changement.

La philosophie peut-elle le faire, ou la discipline est-elle destinée à interpréter le monde pour toujours sans l’affecter de manière significative ?

Le postmodernisme est-il non seulement l’incarnation de ce besoin, mais aussi la cause de la situation actuelle ?

Mike Cole découvre les problèmes du postmodernisme et la promesse du marxisme.

Lisez la réponse de Simon Glendinning.

La raison d’être de cet article est d’insister sur le fait que la célèbre déclaration de Marx selon laquelle “les philosophes n’ont jusqu’à présent interprété le monde que de diverses manières ; il s’agit de le changer” est plus pertinente aujourd’hui que jamais.

Le postmodernisme n’est par définition qu’une interprétation du monde et, en tant que tel, il exclut tout projet politique, alors qu’il faut tenir compte de l’appel au changement progressif et transformateur que représente le marxisme.

Les défis posés au marxisme ont une longue histoire et ont peut-être commencé avec le sociologue Max Weber.

Si la célèbre observation d’Albert Salomon selon laquelle Weber était impliqué dans un débat “avec le fantôme de Marx” (Salomon, 1935) est peut-être quelque peu exagérée, depuis que Weber (vers 1915) a émis un certain nombre de critiques à l’égard de PALAZZI 38 VENEZIA

Marx et du marxisme, la lutte intellectuelle contre les idées marxistes a été au premier plan de la théorie sociale critique.

Weber a suggéré que la classe sociale n’est peut-être pas uniquement liée au mode de production, que le pouvoir politique ne découle pas nécessairement du pouvoir économique et que le statut ainsi que la classe peuvent constituer la base de la formation de groupes sociaux.

Les tentatives ultérieures pour saper les idées marxistes vont des écrits post-structuralistes de Michel Foucault, qui pensait que le pouvoir est diffus plutôt que lié aux moyens de production, et de Jacques Derrida, qui soulignait la nécessité de déconstruire tous les discours dominants, au postmodernisme de Jean-François Lyotard, incrédule de tous les grands récits, et de Jean Baudrillard, qui soutenait que les oppositions binaires (telles que les classes dirigeante et ouvrière) s’étaient effondrées.

Le traitement par Foucault des liens entre le corps, le pouvoir et la sexualité a été, à juste titre, largement adapté dans l’analyse féministe.

En ce qui concerne Derrida, qui tente de faire valoir que “la déconstruction ... n’est pas la même chose que la destruction” (Atkinson, 2002, p. 77), l’éminente féministe postmoderne britannique Elizabeth Atkinson cite l’éminente penseuse sociale et philosophe Judith Butler, qui soutient que Déconstruire n’est pas nier ou rejeter, mais remettre en question et, peut-être plus important encore, ouvrir

Le fléau du postmodernisme Les interprétations ne suffisent pas pour changer le monde

Mike Cole

Professor in the School of Education and Communities University of East London https://iai.tv/articles/the-plague-ofpostmodernism

PALAZZI 39 VENEZIA

un terme ... à une réutilisation ou à un redéploiement qui n’a pas été autorisé auparavant (cité dans Atkinson, ibid.)

Le marxisme démystifie le discours qui masque la nature intrinsèquement exploitante de la société capitaliste et, contrairement au poststructuralisme, pointe vers un monde non-exploitant.

Comme je l’ai soutenu dans Cole (2004 ; voir aussi Cole, 2003 ; Cole et Hill, 1995), c’est précisément ce que fait le marxisme.

Il démystifie les discours qui masquent la nature intrinsèquement exploitante de la société capitaliste, offrant ainsi un moyen à la fois d’analyser cette société, de comprendre sa nature exploitante et, contrairement au poststructuralisme, de pointer vers un monde non-exploitant.

En ce qui concerne l’incrédulité au grand récit du marxisme et l’effondrement des binaires, je soutiens dans cet article que le marxisme reste une vision du monde cohérente, bien qu’adaptée, et que l’opposition binaire entre le capital et le travail est plus grande que jamais.

L’un des concepts clés de Derrida (1992) est “l’épreuve de l’indécidable”.

Dans le même ordre d’idées, Atkinson (2001) a contesté l’idée qu’il est essentiel de choisir une perspective théorique (suit page 40)

Photo ghery praague

(suit de la page 39) ou une ligne de conduite plutôt qu’une autre. À peu près à la même époque, la féministe postmoderne américaine Patti Lather, qui a influencé le travail d’Atkinson, a exalté “l’épreuve” pour ses “obligations d’ouverture, de passage et de non maîtrise” où “les questions sont en mouvement constant” et où “on ne peut pas définir, finir, fermer” (Lather, 2001, p.

184).

Le concept de Derrida est à son tour complété par l’un de ceux de Lather : une praxis de ne pas être aussi sûr” (p.

184), “une praxis dépassant la logique binaire ou dialectique”, une “praxis post-dialectique” (p.

189).

Je dirai tout à l’heure que nous devons décider, prendre des décisions avant qu’il ne soit trop tard.

Vers le milieu des années 90, les échanges entre marxistes et postmodernistes semblaient avoir été épuisés (par exemple, Cole et Atkinson, 2007), et je me suis intéressé aux travaux universitaires des Critical Race Theorists, une autre tentative d’usurpation du marxisme en plaçant la “race” au-dessus de la classe, bien que la Critical Race Theory (CRT) ait un certain nombre de points forts (par exemple, Cole, 2017a, b).

Plus important encore, elle soutient avec force que le racisme est en-

démique, étendu, normal et non aberrant (Gillborn, 2008, p. 40).

Si tout est sujet à interprétation et que rien ne peut être décidé avec certitude, nous sommes en effet dans une ère post-vérité qui permet à Trump de propager des mensonges sans fin.

