JA3076H

L’AFRIQUE EN 2020

RD CONGO FÉLIX TSHISEKEDI

« Il n’y a qu’un seul patron, c’est moi »

ALGÉRIE Les chefs d’entreprise dans l’expectative

DÉBAT Piketty & Nubukpo « L’Afrique doit inventer son propre avenir »

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3076H DU 22 DÉCEMBRE 2019 AU 11 JANVIER 2020

TRIBUNES Bachir Diagne, Hemley Boum, Gwet, Jack Ma, Ndikumana, Alioune Sall, StraussKahn, Tozi, Yabi...

FR

FA C C AN

JEUNE AFRIQUE N o 3076H

L’A F R I Q U E E N

2020

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France 7,90 € Algérie 420 DA Allemagne 9 € Autriche 9 € Belgique 9 € Canada 12,99 $ CAN Espagne 9 € États-Unis 12,99 $ US Éthiopie 110 birrs Grèce 9 € Guadeloupe 9 € Guyane 9 € Italie 9 € Luxembourg 9 € Maroc 50 DH Martinique 9 € Mauritanie 2 500 MRO Mayotte 12 € Nouvelle Calédonie 1000 XPF Pays-Bas 9,20 € Polynésie Française 1000 XPF Portugal cont. 9 € Réunion 9 € Royaume-Uni 8,50 £ RDC 10 USD Suisse 15 FS Tunisie 8 DT Zone CFA 4 800 F CFA

ENGAGÉE EN AFRIQUE, LÀ OÙ L’AVENIR S’ÉCRIT Société Générale est nommée meilleure banque en Afrique, pour sa responsabilité d’entreprise et sa contribution au développement d’une agriculture innovante et durable sur le continent.

Société Générale, S.A. au capital de 1 066 714 367,50 € – 552 120 222 RCS PARIS – Siège social : 29, bd Haussmann, 75009 PARIS. Crédit photo : Alexis Dufresne – Décembre 2019.

ÉDITORIAL

Qu’avons-nous fait de nos 60 ans ? e numéro triple que vous avez entre les mains est le dernier d’une année riche en rebondissements et en enseignements. Il est exceptionnel à plus d’un titre. D’abord, en raison de sa densité: 228 pages d’enquêtes, de portraits, d’interviews et d’opinions destinées à vous éclairer sur les évolutions politique, économique, diplomatique, sociétale et culturelle du continent. En 2020 et au-delà.

Ensuite, en raison de sa longévité : il demeurera en vente pendant trois semaines, du 22 décembre au 11 janvier. Enfin, en raison de son contenu, riche, éclairant, prospectif et original.

C’est à un passionnant voyage que nous vous convions, d’Alger au Cap, et du golfe de Guinée à celui d’Aden.

Au plus près du terrain, mais avec la hauteur de vue requise par l’analyse et la compréhension des grands enjeux du moment, nationaux comme continentaux. Sur ce dernier point, nous ne saurions trop vous recommander la lecture de l’excellent débat entre les économistes Thomas Piketty et Kako Nubukpo (lire pp. 26-33).

Ce voyage est d’autant plus instructif – et indispensable – que 2020 sera riche de rendez-vous électoraux à la fois symboliques et cruciaux (lire pp. 62-64). Une dizaine de scrutins présidentiels et/ou législatifs devraient en effet avoir lieu. Ils recèlent autant de promesses que d’inquiétudes. Parmi les principaux, citons les présidentielles ivoirienne, burkinabè, togolaise, nigérienne, guinéenne, ghanéenne, centrafricaine et burundaise… Mais 2020 marquera aussi le soixantième

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anniversaire de l’indépendance de dix-sept pays d’Afrique subsaharienne (parmi lesquels quatorze ex-colonies françaises): Mauritanie, Mali, Sénégal, Côte d’Ivoire, Burkina, Bénin, Niger, Togo, Nigeria, Tchad, Cameroun, Centrafrique, Gabon, Congo, RD Congo, Somalie et Madagascar (lire pp.

54-55). L’occasion de se pencher sur le chemin parcouru et sur celui qu’il reste à arpenter. Année de tous les combats, 1960 fut l’aube d’une nouvelle ère, la concrétisation d’innombrables rêves de liberté. Les chaînes de la colonisation brisées, le regard tourné vers l’avenir, les États prenaient leur destin en main.

Soixante ans plus tard, que reste-t-il de cette époque où tout semblait possible ? Quelles leçons doit-on tirer de notre histoire afin de surmonter nos actuelles frustrations?

continent dans son ensemble : il est réalisé par des Africains (même s’il est édité à Paris pour des raisons pratiques et logistiques), pour les Africains. Et il va de soi que nous continuerons dans cette voie. Nous poursuivrons également notre effort d’innovation et de changement, tout en restant fidèles à nos valeurs et attentifs à vos exigences.

Dans le domaine du digital notamment.

Nous allons étoffer nos contenus éditoriaux : Jeune Afrique, son site et son application vont évoluer, de même que Jeune Afrique Business+,notre publication consacrée aux coulisses du monde des affaires, et The Africa Report, notre trimestriel et site internet en anglais.

Dans celui de l’événementiel, aussi, le programme est chargé: après Kigali en 2019, la 8e édition de l’Africa CEO Forum se déroulera les 9 et 10 mars à Abidjan, en Côte d’Ivoire. De nombreuses autres manifestations sont prévues. Elles seront notamment consacrées aux femmes cadres supérieures ou chefs d’entreprise (Women in Business et Les Héroïnes), mais aussi au monde de la finance. En attendant, l’ensemble de la rédaction et des collaborateurs de Jeune Afrique Media Group se joignent à l’auteur de ces lignes pour vous souhaiter d’excellentes fêtes de fin d’année et vous présenter leurs meilleurs vœux. Bonne lecture à toutes et à tous!

Après Kigali, le prochain Africa CEO Forum aura lieu à Abidjan, en mars.

Aventure médiatique unique

Parallèlement, Jeune Afrique fêtera également ses 60 ans en 2020. Fondé à Tunis le 17 octobre 1960, votre hebdomadaire s’est attaché pendant toutes ces années à décrypter l’actualité africaine et à en faire connaître les acteurs. Avec objectivité et en rejetant les prismes déformants qui empêchent de voir l’Afrique telle qu’elle est réellement – et telle que les Africains euxmêmes la perçoivent. Une aventure médiatique unique. C’est en effet le seul newsmagazine consacré à un

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Sommaire TRIBUNES

3 Éditorial par Marwane Ben Yahmed

PROJECTEURS

6 Confidentiel 10 L’homme de l’année Kaïs Saïed 12 Le match Nana Akufo-Addo vs John Dramani Mahama 14 10 choses à savoir sur… Zozibini Tunzi 16 L’œil de Glez 2020 croquée sur le vif 22 Esprits libres

LA GRANDE INTERVIEW

26 Thomas Piketty & Kako Nubukpo « L’Afrique doit inventer son propre avenir »

ÉVÉNEMENTS

44 Entretien Félix Tshisekedi, président de la RD Congo 54 1960-2020. Il y a 60 ans, l’indépendance…

Les premiers présidents africains 56 Sur un air de Cha Cha 62 Politique Élections à plusieurs inconnues 72 Algérie Les patrons dans l’expectative

TENDANCE

84 Cedeao Ce si long chemin vers la monnaie unique 92 Maroc Étoiles politiques montantes 104 Éthiopie Enfin la Renaissance ?

112 Entreprises Interview de Célestin Tawamba, président du Gicam 119 Société Pour le meilleur… et pour la galerie 130 Musique Entretien avec Amazigh Kateb 137 Sorties Ces rooftops qui montent

36 Léonce Ndikumana, Injustice fiscale 38 François Soudan, Les larmes du crocodile 52 Hemley Boum, Cher Africain de demain 60 Yann Gwet, Les grands simulacres nationaux 66 Jack Ma, L’Afrique d’aujourd’hui, c’est la Chine d’il y a vingt ans!

70 Gilles Olakounlé Yabi, Montronsnous stratèges avec nos nouveaux partenaires étrangers 80 Mohamed Tozy, Des limites du hirak 90 Emmanuel Leroueil, Comment éviter le bras de fer financier en Afrique centrale 102 Didier Gauvin, Elizabeth Warren et le plafond de verre 110 Souleymane Bachir Diagne, Précis d’érudition islamique 126 Marc-Antoine Pérouse de Montclos, Jihadisme transethnique 128 Dominique Strauss-Kahn, À l’orée d’une décennie décisive 141 Edmond Bertrand, Comment vaincre Ebola 144 Ousseynou Nar Gueye, Maîtresse d’un homme marié, ou la parole libérée

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54 ÉTATS À LA LOUPE

VOUS & NOUS 226 Post-scriptum

151 Afrique du Nord

189 Afrique de l’Est

159 Afrique de l’Ouest 179 Afrique centrale

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203 Afrique australe jeuneafrique

215 Océan Indien

PHOTOS DE COUVERTURE : ÉDITION IA : KAMBOU SIA / AFP ; PANA ; MISTROLLI / FOTOGRAMMA / REA ; KIRKPATRICK / NYT / REDUX-REA ; VINCENT FOURNIER / JA ; LEMOUTON / POOL / REA ; NICOLAS FAUQUÉ / IMAGESDETUNISIE.COM ; BENSALEM / APP ; LUIS MATO / AFP. ÉDITION MMO : NICOLAS FAUQUÉ / IMAGESDETUNISIE ; COM ; ESSAM AL FETORI / REUTERS ; ZUMA / APA / REA ; DR ; BENSALEM / AFP. ÉDITION RDC : ROBERT CARRUBA POUR JA, VINCENT FOURNIER/JA

Vous retrouverez le « Ce que je crois », de Béchir Ben Yahmed, le 12 janvier 2020

Fondateur : Béchir Ben Yahmed, le 17 octobre 1960 à Tunis bby@jeuneafrique.com Édité par Jeune Afrique Media Group Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris Tél. : +33 (0)1 44 30 19 60 Fax : +33 (0)1 45 20 09 69 Courriel : redaction @jeuneafrique.com Directeur général : Amir Ben Yahmed Vice-présidents : Danielle Ben Yahmed, François Soudan Directeur de la publication : Marwane Ben Yahmed mby@jeuneafrique.com Directeur de la rédaction : François Soudan f.soudan@jeuneafrique.com La rédaction et l’équipe de Jeune Afrique sont à retrouver sur www.jeuneafrique.com/ qui-sommes-nous/

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PROJECTEURS CONFIDENTIEL Politique

DR

CÔTE D’IVOIRE AMBITION À L’HORIZON ?

L’ancien président centrafricain, à Bangui, le 17 décembre.

CENTRAFRIQUE

Comment Bozizé est rentré Dans la soirée du 15 décembre, François Bozizé a retrouvé Bangui, après un périple par la route depuis Kampala (Ouganda).

Toujours frappé par des sanctions de l’ONU, l’ex-président a officiellement interdiction de se déplacer. Selon nos sources, il a défendu à ses collaborateurs de révéler les points de passage de son convoi afin de pouvoir les utiliser à nouveau au cas où sa sécurité viendrait à être menacée.

Accueilli par son fils, Jean-Francis Bozizé, il a ensuite fait prévenir Bertin Béa et Christian Guénébem-Dédizoum, respectivement secrétaire général et porte-parole de son parti, le KNK. Le lendemain, à 10 heures, une délégation du KNK composée de Béa, Guénébem-Dédizoum, Jean-Louis Opalagna (secrétaire national et avocat de Bozizé), Séverin VéléFaïmindi, Nicole Namsé et de la députée Rachel Ninga Wong Mallo Mbaïkandji a été reçue à la présidence par ObedNamsio, le directeur de cabinet du chef de l’État.

Bozizé souhaitait assurer FaustinArchange Touadéra (FAT) de son intention de participer au processus de paix.

Contacté par JA, il explique « [ne pas être]

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revenu pour [se] battre ». Le même message a été transmis au premier conseiller de l’ambassadeur de France Éric Gérard, aux représentations de l’UE, de l’UA et de l’ONU. Un rendez-vous avait été fixé à la primature, avec la directrice de cabinet de Firmin Ngrebada, mais celle-ci l’a annulé.

Le 17, la même délégation s’est rendue dans les ambassades des pays voisins (Tchad, Soudan, Soudan du Sud, Cameroun, RD Congo). Après s’être entretenu par téléphone dans la matinée avec Fidèle Gouandjika, ministre conseiller de FAT, Bozizé a fait une première apparition publique le soir, au siège du KNK. Aucune autre n’est prévue: il souhaite au préalable s’entretenir avec FAT, à qui une demande d’audience a été transmise le 18.

Logé à Bangui dans un lieu tenu secret, Bozizé a demandé la protection des forces de défense nationale et de l’ONU. « Il était temps que je rentre », confie-t-il à JA. Il tenait à ne pas arriver après le 27 décembre 2019: s’il devait se présenter à la présidentielle (prévue pour le 27 décembre 2020), il devrait justifier d’une résidence de douze mois consécutifs en Centrafrique.

Marcel Amon-Tanoh, le ministre des Affaires étrangères, à qui l’on prête le désir de concourir à la présidentielle de 2020, va devoir s’expliquer auprès d’Alassane Ouattara. Le chef de l’État souhaite en effet qu’il lui précise ses intentions. Après s’être absenté du pays pendant trois semaines pour raisons médicales, Amon-Tanoh est réapparu le 16 décembre à New York, au siège de l’ONU.

ALGÉRIE LES PRIORITÉS DE TEBBOUNE

Avant même son investiture, le président Abdelmadjid Tebboune avait entamé des démarches discrètes pour choisir son futur Premier ministre. Dans les messages qu’il fait passer directement ou par l’intermédiaire d’émissaires à ses interlocuteurs, il résume ainsi les premières mesures qu’il compte prendre: libération des prisonniers d’opinion, maintien des deux chambres du Parlement et révision en profondeur de la Constitution.

PROJECTEURS

CONFIDENTIEL Diplomatie & réseaux G5 SAHEL IDI EN RENFORT

Amadou Toumani Touré, ici lors d’un premier retour à Bamako, le 24 décembre 2017.

MALI

La nouvelle vie d’ATT Amadou Toumani Touré (ATT), qui vivait en exil à Dakar depuis le coup d’État qui l’a renversé en 2012, est rentré définitivement à Bamako le 15 décembre. Avant de quitter la villa des Almadies, où il résidait en famille, l’ancien président malien a remercié pour son accueil Macky Sall – dont il est toujours resté proche au cours des sept années qu’il a passées au Sénégal. Arrivé à l’aéroport de Bamako en fin de journée à bord d’un vol de la Kenya Airways en compagnie de son épouse, Touré Lobbo Traoré, ATT s’est installé dans la maison de sa fille, Fanta, dans le quartier huppé d’ACI 2000, où il vivra désormais. Les autorités maliennes y ont d’ailleurs fait réaliser des travaux afin d’assurer son confort et sa sécurité. Non loin se situent les locaux de sa Fondation pour l’enfance, dans laquelle il compte s’investir dans les prochains mois. L’ex-président se rendra également à Mopti, dont il est originaire. Selon l’un de ses proches, il a l’intention de s’impliquer dans la résolution de la crise du Centre.

AMBAZONIE NÉGOCIATIONS AU POINT MORT

Une délégation du Centre pour le dialogue humanitaire (HD) devait se rendre à la fin de novembre au Cameroun pour y rencontrer le gouvernement, mais ce dernier a annulé la rencontre sine die. Selon nos sources,

Yaoundé n’a pas l’intention de participer à des pourparlers avec les Ambazoniens tant qu’il n’aura pas mis en œuvre les mesures issues du Grand Dialogue national d’octobre (en particulier le statut spécial pour les régions anglophones) et que les élections locales n’auront pas été organisées (en février).

NIGER YACOUBA LE PANAFRICAIN

Investi le 15 décembre candidat à la présidentielle nigérienne de 2020, Ibrahim Yacouba a officialisé la création de l’Inter-Africaine progressiste, composée de son parti, le MPN-Kiishin Kassa, et des formations du Tchadien Succès Masra, du Sénégalais Ousmane Sonko, du Malien Oumar Mariko, du Guinéen Siaka Barry et du Burkinabè Abdoulaye Soma. Cette alliance, qui était en gestation depuis plusieurs mois, a vocation à être élargie à d’autres pays, notamment d’Afrique centrale, où Masra est chargé du recrutement. Les chefs de partis devraient en occuper la présidence à tour de rôle. L’économiste togolais Kako Nubukpo a confirmé que son mouvement, L’Essentiel, allait intégrer l’alliance.

Même après ces échéances, la tenue de pourparlers reste incertaine : les séparatistes sont divisés et, au palais présidentiel, deux camps s’affrontent. D’un côté, les tenants d’une ligne dure, plutôt opposée au dialogue et représentée par Samuel Mvondo Ayolo, le directeur du cabinet civil, et par Joseph

TAGAZA DJIBO POUR JA

MICHELE CATTANI / AFP

Les présidents du G5 Sahel se sont réunis à huis clos à Niamey, le 15 décembre. Au centre de leurs discussions: leur coopération avec la France, qui sera évoquée à Pau, le 13 janvier, avec Emmanuel Macron. Ils ont aussi abordé la question des moyens militaires à déployer pour prendre le dessus sur les groupes jihadistes, en particulier dans le « fuseau centre », qui couvre la zone sensible des trois frontières. Idriss Déby Itno (IDI) a redit à ses pairs son intention d’y envoyer prochainement un bataillon de l’armée tchadienne, sans en préciser la date.

Dion Ngute, le Premier ministre. De l’autre, une frange plus ouverte, qu’incarne Ferdinand Ngoh Ngoh, le secrétaire général de la présidence. À l’étranger, la médiation a aussi ses partisans et ses détracteurs : les États-Unis y sont très favorables, tandis que la France y est plutôt opposée.

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PROJECTEURS

CONFIDENTIEL Diplomatie & réseaux

GUINÉE

Six mois après l’expiration de son mandat à la tête de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL), Denis Sassou Nguesso (DSN) en est toujours de facto le président. Le chef de l’État congolais devait en théorie passer la main en juin dernier à Abdallah Hamdok, le nouveau Premier ministre soudanais, mais ce dernier s’est désisté en raison de la situation politique à Khartoum. Aucun des dix autres membres de la CIRGL n’ayant fait acte de candidature et aucun sommet des chefs d’État et de gouvernement de cette organisation ne s’étant tenu depuis celui d’octobre 2017 à Brazzaville, DSN continue d’en assurer la direction.

FRANCE-LIBYE PORTE CLOSE

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA) n’a pas statué sur le cas de Zahra Mansour, ex-garde du corps de Mouammar Kadhafi réfugiée en France (JA n°3074), qui argue qu’elle ne pourrait retourner en Libye sans y être menacée de mort. La CNDA devait rendre son verdict le 12 décembre, mais l’audience a été reportée au 26 février. Le 6 décembre, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) a transmis à la CNDA un nouveau mémoire expliquant que Mansour ne devrait pas obtenir l’asile en raison de son ancienne appartenance aux Amazones de Kadhafi. Prise de court, la défense de la Libyenne a préféré demander un report.

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Imbroglio à Conakry Le 14 décembre, Alpha Condé a « pass é un savon » au Camerounais Christopher Fomunyoh, directeur Afrique de l’ONG a m é r i c a i n e Na t i o n a l Democratic Institute (NDI), qu’il a fait venir au Palais en marge du déjeuner offert au terme de leur visite à Conakry aux ex-chefs d’État nigérian Goodluck Jonathan et béninois Nicéphore Soglo. Motif : Fomunyoh et Alan Doss, qui dirige la Fondation Kofi Annan (KAF), s’étaient contentés d’un simple courrier, expédié le 25 novembre, pour annonGoodluck Jonathan, Alpha Condé et Nicéphore Soglo, le 14 décembre. cer que les deux ex-présiNDI-KAF, au sein de laquelle figurait aussi dents mèneraient une mission conjointe sous l’égide de leurs ONG respectives. la Libérienne Medina Wesseh, secrétaire N’ayant pas reçu de réponse, cette inigénérale de l’Union du fleuve Mano, a rentiative aurait dû être annulée, selon Alpha contré les principaux acteurs du processus Condé, lequel ne reconnaît que la médiaélectoral. À la fin du déjeuner, au cours duquel la situation intérieure guinéenne tion de l’OIF. Soglo et Jonathan, qui penn’a pas été abordée, Soglo a offert à son saient que Conakry avait donné son accord à leur visite, se sont dits « désolés » et hôte des cartes et des ouvrages sur… l’exauraient présenté leurs excuses. Pendant termination des Indiens d’Amérique et sur son séjour (9-14 décembre), la délégation la traite négrière.

FRANCOPHONIE

Mushikiwabo fait le ménage Secrétaire générale de l’OIF depuis janvier 2019, Louise Mushikiwabo achève d’installer ses équipes. Le 22 novembre, la Rwandaise a mis fin aux fonctions des derniers directeurs qu’avait nommés sa prédécesseuse Michaëlle Jean : Nita Deerpalsing (Programmation et Développement stratégique), Youma Fall (Langue française) et Nicodème Adzra (Administration et Finances). Alioune Koné, le responsable des ressources humaines, et Narjess Saidane, la représentante auprès de l’ONU à New York, ont également été remerciés. Un intérim a été mis en place dès le 25 novembre.

Le 9 décembre, Georges Nakseu Nguefang, directeur des affaires politiques de Michaëlle Jean, a été nommé représentant permanent de l’OIF auprès des Nations unies, à Genève. Il succède à Henri Monceau, promu directeur de la Francophonie économique et numérique. Enfin, Éric Adja, le directeur du Bureau régional de l’Afrique de l’Ouest, lui aussi nommé par Jean, a été limogé le 11 décembre « à la suite d’une procédure disciplinaire ».

DR

GRANDS LACS DSN GARDE LA MAIN

PROJECTEURS

CONFIDENTIEL

TURQUIE-AFRIQUE UN SOMMET EN AVRIL

Le 3e Sommet Turquie-Afrique aura lieu à la fin d’avril, date qui convient aussi bien aux responsables turcs qu’à ceux de l’UA. Le président Recep Tayyip Erdogan doit décider dans les prochains jours s’il aura lieu à Istanbul ou à Ankara. Le 14 décembre, Mevlüt Çavusoglu, son ministre des Affaires étrangères, a profité de sa présence au Forum de Doha pour en évoquer les préparatifs avec Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA, et y convier Paul Kagame, au nom du chef de l’État turc.

TAMIM BEN HAMAD AL THANI

HAMILTON/REA

L’émir du Qatar a lancé une offensive en Afrique, où son pays souhaite accroître ses investissements. Après s’être longtemps appuyé sur les Marocains, il compte aujourd’hui sur plusieurs personnalités influentes pour lui ouvrir les portes du continent.

NICOLAS SARKOZY L’ex-chef de l’État français représente les intérêts du Qatar au sein d’Accor. Depuis 2017, il assure la présidence du comité « stratégie internationale » du groupe hôtelier, chargé des investissements.

Est proche de Cheikh Hamad Ben Khalifa Al Thani, le père de l’émir.

V.FOURNIER/JA/REA

Nommé coordinateur général des Affaires présidentielles, Noureddin Bongo Valentin, l’aîné du couple présidentiel, n’est pas le seul « fils de » aux affaires. Ministre de l’Agriculture depuis février 2018, Biendi MagangaMoussavou siégeait en Conseil des ministres en même temps que son père, Pierre Claver, vice-président du pays entre août 2017 et mai 2019. Les ministres Carmen Ndaot (Promotion des investissements) et Pascal Houangni Ambourouet (Énergie) ont pour parents les anciens maires de Port- Gentil Séraphin Ndaot Rembogo et MarieAugustine Houangni Ambourouet.

Le ministre de la Communication, Edgard Anicet Mboumbou Miyakou, suit les traces de son père, Antoine Mboumbou Miyakou, qui fut membre du gouvernement de 1982 à 2006 et vice-président du PDG. Le ministre des Sports, Franck Nguema, est, lui, le fils d’Angèle Ondo, ex-ministre de la Communication. Quant au nouveau porte-parole de la présidence, Jessye Ella Ekogha, il avait pour père le général Jean-Claude Ella Ekogha, ancien chef d’état-major des forces armées gabonaises.

Les « VRP » en Afrique de…

MOUSSA FAKI MAHAMAT Président de la Commission de l’UA. Maillon essentiel de la stratégie diplomatique des Qataris, qui le consultent pour la résolution de crises survenant dans les pays arabes du continent. Séjourne régulièrement à Doha, où il multiplie les séances de travail avec les autorités.

E.LARRAYADIEU POUR JA

Les « fils de » reviennent en force

IAL SPÉC AR QAT

DONALD KABERUKA Ex-président de la BAD. Reconverti dans le conseil au sein de la banque d’affaires SouthBridge Partners. A été recommandé à l’émir par Paul Kagame. Conseille les Qataris à propos de la création du Fonds d’investissements stratégiques pour l’Afrique, prévue pour 2020.

V.FOURNIER/JA

GABON

DR

Diplomatie & réseaux

SAMUEL ETO’O Ambassadeur de la Coupe du monde de football 2022, qui se déroulera au Qatar, l’ex-international camerounais fait la tournée des présidents africains. Installé à Doha. A joué un rôle dans le partenariat commercial qui lie le Rwanda au club de football français PSG, propriété de l’émir.

LIBYE QUAND L’ÉMIR DU QATAR MILITE POUR L’UA

Le Qatar fait du lobbying pour que l’UA prenne une part plus active à la résolution du conflit libyen et se dit prêt à financer ses initiatives. Il estime que la mission onusienne s’est montrée incapable de condamner explicitement l’ingérence des Émirats arabes unis en Libye et leur soutien au maréchal Khalifa Haftar. Doha reproche aussi à l’ONU de ne pas l’avoir associé à la conférence de Berlin, prévue en octobre et reportée plusieurs fois. Signe de l’implication des Qataris dans ce dossier: leur ambassadeur en Libye, Mohamed Ben Nasser Ben Jassim Al Thani, n’est autre qu’un cousin de l’émir Tamim Ben Hamad Al Thani. Ex-pilote de chasse, il s’est replié sur Doha, où il réside, et a rang de ministre.

FORUM DE DOHA L’AFRIQUE AU RENDEZ-VOUS

Outre Paul Kagame, le chef de l’État rwandais, et Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA, plusieurs personnalités africaines ont pris part au Forum de Doha (14-15 décembre). Parmi les invités, René Trabelsi, le ministre tunisien du Tourisme; Hassan Ali Khayre, le Premier ministre somalien; Louise Mushikiwabo, la secrétaire générale de l’OIF, et le Franco-Ivoirien Tidjane Thiam, directeur général du Crédit Suisse. Mohammed Siala, le ministre libyen des Affaires étrangères, était lui aussi présent, ainsi que Fayez al-Sarraj, le chef du gouvernement d’union nationale.

L’intervention de ce dernier a été annulée sans explication.

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PROJECTEURS

LES GENS

ONS ABID

À Tunis, le 13 octobre 2019.

L’HOMME DE L’ANNÉE

Kaïs Saïed, le sphinx de Carthage

Mystérieux, il s’exprime peu et prend son temps pour s’imprégner de la fonction. Même s’il jouit encore d’un préjugé favorable, le chef de l’État sait qu’il doit rendre espoir au pays. Et vite.

CAMILLE LAFRANCE, envoyée spéciale à Tunis

nvesti chef de l’État le 23 octobre 2019, Kaïs Saïed a désormais droit à son best of vidéo mensuel: cinq minutes de plans saccadés diffusés sur la page Facebook de la présidence tunisienne, où de rares extraits de discours sont entrecoupés d’une musique aux accents martiaux. De quoi donner un air grandiloquent à cet universitaire sans parti, dont la droiture et l’austérité tranchent avec les fastes de la fonction. Outre Youssef Chahed et Habib Jemli – respectivement ancien et nouveau chefs du gouvernement –, les leaders de partis et les indépendants défilent au palais de Carthage.

Journalistes, représentants d’instances républicaines ou du syndicat UGTT font eux aussi partie de cet incessant ballet.

Hyperactif, Kaïs Saïed (61 ans) reste un président inclassable, à la communication archi-verrouillée. Peu

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disert, il n’a pas donné d’interviews depuis son intronisation: tout au plus quelques points de presse au gré de ses déplacements. Il a fait le pari osé de se passer de porte-parole. Ceux qui se risquent à commenter ses premiers pas requièrent l’anonymat ou en sont réduits à faire des comparaisons. « Il incarne le pays. Pour mener des négociations, il faut une personnalité suffisamment forte, de l’étoffe d’un Bourguiba ou d’un Béji Caïd Essebsi », glisse une source gouvernementale. « Ses prédécesseurs, élevés à l’école du bourguibisme, se présentaient exclusivement comme des figures paternalistes. Lui a l’avantage d’être à l’écoute », rétorque Zouhair Maghzaoui, secrétaire général du parti Echaab (gauche). Reçu à Carthage, le populiste Seifeddine Makhlouf, député d’Al Karama, résume, perplexe: « Il nous a écoutés sans donner son avis, comme si on passait un examen et qu’il notait “vu”. Nous connaissons Kaïs Saïed le juriste, mais tout le

monde attend de voir Kaïs Saïed le politicien. »

Rôle d’arbitre

Les premiers mois de son mandat ont été marqués par un début de polémique portant sur le doublement des frais de sécurité lié à son choix de continuer à vivre chez lui, à El Mnihla, à une trentaine de kilomètres de Carthage. Le palais, « c’est son bureau », résume une source bien renseignée. « Ce n’est pas un roi isolé dans son château », applaudit une autre. À l’évidence, Saïed ambitionne de redéfinir les prérogatives présidentielles pour jouer un rôle d’arbitre.

Désorientant. D’autant que les divisions partisanes ne laissent pas augurer de rapports de force clairs. « C’est le nouveau gouvernement qui déterminera sa place et non l’inverse, prédit une autre source gouvernementale. Il pourra être une force de proposition, mais il n’aura pas le dernier mot. » Les diplomates, aussi, s’interrogent.

Tebboune pour le féliciter, lui faisant part de sa volonté de « dynamiser la coopération bilatérale ».

En attendant, il sillonne le pays et casse les codes : visite de décharges anarchiques à Radès, de plantations d’oliviers à El Manar, défense du développement au Kef et à Siliana, dénonciation du terrorisme à Ouerdanine ou du mauvais état des routes à Aïn Snoussi… Son habit de « prof » lui colle à la peau. Il a visité plusieurs établissements scolaires, froissant les institutions de tutelle, qui n’en étaient pas informées. Il compte d’ailleurs mettre sur pied un Conseil supérieur de l’éducation et nourrirait des projets pour le secteur de la santé – des domaines éloignés de ses attributions. Son but: réhabiliter le rôle social de l’État.

Saïed reçoit volontiers de s « groupes de jeunes » de Kasserine, des délégations de la société civile et des chômeurs venus à pied de Gafsa. « Il a une certaine intelligence émotionnelle qui fait qu’on le croie, mais il ne pourra compter sur cela que durant

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Empathie ou populisme?

Se rattrapera-t-il sur le dossier libyen?

Fayez al-Sarraj, le président du Gouvernement d’union nationale, est venu à Tunis au début de décembre.

Leur tête-à-tête n’a donné lieu qu’à des échanges policés. Kaïs Saïed n’a toujours pas prévu de déplacement à l’étranger, sans doute embarrassé par sa promesse de réserver sa première visite officielle à l’Algérie. La présidentielle qui vient de s’y tenir a été timidement saluée par les chancelleries occidentales. Au lendemain du scrutin, Saïed a téléphoné à Abdelmadjid

les premiers mois », avertit un journaliste. « Il ne fait que pleurer avec les gens et leur taper sur l’épaule, c’est du populisme ! Il aurait dû faire des promesses qui entrent dans le champ de ses prérogatives, la déception sera immense », juge un député de gauche. « Il a toujours été devant un amphithéâtre et se retrouve aujourd’hui avec très peu de moyens face à des centaines de milliers de Tunisiens qui, à tort ou à raison, le tiennent pour responsable de leur avenir », tempère une source ministérielle.

La vidéo de son premier mois d’action se termine sur une accolade avec un citoyen. « Ressusciter la révolution ne suffit plus. Il est temps d’apporter des solutions à des situations socio-économiques catastrophiques, souligne le militant des droits de l’homme Messaoud Romdhani. L’exaspération commence à poindre. » À preuve, l’élection de Kaïs Saïed n’a pas empêché les mouvements de protestation de se multiplier en fin d’année.

QUI LE CONSEILLE ?

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Et pour cause : les décisions du nouveau président en matière de politique étrangère sont très attendues.

En décembre 2020, Tunis accueillera plus de 80 délégations au Sommet de la Francophonie. Du jamais vu ! Dès janvier, la Tunisie entrera pour deux ans au Conseil de sécurité de l’ONU. Elle sera appelée à prendre position et pourrait être le porte-voix de la Ligue arabe, voire de l’UA. « Il veut rééquilibrer certaines relations, estime une source autorisée. Il incarne une diplomatie proactive et tranchante, ça tombe à pic. » Comme pour marquer son territoire, le chef de l’État a écarté les ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Dans ce dernier domaine, sur lequel il se rode encore, il s’appuie sur le chef des services de renseignements ou sur le Conseil supérieur des armées. Nombre de ses proches conseillers sont issus du ministère des Affaires étrangères (lire encadré), ce qui a rassuré. Et, en attendant que Habib Jemli forme un gouvernement, Youssef Chahed, chargé d’expédier les affaires courantes, sert d’émissaire au président et transmet ses lettres d’amitié aux alliés traditionnels : Alger, Paris et Rome. Ont aussi été invités à Carthage trois diplomates – un Allemand, un Algérien et un Libyen – ainsi que le célèbre journaliste palestinien Abdel Bari Atwan.

Donnant de la voix sur la question palestinienne, Saïed n’a pas pour autant entraîné avec lui les dirigeants de la région.

Pour beaucoup, ABDERRAOUF BETBAÏEB, influent ministre-conseiller et fidèle ami de Kaïs Saïed, a joué un rôle dans les nominations à la présidence. Chargé d’affaires à La Haye et au Caire, consul adjoint à Djeddah puis ambassadeur à Budapest, cet homme jugé « peu expansif » et « conservateur » a été militant syndical au sein de son ministère après la révolution de 2011.

TAREK BETTAÏEB, qui fut ambassadeur à Abou Dhabi et à Téhéran, devient directeur de cabinet. Othman Jerandi, ex-ministre et ancien ambassadeur (au Nigeria, au Koweït et en Corée du Sud), renforce la cellule diplomatique. Un autre diplomate, Tarek Hannachi, a pris la tête du protocole. Leur expérience devrait leur permettre de peser sur les grandes orientations du pays en matière de politique étrangère. « La répartition des rôles n’est toutefois pas encore très claire », confie une source diplomatique.

Le général Mohamed Salah Hamdi, qui fut chef d’état-major et attaché militaire en Libye, conseille le président dans le domaine de la défense. Plus contesté, Sami Ben Jannet, formé à la direction de la Régie des tabacs, dirige l’Institut tunisien des études stratégiques. « C’est un poste lié aux questions de sécurité, on n’y nomme pas quelqu’un qui n’a pas idée de ce qu’est une stratégie », tance une source gouvernementale. À l’inverse, la désignation de deux femmes – RACHIDA ENNAIFER à la Communication et Nadia Akacha aux Affaires juridiques – rassure ceux qui se méfient du conservatisme de Kaïs Saïed.

C.LA.

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PROJECTEURS

LES GENS

NICHOLAS ADJEI et PATRICK SMITH

u Ghana, la prochaine élection présidentielle aura un air de revanche. John Dramani Mahama, sous les couleurs du Congrès national démocratique (NDC), et Nana Akufo-Addo, sous l’étiquette du Nouveau Parti patriotique (NPP), s’affronteront pour la troisième fois. En 2012, le premier l’avait emporté lors d’un scrutin aussi serré que contesté. Quatre ans plus tard, le second s’est imposé avec près de 1 million de voix d’avance. La présidentielle de décembre 2020 promet donc d’être très disputée.

Tous deux fins politiciens, Akufo-Addo et Mahama différent complètement par leur style. Avocat expérimenté, Akufo-Addo réfléchit vite et n’aime rien tant que les intrigues. À l’inverse, Mahama, dont le poste le plus marquant avant son entrée en politique fut celui de responsable de la communication à l’ambassade du Japon, préfère les débats d’idées et le contact humain. C’est un idéologue qui aime se frotter à la population. Viceprésident de John Atta Mills, il avait assuré la fonction de chef de l’État par intérim après la mort de ce dernier, en juillet 2012.

En 2016, ce chrétien originaire du Nord (à dominante musulmane) avait refusé de participer à un débat télévisé avec son adversaire. Cette fois, il pourrait revoir sa position. Car, trois ans après son arrivée au pouvoir, Nana Akufo-Addo est confronté à une avalanche de critiques, surtout en dehors des régions de l’Est et Ashanti, les bastions de son parti. Son gouvernement a du mal à répondre aux attentes des citoyens et a fait face à plusieurs scandales de corruption. Or c’est en partie à cause de celle-ci que le NPP avait perdu les élections en 2008. La publication sur les réseaux sociaux de photos montrant des ministres au volant de voitures de luxe ou faisant la fête sur des yachts dans le sud de la France a eu un effet dévastateur. Alors que l’économie est en plein marasme, ces images ont accru l’impression que le NPP est un club de privilégiés et que les accusations de népotisme formulées par l’opposition sont fondées.

A

Barrage et turbines

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Nana Akufo-Addo Le chef de l’État sortant…

répond que la situation économique lors de l’arrivée au pouvoir d’Akufo-Addo, en 2017, était catastrophique. Les autorités rappellent par exemple que la dette publique augmentait dangereusement, dépassant 70 % du PIB, et qu’elle finançait en grande partie des projets d’énergies non renouvelables.

Les questions économiques seront donc au cœur de la campagne électorale. En 2015, alors que sa dette avait atteint un niveau critique, le Ghana s’était tourné vers le FMI. Le programme, d’un montant total de 926 millions de dollars, a pris fin en mars.

Il aura permis de redresser la barre. De 17 %, l’inflation est passée sous la barre des 10 %.

Le déficit a été résorbé à 3,7 % du PIB. Dans ce contexte, le choix de Nana Akufo-Addo de ne pas renouveler la collaboration avec le FMI a suscité de nombreuses interrogations.

La principale porte sur la capacité du pays à maintenir le cap de la rigueur budgétaire.

Pour répondre à ces craintes, le gouvernement a fait passer, à la fin de 2018, une loi de « responsabilité fiscale » interdisant tout déficit supérieur à 5 % du PIB. Et, depuis le début de l’année, le pays s’est doté d’un conseil de discipline fiscale et d’un conseil de stabilité financière. Suffisant pour encadrer la

À un an de la présidentielle, ils se préparent à leur troisième affrontement.

Selon une récente enquête d’Afrobaromètre, seuls 30 % des Ghanéens pensent que la situation du pays est « assez bonne ou très bonne », 66 % estiment que le gouvernement « ne fait pas ce qu’il faut pour réduire les inégalités », et 54 % jugent que « la politique actuelle ne crée pas suffisamment d’emplois ». Plus largement, 59 % d’entre eux estiment que « le pays va dans la mauvaise direction ». Dans les rangs du NPP, on

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GHA

NA John Dramani Mahama … et son prédécesseur

folie dépensière qui touche l’État tous les quatre ans, à chaque campagne électorale ? « Notre succès dépendra de notre capacité à poursuivre le redressement de l’économie, de l’efficacité de nos mesures sociales dans les domaines de la santé et de l’éducation, de l’amélioration du système des transports », estime Nana Akufo-Addo. À la fin de novembre, le président a lancé en grande pompe le projet de barrage de Pwalugu, dans la région de l’Upper East.

Estimé à 993 millions de dollars, il comprendra deux turbines d’une capacité de production de 60 MW, ainsi qu’une centrale solaire de 50 MW et un système d’irrigation desservant 25 000 ha. « Nous ne renions pas nos promesses. Le gouvernement respecte ses engagements envers le peuple », a déclaré le chef de l’État à cette occasion.

Cet énorme projet est financé grâce à un « accord de troc » conclu avec le conglomérat chinois Sinohydro et approuvé à la fin de juillet 2018. D’une valeur de 2 milliards de dollars (1,79 milliard d’euros), cet accord, très critiqué par l’opposition, prévoit que de la bauxite raffinée sera fournie « en échange » de la construction d’infrastructures et de logements. « On ne peut pas appeler ça du troc. Il

YASUSHI KANNO/AP/SIPA ; FRANCIS KOKOROKO POUR TAR

s’agit juste d’un moyen intelligent pour passer outre les limites budgétaires que nous impose le FMI. Nous allons rembourser les prêts avec les revenus issus de ces projets », plaide Gabby Otchere-Darko, un avocat (et cousin) du chef de l’État.

Ce barrage fait partie d’une série de projets prévus dans le Nord. Un réseau d’échangeurs routiers doit par exemple être construit à Tamale, la troisième ville du pays. Cette attention portée au développement du septentrion n’a rien d’anodin. De nombreux analystes politiques estiment que cette zone, où plus de 50 % de la population vit dans une situation d’extrême pauvreté, pourrait faire basculer l’élection de 2020. La région du « Grand Accra », où les critiques contre le marasme économique sont très vives, sera elle aussi à surveiller. Le gouvernement a annoncé qu’il y lancerait en janvier une nouvelle série de projets de réhabilitation urbaine.

Risque de violences

S’il ne dispose pas des mêmes ressources financières et des avantages du pouvoir, Mahama peut, lui, s’appuyer sur la machine du NDC, qui dispose d’un plus important vivier de militants et d’un meilleur maillage territorial que le NPP. Un taux de participation élevé pourrait donc lui être favorable. Encore faudra-t-il que le parti réussisse à surmonter ses divisions chroniques.

Le vote de la jeunesse sera également l’un des enjeux du scrutin. Pour le moment, l’avantage est à AkufoAddo. En 2016, Mahama n’avait pas réussi à inverser la tendance. Il avait pourtant fait de gros efforts, en organisant par exemple plusieurs grands concerts gratuits.

Sera-t-il capable de renverser la table au cours de cette nouvelle campagne ? « Nos sondages internes sont très encourageants.

Aujourd’hui, même ceux qui avaient voté pour le NPP se posent des questions », assure Samuel Okudzeto Ablakwa, député de l’opposition et ancien ministre.

Contrairement à nombre de ses voisins, le Ghana bénéficie depuis vingt-cinq ans d’un système de multipartisme stable et efficace. Mais, au fil des scrutins, les tensions se font plus fortes. Cette année encore, de nombreux observateurs craignent que la compétition électorale ne débouche sur des violences, tant le climat politique semble se détériorer semaine après semaine. Chaque camp accuse l’autre de susciter le désordre. D’un côté, le pouvoir suspecte des membres du NDC d’avoir été mêlés à plusieurs enlèvements en 2019.

De l’autre, les militants de l’opposition affirment que le NPP a fait entrer des miliciens dans l’appareil sécuritaire de l’État. À un an du scrutin, la bataille est déjà lancée.

La situation économique, guère brillante, sera au cœur de la campagne électorale.

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PROJECTEURS

LES GENS

Zozibini Tunzi

À 26 ans, la Sud-Africaine a été sacrée Miss Univers 2019 lors de la cérémonie annuelle qui s’est tenue à Atlanta (États-Unis) le 8 décembre. Elle est la troisième Noire à remporter le titre.

SYMBOLE

LES QUATRE FANTASTIQUES

Une Miss Univers aux cheveux courts et crépus !

On n’avait jamais vu ça.

D’autant que la peau d’ébène de la lauréate n’a visiblement souffert d’aucun produit éclaircissant. De quoi dynamiter les canons de beauté que l’Angolaise Leila Lopes (la dernière Africaine à avoir remporté le titre, en 2011) avait scrupuleusementt respectés : cheveux longs et lisses, teint plus clair…

Alors qu’elle était élue Miss Univers, trois Noires ont remporté les trois autres concours de beauté les plus prestigieux des États-Unis : Nia Franklin est devenue Miss America, Cheslie Kryst a été

Au cours de son dernierr discours, avant le verdicct, la gagnante a appelé à ce que l’on enseigne aux femmees la notion de leadership. « Je pense que nous, les femmes,, sommes les êtres les plus puissants de la Terre, et qu’on devrait nous donner toutes nos chances. On devrait apprendre aux jeunes filles à prendre toute leur place dans la société. »

BLACK IS BEAUTIFU UL

Lors de son couronnement, la jeune femme a prononcé un discours en forme d’ode à la beauté noire : « J’ai grandi dans un monde où les femmes comme moi, avec mon type de peau et de cheveux, n’onnt jamais été considérées comme étant belles. Il est temps que cela change. »

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LE CAP

Elle est née le 18 septembre 1993 à Tsolo, une ville de la province p du Cap-Oriental, en Afrique du Sud. Elle a grandi dans le village v de Sidwadweni avant quue sa famille s’installee définitivement au Cap.

TÉÉNACITÉ

VALERIE MACON / AFP

LEADERSHIP

sacrée Miss USA, et Kaliegh Garris a été couronnée Miss Teen USA. Une première !

En 2015, elle remporte un conncours de beauté local (M Miss Mamelodi Sundow wns). Deux ans plus tard, eelle se présente à l’élecction de Miss Afrique du Sud,, et échoue. En 2019, ellee retente sa chance, et estt élue le 9 août. Prix : unne voiture et 1 million de d rands (environ 61 000 euros).

LUXE

Cette fois, outre sa couronne de Miss Univers, elle dispose d’un luxueux appartement dde fonction à New York, oùù elle vivra afin de partticiper à une pléiade d’événnements liés à son nouveaau statut. Elle recevra également un salaire annuel d’ennviron 100 000 dollars.

Saans parler d’un accès

illimité à des soins dentaires ou des occasions de travailler avec des photographes professionnels.

FAMILLE

Sa mère est directrice d’une école située dans le village de Bolotwa. Son père est employé au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Formation, à Pretoria.

Elle a trois sœurs.

ÉTUDES

En 2018, elle a obtenu un diplôme de relations publiques et de gestion de l’image ainsi qu’une licence de technologie à la Cape Peninsula University of Technology tout en menant en parallèle une carrière de mannequin.

FÉMINISTE

Elle défend les droits des femmes et soutient notamment la campagne onusienne HeForShe, dont l’actrice anglaise Emma Watson est ambassadrice de bonne volonté. À l’occasion de la Journée internationale des femmes le 8 mars dernier, sur son compte Twitter, elle a appelé « tous les hommes » à adresser des lettres aux femmes. Ces lettres ont été insérées dans les rubans de la robe aux couleurs de son pays qu’elle a portée lors du concours de Miss Univers.

KATIA DANSOKO TOURÉ

msc.com

PROJECTEURS

L’ŒIL DE GLEZ

2020 CROQUÉE SUR LE VIF

SOMMET AFRIQUE-FRANCE Un peu de légèreté dans un monde de brutes

TUNISIE Qui est le président ?

Si sa campagne électorale a parfois manqué de souffle, sa victoire à la présidentielle n’a, elle, pas manqué de panache. Le 13 octobre 2019, le timide professeur de droit Kaïs Saïed, 61 ans, est devenu chef de l’État avec 72 % des suffrages exprimés.

Plébiscité par une jeunesse prônant un certain « dégagisme », la personnalité de celui que l’on surnomme « le robot » en raison de son austérité fait l’objet de toutes les spéculations. L’année 2020 devrait nous éclairer sur ses choix politiques.

BURKINA Défi électoral

Comme son voisin malien en 2018, le Burkina Faso sera confronté, en 2020, à un immense défi : organiser un scrutin présidentiel crédible sur un territoire largement en proie à l’insécurité. Nouvelle tête de pont d’un « Sahelistan » fantasmé par les jihadistes, le Pays des hommes intègres a vu – selon la terminologie de la diplomatie française – totalement disparaître ses zones à « vigilance normale » et éclore, en son centre, des zones « formellement déconseillées ». La moitié du territoire national est contaminée.

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Comme toujours, les organisateurs des sommets internationaux préfèrent choisir des thèmes consensuels, détachés de l’actualité politique. Pour la 28e édition du Sommet Afrique-France, du 4 au 6 juin 2020, à Bordeaux, Stéphanie Rivoal, l’ambassadrice et secrétaire générale de l’événement, souhaite que soient menées des réflexions sur les « villes et territoires durables ». À moins que les questions de sécurité ne resurgissent et ne rattrapent la cinquantaine de chefs d’État qu’Emmanuel Macron a invités…

PROJECTEURS

LES GENS

ÉLECTIONS Je vote, tu votes, ils votent…

Panacée politique ou habile trompe-l’œil ? Ce ne seront pas les rendez-vous électoraux, et en particulier présidentiels, qui manqueront en 2020. Du volcanique Burundi à l’exemplaire Ghana, en passant par le Togo, la Guinée, la Tanzanie, le Niger ou la Centrafrique, ces scrutins témoigneront de la diversité du continent en matière de maturité démocratique. Certains souvenirs de crises postélectorales douloureuses inspirent déjà la plus grande circonspection aux observateurs les plus aguerris.

SOUDAN-ALGÉRIE Les kaki font de la résistance

Après les départs forcés, en 2019, de l’Algérien Abdelaziz Bouteflika et du Soudanais Omar el-Béchir, les manifestants ont découvert qu’il y avait loin de la coupe de la contestation aux lèvres de la liberté. Les juntes militaires tapies derrière les anciens régimes tentent de faire de la résistance. Les jeunesses algérienne et soudanaise réussiront-elles à transformer l’essai en fissurant suffisamment les pouvoirs militaro-politiques pour faire germer de vrais systèmes démocratiques ?

CÔTE D’IVOIRE Bis repetita ?

Nouvelle présidentielle, en octobre 2020, avec, à la manœuvre, quelques anciens acteurs qui ont tissé, ces vingt-cinq dernières années, toutes les coalitions imaginables, à défaut d’union nationale. Entre « Front républicain », mouvement « Tout sauf Ouattara » et « Rassemblement houphouëtiste », à quel passé ressemblera l’avenir de la Côte d’Ivoire ? À moins que de jeunesanciens politiciens sortent du bois pour retirer le bâton de commandement des mains des plus de 60 ans…

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PROJECTEURS

L’ŒIL DE GLEZ

GAMBIE Jammeh, citoyen lambda ?

À Foni Sibanor, au cours de sa tournée baptisée « Meet the People », le président gambien a déclaré que Yahya Jammeh, son prédécesseur, pourrait revenir au pays, mais en qualité de simple citoyen. Adama Barrow a en outre précisé que l’ex-homme fort de la Gambie, en exil depuis 2017 et qui brûle de faire son retour, ne pourra pas redevenir président, après vingt-deux années de pouvoir durant lesquelles ses miliciens se sont rendus coupables de nombreuses violations des droits de l’homme.

CHINE-AFRIQUE Et voilà Alibaba!

Souvent considéré comme le Bill Gates chinois, le fondateur d’Alibaba a mis une partie de sa fortune au service du continent africain. Retraité (à 55 ans) du géant de la vente en ligne, Jack Ma a créé une fondation pour soutenir les entrepreneurs africains dans le domaine des nouvelles technologies. Lors d’une tournée qui l’a mené du Togo à l’Éthiopie, le milliardaire a affirmé: « L’Afrique d’aujourd’hui est comme la Chine d’il y a vingt ans. » L’année 2020 sera-t-elle celle du grand bond en avant?

BURUNDI À la grâce de Dieu

Au Burundi, l’année électorale qui s’annonce ne devrait pas être placée sous le signe de la laïcité. Adepte de l’Église du Rocher, Pierre Nkurunziza continuera de penser qu’il a été désigné par le Tout-Puissant et de marquer des buts pour le Alleluia FC. La première dame, Denise Nkurunziza, continuera de prêcher, voire de sortir – comme en octobre dernier – des singles inspirés des chorales de gospel. Dérives jugées « sectaires » ou pas, les scrutins présidentiel, législatifs et communaux se dérouleront en mai et juin… si Dieu le veut.

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@africaceoforum #ACF2020

8e édition

Le plus grand rendez-vous international des décideurs et financiers du secteur privé africain www.theafricaceoforum.com

9 & 10 mars 2020

PARTENAIRES MÉDIA

GALA DINNER

PROJECTEURS

ESPRITS LIBRES

Quand l’explosion démographique fait pschitt...

Alioune Sall Docteur en sociologie, directeur exécutif de l’Institut des futurs africains ’il est un sujet qui suscite les fantasmes les plus fous, c’est bien celui de la démographie africaine. À travers l’Europe, les populistes agitent régulièrement la menace du « grand remplacement ». Mais les thèses néomalthusiennes sur lesquelles ils s’appuient ont été mises en pièces par des démographes connus pour leur sérieux comme Hervé Le Bras, et c’est appréciable.

Mais si nous autres Africains nous donnions la peine de mettre les choses en perspective, nous aurions moins l’impression qu’il nous faut battre notre coulpe. D’abord, parce qu’il n’y a pas d’exception africaine en matière de démographie. Depuis la fin du XVIIIe siècle, grâce aux progrès réalisés par la médecine, les sciences et la technologie, qui ont permis une amélioration des conditions sanitaires et nutritionnelles, tous les autres continents ont connu, à des moments divers, une véritable explosion démographique. L’Afrique a seulement dû attendre deux siècles pour expérimenter, au début des années 1920, ce phénomène. Pour singulière que soit sa démographie aujourd’hui, elle n’est que la réplique de « séismes » enregistrés en d’autres temps dans différents points de la planète sans que cela suscite de l’effroi.

S

Généralisation

Nous aurions encore moins de raisons de nous excuser si nous rappelions qu’en l’an 1600 notre continent abritait 15 % de la population mondiale ; qu’en 1950, son poids démographique avait diminué de plus de la moitié, passant à 7 %. Et qu’en accueillant

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aujourd’hui les 10 % de l’humanité, il ne fait que regagner progressivement la place perdue il y a trois siècles…

Nous pourrions aussi ajouter que les discours sur la démographie africaine procèdent d’une trop grande généralisation. Certains peuvent se révéler justes au moment où on les énonce, mais il est regrettable qu’ils ne mettent pas suffisamment l’accent sur les nombreuses incertitudes, plus intéressantes à examiner que les tendances lourdes.

Comme chacun sait, la croissance démographique résulte de trois facteurs : la natalité, la mortalité et les soldes migratoires. S’agissant de la mortalité, par exemple, on a certes enregistré un recul entre les années 1920 et 1950. Mais cette évolution tend à s’inverser – en partie du fait de la faiblesse des systèmes de santé – et des inégalités fortes subsistent entre les milieux urbains et ruraux. Il faut donc relativiser les discours qui tendent à faire croire que la mortalité a baissé de façon significative partout et que la natalité augmente inexorablement. Dans le cas de la fécondité, la baisse s’est amorcée alors que l’Afrique était en crise, dans les années 1990. Mais nul ne peut dire aujourd’hui si elle est irréversible ou s’il s’agit d’un phénomène conjoncturel lié à la crise.

Tant sur la mortalité que sur la fécondité, les discours uniformisants que l’on tient sur l’Afrique n’ont pas de raison d’être parce que le

continent se caractérise par une très grande hétérogénéité. Or les généralisations sont la règle au sein des institutions internationales.

Enfant unique

Ces organisations sont tellement obnubilées par les tendances lourdes qu’elles restent aveugles face aux changements en gestation qui pourraient avoir des incidences positives ou négatives sur ces dernières.

Ainsi, il y a quelques années, toute la littérature sur la démographie faisait abondamment référence au fléau du sida. Aujourd’hui, comme par enchantement, il a disparu.

Or, si les thérapies ont permis d’en limiter l’extension et d’augmenter l’espérance de vie des malades, cela reste valable pour un petit groupe seulement et la pandémie continue de faire des ravages, avec des conséquences démographiques, économiques et sociales.

La variable de la population ne peut pas elle seule expliquer le passé, le présent et le devenir de notre continent. Il faut toujours la corréler à d’autres. Il est essentiel de replacer le discours sur la démographie dans le cadre d’une réflexion sur le modèle économique et politique le plus à même d’assurer une croissance qui ne mette pas en péril l’environnement, ne génère pas des inégalités sociales et ne remet pas en cause nos fragiles équilibres culturels. Pendant des décennies,

Il faut relativiser les discours affirmant que la natalité augmente inexorablement.

Banjul au secours des Rohingyas Samia Maktouf Avocate aux barreaux de Paris et de Tunis, Conseil auprès de la Cour pénale internationale les Chinois ont considéré que leur croissance démographique était un problème. Pour y remédier, ils ont mis en place la politique de l’enfant unique, sur laquelle ils reviennent aujourd’hui. En l’espace de cinquante ans, ils ont porté un regard différent sur cette question. Les positions de l’Afrique elles aussi ont eu à évoluer.

Lors de la Conférence mondiale sur la population, en 1974, à Bucarest, les représentants du continent étaient résolument pro-natalistes.

Ils estimaient que l’Afrique était sous-peuplée et qu’il lui fallait des bras pour se développer. On considérait alors qu’une main-d’œuvre bon marché était un avantage comparatif.

Lucidité et rigueur

Aujourd’hui, même des pays aussi islamisés que le Niger et le Tchad s’engagent dans des politiques visant à réduire le taux de fécondité. On y a vu des imams prônant, si ce n’est la limitation des naissances, du moins la protection du bien-être familial, grâce notamment à des politiques d’espacement des naissances. C’est déjà une avancée.

Le regard sur la situation change parce que la variable démographique n’est pas indépendante des autres. Il faut donc arrêter d’idéologiser les discours sur la démographie africaine et revenir à la réalité pour oser analyser la situation avec lucidité et rigueur avant d’opérer des choix. Et ces choix, les États africains doivent les faire en fonction des uns et des autres, et du reste du monde. On ne peut imaginer contrôler la variable démographique uniquement par des politiques nationales.

près plusieurs années à minimiser puis à nier le génocide en cours contre la minorité musulmane des Rohingyas au Myanmar (anciennement Birmanie), Aung San Suu Kyi, ancienne icône mondiale de la défense des Droits humains, s’est enfin trouvée forcée de s’expliquer devant la Cour internationale de Justice de La Haye, le 10 décembre. La Dame de Rangoon a défendu les militaires, ses anciens geôliers impitoyables, responsable des pires tyrannies, brandissant l’argument usé jusqu’à la corde d’opérations « antiterroristes », comme celle que mèneraient les autorités chinoises quand elles enferment dans des camps la minorité ouïghoure.

A

birman ne s’était retrouvé à la barre dans ce dossier. Et la justice internationale doit cette première victoire contre l’oppression à l’Afrique: c’est en effet la Gambie qui est à l’origine de cette comparution. Non État partie au Statut de Rome, le Myanmar ne pouvait être attaqué de front devant la Cour pénale internationale. Débarrassée de sa dictature seulement depuis 2017, la Gambie, majoritairement musulmane, a donc porté plainte, par la voix de son ministre de la Justice, Abubacarr Tambadou, auprès de la Cour internationale de justice. Un véritable coup de maître devant une juridiction prévue par la Charte des Nations unies, chargée des litiges entre États membres de l’ONU, comme celui opposant, dans les années 1990, la BosnieHerzégovine et la Yougoslavie.

Ancien procureur adjoint du Tribunal pénal international pour le Rwanda, Abubacarr Tambadou sait les limites qui, une fois franchies, mènent à l’inhumanité. Et aujourd’hui, Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix en 1991, qui incarnait alors l’espoir d’un monde plus libre et plus juste, est devenue l’image et la parole de la barbarie.

Tout à la fois blessée et forte de la mémoire du génocide, l’Afrique reprend le flambeau d’une lutte autrefois portée par une icône mondiale déchue, qui s’est elle-même fait chuter de son piédestal.

La Gambie a contraint Aung San Suu Kyi à s’expliquer devant la justice internationale.

Première victoire

Dès 2017, Amnesty International parlait pourtant d’une politique « systématique et planifiée » au Myanmar, majoritairement bouddhiste, avec des villages entiers brûlés et des troupes tirant sur les populations qui tentaient de fuir.

Mais alors que l’ONU déclarait les Rohingyas « minorité la plus persécutée au monde », Aung San Suu Kyi persistait à qualifier ces accusations de fake news et refusait même de se rendre à l’Assemblée générale de l’organisation, à New York.

Jusqu’ici, jamais un dirigeant

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ASECNA

UNE VISION PANAFRICAINE

© DR

Depuis sa création, l’ASECNA assure la fourniture de services de navigation aérienne au profit d’États ayant eu très tôt la vision de mutualiser leurs ressources matérielles, humaines et financières pour garantir la sécurité des vols au-dessus de leurs territoires. Aujourd’hui, les plus grands experts du monde aéronautique considèrent l’ASECNA comme l’illustration d’une réussite africaine.

Le 12 décembre 2019, l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) célébrera ses 60 ans à Dakar, au Sénégal, berceau de cette structure modèle en Afrique.

UN MODÈLE POUR L’AVIATION INTERNATIONALE L’ASECNA constitue un modèle historique d’organisme régional et autonome dédié à la gestion des espaces aériens et à la fourniture des services de sécurité de la navigation aérienne.

Elle est à ce titre l’un des meilleurs exemples de coopération Nord-Sud et Sud-Sud réussie. C’est pourquoi les États membres, à travers les Résolutions des Instances Statutaires, renouvellent régulièrement leur attachement à cet outil qui matérialise leur volonté de renforcer l’intégration régionale et continentale.

Un modèle de gestion coopérative Aujourd’hui la tendance mondiale est au « ciel sans couture » ou « ciel unique ». Ce qui permet la gestion de la navigation aérienne par un nombre limité de fournisseurs de services.

Tour de contrôle de l’aéroport de Malabo (Guinée équatoriale).

Une agence à la pointe de la technologie La compétence, les qualifications et la formation du personnel aéronautique demeureront, avec la modernisation des systèmes, des équipements et des infrastructures, les principales garanties de l’efficacité et de la sécurité de l’aviation civile mondiale.

Un dialogue permanent avec les usagers de l’air L’ASECNA a très tôt compris la nécessité de prendre en compte les préoccupations de toutes les parties prenantes dans le service qu’il rend. Ainsi les points de vue des États comme ceux des usagers des services de navigation aérienne sont régulièrement sollicités.

Une expertise mondialement reconnue

Une indépendance et une stabilité financières

Le modèle de l’ASECNA, bâti sur la mutualisation des moyens de plusieurs États pour fournir des services de navigation aérienne est cité en exemple dans le monde. Et l’Organisation de l’aviation Civile Internationale fait appel fréquemment à l’ASECNA pour conduire des processus complexes sur le continent africain.

Les redevances aéronautiques composées du survol, de l’atterrissage, du balisage et de la prolongation d’ouverture constituent les principales ressources de l’Agence ; le survol représente plus de 85 % de son chiffre d’affaires.

PUBLI-INFORMATION

VISION 2032 La gestion du trafic aérien dans les quinze années à venir se fondera pour l’essentiel sur les technologies spatiales et les échanges de données numériques entraînant progressivement le démantèlement des installations classiques disséminées partout sur le continent. La digitalisation, la virtualisation des lieux de production et, d’une manière générale, l’intelligence artificielle seront au cœur des activités de management du trafic aérien.

L’ASECNA appréhende bien cette situation.

C’est pourquoi, depuis quelques années, elle a entrepris sa métamorphose pour demeurer présente et incontournable à l’heure de la mise en œuvre de ces nouvelles technologies. Dans cette perspective et en accord avec l’ensemble des États, l’ASECNA s’est donné pour objectif en 2032 de mettre en œuvre un espace aérien uniformisé pour assurer le management du trafic.

C’est pourquoi l’ASECNA est engagée dans un programme ambitieux de fourniture de services globaux de navigation par satellite, basés notamment sur EGNOS (European Geostationary Navigation Overlay Service) et GALILEO. Cette ambition s’inscrit dans une volonté affirmée d’anticiper une évolution technologique majeure entraînant une mutation profonde de la nature des services et de leurs modes de gouvernance. Elle vise à conforter le positionnement de l’Agence en tant que producteur de services dans un environnement concurrentiel croissant.

L’ASECNA EN QUELQUES CHIFFRES

Le SBAS de l’ASECNA vise à renforcer les opérations de navigation et de surveillance au cours de toutes les phases de vol et à améliorer de manière significative et durable la sécurité et l’efficacité des vols dans sa zone de responsabilité. Ces services permettront, à partir de 2021-2022, d’augmenter les performances de positionnement fournies par les constellations de navigation par satellite, comme le GPS ou GALILEO.

16,1

millions de km² d’espace aérien

Matérialiser le « Ciel unique pour l’Afrique »

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En dehors des espaces gérés par l’ASECNA pour le compte de ses États membres, chaque État de l’Afrique du Nord, de l’Afrique du Sud ou de l’Afrique de l’Est gère l’espace aérien situé au-dessus de ses limites territoriales.

Cette gestion s’appuie sur des équipements qui diffèrent souvent d’un pays à l’autre, rendant parfois difficile la coordination et le suivi du vol par manque d’interopérabilité, avec des implications néfastes sur la sécurité de la navigation aérienne.