Alors que j’étais à court de choses à dire sur la CRT, Donald J. Trump est devenu le quarante-cinquième président des États-Unis, et j’ai saisi l’occasion pour interroger la rhétorique et les politiques d’accompagnement de cet archiraciste et fasciste-acteur (par exemple, Cole, 2020a, b).

Après avoir passé quatre ans à écouter et à lire la pédagogie publique de la haine (pas seulement basée sur la “race”, bien sûr, mais aussi sur le handicap, le sexisme et la misogynie (Peter Hudis, cité dans Doğan, 2020 a ajouté la misanthropie au personnage sociopathe de Trump), mon intérêt pour le postmodernisme s’est ravivé lorsque je suis tombé sur un certain nombre d’articles reliant Trump au postmodernisme (par exemple Edsall, 2018 ; Haider, 2019 ; Illing, 2019 ; Gupta, 2020).

La plupart se concentrent sur la notion de relativité et de vérité ou de post-vérité pour faire valoir que, puisque pour Trump, la vérité n’est pas pertinente, il est soit un postmoderniste, soit un produit du postmodernisme.

En réponse, Johanna Oksala, professeur de sciences sociales et d’études culturelles à l’Institut Pratt, a déclaré : “Je ne pense pas que Trump devrait être quaPALAZZI 40 VENEZIA

lifié de président postmoderne, mais simplement de menteur” (cité dans Edsall, 2018), tandis que Judith Butler était incrédule à ce sujet : N’importe qui serait enclin à blâmer les tendances intellectuelles dans l’académie ou dans les arts pour la façon dont Trump parle, pense ou agit. Étant donné qu’il ne lit pas beaucoup, et que ... la théorie littéraire et sociale [académique] ... dépend d’une lecture attentive, les deux tendances ne pourraient pas être plus éloignées l’une de l’autre (cité dans Edsall, 2018).

Dans The Outline, Shuja Haider (2019) affirme que “le phénomène que représente [Trump] est assez simple, il existe depuis aussi longtemps que la philosophie : un homme très stupide a plus de pouvoir qu’il ne le mérite, et il va en abuser jusqu’à ce que quelqu’un l’arrête”.

Enfin, Aaron Hanlon (2018) cite le dicton de Marx sur les “philosophes”, en soutenant à juste titre que les postmodernistes ont inversé cet appel à l’action, “cherchant principalement à l’interpréter”.

La conclusion de Hanlon est que “le véritable ennemi de la vérité n’est pas le postmodernisme mais la propagande, la distorsion active de la vérité à des fins politiques”.

L’administration Trump est activement engagée dans la distorsion de la vérité au quotidien à des fins politiques et l’hyper relativisme du postmodernisme explique en partie cet aspect important du phénomène du Trumpism.

En d’autres termes, si tout est sujet à interprétation PALAZZI 41 VENEZIA

et que rien ne peut être décidé avec certitude, nous sommes en effet dans une ère post-vérité qui permet à Trump de propager des mensonges sans fin qui sont en fait vénérés par ses partisans.

Le fait que Trump soit un homme stupide et un sinistre manipulateur de propagande (vous pouvez être les deux) montre la nature essentiellement réactionnaire du postmodernisme : il lui manque un concept concret de changement social progressif - tout est permis, tout est possible.

La post-vérité et son incarnation monstrueuse doivent être contestées avec force non seulement par les marxistes, mais par tous ceux qui sont contre le totalitarisme et le fascisme rampants et accélérés.

Une façon beaucoup plus complète et productive de comprendre le phénomène de l’atout est de l’examiner d’un point de vue économique et politique.

Le facteur déterminant de la montée et de la résilience de Trump est lié à la propagation du populisme de droite au lendemain de la crise financière mondiale de 2008.

Le krach financier a précipité une crise du néolibéralisme, comme en témoignent deux événements majeurs.

Premièrement, il y a un mécontentement populaire face à l’austérité et à l’inégalité (un choix politique, (suit page 42)

(suit de la page 41) saisi par la classe dominante) que le néolibéralisme a produit.

Deuxièmement, et en conséquence, nous assistons à une prise de conscience croissante par l’establishment que la révolution néolibérale a suivi son cours et que l’hégémonie américaine est menacée par un nouveau rival, la Chine (par exemple Bramble, 2018).

La mesure dans laquelle Trump utilise ce pays comme bouc émissaire a atteint de telles proportions que le ministre chinois des affaires étrangères, Wang Yi, a déclaré que certaines forces politiques aux États-Unis poussent les relations entre la Chine et les États-Unis “au bord d’une nouvelle guerre froide” en ce qui concerne les coronavirus, le statut de Hong Kong et d’autres questions, ajoutant : “Outre la dévastation causée par le nouveau coronavirus, un virus politique se propage également aux États-Unis” (cité dans Agence France-Presse, 2020).

L’atout est, selon Peter McLaren (2020, p. 4), “l’incarnation la plus odieuse de l’identité capitaliste”, quelqu’un qui “aime le profit et le capital - le travail mort - plutôt que le travail vivant - les gens” (McLaren, 2020, p. 4).

C’est le capitaliste le plus authentique des États-Unis et certainement le plus expérimenté qui ait

jamais été à la Maison Blanche” (Nimtz Jr. 2019).

En conséquence, son “capitalisme nu” coïncide avec son propre intérêt.

Alors que le principe majeur du postmodernisme est que rien n’est sûr, qu’il n’y a pas de théorie globale pour expliquer la société, qu’il n’y a pas de dialectique et pas de version unique de la “vérité”, avec ce qui pourrait se passer dans un “livre ouvert”, les marxistes utilisent le dialecte de la lutte des classes pour comprendre la nature intrinsèquement exploitante de la société capitaliste : l’appropriation de la plus-value des travailleurs pour le profit - un fait objectif plutôt qu’un “indécidable” - et aussi pour transcender le capitalisme : de la lutte entre le capital et le travail, il existe la synthèse potentielle du socialisme.