Face à cette situation, l’ASECNA considère que la mutualisation de la gestion des espaces aériens reste, pour l’heure, la réponse la plus adaptée, et, à ce titre, a conçu un projet dénommé « Ciel unique pour l’Afrique » afin d’homogénéiser les pratiques et de rendre plus efficace la fourniture de services de navigation aérienne. C’est pourquoi l’ASECNA a ouvert une Délégation au siège de l’Union africaine, à Addis-Abeba, pour soutenir cette vision.

aérodromes communautaires

597 905

vols traités en 2018 (trafic)

423

milliards de F CFA Plan d’investissement 2018-2021

6 000

Le second avion de calibration de l’ASECNA, dans le hangar d’AERODATA, à Wichita, Kansas, (États-Unis), en juin 2019.

CONTACT https://asecnaonline.asecna.aero/ 32-38, avenue Jean-Jaurès BP 3144, Dakar, Sénégal

DIFCOM/JAMG : CaC

RICARDO REITMEYER

agents

LA GRANDE INTERVIEW L’un plaide pour une réorganisation de la mondialisation, l’autre prône un changement de modèle de croissance pour le continent.

Entretien croisé avec deux économistes qui n’ont pas peur de casser les codes.

Propos recueillis par STÉPHANE BALLONG

Thomass Piketty «L’Afriquedoitinventer

sonpropreavenir»

PHOTOS : VINCENT FOURNIER/JA

Kako Nubukpo

La grande interview PIKETTY & NUBUKPO

Jeune Afrique : Liban, Haïti, Irak, Chili, Hong Kong, Algérie, France…. Plusieurs régions du monde sont secouées par des vagues de contestations populaires.

Comment analysez-vous ce phénomène ?

Thomas Piketty : Je pense qu’on arrive au bout du cycle

de développement qui a commencé dans les années 1980 sous le coup du reaganisme et du thatchérisme et qui s’est diffusé dans les années 1990 en Europe et dans d’autres parties du monde. Ce modèle, la mondialisation dans sa forme actuelle, a favorisé une remontée très forte des inégalités. Et l’absence d’un horizon égalitaire crédible, notamment depuis la fin du communisme soviétique, et

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MOHAMED AZAKIR/REUTERS

V

oilà deux économistes qui auront marqué l’année qui s’achève et qui, cela ne fait guère de doute, vont continuer à animer le débat en 2020. À 48 ans, le Français Thomas Piketty est un obstiné détracteur du capitalisme contemporain, qui, selon lui, engendre de grandes inégalités dans le monde. Dans son ouvrage Capital et Idéologie, paru en septembre dernier aux éditions du Seuil, il insiste sur la nécessité, déjà défendue dans son best-seller Le Capital au XXIe siècle, paru six ans plus tôt chez le même éditeur, de réformer ce système. Il faut réorganiser « la mondialisation », martèle-t-il, favoriser une plus grande « justice sociale », « désacraliser » la propriété privée et mettre un terme à la « logique d’accumulation infinie » que celle-ci induit. Utopistes pour certains, ses idées font néanmoins leur chemin dans les discussions au sein des partis travaillistes et conservateurs au RoyaumeUni, tout comme aux États-Unis, où elles sont au cœur de la campagne pour les primaires du Parti démocrate.

Quant à Kako Nubukpo, 51 ans, doyen de la faculté des sciences économiques et de gestion de l’université de Lomé, ancien ministre et ancien directeur de la francophonie économique à l’OIF, il combat depuis plusieurs années le franc CFA, monnaie utilisée par 14 pays d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest, dans sa forme actuelle. C’est également par le biais d’un livre, L’Urgence africaine, publié chez Odile Jacob en septembre, qu’il a fait parler de lui en 2019. Pour lui, il faut rapidement changer de modèle de croissance sur le continent, opter pour un développement « endogène », rompre avec les institutions de Bretton Woods qui ont fait de l’Afrique un « laboratoire néolibéral » et s’entêtent à y imposer des politiques de développement qui ne fonctionnent pas, alors que le continent connaît une croissance démographique sans précédent!

Si ces deux intellectuels mènent leurs réflexions sur des terrains différents, ils partagent un même socle idéologique, proche du socialisme. Surtout, l’un et l’autre ont la parole libre et n’ont pas peur de déranger. Interview.

de discussions sérieuses sur une alternative au système fondé sur le marché nourrit beaucoup de frustrations. On est donc à un moment charnière où se pose la question de la réorganisation de la mondialisation.

Kako Nubukpo : Ce qui se passe aujourd’hui est une forme de mondialisation de la contestation fondée sur des éléments qui sont au cœur du vivre-ensemble, c’est-à-dire l’impératif d’une justice sociale. En Équateur, en Haïti ou même en France, où l’État est dit social, les troubles provoqués par l’augmentation des prix du carburant traduisent cette demande, ce besoin.

Donc, pour vous, la question des inégalités est au cœur de tous ces mouvements de protestations…

T.P. : En effet, il y a toujours la question des inégalités,

qui prend des formes très différentes selon les pays. Le discours qui caractérise notre époque et qui consiste à sacraliser les milliardaires ne passe plus. On l’a vu avec la crise des « gilets jaunes » en France, quand on a augmenté les taxes sur les carburants et utilisé les recettes non pas pour financer la transition écologique ou pour aider les groupes sociaux les plus touchés par la crise mais pour financer la suppression de l’impôt sur la fortune. C’est rare que les choses soient exprimées de façon aussi claire.

Existe-t-il une spécificité africaine dans ce désarroi mondialisé ?

NOUS ASSISTONS

À UNE MONDIALISATION DE LA CONTESTATION FONDÉE SUR UN IMPÉRATIF DE JUSTICE SOCIALE.

Manifestations contre le gouvernement, à Beyrouth, au Liban, en octobre 2019.

K.N. : Dans la plupart des pays africains, les sociétés n’ont pas encore connu l’État social. Elles n’éprouvent donc pas forcément dans la mondialisation un phénomène de déclassement. L’Afrique a ses propres spécificités, qu’on peut analyser en trois temps. Il y a eu la période postindépendances, ou du volontarisme, durant laquelle l’embryon d’État a essayé de créer des services publics. Cette période a brusquement été interrompue dans les années 1980 et 1990 pour laisser place au temps de la gestion, c’est-à-dire des programmes d’ajustements structurels [imposés par le FMI et la Banque mondiale, et marqués par l’austérité budgétaire et les privatisations].

Et depuis peu, on commence à parler du postajustement structurel, on reconnaît avec une sorte de pragmatisme des complémentarités entre l’État et le marché. Mais la casse sociale a bien eu lieu à partir des années 1990 et jusqu’en 2010.

T.P. : Ce qui a été imposé à l’Afrique par les organisations internationales est en effet très choquant. On a joué avec le développement africain. On a misé sur la diminution du poids de l’État alors même que tous les pays aujourd’hui riches le sont devenus grâce à la construction d’un État fiscal et social capable non seulement d’organiser, de réguler les échanges économiques, de répertorier les propriétés, de mettre en place un minimum de justice fiscale et sociale, mais aussi d’investir dans les infrastructures, dans l’éducation et dans la santé. On a

encore fait baisser le niveau de prélèvement fiscal, alors même qu’il atteignait à peine 10 % à 15 % du PIB, contre 30 % à 40 % dans les pays riches, où il continuait d’augmenter légèrement.

Kako Nubukpo, dans votre ouvrage, L’Urgence africaine, vous soulignez la responsabilité des dirigeants africains, qui ont laissé faire…

K.N. : On pourrait élargir cette responsabilité aux intel-

lectuels africains qui se sont planqués au FMI, à la Banque mondiale et dans d’autres institutions internationales pour faire carrière. Le Consensus de Washington est arrivé non seulement au pire moment pour le continent, mais aussi alors que ceux qui avaient été formés et pouvaient apporter une lecture endogène du développement africain étaient devenus des alliés objectifs de ces grandes institutions.

Sans compter qu’après la chute du communisme soviétique tous ceux qui avaient porté un discours marxisant au début des années 1960 n’osaient plus s’exprimer. Aujourd’hui, nous aurions davantage besoin d’économistes hétérodoxes africains portant un discours de développement plus endogène. De même, l’émergence progressive d’une classe moyenne qui s’approprie le débat sur les questions sociétales et économiques pourrait aider à changer la donne.

En Côte d’Ivoire, au Togo ou encore en Angola, on assiste à de nouvelles privatisations. Faut-il s’en

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La grande interview PIKETTY & NUBUKPO

ROUGET/AFP

Le roi du Maroc Mohammed V (au centre) accueillant les leaders africains avant l’ouverture de la Conférence de Casablanca, le 3 janvier 1961.

inquiéter ? Que conseilleriez-vous aux autorités des pays concernés ?

T.P. : Quand on choisit de privatiser une partie de ses

entreprises publiques, il est important d’avoir une cartographie et un enregistrement très stricts de la propriété privée sur l’ensemble de son territoire. Car, sans savoir qui possèdent les moyens de production, du petit commerce à la plus grande fabrique, comment contrôler les déclarations de revenus et de profits ? Beaucoup de pays africains et d’Asie du Sud-Est ont sauté cette étape, ils se retrouvent donc avec un secteur informel gigantesque.

K.N. : Il existe une très forte exclusion financière en Afrique parce que les gens n’ont pas de titres de propriété. Développer ces derniers peut faciliter l’accès à un financement pllus endogène. On se comporte souvent comme si l’Afrique n’avait pas suffisamment d’épargne, pas suffisamment de potentiel pour financer un développement qui partirait de sa base, et on mise sur tout ce qui vient de l’extérieur. Pourtant, les IDE entretiennent l’économie de rente : les gros investissements vont dans le pétrole, le diamant, et plus généralement dans les matières premières. Il faut sortir de cette logique.

Il faut donc donner la priorité aux investisseurs privés locaux…

K.N. : Dans La Grande Désillusion,

Joseph Stiglitz écrit que la plupart des privatisations en Afrique n’ont fait

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qu’augmenter le phénomène de pillages. On a en réalité remplacé des monopoles publics par des monopoles privés. Lorsqu’on privatise, il faut veiller à ce que des collectifs de citoyens disposent au moins de minorités de blocage, et empêcher les barons locaux de s’emparer des entreprises concernées. Sinon, il faut instaurer un donnant-donnant, comme en Côte d’Ivoire, quand Houphouët Boigny disait : « Si vous volez l’argent public, au moins, investissez dans le pays ! » T.P. : On peut faire mieux que ça ! Outre les citoyens, on peut aussi associer les salariés aux processus de privatisation des entreprises. En Allemagne ou en Suède, leurs représentants peuvent occuper un tiers ou même la moitié des sièges dans les conseils d’administration, et cela a l’air de fonctionner. Le fait qu’ils aient accès à tous les documents a permis de limiter les super-rémunérations des grands patrons allemands et d’impliquer les salariés dans la stratégie à long terme.

Cette idée est petit à petit en train de se diffuser au Royaume-Uni, elle figure dans des projets de loi discutés au Sénat américain et dans le programme du parti démocrate. On n’a jamais vu cela auparavant ! Pourquoi l’Afrique n’en ferait-elle pas autant ?

IL NE FAUT PAS FAIRE LES MÊMES ERREURS QUE LES ÉTATS DE L’UE, QUI REFUSENT DE FAIRE DE LA POLITIQUE ENSEMBLE.

Pourquoi, soixante ans après les indépendances, les économies africaines ne parviennent toujours pas à vraiment décoller ?

T.P. : Il faut voir d’où on est partis . Les

défis auxquels l’Afrique a dû faire face

étaient nouveaux d’une certaine façon. Il y a eu un degré d’extraction (humaine et de ressources naturelles) qui est sans comparaison dans l’Histoire. Et aujourd’hui, le continent connaît une croissance démographique sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale, qui peut être un atout mais pose des défis d’une ampleur inédite.

Enfin, la fuite des cerveaux vers des pays riches, proches géographiquement, pose de vraies difficultés.

K.N. : On aurait effectivement pu s’attendre à ce que les indépendances permettent de mettre fin à l’é économie de l’esclavage colonial et de rentrer dans une économie monétaire de production afin de créer une prospérité partagée. C’était un peu le pari des pères d des indépendances. Malheureusement, l’élite africain ne s’est substituée à l’élite coloniale sous les pressions internationales. Elle n’a absolument pas assumé sa mission, celle de faire progresser l’Afrique dans le concert mondial autrement qu’à travers son insertion sur les marchés internationaux par l’exportation de matières premières.

La solution pour l’Afrique passerait donc par le fédéralisme ?

T.P. : Au moment des indépendances,

des gens d’autres nationalités, on crée les conditions de faisabilité d’une vraie fédération.

Concrètement, comment construire une fédération qui fonctionne avec des États-nations très faibles ?

T.P. : C’est un défi vertigineux ! Il faut penser des formes

fédérales nouvelles qui s’appuient sur les États-nations. Il faut que ces derniers soient le plus fonctionnel possible.

Parmi les formes démocratiques transnationa ales que je défends, il y a la création d’une assemblée a fédérale avec les pays qui le souhaitent, et qui s’appuie sur leurs différentes assemblées nationales. Il ne faut pas reproduire les erreurs des États-nations de l’Union européenne, qui refusent de faire de la politique ensemble, en particulier en ce qui concerne la solidarité et l’impôt. Sans impôt commun, il ne peut pas y avoir de destin commun.

K.N. : Il y a quelques années, j’ai présenté avec certains collègues l’idée d’une confédération de l’Uemoa qui passerait par la mutualisation d’un certain nombre de services et de fonctions, comme les douanes. J’avais aussi proposé de donner plus de moyens à la Commission pour qu’elle puisse financer un certain nombre de droits communautaires, comme celui qui permet aux étudiants de s’inscrire dans n’importe quelle université des pays membres en payant les mêmes droits que leurs camarades nationaux. Aujourd’hui, le budget communautaire de l’espace Uemoa représente 0,3 % de son PIB, une proportion qui est quasiment trois fois moindre que celle en vigueur dans l’Union européenne.

Mon idée était de modifier le traité de l’Uemoa pour permettre à sa Commission de lever sur le marché financier régional des montants supérieurs à ses fonds propres, tout en gageant ces emprunts sur les réserves de change que nous détenons auprès du Trésor français. Mais cela n’a pas été suivi. Mon impression est qu’il manque un narratif positif, qui serait porté par quelques leaders de la région pour mobiliser les populations, à l’image du fameux Groupe de Casablanca créé autour de Nkrumah et Nasser au début des années 1960. Aujourd’hui, tous les pays ont des plans de développement nationaux, on pourrait aussi élaborer des plans régionaux. On pourrait dans ce cadre créer une sorte de revenu universel qui permette aux populations les plus défavorisées d’accéder aux services sociaux de base, parce que c’est là que tout se joue.

SELON MOI, L’AIDE INTERNATIONALE POURRAIT ÊTRE MIEUX ORGANISÉE, À TRAVERS UNE SORTE DE PLAN MARSHALL POUR L’AFRIQUE.

beaucoup de dirigeants africains se rendaient déjà compte que les petits Étatsnations légués par la colonisation ne pouvaient pas faire face aux puissances économiques et financières mondiales.

Les réflexions sur des constructions fédérales qui auraient pu remplacer l’empire français auraient pu davantage aboutir si Paris n’avait pas tenté de façon très hypocrite de conserver la main sur tout ça. Son idée d’une assemblée fédérale franco-africaine ne pouvait pas fonctionner dans un cadre démocratique. La transition a donc raté. Le franc CFA reste un élément de ce cadre très imparfait et très insatisfaisant, mais sur lequel il faut désormais s’appuyer pour bâtir et pour faire mieux que l’Union européenne.

On peut inventer des formes nouvelles de fédéralisme démocratique et social en Afrique. Je suis en train de finir le roman Rouge impératrice, de Léonora Miano : elle dépeint une fédération africaine en 2124, qui a certes encore des difficultés, mais qui prospère. Le fait que la création romanesque s’empare aussi de ces sujets est en soi intéressant !

K.N. : On a déjà tout pour passer au fédéralisme. Les populations sont déjà intégrées, les pays de l’Uemoa négocient par exemple collectivement leur commerce extérieur à l’OMC, on a commencé à lever des armées par le biais de la Cedeao pour intervenir au Liberia et en Sierra Leone. Aujourd’hui, des militaires tchadiens meurent au Mali dans la lutte contre les jihadistes. À partir du moment où on accepte de verser du sang pour

Un revenu universel ? Qui le financerait ?

K.N. : Par la solidarité internationale. L’aide pourrait

être mieux organisée, à travers une sorte de plan Marshall pour l’Afrique.

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La grande interview PIKETTY & NUBUKPO

L’aide internationale financerait donc les politiques sociales ?

K.N. : Aujourd’hui, des sommes folles sont injectées en

Afrique, mais rien n’est coordonné. Il faudrait désigner au niveau régional un point focal et définir avec lui les axes prioritaires pour chaque pays.

T.P. : J’insisterai davantage sur la question de la fiscalité internationale, parce que l’aide met les pays donateurs dans une position similaire à celle du milliardaire qui vous dit : « Je veux bien vous donner de l’argent, mais c’est moi qui vais vous dire où le mettre. » Tout cela aboutit à un contournement de l’État et affaiblit la construction d’une puissance publique légitime en Afrique. Au-delà de l’immense générosité des pays du Nord, c’est de justice fiscale internationale qu’ont besoin les États africains. Très souvent, les flux entrants d’aide sont inférieurs aux flux sortants de profits privés, qui sont parfois des appropriations extrêmement douteuses des ressources. Il faut un cadre légal et un cadre fiscal qui permettent de mettre un terme au pillage permanent des pays africains.

K.N. : Il est vrai que dans un pays comme la Guinée équatoriale, le revenu national brut, une fois qu’on a payé la propriété du capital qui n’est pas équato-guinéen, ne représente plus que 47 % du PIB. Plus de la moitié de la richesse créée chaque année ressort du pays. Il faut abandonner le système du franc CFA actuel, qui permet de faire sortir facilement les capitaux de façon tout à fait légale. On pourrait aussi très bien décider de taxer ces flux pour financer les politiques sociales.

Vous dites que le franc CFA est imparfait… Que faut-il changer ?

T.P. : Le rôle joué par le ministère

IL FAUDRAIT UNE MONNAIE QUI SOIT DAVANTAGE MISE AU SERVICE D’UN PROJET DE DÉVELOPPEMENT ET DES INVESTISSEMENTS PUBLICS.

français des Finances pose de sérieux problèmes en matière de gouvernance démocratique. Et le fait d’insister sur une inflation très faible ainsi que sur la facilité de transférer des capitaux offre des conditions très avantageuses à ceux qui ont beaucoup de ressources, au détriment de la grande majorité des populations africaines. Il faudrait une monnaie qui soit davantage mise au service d’un projet de développement et des investissements publics. Les besoins en la matière sont considérables, compte tenu de la croissance démographique. Après avoir vu les banques centrales européenne et nord-américaines sauver leurs établissements bancaires, on ne peut plus dire qu’on ne peut rien faire pour financer les investissements d’infrastructures, de transports et d’éducation en Afrique.

Je n’encourage pas l’hyperinflation, mais est-ce qu’il faut pour autant plafonner l’inflation à 2 % ou 3 % ? Ne peut-on pas aller jusqu’à 5 % ? Kako Nubukpo évoque le

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chiffre de 8 % dans son livre. Moi je n’ai pas la formule magique, mais je pense qu’il faut s’autoriser à sortir un peu du cadre trop strict.

K.N. : On nous annonce une réforme du franc CFA et la création d’une monnaie unique de la Cedeao. Il faut justement profiter de cet événement pour construire un nouveau contrat social monétaire. Et transformer une institution qu’on pourrait qualifier d’extractive en une entité plus inclusive. Dans le cadre de la monnaie de la Cedeao, cela signifierait pour les pays de la zone franc CFA déplacer leur point focal monétaire. De Paris vers Abuja, par exemple, puisque le Nigeria représente les trois quarts du PIB de l’Afrique de l’Ouest et 52 % de sa population.

Je suis contre l’idée de monnaies nationales. Les défenseurs du franc CFA ne mettent pas suffisamment en avant la solidarité qui a été construite grâce à la centrralisation des réserves de change. Quand un c commerçant malien importe du riz, il ne sait pas que c’est grâce à l’exportateur de cacao ivoirien. Il faut donc garder tout ce qui est positif, et faire des sauts qualitatifs.

La création d’une zone continentale de libre-échange est également un sujet qui mobilise les dirigeants africains ces derniers temps. Est-ce dans cette direction que devrait aller le continent ?

T.P. : En Europe, l’approche fondée

uniquement sur le marché a mené à des contradictions et à des risques d’explosions. Si on ne prend pas la mesure de ces échecs, on court le risque d’entraîner d’autres Brexit ou que d’autres forces xénophobes et nationalistes prennent le contrôle de l’Union européenne et en fassent une forteresse crispée, moisie, identitaire et anti-immigration.

K.N. : En Afrique, on se comporte comme si le marché était l’alpha et l’oméga du développement. Et on réduit les droits de douane à une allure exponentielle. Si on construit simplement une zone qui permet au reste du monde d’alimenter le marché africain, on n’aura pas fait beaucoup de progrès. On ne peut pas mettre un producteur de riz américain et un concurrent sénégalais sur le même marché, sachant que le premier produit en une heure 400 fois plus que le second. En revanche, si on insiste sur le contenu local, que les règles d’origine fixent aujourd’hui à 60 %, cela incitera les acteurs à produire sur place. Je pense qu’il faut encore protéger les marchés africains le temps qu’ils améliorent leur productivité, afin qu’ils soient un peu plus compétitifs.

Muhammadu Buhari a-t-il raison de fermer les frontières de son pays avec ses voisins, notamment le Bénin, pour protéger sa production nationale ?

K.N. : Depuis les indépendances, des pays comme le Bénin et le Togo pratiquent ce qu’on appelle en droit douanier la politique de la porte ouverte. Ils importent pour réexporter. Le géographe béninois John Igué appelle cela des États entrepôts. Il n’est pas surprenant que cela provoque des frictions avec des pays comme le Nigeria, qui veut devenir producteur et même créer une base industrielle. Cela dit, on peut remettre en question la violence avec laquelle le président Buhari a fermé la frontière.

Selon vous, la croissance démographique en Afrique est une aubaine ou plutôt une bombe ?

K.N. : Il y a un ratio implacable dans l’histoire écono-

mique, c’est le ratio population/subsistance. De deux choses l’une: où vous augmentez les subsistances, ou vous faites ralentir l’augmentation de la population. Quand vous enregistrez un taux de croissance démographique de 2,8 % par an, cela suppose que vous ayez d’importantes ressources pour financer les politiques publiques dans les domaines de la santé et de l’éducation, et favoriser l’adéquation entre formation et emploi. L’incapacité de nos dirigeants à se projeter sur le long terme me pousse à dire que cette démographie est aujourd’hui un danger. Nous

devons passer d’une démographie subie à une démographie choisie. Quand on ramène la croissance africaine – qui est la deuxième plus importante au monde, derrière celle de l’Asie de l’Est et du Sud-Est sur les vingt dernières années – à la question démographique, on obtient un chiffre proche de zéro. Le PIB par tête en Côte d’Ivoire aujourd’hui est plus faible qu’en 1970.

T.P. : Il est quand même utile pour l’Afrique d’avoir une croissance démographique, à condition de la maîtriser et qu’elle soit légèrement positive. Les pays qui font actuellement face à une chute de leur population, comme ceux de l’Europe de l’Est, dont le nombre d’habitants sera divisé par deux d’ici à la fin du XXIe siècle, doivent eux faire face à des problèmes de retraite et ont peur de tout. Les pays africains doivent inventer leurs propres cadres, imaginer un modèle de croissance et de développement qui prennent acte de cette réalité et du besoin d’investir dans la jeunesse africaine. Ils doivent sortir des cadres imposés, théoriques, et qui n’ont pas forcément marché dans le passé. Ils doivent rompre avec les choix économiques hyper-orthodoxes qu’on nous impose aujourd’hui. À l’Afrique de profiter de ses atouts pour inventer son avenir.

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Léonce Ndikumana

Professeur d’économie, directeur du Programme des politiques de développement africain à l’Institut de recherche en économie politique de l’université du Massachusetts et membre de l’ICRICT.

Injustice fiscale

ur le papier, les prévisions de croissance pour l’Afrique subsaharienne en 2020 ont de quoi faire pâlir d’envie le reste du monde. Avec une hausse de 3,6 % de son produit intérieur brut selon le Fonds monétaire international, la région fera mieux que la moyenne mondiale. Mais on est loin, très loin, de ce dont elle a besoin pour répondre aux attentes fondamentales de sa population.

Le véritable enjeu est la réduction des inégalités. Alors que l’Asie a réussi à réduire l’extrême pauvreté, c’est-à-dire le nombre d’habitants vivant avec moins de 1,90 dollar par jour, celle-ci ne cesse d’augmenter en Afrique. Si rien ne change, le continent pourrait compter 90 % des pauvres du monde d’ici à 2030, avertit la Banque mondiale.

Bien sûr, les Africains ont gagné près de onze ans d'espérance de vie depuis le début du siècle. Mais les maladies infectieuses continuent à faire des ravages dans la région et l’impact des inégalités est criant. Au Sénégal, la mortalité des enfants de moins de 5 ans est deux fois et demie plus élevée chez les 20 % les plus pauvres de la population que chez les 20 % les plus aisés.

La crise climatique est plus inquiétante encore. L’Afrique est le continent le moins responsable du réchauffement mais subit de plein fouet ses conséquences: sécheresses prolongées, inondations à répétition, déclin des rendements agricoles, accès à l'eau limité. Des catastrophes qui augmentent les risques d’insécurité alimentaire et d’épidémies. Alors que 86 des 100 villes aux croissances les plus élevées du monde se trouvent en Afrique, 79 d’entre elles – dont 15 capitales – sont confrontées à des risques extrêmes liés au changement climatique.

Les États africains sont aujourd’hui incapables de faire face à ces défis, d’autant que, pour beaucoup, leurs faibles ressources sont saignées par des contextes sécuritaires de plus en plus préoccupants. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso consacrent ainsi 4 % de leur PIB à leur armée.

Pour financer des services publics de qualité contribuant à la réduction des inégalités, les États doivent obtenir d’urgence plus de ressources fiscales. Celles-ci ne représentent que 18,2 % du PIB en moyenne en Afrique, contre 40 % pour une économie avancée typique. Or Oxfam a montré que si les pays à faibles revenus parvenaient à augmenter de 2 % leurs ressources fiscales en 2020, cela ajouterait 144 milliards de dollars à leur budget.

Pour collecter plus, ils doivent améliorer leur administration, mais surtout élargir leur assiette fiscale en faisant payer aux multinationales des impôts proportionnels à leurs bénéfices. Ces dernières, notamment dans le secteur des ressources naturelles, négocient des réductions fiscales qui pèsent lourd sur les finances publiques.

Au Mali, par exemple, le montant total des exonérations s'élevait à

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203,4 milliards de francs CFA en 2015, soit trois fois et demie le budget de l'éducation. Le pire est que, par ailleurs, les multinationales profitent d’un système fiscal international dépassé qui leur permet, en toute légalité, de ne payer aucun impôt dans les paradis fiscaux.

C’est pourquoi 2020 constitue une année clé. Les scandales d’évasion fiscale ont poussé l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à proposer une refonte des règles fiscales internationales. Mais ses idées sont loin d’être satisfaisantes, comme le souligne dans son dernier rapport la Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des entreprises (ICRICT), dont je suis membre. L’OCDE n’envisage de redistribuer qu’une part limitée des bénéfices des multinationales, et elle vou-

ADRIA FRUITOS POUR JA

S

VALLEY LIGHTWORKS

Tribune

drait que cette répartition (et donc les impôts qui en découlent) se fasse en fonction du seul critère des ventes. Cela profiterait aux pays riches, où réside l’essentiel des consommateurs, alors que prendre également en compte l’emploi, comme le suggère le G24, un groupe de pays en développement, serait beaucoup plus équitable.

Il est impératif que ces derniers se fassent entendre, en janvier, lors de la prochaine réunion organisée par l’OCDE à Paris. De là pourraient surgir les bases d’un nouveau système fiscal susceptible de s’imposer au monde entier. Si les gouvernements africains ne prennent pas conscience des enjeux et s’ils ne sont pas représentés à ce rendez-vous critique, il sera trop tard.

En Afrique, la technologie enseigne où les livres sont absents.

Avec des outils high-tech dans plus de 925 centres multimédias sur 7 marchés, nous travaillons tous pour réduire la fracture éducationnelle de l’Afrique.

Quand on peut atteindre les plus isolés d’entre nous et les connecter de village en village, d’un pays à l’autre à travers le monde, c’est parti. Quand on peut enseigner grâce à la technologie, là où les livres sont absents, c’est parti. Quand 30 millions de personnes qui n’ont jamais eu accès aux services bancaires ont maintenant une banque dans leur poche, c’est parti.

Chaque jour, à MTN, on est motivé par l’esprit combatif des personnes que nous servons.

Voilà pourquoi,

On est bien ensemble.

TBWA\HUNT\LASCARIS 923132

everywhere you go

En vérité

François Soudan

Directeur de la rédaction

Les larmes du crocodile

S

«

les confinant dans une sorte de déni est d’importation récente ergent », « Commandant », « Capitaine », « Chef sur le continent : le lien avec la « terre mère », ses espaces de cabinet » et leurs quelque deux cents congévierges et sa cosmogonie y est toujours profond. Cependant, nères des lacs de Yamoussoukro attendent avec les résistances aux obligations qu’impose l’urgence écologique impatience la saison des pluies. Comme il pleut sont encore nombreuses et puissantes. Certains gros pollueurs, de plus en plus, ces caïmans qui peuplent les abords de la résicomme l’Afrique du Sud – où 86 % de l’énergie produite prodence de feu Houphouët-Boigny profitent des inondations pour vient du charbon –, continuent de prétexter la responsabilité se répandre en ville, ravageant les basses-cours et terrorisant initiale des pays industrialisés dans l’émission des gaz à effet les humains en toute impunité : on ne tue pas un crocodile de serre pour se défausser de la leur. Nulle sacré. Le réchauffement climatique est pour part en Afrique les États, confortés il est vrai ces sauriens une aubaine inespérée. Cet effet par le FMI, pour qui seul compte le taux de collatéral et anecdotique du dérèglement écocroissance, ne sont encore parvenus à établir logique est très loin d’être le seul en Afrique. « FAUT-IL QUE un équilibre entre les nécessités du dévelopLa sécheresse qui frappe le Sahel a ainsi des NOUS BRÛLIONS pement et les impératifs environnementaux. conséquences directes sur la montée en puisTrop de dirigeants baignent encore dans l’insance des groupes jihadistes, qui profitent des NOTRE FORÊT différence et l’inconscience, portés en cela tensions foncières exacerbées entre éleveurs COMME EN par des classes moyennes urbanisées dont et agriculteurs pour recruter parmi les prel’aspiration (légitime) est de jouir d’un mode miers nommés. A contrario, c’est un véritable AMAZONIE, POUR de vie de plus en plus décrié par les 9 millions déluge qui, ces dernières semaines, a écrasé QU’ENFIN VOUS de followers de Greta Thunberg : 4x4, clims et Kinshasa, Brazzaville, Bangui et Libreville de voyages en avion. Lorsqu’un ministre courason fracas. Quand les cieux déversent un torNOUS AIDIEZ geux, ou soucieux tout simplement de faire rent inaltérable sur les quartiers populaires, les son travail, sanctionne un opérateur minier caniveaux dégorgent une mélasse qui envahit À VOUS AIDER ? » peu scrupuleux en matière d’écologie, mais tout, macule tout, gerbe de partout. Sous le LA MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT associé à quelque baron du régime, il se fait pilon de la pluie, les rues deviennent le siège D’UN PAYS D’AFRIQUE CENTRALE À aussitôt rappeler à l’ordre. Ce n’est pas le d’une vie cahotique adaptée dans l’urgence à SON HOMOLOGUE FRANÇAISE, gouvernement ougandais mais une poignée la gésine d’une ville en mutation où des pâtés LE 10 DÉCEMBRE, À MADRID d’ONG pugnaces qui tentent d’empêcher Total de maisons entiers disparaissent, engloutis de mener à bien son projet pétrolier dans le par les érosions. Ngaliema, Limete, Mfilou, parc naturel des Murchison Falls. Et quand un militant conservaMakélékélé, Kolongo, Sapéké… Le nom des faubourgs en état tionniste camerounais ou congolais s’inquiète de la disparition de suffocation s’égrène comme le clapotis obsédant de l’eau qui de la faune sauvage, il se voit rétorquer que sa préoccupation glisse au travers des toits de tôle. est déplacée, alors que tant d’hommes souffrent – comme si l’indifférence envers les animaux était une garantie de comPour ceux qui veulent bien l’entendre, le constat est clair : passion pour les humains. Le risque, on le voit, est loin d’être issues de mille sources, l’angoisse écologique et la prise de admis par tous, en Afrique comme ailleurs. conscience qu’il convient non pas de « sauver la planète » (laquelle, même privée de toute vie, continuerait d’exister) mais L’éveil d’une conscience environnementale sur le continent n’est de sauver l’habitabilité de la biosphère affleurent de partout en guère favorisé, il faut en convenir, par l’autisme dont font preuve Afrique. Sans doute parce que les Africains, plus que d’autres, les grands émetteurs de CO2 que sont les États-Unis, la Chine, vivent au quotidien l’impact dévastateur des catastrophes dites naturelles et le hiatus entre l’accroissement démogral’Inde, l’Australie et le Brésil. Faute d’un leadership fort du type phique et le besoin d’espaces, lesquels sont de plus en plus de ceux qu’exercèrent Mohammed VI à Marrakech, le tandem limités. Mais aussi parce que la religion du progrès et l’idéoHollande-Fabius à Paris ou Angela Merkel à Bonn, la COP 25, logie productiviste qui imprègnent toujours la classe politique qui vient de s’achever à Madrid, a accouché de résultats insigniet les électeurs occidentaux – en particulier Américains – en fiants, et si un accord minimal a tout de même été conclu, c’est

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UNIVERSAL IMAGES GROUP VIA GETTY

Le parc national d’Odzala-Kokoua, dans la cuvette ouest, en République du Congo.

– notamment – aux pays africains, qui ont accepté de rehausser leurs ambitions en matière de réduction des gaz à effet de serre, qu’elle le doit. Ce que l’on octroie au continent en échange, et particulièrement aux États membres de la Commission climat du bassin du Congo, où forêts et tourbières capturent des milliards de tonnes de CO2, est encore dérisoire, au point que la ministre de l’Environnement d’un pays de la région a apostrophé son homologue française à Madrid avec cette phrase : « Faut-il que nous brûlions nos forêts comme en Amazonie pour qu’enfin vous cessiez d’agiter n’importe quel prétexte pour ne pas nous aider à vous aider ? » Au Nord comme au Sud, les deux hémisphères étant pour le coup intrinsèquement liés par une communauté de destin, le combat pour de nouveaux paradigmes de survie sera long et

difficile. Il y faudra une volonté politique de fer et un processus qui ne pourra être que progressif, car seule une dictature serait à même de porter un coup d’arrêt brutal aux pratiques antiécologiques et d’étouffer la colère de centaines de millions de gens directement menacés dans leurs activités et leurs revenus. Faire admettre à chacun que l’urgence climatique est une obligation qui s’impose à tous et qu’il vaut mieux l’assumer plutôt que la subir avec fatalisme est une œuvre pédagogique certes de longue haleine mais absolument indispensable. Et tant mieux si les crocodiles de Yamoussoukro n’y trouvent plus leur compte: le temps où leur protecteur Houphouët pouvait se permettre de rétorquer aux donneurs de leçons environnementales venus du froid « donnez-nous un peu de pollution », manière de signifier par là que l’écologie était un souci de riches, ce temps-là est définitivement révolu. jeuneafrique no 3076H

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LE FONDS DE SOLIDARITÉ AFRICAIN (FSA)

40 ANS DE FINANCEMENT DE L’ÉMERGENCE AFRICAINE Créé en 1976, à Paris, le FSA est devenu opérationnel en septembre 1979. Institution financière multilatérale à vocation panafricaine, le FSA a son siège à Niamey (Niger).

Elle dispose d’un capital de 150 milliards de F CFA. Le FSA est composé de 14 pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, à savoir le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, la Centrafrique, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée-Bissau, le Mali, Maurice, le Niger, le Rwanda, le Tchad et le Togo.

La mission du FSA est de faciliter le développement économique de ses États membres. nI itialement centrées sur la bonification des taux d’intérêt dans l’optique de rendre les financements concessionnels, les activités du FSA ont été diversifiées et orientées progressivement vers le secteur privé, considéré comme le moteur de la croissance. Cela, à travers la garantie financière, l’allongement de la durée de vie des prêts et la prise de participation, tout en rénovant le cadre des interventions en faveur des investisseurs publics par la création d’un Fonds Spécial de Bonification.

Ce faisant, le FSA permet aux entreprises, tant publiques que privées, ainsi qu’aux institutions de microfinance de ses États membres, d’accéder au crédit bancaire et de lever des fonds sur les marchés financiers, destinés à financer les projets d’investissement et les activités génératrices de revenus, en vue de garantir le développement économique et le bien-être des populations.

FSA, 40 ans au service du financement de l’émergence africaine.

S’agissant des performances financières, les comptes du FSA ressortent un produit net bancaire en croissance et un résultat positif pour la quatrième année consécutive. Sur le plan opérationnel, les interventions se sont significativement accrues, si bien qu’elles ont atteint plus de 70 milliards F CFA contre un total de moins de 40 milliards l’année précédente. L’augmentation du volume des interventions est allée de pair avec une focalisation sur la qualité des risques.

Le FSA obtient AA+ dès sa première notation. L’institution financière multilatérale qui vient de recevoir AA+ a une perspective stable. C’est

ce qui ressort de sa notation financière par l’agence de notation Wara.

AA+, c’est la notation reçue par le FSA à l’échelle régionale pour ses efforts en faveur du soutien aux économies des États membres. Cette note indique que le FSA a la capacité financière d’honorer les engagements qu’il aura souscrits à travers les conventions. Le FSA met en confiance ceux qui apportent le crédit, ainsi que ceux qui en ont besoin.

Cette note vient donc à point nommé pour récompenser ces efforts. Ce qui fait du FSA, à ce jour, l’institution financière la mieux notée dans l’UEMOA et dans la CEMAC. Cette notation financière du FSA marque une évolution majeure et le positionne parmi les institutions financières les plus crédibles et les plus stables du continent.

PAYS MEMBRES DU FSA Le FSA compte actuellement quatorze États membres.

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8 pays de la CEDEAO (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo)

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3 pays de la CEMAC (Gabon, Centrafrique, Tchad)

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3 pays du COMESA (Burundi, Maurice et Rwanda)

Au 31 décembre 2018, le montant total des interventions du fonds, en garantie des financements, s’est situé à plus de 479 milliards de F CFA, en faveur de 331 pro-jets réalisés dans 12 des 14 États membres.

Ce montant a permis de mobiliser des ressources de l’ordre de 989 milliards. Au titre de la Bonification, le FSA a décaissé au profit de ses États membres, en allègements des intérêts dus au titre de leurs prêts auprès de leurs différents bailleurs de fonds, une somme de plus de 19 milliards qui a contribué à mobiliser des financements de l’ordre de

COMMUNIQUÉ

375 milliards. S’agissant de refinancement pour allongement de durée de prêt, le FSA a, au cours de la même année, engagé plus de 7 milliards et mobilisé un montant total de l’ordre de 34 milliards.

Globalement, la tendance est à l’amélioration de la qualité du portefeuille. La Direction Générale lui apporte un soutien sans faille, et l’implication forte des Administrateurs du FONDS se poursuit, avec la prise d’importantes décisions qui visent à l’amélioration de la qualité du portefeuille, couplées à la mise en œuvre des recommandations édictées par le Plan de Développement Stratégique à Moyen Terme 2016-2020, dénommé PLAN EXPANSION 2020. L’un des axes

Le Fonds de Solidarité Africain œuvre depuis 40 ans au financement du développement économique et à la lutte contre la pauvreté dans ses États membres. de ce plan a pour objectif de diversifier et de renforcer l’ancrage institutionnel du FSA à travers l’élargissement de la base des États membres. Ce qui implique l’ouverture du capital du Fonds à d’autres États de l’Afrique francophone subsaharienne, comme la République du Cameroun, la République du Congo, la République démocratique du Congo, la République de Guinée, la République de Guinée équatoriale et la République de Madagascar. Cet élargissement permettra plus globalement de renforcer l’envergure africaine du FSA et de couvrir les zones d’intégration régionales, comme la CEEAC et la CEDEAO, et d’offrir à l’institution un accès à un marché plus vaste.

Afin d’améliorer davantage nos performances et la qualité des prestations offertes à nos clients, le FSA a mis en place, au début de 2019, un système de management de qualité, conforme à la norme ISO 9001 version 2015. Le FSA existe depuis 40 ans, il est opérationel et s’affirme toujours davantage comme une institution forte et innovante. Partenaire privilégié des acteurs du

WARA, la notation de long terme du FSA est « AA+ », en grade d’investissement, et sa notation de court terme est « W-2 » •

AAA WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie AAA disposent de la qualité de crédit la plus élevée, et donc d’un risque de crédit minimal

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AA+ AA AA– : WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie AA disposent d’une qualité de crédit très élevée, et donc d’un risque de crédit très faible

•

A+ A A- : WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie A disposent d’une qualité de crédit moyenne à élevé

développement économique, il offre des produits de garantie et de financement diversifiés, adaptés aux besoins de ses États, afin de jouer pleinement et avec dynamisme son rôle de catalyseur des financements dans les États membres.

GARANTIES DU FSA Le FSA leader de la garantie en Afrique propose…

Garantie individuelle de prêt bancaire

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Garantie de levée de ressources (marchés financiers)

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Garantie de portefeuille

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Refinancement avec ou sans allongement de la durée de prêt

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Accompagnement de marchés publics (BTP, livraison & services)

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Bonification de taux d’intérêt

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Gestion de fonds pour compte de tiers

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Arrangement et structuration de financement

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Couverture des marchés publics

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Couverture des opérations d’import-export

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux :

D @FSA_Niamey C fonds-de-solidarit%C3%A9-africain-fsa-8710aa160 617, avenue du Président-KARL-CARSTENS PL 005 BP 382 NIAMEY – NIGER – Quartier Plateau – Commune I Tél. : (+227) 20 72 26 32/ 33/ 34 Fax : (+227) 20 73 30 44 E-mail : fsa@fondsolidariteafricain.org

www.fondsolidariteafricain.org

JAMG - PHOTOS : D.R.

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ÉVÉNEMENTS

Le 8 mars 2019, à Alger.

54 1960-2020 Il y a 60 ans, l’indépendance…

62 Politique Élections à plusieurs inconnues

72 Algérie Les patrons dans l’expectative

RYAD KRAMDI/AFP

44 Entretien Félix Tshisekedi, président de la RD Congo

Événements

ENTRETIEN

Félix Tshisekedi

« Pour un grand Congo, il faut de grandes ambitions »

Bilan de sa première année, alliance avec Kabila, opposition, révision de la Constitution, double nationalité, lutte contre la corruption, politique étrangère… Une interview exclusive du chef de l’État.

Propos recueillis à Kinshasa par MARWANE BEN YAHMED

K

inshasa, Palais du peuple, vendredi 13 décembre en fin de matinée. Députés et sénateurs sont réunis en congrès pour écouter le discours sur l’état de la nation que doit prononcer le chef de l’État, Félix Tshisekedi. Son premier grand oral (lire pp. 50-51) est l’occasion de dresser le bilan de sa première année à la tête de la RD Congo, d’expliciter ses ambitions, sa vision politique et ses priorités. Un moment historique : pour la première fois depuis dix-huit ans, les élus du pays entendent une autre voix que celle de Joseph Kabila, son prédécesseur et néanmoins allié, absent de la salle.

Devant eux, mais aussi devant une foule de militants acquis à sa cause, Tshisekedi a pris son temps et a balayé tous les sujets, politiques, économiques et diplomatiques.

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Le tout dans un brouhaha et une ambiance indescriptibles, notamment lorsque ses supporteurs ont entonné chants et louanges, ou quand ils ont ponctué ses annonces les plus symboliques d’interminables salves d’applaudissements ou de « Fatshi Béton ! », un de ses surnoms.

Un exercice d’équilibriste

Félix Tshisekedi, 56 ans, est donc à la tête de la RD Congo, l’un des pays les plus difficiles à diriger du continent, depuis le 24 janvier 2019. Un territoire à nul autre pareil, immense, béni par dame Nature, qui abrite une population particulièrement jeune, dynamique, créative et résiliente. Mais aussi une nation fragile, où tout est compliqué, où tout prend du temps, rongée par la corruption et le culte de l’argent facile, attaquée de toutes

parts, par les grandes puissances, qui y ont des intérêts économiques stratégiques, et par ses voisins, qui y exportent parfois leurs propres problèmes ou entendent se servir à moindres frais.

Face à lui, les attentes impérieuses de 80 millions de Congolais.

Tshisekedi est en outre le fruit d’une alternance, un opposant de longue date, lui qui a toujours accompagné le combat de son père, Étienne, mais qui se retrouve à devoir s’allier avec son prédécesseur, poussé vers la sortie par les Congolais euxmêmes tout en conservant sa majorité dans les assemblées, nationale comme provinciales.

Bref, un exercice d’équilibriste dantesque dont il se sort pour l’instant plutôt bien. Il nous a reçus dans un des salons du Palais du peuple pour répondre à nos nombreuses

ROBERT CARRUBBA POUR JA

À Kinshasa, le 13 décembre.

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Événements ENTRETIEN

questions, sous l’œil particulièrement vigilant des membres de son protocole et de sa sécurité. Harassé par son discours fleuve, mais volontaire et volubile.

Jeune Afrique : Près de onze mois se sont écoulés depuis votre arrivée à la présidence de la RD Congo. Quel bilan tirez-vous de cette période ?

Vous êtes engagé avec la formation de votre prédécesseur, Joseph Kabila, majoritaire au Parlement comme dans les assemblées provinciales, au sein d’une coalition. Pourtant, les tensions entre vos partisans et vos entourages respectifs sont nombreuses. Il a fallu, par ailleurs, sept mois de tractations pour que vous parveniez à former un gouvernement de plus d’une soixantaine de ministres… Cette alliance est-elle réellement vouée à durer ?

Cette coalition est née de la volonté des Congolais. Ils ont élu un président issu de l’opposition et ont choisi de garder la majorité parle-

OLIVIA ACLAND/REUTERS

Félix Tshisekedi : Compte tenu des circonstances – un gouvernement, au départ, voué à expédier les affaires courantes et un budget quasi inexistant –, je dirais qu’il est plutôt positif. Nous avons pris un certain nombre de mesures, à mon avis judicieuses, destinées à marquer les esprits, à apaiser les tensions et à libérer les énergies.

Lors de son investiture, aux côtés de son prédécesseur, Joseph Kabila, le 24 janvier.

des choses : toutes nos discussions se sont déroulées sereinement et de manière constructive, en privilégiant évidemment l’intérêt supérieur de l’État. Quant aux soubresauts entre nos deux camps, ils sont hélas logiques. Comme je vous l’ai dit,

IL N’Y A QU’UN SEUL PATRON, C’EST MOI, ET MON PRÉDÉCESSEUR N’ESSAIE EN AUCUNE MANIÈRE DE ME FAIRE DE L’OMBRE. mentaire sortante. Il n’y avait donc qu’une alternative : la cohabitation ou la coalition. Nous avons choisi la seconde possibilité, mais nous n’étions absolument pas préparés à un tel scénario. Nous avons donc appris en marchant et nous avons dû discuter point par point, étape par étape. La formation du gouvernement a effectivement pris beaucoup de temps. Mais voyons le bon côté

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personne, à commencer par nos bases respectives, ne s’attendait à une telle configuration. Forcément, cela ne pouvait se faire sans heurts : ce sont des gens qui, jusque-là, se considéraient comme adversaires et se regardaient en chiens de faïence.

Et, du jour au lendemain, on leur demande de travailler ensemble…

Mais l’essentiel est d’avancer, et c’est désormais le cas.

Depuis votre élection, le doute subsiste quant à votre autonomie vis-àvis de Joseph Kabila. Qui est le vrai patron de la RD Congo ?

Je ne suis en compétition avec personne. Il n’y a qu’un seul patron, c’est moi. Et mon prédécesseur n’essaie en aucune manière de me faire de l’ombre.

Certains cadres du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) laissent entendre de manière de plus en plus ouverte qu’une candidature de Joseph Kabila en 2023 est possible. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Rien. Les cadres du PPRD sont d’abord les partisans de Joseph Kabila, c’est leur droit de rêver au retour de leur leader.

Certains membres de l’opposition, en particulier Martin Fayulu, continuent de contester les résultats de

VILLAGE URUGWIRO

Avec son homologue rwandais, Paul Kagame, à Kigali, le 24 mars. l’élection présidentielle et de réclamer la vérité des urnes. Est-ce que cela vous agace ?

Pas du tout. Ils ont besoin d’exister, et pour exister il faut un thème.

Ils ont choisi celui-là, c’est leur décision. Nous nous sommes toujours battus contre l’injustice, contre le système répressif, pour les libertés.

Aujourd’hui, il n’y a plus de répression vis-à-vis des opposants, tout le monde jouit de ses droits et de ses libertés. Cette thématique n’étant plus utilisable, ils s’accrochent à autre chose, en l’occurrence une chimère. Je leur conseillerais plutôt d’être force de proposition, ou même de critiquer de manière constructive la politique que nous sommes en train de mener, au lieu de continuer de prêcher dans le désert.

Cette même opposition demande l’application de la loi de 2007 sur son statut, qui prévoit la désignation

d’un por te -parole issu de ses rangs. Pourquoi n’est-ce toujours pas instauré ?

Posez la question à la présidente de l’Assemblée nationale, Jeanine Mabunda. C’est elle qui programme l’ordre du jour avec les présidents des commissions. De mon côté, j’ai déjà dit à plusieurs reprises que je souhaitais que cela soit réglé le plus vite possible : nous devons avoir un interlocuteur ou un contradicteur attitré, c’est très important.

Quelles relations entretenez-vous avec les principaux leaders de l’opposition, qui étaient naguère vos partenaires, comme Moïse Katumbi ou Jean-Pierre Bemba ?

Les mêmes qu’avant, c’est-à-dire bonnes et empreintes de respect mutuel. Il n’y a pas d’inimitié personnelle, que je sache. Ils ont toute latitude pour exercer leurs activités sans aucune entrave, mais nous

n’avons plus les mêmes agendas, c’est une évidence.

Longtemps taboue, la question d’une révision de la Constitution se pose désormais. Y êtes-vous favorable ?

Oui, absolument. Certaines dispositions sont à revoir, sans que l’on touche évidemment au sacro-saint principe de limitation du nombre de mandats. Notamment concernant les provinces: la désignation des gouverneurs ou des sénateurs, l’élection des députés provinciaux, tout cela est à revoir afin d’éviter les manipulations et les tricheries.

Quid de l’interdiction de la double nationalité, qui fait débat ?

Le Congo doit avoir le courage de se regarder dans le miroir. Des millions de Congolais ont acquis une nationalité étrangère, mais sont restés Congolais de cœur. Des hommes et des femmes qui sont nés ici, qui y

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Événements ENTRETIEN

ont de la famille, poussés à l’exil pour certains… On ne va pas me dire que ces gens ne sont pas Congolais ! Nous avons le devoir de régler ce problème. Êtes-vous satisfait du rôle que joue votre partenaire politique, Vital Kamerhe, et du travail qu’il accomplit ?

Tout à fait. II s’acquitte parfaitement de sa tâche de directeur de cabinet.

Où en est l’enquête sur les 15 millions de dollars disparus des caisses du Trésor, une affaire révélée à la fin de juillet par un rapport d’audit de l’Inspection générale des finances (IGF) ?

Elle suit son cours le plus normalement du monde. Le dossier a été transmis par l’IGF au procureur.

prédécesseur, lui, avait nommé un conseiller spécial en la matière, mais je me suis rendu compte que, si l’idée était bonne, ce n’était pas très efficace. Nous essayons donc d’en tirer les leçons pour changer notre fusil d’épaule.

Dix milliards de dollars pour le budget 2020, c’est près du double du précédent et plus que les recommandations des experts du Fonds monétaire international, qui tournaient autour de 7 milliards. Est-ce réaliste ? Comment comptez-vous mobiliser les recettes nécessaires ?

Certains n’ont pas compris que les temps avaient changé. Pour un grand Congo, il faut de grandes ambitions. À titre de comparaison, le budget de l’Angola, pays postconflit comme nous, est de

Vous avez fait de la lutte contre la corruption l’une des priorités de votre présidence. Comment comptez-vous concrètement vous y prendre, compte tenu de l’ampleur du phénomène en RD Congo ?

La corruption dans notre pays est une véritable pandémie, une gangrène même. On ne peut s’y attaquer à la légère ou dans la précipitation. Car, ce qui importe, ce ne sont pas les grands discours, mais les résultats. Il faut d’une part sensibiliser, et d’autre part réprimer de la manière la plus sévère qui soit les comportements délictueux. Concernant le premier aspect, nous allons commencer par la création de l’Agence pour le changement des mentalités, qui disposera de moyens importants pour que son coordinateur ait la possibilité de toucher toutes les composantes de l’administration et de l’État.

Concernant la répression, il faut faire des exemples en punissant les vrais commanditaires, parce que les corrupteurs sont les plus répréhensibles, à mon avis. Nous prenons le temps nécessaire à la mise sur pied d’une structure consacrée à la lutte contre la corruption, la fraude fiscale et le blanchiment de capitaux. Elle devrait être opérationnelle dans le courant du premier trimestre de 2020. Mon

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En tant qu’entreprise publique, le géant minier Gécamines pourrait être soumis à un audit.

32 milliards pour 29 millions d’habitants. Dix milliards pour 80 millions de Congolais, ce serait démesuré ?

Soyons sérieux ! Ce n’est pas avec un budget divisé par deux que nous pourrions lutter contre la pauvreté comme nous nous y sommes engagés. Nous savons ce que nous devons faire : lutter contre la fraude et la corruption, nous venons d’en parler, moderniser notre administration et la faire passer au numérique, élargir l’assiette fiscale, en ramenant notamment le secteur informel dans le secteur formel, réorganiser le secteur bancaire, pour que tous les paiements dus à l’État passent par les banques commerciales, améliorer la gouvernance dans les industries extractives… Rien d’insurmontable, à condition de faire preuve de volonté.

Ce n’est pas mon rôle, c’est celui du gouvernement. Maintenant, cela me semble logique : quand il y a de nouveaux mandataires à la tête de telle ou telle entreprise, il est souvent nécessaire de procéder à un audit afin de partir sur des bases réelles et saines.

Plus d’un an et demi après sa promulgation, l’application du nouveau code minier semble délicate. Doit-il être revu ?

Non, il ne fera l’objet d’aucun ajustement. Mais il ne faut pas non plus être obtus. Nous devons rester à l’écoute des investisseurs, comprendre leurs difficultés. L’objectif étant de parvenir à une relation gagnant-gagnant. Les investisseurs apportent leurs capitaux pour développer leurs activités chez nous, qui sommes les détenteurs de ces terres, de ces richesses: il ne me semble pas sorcier de pouvoir travailler de concert, dans l’intérêt des uns et des autres.

Lors de la dernière édition de l’Africa CEO Forum (organisé par Jeune Afrique Media Group), en mars 2019, à Kigali, vous avez débattu avec le président rwandais, Paul Kagame, et nous avons ensuite assisté à un net réchauffementdesrelationsentrevos deux pays. Cela s’est-il traduit dans les faits depuis ?

Comptez-vous soumettre à différents audits les grandes entreprises publiques, comme la Gécamines par exemple ?

depuis et comment évolue votre relation ?

Je ne sais pas d’où sort cette déclaration. En tout cas, le président Macron ne m’a jamais dit cela directement. Lui et moi entretenons de très bonnes relations, empreintes de franchise. Et je n’ai pas l’impression qu’il soit dubitatif.

Quid de la Belgique, l’ancienne puissance coloniale, un pays que vous connaissez particulièrement bien ?

Je suis très content de la visite que j’ai effectuée là-bas en septembre.

Mais les Belges, aujourd’hui, ont un peu perdu de leur influence au Congo.

UN BUDGET DE 10 MILLIARDS DE DOLLARS POUR 80 MILLIONS D’HABITANTS, CE SERAIT DÉMESURÉ ? SOYONS SÉRIEUX !

GWENN DUBOURTHOUMIEU

Oui, car nous sommes tous deux engagés pour le changement. Nous échangeons sur l’intégration économique, sur la paix entre nos peuples et à nos frontières. Jusqu’ici, nos deux pays n’ont connu qu’antagonisme et méfiance. Il faut en finir. Cela ne concerne d’ailleurs pas que le Rwanda, mais tous nos voisins. Nous sommes l’une des sous-régions les plus riches en Afrique, potentiellement en tout cas, mais, malheureusement, nos peuples ne goûtent pas à cette richesse. On ne peut pas penser se développer chacun dans son coin sans être en paix les uns avec les autres, sans nous considérer comme des partenaires, sans augmenter considérablement le volume de nos échanges, sans parler d’une même voix sur des sujets qui nous concernent tous et sans affronter ensemble les nombreux défis qui nous attendent.

Lors de votre première rencontre avec Emmanuel Macron, à Nairobi, toujours en mars 2019, ce dernier avait déclaré avoir pris acte des résultats des élections, mais attendre de vous la réelle manifestation de votre autonomie. En avez-vous reparlé

D’abord compte tenu de leurs dissensions internes, parce qu’ils n’ont plus une politique nationale en matière d’affaires étrangères et se sont un peu repliés sur eux-mêmes. Ensuite parce qu’ils sont aujourd’hui dilués dans l’Union européenne et qu’ils s’inscrivent dans la diplomatie de cette dernière. C’est dommage, parce que c’est le pays qui connaît le mieux le Congo en Occident et que c’est notre porte d’entrée sur cet Occident.

Raison pour laquelle je souhaite un véritable rapprochement entre nos deux nations, pour que nous puissions écrire une nouvelle page de notre histoire. J’espère y parvenir, parce que j’ai rencontré en Belgique des gens formidables, qu’il s’agisse d’acteurs politiques ou économiques.

Nous devons faire des efforts de notre côté car, il faut bien le reconnaître, l’image que nous avons donnée du Congo pendant des décennies n’est pas franchement attrayante…

L’Union européenne a décidé, le 12 décembre, du maintien des sanctions contre certains hauts responsables militaires de la RD Congo.

Quelle a été votre réaction ?

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Événements ENTRETIEN

Je ne sais pas sur quelle base ou sur quels critères ces sanctions ont été prises. L’Union européenne fait ce qu’elle a à faire, je n’ai pas à juger. Ce qui me préoccupe, c’est la notion de justice. Si certains cas sont réellement répréhensibles, je n’y trouve pas d’inconvénient. Mais je préférerais que nous soyons nous-mêmes en mesure de juger des crimes perpétrés au Congo par des Congolais.

Depuis le début de votre mandat, plusieurs groupes armés ont déposé les armes, mais d’autres ont aussi repris le maquis. Comment en finir avec ce fléau, notamment dans l’Est ?

C’est un problème particulièrement complexe. Vous savez, vu de l’opposition, quand j’y étais, nous pensions que c’était assez simple, mais, en arrivant aux affaires, j’ai compris mon erreur. On a souvent pointé du doigt les étrangers à propos de la situation dans l’Est. Mais des

Congolais sont aussi responsables, on ne le dit pas assez. Il nous faut faire preuve de beaucoup de patience, de disponibilité pour dialoguer, savoir faire le tri entre ceux qui ont été instrumentalisés, ceux que nous pouvons persuader et ceux qui sont irrécupérables ou qui n’aspirent qu’à

Pas encore totalement, mais nous sommes en train de nous en occuper. Elle le sera dans les mois qui viennent, et, croyez-moi, ce sera impressionnant.

Vous avez plaidé à l’ONU pour un projet de coalition régionale impliquant

ON A SOUVENT POINTÉ DU DOIGT LES ÉTRANGERS À PROPOS DE LA SITUATION DANS L’EST. MAIS DES CONGOLAIS SONT AUSSI RESPONSABLES. semer le chaos. Il faut savoir quand manier la carotte et quand manier le bâton. Mais l’essentiel, pour moi, est d’abord de protéger nos populations contre toutes ces exactions.

L’armée congolaise est suffisamment équipée pour « manier le bâton », comme vous dites ?

le Rwanda, l’Ouganda, le Burundi et la Tanzanie afin de lutter contre ces groupes armés et l’insécurité. Quelle forme cela pourrait-il revêtir ?

Je militais avant tout contre l’arrivée de mouvements terroristes en RD Congo, notamment ce groupe issu des ADF-Nalu, qui se réclame de Daesh et qui se compose d’Ougandais, de

STANIS BUJAKERA TSHIAMALA, à Kinshasa

C’est dans la salle des congrès du Palais du peuple que Félix Tshisekedi s’est, pour la première fois, adressé aux deux chambres du Parlement, le 13 décembre. Un discours fleuve, de près de trois heures, prononcé sous les vivats des militants de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).

Affirmant que la République démocratique du Congo était « sur la voie du changement », le chef de l’État, investi le 24 janvier 2019, a dressé un premier bilan de son action.

Il a relevé une nette amélioration de la situation sécuritaire, avec la fin des

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violences dans la région du Kasaï, le lancement d’opérations de pacification dans le Tanganyika, et la poursuite de l’offensive contre les groupes armés dans l’est du pays.

« Intraitable »

Félix Tshisekedi s’est également félicité de son action diplomatique, assurant que la voix du Congo serait désormais portée et entendue à travers le monde. Même satisfaction en ce qui concerne la liberté d’expression, qui a progressé, selon le président. À propos de l’opposition, il a dit souhaiter qu’elle se structure pour que le pouvoir puisse avoir un interlocuteur, voire un contradicteur, selon ses

propres termes. Il a aussi appelé à la solidarité et à l’unité, insistant sur le fait que sa victoire, il y a un an, n’était pas celle d’un camp contre un autre.

Tout en reconnaissant les mérites de son prédécesseur, Joseph Kabila, décrit comme un « frère et [un] ami », Félix Tshisekedi s’est dit préoccupé par les manœuvres de certains de ses adversaires, qui tenteraient de déstabiliser les institutions provinciales.

D’où son ambition de faire modifier le mode des scrutins pour les élections indirectes (gouverneurs et sénateurs), en raison notamment des allégations de corruption qui ont pesé sur les opérations de vote en 2018.

ROBERT CARRUBBA POUR JA

Un premier grand oral animé

Félix Tshisekedi lors de son discours au Palais du peuple, à Kinshasa, le 13 décembre.

Lors de l’entretien, le 13 décembre.

Une trentaine de personnes ont été condamnées à huis clos par un tribunal militaire dans le cadre de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila, en 2001. Toutes ont nié, mais elles ont été incarcérées à Makala. Un certain nombre d’entre elles sont depuis décédées. Joseph Kabila a toujours refusé de les gracier. Qu’envisagezvous de votre côté ?

Je suis en train de me pencher sur ce dossier et je pourrai mieux vous répondre courant janvier, si vous me reposez la question. Je n’ai aucun jugement à émettre à ce stade, si ce n’est que le sujet est évidemment

ROBERT CARRUBA POUR JA

Congolais, de Somaliens, de Kényans, de Burundais, etc. C’est une menace qu’il faut absolument éradiquer avant que ce qui n’est encore qu’un embryon ne se développe. Cela implique forcément une coopération régionale, notamment en matière de renseignement.

délicat et sensible, il s’agit de l’assassinat du père de mon prédécesseur.

J’ai besoin de comprendre, après avoir réuni tous les éléments, avant de voir comment nous pourrions régler cette question une bonne fois pour toutes. « Le peuple d’abord » était le slogan de votre père, Étienne Tshisekedi, et vous semblez le reprendre à votre compte. Que retenez-vous de son héritage politique ?

L’amour du Congo et des Congolais, évidemment. C’est ce qu’il nous a inculqué, et j’essaie de m’acquitter au mieux de ma tâche en respectant ce leitmotiv.

Vous êtes très différent de lui. Que souhaitez-vous que les Congolais retiennent de Félix Tshisekedi quand il aura achevé son ou ses mandats ?

Qu’il aura été celui qui aura ramené le Congo à sa juste place, celle du pays le plus puissant d’Afrique.

Sur le plan économique, il a défendu son premier budget en rejetant les accusations de ceux qui l’estiment « utopique, irréaliste et trop ambitieux ». Il a également argumenté en faveur de son programme d’urgence des 100 jours, déclarant être au courant de « la persistance des pratiques de la corruption et de l’existence des réseaux de fraude massive qui occasionnent des détournements et des manques à gagner pour le Trésor public ». « Tous ces réseaux seront démantelés, a-t-il ajouté. Et je serai intraitable. » Le chef de l’État congolais a évoqué la possible création d’une structure judiciaire, voire d’une juridiction, spécialisée

dans la lutte contre la fraude fiscale, le blanchiment des capitaux ainsi que le détournement des deniers publics. Dénonçant aussi le harcèlement fiscal auquel sont confrontés les investisseurs, il a promis la création d’une cellule destinée à améliorer le climat des affaires.

Enfin, le chef de l’État a évoqué le retour à une présidentielle à deux tours, sachant qu’une proposition de loi allant en ce sens a déjà été déposée par Envol, le parti de l’opposant Delly Sesanga. Il a également demandé aux parlementaires d’autoriser la double nationalité.

Le Congo, a-t-il insisté, doit s’adapter à l’évolution du monde.

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Événements

J

Cher Africain de demain

pour te dire toute l’espérance que tu symbo’ ailises,voulumaist’écrire l’actualité déverse la pestilence de ses nouvelles

ADRIA FRUITOS POUR JA

dans notre monde déjà fort pollué. L’application que nous mettons à détruire ce qui est déjà si fragile ne cesse de me surprendre. Chaque nouveau jour nous impose son lot de violence et d’injustice crasse. Alors ma missive sera moins optimiste que prévu, veux-tu m’en excuser?

Pourtant ce siècle était prometteur, si tu savais… Ton siècle, ton millénaire, ton héritage! Nous l’espérions neuf, débarrassé des scories du passé, libre des anciennes détestations, ouvert aux nouvelles légitimités, plus respectueux du vivant, mais non. Les canaux de la transmission sont depuis longtemps obstrués, ne reste que le cycle sans fin de nos névroses, épaissi de notre avidité, du cynisme et de l’arrogance qui en sont les corollaires. Il se répète, toujours plus puissant, bouffi d’orgueil et de malveillance. Quand nous croyons avoir tiré leçon du passé, quand nous commençons timidement à espérer en un en-commun qui ne soit pas que slogan, la violence quotidienne nous ramène à la réalité. Il existe bien une conjuration de personnes de bonne volonté, mais elles ne sont ni assez nombreuses ni assez puissantes pour constituer un réel contre-pouvoir à l’effroyable mouvement de balancier qui, passant d’un extrême à l’autre, nous enserre dans nos solitudes hargneuses et désespérées. Il semblerait que nous ne puissions plus arrêter le monstre que nous avons conçu.

Alors, à quoi rêves-tu, enfant d’Afrique? Parce que nous parlons de futur, je t’ai voulu enfant, je t’ai de suite tutoyé. Je te prie de ne voir là ni manque de respect ni condescendance, il s’agirait plutôt d’une connivence par-delà les âges. Car, moi aussi, j’ai représenté un jour l’Afrique de demain, et cela me chagrine de te savoir chargé d’un tel fardeau. Pour moi, il est déjà demain, et La Promesse de l’aube n’a pas eu lieu. Pas cette promesse-là, pas celle de plus de dignité pour les nôtres. Mais pourquoi en appeler à la dignité quand même l’attente élémentaire d’eau et de nourriture en quantité suffisante pour tous n’aura pas été comblée?

Si tu veux bien, revenons à toi. Oui, à quoi rêves-tu, Africain de demain ? Si un ancêtre fabuleux, issue de notre panthéon

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DR

Hemley Boum

Romancière camerounaise

immémorial, revenait t’annoncer que tu es la personne la plus importante au monde et que tu n’as qu’à énoncer ton désir pour le voir exaucé, quels seraient tes premiers mots ? Si tu prenais conscience que ton extrême vulnérabilité, ton interminable attente, ton refus de renoncer, sont la trame même de la vie, que ferais-tu de l’idée toute neuve de ta puissance?

Désires-tu une place dans le grand banquet à ciel ouvert où se gavent tous ces gens qui ne sont pas toi ? Réclames-tu ta part du confort dont leur naissance a largement pourvu les plus chanceux d’entre nous? Qui pourrait t’en vouloir? Le contraire de l’opulence est la misère, pas la sobriété choisie, tu es bien placé pour le savoir.

Mais peut-être ne rêves-tu pas, ou plus ; las de tous les lendemains où l’on te projette parce que c’est demain précisément, et que demain ne mange pas de pain. Tu remarqueras que c’est toujours l’Afrique qui est pour demain. Ceux qui s’arrogent le passé, le présent, et te relèguent à un avenir hypothétique se soucient bien peu du futur. Si tu en doutes, regarde donc comme ils traitent leurs enfants inquiets pour l’avenir de notre espèce.

Peut-être l’as-tu déjà compris, enfant du siècle, riche que tu es de l’histoire glorieuse de ta survie inattendue, dans l’opiniâtreté admirable qui est la tienne pour faire entendre ta musique originale, dans les batailles inlassablement recommencées.

Peut-être as-tu déjà compris que l’Africain de demain est un leurre conçu pour te détourner de toi-même. Que tu n’es pas condamné à patienter dans l’angle mort des étoiles avec l’attente de lendemains qui chantent pour seule perspective. Car malgré les promesses, aucun matin glorieux n’est venu depuis lors magnifier ta présence sur Terre.

Tu sais à présent la vacuité des serments. Tu n’as pas vocation à occuper la périphérie d’un monde qui te nie en même temps qu’il te charme, qui te construit des lendemains t’excluant au présent. Et, bien sûr, lutter pour sa dignité est digne en soi.

Peut-être as-tu déjà compris que c’est maintenant, aujourd’hui, toutes affaires cessantes, qu’il te faut être Africain.

Peut-être, mais je n’en sais rien, alors j’insiste, cher, infiniment cher: dis-moi, as-tu sauvé en toi l’audace de rêver?

SC BTL-12/19

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Événements 1960-2020

Il y a 60 ans, l’indépendance…

Du Sénégal à la RD Congo, ils ont pris la tête de dix-sept pays tout juste émancipés.

Retour sur le destin des premiers présidents africains.

MOKTAR OULD DADDAH 1924-2003 Premier président de la République islamique de Mauritanie, il est réélu deux fois, quitte la zone franc et dénonce les accords de coopération avec la France. Engagé aux côtés du Maroc dans la guerre contre le Front Polisario, il est renversé par un coup d’État en 1978.

LÉOPOLD SÉDAR SENGHOR 1906-2001 Étudiant puis professeur en France, Senghor y occupe plusieurs postes politiques avant de devenir le premier président sénégalais. Systématiquement réélu, il démissionne au cours de son cinquième mandat et sera le premier Africain à entrer à l’Académie française.

Mauritanie

28 novembre

Mali

22 septembre

Sénégal

Niger

3 août

4 avril

Burkina

5 août

FÉLIX HOUPHOUËT-BOIGNY 1905-1993 Député et ministre en France comme Senghor, le Vieux compte parmi les rares partisans affichés de la Françafrique (terme dont on lui attribue parfois la paternité).

Alors que les candidats à sa succession se déchirent, il s’éteint en 1993, sans avoir quitté le pouvoir.

Bénin

1er août Côte d’Ivoire

7 août

Togo

Nigeria

1er octobre

27 avril Cameroun

1er janvier

MAURICE YAMÉOGO 1921-1993 Ministre du premier gouvernement voltaïque mis en place en 1957 en accord avec la France, Monsieur Maurice règne déjà en autocrate quand survient l’indépendance. En 1966, un soulèvement populaire provoque sa démission.

La Haute-Volta devient le Burkina Faso en 1984.

SYLVANUS OLYMPIO 1902-1963 Après des études en Europe, Olympio revient au pays et, en 1958, quand le Togo se détache du Ghana, il négocie l’indépendance avec de Gaulle. Président en 1960, il met en place un régime autocratique. Il est assassiné en 1963 dans des circonstances qui restent sujettes à polémique.

HUBERT MAGA 1916-2000 Figure incontournable des luttes de pouvoir dans le Dahomey d’après-guerre, Maga est sous-secrétaire d’État en France en 1957, puis premier président de la République. Destitué par un coup d’État en 1963, il revient au pouvoir de 1970 à 1972. Le pays devient le Bénin en 1975.

NNAMDI AZIKIWE 1904-1996 Si le Nigeria acquiert son indépendance en 1960, il attendra 1963 pour se doter d’une Constitution et élire son premier président. Élu de l’est du pays, Azikiwe est renversé par un coup d’État militaire dès 1966. Candidat malheureux à la présidence en 1979 et en 1983, il se retire de la politique.

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Gabon

17 août

Pays ayant obtenu leur indépendance en 1960 MODIBO KEÏTA 1915-1977 Proche des panafricanistes dès les années 1930, il dirige la Fédération du Mali (Soudan français, Sénégal, Haute-Volta et Dahomey). Premier président du Soudan français, rebaptisé République du Mali, il lance en 1967 une « révolution active » qui causera sa chute l’année suivante.

HAMANI DIORI 1916-1989 Ancien député à l’Assemblée nationale française, Hamani Diori est le premier président de la République du Niger et sera réélu en 1965 et en 1970. Artisan de la création d’une organisation réunissant les pays francophones, il est renversé par un coup d’État en 1974.

FRANÇOIS TOMBALBAYE 1918-1975 Sitôt élu, le premier président tchadien s’engage rapidement dans une dérive autoritaire et lance des campagnes de retour à l’« authenticité africaine ». En conflit avec le voisin libyen, il est victime de plusieurs tentatives de coup d’État et est assassiné lors de la dernière, en avril 1975.

Tchad

11 août

Somalie

1er juillet

ADEN ABDULLAH OSMAN DAAR 1908-2007

13 août

Congo

BARTHÉLEMY BOGANDA 1910-1959

15 août

Prêtre comme le Congolais Youlou, député à l’Assemblée nationale française, ce partisan du panafricanisme dirige à partir de 1958 l’Afrique-Équatoriale française (AEF), qui deviendra la République centrafricaine. Il disparaît dans un accident d’avion en 1959.

République démocratique du Congo

30 juin

PATRICE ÉMERY LUMUMBA 1925-1961 D’abord partisan d’une décolonisation négociée, Lumumba se radicalise et devient Premier ministre en 1960. Partie du Katanga, la guerre éclate presque immédiatement, et Mobutu s’empare du pouvoir. Le « héros national » Lumumba est torturé et assassiné au début de 1961.

FULBERT YOULOU 1917-1972 Ancien prêtre converti à la politique, l’abbé Youlou se range clairement dans le camp anticommuniste et prooccidental. Muselant l’opposition, développant un culte de la personnalité, il est renversé lors de l’insurrection dite des « Trois Glorieuses » en août 1963 et finira sa vie en exil.

LÉON MBA 1902-1967 Ancien de l’Administration française, Mba devient Premier ministre puis président. Il instaure un régime autoritaire, est renversé en 1964, mais retrouve son poste avec l’aide de la France. Malade, il cède la réalité du pouvoir à AlbertBernard Bongo en 1965 et meurt deux ans plus tard.

Madagascar

26 juin

PHILIBERT TSIRANANA 1910-1978 Premier ministre en 1958, Tsiranana devient président en 1960. Partisan d’un « socialisme malgache » modéré et teinté de libéralisme, il garantit une certaine stabilité mais laisse peu d’espace à ses opposants. Malade, il tente de s’accrocher au pouvoir mais finit par se retirer, en 1975.

AHMADOU AHIDJO 1924-1989 Porté au pouvoir avec l’aide de la France, Ahidjo met fin au système fédéral entre les parties francophones et anglophones du pays. Ce dirigeant autoritaire démissionne en 1982 pour raisons de santé. Il meurt en exil en 1989, après une dernière tentative de putsch de ses partisans.

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ARCHIVES JA (10) ; PASCAL MAITRE/JA ; BETTMANN ARCHIVE/GETTY IMAGES (3) ; SERVICE DE PRESSE/NIGER/ARCHIVES JA ; AFP (2)

Lorsque le protectorat britannique et le territoire sous tutelle italienne fusionnent en une République somalie indépendante, ce militant de longue date est nommé président provisoire, puis élu en 1961. Battu en 1967, il est le premier président africain à se retirer pacifiquement.

Centrafrique

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Événements IL Y A 60 ANS, L’INDÉPENDANCE...

1960-2020

Sur un air de Cha Cha

Hymnes nationaux enjoués, orchestres d’État, morceaux engagés d’artistes en exil… JA rembobine la bande-son qui a accompagné l’émancipation du continent.

LÉO PAJON

Le 9 novembre dernier s’éteignait le bassiste Armando Mwango, alias « Brazzos », à l’âge très honorable de 97 ans. Il était l’un des deux derniers musiciens vivants à avoir participé à l’enregistrement du tube congolais Indépendance Cha Cha. Aujourd’hui, seul le septuagénaire Pierre Yantula Bobina, mieux connu sous le pseudonyme de Petit Pierre, percussionniste et toujours sociétaire de l’African Jazz, est en mesure de raconter la création de ce qui s’est imposé comme un hymne panafricain de l’émancipation.

Devenu chef de quartier de Lingwala, il est un peu tombé dans l’oubli… Il affirme même ne jamais avoir reçu de droits d’auteur. Mais le célèbre refrain résonne toujours dans les mémoires.

La période des indépendances a en effet été très riche en matière de création. Les peuples libérés exultent alors en musique. Les nouveaux États ont besoin de groupes pour célébrer la liberté retrouvée… et chanter leurs louanges. Les compositeurs s’inspirent de rythmes latinos, alors que Cuba est parfois un allié objectif de ces régimes. Bientôt, certains musiciens prometteurs seront même envoyés à La Havane pour se perfectionner, à l’image de Boncana Maïga, le leader de Las Maravillas de Mali.

Il y a dix ans, de nombreuses compilations (Free Africa chez Harmonia Mundi, Afriques indépendantes chez Cantos-Pias, Africa, 50 Years of Music chez Wagram…) évoquant cette période fertile ont vu le jour. Et depuis, régulièrement, les médias rembobinent la bande-son de l’époque, comme France Culture, qui a réalisé la remarquable série d’émissions « Afrique, la musique des indépendances », toujours accessible en ligne.

Si l’attrait pour le sujet ne s’est jamais

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démenti, c’est que ces morceaux disent beaucoup des aspirations et des réalités politiques. Retour sur quatre grands moments musicaux de cette période historique.

vibre 1 LeauGhana rythme du calypso

Ironiquement, c’est à Londres qu’a été enregistré Birth of Ghana, la chanson la plus marquante de l’indépendance de la Gold Coast, ancienne colonie britannique. Les paroles célèbrent le jour de cette émancipation – l’une des premières en Afrique subsaharienne, quelques mois après celle du Soudan –, ce 6 mars 1957 « qui ne sera jamais oublié » et durant lequel « il faut être joyeux ». Elles font l’éloge de Doctor Nkrumah, rappelant son passé d’agitateur, de leader qui n’a cessé de lutter « pour nous apporter la liberté ».

Pour comprendre ce succès, il faut se rappeler que la victoire de Kwame Nkrumah et la naissance du nouvel État étaient alors une promesse d’espoir pour tout le monde noir (Louis Armstrong était même passé dans le pays en 1956 pour dédier une chanson au futur chef de l’État). L’auteur et interprète de Birth of Ghana n’est d’ailleurs pas un Ghanéen mais un Trinidadien (Trinité-et-Tobago n’obtiendra son indépendance qu’en 1962).

Et un musicien loin d’être inconnu.

Aldwyn Roberts, alias Lord Kitchener, né en 1922, est l’un des maîtres du calypso. Devenu la coqueluche des troupes américaines basées sur l’île, il a donné des concerts aux États-Unis et assuré une tournée en Jamaïque avant de s’installer à Londres après la Première Guerre mondiale, comme des milliers de Caribéens.

Si Lord Kitchener a célébré la capitale britannique en 1948 dans London is the Place for Me, cela ne l’a jamais empêché d’être critique à l’égard

Section de trompettistes, pendant une messe, à Kinshasa.

du colon dans ses chansons. Son pseudonyme est d’ailleurs un clin d’œil ironique à l’un des principaux maréchaux de l’Empire. Malgré son rythme chaloupé, ses percussions virevoltantes et ses solos de cuivres enjoués, le calypso véhicule souvent une critique sociale et politique.

Ses interprètes ont des fonctions proches de celles attribuées aux griots ouest-africains, mais utilisent parfois des astuces pour contourner la censure. Il est arrivé que, sous couvert de dénoncer l’Allemagne d’Hitler et l’occupation de la Pologne, les artistes fassent référence aux agissements des Britanniques à Trinidad… Birth of Ghana n’est donc pas qu’un hymne joyeux, c’est aussi une célébration de l’indépendance, affirmant qu’un nouveau monde, plus libre, est possible.

MARCUS BLEASDALE

S’appuyant sur des rythmiques africaines, le calypso fera des émules dans tout le golfe de Guinée… Au Ghana, il sera l’une des nombreuses composantes du highlife, qui fait toujours vibrer le pays.

Jazz, la voix 2 deBembeya la révolution guinéenne

Rien de tel qu’une bonne chanson pour influer sur les masses… Le général de Gaulle, lorsqu’il part pour une tournée africaine en 1958, en campagne pour le « oui » au référendum constitutionnel, l’a bien compris. D’ailleurs, un titre explicite le précède : « Dis-moi oui, dis-moi oui ou non / mais si c’est oui, c’est vraiment très bon… », susurre Art Taylor.

Sauf qu’un mois après le passage du président français à Conakry,

le 28 septembre 1958, 95,2 % des électeurs du pays votent « non ». La Guinée proclame son indépendance le 2 octobre.

Bientôt, Sékou Touré, tout nouveau président, prend en main la politique culturelle du pays (« la culture est une arme de domination plus efficace que le fusil », clamait-il). Il s’appuie notamment sur la musique pour unifier la nation, rendre sa fierté à la population… et chanter ses louanges. Comme l’écrit la chercheuse Elara Bertho dans Médias, propagande, nationalismes, « six mois seulement après l’indépendance, les orchestres de Conakry sont officiellement dissous afin de privilégier la musique guinéenne perçue comme traditionnelle ». Un véritable maillage territorial musical est assuré, avec la mise en place d’un réseau

de festivals, la création d’orchestre dans chaque préfecture et chacun des 2 500 Pouvoirs révolutionnaires locaux du pays. Un média, la Radio télévision guinéenne, un studio baptisé La voix de la révolution, un label national, Syliphone, permettent de diffuser les créations des nouvelles formations.

Créé en 1961, le très populaire Bembeya Jazz devient bientôt « National ». En 1969, le groupe livre un album fondateur, Regard sur le passé, qui célèbre l’histoire épique de l’almamy Samory Touré, fondateur de l’empire wassoulou, résistant au colonisateur… et arrière-grand-père de Sékou Touré. Ce dernier a dicté des modifications pour la version originale. Ce chant de près de 35 minutes en français et en malinké est une ode

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Événements IL Y A 60 ANS, L’INDÉPENDANCE...

à peine déguisée au guide de la révolution: « Grâce à toi, nous sommes devenus des hommes / Grâce à toi, nous avons notre indépendance / Tu es exemplaire de la Guinée, et tes ennemis seront toujours humiliés […] » Il faut imaginer le chanteur soliste Demba Camara vêtu d’un grand boubou blanc, sabre glissé dans la ceinture, lance à la main, interpréter ce long récital, notamment lors d’un gala télévisé mémorable au théâtre de la Cité universitaire d’Abidjan, en 1972 (l’enregistrement est toujours disponible sous le titre Belle Époque volume I, chez Syllart).

Regard sur le passé va exercer une influence durable sur la production musicale africaine de l’époque. Du Mali au Sénégal en passant par le Burkina ou la Guinée-Bissau, les épopées historiques fleurissent… Et le Bembaya Jazz National restera actif jusqu’au début des années 2000, longtemps après la mort de Sékou Touré, en 1984. Un documentaire burkinabè, Sur les traces du Bembeya Jazz, sera même réalisé en 2007 et célébrera la longévité des porte-drapeau de la révolution guinéenne.

rumba 3 Congo, et cha-cha-cha

Lorsqu’il est envoyé à Bruxelles à l’âge de 29 ans, en 1960, pour suivre la table ronde qui réunit les principaux acteurs congolais du moment en vue d’obtenir l’indépendance du Congo belge, Joseph Kabasele Tshamala, plus connu sous le nom de Grand Kallé, est déjà une célébrité. À la tête de l’African Jazz, il a popularisé la rumba ainsi que le cha-cha-cha dans le pays et mêlé son chant aux notes du guitariste Nicolas Kasanda, alias Docteur Nico… Il doit alors témoigner de ce moment historique en musique.

Il ne se doutait pas que sa chanson allait devenir bien plus : un hymne pour l’indépendance adopté bien au-delà des frontières congolaises, « la chanson symbole de l’émancipation des années 1960 », selon Alain Mabanckou, auteur d’une chronique à ce sujet dans le journal Libération cinquante ans plus tard. Écrit le

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20 janvier, le titre est joué pour la première fois à l’Hôtel Plaza de Bruxelles, le 27 janvier, avec des musiciens de l’African Jazz et même deux membres d’un groupe rival, le OK Jazz, recrutés pour l’occasion.

Les paroles en lingala (parlé dans les deux Congos) mariées à quelques mots de français sont basiques: « Nous avons obtenu l’indépendance / Nous voici enfin libres / À la table ronde nous avons gagné / Vive l’indépendance que nous avons gagnée ». Elles citent tous les leaders de l’époque, quel que soit leur camp (Patrice Lumumba, Moïse Tshombé ou encore Joseph Kasa-Vubu…), ainsi que les acronymes des mouvements pro-indépendance (Abako, Conakat…). Le refrain trouvé à la faveur d’une improvisation à la guitare par Docteur Nico est simple sans être simpliste, la rythmique afro-cubaine entraînante. Un tube est né, très largement diffusé sur Radio Congo Belge, puis repris dans toute l’Afrique francophone.

C’est surtout la gaieté du titre qui va lui permettre de supplanter les très nombreuses odes à l’indépendance de l’époque. Dans Musiques de toutes les Afriques (Fayard), Gérald Arnaud et Henri Lecomte écrivent : « En quelques mois, alors que les nouveaux chefs d’État commandent en toute hâte à des compositeurs besogneux des hymnes nationaux plus insipides et empesés les uns que les autres, toute l’Afrique se met à chalouper en fredonnant cette chanson lumineuse. » Le hit reste un symbole durable…

On le retrouve dans le film de Raoul Peck sur Lumumba en 2000. Ainsi qu’en 2010 sur le titre Le Jour d’Après / Siku Ya Baadaye (Indépendance ChaCha), du chanteur d’origine congolaise Baloji… Mais le tube ensoleillé de 1960 se marie alors à des paroles amères : « Les promesses de lendemain, les promesses de l’aube / d’un État souverain où le sol se dérobe / entre milices et rebelles, pillages et recels / peuples que l’on déplace comme des cheptels / de parcelle en parcelle / de gouvernance en tutelle. » Le tube renvoie aussi au chaos qui a suivi la décolonisation : sécession, coup d’État,

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3 instabilité chronique et confiscation du pouvoir…

résistant angolais 4 Unnommé Bonga

Tandis qu’une vague de décolonisation provoque l’éclosion de nouveaux États partout en Afrique, le Portugal reste arc-bouté sur son empire. Face au colon, la résistance s’organise en Angola dès les années 1940, notamment au niveau culturel. Des groupes réhabilitent les instruments traditionnels, font vivre le patrimoine et célèbrent l’émancipation des peuples. La formation Ngola Ritmos, notamment, devient l’un des fers de

POPPERFOTO VIA GETTY IMAGES

1960-2020

PAUL COOPER/SHUTTERSTOCK

lance de la contestation, avec à sa tête « Liceu » Vieira Dias. Cet ancien employé de banque, anticolonialiste, guitariste doué, est arrêté en 1959 par les autorités portugaises et emprisonné au Cap-Vert pendant dix ans.

Un autre musicien gravite dans cette nébuleuse politico-artistique. José Adelino Barceló de Carvalho a appris la musique avec son père accordéoniste, et joue d’un instrument traditionnel, la dikanza (un bambou strié que l’on frotte avec une baguette). Mais au début des années 1960, il est plutôt célèbre pour avoir battu le record portugais du 400 m (en 47 secondes)!

En coulisses, l’athlète œuvre à la

N’KRUMAH LAWSON DAKU 2016

KEYSTONE-FRANCE

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4 libération du pays sous le pseudonyme de Bonga Kuenda (« celui qui se lève et marche »). « Le plus souvent, je servais de coursier, se remémorait-il à la fin de 2016, quand nous l’interrogions sur son parcours. Avec les compétitions, j’étais amené à voyager, alors je faisais passer des messages à l’étranger à d’autres militants, aux journalistes, sur la situation réelle du pays. » Mais le petit réseau de résistants est rapidement infiltré par la police politique du régime salazariste, la Pide. « Mes amis et ma compagne portugaise d’alors ont été arrêtés, torturés… Moi, j’ai réussi à m’enfuir », se souvient Bonga. Le champion de

1 Lord Kitchener, l’un des maîtres du calypso, auteur et interprète de Birth of Ghana.

2 Les Guinéens du Bembeya Jazz à Angoulême, en France, en 2003.

3 Le roi belge Baudouin et le président congolais Joseph Kasa-Vubu à Léopoldville, le 29 juin 1960, à la veille de la proclamation de l’indépendance du Congo.

4 Le musicien Bonga, figure de la lutte pour l’indépendance angolaise et interprète du succès Mona Ki Ngi Xiça.

23 ans trouve refuge à Rotterdam, où, au contact de nombreux musiciens cap-verdiens, il enregistre son premier album : Angola 72, pour le label néerlandais Morabeza. Un mandat d’arrêt est émis contre le chanteur, qui sera forcé de poursuivre sa course pour se réfugier en Belgique, en Allemagne, en France…

Le disque est interdit dans son pays d’origine. Mais des marins l’y importent secrètement, et, bientôt, les Angolais découvrent les paroles séditieuses de l’album. Parmi les dix chansons, l’une d’elles, Mona Ki Ngi Xiça, devient incontournable. Avec sa voix éraillée, sur une mélodie mélancolique et sublime, Bonga chante « le dernier message » de celui qui s’exile: « Dans la fuite désespérée […] Nous laissons les fils / Que nous aimons / À l’heure du départ / Nous pleurons la dernière larme / Nous transmettons le dernier message / À la fille que nous laissons. » « Malgré la censure, la chanson est devenue une sorte d’hymne, que près de 90 % des Angolais connaissaient », confie Bonga. La révolution des Œillets, en 1974, précipite l’indépendance du pays, obtenue officiellement le 11 novembre 1975.

Depuis, Bonga est resté populaire en Angola… même s’il a choisi de vivre en Europe. Et malgré les tentatives de récupération, l’artiste a gardé son indépendance. « Tous les partis m’ont contacté, mais je ne veux pas m’aligner. Je veux continuer de chanter pour tous les Angolais. »

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Événements

A

Les grands simulacres nationaux

ADRIA FRUITOS POUR JA

u début d’octobre, mon ami et ancien camarade de classe Succès Masra, président des Transformateurs et jeune opposant au président Idriss Déby, invitait la classe politique tchadienne « à un dialogue national pour un nouveau départ, assorti de façon consensuelle d’un pacte national ». Initiative louable, mais qui me laissa perplexe. La longue carrière du président Déby révèle des qualités, à n’en pas douter, mais son sens du dialogue n’est pas ce qui frappe au premier regard. Au-delà, cette offre venait quelques jours après la clôture du Grand Dialogue national organisé par Paul Biya au Camerounpourrépondreàlacriseanglophone.Ce«Biyalogue»,ainsi que l’ont appelé des Camerounais, n’avait rien d’un dialogue, ni rien de national, ni rien, a fortiori, de grand. C’était un petit tour de passepasse cousu de fil blanc imaginé afin de se relégitimer auprès d’une communauté internationale friande de « gestes d’apaisement ».

Comme le note l’association Survie dans un rapport consacré au Cameroun, aussitôt accomplis le « simulacre de dialogue national » et la libération opportune de Maurice Kamto et de « quelques centaines d’opposants politiques et de militants sécessionnistes » que Paul Biya « redevenait immédiatement fréquentable pour Emmanuel Macron, qui s’afficha volontiers avec lui dans un têteà-tête diplomatique le 10 octobre à Lyon ». Si fréquentable que, à peine deux semaines plus tard, Jean-Yves le Drian, ministre français des Affaires étrangères, s’est précipité au Cameroun pour redémarrer

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DR

Yann Gwet

Essayiste camerounais

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le moteur du business entre les deux pays, sur fond de concurrence russe. Depuis Yaoundé, il annonça la « relance de la coopération entre le Cameroun et la France dans tous les domaines, y compris le domaine politique », et proposa l’appui de la France à la mise en œuvre du statut spécial pour les zones anglophones du Cameroun décidé à l’issue du Grand Dialogue national.

Mais l’instrumentalisation du dialogue national à des fins politiques n’est pas une exception camerounaise. Ainsi, commentant « le dialogue politique (…) annoncé par le président Macky Sall après la confirmation de son élection en 2019 » dans le média The Conversation, Maurice Soudieck Dione, universitaire sénégalais, dénonçait il y a quelques mois une « instance de manipulation de l’opinion permettant au pouvoir actuel, critiqué pour ses pratiques autoritaires, de reprendre son souffle », et qui « tend à couvrir les multiples atteintes à la démocratie sénégalaise, que ce soit le tripatouillage des règles du jeu politique ou les violations constantes des droits et libertés de l’opposition ». Des critiques que ne renierait probablement pas une partie de l’opposition au président béninois, Patrice Talon, qui a lui aussi ouvert un dialogue politique à la suite des législatives du 28 avril, fortement contestées.

Mais au-delà de ces cas, c’est l’idéologie derrière l’institutionnalisation du dialogue politique – en fait du consensus – comme mécanisme de régulation des divergences politiques qu’il faut examiner. Pour Carl Schmitt, éminent penseur allemand du pouvoir politique (dont l’héritage est controversé en raison de sa collaboration avec les nazis), toute politiquecommenceparl’identificationd’un ennemi.

Celui-ci doit être suffisamment éloigné de soi (au sens politique) pour que « des conflits avec lui soient possibles ».

La politique est donc par définition le domaine de l’antagonisme et du conflit. C’est-à-dire de la violence. Schmitt explique que c’est le libéralisme qui, poussé par son surmoi économique, a entrepris de transformer l’ennemi en compétiteur ou en contradicteur. Mais, si le libéralisme est parvenu à changer le langage de la politique et du pouvoir, il n’a pas modifié son exercice.

Nos chefs d’État sont en tout cas rarement des libéraux et ont une conception fondamentalement « schmittienne » de la politique (ils ne sont pas les seuls). Tous ceux qui ne sont pas avec eux sont des ennemis à embastiller ou à éliminer. Et donc, pour eux, le dialogue politique ne peut être que la poursuite de la logique de l’inimitié par d’autres moyens. Ils dialoguent non pas pour trouver des solutions, mais pour in fine asseoir leur domination. C’est pour cette raison que, si sa demande de dialogue est acceptée, je recommanderais à mon camarade Succès Masra d’y aller, mais sans illusions.

Événements

AISSATOU DIALLO, VINCENT DUHEM, ROMAIN GRAS, FATOUMATA DIALLO et THE AFRICA REPORT

près une année 2019 riche en élections majeures sur le continent – Nigeria, Tunisie, Afrique du Sud et Algérie, en particulier –, l’année 2020 s’annonce tout aussi animée avec dix scrutins présidentiels et/ou législatifs. On observera de près les pays soumis à de graves crises sécuritaires, mais aussi ceux où les règles constitutionnelles et leur éventuelle révision font peser une incertitude sur la candidature des chefs d’État actuellement en poste.

A

BURKINA FASO En plein doute Le Burkina pourra-t-il, à la fin de l’année 2020, rééditer l’exploit de 2015 ? À l’époque, la présidentielle et les législatives avaient suscité un fort engouement dans un climat de postinsurrection populaire. Près de 60 % des Burkinabè s’étaient rendus aux urnes, et les observateurs avaient salué un scrutin pacifique. Cinq ans plus tard, plus personne n’escompte que le même enthousiasme se manifestera le jour du scrutin. Le climat politique s’est tendu et les nostalgiques de l’ancien président Blaise Compaoré, en exil en Côte d’Ivoire, n’hésitent plus à donner de la voix.

Surtout, la dégradation de la situation sécuritaire fait peser des doutes sur la tenue d’une élection, dont la date précise n’a pas encore été fixée, sur l’ensemble du territoire national. Les attaques jihadistes se sont multipliées dans le Nord et dans l’Est, et une partie du territoire échappe désormais au contrôle des autorités – les candidats feront sans nul doute de la résolution de cette crise l’une de leurs priorités.

Pour l’instant, ni le président sortant, Roch Marc Christian Kaboré,

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ni son principal adversaire, Zéphirin Diabré, n’ont annoncé leur candidature. Plusieurs candidats indépendants se sont en revanche lancés.

Quant au Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), au pouvoir jusqu’en 2015, il s’est mis en ordre de bataille, même s’il n’a pas encore annoncé qui porterait ses couleurs.

Privé de scrutin il y a cinq ans, car la loi écartait à l’époque toute personne ayant soutenu le projet de modification de la Constitution de Blaise Compaoré, le CDP est parvenu à lisser son image et à se faire une place au sein de l’opposition. Il tentera de séduire les Burkinabè de la diaspora qui, conformément à la promesse qu’avait faite Kaboré, pourront voter pour la première fois. Une attention particulière sera portée aux quelque

CÔTE D’IVOIRE Le grand mystère Très attendue, la prochaine élection présidentielle s’annonce aussi très incertaine. Prévu pour le 31 octobre 2020, le scrutin pourrait donner lieu à la première alternance pacifique de l’histoire contemporaine d’un pays marqué, ces dernières années, par une grave crise politico-militaire. Mais de nombreuses inconnues demeurent.

L’identité des candidats elle-même demeure un mystère, Guillaume Soro, l’ex-président de l’Assemblée nationale, étant la seule personnalité d’envergure à s’être officiellement lancée dans la course. Le chef de l’État, Alassane Ouattara, tout comme l’ancien président Henri Konan Bédié, laissent planer le doute sur leurs intentions. Quant à Laurent Gbagbo, son avenir politique est étroitement lié aux décisions de la Cour pénale internationale (CPI). S’il a été acquitté en première instance en janvier 2019, rien ne dit qu’il pourra rentrer à temps

Le président ivoirien, Alassane Ouattara, et son dauphin putatif, le Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly.

THIERRY GOUEGNON/REUTERS

Politique Élections à plusieurs inconnues

trois millions de Burkinabè installés en Côte d’Ivoire et dont les suffrages pourraient faire basculer l’élection.

pour l’élection, si tant est qu’il souhaite se présenter. Reste le scrutin en lui-même. L’opposition estime que les conditions ne sont pas réunies pour qu’il puisse être libre et transparent.

Elle en veut pour preuve la composition de la nouvelle Commission électorale indépendante, récemment réformée mais jugée déséquilibrée.

Elle a d’ailleurs refusé d’y siéger.

BURUNDI Surveillé de près Ira ou n’ira pas ? À cinq mois de la présidentielle, prévue pour le 20 mai 2020, le suspense autour de l’avenir de Pierre Nkurunziza reste entier. Le 7 juin 2018, conforté par le succès de son référendum constitutionnel, le chef de l’État burundais, au pouvoir depuis 2005, avait annoncé à la surprise générale qu’il ne briguerait pas un quatrième mandat – et ce, même si la nouvelle Loi fondamentale l’y autorise. Depuis, le flou persiste.

Reviendra-t-il sur sa décision ? Ferat-il d’un cadre de l’appareil sécuritaire son successeur ou choisira-t-il un profil plus « politique » au sein du CNDD-FDD (au pouvoir)? Ou encore propulsera-t-il sur le devant de la scène la première dame, la très religieuse Denise Nkurunziza?

Officiellement, la décision reviendra aux organes du parti. Mais le choix final en dira long sur le message que le Burundi souhaite envoyer à la communauté internationale. Jusqu’à présent, Nkurunziza a multiplié les signaux négatifs. Il a demandé la fermeture du bureau des droits de l’homme de l’ONU, exigé que les ONG se conforment aux nouvelles dispositions de la Constitution sur les quotas ethniques (ce qui a entraîné le départ de nombre d’entre elles), muselé la plupart des médias et fait peu de cas des droits de l’opposition. Au point que cette dernière ne paraît pas en mesure de contester la domination du CNDD-FDD. Le Conseil national pour la Liberté (CNL) d’Agathon Rwasa, principal opposant au pouvoir – l’un des rares surtout à avoir choisi de demeurer à Bujumbura –, dénonce

Événements POLITIQUE Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, lauréat du prix Nobel de la paix 2019.

HÃ¥KON MOSVOLD LARSEN/AP/SIPA

les violences des Imbonerakure, la ligue des jeunes du parti au pouvoir.

L’ONU la compare à une milice et l’accuse de nombreuses violations des droits de l’homme. Reste le Cnared, la plateforme d’opposition en exil.

Divisée sur sa participation au scrutin, elle ne paraît pas en mesure d’influer sur le cours des événements.

Grâce au vote, en mai 2019, d’une révision constitutionnelle limitant le nombre de mandats présidentiels, mais de manière non rétroactive, Faure Essozimna Gnassingbé pourra se représenter le 22 février 2020. Face à une opposition divisée, il fait figure de grand favori. Sa campagne devrait mettre en avant les succès économiques de ses trois mandats, bâtis autour d’une stratégie faisant du Togo un pôle logistique incontournable pour ses voisins enclavés. Quant à la coalition de l’opposition, elle a volé en éclats, certains ayant annoncé leur candidature tandis que d’autres réclament une recomposition de la Cour constitutionnelle et une réforme du code électoral afin d’assurer la transparence du scrutin.

GUINÉE Scrutin sous tension

En Guinée, la présidentielle devrait être organisée à la fin de 2020. Mais le flou règne encore, notamment sur l’identité des candidats. C’est une autre question qui focalise l’attention.

Alpha Condé, élu en 2010 et en 2015, briguera-t-il un troisième mandat? La Constitution le lui interdit, mais ses adversaires le soupçonnent de préparer une réforme de la Loi fondamentale qui, remettant les compteurs à zéro, lui permettrait de retenter sa chance.

Réunies au sein du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), les principales figures de l’opposition – comme Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, pour lesquels il fait peu de doute qu’ils seront candidats – font bloc. Mais jusqu’à quand?

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VINCENT FOURNIER/JA

TOGO Les jeux sont-ils faits?

Au Togo, Faure Gnassingbé, candidat à un quatrième mandat.

En attendant, manifestations et affrontements rythment le quotidien.

Un mois après le début des protestations qui ont éclaté à la mi-octobre, une vingtaine de personnes avaient été tuées et une centaine d’autres blessées. Autre facteur de tension : les législatives. La date du 16 février a été fixée pour renouveler le mandat, expiré depuis janvier 2018, des députés. Une date que conteste l’opposition, convaincue que le délai est trop court pour que le scrutin soit organisé dans de bonnes conditions car la commission électorale doit encore assainir le fichier électoral et procéder au recensement de près de 6 millions de votants.

ÉTHIOPIE Le moment de vérité

Abiy Ahmed sera-t-il victime de sa propre politique ? Les élections générales auront lieu en mai 2020

et, à quelques mois de l’échéance, le Premier ministre éthiopien est dans une position particulièrement inconfortable. Salué par la communauté internationale pour les réformes qu’il a entreprises, récompensé par le prix Nobel de la paix, en octobre 2019, pour avoir été l’artisan d’une réconciliation spectaculaire avec l’Érythrée, il est menacé par la montée des revendications régionalistes et des tensions interethniques. A-t-il voulu aller trop vite en entreprenant de transformer le régime marxisant, dont il est le pur produit, en une démocratie? Pour un pays comme l’Éthiopie, rompu au monolithisme du pouvoir, l’ouverture politique et le retour des opposants en exil ne sont pas sans risque. D’autant que la vieille garde politico-sécuritaire tigréenne, au pouvoir depuis vingthuit ans, a été progressivement marginalisée au sein de l’EPRDF, la coalition au pouvoir. Pour Abiy Ahmed, premier Oromo à accéder à d’aussi hautes fonctions, elle constitue donc une menace.

Le Premier ministre doit en outre gérer les frustrations dans sa propre région de l’Oromia, foyer des manifestations qui l’ont indirectement porté au pouvoir. Il est en conflit ouvert avec le cyberactiviste oromo Jawar Mohammed, une des voix de la contestation, qui n’exclut pas de jouer un rôle lors du scrutin.

Face au péril ethnonationaliste, Abiy Ahmed pourra-t-il poursuivre ses réformes ? L’attentat de juin 2018, le début de mutinerie survenue quelques mois plus tard, ou encore la tentative de coup d’État de juin 2019 ont été de sérieux coups de semonce.

Ces élections s’annoncent décisives, à l’échelle tant nationale que sous-régionale.

ROMUALD MEIGNEUX/SIPA

Événements

Jack Ma

Cofondateur et ancien président exécutif du groupe chinois de commerce électronique Alibaba

L’Afrique d’aujourd’hui, c’est la Chine d’il y a vingt ans!

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pour la première fois mis les pieds en Afrique en 2017. ’ aiConseiller spécial de la Conférence des Nations unies sur

La révolution numérique pourrait être à l’origine d’une vertigineuse prospérité sur le continent, dès lors qu’il disposera des entrepreneurs et des entreprises capables de la mener à bien. Les le commerce et le développement, j’ai été amené à me sceptiques peuvent bien souligner l’insuffisance de ses infrastrucrendre au Kenya et au Rwanda. M’étant beaucoup documenté tures et estimer qu’il n’est absolument pas prêt à entrer dans l’ère avant de partir, je croyais savoir à quoi m’attendre – et espérais numérique, ils se trompent : il est au contraire fort bien placé. surtout sortir de ma zone de confort. Car je n’avais nullement Dans ce nouveau monde, des infrastructures lourdes n’ont guère l’habitude d’analyser la situation dans tel ou tel pays étranger. d’utilité. Quand un système marche trop bien, tout changement À ma grande surprise, elle n’était pas très différente de celle que suscite des résistances. L’héritage est trop difficile à assumer. j’avais pu connaître chez moi, en Chine.

Fort heureusement, ce n’était pas un problème en Chine Lors de chacun de mes voyages, je m’efforce de rencontrer en 1999, quand j’ai créé Alibaba. Nous avions une population de jeunes entrepreneurs. Et le continent n’a pas fait exception nombreuse, un revenu par habitant faible, et des infrastructures à la règle. J’ai donc parlé à des chefs d’entreprise africains. J’ai peu développées dans les secteurs du commerce de détail, de découvert leurs histoires personnelles, leurs rêves. Et soudain je la logistique et de la banque. Mais deux décennies plus tard, me suis trouvé propulsé vingt ans en arrière, à l’époque de la le nombre d’usagers d’internet est passé de création d’Alibaba.

8,8 millions à 850 millions ; le revenu par Un peu partout sur le continent, j’ai habitant, qui ne dépassait pas 800 dolconstaté que la plupart des entrepreneurs lars, culmine à présent à 9 000 dollars ; n’étaient pas aussi obsédés par l’idée de L’AVENIR et les ventes de l’e-commerce atteignent faire une brillante carrière que leurs colDU CONTINENT 1 000 milliards de dollars au total. À lui seul, lègues américains ou, de plus en plus, l’écosystème Alibaba a permis de créer plus chinois. Prudents, ils cherchent avant tout APPARTIENT À SES de 40 millions d’emplois dans l’ensemble un emploi salarié stable dans des secteurs ENTREPRENEURS, du pays. L’an dernier, les revenus tirés de comme la banque, l’énergie ou les mines. l’e-commerce ont dépassé 97 milliards de L’entrepreneuriat, c’est l’affaire des joueurs, CES INLASSABLES dollars dans la Chine rurale, générant près ceux qui sont incapables d’exercer un métier RÊVEURS POUR QUI de 7 millions de nouveaux emplois. traditionnel, et qui, pour gagner leur vie, Et l’Afrique peut faire encore mieux. doivent se bagarrer et se montrer créatifs.

CHAQUE PROBLÈME Comme en Chine, le manque d’infrastructures y est un atout. Autre ingrédient de son Je suis convaincu que l’avenir de l’Afrique EST UNE CHANCE. futur succès: elle compte 1,3 milliard d’habiappartient à ses entrepreneurs, ces inlastants, dont 40 % ont moins de 16 ans. Six des sables rêveurs pour qui chaque problème dix économies qui progressent le plus vite au est une chance. Je ne doute pas que tous ces monde sont africaines. Et le nombre de smartphones par habijeunes rencontrés en 2017 soient les futurs héros du continent. tant y croît rapidement.

Et je me suis promis de tout faire pour les aider à atteindre leurs Pour prospérer, le continent doit impérativement adopter ce objectifs. que j’appelle les « 4 E ». Le premier désigne les entrepreneurs.

L’Afrique est mûre pour une transformation radicale. Le monde Nous devons absolument les soutenir et inspirer une nouvelle vit actuellement une révolution numérique qui pourrait débougénération. Montrons aux jeunes Africains ce qu’ils peuvent faire cher sur des changements d’une ampleur sans précédent. Il suffit pour transformer la société. Et il ne s’agit pas de célébrer les mildésormais d’un smartphone pour souscrire un crédit et créer son liardaires, ni de mobiliser l’épargne publique à leur profit. Je parle entreprise. Les technologies du mobile et de l’internet permettent de start-up favorisant la croissance « inclusive » et contribuant à à tout un chacun d’accéder à une gamme très étendue de prorésoudre des problèmes sociaux. duits et de services.

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ADRIA FRUITOS POUR JA

C’est la raison pour laquelle ma fondation vient de créer le prix du Netpreneur africain. Pour la première édition, cette année, nous avons recherché à travers tout le continent les entrepreneurs les plus impressionnants du moment. Plus de dix mille candidatures ont été retenues. Les dix finalistes ont été départagés lors d’un grand événement télévisé. L’enjeu ? Une importante somme d’argent, bien sûr, mais aussi un encadrement

des activités des lauréats ainsi que des stages de formation. Les trois vainqueurs se nomment Temie Giwa-Tobosun, Christelle Kwizera et le Dr Omar Sakr. Tous comptent parmi les novateurs les plus prometteurs au monde. Il va de soi que nous entendons récompenser et soutenir ces fantastiques entrepreneurs. Mais, plus important encore, nous aimerions aussi qu’ils soient une source d’inspiration pour d’autres.

Les deux E suivants recouvrent l’e-gouvernement et l’éducation, indispensables au soutien des entrepreneurs. Le continent a besoin de gouvernements disposant des compétences

indispensables à l’émergence d’une économie numérique. Et ses entrepreneurs doivent pouvoir accéder à des formations et à des systèmes éducatifs adaptés à cette nouvelle ère.

Il va sans dire que je compte prendre part à cette mission.

C’est pourquoi, en association avec la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, Alibaba Business School a mis en place un programme de formation à l’e-commerce, l’Association des e-fondateurs, afin de fournir aux jeunes entrepreneurs du continent le savoir-faire nécessaire au développement de l’e-business. Alibaba Business School a mis au point un programme du même type à l’intention des responsables politiques et des membres de gouvernements pour les aider à naviguer dans un paysage technologique des plus changeants.

L’an dernier, une telle opération a été engagée au Rwanda pour préparer les éducateurs à former la prochaine génération d’entrepreneurs. D’autres sont à l’étude pour d’autres pays.

Le dernier E concerne les e-infrastructures et sous-tend les trois autres. Car l’Afrique a besoin de services internet de classe mondiale, base de la nouvelle économie numérique : analyse de données, logistique et paiements.

Depuis ma première visite, il y a vingt ans, j’ai sauté sur toutes les occasions de m’informer sur ce prodigieux continent et de rencontrer de nouveaux entrepreneurs. Mon but est de visiter l’ensemble des pays qui le composent. Chaque fois, je me convaincs un peu plus que ses entrepreneurs sont l’avenir de l’Afrique. Et que le meilleur moyen de les aider est de les soutenir et de leur fournir les outils dont j’aurais aimé disposer lorsque je me suis lancé dans ma propre aventure. Car aucun entrepreneur ne peut se développer seul.

Il a besoin de responsables politiques, d’éducateurs, d’autres capitalistes, d’associations professionnelles et d’incubateurs de start-up. Si tout le monde accepte de travailler ensemble, alors l’Afrique deviendra un hub d’innovation et de croissance.

Car chacun sait bien qu’elle a le potentiel de devenir un leader planétaire. © 2019 The New York Times Company et Jack Ma

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COMMUNIQUÉ

SANAD – SALON NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Promouvoir la Guinée pour booster son émergence Le 1er Salon National du Développement Durable (SANAD), qui se tiendra à Conakry du 21 au 23 février 2020, a pour objectif de créer une plateforme d’information, de rencontre et d’échange pour les institutions gouvernementales et les partenaires multilatéraux qui, ensemble, œuvrent pour l’implémentation des programmes de développement.

Trois temps forts

•

Des conférences. Les responsables des institutions gouvernementales et non gouvernementales, les chefs d’entreprise et les experts de renommée nationale et internationale animeront des panels de haut niveau consacrés aux thématiques retenues par le comité d’organisation.

Cette initiative innovante vient clôturer la série de conférences de presse des membres du gouvernement, lancée dès janvier 2019 dans le but d’informer les citoyens, les partenaires au développement et le secteur privé sur les actions concrètes et les politiques menées ou envisagées par les pouvoirs publics, dans le cadre de la recherche de solutions aux multiples problèmes de développement de la République de Guinée.

•

Des expositions. Véritable parc des expositions multisectorielles en plein cœur de la capitale guinéenne, le Salon se positionne comme un vecteur de convergence dans la dynamique de promotion des réformes et des politiques socio-économiques engagées en République de Guinée. Des stands aux formats divers seront aménagés par les participants venus des quatre coins du globe.

•

Une Soirée des partenaires. Un dîner de gala, organisé dans un hôtel cinq étoiles de Conakry, sera consacré aux rencontre B to G et B to B, autour d’un banquet VIP qui mettra en relation directe tous les participants. L’objectif est de faciliter les contacts d’affaires entre le secteur privé national, les multinationales, les investisseurs et les bailleurs de fonds.

Le Salon a pour objectif principal de mettre en place un cadre d’échanges participatifs à travers lequel seront présentés la vision globale du gouvernement, ses programmes et projets mais aussi les appuis multiformes des partenaires multilatéraux qui l’accompagnent au quotidien.

En outre, il vise à promouvoir, dans un cadre institutionnel d’excellence, le potentiel de la Guinée et son modèle de gouvernance, afin de garantir son attractivité. Le Salon a pour objectif également d’informer l’opinion nationale, mais aussi d’inciter la participation citoyenne à la vie publique.

En définitive, le SANAD créera de meilleures conditions pour des rencontres B to G, B to B et suscitera un intérêt certain pour la mise en place d’une dynamique de développement inclusif, via des opportunités d’investissement et de joint-ventures dans des secteurs à fort potentiel de croissance.

Organisateurs

UNE GRANDE VARIÉTÉ ATTENDUE D’EXPOSANTS ET DE PARTICIPANTS –

Les ministères, les entreprises publiques et parapubliques et les institutions publiques

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Le secteur privé national

–

Les investisseurs

–

Les partenaires au développement

–

Les institutions financières

–

Les PME et PMI, etc.

Partenaires

JAMG - PHOTO : S4SVISUALS/ADOBESTOCK.COM

Des objectifs multiples

Comme tous les grands Salons internationaux de ce type, le SANAD proposera trois grands volets…

VINCENT FOURNIER/JA

Événements

Gilles Olakounlé Yabi

Analyste politique, fondateur de Wathi, think tank citoyen de l’Afrique de l’Ouest

Montrons-nous stratèges avec nos nouveaux partenaires étrangers

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troisième sommet économique Afrique-Allemagne, destiné à stiair Bolsonaro est un cas à part. Pas seulement parce qu'il muler l’intérêt des investisseurs privés allemands pour le continent. affiche son mépris des usages diplomatiques et ne craint pas Fidèles à leur réputation de pragmatiques, et peut-être par délicad'enchaîner indélicatesses et contrevérités. Mais aussi parce tesse à l’égard de l’allié français, les Allemands affichent essentielqu'il manifeste, à l'égard de l'Afrique, une indifférence totale. Peu lement des objectifs économiques et suivent Paris sur les grands lui importe que le Brésil ait longtemps été un partenaire – écodossiers politiques et sécuritaires africains, notamment au Sahel. nomique notamment – de plusieurs des pays du continent. Peu Le tout dernier venu, qui fait grand bruit, c’est Moscou, avec son lui importe encore de prendre le contre-pied de la politique que récent sommet Russie-Afrique. Ces dernières années, le Kremlin a l'un de ses prédécesseurs, Luiz Inácio Lula da Silva, s'était applirepris une place influente sur la scène mondiale qué à construire, multipliant les voyages sur le en s’appuyant sur sa capacité militaire, projetée continent (13 visites à travers 29 pays entre 2003 avec une redoutable efficacité en Syrie. Une quaet 2010). L'Afrique, le nouveau président brésilien POUTINE rantaine de dirigeants africains se sont pressés à n'en a cure, et ce dédain affiché est d'autant plus Sotchi, les 23 et 24 octobre derniers. À titre perremarquable qu'il est à l'exact opposé de l'intérêt N’EST PAS UN sonnel, Vladimir Poutine n’est clairement pas un globalement exprimé par l'ensemble des pays qui AMOUREUX DE « amoureux » de l’Afrique. Mais s'il séduit sur le pèsent ou espèrent peser sur la scène mondiale. c'est parce qu’il semble être le seul, avec Pour s'en convaincre, il suffit de recenser le L’AFRIQUE. MAIS lecontinent, président chinois, qui tienne tête aux États-Unis. nombre des sommets qui mettent le continent CETTE RELATION Avec eux, nos chefs d'État n'ont pas à redouter de à l'honneur – la liste est impressionnante. On leçons au sujet de la démocratie, du respect des connaît, bien sûr, les sommets Afrique-France, LUI PERMET droits de l’homme et de la bonne gouvernance. Le version politiquement plus correcte des sommets primat des souverainetés nationales et la priorité France-Afrique lancés au début des années 1970 DE RÉGLER SES donnée aux relations économiques rassurent. Avec sous la présidence de Georges Pompidou. On COMPTES AVEC leurs propos lisses et flatteurs, les nouveaux partes'est également habitués à la Ticad, la conférence naires de l'Afrique profitent de l’occasion que leur internationale de Tokyo sur le développement en SES RIVAUX. offrent ces sommets pour régler leurs comptes avec Afrique, inaugurée en 1993. Dans ce cas précis, il leurs rivaux sur la scène géopolitique mondiale, est intéressant de souligner que le Japon a coudénonçant les dégâts historiques provoqués par les tume d'associer largement à ses Ticad diverses puissances européennes en Afrique. agences onusiennes, privilégiant une approche ouverte et interDans ce registre, Recep Tayyip Erdogan est sans doute le plus nationalisée quand les autres puissances (émergentes ou bien décomplexé. Lors du troisième sommet des leaders religieux établies) ont quasiment toutes opté pour une reproduction du musulmans d’Afrique organisé à Istanbul en octobre, le président tête-à-tête franco-africain. turc a déclaré que « ceux qui [voulaient] nous donner des leçons aujourd'hui ont, pratiquement tous, un passé entaché de masContinuons notre liste. Depuis l'an 2000, Pékin a institutionnasacres, d'invasions et de colonisation ». Point de doute sur ceux qui lisé un Forum de coopération sino-africaine, le Focac. La dernière sont visés… La Turquie a organisé en 2008 son premier sommet de édition, en septembre 2018, s’est achevée sur des annonces d’encoopération Turquie-Afrique et a confirmé depuis sa poussée specgagements financiers faramineux. Rivale de la Chine en Asie, taculaire sur le continent, multipliant les ouvertures d’ambassades l’Inde affiche également de grandes ambitions. En octobre 2015, et projetant dans le ciel africain sa compagnie Turkish Airlines. le Premier ministre, Narendra Modi, a invité tous les pays africains De Paris à Pékin, en passant par New Delhi, ce que les uns ou sans exception au troisième sommet Inde-Afrique. Une quaranles autres ont à y gagner, en termes d'échanges commerciaux taine ont répondu présent. ou de géopolitique mondiale, est plutôt évident. Mais que retire L'Europe, bien sûr, n'est pas en reste. L’Allemagne, longl'Afrique de ces grands raouts ? Commençons par les chefs d’État temps timide malgré son statut de première puissance du Vieux africains. Sans doute y gagnent-ils une certaine reconnaissance Continent, s’est aussi lancée. Le Ghana a accueilli en février 2019 le

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internationale et, parfois, le sentiment de compter aux yeux des pays les plus influents de ce monde. Cette légitimation n'est pas anecdotique pour les présidents les plus contestés en interne, que ce soit pour leurs pratiques autoritaires, pour leurs résultats économiques et sociaux peu convaincants ou pour leur longévité au pouvoir. À Sotchi ou ailleurs, on a vu des chefs d'État

se presser pour obtenir des apartés et, le cas échéant, savourer « l'honneur » qui leur était ainsi fait. Bien sûr, ils y trouvent aussi un intérêt très concret. La Russie et ses capacités respectables dans le domaine des équipements et de l’expertise militaires intéressent nombre de pays du continent. On imagine aussi que les présidents sahéliens apprécient de pouvoir sortir de temps en temps du tête-à-tête avec le partenaire historique français, aussi familier qu’encombrant.

On a aussi beaucoup répété que, pour les pays africains et pour leurs peuples, le principal intérêt de ces sommets résidait dans la diversification des partenaires, au motif que celle-ci irait de pair avec une diversification des options d'investissement, des échanges commerciaux et des sources de financement. Cela est

sans doute vrai et ne se refuse pas. Mais, pour en tirer des bénéfices durables, il faudrait que les États africains disposent d’une identification claire des besoins d’apports extérieurs dans les domaines clés pour le développement à moyen et à long termes. La multiplication des offres de partenariat avec des États aux modèles économiques et politiques très variés peut distraire encore davantage les pays africains de leurs priorités, qui ne peuvent pas se résumer à un exercice de rattrapage du retard en matière d’infrastructures. L’investissement dans le capital humain et social ainsi que celui dans la préservation de l’environnement sont cruciaux pour l’avenir du continent.

On ne peut pas non plus continuer à occulter la face sombre des relations entre les pays africains et leurs généreux partenaires, anciens ou récents : la ponction des ressources naturelles enfouies dans les terres et les fonds marins. Il est un point qui est très clair en matière d'exploitation des ressources : sans un changement majeur dans la gouvernance de nos pays, sans un effort immense dans la formation des ressources humaines, nous n'avons aucune chance de parvenir à établir un rapport de force bénéfique aux Africains.

Alors oui, nos pays doivent profiter des opportunités offertes par la diversification de leurs partenaires.

Mais tant que les dirigeants africains ne feront pas leur « homework », leurs devoirs à la maison, en construisant des capacités de réflexion et d’action au sein de leurs États, en les mettant en réseau à l’échelle des communautés économiques régionales et continentale, la diversification de la dépendance aura des conséquences assez similaires à celle de la monodépendance.

Il est lassant de devoir le répéter : l’Afrique doit penser par et pour elle-même, et être aussi unie que possible sur les questions globales. Sans quoi, elle continuera à être conviée au grand banquet du monde pour y être plus ou moins délicatement mangée.

Il n’est pas certain que cela fasse une grande différence, pour une gazelle, d’être dévorée par un lion ou par plusieurs. Certes, elle peut espérer que la querelle qui ne manquera pas d'opposer ses poursuivants lui offrira un sursis, voire une possibilité de fuite, mais l'espoir est mince. Et s'il est excessif d'assimiler nos partenaires, anciens et nouveaux, à de simples prédateurs, nous serions avisés de ne pas oublier la longue histoire de domination politique et économique qui est la nôtre. jeuneafrique no 3076H

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Événements

Algérie Les patrons dans l’expectative Dans un climat d’affaires crispé et suspicieux marqué par une série de méga-procès pour corruption, le monde de l’entreprise attend beaucoup de la nouvelle équipe gouvernementale.

DJAMILA OULD KHETTAB, à Alger

n 2017, Abdelmadjid Tebboune avait déclenché l’ire de Saïd Bouteflika lorsqu’il avait soufflé aux officiels français, lors d’une visite à Paris, avoir le soutien de l’armée pour succéder au président à la tête du pays. Son départ était déjà acté depuis qu’il avait affiché la volonté de s’attaquer aux prébendes des entrepreneurs affidés au pouvoir. Quelques jours plus tard, le conseiller tout-puissant l’obligeait à quitter son poste de Premier ministre. Le 12 décembre, au terme d’un scrutin dont la majorité des Algériens ne voulaient pas, sa prédiction s’est finalement accomplie. L’élection d’Abdelmadjid Tebboune, 74 ans, clôt une année folle en Algérie, marquée par la démission forcée en avril d’Abdelaziz Bouteflika – poussé vers la sortie pour avoir voulu briguer un cinquième mandat – et une mobilisation du peuple, qui n’a cessé de réclamer un changement de régime. Adoubé par Gaïd Salah, le chef d'état-major de l’armée, l’ancien obligé promet d’ouvrir une nouvelle page pour le pays. Comme gage de sa bonne foi, il peut se prévaloir durant son passage éphémère à la primature d’avoir croisé le fer avec l’entrepreneur alors le plus puissant d’Algérie, Ali Haddad, aujourd’hui en prison. Et il entend poursuivre le ménage entamé dans les écuries du système.

Car, depuis plus de neuf mois, c’est la chasse aux sorcières chez les politiques et dans les milieux des affaires. Deux jours avant le vote, l’épilogue du premier grand procès post-Bouteflika voyait deux anciens Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, condamnés respectivement à quinze et douze ans de prison pour favoritisme dans le secteur de l’automobile.

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Dans un autre volet du procès, Abdelmalek Sellal a également été condamné pour financement occulte de la campagne pour un cinquième mandat de Bouteflika.

Du jamais-vu en Algérie, où aucun haut dirigeant n’avait été jusqu’ici reconnu de corruption. Du côté du patronat, Ahmed Mazouz, à la tête du groupe du même nom, Hassen Arbaoui, propriétaire de Kia Motors, et l’ancien vice-président du Forum des chefs d’entreprise Mohamed Bairi ont écopé respectivement de sept, six et trois ans de prison. Les sommes détournées sont faramineuses: 128 milliards de dinars (975 millions d’euros) de perte pour le Trésor public, selon l’Algérie presse service.

Au Conseil national de la concurrence (CNC), une autorité placée auprès du ministre du Commerce, on peine à se réjouir des sentences prononcées pour l’exemple. « Il n’y a pas de culture de la concurrence dans le pays », assène d’emblée Amara Zitouni, le président du Conseil, qui vient de mettre en garde le gouvernement contre des dérives dans le domaine pharmaceutique. « Cette industrie a à peine une vingtaine d’années, mais on remarque déjà la constitution d’un monopole », alerte-t-il.

Mauvaises habitudes

Mais la préoccupation majeure du Conseil, réactivé en 2013 après dix ans de sommeil, reste les conditions d’octroi des marchés publics, terreau de la corruption dans le pays. Pour le nouveau président, connu pour entretenir lui aussi des relations avec les milieux d’affaires, la tâche pour redonner un visage plus présentable aux responsables politiques et aux chefs d’entreprise s’annonce ardue. « La procédure de gré

Abdelmadjid Tebboune lors d’une conférence de presse après sa victoire à la présidentielle, le 13 décembre, à Alger.

FAROUK BATICHE / ANADOLU AGENCY

à gré, c’est-à-dire sans passer par l’appel d’offres, s’est répandue à tel point que l’exception est devenue la règle. Les décisions se prennent dans des cafés de manière complètement informelle », déplore le responsable du Conseil. Comment y remédier? « Le problème ne réside pas dans le texte, car le code des marchés publics algérien est conforme aux normes européennes. Non, le problème vient des pratiques », souffle-t-il.

En cause, l’absence de garde-fous. Quatre ans après sa création, l’Autorité de régulation des marchés publics n’est toujours pas opérationnelle. « Il est fondamental de consolider les corps intermédiaires, comme la Cour des comptes ou le Conseil de la concurrence, qui jouent un rôle de veille, d’information et de contrôle, et de les doter de pouvoirs de sanction », insiste Alexandre Kateb, professeur à Sciences Po Paris. Pour l’auteur des Économies arabes en mouvement, l’Algérie a tout intérêt à s’inspirer du dispositif législatif tunisien pour lutter

contre l’enrichissement illicite dans la vie publique, à l’œuvre depuis 2018. « Là-bas, les agents de la fonction publique sont tenus de déclarer leur patrimoine et leurs revenus.

La loi tunisienne protège également mieux les lanceurs d’alertes qui observent des malversations dans leur entreprise ou dans leur administration », assure-t-il.

La règle du 51/49 assouplie

LE PAYS POINTE À LA 157E PLACE DU CLASSEMENT «DOING BUSINESS», LOIN DERRIÈRE LE MAROC (53E) ET LA TUNISIE (78E).

En attendant, une nouvelle vague de procès pour corruption doit démarrer d’ici à quelques semaines. Ce qui ne devrait pas aider à apaiser le monde de l’entreprise, très tendu depuis l’arrestation, au printemps, d’une douzaine de richissimes capitaines d’industrie (lire p. 76). D’ailleurs, dans le dernier classement « Doing Business » de la Banque mondiale, l’Algérie cale à la 157e place, loin derrière le Maroc (53e), la Tunisie (78e) et Maurice (13e), premier pays africain. Dans le détail, l’Algérie occupe la peu flatteuse 181 e position dans

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RYAD KRAMDI/AFP

Événements ALGÉRIE

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Des manifestants tenant une banderole où sont représentés en détenus Saïd Bouteflika, Abdelmadjid Sidi Saïd, Ali Haddad et Ahmed Ouyahia, le 15 mars, à Alger.

des réserves de change. Évaluées à 194 milliards de dollars en 2013, elles pourraient, au rythme actuel, avoir totalement disparu d’ici à la fin de 2023.