Le capitalisme est analysé et révélé comme un système d’exploitation, mais qui peut être remplacé par une structure différente et viable, libre d’exploitation et d’oppression.

De plus, alors qu’il est généralement reconnu que le postmodernisme et la CRT développent tous deux des théories, le marxisme est faussement catégorisé comme habitant un passé autoritaire, stalinien, patriarcal et raciste dépassé, non seulement par les postmodernistes, mais par les antisocialistes en général, y compris Trump (en témoigne son amalgame de plus en plus fréquent des candidats démocrates à la présidence et à la vice-présidence, ouvertement pro-capitalistes, avec le socialisme et l’anarchie.

En réalité, en tant que “philosophie vivante” s’adapPALAZZI 42 VENEZIA

Photo charlesmoore

tant et se modifiant continuellement “par des milliers d’efforts nouveaux” (Sartre, 1960), le marxisme peut être rethéorisé pour inclure le genre comme dans le féminisme marxiste (par exemple Mojab, 2015) et le capitalisme racialisé (par exemple Cole, 2016).

Le socialisme, en outre, a également embrassé l’écologie sous la forme de l’écosocialisme (par exemple Löwy, 2018, 2020), pleinement informé par l’écoféminisme (Brownhill et Turner, 2018, 2020) et l’antiracisme (Cole, 2020c).

Enfin, pour prévenir le stalinisme, la transition vers l’écosocialisme doit centraliser une véritable démocratie (participative à tous les niveaux et à toutes les étapes (pour une discussion approfondie, voir Löwy, 2018, qui fournit une description détaillée des processus de changement écosocialiste).

Le capitalisme est analysé et se révèle être un système d’exploitation, mais qui peut être remplacé par une structure différente et viable.

Contre Baudrillard, ces développements sains de la philosophie vivante qu’est le marxisme ne changent rien au fait que le capitalisme repose pour son existence même sur un binaire : l’exploitation d’une classe par une autre - les travailleurs, définie par les marxistes comme englobant tous ceux qui doivent vendre leur travail pour survivre - par une autre, la classe capitaliste.

En effet, l’écart entre les revenus et le niveau de vie de chaque classe a maintenant atteint des proportions astronomiques.

PALAZZI 43 VENEZIA

Cette évolution souligne la nécessité d’une métanarisation du socialisme dont les postmodernistes, à l’instar de Lyotard, luimême ancien socialiste révolutionnaire, sont si sceptiques.

Désormais largement défini, le socialisme reste l’alternative la plus viable au “capitalisme nu”, à la misogynie, au racisme, au handicap et aux menaces à la démocratie et au fascisme rampant, ainsi qu’à la menace très réelle de destruction écologique, aidée par le déni du changement climatique (le retrait de l’accord de Paris de Trump est prévu pour entrer en vigueur, un jour après l’élection du 4 novembre 2020), sans parler de la tragédie américaine que représente le désintérêt de Trump pour les morts de Covid.

Le socialisme est également un antidote au danger de guerre (nucléaire), ce qui n’est pas du ressort du postmodernisme.

Elbridge A. Colby, l’un des codirecteurs de la Stratégie de défense nationale publiée par le Pentagone en janvier 2018, a écrit un article dans Foreign Affairs, intitulé “If You Want Peace, Prepare for Nuclear War” (Colby, 2018).

En conséquence, la Maison-Blanche, qui est l’atout principal de l’Union européenne, avance rapidement avec un plan de 1 000 milliards de dollars pour étendre, “moderniser” (suit page 44) (suit

Photo fondazionezabarella

de la page 43) et miniaturiser l’arsenal nucléaire américain (Damon, 2020).

Nous pouvons mettre fin à cette horreur, mais le temps presse.

Je le répète, si la théorie critique de la race, qui est peut-être le principal débat contemporain avec le fantôme de Marx et le défi à la centralité de la classe sociale, est clairement pertinente alors que Trump multiplie ses tentatives de légitimation du racisme et de la suprématie blanche pour apaiser sa base. À l’approche des élections, le postmodernisme n’offre aucune solution à Trump, prônant plutôt “l’épreuve de l’indécidable” et une praxis post-dialectique, ainsi que des débats sur la question de savoir si Trump est un postmoderniste ou s’il s’explique par le postmodernisme.

Si l’espace ici exclut toute discussion, le marxisme apporte une solution: un monde écosocialiste antiraciste, informé par l’écoféminisme, caractérisé par une véritable démocratie participative (voir Cole, 2020c pour une analyse approfondie).

Il est temps de “choisir une perspective théorique et une ligne de conduite plutôt qu’une autre”, de “définir, terminer et clôturer” l’une des périodes les plus sombres et les plus laides de l’histoire des États-Unis.

Il est temps de changer le monde.

Mike Cole

lus de cent chefs-d’œuvre témoignent du monde très émotionnel des Macchiaioli, un monde dont l’essence raconte les valeurs de l’homme, de l’homme héroïque et infatigable, de sa force et de son courage, de son désir de recommencer jour après jour malgré toute difficulté.

Esprits indépendants et révolutionnaires, chaleureux de ferveur patriotique et fermes dans leurs affections, les Macchiaioli peignaient ce que le “vrai” offrait à leurs yeux.

Nous ne pouvons que mentionner le Caffè Michelangiolo à Florence, l’épicentre de leurs idées, de leurs combats pour l’affirmation d’une nouvelle esthétique qui place l’homme, la réalité et la nature au centre.

Les Macchiaioli savent comment capturer les émotions et les valeurs de l’homme à chaque instant de la vie quotidienne, dans chaque sourire ou effort humain, dans chaque paysage et dans une nature intacte.

Plein de rêves et d’émotions vitales, fort d’une âme puissante et vraie qui a toujours combattu la mort, l’homme d’aujourd’hui est un “Macchiaioli”, qui sait saisir la vie de manière pleine, totale et profondément héroïque.

Les poissonniers de Signorini, la mercerie de La Spezia, la farine d’herbe de Fattori, les dames de Cabianca au soleil, les dames de Lega, les gens du marché de Via del Fuoco, les mères rayonnantes et pleines de vie de Banti, les enfants pris dans leur sommeil, la femme lisant le journal d’Adriano Cecioni : les protagonistes des splendides œuvres exposées au Palazzo Zabarella PALAZZI 44 VENEZIA

du 24 octobre au 18 avril 2021 sont vous, les hommes et les femmes d’aujourd’hui, Macchiaioli hier, Macchiaioli aujourd’hui; infatigables, pleins d’émotions et d’impulsions vitales.

Que signifie “macchiaiolo” ?

Macchiaiolo est synonyme de “vie”, cette vie qui est la force même de l’amour qui envahit toute chose et contraste avec la mort, rayonnant partout la lumière de l’Être.

Les Macchiaioli, déjà au XIXe siècle, savaient voir au-delà, leur sentiment profond et humain est une exaltation de chaque instant de la vie quotidienne.

Ils ont anticipé Monet, van Gogh, Gauguin... dans leur manière de représenter et d’exalter les relations humaines dans toute leur valeur réelle, dans tout leur “héroïsme”.

Une exposition sur les Macchiaioli, si aimés et si populaires, mais dont les secrets restent à découvrir, avec des histoires et des personnalités à découvrir, semble plus que jamais appropriée à une saison culturelle de “redémarrage” pour l’ensemble de notre pays.

Une exposition-événement dont le but est de rouvrir un chapitre important de notre histoire artistique - celui des Macchiaioli - et de l’enrichir en utilisant de nouveaux points de vue et une recherche scientifique rigoureuse, à travers des sources souvent négligées.

C’est-à-dire, celle représentée par un grand nombre de collectionneurs et de mécènes, un réseau dense tissé autour de maîtres connus comme Silvestro Lega, Giovanni Fattori, Giovanni Boldini, Telemaco Signorini, et d’autres moins connus, mais non moins im-

I MACCHIAIOLI CAPOLAVORI DELL’ITALIA CHE RISORGE (Chefs d’eouvres de l’Italie qui ressurgis)

du 24 octobre au 18 avril 2021 Palazzo Zabarella via degli Zabarella, 14

35121 Padova tel. +39 049 8753100 https://www.zabarella.it/

PALAZZI 45 VENEZIA

portants, comme Adriano Cecioni, Odoardo Borrani, Raffaello Sernesi, Vincenzo Cabianca. Cette exposition, dont les commissaires sont Giuliano Matteucci et Fernando Mazzocca, aura lieu à Padoue au Palazzo Zabarella.

Palazzo Zabarella témoigne d’une longue histoire qui a commencé au VIIIe siècle avant J.-C. et se poursuit jusqu’à nos jours.

Contemporanéité dont on peut dire que, pour le palais historique de Padoue, elle commence en 1996, lorsque s’achèvent ses imposants et minutieux travaux de restauration, qui ont duré près de dix ans.

Un défi pas simple, entrepris avec étude et passion et qui, une fois gagné, a ramené Palazzo Zabarella à sa splendeur originale et ancienne et (plus important encore) à une nouvelle vie et à une fonction renouvelée.

En effet, toutes les expositions qui ont eu lieu jusqu’à présent au fil des ans se sont toujours distinguées par leur grande valeur scientifique et artistique reconnue, ainsi que par leur remarquable capacité d’accueil et d’implication personnelle des visiteurs.

Et ce n’est pas un hasard si chaque initiative a toujours été récompensée tant par les critiques les plus avisés que par un public nombreux et fidèle au fil des ans : un cas plus unique que rare, en fait.

Photo isabellelévenmez

epuis 1995, mon travail explore et interroge le corps comme espace à découvrir, motif et sujet centraux de l’oeuvre à travers plusieurs médiums : dessin, vidéo, installation et photographie.

Entre réalité et fiction, mon travail ne cesse d’interroger l’individu, ce qui le met en question et l’affecte dans sa relation au monde à autrui ou encore dans la perception qu’il a de sa personnalité.

Le corps y occupe une place centrale : il est tout à la fois le vecteur, le motif et le sujet des dessins, des écritures, des vidéos, des installations et des photographies qui composent mes formulations plastiques Le corps absent de l’image est néanmoins présent: il est caché, dissimulé.

Il est question ici de corps - paysage, du corps qui demeure objet inquiétant et intrigant, corps de tous les désirs.

Depuis 1995, l’écriture est appréhendée dans mes recherches artistique comme un matériau bien plus que comme une forme, un matériau qui s’amalgame avec la matérialité même de l’oeuvre, voire qui fusionne avec son concept.

Tout s’opère dans une osmose, parfois une franche confusion, dont le résultat n’est plus de l’ordre d’une désignation ce qui est la fonction première de l’écriture mais relève tantôt d’un trouble, tantôt d’un éclatement, tantôt d’une révélation.

http://www.wegotalent. com/artiste/ isabellelevenez http://www.ouvretesyeux. fr/2014/01/21/ isabelle-levenez betes-off-parisconciergerie-de-parisprojection-de-la-videorepas-de-famille-2007 https://joursdelune.wordpress.com/ artistes/isabelle-levenez isabelle.levenez@ esba-angers.fr

voir la vidéo https://youtu.be/ o9HkJvgUHFs

our ceux dont la fréquentation du travail d’Isabelle Lévénez est ancienne, et pour en informer quelque peu les autres, une idée très simple semble venir tout naturellement à l’esprit : le corps qu’elle met si souvent en scène (encore que l’expression laisse entendre plus qu’une « façon de parler ») n’a qu’une présence fugitive, impersonnelle, inadéquate même, car ce que l’artiste semble viser se situe toujours au-delà ou en deçà, ailleurs en tout cas.