Rassurer les investisseurs

CROISSANCE DU PIB RÉEL en prix constant du marché

3,2

2,2 1,9 1,5 1,4 2016 17

1,3 18

19 e

20 p

21 p

INFLATION

Indice des prix à la consommation 6,4 5,9 5,1

5,6 4,3 4,3 2016 17

18 e

19 e

20 p 21 p

estimation p prévision

SOURCE : BANQUE MONDIALE

l’obtention de prêts et la 152e pour la création d’entreprises. « L’environnement des affaires n’est pas encourageant, en raison notamment de la dégradation des rapports entre le pouvoir et la sphère entrepreneuriale. La lutte contre la corruption, telle qu’elle est menée, a induit un climat de suspicion lourd et difficile à supporter pour beaucoup de chefs d’entreprise », confie un gérant dans le secteur des assurances. Un autre, actif dans l’agroalimentaire, regrette: « C’est difficile de travailler au quotidien en s’imaginant être arrêté pour un simple acte de gestion.

La corruption et la fraude doivent relever du pénal, mais pas une erreur dans un acte de gestion. C’est un frein au développement. » C’est dans ce climat de défiance que les autorités ont décidé de lever les restrictions en matière d’investissements étrangers. Signée par l’ex-président par intérim Abdelkader Bensalah, la loi de finances prévoit de limiter la règle du 51/49 aux seuls « secteurs stratégiques » qui plafonnait jusque-là la participation des étrangers dans tout nouvel investissement à 49 %. Objectif : capter les capitaux étrangers pour revitaliser une économie à bout de souffle et résorber l’hémorragie

Dans le patronat algérien, la fin de ce tabou des années Bouteflika est accueillie avec prudence. « Cette mesure était une aberration qui a eu pour effet de freiner l’investissement dans le pays. Mais on attend maintenant de connaître les contours de cette révision : qu’en est-il du droit de préemption ? Quand sortiront les textes d’application? Quels secteurs stratégiques vont continuer à être régis par cette règle? », s’interroge un membre du Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (Care), un think tank algérien.

Malgré cet assouplissement, les investisseurs étrangers ne devraient pas se bousculer en Algérie. Le pays a attiré pour 1,5 milliard de dollars d’IDE en 2018, contre 3,6 milliards pour le Maroc et 6,8 milliards en Égypte, premier destinataire des IDE du continent, selon la Cnuced. « Vendre aux investisseurs étrangers la destination Algérie n’est pas évident dans le contexte actuel. Il faut d’abord les rassurer en

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en Afrique francophone chaque semaine*

*Sources : Kantar - TNS – Africascope 2019 – Abidjan, Bamako, Brazzaville, Dakar, Douala, Yaoundé, Kinshasa, Libreville et Ouagadougou

Événements ALGÉRIE

leur donnant des garanties en matière de sécurité juridique. Les réglementations ne peuvent plus être modifiées de manière imprévisible et rétroactive, comme cela a été le cas par exemple avec l’instauration d’une taxe modifiant le partage des profits tirés du pétrole et du gaz, en 2006 », temporise Alexandre Kateb. À la suite d’un arbitrage international, le géant pétrolier algérien Sonatrach avait d’ailleurs été contraint de dédommager l’américain Anadarko et le danois Maersk à hauteur de 4 milliards de dollars en 2012.

Refonte fiscale

« LES BANQUES PUBLIQUES SE SONT TROUVÉES PLUS DE 70 FOIS EN SITUATION DE FAILLITE. ON DOIT DIRE BASTA ! » LANCE UN EXPERT FINANCIER.

Au-delà de la question de l’investissement étranger, les attentes des chefs d’entreprise envers la nouvelle équipe gouvernementale sont grandes. Et les chantiers de réformes, nombreux. « On ne peut pas faire évoluer un pays avec autant d’incohérences dans le système fiscal, financier et réglementaire.

Donc forcément, dans les douze à vingtquatre mois, des changements vont s’opérer, et dans un sens positif », espère l’adhérent au Care.

Le changement le plus attendu: la refonte fiscale. Dans le milieu des affaires, on la surnomme même la « mère des réformes ». Le sujet refait surface à chaque débat autour de la loi de finances. Jusqu’ici sans trop d’avancées. Ce qui est reproché au régime actuel: une mauvaise répartition de la charge fiscale, au détriment notamment des PME. « Le niveau de fiscalité est raisonnable, mais le problème vient du fait que le système n’est pas équitable. Il y a une partie des opérateurs qui en sont exemptés, car ils bénéficient d’avantages », explique Alexandre Kateb. Ce système jugé inégalitaire pousserait certains dans les circuits informels.

Selon des estimations, l’économie informelle représente 45 % du PIB et fait travailler plus de 3 millions de personnes

CHRONOLOGIE D’UN COUP DE TORCHON Depuis la chute du président Bouteflika, plusieurs hommes d’affaires parmi les plus puissants du pays font l’objet d’enquêtes pour corruption ou sont incarcérés à la prison d’El Harrach.

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alors qu’il avait bénéficié d’avantages douaniers, fiscaux et bancaires ».

3 avril : Ali Haddad, PDG d’ETRHB et ex-président du Forum des chefs d’entreprise, est placé en détention provisoire pour usage illégal d’un second passeport algérien. Il avait été arrêté le 31 mars au poste-frontière d’Oum Teboul alors qu’il tentait d’aller en Tunisie.

23 avril : Redha Kouninef, PDG du groupe KouGC, et ses deux frères, Tarek et Karim, sont placés en détention provisoire pour « nonrespect des engagements contractuels dans la réalisation de projets publics, trafic d’influence avec des fonctionnaires publics pour l’obtention de privilèges et détournement de fonciers et de concessions ».

22 avril : Issad Rebrab, patron de Cevital, est arrêté puis placé en détention provisoire pour « fausse déclaration relative aux transferts illicites de capitaux de et vers l’étranger, surfacturation d’équipements importés et importation de matériels d’occasion

10 juin : Mahieddine Tahkout, à la tête de Tahkout Manufacturing Company (TMC), deux de ses frères, Rachid et Hamid, et son fils Bilal sont placés en détention provisoire, notamment pour « obtention d’indus privilèges ».

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16 juin : Mourad Oulmi, PDG de Sovac, partenaire de Volkswagen, est placé sous mandat de dépôt.

Il est soupçonné entre autres de transfert illicite de capitaux vers l’étranger et d’avoir bénéficié d’avantages indus.

20 juin : Hassan Arbaoui, PDG de Global Group et propriétaire de la marque Kia, est placé sous mandat de dépôt. Il est suspecté de « blanchiment d’argent et transfert de biens obtenus par des faits de corruption », et de trafic d’influence.

3 juillet : Ahmed Mazouz, dirigeant du groupe du même nom et propriétaire de la marque N’Gaous, est placé sous mandat de dépôt pour blanchiment d’argent et participation au financement occulte de la campagne.

19 juillet: Mohamed Baïri, PDG du groupe Ival (marques Iveco, New Holland Construction et Fiat), est placé sous mandat de dépôt et incarcéré. Il est soupçonné de blanchiment d’argent et de transfert de biens résultant de faits de corruption, de dilapidation et d’utilisation des fonds de la banque de manière contraire à la législation, d’avoir incité des fonctionnaires publics à abuser de leur fonction, de financement occulte de partis politiques.

12 août : Abderrahmane Benhamadi, patron du groupe Condor, et deux de ses frères sont placés en détention provisoire. Motifs : blanchiment d’argent, transfert de biens obtenus par des faits de corruption et financement occulte des partis politiques.

DJAMILA OULD KHETTAB

Le grand chantier bancaire

Abdelmadjid Tebboune, qui incarne la vieille bureaucratie affaiblie par la montée d’un capitalisme algérien, n’a presque rien dit de ses intentions en matière économique. En 2017, il avait drastiquement réduit les importations pour faire face à la chute des recettes gazières. Deux ans plus tard, le nouveau président devrait réaffirmer son choix de privilégier une économie administrée en limitant autant que possible les sorties de devises. Il y a peu de chances qu’à court terme il réponde pleinement aux attentes des chefs d’entreprise et s’attaque par exemple au quasi-monopole des banques publiques.

Les six établissements étatiques dominent 90 % du secteur et sont les clients exclusifs des entreprises publiques.

Sous-performantes, bureaucratiques, enlisées dans les vieux réflexes de l’économie planifiée…, les banques publiques sont perçues comme un frein à la croissance et au développement du secteur privé. Les premières à en pâtir sont les PME. « Les banques publiques ne prennent aucun risque en matière d’octroi de crédits. Elles n’encouragent ni l’innovation ni les petits acteurs, car elles n’accordent des crédits qu’à condition de présenter des garanties réelles », déplore Nabil Djemaa, expert financier Éclaboussée par les affaires de corruption, la gouvernance des banques publiques est pourtant plus que jamais au cœur des critiques. Depuis juin, l’ancien

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Les six banques publiques algériennes, qui bénéficient d’un quasi-monopole, sont accusées de plomber l’économie.

SOLDE BUDGETAIRE en prix constant du marché

-8,8

-7,2

-7,6

-7,1

-12,2 -14,6 2016 17

18

19 e

20 p

21 p

DETTE % du PIB

62,2

66,1

52,1 41,7 32,2 2016 17

33,9 18 e

19 e

20 p

21 p

estimation p prévision

SOURCE : BANQUE MONDIALE,

sans couverture sociale. Pour ramener ces personnes vers les marchés régulés, des mesures coercitives ne suffiront pas. « Le prochain gouvernement devra proposer des lois incitatives et des contreparties telles que l’accès à des services, du type formation professionnelle, soutien à l’investissement et à l’équipement ainsi qu’une meilleure relation contribuables-administration », suggère Alexandre Kateb.

L’économiste va plus loin. « L’amnistie fiscale est également une bonne solution pour faire rentrer tout le monde dans le rang. Pas de poursuites judiciaires, on remet les compteurs à zéro et on se dote d’un régime simplifié et adapté aux différentes entreprises. On ne peut plus demander aux PME le même effort que les grandes entreprises », poursuit-il.

SADDEK HAMLAOUI/SHUTTERSTOCK

Événements ALGÉRIE

directeur général du Crédit populaire d’Algérie (CPA) Omar Boudieb et l’exprésident de la Banque nationale d’Algérie (BNA) Aboud Achour sont en détention provisoire à la prison d’El Harrach, dans le cadre d’une enquête pour octroi de crédits dans des conditions douteuses.

Depuis, les entrepreneurs sont nombreux à demander une modernisation du secteur bancaire. Entre ouverture du capital et privatisation, le débat n’est pas encore tranché. « Les banques algériennes publiques ont des bilans négatifs, qu’elles maquillent. Depuis leur création, dans les années 1960, elles se sont trouvées plus de 70 fois en situation de faillite. À chaque fois, c’est l’État qui, par le biais des lois de finances, recapitalise ces établissements. On doit dire basta à ce système! » lance Nabil Djemaa. Selon lui, le dossier de la privatisation de la CPA et de la Banque de développement local (BDL), discuté en 2005, doit être rouvert. « À l’époque, le Crédit agricole devait entrer dans le capital de la CPA, mais l’opération a avorté à la dernière minute avec la flambée du prix du baril de pétrole, qui avait atteint la barre des 140 dollars. » Sans aller jusqu’à une privatisation totale, certains préfèrent une ouverture graduelle du capital des banques publiques. « L’État garderait une participation minoritaire et renoncerait à son pouvoir de contrôle. Il ne faut pas reproduire l’erreur de l’ouverture du capital de Saidal [leader du secteur pharmaceutique], quand l’État n’a lâché que 20 % de ses parts », estime un industriel. Pas certain que le nouveau gardien de l’ordre établi adhère.

Événements

DR

Mohamed Tozy

Politologue et sociologue marocain

Des limites du hirak

Il s’agit de mouvements à la fois modernes, en rupture avec le passé, et conservateurs, revendiquant un retour à la tradition. Modernes parce qu’ils portent une promesse d’affranchissement des liens communautaires. Libanais comme Irakiens se révoltent autant contre les élites corrompues que contre le communautarisme. Modernes parce que travaillés par des dynamiques de sécularisation et de sociétisation qui reconfigurent les formes de sociabilité, la place de la femme dans le couple, la structure de la famille. Ce processus non pensé et non assumé redessine les frontières du civisme et redéfinit les nouvelles responsabilités de l’État, de l’école, de la justice. Lequel État, mobilisant les ressorts fatigués de la légitimité traditionnelle, en est pour l’instant incapable.

En l’absence d’une révolution culturelle par et pour le plus grand nombre, le hirak ne peut être que dominé par un courant conservateur ou, à terme, porteur de populisme antipolitique, voire antidémocratique. Le débat au Maroc autour des questions des droits individuels a ainsi tourné court après la condamnation de Hajar Raissouni et la grâce royale qui s’est ensuivie. Cette dernière est intervenue autant pour dénouer la crise due aux dérives d’une justice

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marocaine largement conservatrice que pour clore un débat sur les libertés. L’élection en Tunisie de Kaïs Saïed est aussi symptomatique.

Le président, élu à plus de 70 % en dehors de tout parti, incarne cette modernité conservatrice. Il est l’individu assumé en marge des loyautés traditionnelles, mais aussi celui qui n’hésite pas à se déclarer pour la famille et contre l’égalité homme-femme dans l’héritage.

ADRIA FRUITOS POUR JA

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n ce jour de présidentielle en Algérie, ma plume me démange tant ce moment aussi attendu que craint peut nourrir les espoirs d’une accentuation des changements de cap au Maghreb après les élections en Tunisie. Je sais pertinemment que, quels que soient les résultats du scrutin, le président souffrira d’un déficit abyssal de légitimité. Mais cela peut permettre à l’Algérie – dans un scénario optimiste, mais improbable – une sortie par le haut.

L’arrivée d’un pouvoir civil faible incitera peut-être les militaires à regagner leurs casernes pour permettre au nouveau président de profiter d’un possible état de grâce pour négocier une transition crédible. On peut aussi s’attendre au pire, si les militaires appréhendent cet échec comme un affront autorisant l’accentuation de la répression. Dans tous les cas, il sera difficile d’opérer un retour en arrière.

On peut se demander si les hiraks au Maghreb, au Liban, en Irak, même en Égypte, annoncent le crépuscule des dictatures et la décrédibilisation des élites qui les ont soutenues, ou s’il s’agit simplement d’une sorte d’intifada sans lendemain. La réponse ne peut être que nuancée.

Les mouvements actuels donnent à voir des sociétés en mutation. En quelques années, on est passé de la logique de l’émeute à celle de la manifestation, dans laquelle la créativité et l’humour séculier sont des marqueurs forts. Il serait cependant illusoire d’y voir les prémices d’un mouvement démocratique homogène porté exclusivement par des valeurs de progrès et de liberté.

Une thèse récemment soutenue à Sciences Po Aix montre qu’en Égypte l’armée et les Frères musulmans partagent dans une relation d’ennemis intimes le même imaginaire politique conservateur.

L’étude analyse la diffusion d’une modernité particulière articulant raison d’État et raison de Dieu héritée du salafisme égyptien et portée par l’armée et les Frères musulmans. Elle montre que l’incapacité du hirak à déboucher sur un autre horizon que celui d’un autoritarisme moderne et conservateur vient d’un imaginaire partagé, où le pouvoir par la ghalaba (conception khaldounienne de la domination) est la résultante d’un rapport de force et non d’un consentement, que le secret est une modalité assumée de gouverner, et que l’opposition à toute fitna – même légitime – et l’obligation qui en découle de la réduire par la violence sont une obligation religieuse.

Finalement, le crépuscule annoncé des dictatures au vu des mouvements sociaux ne signifie pas toujours une demande de démocratie, et encore moins de changement dans les rapports sociaux.

ABIDJAN | ALGIERS | BARCELONA | CAIRO | CASABLANCA | VALLETTA

Rendements élevés et impact positif en Afrique

17,000 Emplois directs

5,000

Nouveaux emplois créés1

62%

Croissance annuelle des emplois occupés par des femmes2

1 Depuis 2008. 2 2017-2018.

TENDANCES

112 Entreprises Interview de Célestin Tawamba, président du Gicam

92 Maroc Étoiles politiques montantes 119 Société Pour le meilleur… et pour la galerie

104 Éthiopie Enfin la Renaissance ?

130 Musique Interview d’Amazigh Kateb

137 Sorties Ces rooftops qui montent

Le 28 septembre 2019, lors de la sixième Fashion Week de Kampala (Ouganda).

SUMY SADURNI / AFP

84 Afrique de l’Ouest Ce si long chemin vers la monnaie unique

Tendances

Cedeao Ce si long chemin vers la monnaie unique NADOUN COULIBALY, à Ouagadougou

on nom est désormais connu: eco.

Depuis plusieurs mois, un groupe de travail œuvre d’arrache-pied pour lui trouver un symbole, étape indispensable pour la mise en circulation de la monnaie unique des quinze pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

Fin octobre, six propositions de symbole avaient été ainsi retenues parmi plusieurs autres présentées par des designers venus du Bénin, de Côte d’Ivoire, du Ghana, du Nigeria et du Sénégal. C’est cette présélection qui devrait permettre aux ministres des Finances puis à la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao de procéder au choix final en tenant compte de deux principaux critères : la simplicité et l’originalité.

En attendant l’aboutissement de ce processus, les quinze États de la Cedeao ont entériné, à la mi-2019, le principe d’un régime de change flexible, d’une Banque centrale fédérale et du respect des critères de convergence que sont : un déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB, une inflation annuelle inférieure à 10 %, l’équivalent de trois mois d’importations en réserves de change et un strict encadrement du financement des États par la future Banque centrale. Autant de conditions contraignantes que seul le Togo avait respecté en 2019. Un an plus tôt, aucun des quinze pays membres de la Cedeao n’avait réussi à cocher toutes les cases. Ce qui, début décembre, en marge de la réunion du comité des ministres des Finances et

S

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jeuneafrique no 3076H

des gouverneurs des banques centrales de la Cedeao, a fait dire à la ministre nigériane du Budget, Zainab Ahmed, que l’échéance de 2020, prévue pour l’entrée en vigueur de cette monnaie unique, ne pourrait être tenue. D’ailleurs, au-delà des critères de convergence, plusieurs questions demeurent pour l’instant sans réponse. Elles concernent notamment le montant du capital de la future Banque centrale et le nom du pays qui accueillerait son siège. Une conférence des chefs d’État de la région, prévue pour le 21 décembre, devait définir une nouvelle feuille de route. Comment la création de la monnaie unique de la Cedeao pourrait-elle aboutir ? Qui seront les grands gagnants et les perdants de cette nouvelle union monétaire ? Et quel avenir pour le franc CFA ? Éléments de réponses.

Approche graduelle Alors que l’échéance de 2020 semble de plus en plus incertaine, Lassané Kaboré, ministre des Finances du Burkina Faso, est malgré tout optimiste. « La création d’une monnaie unique de la Cedeao contribuera à plus de croissance et de développement dans la région », affirme-t-il. D’après le grand argentier burkinabè, l’approche graduelle privilégiée par les dirigeants de la zone permet d’accélérer le projet, qui a été maintes fois repoussé depuis 1983. Cette stratégie échafaudée par la task force – pilotée depuis 2013 par les présidents suivants, Mahamadou Issoufou (Niger), Nana AkufoAdo (Ghana) et Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire) – permet en effet que seuls les

PRÉSIDENCE DU BÉNIN

Maintes fois repoussé depuis 1983, son lancement a été fixé à 2020. Mais cette nouvelle échéance sera-t-elle respectée?

Rien n’est encore joué.

Lors de la 55e session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao, le 29 juin, à Abuja.

pays respectant les critères de convergence démarrent cette monnaie unique. Ils pourront ensuite être progressivement rejoints par les autres membres de la communauté.

Combien seront-ils en 2020 à remplir toutes les conditions? Difficile à pronostiquer!

De même, s’il est encore hasardeux d’avancer avec certitude une date de mise en circulation de la monnaie fiduciaire, les experts s’accordent cependant à dire que, dès lors que le régime de change de la future monnaie régionale sera fixé, le reste devrait rapidement se mettre en place. « Nous misons d’abord sur la création, en 2020, de l’unité de compte fixant les parités irrévocables par rapport aux monnaies locales (franc CFA, naira, cédi, franc guinéen…), permettant d’autoriser les entreprises à ouvrir des comptes et à échanger en eco pour leurs transactions, sans recourir au dollar US ou à l’euro », avait expliqué le ministre burkinabè dans une interview à JA. Il s’agit concrètement de fixer un taux de change des monnaies locales des quinze pays membres par rapport à l’eco de sorte à avoir un panier de monnaies adossées à elle.

Ce processus, calqué sur le modèle européen de mise en place de l’euro, pourrait perdurer entre trois et cinq ans, le temps de basculer progressivement vers la nouvelle monnaie.

Qui perd, qui gagne?

L’enjeu de la future monnaie commune de la Cedeao est également géostratégique.

Une union monétaire, élargie au géant nigérian, suggère une dilution du poids économique de certains pays dans un ensemble régional plus vaste. Par exemple, la Côte d’Ivoire, qui pèse plus de 40 % de la masse monétaire de la zone Uemoa, pourrait être l’un des perdants. Cela expliquerait-il les réticences d’Alassane Ouattara lorsqu’il défend le fonctionnement actuel d’une monnaie attachée à l’euro, comme c’est le cas du franc CFA grâce à la parité fixe ? « Si nous empruntons des euros, au moment de les rembourser dans cinq ou dix ans, le taux est invariable. C’est au même taux que l’on rembourse », arguet-il, émettant ainsi des réserves sur le principe d’un régime de change flexible, préconisé par la Cedeao dans son projet de monnaie unique. « Si les pays de l’Uemoa n’ont pas de problème de dette, c’est grâce à (la) parité fixe (à l’euro) », a-t-il expliqué.

Le Nigeria, première économie du continent, qui représente 75 % du produit intérieur brut de la Cedeao, prône quant à lui un régime de change flexible. Le géant ouest-africain sera le grand bénéficiaire

L’ENJEU EST AUSSI GÉOSTRATÉGIQUE. UNE UNION MONÉTAIRE, ÉLARGIE AU GÉANT NIGÉRIAN, SUGGÈRE UNE DILUTION DU POIDS DE CERTAINS PAYS DANS UN ENSEMBLE RÉGIONAL PLUS VASTE.

jeuneafrique no 3076H

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de cette union monétaire dans la mesure où il pèsera près de 51 % de sa masse monétaire. D’ailleurs le naira nigérian est souvent considéré, à juste titre, comme probable monnaie d’ancrage de la future devise communautaire. Un peu comme ce qu’a été le deutsche mark dans le processus de création de l’euro. Reste que beaucoup d’entreprises rechignent encore à échanger avec ce pays en raison de leur méconnaissance du naira. Il faut dire que la politique de change de la Banque centrale est souvent critiquée, et le cours du naira varie souvent selon le lieu où il est changé. « L’arrivée de l’eco va dissiper ces peurs vis-à-vis d’un grand centre de consommation, en instaurant la confiance et en servant de tremplin pour tirer les autres économies vers le haut, comme l’Afrique du Sud le fait pour les pays d’Afrique australe dont les monnaies gravitent autour du rand », estime le ministre burkinabè.

Dans une étude récente sur l’union monétaire en Afrique de l’Ouest, les chercheurs canadiens Xavier Debrun, Paul Robert Masson et Catherine Pattillo confirmaient que le plus grand profit d’une monnaie régionale unique reviendra au Nigeria, la Côte d’Ivoire n’engrangeant que des bénéfices moyens.

Franc CFA, nouvelle version

Le franc CFA dans sa forme actuelle est un sujet épineux dans le processus de création de la monnaie de la Cedeao. Pour les dirigeants du Nigeria et du Ghana, la rupture du « cordon monétaire » qui lie le franc CFA à la France à travers l’euro est une condition sine qua non à la mise en place de l’eco. Alors que le débat, souvent houleux, sur la réforme du F CFA a donné un coup d’accélérateur au projet eco, la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO)a diligenté une étude de faisabilité et d’impact de la mise en place de la nouvelle monnaie unique ouest-africaine. La BCEAO, qui apporte 2 millions de dollars à l’Institut monétaire de l’Afrique de l’Ouest, implanté à Accra, dans le cadre de l’initiative eco, n’a cependant pas communiqué sur les conclusions de l’étude. Mais il ne fait aucun doute que celles-ci ont motivé la décision des huit chefs d’État de la zone Uemoa de ne pas précipiter les choses. « Ils

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PIERRE GLEIZES/REA

Tendances CEDEAO

Siège de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest - qui regroupe huit pays (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo) -, à Dakar.

LES ÉCONOMISTES L’AFFIRMENT : LE GRAND BÉNÉFICIAIRE DE LA MONNAIE RÉGIONALE UNIQUE SERA INDÉNIABLEMENT LE NIGERIA.

ont compris qu’il fallait procéder étape par étape, surtout dans ce contexte régional qui commande que l’urgence soit portée sur la sécurité », explique un connaisseur des arcanes de l’institution régionale.

En attendant, les dirigeants des huit pays dont la monnaie est aujourd’hui arrimée à l’euro semblent avoir opté pour une période transitoire qu’ils entendent mettre à profit pour réformer progressivement le dispositif qui régit le franc CFA. Ils ont abordé à huis clos cette délicate question, au début de décembre, à Dakar, à l’occasion du colloque « Développement durable et dette soutenable, trouver le juste équilibre », organisé par le Sénégal, le FMI, l’ONU et le Cercle français des économistes. Des annonces étaient attendues dans le cadre de la visite d’Emmanuel Macron à Abidjan du 20 au 22 décembre 2019.

Il n’y aura a priori pas de grandes surprises. La réforme la plus probable devrait consister à donner un nouveau nom au franc CFA durant cette phase transitoire vers l’eco. « En dehors de cela, nous ne voyons pas quelles autres réformes peuvent être menées. Toutes celles possibles l’ont été. De plus, cela

En Afrique, nous contribuons au dynamisme économique et social des territoires. Պ En proposant des services qui sont produits là où ils sont consommés ; Պ En privilégiant une logique de co-construction et de partage de la valeur ajoutée avec notre écosystème ; Պ En permettant à nos clients de s’engager dans des trajectoires durables et circulaires.

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des dépenses réinvesties sur les territoires

Afrique www.veolia.com/africa

Sommet extraordinaire des chefs d’État d’Afrique centrale, le 22 novembre 2019, à Yaoundé.

AFRIQUE CENTRALE : LA COOPÉRATION AVEC PARIS EN DÉBAT « Le statu quo serait de mauvais aloi », martelait Daniel Ona Ondo le 20 novembre. Lisant deux jours plus tard le communiqué du sommet de la Cemac, le président de sa commission soulignait la volonté des chefs d’État d’engager une réflexion sur les conditions et le cadre d’une nouvelle coopération monétaire avec la France.

Face au débat sur l’avenir du franc CFA, engagé notamment par le patronat camerounais et dans le monde universitaire, et au chantier de l’eco en Afrique de l’Ouest, les dirigeants d’Afrique centrale ne

pouvaient rester indifférents à la lame de fond. La Cemac et la BEAC ont donc été invitées à proposer « un schéma approprié ». À son arrivée à la tête de la Banque centrale commune, il y a deux ans, le Tchadien Abbas Mahamat Tolli a constitué une équipe de réflexion. « Nous étudions tous les scénarios possibles ainsi que les modalités de mise en œuvre », indique sans plus de précision un cadre de la BEAC, tout en ne faisant pas mystère de l’existence de plusieurs points sensibles. « Même un simple changement de nom risque de donner lieu à des foires

coûterait des milliards pour changer les billets en circulation », commentait une source institutionnelle. De même, le droit accordé à la France d’être présente dans les organes de contrôle et de décision de la BCEAO pourrait également être aboli. En somme, il s’agirait davantage de réformes symboliques et politiques. Plus complexe est la question de la gestion des réserves de change logées sur un compte d’opérations auprès du Trésor français.

Ici, plusieurs options sont envisageables.

Soit conserver la garantie française tout en réduisant progressivement la proportion

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d’empoigne », ajoute-t-il.

Au sein d’une institution où les discussions sur le F CFA agacent autant que les tribulations de l’eco amusent, la revue de la relation avec Paris ne peut ouvrir que deux pistes. La révision de la convention de coopération monétaire, déjà toilettée en 2014, pouvant toucher le compte d’opérations, notamment le niveau des réserves de change à y déposer et leur rémunération, ainsi que la présence française dans les organes de contrôle et de décision de la BEAC. « La garantie de convertibilité accordée par la France, qui est un atout

indéniable, a pourtant un prix qu’il faut payer. Cette présence est donc nécessaire », rappelle un autre cadre. Il ne faut pour autant pas s’attendre à des avancées dans les prochains mois. « La priorité est au redressement des économies de la zone avec l’appui du FMI. Les chefs d’État sont confrontés à de nombreuses contraintes économiques, politiques et sécuritaires. Les gérer est l’urgence du moment », fait valoir un haut fonctionnaire camerounais. La brèche sur le F CFA d’Afrique centrale est toutefois ouverte. C’est déjà un acquis…

OMER MBADI, à Yaoundé

des réserves de change [50 % aujourd’hui] déposées auprès du Trésor français. Soit rapatrier ces réserves vers la BCEAO, ce qui impliquerait de facto la suppression de la garantie française. Dans ces conditions, une parité fixe de la nouvelle version du franc CFA avec l’euro devrait directement être défendue par la BCEAO, à l’instar de ce que fait la Banque centrale cap-verdienne pour maintenir la parité fixe de l’escudo par rapport à l’euro. Ces réformes du franc CFA permettront-elles de mettre un terme aux polémiques récurrentes ?

Tout l’enjeu est là.

MABOUP

Tendances CEDEAO

COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

Centre de recherches pour le développement international 150, rue Kent, Ottawa ON Canada Tél. : (+1) 613 236 6163 Email : info@crdi.ca www.crdi.ca

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intelligence artificielle repré-

ment d’automatiser des emplois qui

sente un potentiel énorme

sont le gagne-pain de familles et de

pour améliorer les efforts de dé-

communautés entières.

veloppement en Afrique. Mais son développement et son utilisation

Fort de ses 50 ans d’expertise et

doivent être assurés par et pour

de présence en Afrique, le CRDI

les africains de manière éthique

soutient les experts Africains afin

et équitable.

qu’ils parviennent à mitiger les

Déjà, de jeunes entreprises afri-

bénéfices de l’IA.

impacts négatifs et à accroître les caines innovantes utilisent des plates-formes de téléphonie mobile

Avec eux, nous avons mis sur

à intelligence artificielle pour fournir

pied un réseau d’excellence de

Jean Lebel, Président, Centre de recherches pour le développement international (CRDI)

un accès aux services financiers à

l’intelligence artificielle en Afrique

des centaines de millions d’Africains

Subsaharienne. La mission de ce

qui n’ont pas accès aux banques tra-

groupe d’experts est de produire et

ditionnelles. En agriculture, l’IA est

d’échanger des données probantes

utilisée pour soutenir la gestion de

pour mettre l’IA au service de l’at-

l’eau au Moyen-Orient. En Ouganda,

et dans les Caraïbes. Partout, nous

teinte des objectifs de développe-

appuyons le développement des

des agriculteurs utilisent des outils téléphoniques mobiles pour l’identification et le suivi automatisés des infestations des cultures.

Toutefois, l’IA a aussi le pouvoir

outil pour favoriser la collaboration sud-sud. Elle inclut plus de 600 acteurs de l’IA en Afrique, au Moyen Orient, en Asie, en Amérique latine

L’Afrique doit s’approprier l’intelligence artificielle pour en maximiser les bénéfices et en mitiger les risques.

d’exacerber les préjugés sociaux,

ment durable de l’ONU, de la lutte

capacités afin d’assurer l’employabi-

désavantageant ceux qui sont déjà

contre la pauvreté à l’instauration

lité des jeunes dans cet écosystème

les plus marginalisés de nos socié-

de la paix, en passant par l’égalité

qui façonnera les emplois de demain.

tés. Elle décuple les capacités de

entre les sexes et la lutte contre

surveillances portant ainsi atteinte

les changements climatiques,

La population de l’Afrique devrait

à la vie privée en accumulant des

entre autres.

doubler d’ici 2050 pour avoisiner

données qui permettent aussi de faciliter et d’automatiser de vastes campagnes de propagande et de manipulation. Elle menace égale-

les 2,5 milliards de personnes. Pour Le CRDI a aussi soutenu la création

toutes ces communautés, l’intelli-

d’une carte de l’écosystème de l’IA

gence artificielle doit être africaine,

dans les pays du Sud qui se veut un

éthique et équitable.

Tendances

Consultant en stratégie

L

Comment éviter le bras de fer financier en Afrique centrale

ADRIA FRUITOS POUR JA

a Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) est rarement accusée d’excès de zèle, de volontarisme ou de détermination dans son rôle de régulateur. C’est pourtant le reproche qui lui est fait depuis le renforcement de sa réglementation sur le contrôle des changes, datée du 21 décembre 2018. Dans les faits, cette réglementation ne fait que rappeler et préciser des principes déjà édictés, mais non appliqués, par les opérateurs de la Cemac. Elle donne obligation aux banques d’utiliser leurs propres devises, placées sur leurs

comptes chez leurs correspondants à l’étranger, pour compenser les opérations de transfert d’argent hors zone Cemac de leurs clients.

Historiquement, ces établissements sollicitaient les réserves de la BEAC et conservaient leurs propres devises à l’étranger, comme une garantie de non-surexposition aux risques monétaires de la zone, au détriment des réserves de la Banque centrale. Pour les entreprises privées, en particulier pétrolières et minières, la réglementation rappelle l’obligation de rapatriement et de domiciliation sur des comptes bancaires locaux de leurs recettes d’exportation, soit des milliards de dollars dont le système monétaire d’Afrique centrale ne voit pas la couleur. Ces deux mesures ont pour objectif commun de renforcer les réserves de change de la BEAC, chargée de soutenir la valeur de la monnaie et d’éviter une dévaluation forcée. Et les

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DR

Emmanuel Leroueil

jeuneafrique no 3076H

premiers résultats sont encourageants. À la fin de juin, les rétrocessions de devises étaient en hausse de 150 % par rapport au premier semestre de 2018, tandis que le compte d’opération de la BEAC se situait à 3457 milliards de F CFA [5,27 milliards d’euros], en progression de 35 % par rapport à décembre 2017.

Ces réformes n’ont pas manqué de susciter des résistances.

Certains opérateurs considèrent l’obligation de domiciliation et de rapatriement des recettes d’exportation inapplicable et contraire à la libre circulation des capitaux, voire aux dispositions des codes pétroliers et miniers ou aux conventions d’exploitation. Les États de la Cemac, eux, redoutent une baisse de leur attractivité. Mais la BEAC reste décidée à appliquer sa réglementation. Tous les ingrédients d’un bras de fer inopportun et au résultat incertain sont réunis.

Une solution médiane est pourtant envisageable. Elle consisterait à ne rapatrier dans un premier temps que les « provisions obligatoires » – c’est-à-dire les réserves obligatoires prévues pour la réhabilitation des sites pétroliers et miniers à la fin de leur exploitation. À l’échelle de la zone, ces provisions dépassent 3 milliards de dollars, soit près de la moitié des avoirs extérieurs de la BEAC. Si la réglementation prévoit que ces provisions peuvent être logées dans un compte séquestre à la BEAC ou dans une banque notée AAA, les opérateurs les confient le plus souvent à des banques internationales et y recourent pour leur gestion de trésorerie interne. Faire domicilier ces ressources à la Banque centrale serait un grand pas en avant et renforcerait les réserves de change sans perturber les équilibres économiques ni les intérêts stratégiques des industries. Une telle réforme servirait également la politique patrimoniale des États. En effet, des règles similaires à celles du secteur des assurances pourraient être appliquées à ces ressources dormantes, avec 50 % des fonds gelés en réserves techniques obligatoires et 50 % placés dans des produits financiers peu risqués. Les États pourraient s’en servir pour racheter une partie de leur dette extérieure ou financer des projets majeurs d’intégration (boucle ferroviaire, désenclavement des zones à fort potentiel minier…).

Tous les acteurs sortiraient gagnants avec cette solution médiane.

La Banque centrale renforcerait ses réserves de change. Les États disposeraient de ressources nouvelles pour racheter une partie de leur dette et pour financer leur développement. Quant aux sociétés minières et pétrolières, elles bénéficieraient d’infrastructures renforçant la compétitivité de leurs opérations en Afrique centrale.

Tendances

Maroc Étoiles politiques montantes

Ils sont engagés, ambitieux, et soutenus par leurs aînés. Portrait de ces nouvelles figures qui, au Parlement, dans les partis ou les ministères, veulent rapprocher les citoyens de la chose publique.

JULES CRÉTOIS

e n’est pas toujours facile d’être écouté par nos aînés quand on débute en politique », admet Imane Benrabia, élue de 35 ans du plus vieux parti du pays, l’Istiqlal. Les compétences de la jeune femme sont pourtant toujours plus mises à profit par le secrétaire général de la formation, le quinquagénaire Nizar Baraka. Imane Benrabia est l’une des rares députées à s’emparer de questions telles que l’écologie et le développement durable : « Certains sujets touchent plus une classe d’âge que d’autres. Les directions des partis, si elles sont attentives, le remarquent. » Une façon de renvoyer à une critique récurrente adressée à la classe politique: par sa composition, elle serait déconnectée d’une société dont l’âge médian se situe autour de 30 ans. Or, aujourd’hui, seuls 14 % des membres du Parlement sont plus jeunes que cette moyenne. En outre, en 2017, à peineplusde30 %des18-24ansétaient inscrits sur les listes électorales. Le désintérêt des jeunes citoyens pour l’exercicedémocratiqueposeunequestion lancinante à laquelle il est souvent proposé de répondre par une représentation accrue des moins de 50 ans.

Depuis 2011, un effort a été fait en ce sens: la loi électorale réserve 30 des 395 sièges à des jeunes grâce à un système de « listes nationales » (déjà employé pour assurer une représentation minimale des femmes). En revanche, rares sont les moins de 50 ans à la tête de ministères ou de partis. Le plus jeune ministredugouvernementOthmaniII, formé en 2019, est Mohamed Amekraz. À 34 ans, le dirigeant de la jeunesse du

«

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C

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Parti de la justice et du développement (PJD) ne s’attendait pas à être appelé au ministère du Travail par le chef du gouvernement, à qui il avait donné du fil à retordre au sein du parti islamiste. « Mohammed VI m’a recommandé de proposer un profil issu des jeunes de notre parti », a expliqué Saadeddine El Othmani.

À l’école de la Chabiba

Mais cette volonté de faire émerger des jeunes a-t-elle donné les résultats escomptés? Les « espoirs » des partis, une fois en fonction, se montrent-ils vraiment plus connectés à la jeunesse de leur pays? Mohamed Amine Faïz, membre du bureau de Tizi, association qui prône l’engagement politique des jeunes sans se donner d’étiquette, se veut nuancé : « Quand on regarde bien, les jeunes députés ne sont pas spécialement plus assidus que leurs aînés… En revanche, certains abordent d’autres questions que leurs aînés. » L’écologie par exemple, comme le fait Imane Benrabia. Dans l’Hémicycle, c’est aussi Ibtissam Azzaoui, 28 ans, membre du bureau politique du Parti Authenticité et Modernité (PAM), qui aura la première prononcé les mots « crowdfunding » ou « cryptomonnaie ». Mais la timidité politique n’est pas une question d’âge. La société civile non partisane porte toujours avec plus d’aisance un certain nombre de sujets. En amont de l’adoption d’un nouveau service militaire en 2018, c’est Tizi qui a organisé deux débats sur le sujet avec des militants des organisations de jeunesse des partis.

Le rôle de ces branches jeunesse, d’ailleurs, divise. Certains vantent leurs mérites, les décrivent comme

de « bonnes écoles ». D’autres, comme Mohamed Amine Faïz, passé par la Chabiba ittihadia de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), l’une des plus puissantes organisations de ce type, relève: « Elles n’ont pas vraiment d’indépendance ni de force, elles sont là pour diffuser le point de vue du parti, pas plus. » Beaucoup s’accordent à dire que la jeunesse du PJD est la seule capable de faire émerger des leaders, de par son indépendance et son influence. Mohamed Amekraz ne dira pas le contraire : élu à la tête de la jeunesse islamiste en 2018, il est devenu ministre en 2019.

Il faut aussi souligner que la sensibilité politique – et parfois la fonction – se transmet comme un héritage. Au sein de l’Istiqlal, deux anciens chefs qu’a priori tout oppose – Abbas El Fassi, appartenant à la vieille notabilité fassie, et Hamid Chabat, syndicaliste tonitruant – ont envoyé leurs jeunes fils au Parlement. Quant à la cadette de l’institution, Wiam Lamharchi, du PAM, elle représente une région dans laquelle son père est déjà un important élu local.

C’est donc assez logiquement dans la société civile que l’on retrouve le plus de jeunes, issus de tous les milieux, avides d’actions sociales et d’engagement civique. Le nombre

AUJOURD’HUI, SEULEMENT 14 % DES MEMBRES DE L’HÉMICYCLE ONT MOINS DE 30 ANS.

DAVID RODRIGUES POUR JA

d’associations actives dans le pays est d’ailleurs édifiant : 130 000 en 2016. Ces structures non partisanes permettent à de jeunes talents, souvent diplômés, d’émerger. On peut ainsi évoquer, à droite, le Cercle des patriotes (créé en 2018), think tank proche du Rassemblement national des indépendants (RNI), animé entre autres par Ghassane Benchekroun, quadragénaire invité sur des plateaux de télévision pour parler, par exemple, du modèle de développement marocain. À gauche, des anciens de la jeunesse socialiste ont monté Anfass (« Souffles »), dans la foulée du mouvement du 20 février 2011. Le fondateur et ancien président de l’association, le trentenaire Mounir Bensalah, est devenu, en 2019, secrétaire général du Conseil national des droits de l’homme (CNDH). Anfass propose un discours connecté aux attentes de toute une jeunesse sur la culture ou les libertés individuelles.

Collectivités locales

Mais quelle que soit l’influence de ces structures, c’est toujours au sein des institutions que les décisions se prennent. Faute de pouvoir accéder à la fonction de député, certains entrent en politique par le biais des collectivités locales, aux pouvoirs renforcés.

C’est le cas d’Omar El Hayani, quadra élu au conseil de la ville de Rabat qui allie la précision d’un technocrate aux valeurs de gauche. Considéré comme une étoile montante de la Fédération de la gauche démocratique, on l’entend de plus en plus souvent sur les radios nationales, notamment à propos de la réforme de l’enseignement.

Le développement des métiers liés à la communication politique, enfin, suscite aussi des vocations. Le quadragénaire Anouar Zyne, ancien patron de la jeunesse de l’Union constitutionnelle (UC), a travaillé étroitement avec le chef du gouvernement islamiste El Othmani. Omar Alaoui, figure médiatique passée par le PAM, s’est également mué en communicant, épaulant notamment Salaheddine Mezouar quand ce dernier dirigeait le syndicat patronal.

Amina Mae EL AININE

S

a « tribune » publiée sur son compte Facebook en septembre 2019 en réaction à l’ouverture du procès de la journaliste Hajar Raissouni n’est pas passée inaperçue : l’élue du Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste) y appelait à la mise en place d’un « dialogue interne serein » sur les libertés individuelles. Pas vraiment le sujet avec lequel les islamistes sont le plus à l’aise. La jeunesse du parti lui a d’ailleurs répondu vertement, prouvant une nouvelle fois que jeunesse et « progressisme » ne riment pas forcément. La saillie de la députée a-t-elle à voir avec ses propres mésaventures? Au début de 2019, elle a été violemment attaquée après la fuite de photos la montrant sans voile lors d’un séjour en France. Une petite affaire médiatique qui a eu valeur de test: la jeune militante sait s’opposer frontalement aux cadors de sa formation. À Mustapha Ramid, ministre des Droits de l’homme et figure islamiste de premier plan qui avait déclaré : « Les électeurs [ont] voté pour elle alors qu’elle portait le voile : elle n’a pas le droit de l’abandonner », elle avait rétorqué: « Ça ne regarde aucunement le parti. » En 2011 déjà, elle bravait le secrétaire général Abdelilah Benkirane en manifestant aux côtés du Mouvement du 20-Février. Quelques années plus tard, elle soutient le même Benkirane contre Saadeddine El Othmani au poste de secrétaire général et déstabilise franchement ce dernier.

Septième vice-présidente du Parlement, elle préside souvent les séances de questions orales retransmises sur les chaînes nationales où sa franchise et son habileté lors des débats font l’unanimité: elle a mouché des « durs à cuire », comme l’intellectuel berbériste Ahmed Assid, habitué à en découdre avec les islamistes.

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DAVID RODRIGUES POUR JA

Tendances MAROC

Hasnaa ABOUZAID

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est l’une des figures féminines les plus influentes à gauche. Militante entrée en 2005 à l’Union socialiste des forces populaires (USFP), elle en est devenue une frondeuse quelques années plus tard et a même hésité, en 2017, à se présenter contre Driss Lachgar, le patron du parti. Classée « au centre » de sa formation, elle plaide ensuite pour un virage à gauche sur fond de critique sociale, espérant contrer à la fois les islamistes et les partis traditionnels. Entrée en 2011 au Parlement, elle s’y était fait remarquer par la clarté de son discours féministe et sa bonne connaissance de dossiers épineux, comme celui de la santé (elle est pharmacienne de formation). Elle n’hésitait pas à tenir un discours de gauche pour mieux battre en brèche l’argumentaire islamiste: à

propos du Code pénal, qu’elle considère comme liberticide, elle rappelait qu’il était d’inspiration plus coloniale qu’islamique. À 43 ans, elle suit des études à la faculté de Rabat. Droit public, finances et administration : Hasnaa Abouzaid est patiente, et compte bien durer en politique.

Dans d’autres formations de gauche, on nous confie : « Avec elle à la tête du parti, des alliances seraient possibles. » La socialiste est aussi une figure de sa région, le Sahara. Attaquée par les voix conservatrices sur le sujet de la cause nationale, elle en est pourtant une partisane audacieuse mais pragmatique. En 2019, avec un think tank de la gauche radicale, le Centre de recherche Bensaïd Aït Idder, elle prépare un rapport sur le Sahara et l’intégration maghrébine.

Othman EL FERDAOUS

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PHOTO ID OEF

I

l aura eu ce privilège : être le « benjamin » d’une équipe gouvernementale – il a été secrétaire d’État auprès du ministre de l’Industrie, chargé de l’investissement entre 2016 et 2019. Un pari – casser un peu le clivage entre technocrates et militants – qui était aussi son principal atout. Une personnalité de gauche glissait à Jeune Afrique lors de la nomination de ce multidiplômé (notamment de l’ENA à Paris): « Il a une réelle indépendance d’esprit et un attachement aux valeurs démocratiques. Il a une vision, pas juste du savoir-faire technique. » Et nombreux sont ceux qui soulignent son exceptionnelle culture générale. Le jeune homme, qui cultive volontiers la discrétion, est en effet d’une grande précision, et ses marottes vont de l’économie numérique à l’histoire islamique et amazighe. Lui aussi a évolué sous des auspices prometteurs : son père est l’un des fondateurs de l’Union constitutionnelle (UC), parti libéral dont il est membre. Et c’est un « ancien », Mohamed Sajid, maire de Casablanca pendant plus de dix ans et éphémère ministre du Tourisme, qui avait soufflé son nom lors de la composition du gouvernement.

Mengo Kundji Bindi (MKB) II : Un projet congolais ambitieux L’objectif de la Direction générale de la SNPC sur le permis MKB II est de relancer les travaux pour atteindre une production de 30.000 barils/jour à l’horizon 2021.

Production : Exploitation : Co-Operateur : Démarrage : 500 Barils/jour :

Pétrole Onshore SNPC - ORION MKB en 2012, MKB II en 2019 Plateau de production de Kundji 1

L’ambition première de monsieur Maixent Raoul OMINGA est celle de faire de la SNPC, une société opératrice à part entière car à ce jour, la SNPC est tributaire des actifs opérés par d’autres, à savoir 95% du chiffre d’affaires.

Le permis d’exploitation Mengo Kundji Bindi II (PEX MKB II) est situé dans le bassin côtier onshore de la République du Congo, il a une superficie de 699,838 km2. Il est composé de 3 gisements, Mengo, Kundji et Bindi, situés respectivement à 15 km, 20 km et 25 km du terminal pétrolier de Djeno.

Les champs les plus proches sont: Mboundi, Kouakouala, Loufika et Banga-Kayo.

Le potentiel de MKB II est estimé à ce jour à près de 3 milliards de barils de pétrole en place dans la formation des Grès de Mengo et le nouveau plan de développement inclue le forage de près de 120 puits qui seront répartis entre les gisements de la zone. Ce plan de développement va aussi valoriser le potentiel profond de MKB II, évalué à ce jour à près de 2 milliards de barils en place dans les formations ante-salifères du Vandji et du Djeno.

SNPC, SOURCE D’ENERGIES www.snpc-group.com

Tendances MAROC

Mehdi MEZOUARI

T

DAVID RODRIGUES POUR JA

entera-t-il de prendre la direction du parti ?

L’intéressé ne répond pas par l’affirmative… mais ne dit pas non. Pour le moment, il reste un fidèle du secrétaire général de son mouvement, l’Union socialiste des forces populaires (USFP), pourtant très décrié. Neveu de militants de l’Union nationale des étudiants marocains (Unem), Mezouari entre au parti alors qu’il est encore adolescent. À cette époque, l’USFP est un appareil qui n’a pas d’égal dans le champ politique marocain. Comme d’autres « jeunes » de la classe politique, il a fait ses armes dans la Chabiba, dont il a été responsable national en 2009.

Son entrée au Parlement, en 2011, il la doit aux listes nationales des jeunes. En 2017, alors que l’écologie politique peine encore à mobiliser les Marocains, Mezouari est élu local à Mohammedia (à 25 km de Casablanca) et mène la fronde pour que l’usine de l’ONEE cesse de déverser des particules de charbon sur la plage.

Le quadra a-t-il les épaules pour peser dans les années à venir ? Son CV de militant formé à la vie bureaucratique laisse à penser que oui. Sa proximité avec des personnalités célèbres, comme l’ancien Premier ministre de Hassan II, Abderrahmane Youssoufi, aussi – il est d’ailleurs à l’origine de la création d’une fondation portant le nom de ce dernier. Mais sa candidature aux législatives de 2016 s’est soldée par un échec. À croire que son principal souci est d’appartenir à une formation brutalement sortie des écrans radars ces dernières années.

Fatima-Zahra MANSOURI

DAVID RODRIGUES POUR JA

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ujourd’hui, il est clair que la présidente du conseil national (le parlement interne) du Parti Authenticité et Modernité (PAM) peut, si elle le souhaite, ambitionner d’en devenir la prochaine secrétaire générale. Elle ne cache plus son opposition nette à l’actuel leader de la formation, Hakim Benchamach. Ancien édile de Marrakech, cette quadra dont le père a été pacha de la cité, peut se targuer d’avoir été l’une des rares présidentes de commune à ne pas être épinglée par la Cour des comptes, parvenant même à renflouer les caisses d’une ville longtemps très mal gérée. On lui prête une forte capacité de travail, et sa formation de juriste lui assure une approche pragmatique des dossiers courants. Durant son mandat à la tête de la Ville ocre, elle s’est endurcie : à peine élue en 2009, elle voyait le résultat du scrutin contesté. À deux reprises, en 2011 et en 2017, la rumeur l’a dite sortante du PAM. À chaque fois, elle a déjoué les pronostics. Après s’être faite discrète dans le parti et l’Hémicycle (c’est son deuxième mandat de députée), elle a organisé son come-back en 2018. Pour beaucoup, sa place n’est pas simplement dans le PAM, mais à sa tête.

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DR

Tendances MAROC

Mehdi BENSAÏD

L

ors de son entrée en politique, Mehdi Bensaïd avait attiré l’attention pour une raison simple : son affiliation au Parti Authenticité et Modernité (PAM) ne collait pas à celle de ses parents, militants d’extrême gauche. Son apprentissage politique s’est d’ailleurs doublé d’un autre, plus littéral : peu porté sur l’arabe, une langue essentielle pour le travail parlementaire, le jeune

élu, scolarisé en France parce que son père était réfugié politique, s’est attelé à l’apprendre. En 2011, Bensaïd est largement critiqué par des gens de son âge, partisans du Mouvement du 20-Février : délaissant la rue, il a choisi de se former au sein d’une association volontiers libérale, le Cercle des jeunes démocrates marocains, qui ne tarde pas à fournir des troupes au PAM. Une fois au Parlement, où il entre grâce aux listes nationales des jeunes, il fait très tôt parler

de lui : c’est notamment à son initiative que le débat sur la production de cannabis thérapeutique et industriel s’est invité dans l’institution. Son accès à la présidence de la commission des affaires internationales à l’âge de 29 ans a suscité des moqueries. Aujourd’hui élu d’une commune de Rabat, il veut permettre aux citoyens d’interpeller les élus locaux grâce au numérique. Et dans son parti, en proie aux divisions, il fait partie des voix qui comptent.

Hamza HRAOUI

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os hommes politiques n’ont plus le choix, ils doivent moderniser leur communication », écrivait Hamza Hraoui dans une tribune publiée en 2014 dans le Huffington Post Maghreb. Quelque temps plus tard, on retrouve ce Franco-Marocain auprès de La République en marche (LaRem), le parti du président Emmanuel Macron. Hamza Hraoui participe à la campagne auprès des Français de l’étranger. Mais c’est au Maroc que ce jeune communicant s’engage finalement à fond.

L’expérience « En marche » semble avant tout avoir été pour lui une formation express au militantisme. Au début de 2019, il crée Maan (« Ensemble »). Le principe : bâtir un mouvement qui ne soit pas formellement un parti mais qui semble destiné à le devenir. Difficile d’imaginer ce réseau de jeunes cadres très urbains s’implanter durablement dans les zones rurales, qui constituent encore un gros réservoir de votes. Mais, dans les villes, les militants de Maan pourraient faire office de boîte à idées et booster des candidatures, de droite comme de gauche, autour de valeurs fédératrices comme la reddition des comptes ou la transparence.

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jeuneafrique no 3076H

BRUNO LEVY POUR JA

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Omar BALAFREJ

DAVID RODRIGUES POUR JA

E Mbarka BOUAIDA

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lors que la classe politique marocaine reste très majoritairement divisée, de façon binaire, entre « francophones » et « arabophones », cette quadragénaire se distingue avec son MBA de l’université de Hull, à Londres. Une formation anglo-saxonne qui, comme elle l’a expliqué à Jeune Afrique, lui a aussi permis de découvrir un « libéralisme » et un « souci de la pédagogie » qui l’agréent. Cependant, la jeune présidente de région – elle a été la première femme à le devenir – n’a rien d’un ovni.

Sa famille est influente au Sahara depuis des générations, et son père est l’un des fondateurs du Rassemblement national des indépendants (RNI), dont elle est devenue une figure importante. Elle raconte qu’elle a appris la lecture avec la presse du parti.

Comme beaucoup de jeunes talents, Mbarka Bouaida a joui d’une sorte de parrainage pour s’imposer en politique: celui de Salaheddine Mezouar, dont elle a été ministre déléguée lorsqu’il était aux Affaires étrangères.

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Omar IHARCHANE

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vec d’autres, son « frère » HassanBennajeh notamment, il incarne le nouveau visage d’Al Jamaa Adl Wal Ihsan (« Justice et Bienfaisance »), l’organisation islamiste d’inspiration confrérique qui reste à l’écart de la politique parlementaire. Universitaire trilingue, plus anglophone que francophone, il

discute volontiers avec des militants amazighs ou gauchistes et anime une page Facebook très suivie, tout comme celle de Hassan Bennajeh. Ces « quadras adlistes » compteront dans l’arène politique profane: bien plus que le guide discret de la Jamaa, le cheikh Mohamed Abbadi, ils ont des contacts dans la presse, dans la société civile, à l’étranger, et représentent une « élite islamiste » souvent issue de la classe moyenne supérieure.

Ingénieurs, avocats, sociologues ou communicants, ces urbains connectés sont soutenus par une organisation qui a pris le virage numérique avec sérieux, mais dont le rayonnement est très modeste comparé à celui du Parti de la justice et du développement (PJD).

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st-ce une question de génération ? Omar Balafrej compte sans doute parmi les élus les plus connectés du Parlement.

Chaque semaine, il présente son activité dans des vidéos en ligne. Ce député de gauche, centralien passé par le holding royal ONA, a été, il faut le dire, à bonne école: de 2008 à 2016, il a dirigé le Technopark de Casablanca, qui aide à la création et au développement des entreprises du numérique. Au sein de cet incubateur de la capitale économique, Balafrej a fréquenté une jeunesse novatrice et volontiers rebelle : il a ouvert le lieu à une association musicale et culturelle urbaine, Le Boulevard. Quand il présidait la Fondation Abderrahim Bouabid, un think tank de gauche, il avait déjà impulsé une « FabTV » online. Entre sa démission de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) et son mandat à la Fédération de la gauche démocratique (FGD), il aura passé quelques années au sein d’une boîte à idées socialedémocrate et non partisane, le CAC (Clarté, Ambition, Courage). Dans ce cadre plus souple, il a continué à fréquenter la jeunesse. Il est un des deux seuls députés à avoir voté contre la conscription obligatoire en 2018. Un acte parmi d’autres pour un député très assidu, mais qui n’a pas échappé à de nombreux jeunes électeurs. Il est aussi membre du conseil de la ville, à Rabat.

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Tendances

DR

Didier Gauvin

Docteur en sciences politiques, analyste politique à New York

Elizabeth Warren et le plafond de verre

a vu en Elizabeth Warren celle qui allait enfin faire sauter le plafond de verre qui a jusqu’à présent empêché une femme d’accéder à la tête de la première puissance mondiale.

Issue d’une famille modeste de l'Oklahoma, la petite Elizabeth voit la crise cardiaque qui frappe son père obliger sa mère à travailler comme vendeuse à près de 50 ans, sans que cela leur évite de perdre leur voiture – et presque leur logement. Élève boursière devenue professeure à Harvard, Warren incarne à merveille le rêve américain.

Son histoire explique aussi la profondeur de son engagement en faveur des classes populaires. Spécialiste du droit des faillites, elle a joué un rôle central auprès de Barack Obama dans la création du Bureau de protection des consommateurs et a lutté pied à pied pour imposer une réglementation contraignante à Wall Street afin de limiter « les excès de la finance ». En Europe, son combat la ferait aisément passer pour une socialiste – ce qu’elle ne revendique pas, contrairement à Bernie Sanders.

Féministe et de gauche, elle remplit presque toutes les cases du politiquement correct, excepté peut-être celle de ses origines: celle que Trump appelle « la Pocahontas » n’a pas réussi à se faire accepter comme d’ascendance indienne par les chefs des tribus natives, ce qui aurait été un atout décisif pour son image. Jouissant de la sympathie générale des médias, contrairement à son rival Joe Biden, homme blanc et âgé, elle a côtoyé cet automne les scores de l'ancien vice-président de Barack Obama, favori dans les sondages. Mais son étoile est en train de pâlir. Alors qu’elle tardait à expliquer le financement de son projet Medicare for All, Hillary Clinton et Barack Obama ont exprimé des doutes sur son plan de couverture santé financé par l’État, expliquant qu’il eût été plus sage de sa part de vouloir bâtir sur ce qui existait déjà, c'est-à-dire de renforcer l’Affordable Care Act que les républicains, malgré tous leurs efforts, n’ont jamais réussi à abolir.

Redécouvrant le caractère populiste de sa proposition, les journaux se sont pris à douter de sa candidature.

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Les barons démocrates craignent également qu’un candidat trop à gauche effraie la majorité des électeurs dans l’affrontement final face à Trump et peine à gagner le collège électoral. La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a ainsi avoué être mal à l’aise avec une candidate qui promettait le Medicare for All. Le problème du parti est que l’urgence de battre le président l’empêche de s'interroger sur le projet à envisager pour l’Amérique post-Trump: s’agit-il juste de rétablir une présidence « normale », renouant avec la politique américaine traditionnelle, ou d’engager une transformation structurelle de la société – par exemple en réformant le système

ADRIA FRUITOS POUR JA

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lizabeth Warren peut-elle vaincre Donald Trump et devenir la première présidente des États-Unis? Des quatre femmes présentes parmi les dix-huit candidats à l’investiture du parti démocrate, seule la sénatrice du Massachusetts est en position d’être élue face à un président empêtré dans une procédure de destitution – les enquêtes lui donnant l’avantage dans un duel contre Trump (sondage Quinnipiac du 10 décembre, 50 % contre 43 %). Après l’échec inattendu de Hillary Clinton en 2016, l’Amérique

d’assurance-santé? Peut-on continuer à ignorer la question posée par Sanders et reprise par Warren: un pays aussi riche que les États-Unis peut-il continuer à ne pas garantir une assurance-santé minimale à l’ensemble de sa population?

Les derniers sondages placent la sénatrice de plus en plus régulièrement en troisième position, derrière Bernie Sanders. Pourrat-elle retrouver une dynamique? Même si l’issue de la course est incertaine, ce sera difficile. Un éventuel échec d’Elizabeth Warren à l’investiture démocrate, et donc à la présidence, reposerait avec force la question du plafond de verre dont sont victimes les femmes.

Tendances

Éthiopie Enfin la Renaissance ?

Addis-Abeba maintient la pression pour que le barrage sur le Nil bleu produise ses premiers kilowattheures d’ici à la fin de 2020. Et pour trouver un compromis avec ses voisins.

VINCENT DUBLANGE, à Addis-Abeba

bbay, Abbay » dit la chanson.

De sa voix psalmodiante, l’artiste Gigi semble supplier le Nil bleu – son nom international – de ralentir sa course tumultueuse vers l’ouest puis vers le nord; de devenir enfin autre chose que « la richesse du désert ». Car, bien que 86 % de ses eaux proviennent des hauts plateaux de l’Éthiopie, c’est bien les plaines sèches d’Égypte qui sont le « don du Nil » célébré dans l’Antiquité par l’historien grec Hérodote. La rivière Abbay, principal affluent du plus grand fleuve du monde, a longtemps été le paradoxe douloureux d’une Éthiopie moderne marquée par les sécheresses et les famines.

Tout a changé en février 2011 lorsque, devant le Parlement, le défunt Premier ministre Mélès Zenawi a annoncé la construction du barrage de la Renaissance éthiopienne. Dès le mois d’avril, l’ancien maquisard marxiste pose, casquette rouge sur la tête, la première pierre du futur plus grand ouvrage hydraulique d’Afrique en matière de production d’énergie. Dès lors, « la musique, la culture populaire, ont complètement évolué. Il y a désormais une glorification du barrage », raconte Wondwosen Michago, un universitaire éthiopien qui travaille depuis Lund, en Suède, sur cette « émotion collective » que sont les ouvrages

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hydrauliques. De l’Espagne de Franco à l’Égypte de Nasser en passant par les États-Unis de Roosevelt, « les barrages ont toujours été utilisés comme outils de construction nationale ».

Tournois sportifs

Avec son projet censé produire plus de 15 000 GWh par an, l’Éthiopie ne fait pas exception. Puisque la Banque mondiale a refusé de s’impliquer dans une histoire potentiellement conflictuelle à l’échelle régionale, le gouvernement de la République fédérale a annoncé son intention de le financer par ses propres moyens. Les fonctionnaires ont donné de leur salaire, la diaspora a acheté des obligations d’État, des tournois sportifs, des loteries et des expositions ont servi à réunir les 3,8 milliards de dollars initiaux, une somme depuis dépassée (lire p. 108). Aujourd’hui, personne ne peut prétendre faire abstraction de ce projet phare, à l’intérieur du pays – il met d’accord chaque pan de la complexe société éthiopienne – comme à l’étranger.

Arrivé au sommet de la coalition qui dirige le pays depuis 1991, l’actuel Premier ministre, Abiy Ahmed, est pourtant d’abord resté sur la réserve.

Et ce malgré une visite sur le site, à quelques kilomètres de la frontière soudanaise, en mai 2018. « Il y avait une composante politique dans tout cela, cela faisait partie d’une stratégie globale pour se distancier de

La capacité de production annuelle de l’infrastructure doit atteindre à terme plus de 15 000 GW.

l’héritage du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), décrypte William Davison, analyste senior de l’International Crisis Group (ICG).

Mais ces derniers mois, le Premier ministre ayant consolidé son propre pouvoir, ce besoin s’est fait moins pressant, et l’État éthiopien a repris son discours habituel sur l’intérêt national à propos du barrage. » Avec une population de 115 millions d’habitants en 2020, le géant de

TIKSA NEGERI/REUTERS

DE L’ESPAGNE DE FRANCO À L’ÉGYPTE DE NASSER, LES BARRAGES ONT ÉTÉ UTILISÉS COMME DE VÉRITABLES OUTILS DE CONSTRUCTION NATIONALE.

la Corne de l’Afrique doit poursuivre son développement économique.