Pourtant, ce corps est toujours là et, tout comme le nôtre (celui dont nous éprouvons la fermeté, l’étanchéité, voire la porosité), celui qui apparaît à l’écran a sa pleine consistance.

L’incarnation qu’il implique n’est pas amoindrie par la vidéo ou la photographie ; au contraire, ce corps peut sembler très présent, rendu trop humain par le grossissement de l’objectif.

Dans le dessin, qui accompagne immanquablement les images obtenues par reproduction mécanique ou électronique, c’est plutôt une allusion de corps, des silhouettes que l’on entrevoit : ce qui reste après certaines opérations aussi essentielles que l’absorption, la mastication, la vue, la pénétration, la parole.

La bouche, l’œil, la main, les membres, rarement d’autres organes s’y associent de diverses manières, mais d’aucune qui ne soit réelle – réaliste en quelque sorte.

Ainsi, celui qui les observe attentivement peut prendre conscience de ce paradoxe : entre le monde de

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l’image « réelle » (vidéo ou photo), celui du dessin et cet autre, dont nous n’avons pas encore parlé et qui est pourtant si présent – celui de l’écriture –, de nombreux échanges s’opèrent, de l’ordre du signe et de la connotation de l’un par l’autre ; pourtant, ils ne paraissent pas véritablement connectés entre eux.

Il demeure une limite, une frontière par où, certainement, quelque chose peut passer mais qui ne se situe jamais complètement dans l’ordre du visible.

Depuis bientôt quatre ans, l’artiste revient sur des images antérieures, mêlées aux nouvelles, chaque étape de ce processus entraînant des écarts – suppressions, effacements, ou bien assimilation et transformation.

La poussière dansant dans un rai de lumière verte provient du souvenir très précis qu’elle garde d’une peinture de Vilhelm Hammershøï (1864-1916) et du sous-titre que ce dernier a donné à l’œuvre : Rayon de soleil, Poussière dansant dans un rai de lumière (1900, musée d’Ordrupgaard, Copenhague).

L’imprégnation progressive d’éléments perçus, visuels ou non, fait intimement partie du processus de travail. Une fois restituée, la continuité de cet échange disparaît, n’en laissant que les traces – comme un rayon de lumière matérialise la poussière, alors que celle-ci, pour nous, n’existait pas avant et n’existera plus après.

Elle écrit : « Se situer à la limite de l’image, à l’endroit d’un manque dans lequel chacun peut projeter du réel. » et aussi : « Elle filme pour dire qu’elle est là et ailleurs à la fois. » et, enfin, disant je cette fois : PALAZZI 47 VENEZIA

« J’efface un lieu pour en créer un autre pour tout recommencer. Je brouille les pistes ».

Ce texte n’est pas une introduction, il serait plutôt une postface, l’esquisse d’une description de plusieurs années de travail et d’expériences qui menèrent Isabelle Lévénez à prendre de plus en plus en compte l’espace – l’espace réel, celui dans lequel vous pénétrez.

De ces tentatives qui la font marcher souvent dans les pas de Bruce Nauman (Mapping the studio, entre autres), l’exposition du centre d’art de Pontmain, « Visions », en 2008, fut l’une des plus radicales : ceux qui ont eu la chance de l’expérimenter se souviennent d’une quasi-annulation de la pesanteur, d’une pénétration dans le bleu – d’une compénétration devrait-on dire plutôt, de la lumière avec le corps, au point que les frontières s’estompaient réellement et que l’image vidéo n’était que le vestige sensible du fait qu’il y eut un corps, un instant plus tôt.

François Michaux Recettes d’IL : Pour être au centre du monde et rester caché des autres Immobilisez vous au cœur d’un paysage Attendez le silence de l’image pour paralyser la fuite de votre corps Puis plongez en vousmême https://www.levenezisabelle.com

Photo pascalaubier

-t-on besoin de culture ?

De foi, de poli-

tique ?

D’Enfer ou de Paradis promis, en veux-tu en voilà ?

Je n’en sais trop rien mais je crois en tous cas qu’on a besoin de cul d’où qu’on vienne qui que l’on soit.

Le cul, le fond des choses comme vous savez.

Et les jolies petites herbes qui poussent autour et qui, chez les filles remontent sur une petite motte fendue et sombre, intrigante, attachante, on n’en a pas vachement besoin ?

Tout ça, motte, petit trou, gros trou, bite, pine, queue de nègre ou de chinois, petit bouton de rose, clito, clitoris, fente fendue souriante, fleurs des champs, roses des amants, lèvres avides, tout ça c’est le cul dans la pensée des amoureux et des poètes.

Et même pas besoin d’être amoureux ni poète.

L’amour du cul et des fesses est partagé par tout le monde surtout et y compris par ceux et celles qui rougissent, qui se signent, qui vitupèrent, interdisent, insultent et crachent dessus.

Les scientifique, Américains ou Allemands appellent ça le sexe ce qui est moins joli et moins appétissant.

Et voilà notre mot à nous : appétissant, appétit, désir, envie, ivresse, tête qui tourne, tête perdue à corps et à cris.

En Français on a des histoires de cul.

Qui sont ou qui ne sont pas forcément des histoires d’amour et de temps perdu.

C’est dans cette ivresse là enfin que Sophie se meut 20 années de dessins érotiques mais ne se vautre pas.

Qu’elle dessine comme d’autres chantent, dans le réceptacle sans fin de son inspiration, à l’aube des poèmes ou des nuits d’amour, elle façonne ces couples qui s’aiment, qui s’arrachent les rires et les larmes.

Et le foutre divin, fontaine, jet, arc en ciel. sur rendez-vous Elle peint, elle dessine, elle grave gravement.