Même si les chiffres sont probablement surévalués, la croissance économique éthiopienne est forte depuis plus d’une décennie, tirée par d’énormes investissements dans les infrastructures (trains, routes, parcs industriels) mais grevée par un manque criant de devises étrangères, notamment dû à des exportations qui ne décollent pas. Dans ce contexte,

l’électricité est un élément clé pour développer davantage les infrastructures comme pour engranger des dollars.

Exportations

« Le but principal du barrage de la Renaissance est la production d’électricité », confirme Fekahmed Negash, directeur exécutif du bureau technique du Nil oriental (Entro) à l’Initiative du bassin du Nil. En

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Tendances ÉTHIOPIE

ZACHARIAS ABUBEKER/BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES

Le chantier devrait être totalement achevé en 2022.

DES BÂTONS DANS LES TURBINES Ses seize turbines devaient commencer à tourner en 2016. Près de neuf ans après le lancement des travaux, les responsables du chantier de la « Renaissance éthiopienne » ont revu leurs ambitions à la baisse : ils proposent de démarrer avec trois turbines. La capacité de production annuelle resterait la même : 15 760 GW (le pays a produit près de 14 000 GWh en 2017, selon l’Agence internationale de l’énergie).

En octobre 2019, le journal Addis Fortune annonçait un ouvrage

terminé à 68,6 % (sic).

Mais c’est surtout le gros œuvre de la structure qui a avancé, et non pas les parties électromécaniques. Empêtré dans des affaires de corruption, le conglomérat militaro-industriel Metal and Engineering Corporation (MeTEC), s’est vu retirer le contrat du barrage en août 2018.

Un contrat récupéré par l’italien Salini Impregilo, maître d’œuvre du projet global, le français GE Hydro, l’allemand Voith Hydro et les chinois Gezhouba et Sinohydro.

Les surcoûts engendrés par les retards et les

produire, et en vendre. Selon lui, une étude a montré que l’Éthiopie pourrait exporter jusqu’à 2 000 MWh vers l’Égypte et 1 200 MWh vers le Soudan. Ce dernier achète déjà de l’électricité à son voisin depuis 2013, tout comme Djibouti, ce qui ferait entrer en moyenne 70 millions de dollars dans les coffres de la Banque centrale chaque année. Une ligne

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malfaçons ont fait exploser la facture (4,7 à 5 milliards de dollars selon les sources). Il manquerait aujourd’hui 1,3 milliard de dollars pour la régler, selon l’hebdomadaire Addis Fortune. Cependant, le ministre éthiopien de l’eau, de l’irrigation et de l’énergie, Sileshi Beleke, affirme que le remplissage du réservoir débutera bien en juin 2020 et que les premiers kilowattheures sortiront du barrage à la fin de l’année. Le lancement complet est annoncé pour 2022.

V.D.

de transmission devrait par ailleurs bientôt relier le Kenya et l’Éthiopie, qui espère un jour pouvoir vendre également son courant à la Tanzanie ou au Soudan du Sud. « L’Afrique est le continent le moins connecté au réseau énergétique », martèle Linus Mofor depuis son bureau encombré de documents.

Tout en confirmant l’immense

potentiel du projet, le spécialiste de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique souligne la nécessité de débloquer la demande. En Éthiopie, seul un tiers de la population environ a accès à l’électricité. « De mon point de vue, il faut investir dans l’interconnexion », affirme Linus Mofor. En raccordant davantage de foyers, en développant les économies, le besoin d’énergie ira en s’accroissant, ajoute-t-il.

Populations déplacées

Contrairement à ce que laisse entendre la chanson, l’Éthiopie n’a pas attendu le barrage de la Renaissance pour développer ses capacités hydroélectriques. Les premiers projets ont été mis en œuvre dans les années 1970. Mais c’est bien l’actuelle coalition au pouvoir qui a trouvé les finances et la volonté politique d’accélérer le mouvement.

Elle a construit de nombreux barrages avec « un sens de l’urgence » et une pratique autoritaire du pouvoir, comme le fait remarquer un chercheur qui souhaite rester discret. Celui-ci a pu constater, sur un autre barrage éthiopien, le manque de considération envers les populations locales, déplacées pour permettre d’inonder les terres destinées au réservoir d’eau. Si elles ont été indemnisées, ces personnes vivent parfois toujours dans le noir. « C’est dans la logique même du développement », tempère Yacob Arsano, professeur à l’université d’Addis-Abeba, un des conseillers des négociateurs éthiopiens lors des tables rondes avec leurs homologues égyptiens. « Je suis allé sur place plusieurs fois, les populations locales soutiennent le grand barrage pour deux raisons: il apporte le développement – la ville, les écoles, les emplois.

Même si le projet a des conséquences négatives, cela a été négocié et il y a eu des compensations financières, on leur a donné de nouvelles terres et les gens ont pu être employés sur le projet. » La floraison d’ouvrages hydroélectriques sur le Nil bleu est logique,

Tendances ÉTHIOPIE

sentir. L’Éthiopie constitue pour cela le meilleur terrain, compte tenu du faible taux d’évaporation qu’elle enregistre par rapport aux pays en aval. Sa géographie montagneuse recèle de nombreuses gorges profondes, qui peuvent contenir un volume important et qui sont relativement peu exposées à l’air, par ailleurs moins chaud qu’en Égypte et qu’au Soudan.

Pour Fekahmed Negash, le projet comporte également deux autres avantages de taille : le développement de la pêche, alors que les retenues d’eau fournissent désormais en poisson des villes comme Mekele ou Jimma. « Et à long terme, le site pourrait devenir une attraction touristique puisque de nombreuses îles seront créées », espère-t-il.

PRESIDENCY OF EGYPT / HANDOUT / ANADOLU AGENCY/AFP

explique Fekahmed Negash. Elle est due « à la nature du fleuve » : la quantité d’eau charriée fluctue énormément durant l’année, particulièrement du côté éthiopien, où 80 % du volume est atteint durant les quatre mois de la saison des pluies sur les hauts plateaux (de juin à septembre).

D’où l’intérêt de retenir l’eau pour l’utiliser lorsque le besoin se fait

Sommet tripartite entre le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed (au centre), le chef de l’État égyptien, Abdel Fattah al-Sissi (à sa g.), et Omar el-Béchir (à sa dr.), alors président du Soudan, le 10 février 2019, à Addis-Abeba.

LA GUERRE DE L’EAU AURA-T-ELLE LIEU ?

Les mots sonnaient étrangement dans la bouche d’un Prix Nobel de la paix. « S’il y a besoin d’aller à la guerre, nous pouvons mobiliser des millions d’hommes », affirmait le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, face au Parlement, le 22 octobre 2019. Avant de s’empresser d’ajouter que la guerre n’était « dans l’intérêt d’aucun de nous », ni de l’Éthiopie ni de l’Égypte. Les deux pays négocient, aux côtés du Soudan, pour trouver un

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accord sur le grand barrage de la Renaissance éthiopienne. Le Caire craint une baisse de son volume d’eau, dont le pays dépend à plus de 90 %. Depuis l’automne 2019, les États-Unis et la Banque mondiale sont observateurs de ces discussions, et pourraient devenir médiateurs à la mi-janvier si les négociations n’avançaient pas. Au cœur du débat : l’Éthiopie, ce « partenaire silencieux » – comme l’appelait

l’universitaire John Waterbury – qui ne veut plus se taire face à l’Égypte, puissance régionale contestée qui s’arc-boute sur les traités coloniaux, qui lui garantissent 55 milliards de m3 d’eau par an. Et la nécessité de trouver des compromis. « Il faut répondre à la charge émotionnelle, argumente le chercheur Wondwosen Michago. Il y a trop de peur du côté égyptien, et c’est compréhensible.

Il faut trouver un

mécanisme pour répondre à cette peur. » L’eau pourrait au contraire devenir un facteur d’unification, veut croire l’analyste William Davison. « Je pense qu’il y a un véritable potentiel sur le long terme. Si un accord est trouvé sur le remplissage et le pilotage du barrage, ce sera très positif. Cela signifiera que chacun devra coopérer, partager des informations pour le mettre en œuvre », conclut-il.

V.D.

COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

Institut Diderot 86-90 rue Saint-Lazare 75009 Paris Tél. : (+33) (0)1 55 50 65 60 www.institutdiderot.fr

Sécurité africaine et migrations L’

Institut Diderot contribue au débat public afin de prendre

la mesure du changement de civilisation en cours, notamment par la

publication de dossiers thématiques proposant des analyses, des notes sur des sujets d’actualité, des rencontres sur des thèmes définis par son conseil d’orientation et une présence active sur les réseaux sociaux.

Parmi les questions brûlantes qui se projettent sur l’avenir de l’Afrique, la sécurité et la mobilité des personnes occupent une place importante sur un continent qui verra probablement sa population doubler en 2050.

Pour autant, aucun risque d’invasion migratoire de l’Europe ne se profile à l’horizon car, selon les études de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), « la croissance démographique africaine est encore loin de se traduire en un accroissement équivalent de la migration vers les pays de l’OCDE ».

La sécurité comme la migration sont affectées par la persistance - et l’exacerbation - d’une conflictualité qui constitue un défi majeur à relever dès maintenant pour un avenir différent.

L’Afrique fait face à quatre types d’insécurité en plus de certaines vulnérabilités structurelles qui peuvent les aggraver.

Il en est ainsi de la vulnérabilité écologique et principalement de l’impact du changement climatique.

Les infrastructures numériques sont exposées à 83 % à la cybercriminalité selon un diagnostic fait lors de la 4e « Africa Cybersecurity Conference » d’Abidjan.

La persistance des conflits armés est aggravée par une montée des violences intercommunautaires instrumentalisées, au Sahel notamment et en Afrique centrale.

Elles y menacent les bases du vivre ensemble des peuples de la région dans leur diversité. Les conflits sont largement servis par la circulation (en très grande partie illégale) de plus de 100 millions d’armes légères et de petit calibre.

Les défis de sécurité humaine s’articulent autour de la santé, la sécurité alimentaire et les besoins élémentaires dont la dignité humaine et les droits humains dépendent.

La stratégie panafricaine de sécurité doit mettre la sécurité humaine au cœur de sa doctrine. Ses objectifs doivent précéder les partenariats à nouer. Il est question d’assumer au niveau panafricain l’impératif régalien de protection,de défense,de diplomatie et de développement durable pour mettre l’avenir de l’Afrique à l’abri des maux qui l’assaillent actuellement.

Le potentiel de puissance d’une Afrique unie peut transcender les

Jean-Claude Seys

Pr. Massaer Diallo,

Président de l’Institut Diderot

Président de l’Institut d’Études Politiques et Stratégiques, Membre du Conseil d’orientation de l’Institut Diderot

fragilités et défaillances de nombre d’États qui la composent. L’avenir ne résultera pas d’une simple somme de faiblesses du présent qui ne doivent pas occulter la résilience des peuples ainsi que l’émergence d’une nouvelle conscience politique dans la jeunesse. Celle-ci aspire à l’avènement d’une Afrique qui se développe dans la prospérité, la sécurité, la liberté et la dignité.

Dans une perspective de sécurité collective l’approche panafricaine doit aider à relever de manière intégrée et globale le défi de l’hybridation des menaces qui a commencé à se manifester depuis une décennie dans le Sahel et en Afrique de l’Ouest. Elle se traduit par un décloisonnement, une collusion et parfois des imbrications organisationnelles réversibles entre djihadistes terroristes, rebellions armées, crime organisé autour du narcotrafic, réseaux de trafic de personnes, d’armes, de ressources minières et de carburants.L’économie des passeurs s’inscrit dans le cadre de ces criminalités imbriquées. Il appartient à l’Autorité africaine de relever ce défi. L’Afrique ne saurait se défausser sur l’Europe pour la garantie de sa propre sécurité.

Souleymane Bachir Diagne

Directeur de l’Institut d’études africaines, université de Columbia

Précis d’érudition islamique

n ces temps où l’on ne parle de l’islam dans l’Ouest africain qu’en évoquant les questions, certes importantes, de terrorisme et de sécurité, il est bon de rappeler aussi ce que la religion musulmane a signifié pour l’histoire intellectuelle de la région.

Le Sahara a toujours été un espace de passage et d’échange. C’est le discours colonial sur l’Afrique qui a fabriqué une séparation entre deux mondes de part et d’autre de ce désert, un Nord relevant de la science « orientaliste », et un Sud que l’ethnologie, science des « sociétés sans écriture », était chargée d’expliquer. Ce discours prolongeait le propos d’une philosophie hégélienne de l’Histoire qui avait posé que le continent africain devait être divisé en trois.

Premièrement, une Égypte appartenant au monde asiatique, deuxièmement, une Afrique du Nord ayant vocation à prolonger l’Europe de l’autre côté de la Méditerranée, mais en tant que colonie, et, troisièmement, ce qu’il appela alors « l’Afrique proprement dite », celle située au sud du Sahara.

C’est contre cette construction que doit se comprendre la signification de l’islamisation de l’Afrique et se penser véritablement l’histoire intellectuelle du continent, faite aussi d’érudition écrite. Il faut comprendre déjà que l’histoire intellectuelle dans le monde de l’islam fut aussi celle d’un développement des sciences de l’antiquité grecque et romaine, et que le devenir africain de cette histoire s’est construit également sur cet héritage. La fameuse expression latine, translatio studiorum (transfert des connaissances), utilisée durant le Moyen Âge européen pour parler de la transmission des sciences du monde grec à la chrétienté latine d’Occident, n’est pas ce trajet unilinéaire simple qui a conduit d’Athènes à Rome et de Rome à l’empire d’Occident. C’est aussi le chemin qui a mené d’Athènes à Bagdad, Cordoue, Fès, Tombouctou…

Ainsi, l’histoire de la philosophie en Afrique sera-t-elle faussée si elle ne prend pas en compte la tradition d’étude de la logique d’Aristote ou celle de réflexion sur la philosophie néoplatonicienne dans la métaphysique du mysticisme telles qu’on les rencontre en Afrique de l’Ouest, dans les centres intellectuels comme Tombouctou, ou en Afrique de l’Est, dans le monde swahili. L’étude de la tradition d’érudition en Afrique subsaharienne musulmane, dont témoignent les manuscrits de Tombouctou, connaît aujourd’hui un développement important. Les écrits de ceux qu’Ousmane Kane a appelés les intellectuels africains « non europhones » font l’objet de recherches prometteuses. On citera ainsi le récent ouvrage de cet auteur, traduit en français sous le titre Au-delà de Tombouctou: Érudition islamique et histoire intellectuelle en Afrique occidentale. De manière générale, il est important de

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prendre toute la mesure de la signification de l’islamisation du continent comme facteur de développement d’une tradition intellectuelle qui reste largement à (re)découvrir.

Cette tradition intellectuelle et spirituelle est le fruit du patient travail d’oulémas (savants musulmans) qui ont fait le choix de gagner les cœurs et les esprits à l’islam par l’éducation plutôt que par la contrainte. Ils ont ainsi cultivé une philosophie pacifiste dans la conviction que la fureur des jihads fera toujours infiniment moins que la patience des éducateurs. Ainsi, il faut souligner le rôle décisif joué par les Jakhanke, ce groupe ethnique qui s’est fait une spécialité de produire des oulémas missionnaires, lesquels, durant des siècles, ont créé à travers la région des centres d’enseignement islamique.

ADRIA FRUITOS POUR JA

E

PASCAL PERRICH POUR JA

Tendances

Cette tradition éducative des Jakhanke a fait l’objet d’une étude par Lamin Sanneh, dans un ouvrage au titre éloquent: Beyond Jihad: The Pacifist Tradition in West African Islam. La tradition pacifiste qui a ainsi été établie en Afrique de l’Ouest porte le nom de l’ancêtre fondateur que se reconnaissent les Jakhanke, Al Hajj Salim Suware, qui vécut au XIIIe siècle. C’est en réaffirmant cette tradition que les Jakhanke ont répondu à l’épreuve de la colonisation elle-même en se démarquant des oulémas parmi eux qui s’étaient lancés dans l’aventure du jihad. Leur conviction, partagée en général par les guides des confréries soufies, était que le vrai combat devait être celui de l’éducation. Cela demeure vrai, plus que jamais.

COMMUNIQUÉ

Faciliter l’accès des femmes et des adolescentes à la santé sexuelle et reproductive C’est l’un des objectifs visés par le Projet d’Autonomisation des Femmes et Dividende Démographique au Sahel (SWEDD), qui intervient dans sept pays (Bénin, Burkina Faso, Mali, Côte d’Ivoire, Mauritanie, Niger, et Tchad) avec le soutien financier de la Banque mondiale, l’appui technique du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et de l’Organisation Ouest-Africaine pour la Santé. Cette initiative s’inscrit en droite ligne d’une volonté exprimée par les Chefs d’État des pays du Sahel d’accélérer la transition démographique, de capturer le dividende démographique et de réduire les inégalités de genre dans la région du Sahel.

D’importants acquis et des perspectives prometteuses

En quatre ans d’existence, le SWEDD a permis une augmentation de la prévalence contraceptive avec plus 4302000 femmes additionnelles qui utilisent des méthodes de contraception modernes et le taux d'achèvement des filles au secondaire de 35,1% à 40,3% entre 2015 et 2018.

10154 sages-femmes ont été formées aux nouvelles technologies et leur effectif a augmenté de 15,2%.

Sa mise en œuvre se traduit par les actions concrètes sur le terrain dans plusieurs régions des pays couverts par le projet, avec l’implication des leaders religieux et traditionnels, parlementaires, jeunes et journalistes, entre autres. Les campagnes de sensibilisation ont touchées plus 627 millions de personnes sur la santé reproductive, maternelle et infantile, les actions de formation ont permis à 106263 filles et adolescentes de bénéficier d’un appui à la scolarisation et au maintien à l’école.

Ce sont 99704 filles et jeunes femmes qui ont formées aux activités génératrices de

revenus, et 102600 filles non scolarisées ou déscolarisées ont désormais une seconde chance grâce à la mise en place de 3420 espaces sûrs.

un changement normatif par la mobilisation communautaire. Le projet s'attaque à certaines des causes profondes du mariage et de la procréation précoce.

A travers les 1640 clubs des maris et futurs maris au Niger, en Côte d'Ivoire, en Mauritanie, au Burkina Faso, et au Tchad, c’est la

Le SWEDD est porteur de grands espoirs pour la réduction de la vulnérabilité des adolescentes et jeunes femmes et des iné-

© Olivier Girard / SWEDD

La stratégie de mise en œuvre du projet SWEDD se base sur les principes de la responsabilisation et la participation active des partenaires, la gestion étant axée sur les résultats et le savoir-faire.

n Une famille burkinabè dont l'homme est inscrit dans un club des maris, en visite dans un centre de planification familiale avec sa femme et sa fille.

participation des hommes et des garçons pour une meilleure égalité des sexes qui est favorisée. Cette approche transformative du genre promeut des attitudes et des comportements équitables et encourage

galités de genre. En contribuant à améliorer les possibilités offertes aux femmes et aux jeunes filles, elles participeront davantage à la croissance économique et au développement durable du continent.

www.projetswedd.org

JAMG

Pour plus d’informations, contactez Céline Adotevi par email : adotevi@unfpa.org

MAX MBAKOP POUR JA

Tendances

Entreprises Célestin Tawamba

Président du Gicam

« Nous souffrons de ne pas rencontrer le président Paul Biya » Climat des affaires, relations avec le gouvernement, Grand Dialogue, franc CFA… Le patron des patrons camerounais n’élude aucun sujet et livre son analyse de la situation nationale.

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Propos recueillis par GEORGES DOUGUELI et OMER MBADI, à Douala

orté en 2017 à la tête du Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam) avec l’intention de moderniser cette institution, l’entrepreneur de 53 ans a mené la réduction du mandat de cinq à trois ans, avec effet immédiat et,

P

surtout, le verrouillage du dispositif pour éviter des changements intempestifs et sur-mesure des statuts. Le conseil d’administration a également subi une cure de rajeunissement et de féminisation. Des femmes président quatre des dix commissions.

Si, au début de la dernière année de son mandat, le patron des patrons camerounais joue de l’ambiguïté sur

Dans son bureau de Douala, le 4 décembre.

faible protection du contribuable, s’agissant des contentieux.

Concrètement, qu’est-ce qui est en cause sur le plan fiscal ?

La plupart des entreprises sont soumises au paiement du minimum de perception, qui est de 2,2 % du chiffre d’affaires, plutôt que sur le bénéfice réellement réalisé, comme cela est fixé pour l’impôt sur les sociétés (fixé à 30 %). Résultat : dans des secteurs où la marge bénéficiaire est faible, cette taxation basée sur le chiffre d’affaires pénalise l’activité.

La Côte d’Ivoire, qui avait ce dispositif fiscal (0,25 % au minimum du chiffre d’affaires), est en train d’en sortir. Nous avons recommandé de sortir de ce système au Cameroun, ce

LE MORAL DE NOS ENTREPRENEURS, DÉJÀ EN BERNE, EST PLOMBÉ PAR LES MULTIPLES CRISES QUE TRAVERSE LE PAYS. son désir de rempiler, il n’élude en revanche aucun des sujets sensibles, tels que la fiscalité, la crise anglophone, le climat des affaires…

Jeune Afrique : Quel est le moral des patrons camerounais ?

Célestin Tawamba : Il est en berne.

La situation économique et l’environnement des affaires en disent long. Ce climat est accentué par les multiples crises : la crise sécuritaire en zone anglophone, celle des devises (la Banque centrale a limité le recours à son guichet pour régler des opérations hors de la Cemac). À cela s’ajoutent le déficit des infrastructures, celui de l’énergie – en dépit des investissements consentis –, une fiscalité confiscatoire, voire prédatrice dans sa mise en œuvre, réticente à l’élargissement de l’assiette et assise sur le chiffre d’affaires, ainsi que la

qui aura pour effet d’élargir l’assiette.

Plus largement, il faut réformer notre système fiscal pour réintroduire de la sérénité et avoir une économie compétitive. Il faut non seulement rétablir une justice fiscale mais également plus d’équité dans le contentieux fiscal, en sortant de la logique de « l’embuscade ». Son coût est beaucoup plus élevé pour le contribuable et génère de la corruption. Le dispositif s’est amélioré [digitalisation, facilitation des paiements…], mais il faut aller à l’essentiel, qui est l’abandon de cette fiscalité basée sur le chiffre d’affaires. Nous ne pouvons avoir une fiscalité déconnectée de la réalité !

Pourquoi votre plaidoyer ne passet-il pas auprès de l’exécutif ?

Il y a la peur du changement et la crainte de perdre en recettes fiscales.

Et puis, il y a une sorte de « facilité » à avoir une fiscalité adossée à la taxation de revenus que les entreprises doivent de toute façon déclarer, même si cela les pénalise…

Où en sont les chantiers du remboursement des crédits de TVA et de la dette intérieure ?

Le problème de la dette intérieure demeure. De nombreuses entreprises qui étaient impliquées dans les travaux d’infrastructures de la Coupe d’Afrique des nations sont actuellement à l’arrêt, parce que les paiements ne sont pas assurés. Il y a une absence totale de visibilité sur le stock total de cette dette. À coup sûr, les montants payés ne sont pas significatifs, et, de plus, en arrièreplan, le flux ne cesse de s’accroître.

Nous avons noté une augmentation des remboursements des crédits de TVA, mais ils restent insuffisants au regard du stock global. Tout cela est lié à une activité économique atone, ne générant pas suffisamment de ressources pour assurer le paiement de la dette.

Le Cameroun achève 2019 avec un taux de croissance de 3,9 % du PIB, selon le FMI, et table sur 4,4 % en 2020, d’après le gouvernement. Cela vous convient-il ?

Nous nous félicitons de cette croissance, la plus forte de la zone Cemac.

Mais, au niveau microéconomique, nous n’avons pas l’impression qu’elle soit inclusive et bénéfique pour tous, y compris pour les entreprises. Ce taux de 4,4 % reste en deçà de notre potentiel économique réel qui est entre 8 % et 12 % au minimum par an.

C’est le seuil susceptible de réduire le chômage structurellement.

Quelles sont les répercussions de la crise anglophone ?

La mise à jour, en novembre, de notre rapport de l’année dernière montre une dégradation. Huit chefs d’entreprise sur dix – tous secteurs confondus – estiment qu’elle a des incidences sur leur activité.

Le manque à gagner se chiffre à

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Tendances ENTREPRISES

785 milliards de F CFA. Les pertes d’équipements, à plus de 40 milliards de F CFA, dont la moitié dans l’agro-industrie. Les pertes concernant l’impôt sur les sociétés, les redevances et les diverses taxes sont de l’ordre de 18,5 milliards de F CFA. Plus de 16 000 emplois ont été perdus. Que l’État ait décrété ces zones économiquement sinistrées est révélateur.

Les propositions du Gicam, lors du Grand Dialogue national, sont prises en compte ?

Le dialogue entre l’État et le secteur privé vous satisfait-il ?

Ce dialogue incarné par le Premier ministre, à travers le Cameroon Business Forum [le CBF réunit annuellement le gouvernement et le secteur privé], ne marche pas.

D’où notre recul dans le classement « Doing Business » ces trois dernières années. La raison principale est qu’il n’est pas impulsé et incarné par le chef de l’État. Nous souffrons de ne pas le rencontrer. Nous devons discuter avec notre chef, lui faire part de ce que nous pensons de la marche de

ON NE PEUT S’ACCOMMODER DU STATU QUO SUR LE FRANC CFA, MAIS IL FAUT SE GARDER DE TOUT POPULISME. LE CHOIX REVIENT AUX ÉTATS. Nous saluons cette initiative du chef de l’État ainsi que les mesures fiscales et douanières prises pour ces zones économiquement sinistrées. Nous proposons en plus le gel des contrôles fiscaux et parafiscaux sur trois ans. Mais le retour à la paix est un préalable à toute mesure d’accompagnement.

l’économie. Le CBF doit être présidé par le chef de l’État, comme en Côte d’Ivoire et au Sénégal. C’est de cette manière que cela marche ailleurs pour un vrai dialogue public-privé.

Comment jugez-vous le DSCE, la première phase finissante du chemin vers l’émergence en 2035 ?

Nous avons été honorés de faire partie de la suite du chef de l’État, qui se déplaçait pour faire la promotion politique et économique de notre pays. À ce titre, les engagements économiques qu’il a pris profitent à notre

Il est bon d’avoir une telle boussole. Nous sommes en deçà de tous les principaux objectifs fixés [croissance, emplois, montant des investissements…]. En somme, on peut et on doit mieux faire !

La production énergétique s’est accrue, sans enrayer la pénurie, obligeant les entreprises à investir dans des ressources alternatives…

Nous déplorons cette insuffisance de l’énergie en quantité et en qualité, et espérons qu’il y en aura davantage à l’avenir. L’État prélève en plus des droits de douane et la TVA sur les générateurs utilisés par les entreprises. Nous avons toujours demandé une défiscalisation totale de leur acquisition.

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En mars 2018, vous étiez dans la suite du président lors d’une visite officielle en Chine. Quelles retombées à ce jour pour le Gicam et ses membres?

APE ENTRE LE CAMEROUN ET LE NIGERIA ?

Le Gicam se déclare favorable à un Accord de partenariat économique (APE) entre les deux pays, « parce que c’est notre premier partenaire économique en flux formels et informels.

En outre, ce serait en ligne avec la Zlecaf », justifie son président.

économie. Notre présence à ses côtés ne s’inscrivait pas dans une logique corporatiste, elle va au-delà des membres du Gicam.

Que faut-il revoir dans l’architecture du franc CFA ?

Nous avons organisé un débat à ce sujet en avril. Il faut se garder de tout populisme, à mon avis. Notre religion n’est pas totalement faite à propos de sa réforme. Sur le plan symbolique, on s’accorde à reconnaître que la dénomination pose problème. Sur le plan technique, l’arrimage à l’euro par la parité fixe a donné quelques résultats satisfaisants, en apportant une stabilité de change et une prévisibilité aux entreprises. Cependant, notre économie se mondialise, avec une ouverture vers des marchés asiatiques qu’il faut prendre en compte. On ne peut pas continuer à sous-traiter notre indépendance monétaire, au regard des enjeux de développement de notre zone. On ne peut s’accommoder du statu quo. Le débat peut porter sur la nécessité d’un taux de change fixe pour maîtriser l’inflation – ce qui est un acquis – et l’exigence d’adaptation, à travers une certaine flexibilité. Le choix revient aux États. Il y a lieu de se féliciter que nos chefs d’État se soient saisis de la question lors du récent sommet de la Cemac à Yaoundé.

Vos récriminations à l’égard de la nouvelle réglementation de change (limitation du recours au guichet de la Banque centrale), en vigueur depuis mars, ont-elles eu les réponses appropriées ?

Sa mise en œuvre visait à accroître nos réserves de change. En réalité, elle a entraîné un ralentissement important des opérations de transfert, passées d’une semaine maximum à plusieurs semaines ou à des mois pour honorer nos engagements. Ces délais sont certes en léger recul, mais si la situation perdure, elle affectera la notation des pays de la Cemac et la crédibilité de nos entreprises auprès des fournisseurs étrangers.

MESSAGE

CÔTE D’IVOIRE

© RICCARDO NIELS MAYER/STOCK.ADOBE.COM

La croissance partagée

Les nombreuses avancées en Côte d’Ivoire dans le domaine de l’économie sont évidentes, mais comme l’a souligné le chef de l’État, Alassane Ouattara, il reste encore à faire sur le plan social. Les efforts pour améliorer l’accès des populations aux services sociaux de base, de l’adduction d’eau et d’électricité, ainsi bien sûr qu’aux services de santé et de l’éducation, se poursuivent et sont prioritaires.

Pour ce faire, le Programme Social du Gouvernement (PS-Gouv) portant sur la période 2019-2020, est destiné à accélérer le rythme des réformes à caractère social dans le pays, selon une véritable stratégie appliquée au nom de l’intérêt du plus grand nombre.

CÔTE D’IVOIRE

La croissance partagée

Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, accompagné du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, inaugure le centre hospitalier et universitaire d’Angré.

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LE SOCIAL AU CŒUR DE L’ACTION

Le PS-Gouv vise à renforcer les programmes sociaux déjà initiés par le gouvernement, pour un coût de 727,5 milliards de francs CFA. Il s’articule autour de cinq axes : fournir aux populations des services de santé de proximité et améliorer la protection sociale ; renforcer les conditions d’accès et de maintien à l’école des enfants de 6 à 16 ans – notamment les jeunes filles, et améliorer les conditions d’études et de vie des étudiants ; favoriser l’accès des populations aux logements, à l’eau potable, à l’énergie, aux transports, aux biens de grande consommation ; accroître l’accès des jeunes ainsi que des femmes, à des revenus et à des emplois décents et stables ; créer les conditions pour le bien-être des populations en milieu rural et assurer la sécurité alimentaire. L’objectif final de ce programme étant de bâtir une Côte d’Ivoire prospère et en paix. Pour tous.

Santé et éducation en ligne de mire Depuis 2012, le pays est déjà sur les voies de la prospérité, avec un taux de croissance moyen de 8,9 % chaque année, qui en fait

© NOLTE LOURENS

Paix et prospérité pour tous

C’EST AU MINISTRE AMADOU GON COULIBALY QU’IL INCOMBRE DE MENER À BIEN LE PROGRAMME PS-GOUV

l’une des économies les plus dynamiques du continent. L’étape inaugurée par le PS-Gouv vise maintenant à redistribuer les fruits de cette croissance au plus grand nombre, en mettant l’effort essentiellement sur les secteurs de la santé et de l’éducation. Beaucoup a déjà pu être fait ces dernières années.

Dans la santé, d’importants équipements ont ainsi été réceptionnés, comme le CHU d’Angré ou le centre de radiothérapie et d’oncologie médicale construit à Abidjan.

L’amélioration de la couverture sanitaire du pays est prévue pour se poursuivre jusqu’en 2020, avec la réalisation d’une quinzaine de nouveaux centres hospitaliers, ainsi que de 200 dispensaires attendus sur l’ensemble du territoire.

Gratuité des soins pour le plus grand nombre Le PS-Gouv veut poursuivre sur cette voie, tout en améliorant la protection sociale des citoyens ivoiriens. Parmi les principaux axes développés dans le programme, les pouvoirs publics prévoient le renforcement des programmes de gratuités ciblées en matière de soins, pour les femmes enceintes et les enfants âgés de 0 à 5 ans. La population en

© F8STUDIO/ STOCK.ADOBE.COM

MESSAGE

générale devrait également en bénéficier pour la prise en charge des 48 premières heures en urgence médico-chirurgicales ou d’un traitement contre le paludisme.

Le Programme élargi de vaccination (PEV) existe déjà mais doit être étendu à tous les enfants, de 0 à 11 mois, afin qu’ils puissent être protégés contre 13 maladies, ainsi quà toutes les femmes enceintes et leurs enfants à venir. Les autorités ivoiriennes veulent également renforcer et élargir la couverture des bénéficiaires des filets sociaux. Cinquante milles ménages étaient concernés fin 2018, ils devraient être plus du double deux ans plus tard.

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dispositif, les autorités souhaite rendre les médicaments disponibles sur l’ensemble du territoire, avec une réduction d’au moins 30 % sur les prix des articles vendus dans le public et le privé.

Couverture universelle Mais la priorité du gouvernement en matière de santé reste de veiller à l’opérationnalisation progressive de la Couverture Maladie Universelle (CMU). Destiné à couvrir les risques de maladie, le système est financé par une cotisation forfaitaire de 1 000 francs CFA par mois et par personne. Mis en place depuis mars 2014, il ne concerne pour l’instant que 5 % de la population. L’objectif inscrit au PS-Gouv vise un taux de 17 % en 2020.

Toute personne résidant en Côte d’Ivoire bénéficiera alors d’une prise en charge de leurs frais médicaux à hauteur de 70 %, et de 100 % dans le cas des populations les plus défavorisées. Pour compléter le

L’éducation au défi

© ADIMGUZHVA - STOCK.ADOBE.COM

≥ Des programmes de gratuités ciblées en matière de soins seront développés pour les femmes enceintes.

La couverture sociale concernait 50 000 ménages en 2018 et doublera d’ici 2020.

Le secteur de l’éducation fait également l’objet de la plus grande attention de la part des pouvoirs publics de Côte d’Ivoire.

Le pays a encore du chemin à parcourir en la matière. En 2015, le taux d’achèvement du primaire se situait encore à 63,1 % dans le pays, contre 72,6 % à l’échelle du continent. La Côte d’Ivoire compte aujourd’hui 23 millions d’habitants, dont 40 % âgés de moins de 14 ans. Chaque année, c’est près de 5 millions de jeunes ivoiriens qui prennent le chemin de l’école, encadrés par près de 100 000 enseignants. Sachant que le pays devrait voir sa population doubler d’ici à 2050, le défi à relever s’annonce vertigineux pour les autorités ivoiriennes, qui conscientes de ces lacunes, ont consacré plus de 700 milliards de francs CFA depuis 2012 sur ces questions. Ce budget a déjà permis la modernisation et la construction d’écoles, ainsi que le recrutement et la formation de plus de 15 000 enseignants supplémentaires.

CHIFFRES

100 %

la hausse du nombre de médecins et de sages-femmes depuis 2012.

15

le nombre d’hôpitaux attendus pour voir le jour sur l’ensemble du territoire.

180

en milliards de francs CFA, le montant à investir pour chacune des futures universités qui seront créer dans le pays.

5

en kilomètres, la distance maximale souhaitée par les autorités entre les centres de santé et la population qu’ils sont censés recevoir.

2 291

en milliards de francs CFA, le montant des dépenses sociales engagées par le gouvernement en 2018, soit 8,8 % du PIB.

900

le nombre d’écoles qui bénéficieront des programmes d’amélioration des conditions de vie de leurs élèves.

PRISE EN CHARGE DES FRAIS MÉDICAUX À HAUTEUR DE 70 % ET 100 % POUR LES POPULATIONS LES PLUS DÉFAVORISÉES

© JACQUES TORREGANO/DIVERGENCE

CÔTE D’IVOIRE

MESSAGE

La croissance partagée

Le PS-Gouv en complément

Inscrit dans le Plan national de développement (PND), la question de la scolarisation universelle est actuellement en bonne voie.

Le taux de scolarisation des enfants de 6 à

Campus universitaire d’Abidjan.

16 ans, est notamment passé de 75 % en 2007, à près de 95 % dix ans plus tard. D’ici à 2020, les différents programmes mis en place par les pouvoirs publics tablent sur la création de plus de 3 400 classes supplémentaires dans le primaire, ainsi que sur la construction de 40 collèges de proximité et de sept lycées, pour grappiller, dès les prochains mois, quelques pourcents supplémentaires. Avec la réalisation de tous ces objectifs dans les deux ans à venir, la Côte d’Ivoire ne manquera pas de consolider les progrès importants déjà enregistrés dans de nombreux secteurs pour lui permettre aujourd’hui de toucher du doigt l’émergence économique annoncée par ses gouvernants et qui, grâce au PS-Gouv, promet de concerner l’ensemble des Ivoiriens.

AMBITIONS UNIVERSITAIRES En parallèle du PS-Gouv, les autorités ivoiriennes ont lancé, depuis 2014, un vaste programme de réhabilitation des pôles universitaires du pays, notamment à Abidjan.

En plus des trois unités régionales de l’enseignement supérieur (URES), de Bouaké, Daloa et Korhogo, transformées en universités autonomes, huit autres pôles régionaux vont ouvrir leurs portes. Celui de Man a été inauguré en 2017, alors que les futures universités de Bondoukou et de San Pedro, actuellement en cours de réalisation, sont attendues pour 2020. Les autres pôles verront progressivement le jour à Abengourou, Adiaké, Dabou, Daoukro et Odienné.

95 % DES ENFANTS DE 6 À 16 ANS SONT SCOLARISÉS ET D’ICI 2020, LE PLAN NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT A POUR OBJECTIF LES 100%

DIFCOM/DF - PHOTOS : PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE SAUF MENTION.

Tous à l’école

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© RENAUD VAN DER MEEREN/LES ÉDITIONS DU JAGUAR

Pour poursuivre l’amélioration du système scolaire, le PS-Gouv prévoit de continuer à embaucher des enseignants, pour tous les niveaux d’éducation primaire et secondaire publics. Évalués à plus de 10 000 professeurs et instituteurs, le déficit devrait être comblé au plus tard pour la fin de l’année 2020. Le programme annonce également diverses mesures qui visent à équiper les écoles de tables-bancs, censées favoriser leurs capacités d’accueil. Près de 250 000 tables-bancs seront acquises par les différents établissements, dans les deux ans.

Dans le même temps, un programme de développement des latrines a vu le jour, pour que l’ensemble des établissements scolaires en soit équipé à l’horizon 2020, contre moins de 33 % actuellement.

Tendances

RAMEZ AOUDÉ

Mariage de l’animatrice de télévision Pamela Nze-Asseko et de l’homme d’affaires Yannick Houndeton, sur le modèle nigérian.

Société Pour le meilleur… et pour la galerie Robes de créateurs, palais des Mille et Une Nuits, guest-stars… Les mariages africains sont de plus en plus fastueux. Rien n’est trop beau, et tout s’étale sur les réseaux sociaux.

CLARISSE JUOMPAN-YAKAM

mmobile, le regard dans le vide, Elsa a sa mine des mauvais jours. À deux semaines de son mariage, qui sera célébré le 27 décembre à Douala, son styliste lui a déconseillé le modèle de voile dont elle rêvait : une interminable traîne incrustée de perles de 22,5 m, légèrement plus longue que les 22 m de celle de l’Indienne Priyanka Chopra, star de Bollywood, qui vient d’épouser le chanteur américain Nick Jonas

I

à Jodhpur. Sans cet accessoire, s’entête Elsa, pas sûr que la cérémonie à l’église soit aussi fastueuse qu’elle l’avait imaginé.

Comme de nombreux jeunes couples sur le continent, la future mariée et son fiancé ont fait le pari d’un mariage hollywoodien, qu’ils s’empresseront d’exposer sur les réseaux sociaux. Sous les cristaux d’une monumentale salle des fêtes, ils recevront 1 100 invités servis à table. Exit le traditionnel buffet africain, les deux familles feront appel à

un traiteur. Dans ce pays où le salaire moyen est d’à peine 200 euros mensuels, elles ont investi 70 000 euros dans l’événement – presque dix fois ce que les Français dépensent en moyenne pour un mariage.

Jusqu’à la fin des années 1990, les mariages se déroulaient sur une seule journée au Cameroun. Un ou deux ans après les rites traditionnels, célébrés en toute discrétion. Désormais, on étale sans complexe les festivités sur trois jours au minimum, et c’est à qui affichera la fête la plus grandiose, la

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pièce montée la plus haute, la liste d’invités la plus longue. Tout est fait pour épater la galerie.

Pour leur mariage traditionnel au Bénin, l’animatrice de télévision Pamela et son conjoint, Yannick Houndeton, directeur national d’un grand groupe français et créateur d’une société de production audiovisuelle, ont opté pour une cérémonie entièrement calquée sur le modèle nigérian. Si le jeune marié se défend d’avoir voulu en faire un événement national, comme le prétendent ses détracteurs, il reconnaît néanmoins en avoir scénarisé toutes les étapes. Il ne s’est d’ailleurs pas privé de poster en ligne, au quotidien, des teasers des préparatifs. Comme pour tenir son public en haleine – « pour informer tous nos amis impliqués dans l’organisation à travers le monde », rectifie-t-il.

Et cela a commencé par la demande en mariage. « Elle n’ignorait rien de mes intentions, mais il m’a fallu faire une demande romantique surprise en bonne et due forme. » Un dîner en amoureux d’une heure et demie sur une plage décorée pour la circonstance. Une promenade les pieds dans le sable. Puis des lettres lumineuses jaillissant comme par enchantement dans la nuit : « Pamela, veux-tu m’épouser? » Coût de l’opération: plus de 1200 euros, dont 750 pour la bague de fiançailles.

Ci-contre : composition de fleurs naturelles de l’Ivoiro-Libanais Reda Fawaz.

Ci-dessous : l’arrivée en grande pompe du futur époux, Yannick Houndeton.

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Tendances SOCIÉTÉ

Et pour le jour J, le couple ne s’est rien refusé. Les tenues de la mariée ont coûté à elles seules quelque 3 millions de F CFA. Le couple a changé de toilette cinq fois en vingt-quatre heures. Des équipes du Nigeria ont fait le déplacement pour réaliser la décoration, en collaboration avec des prestataires locaux. Et Yannick a spécialement fait venir des ÉtatsUnis l’artiste bénino-guinéen Jupiter Davibe, qui leur a proposé une nouvelle version de son titre Fumilayo, adaptée à leur histoire. Montant de la facture totale : 30 000 euros. « À Cotonou, nombreux sont ceux qui se marient avec un budget trois fois supérieur. Mais à ce jour, c’est mon

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RAMEZ AOUDÉ

Le plus de buzz

mariage qui a le plus fait le buzz, et certains parient que j’ai dépensé plus de 150 000 euros », s’amuse Yannick Houndeton.

Et il ne s’agissait que d’une première étape. La prochaine sera le mariage religieux, à Dubaï, en décembre 2021. Pamela et Yannick avaient bien pensé à la France, mais les incertitudes quant à l’obtention des visas les ont contraints à changer

leur fusil d’épaule. Hormis leurs parents, les trente invités supporteront seuls les frais de voyage. « Nous avons cette fois encore un budget de 30 000 euros, mais nous allons tout miser sur l’habillement. Il nous faut des tenues de créateurs. » Ils ont déjà repéré des chaussures pour lesquelles ils devront débourser 4 200 euros.

Pour le reste, ils laisseront la main à leur wedding planner.

PER-ANDERS PETTERSSON/GETTYIMAGES RAMEZ AOUDÉ

Ci-dessus : avant le défilé des robes de mariée, à la Kinshasa Fashion Week.

Ci-contre : le marié change jusqu’à cinq fois par jour de tenue et d’accessoires.

S’unir coûtera donc à ce couple aux origines modestes plus de 60 000 euros. « C’est à la mesure de l’amour que je porte à la mère de mes deux enfants, plaide Yannick, qui dit assumer pleinement son choix. De toutes les façons, ceux qui me critiquent ne tarderont pas à m’imiter. » Un discours qu’auraient pu tenir un Vital Kamerhe, critiqué pour ces noces démesurées, ou un Louis-Paul

Motaze, après que des photos volées du mariage de sa fille ont circulé sur les réseaux sociaux. L’ancien directeur général de Camtel David Nkoto Emane a quant à lui choisi de régaler tout le village avec les images du mariage de sa fille avec le fils de l’homme d’affaires ivoirien Bernard Koné Dossongui : il avait placé des écrans géants à tous les coins de rue.

Entre désir d’exhibition et hantise de réussir la fête parfaite, de plus en plus d’Africains confient leurs noces à des professionnels. Les habituels loueurs de salle, photographes, animateurs et stylistes se livrent une concurrence sans merci sur ce marché désormais très juteux. Sans compter les nouveaux acteurs qui apparaissent, tels que les wedding planners.

Hautes sphères

La cinquantaine naissante, l’Ivoiro -Libanais Reda Fawaz fait figure de précurseur dans ce domaine. Ancien danseur puis organisateur d’événements au Liban, ce fleuriste formé au stylisme et à la décoration réunit toutes les compétences nécessaires pour offrir à ses clients un jour J digne des contes des Mille et Une Nuits. Il refuse de le confirmer, mais le tout-Abidjan sait qu’on lui doit l’organisation de

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Tendances SOCIÉTÉ

STARS À DOMICILE Le must pour les mariés, c’est d’inviter leur idole. Les Ivoiriens réclament des artistes américains et nigérians tandis que les Maliens ont un faible pour le chanteur congolais Fally Ipupa (photo). Sur ce terrain, l’organisateur ivoiro-libanais Reda Fawaz se distingue grâce à son carnet d’adresses bien fourni : il a déjà fait venir Magic System, Sidiki Diabaté ou les Nigérians P-Square et Davido. « Leur renommée a un coût : ils voyagent en classe affaires, sont logés dans des hôtels cinq étoiles et doivent disposer de gardes du corps, raconte-t-il.

Cachet compris, les stars internationales font passer le budget du mariage du simple au double. Si les mariés disposent de 20 millions de F CFA [30 000 euros], un Fally Ipupa leur coûtera autant. » Le défi de Reda Fawaz consiste souvent à tempérer les ardeurs de ses clients, qui ont tendance à vouloir transformer leur mariage en concert. « C’est un moment de partage avec ceux que l’on aime, pas une occasion de faire étalage de sa toute-puissance », nuance-t-il.

YOURI LENQUETTE

C.J.-Y.

plusieurs unions dans les hautes sphères : le mariage à l’indienne de Jean-Luc Bédié, fils de l’ancien président Henri Konan Bédié, ceux de deux des fils du Premier ministre Gon Coulibaly, ou celui, plus ancien, du footballeur Kolo Touré. Fawaz dit pourtant viser tous types de clientèle et être capable de s’accommoder du plus petit des portefeuilles. Mais en réalité, d’Abidjan à Ouagadougou, en passant par Bamako, Lomé ou Dakar, les 840 couples qu’il a accompagnés en treize ans sont plutôt issus de la

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classe moyenne supérieure, voire très supérieure. Reda Fawaz a d’ailleurs appris, après quelques mauvaises expériences, à flairer les mauvais payeurs : « Dès qu’un couple se montre réticent à verser un acompte de 50 % à la commande et le solde une semaine avant l’événement, je stoppe net la discussion. » Le budget de ses clients oscille entre 30000 et 245000 dollars (pour respectivement 300 à 1 000 invités).

Une somme qui reste raisonnable, comparée aux 540000 euros qui sont

régulièrement dépensés au Nigeria.

Là-bas, le mariage est devenu une véritable compétition où règnent la démesure et la surenchère entre les familles. « En particulier dans la classe politique et les milieux d’affaires les plus prospères, confirme Reda Fawaz. D’autant que les unions entre grandes familles deviennent aussi des stratégies d’alliance pour accroître son prestige. » On se gardera d’imaginer combien a coûté le mariage XXL entre l’un des fils du milliardaire Mohammed Indimi,

Tendances SOCIÉTÉ

fondateur et président d’Oriental Energy Resources (OER), l’une des firmes pétrolières locales les plus importantes, et la fille de Sani Dangote, vice-président du groupe fondé par son frère, Aliko. Ou celui, en 2014, de la fille de Goodluck Jonathan, alors président du Nigeria… Les téléphones portables plaqués or offerts à chaque invité et la photo de la pièce montée de neuf étages aux couleurs du drapeau national laissent encore aujourd’hui songeur. Spécialiste de ces gâteaux traditionnels à Libreville, Nadine G. a sa petite idée sur le sujet: « Avec 800 convives, on ne peut pas se permettre de présenter un wedding cake lilliputien. Mais une telle pièce pour 100 personnes, c’est prétentieux et de mauvais goût… » La réussite d’une fête de mariage tient en grande partie au prestige du lieu de cérémonie, comme celui qui entoure le Green Beach, à Cotonou. À Douala, Georgette B. dit s’être inspirée des Salons Hoche, à Paris, pour bâtir sa salle des fêtes, louée de 4 500 à 10 000 euros dans le quartier d’Akwa. À Abidjan, le Weddingham Palace, inspiré du palais de la reine Elizabeth, a nécessité un investissement de quelque 150 000 euros.

Une cinquantaine de mariages s’y déroulent chaque année, moyennant 2300 euros pour la location, sans restauration ni décoration.

Fleurs hollandaises

« Le mariage, ce sont d’abord les fleurs », estime Hortense J., décoratrice depuis une vingtaine d’années à Yaoundé. « Les artificielles sont bannies de mes lieux de réception », assure Reda Fawaz, qui consent tout juste à en placer quelques-unes sur

les « zones inatteignables », comme les plafonds. Mais, même naturelles, toutes les fleurs n’ont pas la cote.

Hortense J. réserve les « exotiques », c’est-à-dire celles qui poussent au Cameroun, aux cérémonies traditionnelles. Pour les mariages religieux et civils, qui requièrent davantage de chic et de faste, elle privilégie les roses et les gypsophiles, qu’elle fait venir du Kenya et d’Éthiopie – devenus ces dix dernières années de véritables hubs de la production florale – mais aussi d’Afrique du Sud, des Pays-Bas ou de France. « Nous sommes souvent tributaires des vols des compagnies, ce qui nous contraint, en cas d’urgence, à nous adresser aux importateurs locaux, qui en profitent », regrette H o r t e n s e J. C e s somptueux bouquets peuvent représenter jusqu’à plus de 10 % du budget global. Pour le mariage de l’un de ses fils, un ancien ministre camerounais aujourd’hui emprisonné avait même confié à une équipe de trois fleuristes tout droit venus de Rungis, dans la banlieue parisienne, une coquette somme de 60 000 euros.

De nombreux Africains se sont également spécialisés dans la confection de tenues de mariage.

Boulevard de Marseille, à Marcory, Corinne Drouillet, directrice de Coco Eleganza, accueille une clientèle abidjanaise aisée en mesure de s’offrir des modèles uniques à plusieurs centaines de milliers de francs pour les cérémonies civile et religieuse.

LES UNIONS ENTRE GRANDES FAMILLES DEVIENNENT DES STRATÉGIES D’ALLIANCE POUR ACCROÎTRE LEUR PRESTIGE.

9 & 10 mars 2020 8e édition

www.theafricaceoforum.com

Pour les tenues traditionnelles portées lors des mariages coutumiers, on s’adresse volontiers à Andréa Agnifut et Sonia Talitakoum, deux sœurs qui les vendent… ou les louent, autour de 100 euros. « Pendant la cérémonie de la dot, il faut se changer entre trois et cinq fois. Les couples n’en ont pas forcément les moyens », expliquent les créatrices, qui ont confectionné en cinq ans 200 modèles différents pour des clients toujours en quête de nouveauté. Chez Trevor Ologun, dans un quartier populaire de Lagos, une trentaine de tailleurs réalisent quelque 30 costumes de mariés et de témoins par semaine, vendus 300 euros pièce. Ces vêtements représentent 80 % de son chiffre d’affaires, et l’activité ne cesse de croître.

Dans s on émis sion Walk the talk, la journaliste nigériane Tabia Princewill s’insurge contre cette surenchère et l’exhibitionnisme qui règne sur les réseaux sociaux, où chacun fait étalage de ses signes extérieurs de richesse.

Pour elle, « cet affichage donne à penser que notre valeur en tant qu’être humain dépend de la qualité de notre mariage. Plus la fête est grandiose, plus on a de l’importance socialement. Organiser un petit mariage, c’est prendre le risque de passer pour une moins que rien ». La sociologue Anita Tatchim ne dit pas autre chose : « Avec ce m’as-tu-vu, les mariages perdent tout caractère privé et sacré. »

@africaceoforum #ACF2020

JAMG - © Michal Nowicki

Vivez la Beauté

Une peau saine a besoin d’un expert Implantée au Togo depuis octobre 2003, la société Dodo (Parfumerie Industrielle et Cosmétique du Togo), devenue depuis juin 2013, Dodo Cosmetics est un expert incontesté dans le domaine de la cosmétique.

Malgré une concurrence de taille, grâce à la qualité de ses produits, la société Dodo Cosmetics a su s’imposer sur le marché national et international.

Cette qualité est le fruit combiné de l’expérience acquise par l’usine mère d’Abidjan, et du dynamisme d’une équipe très qualifiée.

Constamment à la recherche du meilleur, tout en respectant les normes dans le domaine de la cosmétique,

la société Dodo Cosmetics, dotée d’un laboratoire à la pointe de la technologie, propose des gammes de produits telles que : Clinic Clear, Maricha, Claire Dame, Code White, Dodo, le défrisant Clinic Hair et le parfum Ange d’Eden.

Tout comme Hyprogel par le passé, Dodo est devenu aujourd’hui le produit phare de la société avec un record de ventes en Afrique qui s’explique par sa formule exceptionnelle.

La société Dodo Cosmetics est en perpétuelle évolution. Aujourd’hui elle est représentée dans 75 % des pays d’Afrique, ainsi qu’en Europe et aux États-Unis.

www.dodo-cosmetics.com

Marc-Antoine Pérouse de Montclos

Docteur en sciences politiques, directeur de recherches à l’Institut de recherche pour le développement

VINCENT FOURNIER/JA

Tendances

Jihadisme transethnique

O

ADRIA FRUITOS POUR JA

n tend souvent à faire une lecture ethnique du conflit qui oppose Bamako aux jihadistes de la katiba du Macina, dans le centre du Mali. Du côté des insurgés, il y aurait des éleveurs peuls ; de l’autre, des agriculteurs dogons alliés à l’armée malienne. Les premiers prétendent traditionnellement détenir le savoir coranique et sont les héritiers d’un proto-État islamique du XIXe siècle, la Dina. Appelés péjorativement « Habe », les seconds ont été islamisés plus tardivement et n’ont pas tous renoncé à leurs croyances traditionnelles.

La complexité des sociétés de la région oblige cependant à déconstruire les idées reçues. Les Dogons parlent d'ailleurs tant de dialectes qu’il leur arrive fréquemment de recourir à la langue peule pour communiquer entre eux – en particulier ceux qui, après avoir

fui les razzias des musulmans, ont fini par descendre des refuges de la falaise de Bandiagara pour s’installer à découvert dans la plaine. Historiquement, les deux populations ont beaucoup commercé ensemble en laissant les agriculteurs et les éleveurs utiliser la terre chacun leur tour pendant les saisons humides puis sèches.

Le chef des jihadistes du Macina, Amadou Koufa, est lui-même à la croisée des chemins. Sa mère est peule, mais sa famille serait originaire d’un petit port de pêche de la périphérie de Tombouctou,

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Kabara, qui avait été établi par le colonisateur français pour accueillir les anciens esclaves Haratins et Bellas libérés dans le nord du Mali. Son père était un érudit devenu l’imam d’un village, Koufa, où siégeait d’ailleurs le tribunal islamique de la Dina au milieu des années 1820.

Aujourd’hui, le chef jihadiste cherche à transcender les clivages communautaires pour élargir sa base sociale. Il invoque les valeurs universalistes et égalitaristes de l’islam pour conspuer l’impiété et l’oppression de la noblesse peule. On prête même à ses hommes la destruction symbolique, près de Mopti, en 2015, du mausolée du fondateur de la théocratie du Macina en 1818, Sekou Amadou. Si cet attentat à la dynamite n’a jamais été revendiqué, il visait clairement à marquer les esprits et à entamer le prestige de la noblesse peule au prétexte que leur imamat n’était nullement héréditaire et que le prophète Mahomet avait interdit le culte des ancêtres, logique qui devait aussi présider à la destruction des tombeaux des saints soufis de Tombouctou en 2012.

Sur le plan tactique, Amadou Koufa a aussi pris soin de mélanger ses effectifs pour surmonter la répugnance de ses combattants à tuer des membres de leur propre lignage. Il a ainsi levé des bataillons peuls pour attaquer le pays dogon et, inversement, il a mobilisé des chasseurs dogons pour aller combattre les chefs peuls qui lui résistaient. À défaut d’être protégée par l’armée malienne, une partie de la paysannerie a dû lui prêter allégeance pour pouvoir continuer à cultiver ses champs, menacés sinon de razzias.

D’autres ont rejoint les insurgés par besoin de reconnaissance sociale ou parce qu’ils se sentaient abandonnés, voire discriminés, par les autorités. En condamnant la tradition préislamique de la dot africaine et en prônant des mariages simplifiés, le discours salafiste de Koufa a notamment séduit des jeunes gens qui ont été autorisés à épouser des femmes de castes différentes du moment qu’ils étaient musulmans.

Résultat, des katibas de Dogons sont en train de se constituer. L’une serait centrée sur la localité de Kerana; l’autre est basée à Serma, siège du tribunal islamique de Koufa. Leurs combattants sont aussi en contact, plus au nord, avec le groupe Ansar Eddine, d’Iyad Ag Ghaly, et avec la katiba du Gourma, qu’a reprise l'ancien colonel malien Ba Ag Moussa après le décès d’Almansour Ag Alkassam, un Touareg tué par l’armée française en novembre 2018. Voilà qui devrait inviter à repenser les visions par trop tranchées des soubassements ethniques des jihads africains.

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VINCENT FOURNIER/JA

Événements

Dominique Strauss-Kahn

Économiste, ancien directeur général du FMI

À l’orée d’une décennie décisive

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Pour cela, il faut évidemment des moyens qui dépassent de loin lus personne ne s’aventurerait aujourd’hui à présenter les seules capacités de ces pays. Et comme l’endettement doit l’Afrique comme un continent à l’avenir incertain. Depuis être correctement maîtrisé, l’avenir ne peut passer que par des le début du XXIe siècle, l’écrasante majorité des études contributions massives des pays avancés. Quelle qu’en soit sa et tribunes économiques convergent pour souligner le forme, l’aide internationale est indispensable. formidable potentiel de croissance du continent. En dépit de la diversité de leurs profils, de leurs atouts et de leurs défis, les Nous connaissons tous les objections récurrentes à cette convicpays africains présentent aujourd’hui un potentiel économique tion. Les uns diront que l’aide est anesthésiante (nuisible même considérable dont les discours internationaux vont de plus en selon certains) et que l’Afrique doit se développer à partir de plus refléter la réalité. ses propres forces. Les autres diront que les pays avancés ont Partout, la forte augmentation démographique crée un bien trop de contraintes domestiques pour se préoccuper du marché dynamique, une opportunité de croissance inclusive développement africain. Aux premiers, je répondrai qu’il suffit et la promesse d’un développement des classes moyennes. La de voir le dénuement, voire la misère, des banlieues des grandes jeunesse d’une population déjà largement urbanisée appelle métropoles africaines pour comprendre que les enfants qui y une modernité faite de services et de nouvelles technologies. vivent n’auront pas le temps d’attendre que le continent se L’abondance de matières premières, souvent rares, comme la développe seul. Aux seconds, je dirai que les légitimes préoccudisposition d’immenses terres arables non cultivées ouvrent pations sur le niveau des retraites ou l’étendes perspectives nouvelles dans la dividue du chômage sont peu de chose face aux sion internationale du travail si l’Afrique problèmes que posera dans les décennies sait écarter deux nuages qui aujourd’hui L’EUROPE DOIT à venir la migration vers le Nord, non plus encore obscurcissent son horizon : une CONSACRER AU de dizaines de milliers, mais de dizaines gouvernance trop souvent incertaine et un de millions d’Africains poussés par le dérècantonnement paresseux en amont de la DÉVELOPPEMENT glement climatique et la quête d’une vie chaîne de valeur. meilleure. C’est donc, bien sûr, l’Europe qui DE L’AFRIQUE DES doit être en première ligne et consacrer des Décisive, la décennie qui s’ouvre l’est RESSOURCES SANS ressources considérables au développement incontestablement. Loin de craindre un quelconque effondrement économique, COMMUNE MESURE de l’Afrique, des ressources sans commune mesure avec l’effort aujourd’hui consenti. c’est une décennie de développement qui AVEC L’EFFORT Mais le financement à lui seul ne peut doit prendre forme au service des Africains suffire.

Des modèles de développement eux-mêmes et non au bénéfice d’États tiers AUJOURD’HUI nouveaux doivent être mis en place ; par qui ne veulent voir dans le continent qu’un CONSENTI. exemple, en ce qui concerne les formes de relais de leur propre croissance, dans une l’urbanisation consécutive à la dynamique vision remodelée d’une colonisation surandémographique et à l’exode rural afin de pernée. Tout au contraire, soixante ans après les mettre à ces métropoles de s’insérer dans la mondialisation. Or, indépendances politiques, et en dépit des difficultés sécuritaires si le phénomène d’urbanisation semble rapprocher le continent largement léguées par les anciennes puissances coloniales, la d’un mécanisme largement partagé à l’échelle mondiale, les décennie qui s’ouvre doit être celle de l’affirmation des indépenvilles africaines se singularisent par leur incapacité à accéder au dances économiques. statut de métropole. Si l’on compte quatre villes africaines (Lagos, La garantie de cette indépendance passe par un effort durable Kinshasa, Luanda, Abidjan) parmi les cinquante plus peuplées dans plusieurs directions : un investissement massif dans les de la planète, aucune d’elles n’entre dans le classement des cent infrastructures et le développement de zones d’échanges régiopremières villes du point de vue du produit urbain brut (PUB). naux ouvrant la porte à la mobilisation d’investisseurs privés.

Les efforts d’élargissement du marché doivent également être D’abord, les infrastructures. Beaucoup a été fait, beaucoup poursuivis, même si les résultats sont encore décevants. Pas une reste à faire. Transports, télécommunications, énergie, éducaréunion de chefs d’État, pas un colloque conduit par les institutions tion, santé… La plupart des pays d’Afrique sont loin du compte.

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ADRIA FRUITOS POUR JA

financières internationales, pas un séminaire d’universitaires où l’on ne déplore la faiblesse de l’intégration régionale. C’est que celle-ci est vraiment indispensable pour bénéficier des effets de grand marché dont le continent recèle, mais qu’il n’exploite pas.

Il faut aussi de la volonté politique, et là, seuls les Africains euxmêmes peuvent changer les choses. Il y a là de nombreux points de croissance à gagner qui relèvent non pas de quelconques financements extérieurs mais de décisions africaines.

Il en est ainsi, par exemple, des zones monétaires. Le débat sur le franc CFA en est une bonne illustration. La réforme est évidemment nécessaire et j’ai eu l’occasion de donner mon sentiment à ce sujet [voir JA no 3049, du 16 au 22 juin 2019]. Au-delà des aspects symboliques, il s’agit avant tout d’élargir la zone de coopération monétaire en vue de faire correspondre les périmètres monétaires et les réalités économiques. Les choses semblent aller dans le bon sens, mais, pour avancer vraiment, il faut que ces zones servent à intégrer les économies des sous-régions. Il y a donc là un effort qui s’appuie sur la monnaie, mais en la dépassant, et

qui créera le grand marché dont toute industrie a besoin.

Tels sont pour moi les fondements indispensables d’un développement maîtrisé au cours de la décennie qui s’ouvre : un effort massif d’infrastructures productives et sociales largement financées par les pays avancés, au premier rang desquels l’Europe, et la création de véritables grands marchés dont les zones monétaires revisitées constituent un levier majeur.

Ce n’est qu’à ce point que la troisième composante, celle qui assurera la durabilité au développement africain, pourra prendre toute sa force ; il s’agit bien sûr du financement privé des investissements productifs. Qu’il s’agisse d’un nouvel élan à donner au private equity africain ou de la multiplication des tentatives pour orienter les transferts de devises des diasporas africaines (65 milliards de dollars par an) vers l’économie productive, le succès dépend de l’environnement créé par les infrastructures et le grand marché. Il s’agit là d’efforts considérables, mais ce sont eux qui libéreront le potentiel de croissance dont dispose l’Afrique et qui est la condition de sa survie, mais aussi de celle des pays européens. jeuneafrique no 3076H

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Tendances

Musique Amazigh Kateb

« Partout, les Algériens se parlent.

Nous faisons à nouveau connaissance »

En pleine tournée avec son groupe Gnawa Diffusion, le fils de Kateb Yacine a échafaudé un projet de Constitution qui fédère aujourd’hui des milliers de ses compatriotes sur le web.