Et là c’est la danse, ça tourne et tourne et enivre. jusqu’au Explosés ou posés comme des oiseaux, ces rondes d’amour ne se défont jamais, rebondissent les unes sur les autres.

Vous allez voir, ce que vous allez voir !

Au nez et à la barbe des pisse-froid, des honteux, des 179, rue du Fbg Saint-Antoine pudibonds et des nouveaux anglo-saxons, les ribam75011 Paris belles de petites fleurs d’amour, ces joutes à bouche TéL: +336 86 42 07 50 que veux-tu, à fesses tendues, à qui mieux mieux vont vous faire aussi tourner la tête.

TéL: +336 50 45 47 08 Et comme Sophie est un grand peintre, que ses traits TéL: +331 75 57 09 87 sont si vifs et si féconds, qu’ils déchirent et donnent www.zombrart.fr soif, vous y reviendrez souvent. philippe@zombrart.fr C’est ça la beauté d’un livre.

Pascal AUBIER sarah@zombrart.fr sophiesainrapt1@gmail.com PALAZZI 48 VENEZIA

ZOMBRART prèsente

SOPHIE SAINRAPT De Georges Bataille à Lisière Mystère

30 novembre 2020

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onjour, Vous étiez nombreux le 28 janvier à Paris lors de la révélation des lauréats de la 4ème édition du Prix Swiss Life à 4 mains, Edouard Taufenbach et Régis Campo, pour leur projet Le Bleu du Ciel.

Nous avions prévu de découvrir avec vous les premières images et pistes musicales à l’occasion de la semaine professionnelle des Rencontres d’Arles.

Les circonstances si particulières en ont décidé autrement.

Il me tenait particulièrement à cœur de vous présenter le travail d’Edouard et Régis.

Leur création a été intense durant le confinement. Toute l’équipe de la Fondation, les conseillers artistiques, l’éditeur se sont mobilisés pour respecter le timing et ne pas subir cette fatalité.

Je suis très heureuse et très fière de vous montrer au travers cette vidéo de quelques minutes le projet en cours de réalisation.

Plus que jamais nous avons soif d’art, de

4ème édition du Prix Swiss Life à 4 mains

Le Bleu du Ciel par Édouard Taufenbach photographe plasticien

et Régis Campo compositeur

du 13 au 15 novembre 2020 révélation de l’œuvre au salon approche, sortie de l’édition photographie et musique http://approche.paris/fr

e projet autour du vol de l’hirondelle est l’histoire d’un voyage.

Il part d’un souvenir d’enfance, de la musique de ces oiseaux dans le ciel et de leur rassemblement sur les fils électriques avant leur grand départ pour l’Afrique, annonçant la fin de l’été.

Deux fois par an, des hirondelles traversent le Sahara et la Méditerranée pour joindre l’Afrique subsaharienne et l’Europe.

A partir du sujet de l’hirondelle, Edouard Taufenbach et Régis Campo cherchent à développer une représentation sensible du passage du temps, du mouvement, et des échanges et circulations au sein d’un espace.

A l’échelle du vol, le mouvement des hirondelles dans le ciel est l’objet d’une fascination qui nourrit l’imaginaire.

Les oiseaux semblent suivre une partition faite de ruptures, d’accélérations et de silences, dessinant des formes abstraites comme des signes à interpréter.

Ce projet est une expérimentation au croisement des usages artistiques et scientifiques des médiums photographique et musical.

Entre rigueur formelle et narration subjective, la recherche déploie une approche où l’hirondelle en vol figurant un vecteur de force, donne forme et matière à un insatiable désir de liberté avec le ciel pour perspective.

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Sans jamais s’illustrer l’une l’autre, l’image et la musique se pourchassent, se dépassent successivement.

Un exercice de voltige où la répétition de rythmes et de motifs s’appuyant sur la composition de la musique itérative dialogue avec la répétition d’images organisées.

D’une case à l’autre, d’une mesure à l’autre, d’une hirondelle à l’autre, Le Bleu du Ciel dessine des espaces de liberté, construisant un sentiment de mouvement, de vitesse, de ruptures de lignes, si caractéristiques du vol des hirondelles.

Edouard Taufenbach et Régis Campo, formation d’un duo intergénérationnel Edouard Taufenbach découvre le travail du compositeur Régis Campo par son album Ombra Felice paru en 2011.

Il suit depuis avec attention son travail jusqu’à son élection en 2017 à l’Académie des beaux-arts dans la section Composition musicale.

Au printemps 2019, à l’annonce de la nouvelle édition du Prix Swiss Life à 4 mains, il voit la chance de le contacter pour travailler ensemble.

La rencontre a été forte, car ils partagent un imaginaire cinéphile et musical commun.

Qui plus est, ils aiment à dire qu’Edouard est un compositeur d’images et Régis un créateur de vignettes sonores.

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liberté et d’évasion.

Entrez dans l’univers poétique, de l’œuvre Le Bleu du Ciel découvrez l’espace de jeu de ces fantasques hirondelles et de l’infini du ciel.

Je reste à votre écoute et à votre disposition pour tout complément d’information.

J’ai hâte de vous faire découvrir l’œuvre complète et l’ouvrage photo-musique réalisé aux édition Filigranes lors de la révélation du Bleu du Ciel pendant le salon a ppr oc he en novembre 2020.

En espérant vous revoir très vite.

Bien sincèrement Nathalie Martin Déléguée Générale de la Fondation Swiss Life nathalie.martin@ swisslife.fr Tél : 06 24 50 00 53 Contact presse : Nathalie Dran nathalie.dran@wanadoo.fr + 33 (0)9 61 30 19 46 + 33 (0)6 99 41 52 49

Photo © Arthur Evans es récifs coralliens captivent mon imagination depuis toujours.

Je suis le plus heureux lorsque les formes exotiques, les couleurs vibrantes et les appendices souvent venimeux des animaux qui habitent un récif tropical dansent à travers la fenêtre de mon masque de plongée alors que je plane lentement au-dessus.

C’est peut-être parce que je suis relativement petit et que je respecte les petites créatures qui peuvent construire de grandes et belles choses, mais j’ai l’impression de m’identifier aux coraux sans doute l’un des animaux les plus difficiles à vivre - à un niveau très profond.

Je me sens souvent comme un corail, travaillant dans mon atelier avec des outils simples et mes mains pour sculpter et texturer méthodiquement l’argile afin de construire de grandes structures délicates et pierreuses qui imitent les prolifiques constructeurs de récifs.

Je perce des milliers de

trous pour recréer la croissance répétitive des colonies de corail avec des polypes individuels qui précipitent le carbonate de calcium de l’eau de mer pour former des squelettes pierreux qui, avec le temps, se développent les uns sur les autres pour composer les vastes structures complexes que nous connaissons sous le nom de récifs.

Il me semble essentiel que le support de mon travail soit la céramique, car le carbonate de calcium est également un ingrédient courant dans les matériaux d’argile et de glaçage.

Non seulement la structure chimique de mon travail est parallèle à celle d’un récif naturel, mais les tentacules d’anémones et les branches de corail en porcelaine cassent facilement si elles ne sont pas manipulées correctement, comme les corps délicats des organismes vivants des récifs.

Comme j’ai une relation si profonde avec les coraux, je suis profondément attristé par leur disparition.

Il est désormais bien connu que les coraux de récif sont une sorte de “canari dans la mine de charbon” pour le changement climatique - si sensible que la moindre altération de la température ou de la chimie de l’eau de mer qui les entoure peut causer une dévastation totale par le blanchiment, la mort et l’érosion des récifs.

Les émissions de dioxyde de carbone (CO2) d’origine humaine provoquent le réchauffement et l’acidification de l’eau de mer - deux des menaces les plus dévastatrices pour la santé des récifs coralliens.

Avec l’augmentation de la température de la mer, les coraux sont stressés et “blanchissent” - expulsant les algues symbiotiques colorées appelées zooxanthelles qui vivent dans leurs tissus et font la photosynthèse pour les nourrir - ce qui provoque la mort des coraux et leur affamation avant qu’un type d’algue maligne n’étouffe leur squelette et ne rende plus difficile le repeuplement du récif par les coraux juvéniles.

Avec l’augmentation de la température de la mer, les coraux sont stressés et “blanchissent” - expulsant les algues symPALAZZI 52 VENEZIA

Photo © Arthur Evans

te pour atteindre cet objectif.

Heureusement, le rapport a également constaté que de nouvelles réglementations telles que des normes d’efficacité des véhicules plus strictes pour réduire les émissions sont possibles sans nuire à notre qualité de vie, et que la technologie des énergies renouvelables devient moins coûteuse.

Il devient tout à fait possible pour chacun d’entre nous de faire des choix en tant que citoyens et électeurs qui contribueront à atténuer le changement climatique avant qu’il ne soit trop tard.

Selon le GIEC, les émissions de gaz à effet de serre devront diminuer de 40 à 70 % d’ici 2050.

C’est une tâche énorme, mais en soutenant des mesures visant à orienter les ressources vers les énergies renouvelables plutôt que vers des investissements supplémentaires dans les combustibles fossiles aujourd’hui, nous pouvons encore limiter l’ampleur du changement climatique catastrophique à venir pour nous et pour notre planète bleue.

Les récifs coralliens sont-ils condamnés à sombrer dans l’oubli ou allons-nous leur permettre de se rétablir et de retrouver leur vitalité ?

Nous n’agirons pas si nous ne nous en soucions pas, et nous ne nous en soucierons pas si nous ne savons pas.

Nous ne nous soucierons surtout pas si nous ignorons les vastes ressources et la valeur inhérente des récifs qui les rendent importants à nos yeux. (suit page 54)

Courtney Mattison biotiques colorées appelées zooxanthelles qui vivent dans leurs tissus et font la photosynthèse pour les nourrir - ce qui provoque la mort des coraux et leur affamation avant qu’une algue maligne “gazonnière” n’étouffe leur squelette et ne rende plus difficile le repeuplement du récif par les coraux juvéniles.

En combinaison avec d’autres menaces, dont la pollution et la surpêche, nos émissions de CO2 seront un désastre pour les récifs si nous n’agissons pas maintenant pour atténuer nos impacts.

Sans une diminution rapide et drastique de nos émissions de gaz à effet de serre, de nos pratiques de surpêche et de la pollution terrestre, les principaux chercheurs s’accordent à dire que les récifs pourraient cesser de fonctionner comme des berceaux écologiques pour la vie marine d’ici la fin de ce siècle.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) - un groupe des Nations unies composé de centaines de scientifiques, d’économistes et d’autres experts - partage cet avis.

Selon Ottmar Edenhofer, un économiste allemand et coprésident du comité qui a rédigé le dernier rapport du GIEC, “Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre une autre décennie...

Si nous perdons une autre décennie, il devient extrêmement coûteux de parvenir à une stabilisation du climat”.

Le comité a constaté que, bien qu’il soit encore techniquement possible de limiter le réchauffement climatique à un niveau supportable, seule une diminution spectaculaire des émissions au cours des 15 prochaines années serait suffisan-

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(suit de la page 53) J’espère que l’idée qu’une petite personne puisse créer des installations sculpturales en céramique aussi énormes et détaillées incitera les spectateurs à réaliser à quel point les récifs sont importants pour moi, et à devenir suffisamment curieux pour en apprendre davantage sur l’importance de l’océan pour eux.

En tant qu’”artiviste” (artiste + activiste), j’espère sincèrement que je ne construis pas des monuments commémoratifs aux récifs pour un avenir sans eux, mais plutôt des célébrations de leur beauté durable mais fragile.