Propos recueillis par LÉO PAJON

e public est bouillonnant, ce 21 septembre, dans l’amphithéâtre à ciel ouvert du festival Arabesques, à Montpellier. Sur scène, le groupe Gnawa Diffusion, entre musique chaâbi, ragga et funk, enflamme les corps. Tandis que le leader, Amazigh Kateb, enfièvre les esprits. Entre deux morceaux et quelques piques bien senties aux élites, toutes nationalités confondues, il rend hommage au peuple algérien avec un enthousiasme communicatif. Normal : le chanteur et militant travaille depuis février à la rédaction d’une Constitution qui puisse accompagner le mouvement.

Chez le fils de Kateb Yacine, l’engagement est tout un art. Rencontre.

L

Vous n’avez plus produit de disque depuis 2012 et la sortie de l’album Shock el Hal. Pourquoi cette longue pause?

C’est d’abord lié à des raisons personnelles. J’ai eu trois enfants entre 2010 et 2017, j’ai vécu un déménagement, une séparation… Il y a un album de Gnawa Diffusion en préparation pour le début de l’année 2020, mais je travaille sur des projets parallèles. Je planche sur de la poésie carcérale, notamment sur les textes d’Abdallah El Ouaddane, un auteur marocain emprisonné, torturé et mort au milieu des années 1980. Sa sœur m’a donné la possibilité de mettre ses textes en musique. Dans un troisième projet, Alger de La Havane, je mêle le chaâbi, le diwan algérien et les

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musiques traditionnelles cubaines. Il y a aussi une perspective historique et politique à ce travail: à un moment, Cuba et l’Algérie ont représenté une troisième voie pour les pays du TiersMonde. On oublie souvent qu’Alger a accueilli beaucoup d’immigrés d’Amérique latine. Dans mon quartier de Ben Aknoun, j’ai grandi avec des enfants chiliens, russes, uruguayens. À 6 ans je savais qui étaient Pinochet et Allende!

Gnawa Diffusion a repris la route.

Comment expliquez-vous la longévité du groupe, qui existe depuis près de vingt-sept ans?

Peut-être que cela tient à notre manière de travailler. Ce groupe, c’est une microstructure ultra-indépendante fondée sur une logique de démocratie participative. On n’a pas de manager, pas encore vraiment de tourneur, et l’on discute de tout ensemble : des structures des chansons comme des conditions de travail.

Sur le plan salarial, il y a une transparence totale. Tous les membres sont payés à parts égales, sauf moi, qui ai une double part, car je m’occupe aussi de promotion, d’écriture… On thésaurise les bénéfices et avec ça on produit

IL Y AVAIT UN RAS-LE-BOL DANS L’AIR. J’AI ÉTÉ TRÈS ÉMU DE VOIR CE PEUPLE SORTIR DE SA TORPEUR, DE SON LONG SILENCE.

nos albums. S’il y a une urgence pour l’un des membres du groupe, il peut aussi retirer de l’argent. Sachant que j’ai « bouffé » pas mal de marxisme, cela me semblait difficile que les gens ne soient pas maîtres de leur outil de production…

Avez-vous été surpris par le mouvement de contestation né en février?

Oui, comme tout le monde je pense, même si je sentais qu’il y avait un rasle-bol dans l’air depuis longtemps.

J’ai été très ému de voir ce peuple sortir de sa torpeur, de son long silence.

Ma génération a connu les années terroristes… Mais les jeunes de 20 ans qui sont aujourd’hui dans la rue n’ont pas vécu ce traumatisme. Pourtant, il y a une telle maturité dans ce mouvement ! Cela m’a fait réfléchir, écrire.

Bref cela m’a nourri.

N’avez-vous pas peur que le mouvement s’enlise?

On dit souvent que les révolutionnaires produisent des révolutions… alors que c’est l’inverse : les révolutions produisent des révolutionnaires. Il y a un différé entre le temps immédiat, médiatique, visible, des révolutions, et le cheminement intellectuel qui se fait grâce à elles dans la tête des gens. L’Algérie était devenue muette, elle ne se racontait pas, elle était devenue étrangère à elle-même.

Aujourd’hui, les Algériens se parlent, dans la rue ou ailleurs. Nous faisons à nouveau connaissance. Tout ce que le carcan du FLN a voulu étouffer ressurgit. Alors, certes, le mouvement peut donner une impression

Le joueur de guembri a repris la route avec Gnawa Diffusion.

Facebook « Écris ta Constitution »…

Oui, l’envie m’est venue avant même d’écrire une chanson ! On dit que sans la paresse des peuples, leur obéissance, aucun des régimes que nous endurons n’existerait. Les populations se désintéressent autant des textes fondamentaux que les élites s’y intéressent… pour les contourner. Nous vivons dans des systèmes, y compris en France, qui sont antidémocratiques, qui ne tiennent pas assez compte de la volonté populaire. Or tout citoyen aujourd’hui a les moyens de faire évoluer le système : nous avons des smartphones, nous sommes sur les réseaux sociaux, nous pouvons être journaliste, commentateur, acteur de l’actualité.

SOPHIE RODRIGUEZ POUR JA

Vo t re p ro j e t d e ré d a c t i o n d e Constitution a-t-il connu du succès ?

d’enlisement, mais ça bouge dans les têtes.

En mars, vous mettiez en ligne la chanson très politique « Roho ! » (« va-t’en ! »). Comment l’avez-vous créée ?

J’avais en tête toutes ces années de gabegie, de rapine organisée en Algérie… Je ne pouvais pas prévoir, à ce moment-là, que le mouvement allait durer, et je voulais qu’une chanson puisse marquer ce qui se passait.

Pour moi, la musique donne parfois plus d’informations qu’un livre sur une époque. J’ai vécu les événements d’octobre 1988 [des manifestations sporadiques dans plusieurs villes algériennes réprimées par l’armée] pour lesquels il n’y a pas à ma connaissance

de « marqueur artistique » qui permette de revivre ce moment… C’est une frustration. « Roho » s’adressait directement à Abdelaziz Bouteflika…

Pour moi, cela faisait longtemps qu’il était parti et que son frère menait la danse en s’appropriant le cachet de la présidence. Dans un système présidentialiste, il était important qu’on abatte avant tout le totem. Mais aujourd’hui les citoyens ont compris que le problème était systémique, qu’il fallait fouiner dans les textes, revoir la Constitution, obtenir la séparation des pouvoirs, une justice indépendante…

Quelques jours après le début du soulèvement, vous avez créé la page

Aujourd’hui, nous avons plus de 5 000 membre s sur notre page. Nous organisons aussi avec Hicham Rouibah, sociologue et économiste, des ateliers constituants.

Pas seulement en Algérie, où nous sommes présents dans de nombreuses wilayas [divisions administratives du pays], mais aussi en Europe et jusqu’au Canada. Le plus long est d’expliquer, de réexpliquer les fondamentaux sur les libertés individuelles, la démocratie… C’est ça qui est épuisant lorsque l’on prend le contre-pied de l’ancien système.

Mais il y a des satisfactions: à présent, chaque vendredi je vois davantage de gens qui appellent à la formation d’une assemblée constituante!

Vous avez la nationalité algérienne, avez-vous voté ?

Non, je ne vote pas. Pas dans les conditions actuelles de l’exercice du pouvoir. Le vote n’est qu’une fourchette dans la cuisine démocratique.

Le peu de souveraineté que j’ai, je ne veux pas le céder à un système politique. Je pense comme Robespierre, qui m’inspire beaucoup, que la nation ne peut déléguer que des fonctions, jamais des pouvoirs. Les pouvoirs ne peuvent être ni aliénés ni délégués.

La nation doit rester souveraine.

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Tendances MUSIQUE

Lors de votre concert à Montpellier, vous avez cité les Gilets jaunes, le mouvement populaire du Rif… Pour vous, il y a une convergence des luttes au niveau international ?

Je pense qu’il y a une prise de conscience au niveau global face à une prédation économique des multinationales qui ne connaît pas de frontières. Et qu’il y a des solutions approchantes trouvées dans différents pays. Je pense à Étienne Chouard, impliqué dans les Gilets jaunes [il

proposait de former une assemblée constituante avec des citoyens volontaires tirés au sort]. À partir du moment où il y a une internationale de la misère, il y a une internationale de la lutte contre la misère… Et je pense que quand les peuples gouverneront vraiment, il n’y aura plus de guerre: quel parent pourrait envoyer de sa propre volonté son enfant au front?

mise en avant de représentants communaux plutôt que des élus. La protection du patrimoine naturel de l’Algérie : nous aimerions que les industriels ne puissent plus s’installer n’importe où. Ce serait une sorte de barrière démocratique pour protéger la nappe phréatique [la nappe de l’Albien est la plus grande réserve d’eau douce au monde] mise en danger par l’extraction du gaz de schiste.

Il y a aussi une transition énergétique à effectuer : nous pouvons étendre le solaire dans le désert, nous pourrions même approvisionner le monde en électricité, plutôt que de pomper les hydrocarbures qui nous restent !

Quels sont vos grands combats ?

La lutte contre la corruption. La

L’écrivain algérien Kateb Yacine, ici vers 1965.

Le mouvement de protestation est presque né dans les stades, avec le chant La Casa del Mouradia… Quel rôle joue la musique dans le mouvement algérien ?

La musique est le véhicule de prédilection pour les idées du mouvement.

Il y a du propos, de la profondeur, de l’humour dans ce que les gens chantent.

RENAUD/LEEMAGE

Idir, Safy Boutella… Plusieurs personnalités de la musique se sont prononcées en faveur du mouvement.

Les artistes prennent-ils suffisamment leur part ?

DANS LES PAS DE SON PÈRE Il y a un peu plus de trente ans, le 28 octobre 1989, disparaissait Kateb Yacine, qui reste l’un des plus grands écrivains algériens, notamment grâce à son roman le plus connu, Nedjma. « Dans les années 1980, il était déjà aux côtés des manifestants… Nul doute qu’il descendrait aujourd’hui dans la rue

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s’il était toujours vivant, glisse Amazigh Kateb. Il attendait ce réveil populaire avec impatience, comme moi je l’attends. » De fait, Kateb Yacine a beaucoup travaillé sur les révolutions, s’est intéressé à Nelson Mandela, à Robespierre, sur lequel il écrivait lorsqu’il est mort. « Pour moi, il est toujours

là. Sa bibliothèque, ses textes, continuent de me nourrir, confie son fils. Le travail même que je réalise sur la Constitution est dans la veine de ses réflexions sur la démocratie. Il disait que le pouvoir n’est pas anecdotique, et qu’il doit se pratiquer tous les jours. » L.P.

Je souhaiterais que tous les artistes s’y mettent… Cela serait bien pour l’avenir du pays. Le dramaturge allemand Bertolt Brecht disait : « Celui qui ne participe pas à la lutte participe à la défaite. » J’aurais aimé qu’un collectif d’artistes se monte.

Pourquoi ne pas l’avoir créé ?

Je sais que le monde de l’art est compliqué, car on est beaucoup parasités par le business… J’ai d’abord visé les citoyens.

Pensez-vous vous installer de nouveau un jour en Algérie ?

C’est une envie ancienne. Même si c’est plus compliqué aujourd’hui avec mes enfants, et leur maman, je voudrais rentrer dans une Algérie libérée.

Et j’espère ne pas avoir à attendre d’être mort.

MESSAGE

ARMÉE GUINÉENNE,

LE CŒUR DU CHANGEMENT Depuis la réforme des Forces de défense et de sécurité entreprise en Guinée en 2011, avec l’arrivée à la magistrature suprême du président Alpha Condé, la Guinée s’est engagée dans la restructuration et la modernisation de son armée nationale.

L’objectif des autorités issues de la première élection démocratique du pays en 2010, était de transformer un grand corps malade en une institution modèle et républicaine, capable de relever les défis qui s’imposent aux nouvelles armées. Pari réussi.

Le Président Alpha Condé s’investit dans la promotion d’une armée nouvelle.

ARMÉE GUINÉENNE,

LE CŒUR DU CHANGEMENT

S

ymbole de l’indépendance nationale et de l’intégration des populations, l’armée guinéenne évolue aujourd’hui sous le signe d’un nouveau pacte mettant véritablement le pouvoir militaire sous la gouvernance des autorités civiles. C’est ainsi qu’après le rajeunissement de ses effectifs qui offre dans le futur une place de choix aux jeunes et aux femmes dans le cadre de la féminisation de l’administration publique, 4 000 membres des forces de sécurité ont connu une mise à la retraite, dans le cadre d’un programme d’accompagnement et de mesures sociales. La priorité pour le gouvernement du Président Alpha Condé est désormais consacrée à la formation des militaires pour accroitre leur efficacité. L’avancement en grade, se fait à l’avenir sur une base rationnelle d’encadrement et de formation, grâce aux nouveaux outils d’acquisition des connaissances et d’accès à la technologie.

Cet enseignement devrait être amélioré de manière constante, par des cycles d’études et de stages, pour hisser le corps des militaires guinéens au niveau des grandes armées contemporaines.

Alpha Condé, Président de la République de Guinée.

Le Président au traditionnel dépôt de gerbes sur la place des Martyrs.

Depuis 2011, contrairement aux années passées, l’armée guinéenne ne participe plus au maintien de l’ordre public, ce rôle incombe désormais à la gendarmerie nationale. L’armée se cantonne quant à elle, à son rôle classique de défense du territoire, à la protection des institutions et de la paix sociale. Tout en participant à de nombreux projets de développement dans les différents chantiers ouverts à l’intérieur du pays. L’institution militaire s’attelle également à améliorer les conditions de vie matérielles des soldats par la réhabilitation des casernes.

Afin d’offrir un meilleur cadre pour l’exercice de leurs activités à tous ces hommes d’honneur qui défendentlaGuinée.Cettearmée,quinecomptaitque 737 hommes dont 50 sous-officiers et 687 hommes de rang, à sa création en 1958, s’est illustrée dans le passé auprès d’autres pays frères, dans le cadre des luttes pour la décolonisation en Angola, Guinée Bissau et Mozambique. Elle s’active aujourd’hui dans de nombreuses missions de paix de l’ONU, de l’Union africaine ou de la CDEAO, à travers le monde. Une action destinée à la stabilité du continent et de l’espace régional en proie à quelques crises sécuritaires.

Une initiative utile pour faire face aux autres défis du moment : la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme religieux, le trafic d’êtres humains, les périls climatiques et toutes les autres formes d’instabilité qui menacent les pays africains.

MESSAGE Questions-Réponses

Général de Corps d’armée Bruno Clément Bollée Vous avez participé à la réforme du secteur de la sécurité en Guinée après l’élection du Président Alpha Condé. Dans quel état précis avezvous trouvé l’armée guinéenne ?

C ’est d’abord dans les rues de Conakry, début 2011, que j’ai découvert les militaires guinéens.

Ils étaient partout, vacant à leurs « affaires », portant pour beaucoup de faux galons et insignes de brevets récupérés je ne sais où. Le nombre de « généraux » était impressionnant et j’ai vite compris que tout cela symbolisait les difficultés qui nous attendaient pour aider à la mise en œuvre de la réforme du secteur de sécurité.

En fait, c’est le pays tout entier qui était en plein chaos. Après toutes ces années difficiles, la Guinée était dans une situation désastreuse et, dans ce contexte explosif, l’armée nationale vivait dans l’anarchie la plus totale, l’apocalypse absolue.

Mais le plus marquant était sans doute l’état psychologique de la population. Il y a des regards qu’on n’oublie pas, chargés de terreur, que j’ai croisés à Sarajevo, à Bangui, à Abidjan, à N’Djaména. C’est cette même terreur que je lisais dans les yeux de la population guinéenne.

J’ai compris là encore qu’il y avait aussi à prévoir un immense travail de restauration de l’image du militaire auprès de la population guinéenne.

Dans le détail, le mal était plus grave.

Pas d’unités constituées, des soldats aux uniformes disparates, pas de politique de ressources humaines, des chefs absents de leurs unités, œuvrant à leurs « affaires », pas d’instruction, pas d’entraînement, des casernes en ruine, des équipements obsolètes. En fait l’outil n’était plus géré depuis de longues années et survivait dans un état d’anarchie prononcé. C’était ça la réalité de l’armée guinéenne alors.

Bruno Clément Bollée, Général de Corps d’armée.

Cette réforme concernait également la gendarmerie et la police. Comment se portaient-elles en 2010 ?

de déstabilisation était grand. Mais tout était à faire ou à refaire, le chantier était total et concernait tous les domaines. Il s’agissait donc de ne pas se tromper et s’attaquer d’abord aux vraies priorités.

Evidemment, l’urgence de cette situation fragile, potentiellement explosive, orientait d’abord l’action sur le volet sécuritaire. Le Président n’a pas hésité longtemps et s’y est attaqué résolument. Réconciliation, démobilisation, restructuration, je me rappelle lui avoir exposé les trois incontournables défis auxquels sont toujours confrontés les gestionnaires de toute sortie de crise.

Et il a alors très vite compris qu’en Guinée, il fallait s’attaquer à ces défis immédiatement, simultanément et de façon coordonnée. La décision était particulièrement courageuse à l’époque, on l’a vite oublié, car les chefs militaires n’étaient pas en

La police et la gendarmerie étaient dans le même état de déstructuration que l’armée. Pour ce qui concerne la gendarmerie, les effectifs étaient très faibles, notoirement insuffisants. Pas d’instruction, pas d’enEn 2010, la situation était traînement, aucune motivation, c’était désastreuse. Casernes en là aussi l’anarchie. ruines, officiers affairistes, Certains gendarmes assuraient pendant population terrorisée… leur service de la sécurité privée. La police ne valait confiance, certains ruminaient dans pas mieux, elle aussi dans un état leur coin, un très fort sentiment pitoyable. Les commissariats étaient de suspicion régnait partout. De vides, les policiers n’obéissant plus même, le Président a vite compris à aucune hiérarchie. qu’il fallait compter d’abord sur les Guinéens pour trouver une réponse En fait, tout cela faisait peser alors sur le pays un risque sécuritaire guinéenne à cette sortie de crise. majeur, celui de voir un mauvais coup surgir à tout moment pour s’emparer du pouvoir.

Quelle était la vision du Président Alpha Condé lorsqu’il a décidé de cette réforme en profondeur ?

Le Président était très conscient que cette situation d’extrême fragilité ne devait pas durer tant le risque

L’appropriation de sa gestion était donc fondamentale, tout en faisant comprendre aux acteurs internationaux que leur présence était ardemment souhaitée pour accompagner l’application de solutions guinéennes et non pour imposer des solutions extérieures concoctées à New York ou à Bruxelles, déconnectées des réalités locales.

MESSAGE

ARMÉE GUINÉENNE,

LE CŒUR DU CHANGEMENT

À quels résultats êtes-vous parvenus ?

En quoi le secteur de la sécurité en Guinée est-il différent aujourd’hui de ce qu’il était en 2010 ?

Nous nous sommes tout de suite attaqués à la réforme du secteur de la sécurité (RSS), en répondant simultanément à une double exigence, convaincre et reconstruire.

Convaincre la foule des impatients est une urgence obligée. Reconstruire nécessite à l’inverse de prendre du temps, car faut viser juste pour édifier le futur outil.

En Guinée, le processus a été exécuté de façon nominale. Pour convaincre, la réalisation immédiate de nombreuses actions de portée modeste, utiles et réalisables dans de brefs délais a fait mouche. La formation technique individuelle a ainsi démarré sans délai dans de nombreuses spécialités dont on savait qu’elles auraient leur place dans une armée restructurée. Au plan collectif, la décision de former un bataillon aux opérations de maintien de la paix a permis de mobiliser des effectifs importants. Au total, cette

suractivité a joué le rôle attendu, montrer concrètement que la sortie de crise démarrait. Pour ce qui est de reconstruire, la phase de réflexion a été menée tout de suite, rassemblant toutes les autorités concernées, civiles comme militaires, avant sa réalisation effective les années suivantes.

ses effectifs pour permettre une couverture nationale. L’instruction aux missions de maintien de l’ordre a fait l’objet d’une grande attention, les unités apprenant à intervenir sans arme à feu, ce qui est rare en Afrique. Pour cela, un entraînement intensif a été mis en œuvre de façon très professionnelle.

Parallèlement, il fallait résorber les sureffectifs importants de troupes et Ainsi en un peu moins de trois restaurer l’image militaire auprès de ans, les résultats atteints ont été la population. Les non-immatriculés remarquables. La situation séont ainsi été reconvertis en pompiers curitaire s’est apaisée de façon au sein d’Unités de Protection Civile, spectaculaire, comme le reconcréées pour l’occasion, rapidement naissaient tous les partenaires opérationnelles et louées en 2014 de la Guinée. Le Président allait pour leur comportement héroïque durant la douloureuse épidémie Ebola. De … Neuf ans plus tard : même, dès 2012, l’ASCAD dignité retrouvée, image (agence du service civique d’aide au développement), restaurée, les soldats bénéficiant d’un encadrement sont fiers de servir leur pays. militaire, était créée au profit de la jeunesse guinéenne, devenue poursuivre son plan et s’attaquer aujourd’hui le fleuron national en au chantier minier. Hélas, au même matière d’insertion des jeunes, copié moment, l’épidémie Ebola a frappé par plusieurs pays africains. cruellement la Guinée, figeant le pays et l’isolant trop longtemps Enfin, les rues de la capitale ont été de la communauté internationale vidées des nombreux individus en et de son accompagnement. Cette uniforme occupés à bien triste besogne. Replacées dans les casernes, lourde contrariété n’a cependant les forces restructurées ont repris pas entamé la farouche volonté l’entraînement, de façon profes- présidentielle d’atteindre l’objectif. sionnelle, et, entre autres, l’objectif de formation aux Opérations de Maintien de la Paix a été confirmé.

Un bataillon des forces guinéennes a été rapidement déployé au Mali au titre des Nations Unies, il y est encore aujourd’hui œuvrant au service de la paix.

Dans le même temps, gendarmerie et police ont été totalement restructurées, la première renforçant

En conclusion, et pour répondre à votre toute dernière question, l’outil national de sécurité et de défense de 2019 est structuré de façon cohérente, les unités sont commandées, s’instruisent, s’entraînent et interviennent, et les soldats, à la dignité retrouvée et à l’image restaurée auprès de la population, sont fiers de servir leur pays. C’est tout l’inverse de 2010 !

Général de Corps d’armée Bruno Clément Bollée Ancien commandant des forces françaises à Djibouti et en Côte d’Ivoire, ancien directeur de la coopération de Sécurité et de Défense au Ministère français des Affaires Étrangères, consultant sur la réforme des Forces de défense et de sécurité guinéennes.

DIFCOM/DF - PHOTOS : DR.

Mais l’immense chantier sécuritaire était, dans l’esprit du Président, à replacer dans une vision politique étatique bien plus vaste. Pas de sécurité sans développement, pas de développement sans sécurité, il avait fait sien le vieil adage et considérait que les résultats de l’effort sécuritaire, une situation apaisée, lui permettraient de décider au moment opportun d’impulser le développement économique. Ainsi, il voulait maintenir l’équilibre général entre gestion de la sécurité et du développement, précaution vitale lors de toute sortie de crise.

THE SOURCE

Tendances

MARRAKECH

Sorties Ces rooftops qui montent Aménagés en bars lounge et clubs de nuit, ces toits-terrasses font fureur en Afrique. Tour d’horizon des meilleurs spots.

EVA SAUPHIE

i les toits des célèbres buildings de New York ont longtemps servi à faire sécher le linge au soleil, ils ont été réaménagés dans les années 2000 pour accueillir des bars lounge et des clubs de nuit à ciel ouvert, offrant une vue panoramique sur la skyline. Skybars, rooftops, toits-terrasses…

Appelez comme vous voudrez ce concept né sur les hauteurs de Big Apple, qui a conquis l’Europe et qui monte aujourd’hui en Afrique. Portés par le succès florissant de l’hôtellerie cinq étoiles (48 % du marché en Afrique de l’Ouest en 2018), les établissements de haut standing du continent misent aujourd’hui sur cette tendance qui a d’ores et déjà conquis leur clientèle d’affaires cosmopolite autour du globe. Avec un avantage supplémentaire: contrairement à ceux des capitales européennes et américaines, qui ne sont souvent ouverts que l’été, les rooftops africains peuvent accueillir leurs hôtes toute l’année.

En marge des grands complexes touristiques calqués sur le modèle occidental fleurissent aussi des sites plus atypiques, conçus dans le respect de la topographie du territoire, avec vue plongeante sur la mer ou sur des terrains verts, plébiscités par la jeunesse branchée. Ainsi Babi redéfinit ses maquis, Marrakech revisite ses riads, Tunis et Dakar investissent leurs buttes et collines… À chaque ville son urbanisme et son patrimoine, à chaque concept son positionnement.

Tour d’horizon, haut perché, des meilleures adresses du continent.

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Au sommet de l’hôtel The Source

Niché au-dessus du restaurant de cet hôtel 4 étoiles inauguré en 2015, à 10 km du centre-ville, sur la route de l’Ourika, ce rooftop aux allures de salon « beldi » chic offre une vue à 360 degrés sur deux hectares de jardin parsemés de cactus, d’oliviers et d’orangers. Un véritable écrin de verdure, comme l’avait imaginé le Français Laurent Cohen pour son luxueux établissement qui dispose de 13 chambres, dont quatre suites et deux villas. « Quand le chantier a commencé, en 2010, c’était désert, se souvient Julie Strasser, directrice commerciale. Tout a été construit pierre par pierre dans l’idée de pouvoir contempler la nature. » Mais c’est surtout grâce à son ouverture panoramique sur l’Atlas que le bar à cocktails de The Source se distingue. Pendant la belle saison, on y admire le coucher de soleil à la lueur des lampions tout en profitant de concerts live ponctuels. Tandis qu’ « en hiver, la vue sur les montagnes enneigées est exceptionnelle ».

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Tendances SORTIES

DAKAR Cap sur le Phare des Mamelles

DAR EL DJED

Direction le point culminant de Dakar, sur l’une des deux collines des Mamelles de la presqu’île du Cap Vert. C’est ici que se dresse, depuis 1864, le phare du même nom, symbole du patrimoine national, qui sert encore de repère aux navigateurs.

Nouveauté depuis décembre 2017, un restaurant doté d’un rooftop à la décoration industrielle et élégante vient animer ce site longtemps déserté par les entrepreneurs.

Un pari fou que l’on doit au couple formé par la Sénégalaise Diana Malick et le Marocain Hicham Bounaffa. « Dakar est un pays plat! Nos fournisseurs et techniciens rechignent parfois à monter!», s’amuse le cofondateur. D’où le caractère assez exceptionnel du lieu qui domine la ville – de la pointe des Almadies au nord à l’île de Gorée au sud, en passant par le monument de la Renaissance africaine – et l’océan. « On a dû rehausser le sol de la terrasse de 50 m et tout remettre à plat pour que nos clients puissent tous profiter du panorama », détaille Hicham.

Pour y accéder, à 126 m au-dessus du niveau de la mer, il faut grimper dans l’une des navettes gratuites qui desservent le site toute la nuit à partir du jeudi, 19 heures, quand le phare ferme ses portes au public. Une fois perchée, la clientèle, composée de Sénégalais, d’expatriés européens et de membres de la diaspora libanaise, peut enfin festoyer au son de la playlist internationale de DJ triés sur le volet. Un concept chic mais pas VIP, qui a permis d’augmenter la fréquentation du phare.

DOUALA

NABIL ZORKOT

ABIDJAN Sur les toits du Tôa

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En matière de rooftop, Babi s’est fait une réputation grâce à la spacieuse terrasse arty du Bushman Café. Ce concept hybride entre restaurant, galerie et bar culturel a été créé en 2016 par le diplomate et collectionneur d’art Alain Kablan Porquet. Logé au deuxième étage, ce havre de paix où se donnent rendez-vous les intelligentsias ivoirienne et étrangère est la garantie d’une pause-café, détente et nature.

Dans le sud de la ville, sur l’artère VGE, les lumières artificielles se mêlent aux feux des véhicules traversant le tentaculaire pont Henri-Konan-Bédié… Voilà le spectacle nocturne que révèle le Tôa. Ce buddha bar suspendu inspiré des terrasses balinaises est installé depuis 2010 au troisième étage de l’imposant immeuble Massaï. Palmiers, bambous, parasols… Une fois confortablement assis dans l’un des fauteuils douillets, à la main un cocktail aussi sucré que la note est salée, on oublie vite le brouhaha de la ville. Ici, dress code chic oblige, l’ambiance se veut lounge et huppée. Et le dépaysement, que l’on retrouve également dans l’assiette aux saveurs eurasiennes, total.

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En plein ciel, à l’hôtel Beauséjour-Mirabel

Yaoundé peut se targuer d’héberger le très cossu Panoramique, skybar perché au 11e étage de l’hôtel Hilton. Mais Douala n’est pas en reste avec Plein Ciel, un toit-terrasse plus modeste, mais dont la programmation en période de fêtes a de quoi secouer le vieux quartier d’affaires d’Akwa. Tous les dimanches de décembre et jusqu’au 5 janvier 2020, l’esplanade de l’hôtel Beauséjour accueille Les Sundayz: le rendez-vous musical hype de la capitale économique du Cameroun.

Depuis le lancement du concept, en 2015, ce sont chaque fois plus de 200 personnes, majoritairement jeunes, qui s’y massent, cocktail ou chicha à la main, pour festoyer au rythme de l’afro-pop impulsée par la crème des DJ locaux. Le reste de l’année, le rooftop est ouvert pour le déjeuner ou le dîner.

TUNIS

Réconcilier les Tunisois avec la médina, c’est l’objectif que s’est fixé l’équipe de l’hôtel spa Dar el Jeld, campé dans la rue du même nom, au cœur de la vieille ville.

Cet ancien hammam désaffecté a rouvert ses portes en 2017 après huit ans de travaux. Depuis, une quarantaine de personnes se réunissent régulièrement à son sommet pour découvrir la jolie terrasse immaculée donnant sur les toits tout aussi blancs du centre historique de Tunis.

Habituellement boudée par les quidams à la tombée de la nuit, la médina peut désormais revivre au crépuscule. « Nous avons voulu réinstaller la vie nocturne qu’il y avait autrefois, commente Lofti Hamadi, gérant du rooftop. La fréquentation du toit-terrasse, et de l’établissement dans son ensemble, permet de recréer une dynamique économique et de sauvegarder l’artisanat qui fait la réputation de la vieille ville. » Mais pas question d’organiser des after work survoltés. Dans une ambiance contemplative et raffinée sur fond de musique chill, le visiteur est invité à vivre une expérience en harmonie avec les vieilles pierres.

PHARE DES MAMELLES

Sur les hauteurs de l’hôtel Dar el Jeld

BAMAKO

Ibiza Sky, en apesanteur

IBIZASKY

Impossible de manquer ses néons roses. Logé au-dessus du club du même nom, ce vaste rooftop situé à quelques encablures de la rue Princesse, réputée pour ses nombreux bars et discothèques, est devenu le nouveau QG de la jeunesse bamakoise en un an seulement. Avec ses impressionnantes baies vitrées lumineuses, son décor futuriste, ses orchestres ou playlists taillées pour Trace TV, ce skybar a su reconquérir sa clientèle, qui avait peu à peu déserté la mythique boîte de nuit. On y va pour s’ambiancer et dîner (au menu : une cuisine variée de qualité mais sans prétention, des cocktails, du champagne, des softs…), avant de fouler les planches jusqu’à l’aube.

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Edmond Bertrand

Professeur, doyen honoraire de la faculté de médecine d’Abidjan

VINCENT FOURNIER/JA

Tendances

Comment vaincre Ebola

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– Il faut d’abord rappeler que le traitement est efficace, bien que de façon encore insuffisante : lors des premières épidémies, les malades non traités avaient une mortalité effroyable de 90 % et plus; actuellement, elle est de 65 % à 70 %. C’est encore beaucoup trop, mais c’est tout de même 30 % de malades guéris.

– Les malades ne doivent pas être « cachés ». Denis Malvy a eu l’heureuse idée de traiter les patients dans des cases aux parois transparentes disposées en cercle. La zone centrale est réservée aux traitants en tenue étanche. Autour des cases, un couloir permet aux familles de voir les leurs. J’adhère d’autant plus à cette idée que c’est exactement le schéma du service de soins intensifs de l’Institut de cardiologie d’Abidjan, dont j’ai dirigé la construction: les familles voient les malades et, mieux, peuvent leur parler par téléphone.

– Un point capital : on peut confirmer le diagnostic par un test rapide et fiable.

Le professeur Denis Malvy – en compagnie de son équipe de volontaires bordelais – s’est rendu sur place et a très courageusement affronté les difficultés. Son intervention, le 15 octobre, à l’Académie de médecine a été saisissante de vérité et d’honnêteté. Il faut, selon lui, traiter les causes de cette hostilité en modifiant les méthodes et la communication et en agissant en toute transparence.

– Les malades décédés ne doivent pas être « volés » à leurs familles. Ils doivent avoir des rites funéraires dignes et sécurisés pour respecter la tradition et éviter la contagion.

– Il faut appliquer rigoureusement les mesures réellement utiles pour empêcher la contagion : éviter tout contact avec la salive, les vomissures, les selles, les urines, le sang, et mettre une tenue étanche pour approcher les malades. En revanche, il faut s’abstenir de prendre des mesures néfastes et probablement inefficaces, comme la destruction de cases ou l’interdiction de la « viande de brousse » (très utile et appréciée dans l’alimentation).

– Faire connaître les moyens disponibles pour lutter contre l’épidémie : un vaccin, protecteur pendant deux mois, nécessitant une seule injection et qui a démontré son efficacité dans les épidémies ouest-africaines antérieures, a permis de protéger 240 000 personnes étant au contact des malades ou au contact de personnes en contact (« ring vaccination »). Deux autres vaccins de plus longue durée d’action sont en cours d’évaluation, mais ils nécessitent deux injections.

– Nous n’avons pas de médicament détruisant le virus lui-même. Après l’échec des antibiotiques, on utilise maintenant des anticorps monoclonaux qui font l’objet d’études randomisées. C’est dire l’importance des traitements classiques du choc infectieux, de la diarrhée profuse, des hémorragies et des insuffisances viscérales.

Aux fantasmes de déni et de peur, il faut opposer la vérité et la clarté : oui, la maladie d’Ebola existe, oui, elle est gravissime.

Mais on peut la guérir d’autant plus facilement qu’on obtiendra la coopération de la population. Qui est indispensable.

ADRIA FRUITOS POUR JA

epuis août 2018 sévit en République démocratique du Congo la treizième épidémie due au virus Ebola – certains disent la vingtième – depuis sa découverte, en 1976. Le bilan d’une année est de 3500 cas détectés et de 2 000 morts. Cette dernière épidémie est celle au cours de laquelle les équipes soignantes se heurtent le plus à la méfiance, et même à l’hostilité, des populations menacées par la maladie, notamment dans la région de l’Est, très perturbée par des « milices armées politico-mafieuses ».

On déplore 132 attaques violentes contre des équipes, agressées physiquement, avec enlèvements et meurtres, et dont les locaux et le matériel sont détruits. La population est trompée par de fausses informations : les Occidentaux viendraient pour diffuser la maladie et non pour la combattre, ils feraient des trafics d’organes et camoufleraient des recherches d’uranium et d’or, ils stériliseraient les femmes !

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e ANNIVERSAIRE

2010 - 2020

Une décennie au service du développement durable en Afrique VERS DE NOUVEAUX DÉFIS EN 2020

2020 marque le 10e anniversaire de la création de l’institution CODEV International.

Une décennie de réalisations, d’avancées significatives et de projection en vue de relever de nouveaux défis. fonds (BAD, Banque mondiale, GIZ, JICA, AFD, KfW, USAID…). De plus, dans ses centres de Tunis et de Paris, elle a réussi à se hisser au rang de première destination des responsables chargés des programmes socio-économiques en Afrique.

Fathi SAIDI Expert-comptable inscrit au tableau de Paris Inscrit au tableau de Tunis Président fondateur de CODEV International

RENFORCEMENT DES CAPACITÉS

C

ODEV International est une institution de renforcement des capacités, d’appui institutionnel et de soutien aux économies en transition. Sa mission centrale est d’œuvrer à édifier le socle de compétences et de connaissances nécessaire pour une gouvernance saine, dynamique et efficace des questions de développement.

Grâce à une organisation académique et technique axée sur la recherche, CODEV international se démarque de ses homologues par un processus d’innovation en perpétuelle évolution qui permet d’offrir des programmes inédits répondant à des besoins très spécifiques et ciblés en matière de renforcement des capacités des acteurs et des partenaires techniques au développement.

Ces programmes couvrent une large gamme de thématiques : le management des projets et des programmes de développement, la lutte

pour l’émancipation CODEV International s’engage des inégalités. de la femme et la réduction

Grâce au sérieux de soon travail d’encadrement et de coordination des programmes de renforcement renfor des capacités et grâce à ses prestations d’assistance technique dans de nombreux pays appartenant à plusieurs communautés économiques régionales (CER) d’Afrique, et ce depuis plus d’une dizaine d’années, CODEV International est aujourd’hui une fierté pour le continent.

Son application, la haute qualification de ses experts, la rigueur scientifique de ses méthodes et de ses standards de formation ont fait que cette institution a gagné la confiance et le respect des bailleurs de

on de rencontre, d’échange CODEV International, Instituti d’horizons divers, animés par et de partage entre acteurs q e. nt de l’Afriqu é lution: le développeme ê e réso une mêm

contre le changement climatique, l’égalité de genre, la lutte contre la pauvreté, l’agriculture intelligente, la sécurité alimentaire, le secteur WASH (Water, Sanitation and Hygiene), l’électrification, la communication, la décentralisation, l’évaluation des politiques publiques, la modernisation de la gouvernance publique, etc.

APPUI INSTITUTIONNEL CODEV International est aujourd’hui une institution qui apporte son soutien et son savoir-faire à de nombreuses organisations : ministères transversaux et sectoriels, structures publiques décentralisées, or-

MESSAGE ganisations parapubliques, sociétés d’État, partenaires techniques et financiers, agences chargées de programmes, etc., en leur proposant une gamme riche et diversifiée de services- conseil, de programmes de formation et de systèmes d’aide à la décision.

JAMG - PHOTOS : D.R.

Atelier sur l’intégration des problématiques liéées au changement climatique dans la planification et la budgétisation du développement nationnal, à Bangui, en Centrafriquue.

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CODEV propose un appui à la prise en compte du changement climatique dans le développement national.

Le changement climatique constitue un défi capital à l’échelle tant nationale que régionale ou planétaire. Il impactera certes tous les écosystèmes ainsi que l’ensemble des sociétés humaines, mais diversement et à différents degrés. L´Afrique est le continent le plus vulnérable à la variabilité et au changement climatique. Y faire face requiert des implications et des actions aux niveaux local, régional et global.

Parfaitement convaincu de l’ampleur et de la portée de ce défi, CODEV International a investi massivement énergie et ressources dans l’appui aux efforts nationaux et internationaux pour l’intégration du changement climatique en tant que question transversale dans les plans de développement.

Des gouvernements, des ministères, des agences et diverses structures de la quasi-totalité des pays d’Afrique ont bénéficié des programmes de CODEV International. Citons la RD Congo, le Congo-Brazzaville, la Mauritanie, le Niger, Madagascar, les Comores, Djibouti, l’Angola, la Guinée-Bissau, le Tchad, la Guinée-Conakry, le Bénin, le Cameroun, le Burkina Faso, Le Gabon, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Mali, la Centrafrique, le Burundi, le Rwanda, le Togo.

L’année 2020 sera marquée par le lancement de deux grands projets.

2020 : LES PERSPECTIVES ET LES HORIZONS >1. ACCRÉDITATION DÉVELOPPEMENT AGRICOLE La situation agricole en Afrique est loin d’être rassurante… L’agriculture fait face, dans ce continent, à de nombreux défis qui retardent son développement. Les pénuries alimentaires chroniques que connaît le continent demeurent obstinément sans solution.

Partant de ce constat, l’Institut national agronomique de Tunisie (INAT), le plus ancien établissement d’enseignement supérieur agricole en Afrique, et CODEV International ont signé une convention de coopération en vertu de laquelle les deux parties unissent leurs compétences pour développer, mettre en œuvre et piloter des activités de

LE MOT DE M. RIDHA MEZNI DIRECTEUR GÉNÉRAL DE CODEV La vision de CODEV International est celle d’une Afrique autonome, ayant la capacité d’atteindre son propre développement.

Pendant la période de son plan stratégique 2020-2024, CODEV travaillera sans cesse dans ce sens en soutenant davantage le processus d’innovation (en s’ouvrant à de nouveaux marchés, en contractant d’autres partenariats, en généralisant la certification de ses séminaires, etc., pour que les priorités de développement continental de l’Afrique – et plus spécifiquement les agendas de développement – soient efficacement atteintes.

renforcement de capacités, pour former et accréditer des managers spécialistes dans plusieurs domaines d’expertise propres aux réalités du secteur agricole.

>2. « CODEV GOVERNANCE » Il est unanimement admis que la trajectoire de croissance à long terme de l’Afrique dépendra beaucoup du traitement efficace des déficits de gouvernance politique, économique, sociale et environnementale.

CODEV lance en 2020 son programme CODEV Governance. Totalement innovant et inédit, ce programme vise à former et à accréditer des leaders capables de gérer le développement durable dans ses différents aspects.

Ce programme, exclusivement en anglais, sera assuré dans quatre centres : Johannesburg, Tunis, Genève et Londres.

“

RYM RADDAOUI DIRECTRICE COMMUNICATION Nous œuvrons à former et à faire émerger une nouvelle génération de leaders outillés des bonnes pratiques pour conduire le changement vers une gouvernance transparente axée sur le développement durable.

CODEV INTERNATIONAL 17, avenue de jugurtha – Mutuelle Ville 1082 – Tél. : (+216) 71 844 645

www.codev-international.com

Tendances

Éditorialiste sénégalais

Maîtresse d’un homme marié, ou la parole libérée

série télévisée qui a fait l’objet de moult articles ’ estdansunela presse locale et dans plusieurs médias internatio-

naux : Le Monde, la BBC (dont le top 100 des femmes les plus influentes de 2019 répertorie Kalista Sy, la réalisatrice de la série), Jeune Afrique… Maîtresse d’un homme marié aura été le phénomène audiovisuel de l’année au Sénégal. Et aussi sur YouTube, avec à ce jour 2,5 millions de vues pour le cinquantième et dernier épisode. Diffusé de janvier à octobre, tous les lundis et vendredis en soirée sur la chaîne de télévision 2sTV, le programme a séduit un public majoritairement féminin.

Le synopsis? Une jeune héroïne qui entretient une relation avec un homme marié – d’abord clandestine, puis (re)connue de la femme de ce dernier, modèle d’épouse soumise mais meurtrie. Autour d’elle, une galerie de seconds rôles féminins, marqués, qui par un viol durant l’enfance, qui par la violence d’un mari accro à l’alcool, ou encore sous l’emprise d’un mariage forcé.

La série est sans conteste le lieu d’une parole féminine libérée. Mais, pour ses détracteurs, la goutte de trop aura été la phrase de la « maîtresse », qu’on peut traduire ainsi du wolof, langue utilisée dans la série : « Ce que je possède, c’est ma chose: je la donne à qui je veux! » Allusion, présumée sexuelle, suffisante pour que l’association islamiste Jamra demande l’interdiction de l’objet du délit (ou du défi ?) pour incitation à la débauche, encouragement à la fornication et « atteinte aux valeurs morales et culturelles sénégalaises » (sic). Après quelques jours de polémique, la série et l’association moralisatrice ont trouvé une solution en forme de jugement de Salomon: la série pourra continuer, avec un droit de regard de Jamra sur le scénario.

Qu’est-ce qui a valu à cet objet télévisuel un tel succès et un tel impact? Donnons la parole aux femmes. Presque toutes affirment que Maîtresse d’un homme marié décrit une réalité tue, au nom de la pudeur, dans laquelle les femmes « sont torturées et les hommes mis sur un piédestal ». « Cela décrit la situation des Sénégalaises, que leur éducation et la société obligent à tout accepter de leur mari, souligne Astou, femme active, mariée et mère de trois enfants. C’est une tradition perpétuée de mère en fille. Et celles qui se révoltent ont, comme par hasard, un destin forclos, pour reprendre Césaire : elles sont atteintes d’une affection incurable ou d’une maladie mentale, sont abandonnées, doivent consulter un psychiatre ». Fatimata, expatriée dans un pays d’Europe

144

jeuneafrique no 3076H

du Sud, a été révoltée par la levée de boucliers de Jamra & Co : « Pendant vingt ans, on a eu des telenovelas brésiliennes, argentines et autres, comme Rubí, qui mettaient en scène des relations amoureuses adultères et scabreuses. Et ils n’ont rien dit. Pourquoi, quand ça parle de la société sénégalaise, ils s’offusquent ? Ce sont

ADRIA FRUITOS POUR JA

C

DR

Ousseynou Nar Gueye

des tartuffes ! » Et Dior, mariée et divorcée deux fois, de conclure : « Si ce qui est décrit dans la série était de la fiction, comment expliquer l’existence dans notre société de coépouses ? » En tous les cas, la question a eu le mérite d’être posée sur la place publique: cette série est-elle le reflet ou non du Sénégal contemporain? Sur un marché matrimonial concurrentiel, la femme sénégalaise reste-t-elle objet ou est-elle devenue actrice de son propre destin? Quoi qu’il en soit, la parole féminine se libère dans le pays, notamment sur la toile. La youtubeuse « Khoumb té dagane » (« Coquin mais halal », en wolof), divorcée et portant le voile religieux, donne des conseils sur le couple et sur le sexe aux femmes… et aux hommes. Mais, dans le même temps, un sondage d’Afrobaromètre révélait à la fin d’octobre que 37 % des Sénégalais estimaient « qu’il [était] normal, dans certains cas, de battre son épouse ».

Du chemin reste à faire. Mais des portes s’ouvrent.

RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI Ministère de l’Énergie chargé des Ressources Naturelles

VERS UNE ÉNERGIE DURABLE ET RENOUVELABLE La République de Djibouti est engagée dans une politique énergétique ambitieuse de promotion des énergies renouvelables.

Cette politique s’inscrit dans la vision 2035 du gouvernement qui aspire à faire du pays une économie émergente.

COMMUNIQUÉ

VERS UNE ÉNERGIE DURABLE ET RENOUVELABLE

L

a feuille de route que le gouvernement a préparée dans ce cadre comprend la programmation et les priorités énergétiques. Longtemps sous la dépendance exclusive des énergies fossiles importées, le pays, depuis quelques temps, s’est donné les moyens de dépasser cette dépendance.

Actuellement, grâce à l’interconnexion hydroélectrique avec l’Éthiopie, plus de 60 % de l’électricité distribuée est d’origine renouvelable. Parallèlement le gouvernement a lancé une série d’études pour identifier et quantifier les ressources énergétiques exploitables et mobilisables pour passer au tout renouvelable dans son apprivoisement énergétique. Dans ce cadre, des études sur les énergies d’origine géothermique, éolienne et solaire ont démontré que le pari des énergies renouvelables peut être facilement gagné. Avec une croissance économique estimée à 7 % en 2018, le gouvernement est conscient que la disponibilité énergétique constituera un paradigme indispensable, aussi bien pour le développement économique que pour le développement social inclusif

Des études sur les énergies d’origine géothermique, éolienne et solaire ont démontré que le pari des énergies renouvelables peut être facilement gagné. des populations. La feuille de route du gouvernement a concentré sa programmation et ses interventions autour de trois grands domaines, en conformité avec la vision 2035.

I.

La transformation structurelle du secteur de l’énergie en vue du développement durable Le gouvernement a déjà lancé ce processus par une série de réformes du secteur de l’énergie, notamment par la libéralisation du marché de l’énergie. Le gouvernement a également lancé des initiatives audacieuses pour encourager la formation d’un partenariat secteur privé/public dans les investissements énergétiques. Toutes ces initiatives, actuelles et à venir, visent à réduire les risques liés aux investissements dans l’énergie renouvelable et à adopter une stratégie cohérente et globale d’engagement du secteur privé dans le secteur de l’énergie.

II.

L’énergie durable pour lutter contre la pauvreté La lutte contre la pauvreté et la précarité est une priorité politique incontournable.

Un ministère de la solidarité a d’ailleurs été créé à cet effet. Le gouvernement compte intégrer les politiques énergétiques durables dans des programmes économiques inclusifs, équitables mais aussi sensibles à la problématique du genre. C’est pourquoi une des principales priorités de la feuille de route est d’élargir l’accès universel à l’énergie.

Dans cette optique, le gouvernement encourage des initiatives énergétiques décentralisées dans les zones rurales.

Tout comme dans les zones urbaines également où, dans le cadre d’un développement économique inclusif, le pouvoir public prend des mesures pour favoriser l’accès des populations vulnérables à l’électricité.

III.

L’énergie pour renforcer la résilience à la sécheresse

Énergie solaire.

COMMUNIQUÉ

Djibouti est confrontée à des défis sans précédent en matière de catastrophes provoquées par la sécheresse. Avec le réchauffement climatique, le cycle de sécheresse qui frappe le pays, surtout le milieu rural, est en constante augmentation. Pour faire face à cette situation qui déstructure l’espace rural, le gouvernement a décidé d’intégrer l’énergie durable dans la planification de la résilience face à la sécheresse en favorisant l’accès des communautés aux services sociaux tels que la santé ou encore l’éducation. L’énergie durable peut ainsi jouer un rôle dans la régénération d’un écosystème économique local et éviter l’exode des populations. C’est pourquoi le gouvernement encourage, par des mesures incitatives, les investissements privés dans l’énergie durable dans les régions et en zone rurale.

Inter-connexion hydroélectrique entre Djibouti et l’Éthiopie.

Monsieur le Ministre, pensez vous que l’ambition de Djibouti de passer au tout renouvelable est réalisable ?

Il faut savoir que le taux d’accès à l’électricité est déjà au-delà des 70 % en milieu urbain.

Par ailleurs, l’augmentation de ce taux passera par la réalisation des projets d’énergie renouvelable et d’électrification en cours.

Effectivement je pense que cela est réalisable. Djibouti passera à une Je peux citer notamment le proutilisation d’énergie 100 % renougramme d’électrification durable velable avant 2024 une fois que tous PED qui prévoit à lui tout seul durant les projets actuellement en cours la période 2019-2023, le raccorprendront fin dans les prochaines dement de près de 14 000 foyers années. C’est l’engagement du soit environ 98 000 Djiboutiens Président de la République Monsieur Yonis Ali Guedi résidant dans les zones périurIsmael Omar Guelleh. Nous avons MINISTRE DE L’ÉNERGIE, baines comme Balbala et dans les organisé un laboratoire en ce sens CHARGÉ DES RESSOURCES régions de l’intérieur. Sans oublier qui met en avance l’augmentation NATURELLES l’amélioration des infrastructures de la capacité d’énergie renouvede transport et de distribution lable jusqu’à 50 % de plus que la existantes ou encore l’électrification rurale pour production actuelle. Nous anticipons ainsi pour les les villages par des énergies renouvelables qui besoins futurs de notre économie. boosteront ce taux d’accès à l’électricité.

Pour atteindre cet objectif, le ministère de l’énergie a mis en place des stratégies harmonisées pour le développement du secteur de l’énergie qui devraient Le prix de l’Énergie est cher accélérer la réalisation de l’objectif consistant à à Djibouti. N’est-ce pas un frein utiliser 100 % de l’énergie provenant de sources aux investissements ? d’énergie renouvelables locales, principalement C’est une réflexion que nous menons avec l’ensemble le solaire, l’éolienne et la géothermique, et pour des acteurs. Notre ambition de devenir un hub compléter les importations d’hydroélectricité en logistique et une des plus grandes zones franches provenance d’Éthiopie. du continent pose effectivement la question de la disponibilité et du prix de l’énergie.

Actuellement le taux d’accès Actuellement compte tenu de notre dépendance à l’électricité est de 60 %. Comment en matière d’approvisionnement et de nos limites comptez-vous l’améliorer ? de production, nous ne pouvons pas garantir une satisfaction optimale. Il s’agit d’une préoccupation En concordance avec les objectifs de développement qui est intégrée dans notre stratégie d’indépendance durable (ODD), cette question interpelle nos énergétique. C’est pourquoi nous avons mis en place engagements vis-à-vis de l’ODD7 qui correspond des projets prioritaires répondant à la fois à l’augmenà l’accès à une énergie propre et abordable pour tation de la production nationale par l’exploitation tous. Bien qu’il a été fixé dans ce cadre d’atteindre de nos énergies renouvelables, et à l’accès à l’énergie un taux de 100 % d’ici 2030, nous ambitionnons de par l’extension du réseau électrique. franchir la barre des 90 % d’ici 2024.

© PATRICK_ROBERT

TROIS QUESTIONS À

VERS UNE ÉNERGIE DURABLE ET RENOUVELABLE

La promesse de la géothermie Depuis 2014 et la création de l’Office Djiboutien de développement de la géothermie (ODDEG), la république de Djibouti a mis de son côté toutes les chances pour exploiter le potentiel géothermique immense de son sous-sol, notamment du rift de l’Afrique de l’est.

L’office dispose de deux forages de 225 tonnes et de 40 tonnes destinés aux forages profonds. D’ores et déjà, le site de Galla Le Koma sur le Lac Assal permettra d’injecter les premiers mégawatts dans le réseau à l’horizon 2022. Les 10 puits géothermiques actuellement en cours de forage pourront générer jusqu’à 50 MW. Sur le deuxième site prometteur de Hanlé garabayis à Dikhil, les ingénieurs de l’ODDEG réalisent déjà deux forages de confirmation du réservoir

Énergie géothermique.

La géothermie, la marée motrice, la biomasse, le solaire ou l’éolienne, toutes les sources énergétiques du pays sont identifiées. géothermique avant de passer à l’étape suivante d’exploitation.

Le central solaire du Grand Bara

de Goubet. Sur ce dernier site un parc éolien de 60 MW verra le jour grâce à un partenariat public/privé. Ce parc éolien dont la capacité sera étendue à 120 MW dans une deuxième phase permettra de connecter la capitale avec le nord du pays.

Bien que le pays jouisse d’un ensoleillement permanent sur toute l’année, l’énergie solaire est encore utilisée de manière très limitée (électrification rurale, accès à l’eau). Le central solaire du Grand Bara dont l’étude de faisabilité est achevée permettra dans une première phase d’injecter 30 MW dans le réseau national.

D’ici 2024, ce projet d’environ 8 milliards en investissements privés permettra la création d’une centaine d’emplois.

Le central éolien de Goubet Djibouti a un énorme potentiel en énergie éolienne. Une série de mesures de la vitesse du vent effectuée sur une période de 2 ans a permis d’identifier des sites très prometteurs comme celui

RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI Ministère de l’Énergie chargé des Ressources Naturelles Cité ministérielle - BP 10010 - Rue Bourhan Bey - Djibouti, République de Djibouti Office : (+253) 21 32 54 34 - Fax : (+253) 21 35 86 74

COMMUNIQUÉ

DIFCOM/DF - PHOTOS : DR SAUF MENTION.

D

epuisquelegouvernement a pris la décision de passer au tout renouvellement, le secteur énergique est en perpétuel chantier.

Après moult études et prospections en tous genres, une cartographie précise du potentiel du pays en énergies renouvelables a été affirmée au niveau du ministère de l’énergie.

Ainsi, de la géothermie en passant par la marée motrice, la biomasse, le solaire ou encore l’éolienne, toutes les sources énergétiques du pays sont identifiées. Le gouvernement confronté à un double enjeu (économique et social) veut réussir le pari d’une énergie renouvelable, abordable et disponible sur l’ensemble du territoire national. D’ores et déjà plusieurs projets d’envergures, sont en cours de réalisation :

Énergie solaire.

FICHES PAYS

54à laÉtats loupe 151 AFRIQUE DU NORD

159 AFRIQUE DE L’OUEST

152 153 154 155 156 157

189 AFRIQUE DE L’EST

Algérie Égypte Libye Maroc Mauritanie Tunisie

161 162 163 164 165 166 167 168 169 170 171 172 173 175 177

Bénin Burkina Faso Cap-Vert Côte d’Ivoire Gambie Ghana Guinée Guinée-Bissau Liberia Mali Niger Nigeria Sénégal Sierra Leone Togo

179 AFRIQUE CENTRALE

215 OCÉAN INDIEN

180 181 182 183 184 185 186 187

Cameroun Centrafrique Congo RD Congo Gabon Guinée équatoriale São Tomé-et-Príncipe Tchad

203 AFRIQUE AUSTRALE

204 205 206 207 208 209 210 211 212 213

190 191 192 193 194 195 196 197 198 199 200

217 218 219 221

Burundi Djibouti Érythrée Éthiopie Kenya Ouganda Rwanda Somalie Soudan Soudan du Sud Tanzanie

Comores Madagascar Maurice Seychelles

Afrique du Sud Angola Botswana Eswatini Lesotho Malawi Mozambique Namibie Zambie Zimbabwe

SOURCES : FMI : PIB par habitant et PIB, taux de croissance et inflation (2019) ; Pnud : population (2019), espérance de vie et indice de développement humain (2018) ; Cnuced : investissements directs étrangers (2018) ; JA : dernier changement de dirigeant

jeuneafrique no 3076H

149

COMMUNIQUÉ PROPARCO 151, rue Saint Honoré 75001 Paris Tél. : (+33) 1 53 44 31 08 Email : proparcojohannesbourg@afd.fr www.proparco.fr

AVIS D’EXPERT

Financement et accompagnement des PME, l’exemple de Vatel Madagascar À

Madagascar, le tourisme

jusqu’à l’investissement du fonds

est devenu la pierre angu-

d’impact Miarakap.

laire du développement. Cultiver l’immense potentiel touristique du pays impliquera au cours des

5 prochaines années de doubler la capacité des chambres, d’ouvrir le ciel de Madagascar aux grandes compagnies aériennes et d’améliorer la formation des managers et du personnel exerçant dans le tourisme et l’hôtellerie.

C’est pour répondre à ces besoins que Vatel, groupe français leader mondial dans la formation en management hôtelier, a ouvert une franchise à Madagascar en 2014.

Vatel Madagascar compte aujourd’hui plusieurs centaines d’étudiants et de diplômés, qui contribuent au boom touristique malgache et dont certains ont même créé leur entreprise. Leurs parcours, qui témoignent d’une grande volonté de participer au développement de la Grande Île et d’une fibre entrepreneuriale réelle, sont néanmoins entravés par le manque de financement auquel les start-up et PME restent confrontées.

Vatel Madagascar a connu ces mêmes difficultés de financement

Grâce à Miarakap, Vatel a aujourd’hui les moyens de se développer et d’améliorer son offre de formation. Les fonds d’investisse-

Falihery Ramakavelo,

Siby Diabira,

Directeur général de Vatel Madagascar

Directrice régionale de Proparco pour l’Afrique australe et l’océan indien

ment comme Miarakap délivrent un service « sur mesure » avec un diagnostic pointu du business model, un investissement en capital et l’apport d’une expertise précieuse dans la gouvernance, le pilotage et le développement des PME. Grâce à eux, les tableaux de bord de Vatel Madagascar sont mieux structurés, ses procédures plus formalisées, son réseau de partenaires et sa capacité managériale se sont renforcés.

C’est notamment grâce à leur intervention que la formation de qualité apportée par Vatel Madagascar contribuera d’une manière décisive au développement de l’île et de son tourisme.

www.choose-africa.com

Choose Africa, l’initiative du groupe AFD pour les PME L’exemple de Vatel Madagascar illustre le rôle fondamental que jouent les PME dans l’amélioration de l’accès à la formation et à l’emploi. En lançant l’initiative Choose Africa, Proparco et sa maison mère l’AFD se sont donnés les moyens – 2.5 milliards d’euros d’ici 2022 – de remplir pleinement leur mandat de développement en Afrique.

Choose Africa permet par exemple au Groupe AFD de proposer des garanties bancaires et d’accompagner des fonds d’investissements comme Investisseurs & Partenaires ou Miarakap afin d’accompagner les PME. Proparco est présent à Madagascar depuis 1992 et y a réalisé plus d’une trentaine d’opérations dans des secteurs piliers de l’île : l’agriculture, le secteur financier ou les infrastructures. Le portefeuille de Proparco s’élève aujourd’hui à près de 80 millions d’euros.

Fiches pays

Alger

Océan Atlantique

Tanger Fès

Oran

Constantine

Mer Méditerranée

TUNISIE

Casablanca Rabat Marrakech

Tunis

Tripoli

Béchar

Alexandrie

Benghazi

Le Caire

MAROC

ALGÉRIE

Tindouf

L I BY E

ÉGYPTE Assouan

Nouadhibou

M A U R I TA N I E

MALI

Nouakchott

NIGER

SOUDAN

TCHAD

SÉNÉGAL 400 km

152 153 154 155 156 157

Algérie Égypte Libye Maroc Mauritanie Tunisie

AfriqueduNord Nouveaux modèles l’orée de l’année 2020, tous les regards se tournent vers Alger. Après l’élection d’Abdelmadjid Tebboune et alors que la contestation bat toujours son plein, quels seront les rapports entre l’armée, les autres institutions et la société civile? Au Maroc et en Tunisie, les organes d’État se mobilisent autour du développement. Dans le royaume, où la contestation populaire est toujours plus régulière, une commission doit plancher sur un « nouveau modèle ».

L’État comme le privé ne peuvent plus ignorer la question de la redistribution des richesses.

En Tunisie, le nouveau président, de culture nationaliste, doit faire face à la baisse de la croissance et à

À

une inflation inquiétante. Mais Kaïs Saïed ne décidera rien seul: il fait déjà face aux volontés contradictoires du FMI et de la puissante Union générale tunisienne du travail (UGTT). Par ailleurs, les deux pays espèrent toujours réduire leur important déficit budgétaire.

Pour Tunis, le défi est d’autant plus grand que le voisin libyen reste plongé dans une guerre dont l’évolution dépend largement des positions prises à l’étranger, à Ankara et Abou Dhabi notamment.

La stabilité politique ne se fera pas sans une redéfinition profonde des modèles économiques. La deuxième vague des « printemps arabes », qui touche, en plus de l’Algérie, le Liban et l’Irak, en est la preuve.

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151

Fiches pays AFRIQUE DU NORD Mer Méditerranée

ESPAGNE Oran

Alger Constantine

MAROC

Algérie Le grand tournant

TUN.

ALGÉRIE MALI

L’élection d’Abdelmadjid Tebboune n’a guère apaisé la contestation.

La crise économique est telle que le pays pourrait être contraint de solliciter l’aide de bailleurs de fonds internationaux.

MAURIT.

LIBYE

NIGER 400 km

privés sont à l’arrêt et l’atmosphère de révolution permaAnnée 2020, an I d’une nouvelle ère. La révolution du nente obère toute visibilité à moyen terme. Les entreprises 22 février 2019 a chassé du pouvoir Abdelaziz Bouteflika de BTP, pourvoyeuses d’emplois, licencient à tour de bras et précipité la chute d’une partie des hommes avec lesquels alors que le chômage est appelé à connaître une hausse il a gouverné pendant vingt ans. Soulèvement dans la rue, significative au cours des douze prochains mois. élection d’un nouveau chef de l’État… Cette année marLa dépendance presque totale de l’Algérie à l’égard de ses quera définitivement la fin de l’ère Bouteflika et le début recettes pétrolières, qui représentent 96 % de ses expord’une autre époque, trouble et difficile, mais non moins tations, est un facteur aggravant qui passionnante. n’augure rien de bon. Selon les estiL’élection contestée d’Abdelmadjid mations des experts, les autorités ont Tebboune, ancien Premier ministre Nombre d’habitants : 43,1 millions besoin d’un baril de brut à 116 dollars issu du système, illustre à quel point PIB par habitant : 3 980 $ pour boucler les prochains budgets. la crise politique née du départ forcé Espérance de vie : 76,3 ans Or les cours de l’or noir stagnent d’Abdelaziz Bouteflika divise les désespérément à 60 dollars le baril.