Our Changing Seas III est la troisième de ma série d’installations céramiques à grande échelle sur les récifs coralliens qui célèbre la beauté exotique des récifs coralliens tout en soulignant les menaces auxquelles ils sont confrontés. Cette pièce explore la transition rapide que les coraux des tropiques et des régions subtropicales connaissent, passant d’un état sain, coloré et diversifié à un état malade et décoloré en raison du changement climatique provoqué par l’homme, qui place les récifs coralliens dans le proverbial “œil de la tempête”. En son cœur, cette pièce célèbre mes aspects esthétiques préférés d’un récif corallien en bonne santé, entouré par les squelettes blancs stériles des coraux blanchis qui tourbillonnent comme les vents rotatifs d’un cyclone.

Courtney Mattison https://courtneymattison. com/

’est une peinture volcanique. Immédiatement solaire.

Elle colore la rétine et donne, comme le disait Rimbaud, « l’œil darne » _ des éclairs dans les

yeux.

Elle ne choisit pas le détour par la représentation de la « laideur chaotique » du monde, comme le dit Berdiaev, mais exalte la « beauté du cosmos » à l’état brut, dans sa nudité.

La résurrection s’opère par la couleur où le rouge et le jaune prédominent et orchestrent les autres couleurs.

Extrait de la Revue AREA N°35 – par Marie Denieuil Surgissement, Cyb ne peint pas le dos courbé par ce qu’elle sait ou la séduit, et sa culture n’a d’emprise ni sur son geste, ni sur sa palette qui n’affrète que des tons purs, par la magie des phosphènes.

Jeux rythmés en accords des monochromes et stridences des tons posés en contrastes.

Ces œuvres n’appellent pas à la dégustation plastique, mais stimulent le regard en laissant la vision libre.

Ses couleurs posées avec une touche tout en busc, enchevêtrent les courbes, induisent des révolutions optiques.

La couleur ici milite pour son propre espace et elle triomphe du tableau qui devient, notamment dans les dernières œuvres, source d’énergie. Épreuve par le regard de tout le corps noyé dans un ailleurs dont j’ignore le nom, mais qui me transporte dans des champs positifs.

Les titres de Cyb accolés au tableau, évocation souvent PALAZZI 54 VENEZIA

voyageuse, ne sont qu’à elle nécessaires, et il ne gênent en rien l’étonnant transport que procure sa peinture.

Théodore Blaise Il y a dans leurs œuvres une gemmelité propre aux esprits libres : cette même soif de liberté, cette même puissance de vie qui échappe au monde de l’aliénation et veut voir le monde sans emprise, sous l’influence seule de la beauté.

Enfin il existe aussi toute une production invisible chez les jeunes mais qui n’est pas institutionnalisée.

Je pense notamment à la poète Franco-Roumaine Raluca Petrescu, au poète franco-arménien Viguen Haroutounian ou encore, pour n’en citer que quelques-uns, aux jeune comédien et poète Sébastien Thévenet.

Cette production n’a pas vraiment de visibilité ni les moyens de se faire connaitre peut-être parce que les institutions ne portent pas assez l’innovation artistique.

Or ce que nous apprend Berdiaev c’est que ce n’est pas seulement l’art qui meurt sans endroit pour en parler, mais l’homme lui-même et la société avec.

La création éthique (ce qu’il nomme l’amour, c’est-àdire le talent de faire du lien entre les êtres et de créer des espaces de générosité) est ce qui rend possible la création artistique. D’où la nécessité de créer des lieux, des situations où susciter ces rencontres pour encourager et valoriser les productions de demain.

Car comme le disait Bardiaev : « La beauté est le but de l’Art », mais « elle est aussi le but de la Vie » AREA n. 35

CYB

Jaune, rouge, bleu Baroque Abstrait

du 4 au 28 novembre 2020 Vernissage Mercredi

4 novembre 2020

Area

39, rue Volta 75003 Paris Tél : +33 1 45 23 31 52

area.volta@laposte.net

www.areaparis.com/

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omment expliquer que cette ville, cette Idée de beauté, puisse manquer au point d’extraire un peintre de sa démarche abstraite ?

Etre convoqué à la réalité par une telle merveille, par cette ville rêvée des mille et un artistes, par cette fière et fragile tentative des hommes de rejoindre le ciel, est l’expérience d’un rapt et d’un délice, d’une limite franchie qui ouvre un inconnu frémissant d’espérance.

Voilà donc Venise, éternelle patrie de la jeunesse et de l’avenir.

Le temps s’y dilate, le rythme du flot en vient briser la structure ordinaire, le déséquilibre des éléments suscite un rapport baroque à la temporalité.

Voici donc Venise, orientale autant que tropicale, archaïque et animalière autant qu’érudite et raffinée.

Si l’essence de la peinture est l’abstraction au sens du style, de l’aménagement singulier de ses moyens propres, couleur, figure, matière, la vocation de la peinture est d’exprimer. Alors l’amour et le manque d’un lieu, d’une ville, d’un être, le manque même de la réalité peuvent se découvrir au cœur du geste pictural.

Mais la réalité n’est-elle pas par essence manquante, en tant qu’elle est cette expérience singulière d’une perception mêlée de souvenir ? Pour rendre visible cette réalité, il faut l’œuvre, celle de l’écrivain, ou du peintre.

La Venise que je peins, est une Venise singulière, elle a les couleurs des Tropiques, leur intensité, la simplification du trait abstrait d’un oeil de peintre, le caractère sauvage d’un enfant qui a toujours connu la mer, et qui a toujours rêvé de peinture.

Venise est un chœur d’uniques, qui provoque la mémoire, aiguise l’imagination. Elle est l’avenir du temps, elle ne cesse de rappeler avec tant de détours et de sortilèges, tant de constance et de miroitements, que le réel n’est pas, et qu’il sera notre œuvre.

CYB