Algériens. Entre ceux qui continuent Alphabétisation : 75 % Autant dire que les difficultés finande manifester dans les rues par cenInflation : 2 % cières vont s’accentuer à moyen taines de milliers pour exiger l’avèIndice de développement terme, et ce d’autant plus que la fonte nement d’une nouvelle République e humain (sur 189 pays) : 85 des réserves de change est inélucet ceux qui ont vu dans le choix de Investissements directs étrangers : table : elles sont passées de 194 milvoter la seule solution pour sortir de 1,5 milliard de $ liards de dollars au début de 2014 à l’impasse, le fossé est très profond, et Dernier changement 56 milliards à la fin de 2020. Avec une il faudra du temps pour le combler. de président : 2019 perte moyenne de 20 milliards de dollars par an, ces réserves disparaîtront Croissance du PIB (%) avant la fin du mandat de cinq ans Le plus grand défi qui se présente au 2,5 2,4 d’Abdelmadjid Tebboune. Scénario nouveau pouvoir, qui souffre d’un 1,4 1,3 apocalyptique pour l’Algérie, qui net déficit de légitimité populaire, sera alors contrainte de recourir à réside justement dans sa capacité l’endettement extérieur auprès d’insà convaincre les opposants de tous PIB (milliards de $) titutions internationales à des condibords d’adhérer à son projet de refontions drastiques. La conjugaison dation de la nation. L’autre challenge 167,3 173,7 172,7 178,6 de facteurs tels que les incertitudes est de maintenir la paix et la cohésion politiques, la contestation de rue, les sociales et de dégager un consensus interférences de l’institution militaire politique autour de ce projet. Défis dans le processus de décision, la crise difficiles, presque insurmontables, économique…, tout cela pèsera louren une année. dement dans la balance lorsque Alger C’est qu’aux troubles politiques et 2017 2018 2019* 2020* sollicitera ces financements. aux incertitudes à court terme s’ajoute 2020, annus horribilis ? Il reste une crise économique grosse de tous encore cette équipe nationale de les dangers. Certes, la révolution du football, sacrée championne d’Afrique en 2019 avec brio, 22 février a poussé vers la sortie un clan qui avait accaparé qui donne de la joie et de l’espoir à des millions d’Algétous les leviers de commande du pays. Certes, cette révoriens. Les prestations de cette sélection formée de joueurs lution a libéré les espaces publics comme politiques et locaux et binationaux suscitent à ce point respect et admirevitalisé l’expression démocratique. Mais les contrecoups ration qu’elle est bien partie pour garder son titre lors de la économiques de ce mouvement d’une ampleur inédite sur Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2021, qui se déroulera le continent sont lourds. Déjà mauvais par le passé, le cliau Cameroun. mat des affaires est sinistré. Les investissements publics et * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Projet de refondation

152

jeuneafrique no 3076H

Mer Méditerranée

Alexandrie

ISRAËL

Port-Saïd

Le Caire Charm el-Cheikh

ou ge

LIBYE

Les mesures d’austérité entraînent une hausse des prix.

Le régime continue de réprimer la jeunesse, de plus en plus impatiente.

rR

ÉGYPTE

ARABIE SAOUDITE Me

Égypte Pas encore sur les rails

SOUDAN

300 km

Sur les dix premiers mois de 2019, 123 citoyens et solL’année 2019 a été chargée de tensions. La hausse des prix, dats avaient déjà perdu la vie au Sinaï, dans un conflit qui liée aux réformes économiques de 2016, a mis fin à l’État dure depuis 2013. À Gizeh, l’attaque d’un bus touristique providence conçu sous l’ère Nasser. Après deux coups le 19 mai a blessé dix-sept personnes. Pourtant, l’Instid’État en l’espace de trois ans, Abdel Fattah al-Sissi avait tut de Harvard pour le développement international promis de rétablir l’économie en deux ans. Aujourd’hui, reste positif : l’Égypte devrait profiter d’une croissance la population souffre toujours de mesures d’austérité annuelle de 6,8 % jusqu’en 2027. fixées dans le cadre d’un accord passé en 2016 entre le Le président Sissi ne semble pas pays et le FMI: un prêt de 12 milliards désireux de prendre sa retraite. Lors de dollars en échange de réformes, d’un référendum national (44 % de dont une réduction importante des Nombre d’habitants : 100,4 millions participation), environ 90 % des élecsubventions publiques.

PIB par habitant : 3 046 $ teurs ont approuvé la prolongation es réformes ont entraîné une Espérance de vie : 71,7 ans de son deuxième mandat jusqu’en hausse des prix allant de 16 % à 30 %.

2024. Il aura même droit à un troiLe président s’est appuyé sur des Alphabétisation : 75,1 % sième round, qui le verrait garder le mégaprojets (le nouveau canal de Inflation : 13,9 % pouvoir jusqu’en 2030. Sissi dirigera Suez, la nouvelle capitale) pour créer Indice de développement également l’Union africaine jusqu’en des emplois et relancer l’économie. e humain (sur 189 pays) : 115 février 2020. L’Égypte en ayant été Mais ils n’ont pas eu les retombées Investissements directs étrangers : exclue en 2013 et en 2014, sa nomiattendues ni servi les classes les plus 6,8 milliards de $ nation avait créé la surprise. Comme modestes, et, de ce fait, ils ont fait Dernier changement il l’avait promis durant son discours l’objet de nombreuses critiques. de président : 2014 d’investiture, il aura en 2020 moins de deux mois pour se concentrer sur Croissance du PIB (%) 5,8 la guerre contre le terrorisme.

En 2020, le pays parie sur l’énorme 5,5 5,3 L’année à venir dépendra des champ gazier d’El-Zhor, découvert Égyptiens eux-mêmes. D’avril à mai en 2015 dans la zone égyptienne de la 4 se dérouleront les législatives, seules Méditerranée. Ce gisement, évalué à élections de 2020. Le peuple votera 850 milliards de mètres cubes de gaz, PIB (milliards de $) pour un nouveau Parlement, mais constitue un tournant pour le pays, 353 302,2 également pour le Sénat, rétabli par qui dépense des milliards de dollars 236,5 249,5 le référendum de 2019. en gaz naturel importé. Il représente L’Égypte a peut-être perdu son aussi l’occasion de fixer le déficit rôle de chef de file dans la lutte pour commercial et une bonne nouvelle l’hégémonie dans la région, mais elle pour les réserves en devises, qui en demeure un acteur important. s’épuisent.

Soutenue par les Émirats arabes Autre composante clé de l’écono2017 2018 2019* 2020* unis et par l’Arabie saoudite, elle mie, les recettes tirées du tourisme continuera d’étendre l’influence ont progressé de 37 % sur le premier régionale de ces derniers en soutesemestre de 2019. Mais les manifestanant le maréchal Haftar, en Libye. La priorité de l’Égypte tions appelant à la destitution de Sissi, à la fin du mois de en 2020 sera de contrer la construction du barrage de la septembre, pourraient entraver cette hausse. Mohamed Renaissance en Éthiopie. L’impasse des pourparlers a Ali, l’entrepreneur qui a travaillé avec l’armée égyptienne poussé Le Caire à appeler à une médiation internationale. pendant quinze ans et qui s’est enfui en Espagne, a été le Sissi, que Trump a décrit comme son « dictateur favori », principal agitateur lors de ce mouvement de contestation, a fermement promis de « protéger les droits de l’Égypte au cours duquel 4 000 citoyens ont été arrêtés. Mais le clisur le Nil ». mat social et politique n’est néanmoins pas le seul frein. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Nouveau hub gazier

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Fiches pays AFRIQUE DU NORD

Mer Méditerranée

TUNISIE

Tripoli

Libye Statu quo ante

ALGÉRIE

L’ANL n’a toujours pas réussi à prendre Tripoli.

L’évolution du contexte politique dans le monde arabe pourrait changer la donne.

Benghazi

LIBYE NIGER 300 km

TCHAD

ÉGYPTE

SOUDAN

le terrain par « le plus grand théâtre de guerre de drones La reprise des hostilités en Libye en avril a plongé le pays au monde », selon le secrétaire général de l’ONU, António dans sa troisième guerre civile depuis 2011. Un accord entre Guterres. Lequel devrait conserver sa confiance à Ghassan le Premier ministre, Fayez al-Sarraj, et le maréchal Khalifa Salamé pour guider la Libye vers un nouveau processus Haftar semblait pourtant avoir été trouvé lors du sommet politique. Un chemin escarpé, qui sera nécessairement qui s’était tenu à Abou Dhabi en février. Mais cela n’a pas jalonné de négociations locales et internationales laboempêché le maréchal de lancer l’Armée nationale libyenne rieuses. L’UA pourrait de son côté chercher à jouer un rôle (ANL) sur Tripoli, mettant en pièces le processus politique plus important dans les discussions. parrainé par l’émissaire de l’ONU, Mais l’évolution du contexte poliGhassan Salamé. tique dans le monde arabe pourrait Si les autorités militaires de l’Est Nombre d’habitants : 6,8 millions changer la donne. Affaiblie par sa promettaient une prise rapide de la PIB par habitant : 5 019 $ confrontation avec l’Iran, l’Arabie capitale, l’ANL était toujours bloquée Espérance de vie : 72,1 ans saoudite, autre soutien important du aux portes de la ville, à l’heure où nous maréchal Haftar, devra certainement mettions sous presse, après l’offensive Alphabétisation : NC revoir la stratégie sécuritaire agressive destinée à déloger les milices de la Inflation : 4,2 % qu’elle suivait ces dernières années et Tripolitaine loyales au Gouvernement Indice de développement pourrait se montrer plus ouverte à un d’union nationale (GNA). Pour autant, e humain (sur 189 pays) : 108 dialogue sur le cas libyen. Tout comme sauf sur une partie du littoral, l’ANL Investissements directs étrangers : NC les Émirats, qui s’orientent eux aussi a peu ou prou réussi à étendre son Dernier changement vers un désengagement relatif des contrôle à la majorité du territoire de président : 2016 conflits dans le monde arabe. libyen. Elle pourrait continuer à Côté terrorisme, si l’État islamique a gagner du terrain, notamment à la Croissance du PIB (%) bien essayé de reprendre pied en Libye faveur de l’implication croissante des 64 à la faveur du chaos ambiant, l’orgamercenaires russes du Groupe Wagner 17,8 – 0,03 nisation jihadiste semble finalement aux côtés des troupes du maréchal – 19 trop affaiblie pour s’y réimplanter Haftar. Chez les milices de l’Ouest, durablement. unies dans un premier temps par la menace Haftar, les divisions comPIB (milliards de $) mencent à apparaître, notamment 40,9 entre les combattants de Tripoli et La période n’est évidemment pas 34 33 30,5 les forces de Misrata. Ces dernières, favorable aux affaires, et la reconsmieux armées et entraînées, assurent truction de la Libye devra sans doute de fait la défense de la capitale, et c’est attendre encore un peu. Son pétrole un Misrati, le ministre de l’Intérieur, attise toujours les convoitises, mais la Fathi Bashagha, qui a pris la tête de production connaît des fluctuations l’appareil sécuritaire. importantes étant donné l’instabilité 2017 2018 2019* 2020* Alors que nul ne semble pouvoir sécuritaire. Et les divisions politiques l’emporter, Misrata et l’ALN, qui s’invitent dans la problématique de n’ont jamais complètement rejeté l’exportation. La Compagnie nationale la possibilité de pourparlers, pourraient être tentées de de pétrole (NOC) a ainsi dénoncé les tentatives visant à divitrouver un terrain d’entente. Un rapprochement difficileser sa filiale Brega Petroleum Marketing Company (BPMC) ment imaginable sans le concours des principaux soutiens entre l’Est et l’Ouest afin que les autorités de la Cyrénaïque internationaux des deux parties. Les Émirats arabes unis puissent avoir leur mot à dire dans l’exportation de brut. continuent pour l’heure d’apporter assistance et conseil à Mustafa Sanalla, son patron, prévient quant à lui que si la l’ALN. La Turquie joue le même rôle auprès des forces de NOC devait perdre son monopole d’exportation, « l’intégrité la Tripolitaine. Le soutien de ces deux États s’illustre sur future de la Libye serait gravement menacée ». * ESTIMATION OCTOBRE 2019

La reconstruction attendra

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PORTUGAL

ESPAGNE

Océan Atlantique

ÎLES CANARIES (Espagne)

Maroc Modèle royal

Casablanca

Rabat

Marrakech

ALGÉRIE

MAROC MAURITANIE

Rabat vise le développement d’une classe moyenne rurale.

Le pays veut devenir un corridor incontournable entre la Méditerranée et l’Afrique de l’Ouest.

MALI 400 km

incarcérée pour avoir subi un avortement. L’affaire aura En quête d’équité sociale, le royaume mise sur le développedes répercussions directes sur le dossier chaud de la renment. Dans son rapport « Un Maroc égalitaire, une taxation trée qu’est la réforme de la politique pénale. La rédaction juste », publié à la fin d’avril, Oxfam rappelle les nombreuses de l’avant-projet de loi remonte à 2015 mais les députés inégalités qui perdurent dans le pays. En 2017 et en 2018 n’ont pas encore soumis le texte au vote. La société civile déjà, Mohammed VI appelait à élaborer un « nouveau fait pression : un nouveau Code pénal lui donnerait une modèle de développement ». La commission a un président vraie bouffée d’air. depuis novembre: Chakib Benmoussa, ancien ministre de l’Intérieur et ambassadeur à Paris.

Un chantier structurel, la « melkisation » – ou le passage à la propriété Plus que sur une diplomatie politique, Nombre d’habitants : 36,5 millions privée, par parcelles, des terres colRabat va sans doute tabler sur un PIB par habitant : 3 345 $ lectives irriguées – doit susciter l’esnouvel effort de lobbying en Afrique.

Espérance de vie : 76,1 ans sor d’une « classe moyenne rurale ».

Patrons et hauts fonctionnaires Le début des opérations dans deux voient dans ses marchés des relais Alphabétisation : 69,4 % régions, le Haouz et le Gharb, a été de croissance qui pourraient souteInflation : 0,7 % annoncé à la fin de juin. nir l’économie nationale. Le somIndice de développement Tout un dossier, qu’on dit cher au met de l’État incarne cette volonté e humain (sur 189 pays) : 123 chef de l’État, doit aussi venir souà l’étranger. Il s’est ainsi positionné Investissements directs étrangers : tenir le futur modèle de développecomme un soutien important de la 3,6 milliards de $ ment : la formation professionnelle.

Zone de libre-échange continentale Dernier changement Cette dernière doit en particulier africaine (Zleca). À terme, le royaume de président : 1999 prendre le relais du Plan d’accéléraambitionne de devenir le « corridor » tion industrielle, qui arrive à échéance incontournable entre Méditerranée et Croissance du PIB (%) en 2020. L’industrie automobile a Afrique de l’Ouest.

4,2 3,6 réalisé un saut qualitatif indéniable.

Favorisant le développement 2,9 2,6 En juin, le français Peugeot a ouvert national et le leadership régional, les un site à Kénitra, donnant naissance investissements dans les infrastrucPIB (milliards de $) à 19 000 emplois directs. Le Maroc tures continueront bon train, notamest devenu le premier constructeur ment à Tanger et à Casablanca. Cette 124,5 119 118,5 du continent et le secteur est le plus dernière doit devenir un hub finan109,7 grand exportateur du pays. Mais la cier régional, et les nouveaux quarmain-d’œuvre reste cantonnée à des tiers et centres d’affaires devraient opérations simples. Augmenter le taux s’étendre en 2020. Rabat rappelle à d’intégration comme la valeur ajoutée qui veut l’entendre qu’une enveloppe exige d’intenses efforts de formation. de 77 milliards de dirhams (environ Cette dernière doit lutter contre un 7 milliards d’euros) a été allouée à un 2017 2018 2019* 2020* phénomène inquiétant: 6 millions de plan d’infrastructures visant à relier Marocains âgés de 15 à 24 ans évoluent la sous-région, et notamment les marhors du système scolaire et n’ont pas chés d’Abidjan et de Dakar, à Tanger d’emploi.

Med, devenu le plus grand port de la Méditerranée grâce à Le gouvernement promet par ailleurs de généraliser un sa deuxième plateforme, ouverte en juin. registre social unique, plus performant dans le ciblage des À la fin de 2019, le Conseil économique, social et environaides. Une telle avancée pourrait créer une soupape de sécunemental (Cese) est, lui, venu tirer une sonnette d’alarme rité face à une grogne sociale devenue difficile à ignorer. déjà maintes fois actionnée : la surexploitation des eaux La fin de l’année 2019 a été marquée par l’incarcération, met en péril la sécurité hydrique du pays. Le Cese demande puis la libération, d’une jeune journaliste, Hajar Raïssouni, d’en faire une priorité nationale. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Relais de croissance

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Fiches pays AFRIQUE DU NORD MAROC

ALGÉRIE

300 km

Mauritanie Vrai changement ou vœu pieux ?

Le nouveau président s’émancipe de la tutelle de Mohamed Ould Abdelaziz.

Les indicateurs économiques sont plutôt encourageants, avec une accélération de la croissance en 2019.

Nouadhibou Océan Atlantique

M A U R I TA N I E

MALI

Nouakchott

SÉNÉGAL

Par ailleurs, Mohamed Ould Ghazouani a commencé En 2019, les Mauritaniens ont vécu une situation inédite. à s’affranchir de la tutelle de Mohamed Ould Abdelaziz.

Pour la première fois dans l’histoire de leur pays, jalonnée de Bien que les deux hommes aient été très liés, leur amitié a coups d’État militaires, un président élu a cédé la place à un commencé à se fissurer en novembre après que tous deux autre président élu. Le 23 juin, Mohamed Ould Ghazouani a ont revendiqué le leadership de l’Union pour la République été proclamé vainqueur avec 52,01 % des voix. L’annonce de (UPR), le parti au pouvoir. Jusqu’ici, le nouveau président sa candidature, en mars, avait définitivement coupé court assurait la continuité. Mieux, il l’assumait. En composant aux allégations selon lesquelles son prédécesseur et ami son gouvernement et en reconduiintime, Mohamed Ould Abdelaziz, sant plusieurs ministres, il avait pris allait briguer un troisième mandat, ce soin de ne froisser ni son ami ni les que lui interdisait la Constitution – et Nombre d’habitants : 4,5 millions collaborateurs de celui-ci, que luiouvert la voie au changement?

PIB par habitant : 1 392 $ même connaît bien pour les avoir Après avoir été propulsé loin des Espérance de vie : 63,4 ans côtoyés pendant plusieurs années. casernes, le général retraité a très prudemment pris ses marques. Cet ancien Alphabétisation : 45,5 % chef d’état-major des armées, éphéInflation : 3 % mère ministre de la Défense (d’octobre Enfin, les indicateurs économiques Indice de développement 2018 à mars 2019), n’a eu à gérer que sont plutôt encourageants. Le FMI, e humain (sur 189 pays) : 159 des questions sécuritaires. Il sait qu’il qui a achevé en mai la troisième Investissements directs étrangers : doit donc faire ses preuves. Durant revue de l’accord au titre de la facilité 71 millions de $ sa campagne, il n’a cessé de répéter élargie de crédit, prédit une accéléraDernier changement que l’éducation, l’économie et la justion de la croissance à 6,6 % en 2019, de président : 2019 tice sociale seraient ses priorités. Le laquelle a déjà augmenté de 3,5 % 7 octobre, jour de la rentrée scolaire, il en 2018. « Les perspectives se sont Croissance du PIB (%) 6,6 a réaffirmé devant les élèves sa volonté améliorées grâce à des termes de 5,8 de doter la Mauritanie d’un système l’échange plus favorables et au déve3,5 3 éducatif performant. Et il s’est attelé à loppement à venir d’un grand champ tenter de décrisper la scène politique gazier offshore », précise le rapport de PIB (milliards de $) en tendant la main à l’opposition, dont l’institution. Le gisement de Grand 5,91 les principaux leaders ont contesté Tortue, situé au large de la Mauritanie 5,65 5,23 son élection. Dès le début du mois et du Sénégal et dont l’exploitation ne 4,92 d’octobre, il a commencé à recevoir devrait pas débuter avant plusieurs ces derniers au Palais présidentiel afin années, ouvre de très belles perspecd’entendre leurs revendications, mais tives aux deux pays. « Néanmoins, les sans toutefois leur apporter de gages. risques liés à l’évolution de l’éconoOuld Ghazouani va devoir concrétiser mie mondiale, à la volatilité des prix ces effets d’annonce, loin des belles des produits de base, aux conditions 2017 2018 2019* 2020* promesses, dont les Mauritaniens climatiques défavorables et à l’insésont las. curité régionale demeurent élevés », De son côté, le militant antiesclatempère ce même document. vagiste Biram Dah Abeid, arrivé deuxième lors du scruMohamed Ould Ghazouani devra aussi gérer en priorité tin, joue des coudes avec les islamistes « modérés » de l’endettement abyssal de la Société nationale industrielle Tawassoul afin de s’imposer comme le nouveau chef de et minière (Snim) qui, portée par le prix très élevé du minel’opposition. Tandis que les urnes avaient totalement marrai de fer, avait pourtant engrangé des bénéfices imporginalisé les alliés Mohamed Ould Maouloud et Ahmed tants entre 2010 et 2013. Le 5 septembre, il a commencé Ould Daddah, qui n’ont récolté qu’à peine 2,5 % des voix, par nommer à sa tête un nouveau patron, l’ex-ministre des Messaoud Ould Boulkheir a déjà rallié le pouvoir.

Finances Moctar Ould Djay. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Champ gazier offshore

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Tunis Sousse

150 km

Tunisie Seconde révolution

Sfax

Mer Méditerranée

TUNISIE ALGÉRIE

LIBYE

L’élection d’un président atypique – et d’un Parlement morcelé – marque une nouvelle rupture.

De véritables réformes structurelles se font toujours attendre, alors que la dette s’alourdit.

PIB en 2020. Pour mettre fin aux déficits en cascade, l’État Après une année 2019 mouvementée, essentiellement axée doit revoir ses plus gros postes de dépenses en incitant les sur les élections législatives et présidentielle, émaillée de entreprises publiques à la reprise, dont celles du secteur des coups de théâtre et marquée par le décès du président de phosphates, qui n’a pas retrouvé son niveau de 2010. Il doit la République, Béji Caïd Essebsi, la Tunisie prend acte d’un également réviser le système de compensation des produits bouleversement total de sa scène politique. Un nouveau de base et de l’énergie, qui plombe son budget. La mise en gouvernement doit être formé par Habib Jemli. route du champ gazier de Nawara 2 devrait couvrir 10 % Cette longue parenthèse électorale fermée, le pays va des besoins nationaux et permettre devoir en intégrer les changements, de réduire les importations d’Algérie mais aussi faire face à ses problèmes tout en diminuant la pression du coût économiques. Sa sortie, en octobre, de Nombre d’habitants : 11,7 millions énergétique. la liste noire des pays fortement expoPIB par habitant : 3 287 $ sés au blanchiment de capitaux et au Espérance de vie : 75,9 ans financement du terrorisme établie par le Groupe d’action financière (Gafi) Cette évolution économique en dents Alphabétisation : 79 % pourrait mettre dans de meilleures de scie peut laisser présager un décolInflation : 6,6 % dispositions les agences de notation lage en 2020, mais l’écosystème tuniIndice de développement financière, à commencer par Fitch sien demeure fragile, à la merci d’une e humain (sur 189 pays) : 95 Ratings, qui avait maintenu son B+ augmentation du baril de pétrole ou Investissements directs étrangers : en juin. d’une crise politique. À ce niveau, la 1 milliard de $ La situation économique et finanballe est dans le camp de la nouvelle Dernier changement cière, elle, sera dans un état beaucoup Assemblée. Elle devra réussir, malgré de président : 2019 moins favorable. Faute de réformes son extrême fragmentation, à s’enstructurelles, attendues depuis 2011, tendre sur les priorités nationales pour Croissance du PIB (%) la compétitivité de la Tunisie (qui relancer l’économie, sans compter que 2,4 2,4 devance néanmoins l’Algérie) stagne le pays sera observé par les instances 1,8 au 87e rang sur 141 du classement de internationales – dont le FMI, l’un de 1,5 ses premiers bailleurs de fonds.

Davos. Les autorités ont fourni des PIB (milliards de $) L’émergence d’une tendance natioefforts pour rétablir un équilibre 39,81 39,89 naliste risque aussi d’affecter les rapmacroéconomique, mais ils restent 39,61 ports avec l’Union européenne (UE), insuffisants pour dégager des pronos38,73 alors que les discussions autour de tics fiables. l’accord de libre-échange complet et Une année céréalière et oléicole approfondi (Aleca) ont été suspendues record, des recettes touristiques à hauet que l’UE a servi à la Tunisie, depuis teur de 4,4 milliards de dinars (environ 2011, 10 milliards d’euros en dons et 1,4 milliard d’euros) sur les neuf preen prêts. C’est dans ce contexte que le miers mois de 2019, et une politique 2017 2018 2019* 2020* pays va devoir accélérer ses réformes, rigoureuse de la Banque centrale de sans négliger certaines urgences.

Tunisie (BCT) ont remis à flot la monL’une d’elles serait de se constituer naie nationale, qui s’était fortement une provision dans le cadre du litige, connu sous le nom de dépréciée. Mais la croissance a décliné, passant de 2,4 % en « l’affaire BFT », l’opposant au fonds ABCI Investments. Le 2018 à 1,5 % en 2019, bien loin des 3,3 % prévus par la loi de Centre international pour le règlement des différends relafinances 2019. L’État est parvenu à juguler l’inflation, passée tifs aux investissements (Cirdi, Groupe de la Banque monde 7,3 % à 6,6 % du PIB entre ces mêmes années, mais il n’a diale) a tranché en défaveur de l’État, et le montant définitif maîtrisé que partiellement le déficit budgétaire, qui atteindu dédommagement, évalué à plusieurs milliards de dinars, dra 3,5 % du PIB sous la pression d’une imposante masse pourrait impacter lourdement son budget. salariale et du service de la dette, lequel culminera à 89 % du * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Tendance nationaliste

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Fiches pays LIBYE

ALGÉRIE

MALI

MAURITANIE

NIGER

Tombouctou Gao

Dakar

161 162 163 164 165 166 167 168 169 170 171 172 173 175 177

Bénin Burkina Faso Cap-Vert Côte d’Ivoire Gambie Ghana Guinée Guinée-Bissau Liberia Mali Niger Nigeria Sénégal Sierra Leone Togo

SÉNÉGAL

Banjul

Mopti

GAMBIE

Bissau

Bamako

GUINÉEBISSAU Conakry Freetown

TCHAD

Zinder

Ouagadougou

Maiduguri

BURKINA FASO

GUINÉE

BÉNIN CÔTE D’IVOIRE

SIERRA LEONE

Yamoussoukro

Monrovia

Niamey

LIBERIA

TOGO GHANA

Lomé

PortoNovo

Accra

NIGERIA Abuja Lagos Port Harcourt

Abidjan

RÉP. CENTRAF. CAMEROUN

Océan Atlantique

CAP-VERT Praia

300 km

Afriquedel’Ouest Année charnière

ul doute que l’Afrique de l’Ouest fera régulièrement la une de l’actualité en 2020. Côte d’Ivoire, Guinée, Burkina Faso, Niger, Togo…

Plusieurs pays majeurs de la sous-région organiseront une élection présidentielle, avec chacune une issue incertaine qui suscite d’ores et déjà inquiétude et interrogations. Le risque de voir certains d’entre eux basculer dans une crise politique – en particulier la Côte d’Ivoire, la Guinée et le Burkina Faso, qui choisiront tous leurs futurs présidents en octobre et novembre – est d’autant plus préoccupant que les groupes jihadistes sahéliens, qui n’ont cessé d’étendre leur rayon d’action au-delà des frontières maliennes ces dernières

N

années, savent parfaitement s’infiltrer dans les brèches ouvertes par un flottement au sommet de l’État. Ils l’ont fait au Mali après l’affaissement du régime d’Amadou Toumani Touré en 2012, puis au Burkina Faso après la chute de celui de Blaise Compaoré en 2014. Les pays de la Cedeao, le G5 Sahel ou encore la France, à travers l’opération Barkhane, ont beau multiplier les initiatives et montrer les muscles, ils peinent à contenir l’expansion d’une hydre jihadiste ravageuse. Enfin, en plus de cet immense défi sécuritaire, l’Afrique de l’Ouest aura un autre challenge tout aussi important (et symbolique) à relever en 2020: celui du passage à l’eco, la monnaie unique qui doit remplacer le franc CFA.

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST NIGER BURKINA FASO

BÉNIN

Bénin Fini les turbulences ?

Parakou

TOGO NIGERIA GHANA 150 km

Le climat politique a été affecté par la crise postélectorale.

La BAD juge néanmoins l’économie en bonne santé.

Cotonou Porto-Novo Golfe du Bénin

d’une capacité de 120 MW, entrera en production.

Le Bénin aura, au cours de cette année 2019, traversé pluToujours selon la BAD, le déficit budgétaire s’est stabilisé sieurs zones de turbulences. La première fut politique. à 2,6 % du PIB en 2019 et devrait s’abaisser à 1,9 % en 2020.

Organisées sans qu’aucun parti de l’opposition ne puisse La dette publique totale devrait continuer à chuter: 53 3 % y participer, les élections municipales d’avril furent émaildu PIB en 2019 et 48,9 % en 2020. lées de violences qui ont fait plusieurs morts et plongé le Toutefois, à deux ans de la prochaine présidentielle, prépays dans une crise inédite. vue en 2021 et à laquelle on ne sait toujours pas si Patrice Quelques semaines plus tard seulement, deux touristes Talon participera, les autorités n’ont français étaient enlevés dans le parc d’autre choix que d’accélérer la mise de la Pendjari, dans le nord du pays. en œuvre du PAG. Des réformes prioLes forces spéciales françaises les Nombre d’habitants : 11,8 millions ritaires, comme celles portant sur le ont libérés le 10 mai. Cet événement PIB par habitant : 1 216 $ foncier, la loi d’orientation des PME, a mis à mal le cœur du Programme Espérance de vie : 61,2 ans la gestion des infrastructures roud’actions du gouvernement (PAG, tières, la création d’une Caisse des lancé en 2016), dont le tourisme Alphabétisation : 32,9 % dépôts et consignations ou d’une est l’un des éléments moteurs – les Inflation : – 0,3 % Agence de la recherche et de l’innoautorités souhaitent en faire l’un des Indice de développement vation sont attendues. Quant aux principaux leviers de croissance du e humain (sur 189 pays) : 163 projets du PAG, passé depuis son pays. Un troisième accroc est interInvestissements directs étrangers : lancement en 2016 de huit à douze venu le 20 août, lorsque le Nigeria 208 millions de $ secteurs (la santé, par exemple, a été a décidé de fermer sa frontière terDernier changement ajoutée), tous n’ont pas avancé aussi restre avec le Bénin, qui tire 20 % de président : 2016 vite que prévu. Plusieurs grands de son PIB de ses échanges avec son chantiers, comme le nouvel aéroport grand voisin.

Croissance du PIB (%) et l’extension du port de Cotonou, ont 6,7 6,6 6,5 5,6 pris du retard, souvent en raison de longues études de faisabilité ou de Ces soubresauts n’ont pas entamé la difficultés à mobiliser les ressources confiance des autorités : le budget PIB (milliards de $) privées nécessaires. Leur construc2020 est en hausse – à 1 986,9 miltion doit débuter d’ici à la fin de l’anliards de F CFA, contre 1 877 milliards 15,4 14,2 14,3 12,6 née 2020. en 2019 (soit 3 milliards d’euros, Autre défi à relever pour les autoricontre 2,86 milliards d’euros en tés : poursuivre la diversification de 2019) –, tout comme le sont les persl’économie afin d’atténuer la dépenpectives de croissance, passées de dance du pays à l’égard du Nigeria.

6,3 % en 2019 à 7,6 % en 2020. La C’est la volonté du gouvernement, Banque africaine de développement reste à la concrétiser.

(BAD) est un peu moins optimiste, 2017 2018 2019* 2020* Enfin, la relative bonne santé écopuisqu’elle estime à 6,8 % la hausse nomique du Bénin dépendra aussi du PIB en 2020, tout comme le FMI, de l’amélioration du climat politique qui table sur 6,7 %. et social. Une partie de l’opposition a choisi l’exil pour Les analyses de la BAD sur l’économie béninoise sont échapper aux poursuites judiciaires. L’une de ses principlutôt positives. En 2019, la croissance du secteur des pales figures, l’ancien président Thomas Boni Yayi, a lui matières premières, tirée principalement par le coton, a aussi quitté le pays pour se soigner après avoir été mainatteint près de 6 %. L’industrie devrait de son côté augtenu en résidence surveillée pendant plusieurs semaines. menter de 13,3 % grâce aux secteurs du BTP (qui gagne Très affaiblie, l’opposition n’a cependant pas dit son der25 %), de l’eau et de l’électricité – ce dernier secteur nier mot. devrait croître de 8 % lorsque la centrale Maria-Gléta, * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Grands chantiers en retard

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST MALI NIGER Ouagadougou

B U R K I N A FA S O

Burkina Faso Résilience exemplaire

BoboDioulasso

CÔTE D’IVOIRE

GHANA

BÉNIN TOGO 100 km

L’année 2020 sera marquée par des élections présidentielle et législatives.

La Cedeao a promis d’aider le pays, en première ligne face au terrorisme.

Autre grand rendez-vous attendu, la nouvelle Roch Marc Christian Kaboré, élu en octobre 2015 au terme Constitution, qui devrait limiter le nombre de mandats d’une période de transition politique, devait être le préprésidentiels (de cinq ans) à deux, qu’ils se succèdent ou sident de la réconciliation nationale et de la relance éconon, rééquilibrer les pouvoirs et abroger la peine de mort. nomique. Mais les priorités de son quinquennat ont changé La relecture du code électoral et la mise en place de disposilorsque le Burkina Faso, jusqu’alors perçu comme un îlot tions pour permettre aux Burkinabè de la diaspora de voter de stabilité dans le Sahel, a été frappé par des attaques pour la première fois occuperont également le débat public. terroristes.

Jadis taboue, la question du retour L’attentat de janvier 2016, qui visait de Blaise Compaoré, en exil en Côte des lieux fréquentés par des expatriés d’Ivoire depuis sa chute en 2014, est à Ouagadougou, a marqué un tourNombre d’habitants : 20,3 millions désormais évoquée au-delà des cercles nant important. Les agressions se PIB par habitant : 717 $ de ses partisans. Sa famille politique, sont depuis multipliées, au point que Espérance de vie : 60,8 ans le Congrès pour la démocratie et le la question de l’intégrité territoriale progrès (CDP), qui avait été privé de et de la restauration de l’autorité de Alphabétisation : 34,6 % présidentielle en 2015, compte revenir l’État sur des pans entiers du pays se Inflation : 1,1 % au pouvoir, sur fond de désenchantepose désormais. « Le Burkina Faso ne Indice de développement ment d’une partie de l’opinion. cédera pas une partie de son territoire, e humain (sur 189 pays) : 183 dussions-nous tous y laisser notre Investissements directs étrangers : vie », avait insisté le président au len480 millions de $ demain de l’offensive – l’une des plus Pour redonner du souffle à son quinDernier changement meurtrières – contre une caserne miliquennat avant la prochaine bataille de président : 2015 taire à Koutougou le 19 août. électorale, Kaboré a nommé une En plus de ces tueries, fréquentes nouvelle équipe gouvernementale en Croissance du PIB (%) 6,8 dans le Nord et dans l’Est surtout, le janvier 2019. À sa tête, l’économiste 6,3 5,9 5,9 pays fait face à des violences interChristophe Joseph Marie Dabiré. Il a communautaires. Bilan depuis aussi opéré des changements majeurs 2015 : plus de 630 morts et près de au sein de l’appareil sécuritaire et a 500 000 déplacés. Cela dans un confié le ministère de la Défense à l’un PIB (milliards de $) contexte régional marqué par le terrode ses proches, Chériff Sy. L’état d’ur15,8 14,5 14,1 12,3 risme et un sentiment antifrançais de gence, décrété en décembre 2018 dans plus en plus marqué au sein des popuplusieurs provinces, reste en vigueur lations. Kaboré, à la tête du G5 Sahel jusqu’en janvier 2020 et pourrait de (qui regroupe le Burkina Faso, le Mali, nouveau être prolongé. la Mauritanie, le Niger et le Tchad) en Malgré un contexte difficile, Kaboré 2019, a porté la question du financepourra tenter de convaincre ses comment de l’organisation à l’internatiopatriotes lors de la prochaine cam2017 2018 2019* 2020* nal. La décision des dirigeants de la pagne grâce aux avancées accomplies Communauté économique des États dans le domaine de la santé (en parde l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), prise ticulier la gratuité des soins pour les lors du sommet de Ouagadougou en septembre, de contrifemmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans), aux buer à l’effort de guerre, financièrement et en hommes, chantiers de désenclavement du pays et à son bilan éconodevrait soulager les pays en première ligne comme le Mali mique positif. Selon la Banque mondiale, les perspectives et le Burkina. Sur le plan politique, la fin de l’année 2020 du Burkina demeurent favorables à moyen terme, avec une sera marquée par des élections présidentielle et législatives. croissance du PIB qui devrait se stabiliser autour de 6 % sur Mais des observateurs craignent déjà qu’elles ne puissent la période 2019-2021, soutenue par les services et le secteur se tenir sur toute l’étendue du territoire. minier, en plein essor, ainsi que par les exportations. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Avancées dans la santé

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Î L E S

Cap-Vert C’est l’heure du bilan

CAP-VERT D U

Océan Atlantique 50 km

Après quatre ans au pouvoir, le MpD doit défendre son action.

Le gouvernement mise sur le développement du tourisme.

S ÎLE

V E N T

S OU

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Praia

Pour doper ce succès, les autorités misent sur une expanÀ un peu plus d’un an des législatives, prévues en 2021, sion de la desserte aérienne et entendent également diverl’heure est déjà au bilan pour le gouvernement du Premier sifier l’offre pour rendre attractive chacune des dix îles de ministre, Ulisses Correia e Silva. L’ancien maire de Praia l’archipel. Objectif: attirer 1 million de touristes d’ici à deux avait remporté les dernières élections il y a près de quatre ans – contre quelque 700000 en 2017. ans, en mars 2016, sous les couleurs du Mouvement pour Pour développer les autres pans de l’économie, le MpD la démocratie (MpD), le parti libéral, dans un régime politable sur le renforcement du secteur privé et sur le désendettique qui accorde une place prépondérante au chef du tement. En témoigne l’un des grands gouvernement. dossiers de l’année passée, la restrucLa même année, le président Jorge turation de la compagnie nationale Carlos Fonseca, soutenu par le MpD, Nombre d’habitants : 0,6 million Cabo Verde Airlines (ex-TACV), dont était réélu pour un deuxième et derPIB par habitant : 3 598 $ les pertes annuelles étaient insoutenier mandat. Après près de quatre Espérance de vie : 73 ans nables pour le pays. En mars, la comans seul aux manettes, le parti doit pagnie Loftleidir Icelandic, filiale du donc défendre son action au pouvoir.

Alphabétisation : 86,8 % groupe islandais Icelandair, a signé Car s’il est certain que le chef de l’État Inflation : 1,2 % avec Praia un contrat de rachat de 51 % laissera sa place comme le prévoit la Indice de développement du capital de Cabo Verde Airlines.

Constitution, le MpD d’Ulisses Correia e humain (sur 189 pays) : 125 Mais tous les secteurs n’ont pas des e Silva briguera une nouvelle majorité Investissements directs étrangers : indicateurs au beau fixe. L’agriculture, parlementaire face au Parti africain 100 millions de $ qui emploie près de 15 % de la popupour l’indépendance du Cap-Vert Dernier changement lation, a été durablement affectée par (PAICV, opposition). Afin d’organiser de président : 2011 la sécheresse de 2017. De fait, l’archicette joute électorale, le MpD tiendra pel est extrêmement vulnérable au un congrès en mars 2020, en amont Croissance du PIB (%) réchauffement climatique.

5 duquel Ulisses Correia e Silva deman4,9 4,9 Autre inquiétude : le taux de paudera – sauf surprise – à être reconduit 3,7 vreté, que Praia peine à diminuer. à la tête de la formation libérale.

Les autorités doivent aussi faire face PIB (milliards de $) à la forte demande d’amélioration du transport entre îles, à la difficulté des Pour convaincre de nouveau les élec2,1 2 1,9 1,7 Cap-Verdiens d’accéder à l’emploi, et teurs, le gouvernement mise sur les aux lacunes du système de santé. bons chiffres de l’économie. Ces deux Des fractures sociales dénoncées dernières années, le PIB est en effet par l’opposition, bien décidée à reparti à la hausse. En 2019, la croisprendre sa revanche après la cuisante sance devrait atteindre 4,9 %, selon le défaite de 2016. Principal adversaire FMI, contre 3,7 % en 2017. du MpD, le PAICV (membre de l’InLe tourisme, qui représente près 2017 2018 2019* 2020* ternationale socialiste) doit tenir un d’un quart du PIB, est en bonne santé. congrès début 2020 pour se remettre Les visiteurs sont de plus en plus nomen ordre de bataille en vue des locales breux à venir admirer les paysages (dont la date n’a pas encore été fixée), test préalable aux paradisiaques de l’archipel: la fréquentation a augmenté élections législatives et présidentielle de 2021. Sa diride 7 % au deuxième trimestre de 2019. Parmi leurs princigeante, Janira Hopffer Almada, première femme à sa tête, paux pays d’origine, on note le Royaume-Uni, le Portugal devrait rester aux commandes. À l’heure où nous mettions et la France. Tributaire de cette clientèle issue du Vieux sous presse, elle était la seule candidate à sa succession Continent, le gouvernement a exempté de visa les citoyens aux élections internes au PAICV, censées être organisées de l’UE (et du Royaume-Uni) et a instauré en échange une fin décembre 2019. taxe aéroportuaire de 31 euros. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Un million de touristes visés

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163

Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST

MALI

Côte d’Ivoire Incertitudes et crispations

GUINÉE

BURKINA FASO

CÔTE D’IVOIRE Bouaké

LIBERIA

Les principaux partis n’ont pas encore choisi leur candidat pour la présidentielle.

Le pays s’est rapproché du Ghana pour instaurer une surtaxe sur le cacao.

200 km

Yamoussoukro Abidjan

GHANA

Golfe de Guinée

s’organiser. Après avoir rompu avec Alassane Ouattara, Contrairementàcellede2015,laprésidentielled’octobre2020 Henri Konan Bédié, le président du Parti démocratique s’annonce incertaine. La crainte de nouvelles violences de Côte d’Ivoire (PDCI), a renoué avec Laurent Gbagbo à la est réapparue chez les observateurs, dix ans après la crise mi-2019. Éloignés idéologiquement, les deux hommes sont postélectorale, qui avait fait 3 000 morts. L’histoire ivoinéanmoins convenus de mener main dans la main leurs rienne pourrait-elle bégayer? Si ce scénario n’est pas le plus combats en vue de la présidentielle. probable, il ne peut être complètement exclu.

Les trois mêmes hommes tiennent dans leurs mains le destin du pays. Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo S’il garde un poids symbolique fort, défont et retissent leurs alliances, Laurent Gbagbo ne peut toujours pas Nombre d’habitants : 25,7 millions relançant sans cesse les dés du jeu influer directement sur l’échiquier PIB par habitant : 1 691 $ politique. À respectivement 78, 85 politique. Malgré son acquittement, Espérance de vie : 54,1 ans et 75 ans, aucun d’entre eux n’exclut en janvier 2019, l’ancien chef de l’État d’être candidat. reste suspendu à la décision des juges Alphabétisation : 43,9 % Alassane Ouattara laisse planer le de la Cour pénale internationale Inflation : 1 % suspense sur son intention de briguer depuis que la procureure a fait appel, Indice de développement un troisième mandat. S’il se lance, il et il ne peut quitter Bruxelles. Rien e humain (sur 189 pays) : 170 pourra s’appuyer sur un bilan éconon’assure qu’il pourra se porter candiInvestissements directs étrangers : mique satisfaisant. Depuis 2012, la dat. Le président du Front populaire 913 millions de $ croissance s’est maintenue à 8 % par ivoirien (FPI) compte donc sur ses Dernier changement an en moyenne. En 2020, en dépit de alliances pour peser dans la course à de président : 2010 la dégradation du contexte régional, la magistrature suprême et n’exclut elle devrait s’établir à 7 %. plus de travailler avec son adversaire Croissance du PIB (%) Premier exportateur mondial de d’hier, Guillaume Soro. L’ex-président 7,7 7,5 cacao, le pays a opéré un rapprochede l’Assemblée nationale, qui a lui 7,4 7,2 ment avec le Ghana afin de peser sur aussi rompu avec Alassane Ouattara, le marché. Les deux voisins ont ainsi ne cache pas ses ambitions.

PIB (milliards de $) réussi à imposer aux acheteurs une Tous s’accordent pour contester les surtaxe de 400 dollars par tonne pour conditions d’organisation du scru48,3 43 44,4 38,1 la saison 2020-2021. Parallèlement, le tin, dénonçant la composition de la prix d’achat bord champ du cacao a été Commission électorale indépendante augmenté de 10 % pour la grande camet le découpage électoral. Un climat pagne 2019, s’établissant à 825 F CFA qui fait peser de nouvelles menaces (1,26 euro). La Côte d’Ivoire sait qu’elle sur la situation sécuritaire, alors doit relever le défi de la redistribution que de nombreuses armes circulent des richesses. Près de la moitié des encore et qu’une recrudescence des 2017 2018 2019* 2020* Ivoiriens vivent toujours au-dessous affrontements intercommunautaires du seuil de pauvreté. Un vaste proa marqué le pays. gramme social de 727,5 milliards de Les crispations risquent de se renF CFA pour les classes pauvres et moyennes a ainsi été lancé forcer : le jeu politique ne devrait se clarifier que tardivepar le gouvernement. À l’aube de la présidentielle, ce chanment, avec l’annonce des candidatures à la fin du premier tier a été confié au Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, semestre de 2020. À quelques mois de la présidentielle, qui apparaît comme le dauphin d’Alassane Ouattara, dans l’enjeu semble immense pour ce pays clé dans la sous-réle cas où celui-ci ne se représenterait pas. gion. S’il a su se redresser spectaculairement, il doit faire Face au Rassemblement des houphouëtistes pour face à ses vieux démons et prouver qu’une transition pacila démocratie et la paix (RHDP), l’opposition tente de fique est possible. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Quelles alliances?

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SÉNÉGAL

Gambie Passage délicat

GAMBIE

Banjul Océan Atlantique

SÉNÉGAL

Plus isolé qu’il y a quatre ans, Adama Barrow aura moins d’alliés en 2021.

Le tourisme et l’agriculture ont généré une forte croissance.

50 km

La Gambie a connu une forte croissance après le départ En raison de luttes politiques intestines, la transition postde Jammeh. Classée dans la catégorie des pays surendettés Yahya Jammeh tarde à profiter à la population. L’année à avec une dette atteignant près de 82 % du PIB à la fin de venir mettra à l’épreuve le sens tactique du président Adama 2019, elle a établi un programme en coopération avec le FMI. Barrow, qui combat d’anciens alliés déçus qu’il ne se retire Les emprunts actuels du gouvernement se concentrent pas à la fin de 2019 comme prévu. Le gouvernement, qui sur des secteurs prioritaires, comme l’électricité, l’éduréforme les entreprises publiques en difficulté, négocie l’alcation et l’agriculture. Un projet de centrale solaire de lègement de sa dette afin de retrouver un peu d’air face aux 20 MW d’une valeur de 156 millions créances du régime Jammeh. de dollars (139 millions d’euros) a été Les sept partis de Coalition 2016, lancé en mars pour combler le déficit qui ont porté Barrow au pouvoir, sont Nombre d’habitants : 2,3 millions énergétique. en plein désarroi. Le chef de l’État PIB par habitant : 755 $ a perdu en 2019 le soutien de son Espérance de vie : 61,4 ans plus grand allié, le Parti démocratique unifié (UDP). Bien que ce derLa Gambie peut espérer que ses eaux Alphabétisation : 42 % nier soit majoritaire au Parlement, soient aussi riches en brut et en gaz Inflation : 6,9 % Barrow a limogé tous les ministres que celles de son voisin le Sénégal.

Indice de développement qui en étaient issus ainsi que son Si, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de e humain (sur 189 pays) : 174 chef, Oussainou Darboe, qui était vicedécouvertes majeures, le pétrolier Investissements directs étrangers : président. Après qu’Adama Barrow a malaisien Petronas et la société austra29 millions de $ annoncé qu’il ne démissionnerait pas lienne FAR sont prêts à mener d’autres Dernier changement s’est formé le mouvement Three Years études sismiques et à forer un puits de président : 2017 Jotna (« trois ans, ça suffit ») pour rapdans les blocs A2 et A5. Le principal peler que Barrow aurait dû quitter le projet du gouvernement pour 2020 Croissance du PIB (%) 6,5 6,5 6,4 pouvoir le 19 décembre. est l’achèvement du Centre internaLe président garde certains alliés de tional de conférences, qui accueillera 4,8 la coalition en vue des élections préle sommet de l’Organisation de la coovues en 2021 : Hamat Bah, dirigeant pération islamique en 2022.

PIB (milliards de $) du Parti de la réconciliation nationale De leur côté, le tourisme et l’agri(NRP) ; Mai Ahmad Fatty, leader du culture jouent toujours un rôle crucial 1,92 1,77 1,62 1,49 Congrès moral de Gambie ; Henry dans la croissance du pays. La fréGomez, chef du Parti gambien pour la quentation est en hausse, mais l’effondémocratie et le progrès. Les analystes drement de l’opérateur britannique n’excluent pas la possibilité d’une Thomas Cook en 2019 pourrait faire entente entre Barrow et l’ancienne chuter les arrivées. Dans l’agriculture, Alliance pour la réorientation patriole gouvernement cherche à donner de tique et la construction pour 2021. la valeur aux exportations de noix de 2017 2018 2019* 2020* Selon ses partisans, le chef de l’État cajou, d’arachide et de sésame. doit rester en poste pour achever la Par ailleurs, les relations avec le transition. La Commission Janneh sur Sénégal se renforcent. Les échanges la corruption sous Jammeh n’a terminé son rapport qu’en commerciaux sont florissants, en partie grâce au pont septembre 2019, et il reste beaucoup de travail à accomplir sénégalais inauguré en janvier 2019. Dakar fournit égalepour récupérer les fonds pillés. La Commission de révision ment une assistance technique à Banjul en matière sécuconstitutionnelle doit quant à elle publier un projet de loi ritaire. Enfin, l’extension du port de la capitale, destinée fondamentale. La mise en place de la Commission vérité, à le décongestionner, est en cours d’élaboration et devrait réconciliation et réparations ainsi que celle des droits permettre à la Gambie de jouer un rôle plus important sur humains a également demandé du temps. le marché régional du transbordement. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Études sismiques

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST BURKINA FASO

GHANA

Tamale

Ghana En ordre de bataille

TOGO

Comme en 2016, Akufo-Addo et Mahama vont s’affronter à la présidentielle.

Les secteurs du pétrole et des mines progressent à grands pas.

CÔTE D’IVOIRE

Kumasi Accra Takoradi

150 km

Golfe de Guinée

Groupes d‘autodéfense

166

jeuneafrique no 3076H

* ESTIMATION OCTOBRE 2019

supérieur gratuit et à soutenir l’industrialisation. Le pays Après avoir achevé le programme du FMI, le Ghana comdevrait enregistrer une forte croissance grâce au pétrole mence l’année 2020 sur des bases économiques plus saines. et au gaz, à un approvisionnement en électricité régulier En décembre, le Nouveau Parti patriotique (NPP) et son et à une reprise dans le secteur agricole. L’inflation est chef, le président Nana Akufo-Addo, chercheront à se faire contenue au-dessous de la barre des 10 % depuis 2018. réélire face au Congrès démocratique national (NDC) et son Mais beaucoup reste à faire. Accra doit veiller à respecporte-drapeau, l’ancien président John Dramani Mahama. ter son budget, à augmenter ses recettes intérieures et à Celui-ci pourrait être secondé par l’ancien ministre des renforcer sa gestion du secteur énerFinances Kwesi Botchwey, l’un des gétique, souligne le FMI, qui juge la favoris du parti à la vice-présidence. dette publique (63 % du PIB à la fin Mais beaucoup de cadres du NDC s’opNombre d’habitants : 30,4 millions de 2019) encore trop élevée. posent au retour de l’ex-chef de l’État.

PIB par habitant : 2 223 $ Le ministère des Finances cherche Menant depuis 2016 un ambitieux Espérance de vie : 63 ans des fonds pour les infrastrucplan d’industrialisation, Akufo-Addo tures et les dépenses sociales. Une a fait de l’économie l’un de ses arguAlphabétisation : 71,5 % entité chargée de gérer les recettes ments les plus forts. Mais l’absence Inflation : 9,3 % publiques issues des concessions de progrès en matière de sécurité et Indice de développement minières est ainsi en cours de créade lutte contre la corruption poure humain (sur 189 pays) : 140 tion. La mine d’Obuasi, mine d’or rait lui nuire. L’échec de la privatisaInvestissements directs étrangers : phare d’Anglogold Ashanti, doit tion de la Compagnie d’électricité du 3 milliards de $ reprendre la production au début Ghana, notamment, a mis en lumière Dernier changement de 2020, après avoir été longtemps des problèmes de gouvernance. L’un de président : 2017 fermée pour cause d’insécurité. des grands enjeux de la campagne Dans le domaine du pétrole, la est le népotisme. Selon le NDC, Nana Croissance du PIB (%) 8,1 norvégienne Aker Energy devrait Akufo-Addo a placé trop de membres 7,4 6,2 présenter un programme de dévede sa famille à des postes élevés, 5,6 loppement révisé pour le champ notamment son cousin, Gabby Asare de Pecan (550 millions de barils de Otchere-Darko, sans portefeuille mais PIB (milliards de $) réserves estimées), dont la productrès puissant, et l’épouse de ce dernier, tion ne devrait pas commencer avant Nana Adjoa Hackman, membre du 69,7 67 65,5 58,9 2022. En matière de développement conseil d’administration de la Ghana industriel, le ministre du Commerce, National Petroleum Corporation.

Alan Kyerematen, se montre optimiste étant donné les accords d’assemblage de véhicules signés avec Alors que les risques sécuritaires Toyota, Nissan, Volkswagen et s’aggravent dans la région, en partiSinotruk. Côté cacao, la taxe élaborée culier au Burkina Faso, les principales 2017 2018 2019* 2020* avec la Côte d’Ivoire pourrait générer menaces qui pèsent sur le Ghana sont des gains à court terme. Et la camd’ordre interne. Une partie de l’oppopagne 2020-2021 sera soutenue par sition et de la société civile ne fait pas un plan de financement de 1,3 milliard de dollars. confiance au gouvernement pour assurer la sécurité de la Enfin, Akufo-Addo considère le fait que le Ghana population en période d’élections et des groupes d’autodéhéberge le siège de la Zone de libre-échange continentale fense pourraient apparaître. Quant au NDC, il met en doute africaine (Zleca) comme l’une de ses plus grandes réalisala neutralité de la commission électorale et se prépare à tions. Le gouvernement s’est engagé à verser 10 millions surveiller lui-même le déroulement du vote. de dollars pour financer le secrétariat, qui devrait être Le NPP cherche à consolider la stabilité macroécoopérationnel en 2020. nomique, à renforcer son programme d’enseignement

SÉNÉGAL

MALI

GUINÉEBISSAU

GUINÉE

Guinée Test grandeur nature

Océan Atlantique

Conakry

Kankan

SIERRA LEONE

Alpha Condé laisse planer le doute sur sa candidature à la présidentielle.

Le fer, longtemps délaissé au profit de la bauxite, s’est refait une santé.

CÔTE D’IVOIRE LIBERIA

200 km

Condé n’a pas abandonné sa volonté d’attirer des capitaux À l’approche des élections, les ambitions politiques s’expriétrangers. « L’Afrique a plus besoin d’investisseurs que de ment de toutes parts et souvent de façon acerbe. L’année dons. Nous ne sommes pas des mendiants », a-t-il lancé lors 2019 n’a pas dérogé à la règle et, à un an de la présidentielle, de sa visite aux États-Unis, en septembre. Et le fer, longl’éventualité d’une révision constitutionnelle a fait l’objet de temps délaissé par le pays au détriment de la bauxite, s’est débats sur toute l’étendue du territoire. refait une petite santé la même année. L’indien Ashapura L’opposition, réunie au sein du Front national pour a repris les commandes de la mine de fer de Yomboyéli et la défense de la Constitution (FNDC), attribue à Alpha ses 3 millions de tonnes de réserves, Condé la volonté de modifier la Loi à l’arrêt depuis 2015. Avec l’aide de fondamentale pour briguer un troil’ex-président français Nicolas Sarkozy, sième mandat. Selon le texte actuel, Nombre d’habitants : 12,8 millions l’épineuse affaire du mont Simandou, promulgué en 2010, le président est PIB par habitant : 981 $ qui opposait l’État guinéen à l’homme limité à deux quinquennats. Ainsi, Espérance de vie : 60,6 ans d’affaires Beny Steinmetz, accusé de en décembre 2020, le chef de l’État corruption, a trouvé une issue favodevrait céder sa place. Mais Alpha Alphabétisation : 32 % rable pour les deux parties. Les blocs 1 Condé est longtemps resté elliptique Inflation : 8,9 % et 2 de ce mégagisement de fer, récupéà ce sujet, laissant planer le doute sur Indice de développement rés par les autorités, ont été réattribués ses intentions. e humain (sur 189 pays) : 175 au consortium SMB Winning (déjà Investissements directs étrangers : actif dans la filière bauxite). Il vise une 483 millions de $ entrée en exploitation à l’horizon 2025 Puis, le 5 septembre, lors d’une adresse Dernier changement avec la construction du chemin de fer à la nation, le président est sorti de son de président : 2010 transguinéen de plus de 800 km qui silence. Il a donné un coup d’accélérapermettra de désenclaver l’est du pays. teur au calendrier électoral avec le lanCroissance du PIB (%) Ces nombreux investissements – en cement des consultations citoyennes 10 particulier dans le secteur minier – – conduites par le Premier ministre, 5,9 5,8 5,7 contribuent à la stabilité de la croisIbrahima Kassory Fofana – sur la quessance, qui oscille autour de 5,8 % en tion du changement de Loi fondamenPIB (milliards de $) 2018 et en 2019, d’après le FMI. Mais la tale. « Il revient au peuple guinéen de redistribution des richesses demeure décider s’il veut ou non modifier la 14,3 13,3 12 10,3 l’une des principales lacunes du pays.

Constitution », a-t-il déclaré. Cette Selon le rapport d’activité 2018 de l’Ofdémarche doit déboucher, en 2020, fice français de protection des réfusur un référendum qui aura pour giés et apatrides (Ofpra), les Guinéens enjeu principal l’abrogation ou non (ou présumés tels) ont constitué le de la limitation à deux du nombre de premier contingent de demandeurs mandats présidentiels consécutifs. d’asile (6 454) issus du continent cette Même si Alpha Condé souhaitait des 2017 2018 2019* 2020* année-là, soit une hausse de près de élections législatives avant fin 2019, 60 % par rapport à 2017. Un chiffre elles ont finalement été décalées contesté par les autorités de Conakry, en février 2020 et 114 députés vont qui l’estiment basé sur les seules déclarations des migrants. remettre leur siège en jeu. Mais l’organisation de ce scrutin Reste que l’absence de perspectives pour les jeunes, victimes risque d’être compliquée, avec une opposition qui dénonce d’un système éducatif défaillant et frappés par un taux de un vote précipité et accuse un président de la Commission chômage élevé, demeure l’une des principales préoccupaélectorale nationale indépendante (Ceni), taxé d’être au sertions du gouvernement. En 2019, seulement 24,38 % des vice de l’exécutif. candidats ayant passé les épreuves du baccalauréat l’avaient Un secteur réussit cependant à la Guinée: celui des mines. obtenu. Un taux d’échec historique.

Moins présent sur la scène internationale en 2019, Alpha * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Référendum en 2020

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST SÉNÉGAL

GUINÉE-BISSAU Bissau

Guinée-Bissau L’adieu aux crises ?

GUINÉE Océan Atlantique

50 km

Le premier tour de la présidentielle s’est tenu sans incident majeur.

Deux priorités : le retour à la stabilité et la lutte contre la corruption. les médiatrices. José Mário Vaz, qui avait dénoncé l’« ingéL’élection présidentielle permettra-t-elle d’en finir avec l’instabilité politique ? Si les résultats du second tour rence » de l’organisation ouest-africaine, avait défié celle-ci n’étaient pas encore connus à l’heure où nous mettions sous en limogeant une nouvelle fois son gouvernement. En retour, presse, les deux hommes en lice avaient fait le serment de la communauté internationale avait sévèrement désavoué remettre la Guinée-Bissau sur les rails. L’ex-Premier ministre Jomav, qui semble avoir payé son isolement croissant.

Domingos Simões Pereira (dit DSP), candidat du Parti Son successeur devra faire face à de nombreux défis et aux attentes immenses de la population. Malgré les africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert promesses de la classe politique (PAIGC, majoritaire à l’Assemblée de lutter contre la pauvreté, près nationale populaire), partait avec une longueur d’avance après avoir de 70 % des quelque 1,8 million de Nombre d’habitants : 1,9 million récolté plus de 40 % des suffrages le Bissau-Guinéens vivent toujours PIB par habitant : 786 $ 24 novembre. Il affrontait au second avec moins de 2 dollars par jour.

Espérance de vie : 57,8 ans tour un autre ancien chef de gouverPour ne rien arranger, bon nombre nement, Umaro Sissoco Embaló, cande services publics ont été paralyAlphabétisation : 45,6 % sés ces dernières années. Les écoles didat du Madem G-15 (parti formé en Inflation : – 2,6 % sont ainsi restées fermées pendant 2018 par des frondeurs du PAIGC), Indice de développement plusieurs mois en raison d’une grève qualifié avec plus de 27 % des sufe humain (sur 189 pays) : 177 frages. En attendant d’être départades enseignants, qui réclament le Investissements directs étrangers : gés, les deux camps adverses avaient paiement d’importants arriérés de 17 millions de $ essayé de rallier à leur cause les dix salaires. Malgré ces multiples crises, Dernier changement candidats malheureux. Mais si Nuno la croissance devrait s’établir à 4,6 % de président : 2014 Gomes Nabiam et le président soren 2019, selon les prévisions du FMI. tant José Mário Vaz, arrivés respecCroissance du PIB (%) tivement troisième et quatrième du 5,9 scrutin, avaient apporté leur soutien Le prochain chef de l’État devra éga4,9 4,6 3,8 à Umaro Sissoco Embaló, le transfert lement s’attaquer à la corruption de leurs voix en faveur du candidat de endémique et à l’implantation des l’opposition était loin d’être garanti. narcotrafiquants. Autre grand dosPIB (milliards de $) sier, celui d’une possible révision José Mário Vaz, dit Jomav, qui se 1,50 1,39 1,42 1,35 constitutionnelle, souhaitée par pluprésentait en indépendant à sa sucsieurs ex-candidats afin d’éclaircir cession, est le grand perdant de cette les rôles respectifs du président et du élection. Le futur ex-chef de l’État, Premier ministre. Enfin, pour attirer 62 ans, a perdu son bras de fer contre de nouveau les bailleurs de fonds son grand rival DSP en ne récoltant internationaux, lassés par ces souqu’un peu plus de 12 % des suffrages. bresauts politiques, le prochain diriSeul président élu à avoir terminé son 2017 2018 2019* 2020* geant pourrait être amené à engager mandat depuis les premières élecla réorganisation de l’armée. Véritable tions multipartites de 1994, Jomav serpent de mer, cette réforme pluétait l’un des principaux artisans de sieurs fois promise n’a jamais été lancée. Un dossier très la dernière crise institutionnelle. Il en avait posé le premier délicat en raison de la fâcheuse tendance qu’ont eue les acte en destituant en 2015 son Premier ministre d’alors, militaires à interrompre les affaires courantes ces derDomingos Simões Pereira, patron du PAIGC. Après son nières décennies. Le dernier putsch, qui date de 2012, avait limogeage, une valse de Premiers ministres et de gouverned’ailleurs eu lieu entre les deux tours de la présidentielle. ments lui avait succédé, sans parvenir à ramener la stabiMais, cette fois, les militaires ont promis de rester dans leur lité. Face aux risques de dérapages dans ce pays à l’histoire caserne. Et tous espèrent qu’ils tiendront parole. jalonnée de coups d’État, la Cedeao avait plusieurs fois joué * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Serpent de mer

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GUINÉE

SIERRA LEONE

Liberia Weah en position de hors jeu ?

LIBERIA Monrovia

Ganta

CÔTE D’IVOIRE

Buchanan Océan Atlantique

100 km

Les autorités doivent faire beaucoup mieux dans la lutte contre la corruption et le gaspillage.

L’exploitation minière pourrait relancer une économie au ralenti. minerai de fer grâce à l’ouverture d’un site par Arcelor Le manque de performance de l’économie et les soupçons Mittal et à d’importants investissements étrangers dans de corruption et de mauvaise gestion qui pèsent sur le l’or, la croissance demeure morose. L’emblématique secrégime de George Weah depuis le début de 2019 façonteur du caoutchouc a licencié des centaines d’employés à neront aussi 2020. Néanmoins, le président conservera cause de la chute brutale des prix et va continuer à s’affaiprobablement sa popularité parmi la grande majorité blir. Optimiste, le projet de budget pour 2020 prévoit une des jeunes citadins et des pauvres grâce à un populisme augmentation des recettes intérieures, mais l’agriculture soigneusement orchestré. Ces problèmes et une inflation et les autres secteurs non miniers ont incontrôlée pourraient cependant perdu 1,3 % de leur valeur depuis avoir un impact sur le Congrès pour 2018. le changement démocratique (CDC, Nombre d’habitants : 4,9 millions au pouvoir). Pendant ce temps, PIB par habitant : 703 $ l’opposition s’organise autour de la Espérance de vie : 63 ans Collaboration des partis politiques, Une grande partie du budget prévu une coalition dirigée par Benoni Urey, par le gouvernement est consacrée Alphabétisation : 42,9 % du All Liberia Party. à la rémunération des employés Inflation : 22,2 % En septembre, le président a écrit de l’État, passée de 330 millions Indice de développement une lettre inattendue à l’Assemblée de dollars en 2019 à 297 millions de e humain (sur 189 pays) : 181 appuyant l’appel, lancé par des milidollars pour 2020. Ces économies Investissements directs étrangers : tants de la société civile, à créer un proviennent des importantes réduc122 millions de $ tribunal de crimes de guerre pour tions de salaires des fonctionnaires Dernier changement juger les atrocités commises pendant de niveaux intermédiaire et supéde président : 2018 les guerres civiles des années 1990 rieur, que le ministre des Finances et et 2000. C’était l’une des princidu Développement, Samuel Tweah, Croissance du PIB (%) 2,4 pales recommandations du rapport a qualifiées d’« harmonisation ». Ce 1,5 de la Commission vérité et réconqui a scandalisé la frange éduquée 1,2 0,4 ciliation en 2009, mais elle n’avait de la population et réjoui les citadins jusqu’alors pas reçu de soutien réel, pauvres. Les détracteurs de Weah se PIB (milliards de $) en grande partie parce que beaucoup sont moqués de la maigre part allouée de membres de l’élite sont impliqués aux « prestations sociales » (1,5 mil3,28 3,24 3,22 3,23 d’une manière ou d’une autre. Weah lion de dollars) en dépit de ses grands non, et certains l’accusent de voudiscours. Les dépenses de défense loir embarrasser sa vice-présidente, ayant selon eux absorbé une grande Jewel Howard-Taylor, ex-épouse du partie des économies réalisées sur les criminel de guerre Charles Taylor, salaires, le sort des plus démunis ne avec laquelle il entretient une relation s’est pas amélioré. houleuse. Le soutien de la commuFace à une administration améri2017 2018 2019* 2020* nauté internationale, incertain à ce caine indifférente, Weah a courtisé les jour, sera crucial pour la mise en place nations européennes et asiatiques. La de ce tribunal, qui pourrait dominer Banque mondiale a annoncé détenir la vie politique libérienne pendant des années. au Liberia un portefeuille de 1 milliard de dollars de proAutre question majeure à venir : un référendum sur la jets dans les infrastructures, la gouvernance ou encore la limitation du nombre de mandats à deux et la réduction de gestion des ressources naturelles, entre autres. Par ailleurs, leur durée de six à cinq ans ainsi que sur la double nationale gouvernement élabore un office national du tourisme lité. De nombreux Libériens ont un passeport américain. et cherche à simplifier l’obtention des visas. Un Sheraton L’inflation, située autour de 28 %, restera élevée en devrait ouvrir ses portes en 2020 dans le quartier d’affaires 2020. Malgré un regain d’activité dans l’extraction du de Monrovia. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Réductions de salaires

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST ALGÉRIE 300 km

Mali Un si long processus de paix

MALI

MAURITANIE SÉN.

Gao

NIGER

Bamako Ségou BURKINA

FASO

GUINÉE

La spirale des violences intercommunautaires s’aggrave dans le Centre.

Si la croissance résiste, elle devrait toutefois légèrement ralentir.

CÔTE D’IVOIRE

avoir fait de même lorsqu’IBK s’est déclaré prêt à « discuJamais le Mali n’avait connu un tel massacre. Le 23 mars, à ter certaines dispositions » de l’accord de paix signé en Ogossagou, dans le Centre, des dizaines d’hommes habillés 2015 à Alger dans son discours pour la fête de l’Indépenen chasseurs dogons assassinent plus de 160 civils peuls, dance, le 22 septembre, la Coordination des mouvements dont des vieillards, des femmes et des enfants. La milice de l’Azawad (CMA), qui regroupe les ex-rebelles du Nord, dogon Dan Na Ambassagou est rapidement accusée d’être a, elle, annoncé qu’elle revenait à la table des discussions à l’origine de ce nettoyage ethnique, dont les rares survimi-décembre 2019. vants livrent des descriptions glaçantes. Ce jour-là, un nouveau seuil est franchi dans l’horreur. Alimentée par le poison de la vengeance, la spirale des violences Quatre ans après la signature de cet Nombre d’habitants : 19,7 millions intercommunautaires reprend de accord, le processus de paix proPIB par habitant : 924 $ plus belle dans le Centre. Sobane Da, gresse toujours péniblement. La ville Espérance de vie : 58,5 ans Gangafani, Yoro… Dans les semaines de Kidal, bastion de l’ex-rébellion qui suivent, plusieurs villages dogons touarègue qui échappe encore au Alphabétisation : 33,1 % sont attaqués par des Peuls, faisant contrôle de l’administration, est au Inflation : 0,2 % près d’une centaine de morts. Depuis, centre de nombreuses crispations, Indice de développement ces tueries interethniques se répètent même au-delà des frontières. Les e humain (sur 189 pays) : 182 sans que les autorités, dépassées, pargroupes jihadistes, eux, sont loin Investissements directs étrangers : viennent à les stopper. d’avoir été anéantis, comme le préten366 millions de $ Cela n’est pas sans conséquences daient certains responsables français Dernier changement à Bamako. Après une série de maniaprès l’opération Serval. Actifs dans le de président : 2013 festations dénonçant l’inaction du Nord et le Centre, ils y multiplient les gouvernement, le Premier ministre attaques contre les forces de défense Croissance du PIB (%) Soumeylou Boubèye Maïga, accusé et de sécurité. En coulisse, certains 5,4 5 5 d’avoir joué le jeu des milices, est œuvrent pour lancer des négociations 4,6 limogé à la mi-avril. Il est remplacé par officielles avec les chefs jihadistes Boubou Cissé, jusqu’alors ministre de maliens comme Amadou Koufa et PIB (milliards de $) l’Économie et des Finances. Ce techsurtout Iyad Ag Ghaly. Beaucoup y nocrate quadragénaire, considéré voient la seule façon de sortir de la 19 17,6 17,1 15,3 comme un fidèle du président Ibrahim crise et d’établir une paix durable au Boubacar Keïta (IBK), est chargé de Mali. Quant au G5 Sahel, censé aider à diriger un gouvernement d’ouversécuriser le pays, son efficacité est de ture. Un accord politique est signé plus en plus remise en question. et plusieurs figures de l’opposition Sur le plan économique, la croisrejoignent le nouvel exécutif, à comsance est toujours là mais devrait légèmencer par Tiébilé Dramé, virulent rement ralentir. Selon le FMI, elle était 2017 2018 2019* 2020* détracteur du chef de l’État, au poste de 5 % en 2019 et sera de 4,9 % en 2020 de ministre des Affaires étrangères. et de 4,8 % en 2021. De son côté, l’inEn plus de ce gouvernement flation devrait passer de 1,7 % en 2019 d’ouverture, un dialogue national inclusif est lancé en à 2,2 % en 2020. Dominée par l’agriculture et les services, octobre. Censé rassembler l’ensemble des « forces vives » l’économie repose sur ses piliers habituels: l’or et le coton. de la nation (responsables politiques, chefs traditionnels, À la fin d’août, le gouvernement a adopté un nouveau code autorités religieuses…) et trouver des solutions durables minier pour tirer davantage profit de l’importante manne à la crise politico-sécuritaire qu’elle traverse, le processus que représente l’or. Premier producteur de coton du contidérape rapidement. Plusieurs leaders de l’opposition, dont nent, le Mali espère aussi atteindre une production de 1 milSoumaïla Cissé, ont décidé de ne pas y participer. Après lion de tonnes d’or blanc pour 2019-2020. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Négocier en coulisses

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LIBYE ALGÉRIE 300 km

MALI

Niger Bientôt le renouveau ?

Niamey BURKINA FASO

BÉNIN

NIGER Agadez Zinder

TCHAD

NIGERIA

Le chef de l’État resserre les rangs à un an de la présidentielle, à laquelle il ne se présentera pas.

Confronté aux crises sécuritaires malienne et libyenne, le pays consacre 15 % de son budget à la défense. purger la fin de sa peine (il a été condamné à un an de prison Dans un an, sauf retournement de situation, les Nigériens pour « supposition d’enfants »), ce qui devrait l’empêcher de sauront qui sera le mieux placé pour succéder à Mahamadou se porter candidat.

Issoufou. Et les grandes manœuvres ont déjà commencé. Le Même s’il ne dispose pas d’une large base électorale – il 21 septembre, le chef de l’État a procédé à un mini-remanieest originaire d’une tribu arabe très minoritaire –, Mohamed ment du gouvernement: Issoufou Katambé a été nommé à Bazoum devrait pouvoir s’appuyer sur la puissance du la Défense, Foumakoye Gado a été promu ministre d’État et, PNDS, qu’il préside depuis 2011. L’homme s’est préparé à surtout, Hassoumi Massaoudou est de retour à un poste de la conquête du pouvoir dans l’ombre ministre d’État à la présidence. d’Issoufou, avec qui il avait fondé le Avec ses trois poids lourds du Parti parti. Il entend désormais récolter nigérien pour la démocratie et le sociaNombre d’habitants : 23,3 millions les fruits de sa patience, tandis que le lisme (PNDS, au pouvoir) – dont le PIB par habitant : 405 $ futur ex-chef de l’État souhaite valider dernier a pourtant vécu une disgrâce Espérance de vie : 60,4 ans une transition démocratique. de sept mois après son limogeage des Finances en janvier –, le chef de l’État Alphabétisation : 15,5 % a resserré les rangs en bâtissant un Inflation : – 1,3 % gouvernement de cohésion en vue de Quel que soit le prochain occupant du Indice de développement la présidentielle (dont le premier tour palais présidentiel, il aura fort à faire. e humain (sur 189 pays) : 189 doit avoir lieu fin décembre 2020).

Confronté à Boko Haram et aux retomInvestissements directs étrangers : Après avoir favorisé la désignation de bées des crises sécuritaires malienne 460 millions de $ son ministre de l’Intérieur, Mohamed et libyenne – plus de 70 soldats ont Dernier changement Bazoum, comme candidat du PNDS, encore été tués à Inates, à la frontière de président : 2011 le chef de l’État a passé les derniers avec le Mali, le 10 décembre –, le Niger mois à s’assurer que la campagne de consacre 15 % à 20 % de son budget à Croissance du PIB (%) 6,4 son dauphin était sur les rails. la défense, sans que l’effort doive a 6,2 6,5 4,8 Le 7 août, alors qu’ils s’avançaient priori faiblir. Face à ceux qui l’accusent côte à côte à Tahoua, lors de la Fête d’avoir sacrifié l’éducation, la santé et de l’indépendance, nul ne pouvait s’y la lutte contre la corruption au profit tromper. Bazoum était bien le challend’une relative sécurité, Niamey met PIB (milliards de $) ger choisi par Mahamadou Issoufou en avant les hôpitaux de référence 10,3 9,4 9,2 8,1 pour briguer sa succession (selon la (Niamey, Maradi et, prochainement, Constitution, le chef de l’État ne peut Tahoua), le barrage de Kandadji se représenter après deux mandats).

(130 MW), ainsi qu’une croissance de Avecunprogrammedecontinuitécen6,5 % en 2019 qui devrait s’élever à un tré sur les infrastructures, l’éducation peu plus de 7 % en moyenne ces cinq et la santé, l’actuel ministre de l’Intéprochaines années. rieur devrait affronter des habitués de Désirant élargir son assiette fiscale 2017 2018 2019* 2020* la course à la magistrature suprême: et diversifier ses investisseurs (qui sont Seini Oumarou (Mouvement national la Turquie et la Chine aujourd’hui), le pour la société de développement, Niger espère surtout profiter de son MNSD), Mahamane Ousmane (Rassemblement démoparc immobilier flambant neuf et de l’aéroport rénové de cratique et républicain, RDR-Tchanji), Ibrahim Yacouba sa capitale, ou encore de son nouveau plan pétrolier (grâce à (Mouvement patriotique nigérien-Kiishin Kassa, MPN). un futur oléoduc via le Bénin) pour s’offrir des coudées budUne incertitude demeure quant au candidat du Moden gétaires un peu plus franches. Niamey ambitionne de pasFa Lumana, premier parti d’opposition. Son leader, Hama ser de 20000 à 500000 barils produits par jour d’ici à 2030.

Amadou, rentré au Niger après trois ans d’exil au Bénin et Quel qu’il soit, le futur président comptera sur ce brut pour en France, a été placé en détention le 18 novembre 2019 pour – enfin – placer son pays sur la voie du développement. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Hôpitaux de référence

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST NIGER

TCHAD

Kano

BÉNIN

NIGERIA Abuja

Nigeria Avantage au camp Buhari

Lagos

Port Harcourt Golfe de Guinée

CAMEROUN 300 km

Le président à peine réélu, la classe politique se concentre sur le scrutin de 2023.

L’économie, qui a mis du temps à se remettre de la récession, dépend encore grandement du pétrole.

* ESTIMATION OCTOBRE 2019

FMI plaide en faveur d’une réduction des subventions au carRéélu en février 2019, Muhammadu Buhari a moins de quatre ans pour laisser sa marque. Il a fait campagne sur burant, ce à quoi Abuja n’est pas du tout favorable. D’autres la lutte contre la corruption, promis d’améliorer la sécuréformes sont toutefois à l’ordre du jour. Selon le ministre rité, de diversifier l’économie (dépendante du pétrole) et des Travaux et du Logement, Babatunde Fashola, des péages d’accroître la production de biens – du riz aux produits devraient être installés sur toutes les autoroutes du pays. pétroliers raffinés. L’économie est l’un des grands axes L’industriel Aliko Dangote parie sur la diversification d’action du président, en témoigne le conflit avec le géographique de ses activités et va commencer à investir Bénin à propos de la contrebande.

60 % des bénéfices de son groupe Bien que membre de la Zone de aux États-Unis et au Royaume-Uni. libre-échange continentale afriIl affirme que Dangote Cement Nombre d’habitants : 201 millions caine (Zleca), le Nigeria a choisi de pourrait également être introPIB par habitant : 2 222 $ fermer sa frontière avec son voisin duit en Bourse à Londres en 2020.

Espérance de vie : 53,9 ans afin d’éviter que du riz asiatique à Son immense raffinerie de Lekki, bas prix ne vienne miner ses efforts d’une capacité de 650 000 barils de Alphabétisation : 51,1 % vers l’autosuffisance. pétrole par jour, pourrait entrer en Inflation : 11,3 % Le Nigeria est confronté à une service à la fin de 2020. Le groupe Indice de développement série de menaces sécuritaires. Les Dangote prévoit de faire passer e humain (sur 189 pays) : 157 conflits entre éleveurs et agriculsa production sur le continent à Investissements directs étrangers : teurs dans la Middle Belt semblent 62 millions de tonnes de ciment.

2 milliards de $ s’être quelque peu calmés, mais les Dans les télécommunicaDernier changement enlèvements, en particulier dans le tions, l’inscription de la compade président : 2015 Nord-Ouest et le Sud-Ouest, sont de gnie sud-africaine de téléphonie plus en plus fréquents. mobile MTN sur la liste locale en Croissance du PIB (%) 2,5 Les gouverneurs du Nord-Ouest 2019 a constitué un grand pas vers 2,2 1,9 font des efforts de dialogue pour l’amélioration de ses relations avec 0,8 lutter contre le banditisme armé, Abuja. Et elle se prépare maintele vol de bétail et les enlèvements. nant à investir massivement dans Pendant ce temps, les attaques l’argent mobile.

PIB (milliards de $) intermittentes de Boko Haram et L’approvisionnement en élec494,8 376,3 398,1 446,5 de l’État islamique continuent. tricité reste faible, car le gouverConcentré sur sa lutte contre la nement n’a pas été en mesure de Chine en Afrique, le gouvernerésoudre les problèmes apparus ment américain pourrait signer lors de son importante campagne un contrat de fourniture d’avions de privatisation. Les sociétés de Tucano à l’armée nigériane. distribution ne sont toujours pas payées régulièrement par l’État, 2017 2018 2019* 2020* et les producteurs d’électricité demandent des tarifs plus élevés L’économie a mis du temps à se pour absorber leurs coûts de remettre de la récession de 2016. production. Des investissements supplémentaires sont Les banques se portent mieux, mais l’État a perçu moins nécessaires pour moderniser et étendre le réseau de de recettes fiscales que prévu. Il a également emprunté transport et de distribution. En juillet 2019, un accord pour financer les déficits budgétaires. Le budget national a été signé avec Siemens pour améliorer le réseau de 2020 atteint le chiffre record de 34 milliards de dollars, électrique nigérian. Dans le secteur pétrolier, la producavec des dépenses accrues dans les infrastructures. tion nationale devrait atteindre 2,2 millions de barils Le gouvernement fédéral dépense maintenant plus de par jour. la moitié de ses recettes au titre du service de la dette. Le

Service de la dette

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MAURITANIE

Saint-Louis

Sénégal Macky Sall joue sur du velours

Dakar

Thiès

Océan Atlantique

En position de force à l’Assemblée, le président souhaite accélérer les chantiers en cours.

Boostée par les investissements et les hydrocarbures, la croissance devrait rester forte.

SÉNÉGAL GAMBIE

GUINÉE-BISSAU

GUINÉE

MALI

100 km

pourrait mener, à terme, à la formation d’un gouverneRéélu avec plus de 58 % des voix dès le premier tour le ment d’union nationale. Derrière cette réconciliation se 24 février 2019, Macky Sall peut poursuivre sereinement joue sans doute la négociation du retour de Karim Wade, les chantiers initiés lors de son premier mandat. Le chef gracié par Macky Sall après avoir passé plus de trois ans de l’État aborde en 2020 la deuxième phase de son Plan en prison pour enrichissement illicite. En exil au Qatar Sénégal émergent (PSE, lancé en 2014), sa stratégie de depuis 2016, le fils de l’ancien président est pressenti développement à l’horizon 2035. pour prendre la tête du parti libéral à la suite de son Disposant d’une majorité confortable à l’Assemblée père. Sa mainmise sur le PDS – au nationale, le président a décidé sein duquel il a été promu en août de supprimer le poste de Premier dernier – a achevé le grand ménage ministre, une mesure rendue effective Nombre d’habitants : 16,3 millions au sein de la formation, dont les le 14 mai par révision constitutionPIB par habitant : 1 427 $ cadres ont un à un claqué la porte nelle. Ce chamboulement instituEspérance de vie : 67,5 ans ou été poussés vers la sortie. tionnel, absent de son programme Initialement prévues en décembre de campagne, lui a valu les foudres Alphabétisation : 42,8 % 2019, les élections locales ont par ailde ses opposants, qui lui reprochent Inflation : 1 % leurs été reportées au mois de mars une « dérive monarchique ». Le chef Indice de développement 2021 « au plus tard », à la veille des de l’État, lui, défend la modification, e humain (sur 189 pays) : 164 législatives de 2022. Ce qui laisse un censée rationaliser l’administration Investissements directs étrangers : boulevard à Macky Sall pour mener et accélérer les réformes.

629 millions de $ à bien ses réformes et projets. Dans Dernier changement son camp, ses alliés et ses soutiens de président : 2012 se font discrets sur leurs ambitions Souvent fragilisée par des tensions pour le scrutin présidentiel de 2024. internes, l’opposition peine à se rasCroissance du PIB (%) Sur le plan social, Macky Sall devra sembler et à tenir un discours uni7,1 6,7 6,6 avant tout répondre aux attentes des fié contre la majorité. Après avoir 6 Sénégalais, attentifs à la gestion des renoncé à contester la victoire de ressources pétrolières et gazières ainsi Macky Sall bien qu’ils aient rejeté qu’aux retombées économiques que les résultats de la présidentielle, ses PIB (milliards de $) leur exploitation pourrait générer, adversaires ont finalement accepté 25,7 23,9 23,4 20,9 et ce d’autant plus que des soupçons de participer au dialogue national, de corruption pèsent sur l’entourage à l’initiative du chef de l’État. Dans présidentiel en ce qui concerne la gesune logique de « décrispation de la vie tion des hydrocarbures. politique », ce dernier a notamment À l’international, le pays mise décidé de gracier l’ancien maire de toutefois sur sa bonne cote auprès Dakar, l’ex-socialiste Khalifa Sall, le des opérateurs économiques. Selon 29 septembre 2019. Cet adversaire de 2017 2018 2019* 2020* le FMI, la production commerciale Macky Sall avait été condamné à cinq d’hydrocarbures attendue pour ans de prison en 2018 pour détour2022 et l’investissement devraient nement de fonds publics et avait vu booster une croissance évaluée à 7,5 % en 2020 et à 7 % en sa candidature à la magistrature suprême rejetée par le 2021. Le Sénégal a aussi obtenu 14 milliards de dollars de Conseil constitutionnel. promesses de financements de la part des bailleurs insPoursuivant sa stratégie de pacification nationale, le titutionnels fin 2018 : un moyen d’accélérer la deuxième chef de l’État s’est également affiché aux côtés de l’anphase du PSE, dont Macky Sall espère qu’il lui permetcien président Abdoulaye Wade, scellant officiellement tra de marquer les esprits par son image de président de ses retrouvailles avec le chef du Parti démocratique l’émergence. sénégalais (PDS). Si leur rapprochement se poursuit, il * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Décrispation politique

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST GUINÉE Makeni Freetown

Sierra Leone Objectif réconciliation

Océan Atlantique

SIERRA LEONE Kenema

LIBERIA 100 km

À Freetown, certains craignent que la croisade anticorruption du président ne s’affaiblisse.

La dépendance aux secteurs minier et agricole devrait diminuer grâce à des investissements dans le pétrole.

* ESTIMATION OCTOBRE 2019

L’assise politique du président s’est raffermie. À la fin Avec un taux d’inflation de 15,8 % et une croissance stade mai, la Haute Cour a retiré leur siège à dix députés gnant en grande partie à cause de projets inactifs dans le APC (opposition), en a donné neuf au SLPP et a soumis le minerai de fer, le président Julius Maada Bio a vécu une dixième à un nouveau scrutin, emporté par le SLPP. Avec délicate deuxième année de pouvoir. Réticent à l’égard 58 députés – contre 57 pour l’APC –, le parti présidentiel est de l’ambitieux projet du pont de Lungi, estimé à 2,1 mildésormais majoritaire au Parlement. liards de dollars, il n’a pas non plus donné d’accord clair Des cas de violences ont pu émailler certains votes. En pour l’expansion du port de Freetown avec des fonds août, une élection partielle dans une chinois. Pourtant, la Sierra Leone a circonscription de Freetown contrôpu augmenter ses recettes publiques lée par l’APC a dû être interrompue. et réduire ses dépenses grâce à un Nombre d’habitants : 7,8 millions La police a arrêté plus de 20 de ses programme du FMI. En 2020, le PIB par habitant : 546 $ militants, dont un ancien ministre. chef de l’État restera probablement Espérance de vie : 52,2 ans L’économie demeure le point le concentré sur son projet éducatif, qui plus vulnérable du gouvernement. demanderait cependant à être revu Alphabétisation : 32,4 % Le leone continue de baisser par rapcompte tenu de la piètre performance Inflation : 15,7 % port au dollar en raison d’une chute des étudiants : 95 % d’entre eux ont Indice de développement dramatique des exportations due à la échoué à l’examen nécessaire à leur e humain (sur 189 pays) : 184 suspension de la production de mineentrée à l’université.

Investissements directs étrangers : rai de fer. Au début d’août 2019, les La réconciliation entre le Parti 599 millions de $ autorités ont annulé les permis des populaire de Sierra Leone (SLPP) et Dernier changement sociétés gérant les mines Tonkolili et les formations qui l’ont précédé au de président : 2018 Marampa. La première, appartenant pouvoir paraît prioritaire. En 2019, au groupe chinois Shandong, avait Bio a mis sur pied une commission Croissance du PIB (%) 4,9 été mise sous séquestre plus tôt cette pour enquêter sur les actes des hauts 4,6 année et avait depuis longtemps cessé responsables du parti Le Congrès 3,7 3,4 de produire. La société a néanmoins de tout le peuple (APC) pendant le contesté cette interdiction. Le site de mandat présidentiel d’Ernest Bai PIB (milliards de $) Marampa, une filiale du groupe améKoroma. Mais, bien qu’elle ait révélé ricain Gerald, avait quant à lui cessé des détournements massifs, elle n’a 4,4 4,2 4 3,7 ses activités en juillet. Une bonne interrogé publiquement ni assigné à nouvelle toutefois : la Banque moncomparaître aucun membre de cette diale a annoncé un investissement de administration. Au lieu de cela, le 60 millions de dollars dans la compachef de l’État a rencontré son prégnie Sierra Rutile. décesseur en septembre 2019 lors Pour stimuler la production alid’une réunion très médiatisée décrite mentaire, le ministère de l’Agriculture comme un geste de réconciliation 2017 2018 2019* 2020* soutient un programme visant à peu après que son gouvernement eut gagner 170000 hectares de riziculture approuvé les grandes lignes d’une au cours des trois prochaines années. nouvelle commission sur la paix et Quant au réseau électrique, il devrait bientôt gagner la cohésion nationale. Certains à Freetown craignent que 50 MW de capacité grâce à un projet solaire dont le gouvercette main tendue n’aboutisse à un accord qui émousse les nement a renégocié les conditions avec l’entreprise Planet efforts de la commission en matière de poursuites, réduiSolar Energy. De nouveaux accords pour des blocs pétrosant ainsi à néant la croisade anticorruption du président. liers sont également à venir. Le gouvernement avait lancé Le chef de l’opposition, Koroma, pourrait cependant se voir en mai un appel d’offres pour toutes les zones offshore bientôt défié par l’ancien vice-président Sam Sumana ou restantes du pays. par l’ancien ministre des Mines Alpha Kanu.

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Fiches pays AFRIQUE DE L’OUEST

BÉNIN Lac Volta

Togo Dans les starting-blocks

Sokodé

TOGO GHANA

NIGERIA

Lomé

Faure Gnassingbé devrait garder les rênes du pays en février 2020.

Malmenée à la suite des troubles de 2017, la croissance amorce un joli rebond.

200 km

Golfe de Guinée

amorce donc un rebond. Le taux de croissance devrait pasAlors que nombre de Togolais et d’observateurs ont les ser de 4,9 % en 2018 à 5,3 % en 2019. Et si les efforts actuels yeux rivés sur la présidentielle de 2020, le pays paraît être sont maintenus, le Togo respectera pour la troisième année sur de bons rails. Après les élections législatives de 2018, consécutive le critère de convergence relatif au déficit budboycottées par l’opposition réunie au sein de la coalition gétaire de 3 % du PIB fixé par l’Union économique et monéC14, et après la tenue des premiers scrutins municipaux taire ouest-africaine (Uemoa). Le déficit global devrait être depuis trente-deux ans en juin 2019, l’accalmie est de légèrement inférieur à 2 % du PIB. retour sur le front sociopolitique.

Après avoir retrouvé une certaine Révisée par voie parlementaire stabilité macroéconomique, notamen mai 2019, la Constitution permet ment dans la gestion de la dette, qui désormais au chef de l’État, Faure Nombre d’habitants : 8,1 millions avait explosé à la suite d’investisseGnassingbé, de se représenter aux PIB par habitant : 671 $ ments massifs dans les infrastrucscrutins de 2020 et 2025. Au pouEspérance de vie : 60,5 ans tures, l’accélération de la mise en voir depuis 2005, celui-ci devrait œuvre du Plan national de déveêtre réélu sans grandes difficultés en Alphabétisation : 63,7 % loppement (PND), au coût estimé à février prochain.

Inflation : 1,4 % 4 622 milliards de F CFA (7 milliards Toutefois, quelques incertitudes Indice de développement d’euros), pourrait avoir un impact sur pèsent sur la tenue de cette élection e humain (sur 189 pays) : 165 la vie quotidienne des Togolais. puisqu’une frange de l’opposition Investissements directs étrangers : et une partie du clergé togolais ont 102 millions de $ demandé la suspension du processus.

Dernier changement Ils réclament comme préalable une Le succès de la cession de 51 % de de président : 2005 recomposition de la Cour constitul’opérateur public Togocom au maltionnelle et un réaménagement de la gache Axian et au fonds panafricain Croissance du PIB (%) 5,3 commission électorale. Ils pourraient Emerging Capital Partners, qui vont 5,1 4,9 aussi prétexter l’absence de dialogue investir 160 milliards de F CFA pour 4,4 pour appeler à manifester de noudensifier le réseau ou lancer la 5G d’ici veau contre le pouvoir, en espérant à 2021, ainsi que la perspective de priPIB (milliards de $) une mobilisation similaire à celle de vatisation des deux banques publiques 5,9 2017. Si la présidentielle devait être BTCI et UTB pourraient accélérer l’in5,3 5,5 4,8 contestée, les tensions qui en découvestissement direct étranger dans le leraient pourraient saper les efforts pays et renforcer in fine la stature de de relance. hub financier régional de Lomé.

L’opposition est néanmoins Selon les projections, ce plan, minée par d’incessantes dissensions qui entend créer au moins internes. Pour preuve, les deux prin500 000 emplois, va accroître le cipaux partis d’opposition que sont revenu par habitant de 9,7 % et per2017 2018 2019* 2020* l’Alliance nationale pour le chanmettre au pays de grappiller 14 points gement (ANC) et le Parti national dans l’indice de développement panafricain (PNP) n’ont pas appelé humain. Reste à savoir si les dépenses au report du vote. L’ANC a même désigné son candidat en sociales, de plus en plus prépondérantes – environ 15 % la personne de Jean-Pierre Fabre. dans le budget 2019 –, suffiront pour convaincre les En parallèle, les autorités accentuent leurs efforts pour Togolais de faire montre de patience. conforter la reprise. Lomé revient de loin, mais le pays Finalement, la principale inquiétude est d’ordre sécuriparaît avoir surmonté l’impact négatif de la crise de 2017, taire, tant les autorités craignent une contagion terroriste. même si l’ajustement budgétaire sévère qui en a découlé a Les zones frontalières du Burkina Faso sont d’ailleurs étroiun temps limité la dynamique de croissance. L’économie tement surveillées. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Lomé, un hub financier

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ÉGYPTE

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N’Djamena

BURKINA FASO BÉNIN GHANA

ÉTHIOPIE

CAMEROUN

Malabo

Cameroun Centrafrique Congo RD Congo Gabon Guinée équatoriale São Tomé-et-Príncipe Tchad

DJIBO

NIGERIA

TOGO

180 181 182 183 184 185 186 187

SOUDAN

Abéché

Douala

Yaoundé

CENTRAFRIQUE Bangui

OUGANDA

GUINÉE ÉQUAT. São Tomé

SÃO TOMÉET-PRíNCIPE

Libreville Port-Gentil

GABON

CONGO

Kisangani

Mbandaka

Brazzaville

Pointe-Noire

SOUDAN DU SUD

Goma

RD CONGO

Bukavu

KENYA RWANDA BURUNDI

Kinshasa

TANZANIE

Matadi Océan Atlantique Lubumbashi ANGOLA 300 km

MOZAMBIQUE

ZAMBIE

Afriquecentrale À la traîne

’Afrique centrale est à la traîne par rapport à la zone ouest-africaine. » Cette confidence recueillie il y a peu de la bouche d’un ministre des Affaires étrangères de la région en question peut difficilement être réfutée. Économiquement, l’intégration patine, les échanges demeurent faibles et les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Ceeac) ont tenté pour la énième fois de provoquer une relance à la mi-décembre lors d’un sommet de l’organisation à Libreville, au Gabon.

Le contexte sécuritaire et politique n’incitait guère à l’optimisme. La Centrafrique est en proie à la crise, le Tchad d’Idriss Déby Itno souffre toujours à ses frontières, le Cameroun de Paul Biya se débat dans

L

«

une double crise – « anglophone » et postélectorale –, le Gabon vit au rythme des remaniements et des évictions et la RD Congo est meurtrie à l’Est. Quant au Congo de Denis Sassou Nguesso, il reste fragile.

Partout, la stabilité semble manquer pour profiter des ressources. Un paradoxe dans une région où les alternances au pouvoir sont une exception. La dernière en date – l’arrivée de Félix Tshisekedi à la présidence en RD Congo – a été « une bouffée d’air frais », même pour les voisins, selon un ancien Premier ministre de Centrafrique. « Il ne réussira peut-être pas tout mais il y a une impulsion et un élan », nous confiait ce dernier. C’est effectivement (beaucoup) mieux que rien.

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Fiches pays AFRIQUE CENTRALE NIGERIA

TCHAD

Garoua 200 km

Cameroun Début d’apaisement

CAMEROUN Golfe de Guinée

Douala

Yaoundé

GUINÉE ÉQU.

Premier test de l’année, les législatives et les municipales du 9 février.

Le pays aborde 2020 dans un climat des affaires dégradé.

CENTRAF.

GABON

CONGO

militaire. Paris a proposé son aide aux autorités camerouÉviter la sécession, apaiser le climat politique. Le Cameroun naises pour, notamment, mettre en place la décentralisation veut consolider sa stabilité pour relancer son économie et et financer la reconstruction d’infrastructures détruites par retrouver le chemin du développement. Le premier test aura la guerre. Sur ce plan diplomatique, le président français, lieu le 9 février 2020, date prévue pour un double scrutin, Emmanuel Macron, a multiplié les attentions à l’égard de législatif et municipal, alors que le pays ne s’est pas encore son homologue camerounais, invité à Paris les 8 octobre et tout à fait remis de deux années de crise multiforme. La 11 novembre. première, eu égard à sa gravité, est le soulèvement des Les États-Unis, en revanche, ont régions anglophones du Nord-Ouest choisi d’accentuer la pression sur le et du Sud-Ouest, qui a déjà provoqué Cameroun. Washington a suspendu la mort de plus de 2000 personnes et Nombre d’habitants : 25,9 millions une partie de ses programmes de fait plus de 500 000 déplacés. Pour PIB par habitant : 1 514 $ coopération militaire avec le pays, tenter de mettre fin aux combats Espérance de vie : 58,6 ans notamment la formation et la fourentre les forces de l’ordre et les sépaniture d’armements pour un total de ratistes armés, le gouvernement a Alphabétisation : 71,3 % 17 millions d’euros. L’administration convoqué un Grand Dialogue natioInflation : 2,1 % Trump a également décidé de sousnal à Yaoundé, du 30 septembre au Indice de développement traire le Cameroun, dès le 1er janvier 4 octobre. Présidées par le Premier e humain (sur 189 pays) : 151 ministre, Joseph Dion Ngute, ces 2020, de la liste des pays bénéficiaires Investissements directs étrangers : assises ont formulé plusieurs recomdes facilités de l’African Growth and 702 millions de $ mandations, dont la plus marquante Opportunity Act (Agoa), qui exonère Dernier changement est l’octroi d’un statut spécial aux deux de droits de douane les pays subsahade président : 1982 régions en crise dans le cadre d’une riens exportant aux États-Unis. « décentralisation avancée ».

Le Cameroun aborde 2020 avec Croissance du PIB (%) 4,1 4,0 un climat des affaires dégradé. Selon 3,9 3,5 une note de conjoncture publiée par le Groupement inter-patronal du Le gouvernement recherche égaCameroun (Gicam), « au cours du deulement l’apaisement sur le terrain PIB (milliards de $) xième trimestre de 2019, 65 % des chefs politique, où les tensions postélecd’entreprise interrogés indiquent torales ont conduit, en janvier, à 40,6 38,6 38,7 34,9 avoir observé une baisse de leur chiffre l’arrestation de Maurice Kamto, le d’affaires par rapport au trimestre leader du Mouvement pour la renaisprécédent ». En 2020, on connaîtra sance du Cameroun (MRC), et de également l’épilogue du feuilleton à plusieurs de ses compagnons. Après rebondissements de l’adjudication plusieurs mois de détention et de du terminal à conteneurs du Port péripéties judiciaires, ils ont été libéautonome de Douala. Le 3 novembre, rés le 5 octobre. Au même moment, 2017 2018 2019* 2020* sur instruction du président Paul Biya, 333 détenus de la crise anglophone le processus de signature du contrat ont, eux aussi, été élargis. de concession attribué à l’entreprise La libération des prisonniers a suisse Terminal Investment Limited (TIL) a été suspendu. été saluée par la communauté internationale comme un Cette suspension est susceptible de mettre fin à la procédébut d’apaisement alors que les ONG, dont Human Rights dure judiciaire introduite par le consortium franco-danois Watch et Amnesty International, critiquaient ces derniers Bolloré-APM Terminals, concessionnaire depuis quinze mois le pouvoir de Yaoundé, l’accusant de violer les droits ans du terminal à conteneurs mais qui ne figurait pas sur la humains. Le Cameroun donne dans le même temps des liste restreinte des opérateurs préqualifiés. Un nouvel appel gages de bonne volonté à ses partenaires étrangers tels que d’offres devrait donc être lancé incessamment. la France, qui a toujours estimé que la solution n’était pas * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Bonne volonté

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TCHAD

Centrafrique On prend les mêmes…

SOUDAN

CENTRAFRIQUE CAMEROUN

Berberati

SOUDAN DU SUD

Bangui

RD CONGO CONGO

300 km

Face aux chefs rebelles, le président cherche des alliés à l’étranger, notamment en Russie.

Bangui vit sous perfusion grâce aux aides des bailleurs de fonds. la défense de la nation »), où Karim Meckassoua, AnicetLes années se suivent et se ressemblent en Centrafrique, où Georges Dologuélé ou encore Jean-Serge Bokassa militent rares sont les optimistes qui espèrent une véritable sortie pour sa destitution. Ces trois candidats malheureux au de crise. En février, le gouvernement a signé un accord de scrutin de 2015-2016 estiment que sa gestion de la crise paix à Khartoum, au Soudan, avec les principaux groupes sécuritaire relève de la « haute trahison ». Et puis, surtout, armés. Mais celui-ci n’a provoqué que de timides avancées ils ont des ambitions pour 2020, tout comme l’ex-Premier sur le terrain, toujours contrôlé à 80 % par les chefs rebelles. ministre Martin Ziguélé.

Les exactions et les combats sporadiques y sont quasi quotidiens tandis que les Noureddine Adam (Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique, FPRC), De son côté, l’ancien président Nombre d’habitants : 4,7 millions Ali Darassa (Unité pour la paix en François Bozizé, en exil en Ouganda, PIB par habitant : 447 $ Centrafrique, UPC), Mahamat alattend son heure. Mis sous sanctions Espérance de vie : 52,9 ans Khatim (Mouvement patriotique pour par les Nations unies et visé par un la Centrafrique, MPC) ou Abass Sidiki mandat d’arrêt international, il a Alphabétisation : 36,8 % (Retour, réclamation et réhabilitation, interdiction de voyager et ses avoirs Inflation : 3 % 3R) continuent de jouir d’une immuont été gelés. Mais l’ancien général Indice de développement nité de fait. s’active en coulisse pour obtenir l’aue humain (sur 189 pays) : 188 Dans ce contexte, la marge de torisation de rentrer dans son pays : il Investissements directs étrangers : manœuvre de Faustin-Archange fait valoir sa qualité de leader d’opi18 millions de $ Touadéra est étroite. Depuis son nion dans son fief électoral de l’OuDernier changement élection au début de l’année 2016, le ham et son rôle de patron du Kwa de président : 2016 président a essayé de multiplier les Na Kwa (KNK), son parti. Plusieurs partenaires et s’est tourné à partir potentiels candidats cherchent à Croissance du PIB (%) 4,9 de la fin de 2017 vers la Russie, au obtenir ses faveurs, et l’intéressé 4,4 4,5 3,8 – relatif – détriment de la France. réussit à se faire entendre. Malgré les Moscou, qui est aujourd’hui l’un des sanctions, il est parvenu à se rendre principaux soutiens de Touadéra, à Addis-Abeba en 2018 pour y renPIB (milliards de $) fournit à son allié en Afrique centrale contrer le Congolais Denis Sassou 2,49 2,32 services de sécurité et armement, Nguesso, influent dans le dossier de 2,28 2,07 tout en soignant ses intérêts éconola crise centrafricaine. miques, notamment dans le secteur Dans un contexte de « paix » toute des mines. Mais Paris n’a pas dit son relative depuis la signature des dernier mot. Agacés, les Français ont accords de Khartoum, Bangui vit durci le ton diplomatiquement, en sous perfusion grâce aux bailleurs s’inquiétant auprès de Touadéra et de internationaux, Union européenne certains de ses homologues – notamen tête, qui font fonctionner tant 2017 2018 2019* 2020* ment le Tchadien Idriss Déby Itno – bien que mal son administration. d’un regain d’influence russe.

En juillet, le FMI a achevé la sixième Chacun des acteurs pense en réalité et dernière revue d’un accord qui d’ores et déjà à la prochaine échéance électorale : la présipermettra à la Centrafrique de décaisser jusqu’à 186 mildentielle, dont le premier tour doit se tenir à la fin du mois lions de dollars. « Les résultats obtenus par la République de décembre 2020. Le chef de l’État, qui sait ne pas être le centrafricaine […] restent satisfaisants en dépit d’une premier choix de Paris – il ne l’était déjà pas il y a quatre situation sécuritaire et humanitaire difficile », avait alors ans –, fait campagne pour sa réélection, sans toutefois l’andéclaré Mitsuhiro Furusawa, directeur général adjoint de noncer officiellement. Face à lui, l’opposition tente de s’unir l’institution de Bretton Woods. Un optimisme que beauau sein de la plateforme É Zingo Biani (« Front uni pour coup d’acteurs sont loin de partager. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Bozizé attend son heure

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Fiches pays AFRIQUE CENTRALE CENTRAFRIQUE

200 km

CAMEROUN

Congo Tout est sous contrôle

GABON Océan Atlantique

Grâce à la restructuration de sa dette, le pays a retrouvé des appuis financiers.

Trop faible, l’opposition ne profite pas des tensions au sein du parti au pouvoir.

CONGO RD CONGO

Brazzaville PointeNoire

ANGOLA

maîtriser les dépenses afin de ramener la dette à 70 % du Les bonnes nouvelles se sont enchaînées au début du PIB en trois ans – contre 120 % aujourd’hui. Malgré les deuxième semestre de 2019. Le Congo, dont les finances 5 % de croissance attendus en 2019, le budget 2020 sera publiques ont été très secouées par la chute des prix du encore marqué par la rigueur. Le gouvernement entend pétrole, a pu signer le 11 juillet un accord de prêt avec le néanmoins lui donner une forte coloration sociale.

FMI. Après deux années de rudes négociations émaillées Des tensions sourdes agitent le Parti congolais du travail de révélations sur une dette cachée auprès de la Chine et (PCT), au pouvoir. Il pourrait se choisir un nouveau secrédes traders pétroliers Glencore et Trafigura (plus de 1,5 miltaire général lors de son congrès ordiliard d’euros), l’institution a accordé naire, fin décembre, concluant ainsi au Congo 448,6 millions de dollars un compromis entre Pierre Ngolo, sur trois ans (398 millions d’euros).

Nombre d’habitants : 5,4 millions l’actuel titulaire du poste, le fils du La Chine a accepté le 29 avril de PIB par habitant : 2 534 $ président, Denis Christel Sassou restructurer la dette congolaise – estiEspérance de vie : 65,1 ans Nguesso, et la tendance modernisamée à 3,15 milliards de dollars, soit trice du parti. environ 35 % de l’endettement total Alphabétisation : 79,3 % L’opposition, divisée, n’est pas en de Brazzaville –, permettant ainsi le Inflation : 1,5 % mesure de surfer sur ces scissions. déblocage de l’aide financière. Le pays Indice de développement Elle semble même éreintée par l’oua également reçu le soutien de la BAD e humain (sur 189 pays) : 137 verture du dialogue politique inclusif, (400 millions d’euros), de la Banque Investissements directs étrangers : dont les premières consultations ont mondiale (260 millions d’euros) et de 4,3 milliards de $ été lancées en octobre par le Conseil la France (135 millions d’euros).

Dernier changement national du dialogue dirigé par Martin de président : 1997 Mberi. Mais ce processus réussira-t-il à aborder les questions qui fâchent Le 10 août, le gisement pétrolier du Croissance du PIB (%) 3,9 et à réinventer en profondeur un jeu Delta de la Cuvette, mis au jour par 2,7 1,5 politique dominé par un PCT archiles compagnies congolaises Société puissant? Rien n’est moins sûr. africaine de recherche pétrolière – 1,7 Lors de la visite de Denis Sassou et de distribution (SARPD-Oil) et Nguesso à Paris le 5 septembre, Petroleum Exploration & Production PIB (milliards de $) le ministre français des Affaires Africa (Pepa), était présenté à Oyo. 11,6 11,5 11,5 étrangères, Jean-Yves Le Drian, lui Selon les prévisions les plus opti8,93 a demandé « avec fermeté » la libémistes, il devrait pouvoir produire ration des opposants, dont celle du jusqu’à 983 000 barils par jour, soit général Jean-Marie Michel Mokoko, trois fois la production nationale arrivé troisième à la présidentielle de actuelle. Une évaluation que certains 2016. analystes jugent cependant aléatoire.

Les armes se sont tues dans le Pool De quoi cependant soulager les auto2017 2018 2019* 2020* et le pays déploie tant bien que mal rités qui, si elles sont parvenues à son Programme de désarmement, assumer les salaires de l’imposante démobilisation et réintégration fonction publique, accusent de nom(PDDR) des anciens combattants de Frédéric Bintsamou, breux mois de retard dans le paiement des pensions des alias Pasteur Ntumi, en attendant que la situation personretraités et des bourses des étudiants ainsi qu’une dette nelle de ce dernier soit réglée. Le ramassage des armes a été contractée auprès des opérateurs économiques du pays effectué. L’État tente d’assurer la subsistance des anciens (2,6 milliards d’euros). miliciens et des populations du Pool. Bref, les défis à releLe FMI a imposé au Congo l’application d’ici à la fin de ver afin de parvenir à une stabilité politique et économique mars 2020 de 48 mesures destinées à assainir les finances sont encore nombreux. publiques, à mieux mobiliser la ressource fiscale et à * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Pression amicale

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CON GO

CENTRAFRIQUE

RD Congo Drôle de rupture

Kinshasa

Kisangani Goma OUGANDA

RD CONGO

RWANDA BURUNDI

TANZANIE

Océan Atlantique 400 km

SOUDAN DU SUD

Lubumbashi

ANGOLA

ZAMBIE

Félix Tshisekedi doit composer avec son prédécesseur, Joseph Kabila, maître du Parlement.

Le nouveau président s’est donné pour mission de ramener la paix dans l’Est. Jean-Pierre Bemba, autre cadre de Lamuka, se montre disLe 24 janvier, Félix Tshisekedi a prêté serment à l’issue d’une cret. Combien de temps la coalition pourra-t-elle rester unie? présidentielle controversée. Cette transition pacifique – une L’avenir pourrait amener à une redistribution des cartes. première depuis l’indépendance – continue d’intriguer, surÀ l’heure où nous écrivions ces lignes, le budget 2020 tout à l’issue d’une première année riche en péripéties. Car était évalué à 10 milliards de dollars. Sera-t-il suffisant ? si c’est bien le candidat du Cap pour le changement (Cach, La croissance est passée de 3,7 % en 2017 à 5,8 % en 2018 coalition que Tshisekedi a formée avec Vital Kamerhe deux et doit se stabiliser à 4,3 % en 2019. Avec la chute des cours mois avant le scrutin) qui a pris les rênes du pays, c’est du cobalt et un ralentissement du Joseph Kabila, le président sortant, secteur minier, de plus en plus d’acqui a endossé le costume de l’indisteurs appellent à diversifier une écopensable partenaire. Le Front comNombre d’habitants : 86,8 millions nomie trop liée au secteur extractif. mun pour le Congo (FCC), de l’ancien PIB par habitant : 500 $ Félix Tshisekedi aura besoin d’une chef de l’État, a remporté une écraEspérance de vie : 60 ans croissance plus dynamique pour faire sante majorité dans les deux chambres avancer ses réformes, notamment du Parlement, que deux de ses proches Alphabétisation : 77 % la gratuité de l’enseignement. Autre dirigent. Après cinq mois d’intenses Inflation : 5,5 % engagement du président, la lutte tractations, c’est un Premier ministre Indice de développement contre la corruption et le combat pour FCC, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, qui e humain (sur 189 pays) : 176 une meilleure gouvernance, chantier a été nommé pour diriger le premier Investissements directs étrangers : essentiel pour rassurer les investisgouvernement de l’ère Tshisekedi.

1,5 milliard de $ seurs étrangers. La RD Congo figure au Dernier changement 183e rang des 190 pays du classement de président : 2019 « Doing Business » 2020 de la Banque Dès lors, peut-on parler de rupture ?

L’ancien et le nouveau président ont mondiale.

Croissance du PIB (%) 5,8 passélesseptpremiersmoisdumandat Outresesdéplacementschezsesvoide Tshisekedi à négocier la formation sins sous-régionaux, Félix Tshisekedi 4,2 3,8 3,7 d’une équipe majoritairement issue a aussi multiplié les contacts auprès du camp Kabila. Après de nombreux des partenaires internationaux PIB (milliards de $) blocages, les deux mouvances contiet des bailleurs, notamment en nuent de s’apprivoiser. D’autant que Belgique et aux États-Unis. Il entend 51,5 48,9 47 37,6 aussi ramener la paix dans l’est de la plusieurs dossiers clivants pourraient ressurgir: nominations dans la magisRD Congo, foyer de rébellions depuis trature, électionsàlaCommissionélecplus de vingt-cinq ans. Avec près torale nationale indépendante (Ceni), de 130 groupes armés dans les deux débat potentiel sur une révision de la Kivus, un programme de désarmeConstitution… Tshisekedi devra par ment, démobilisation et réinsertion ailleurs composer avec certains cadres (DDR) saturé et une épidémie d’Ebola 2017 2018 2019* 2020* de son parti, l’UDPS, agacés par la qui, depuis août 2018, comptabilise plus de 3000 cas dont 2000 morts, la toute-puissance de son directeur de cabinet, Vital Kamerhe. tâche s’annonce délicate.

L’opposition, regroupée au sein de la coalition Lamuka, Le président n’a cessé de voyager dans les pays voisins de peine pour sa part à se remettre de la présidentielle. Deux l’Est, au Rwanda, en Ouganda et au Burundi, afin d’évoquer lignes s’affrontent : la frange dure, conduite par Martin le problème et de renforcer la coopération sécuritaire. Pour Fayulu, réclame toujours la vérité des urnes; une aile plus soutenir ses efforts, la RD Congo peut toujours compter sur modérée, incarnée par Moïse Katumbi, prône une oppola présence de la Monusco, très critiquée sous Kabila et qui sition républicaine et entend faire participer sa formacontinue de subir des pertes budgétaires avant le renouvellement de son mandat à la fin de 2019. tion aux institutions. Entre ces deux forces antagonistes, * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Dossiers clivants

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Fiches pays AFRIQUE CENTRALE CAMEROUN GUINÉE ÉQUATORIALE Océan Atlantique

Gabon Grand chamboulement

Libreville Port-Gentil

GABON Franceville

Le chef de l’État a largement remanié son gouvernement.

Le taux de chômage reste préoccupant, mais la croissance devrait résister.

CONGO 100 km

Gaspard Ntoutoume Ayi, a fait figure de poil à gratter Est-il monté trop haut, trop vite? Une chose est sûre, Brice pour le camp présidentiel. Tout au long de l’année, ils ont Laccruche Alihanga, le directeur de cabinet du président réclamé, sans succès, un examen médical du chef de l’État, Ali Bongo Ondimba, aura été partout, tout au long de l’andont ils doutent qu’il soit capable d’assurer ses fonctions. née 2019. Depuis l’accident vasculaire cérébral du chef de l’État (en octobre 2018) en particulier, c’est lui qui tenait les rênes du gouvernement. Peu à peu, il en a écarté ses rivaux, tels Emmanuel Issoze Ngondet, ancien locataire de la priAlors que la prochaine présidentielle n’aura pas lieu avant mature, ou Ali Akbar Onanga, ex-mi2023, la vie politique gabonaise tourne nistre de la Fonction publique. Mais donc essentiellement autour des quela chute n’a pas tardé à venir: limogé relles internes du Parti démocratique Nombre d’habitants : 2,2 millions du cabinet présidentiel puis du gougabonais (PDG), qui ont fragilisé l’acPIB par habitant : 8 112 $ vernement, où il espérait rebondir, il tion d’un gouvernement plusieurs fois Espérance de vie : 66,5 ans a été interpellé le 3 décembre dans le remanié cette année. cadre de l’opération anticorruption Malgré tout, ce dernier espérait proAlphabétisation : 82,3 % Scorpion. fiter d’une relative quiétude, après la Inflation : 3 % Le sort de Brice Laccruche Alihanga chute de Brice Laccruche Alihanga, Indice de développement est désormais entre les mains de la juspour poursuivre ses efforts en matière e humain (sur 189 pays) : 110 tice, tandis qu’une autre ère s’ouvre au d’économie. Selon le FMI – qui pousse Investissements directs étrangers : Palais du bord de mer, où Noureddin l’État à réduire son train de vie –, le 846 millions de $ Bongo Ondimba, le fils du chef de Gabon sort peu à peu d’une crise Dernier changement l’État, a été nommé le 5 décembre cooraggravée par la forte baisse des prix de président : 2009 dinateur général des affaires présidendu pétrole. tielles. Pendant ce temps, le président La croissance quasi nulle en Croissance 3,4 3,4 a multiplié les séjours à l’étranger, 2017 (0,5 %) et 2018 (0,8 %) devrait du PIB (%) notamment à Londres, et mis l’accent se redresser à 3,4 % en 2019, selon 0,8 0,5 sur sa convalescence. Il a limité ses le FMI, qui a revu ses prévisions apparitions en public, n’apparaissant à la hausse à l’issue de sa mission PIB (milliards de $) la plupart du temps que pour calmer à Libreville en octobre. La reprise les tensions au sein du pouvoir, tanest essentiellement due aux per17,6 16,8 16,8 14,9 dis que l’opposition semblait peiner à formances des secteurs pétrolier, trouver un nouveau souffle. minier et agricole. Les efforts de Jean Ping, candidat malheureux maîtrise des finances publiques ont au scrutin de 2016 se présentant commencé à porter leurs fruits, mais toujours comme le président élu, est l’embellie reste fragile. La réduction peu sorti de son silence, en dehors des dépenses a réduit l’activité dans de quelques symboliques discours. le bâtiment et les travaux publics, 2017 2018 2019* 2020* Quant aux autres poids lourds de grand pourvoyeur d’emplois. Le chôl’opposition, comme Alexandre mage et la pauvreté – qui frappe plus Barro-Chambrier (Rassemblement de 25 % de la population – ont propour la patrie et la modernité, RPM), Guy Nzouba-Ndama gressé, tandis que la trop grande dépendance au pétrole (Les Démocrates, LD) ou Zacharie Myboto (Union natiofreine encore l’économie. nale, UN), ils n’ont guère pesé sur le débat politique après Avec 2023 en ligne de mire, l’opposition n’a d’autre choix la cuisante défaite de leurs troupes lors des législatives que de se reconstruire. L’UN et les autres formations réfléd’octobre 2018. chissent déjà à la façon de contester une nouvelle fois l’héSeul le collectif Appel à agir, regroupant notamment gémonie du « clan Bongo ». Leur salut passera sans doute l’avocat Anges Kevin Nzigou et le cadre de l’UN Jean par l’émergence d’une nouvelle génération. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Querelles internes

184

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Malabo

CAMEROUN

BIOKO Bata

Guinée équatoriale Plan rouge

Océan Atlantique

GUINÉE ÉQUATORIALE GABON

Confronté à la récession, le gouvernement a trouvé un accord avec le FMI. Teodoro Nguema Obiang Mangue lève un à un les obstacles vers la présidence.

50 km

projets de développement en Guinée équatoriale. Ce que le Le règne de la famille Obiang en Guinée équatoriale est PDGE qualifie d’intervention injuste dans les affaires sourythmé par le cycle d’expansion-récession du secteur veraines du pays. pétrolier. Le président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, La mauvaise gestion des revenus pétroliers a des consé77 ans, a fêté ses quarante années de pouvoir en 2019 et ne quences à long terme. Pendant les périodes fastes, le goumontre pas encore clairement comment il va passer le relais vernement a consacré des fonds à des projets de prestige, à son successeur préféré, son vice-président et fils, Teodoro telle la Ciudad de La Paz. Par manque d’épargne publique, Nguema Obiang Mangue, dit Teodorín. La prochaine prél’économie va se contracter chaque sidentielle devrait avoir lieu en 2023. année jusqu’en 2024 au moins, préLes grands projets d’infrastructures voit le FMI, qui a signé avec le pays un ayant été stoppés par la dernière chute Nombre d’habitants : 1,4 million programme triennal en octobre 2019. des prix du baril, le gouvernement PIB par habitant : 8 927 $ Les institutions financières internatiocollabore derechef avec le FMI pour Espérance de vie : 57,9 ans nales veulent que le pouvoir améliore accroître la transparence et réduire le la gouvernance et investisse dans des gaspillage jusqu’à ce que les cours augAlphabétisation : NC domaines tels que l’éducation, la santé mentent à nouveau et que les coffres Inflation : 1 % et l’assainissement. de l’État se regarnissent.

Indice de développement En attendant d’être officiellement e humain (sur 189 pays) : 141 désigné comme dauphin, Teodorín Investissements directs étrangers : prend de plus en plus le contrôle du Autre thème clé de l’accord: la diver396 millions de $ secteur de la sécurité. Une position sification économique. En dehors Dernier changement stratégique pour quiconque lorgne la des secteurs du pétrole et du gaz, de président : 1979 présidence. Teodorín ne serait pas en les investisseurs internationaux ont très bons termes avec son demi-frère, montré peu d’intérêt pour le marché Croissance du PIB (%) – 4,6 Gabriel Mbega Obiang Lima, ministre équato-guinéen en raison de sa petite – 4,7 – 4,9 des Hydrocarbures, mais cela ne taille et des obstacles au commerce – 5,7 devrait pas l’empêcher d’accéder au avec l’Afrique centrale. Bien qu’il vante pouvoir le moment venu. le potentiel de l’agriculture et du touPIB (milliards de $) L’opposition peine à concurrenrisme, le gouvernement hésite à rendre cer le Parti démocratique de Guinée les séjours dans le pays trop faciles. Il 13,7 12,2 12,1 11,6 équatoriale (PDGE), au pouvoir. La circule même des allégations selon Convergence pour la démocratie lesquelles un mur va être construit à sociale, dirigée par Andrés Esono la frontière avec le Cameroun.

Ondo, n’a pas de siège à l’Assemblée La production de pétrole (environ nationale et se plaint d’intimidations 120 000 barils par jour en moyenne régulières provenant des forces de en 2019) a diminué à cause du vieillissécurité. Le gouvernement a utilisé un sement des gisements. Mais l’État vise 2017 2018 2019* 2020* prétendu complot de coup d’État de 145000 b/j en 2020 grâce aux champs décembre 2017 pour sévir davantage des sociétés américaines Noble Energy et limiter l’accès aux réseaux sociaux et Kosmos Energy. et à internet. À la fin de 2019, un nouveau cycle d’attribution de licences Teodorín donne de lui une image négative à l’étranger en était en cours pour 27 blocs. Les contrats devraient être raison de son style de vie extravagant et de ses déboires judiannoncés au début de 2020. Aucun nouvel investissement ciaires. Les autorités suisses ont abandonné une enquête important n’a été annoncé depuis que le britannique Ophir sur lui pour blanchiment d’argent au début de 2019, mais Energy a perdu ses droits sur la plateforme flottante de gaz elles ont saisi et mis aux enchères certaines de ses voitures naturel liquéfié Fortuna – qui devait donner un coup de pour 29 millions de dollars, dont la majeure partie ira à des fouet au secteur du gaz –, en janvier 2019. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Agriculture et tourisme

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Fiches pays AFRIQUE CENTRALE

PRÍNCIPE

São Tomé-et-Príncipe Coudées franches

São Tomé

SÃO TOMÉET-PRÍNCIPE 5 km

SÃO TOMÉ

Face à une opposition divisée, le Premier ministre garde la confiance des députés.

L’économie tourne au ralenti.

Océan Atlantique

L’ADI déchirée

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* ESTIMATION OCTOBRE 2019

Cette réélection a eu lieu en l’absence du principal intéLe Premier ministre social-démocrate, Jorge Bom Jesus, ressé, dont certains proches craignent qu’il ne soit arrêté a rappelé à ses adversaires que la majorité parlemendès son retour à São Tomé-et-Príncipe. taire, bien que très courte, lui était toujours acquise.

De fait, l’ancien Premier ministre est notamment En juin 2019, le chef du gouvernement qui, à São Toméaccusé d’avoir dissimulé une dette colossale pour les et-Príncipe, détient l’essentiel du pouvoir exécutif, l’a finances du pays, chiffrée au début d’octobre à près de montré en obtenant le vote de confiance des députés.

70 millions de dollars par les autorités actuelles. Le FMI, Il devra prendre soin de ce socle parlementaire qui lui qui s’était déjà inquiété du surenest crucial pour gouverner : lors dettement de l’État, a mis en cause des législatives d’octobre 2018, le le précédent gouvernement. « La parti qu’il préside, le Mouvement Nombre d’habitants : 215 000 situation budgétaire s’est consipour la libération de São ToméPIB par habitant : 1 933 $ dérablement détériorée en 2018 », et-Príncipe–Parti social-démoEspérance de vie : 66,8 ans déplorait en octobre l’institution, crate (MLSTP-PSD), avait obtenu dénonçant, notamment, « des aug23 sièges, contre 25 pour la formaAlphabétisation : 90,1 % mentations non budgétisées des tion de centre droit qui dirigeait Inflation : 8,8 % dépenses [ayant] contribué à un jusqu’alors le pays, l’Action démoIndice de développement dépassement des dépenses d’envicratique indépendante (ADI). e humain (sur 189 pays) : 143 ron 3,5 % du PIB ».

Mais grâce à un habile jeu d’alInvestissements directs étrangers : Nul doute que le Premier ministre liances avec cinq autres députés, 17 millions de $ devra prendre des mesures drasla coalition menée par le MLSTPDernier changement tiques pour sortir de cette mauvaise PSD était devenue majoritaire et de président : 2016 passe. Une conjoncture d’autant réussissait son pari de l’alternance. plus délicate que la croissance Quelques semaines plus tard, Jorge Croissance du PIB (%) 3,8 ralentit. Elle devrait stagner à 2,7 % Bom Jesus était donc nommé 3,5 en 2019 selon le FMI. Pour assainir Premier ministre par le président de 2,7 2,6 ses finances, le gouvernement s’est la République, Evaristo Carvalho, par ailleurs engagé à améliorer ses élu en 2016 sous les couleurs de PIB (milliards de $) recettes fiscales en introduisant l’ADI. 0,46 une nouvelle taxe sur la valeur 0,43 0,42 0,37 ajoutée (TVA), qui pourrait entrer en vigueur en 2020.

Si la cohabitation n’est pas toujours Mais le social-démocrate Jorge cordiale entre les deux hommes, Bom Jesus devra aussi composer Jorge Bom Jesus a les coudées avec les fortes attentes de son élecfranches, tant le camp adverse ne torat, qui réclame de véritables cesse de se déchirer. Après les légisaméliorations, notamment en latives, l’ancien Premier ministre 2017 2018 2019* 2020* matière de santé, d’éducation et Patrice Trovoada avait quitté le pays d’assainissement. et suspendu ses fonctions au sein Autre grand défi : la pauvreté, qui de l’ADI. Son parti, déjà divisé, s’est frappe toujours durement les Santoméens, dont un tiers choisi en mai un nouveau leader en la personne d’Agosvit avec moins de 1,9 dollar par jour, selon de récentes tinho Fernandes – une élection contestée par plusieurs estimations de la Banque mondiale. Le Premier ministre, cadres du parti restés fidèles au fils de l’ancien président très attendu sur le front des urgences sociales, a d’ailleurs santoméen Miguel Trovoada. Signe des déchirures prorappelé aux membres de son équipe qu’il n’hésiterait pas fondes qui minent l’ADI, Patrice Trovoada a été réélu à la à remanier son gouvernement si l’équipe ne faisait pas fin de septembre par ses partisans à la tête de la formapreuve d’efficacité. tion, qui compte désormais deux directions antagonistes.

LIBYE

TCHAD NIGER

Tchad Stabilité menacée

Lac Tchad

N'Djamena

400 km

NIGERIA

SOUDAN

Moundou CAM.

CENTRAFRIQUE

Troubles au Soudan, attaques de Boko Haram, rébellion dans le Nord…

Difficile de préserver la paix.

Malgré une dette importante, l’économie reprend peu à peu de la vigueur. pouvoir en décembre 2020. Depuis l’instauration, en 2018, Bon an mal an, au cours d’une année 2019 périlleuse, d’une quatrième République, les détracteurs du chef de le Tchad est parvenu à maintenir sur son territoire une l’État dénoncent une restriction du cadre d’exercice des stabilité menacée de tous côtés. Le président, Idriss partis politiques et des associations. Manifestations contre Déby Itno, a suivi de très près les troubles chez son voil’austérité interdites, fermeture des réseaux sociaux pensin soudanais, jusqu’à la destitution, le 11 avril, d’Omar dant plus d’un an… Le pouvoir brandit l’argument sécuriel-Béchir. Le chef de l’État a également décidé de renfortaire et tente de contenir les mouvements de contestation. cer les troupes tchadiennes dans le Sud afin de consoliLe secteur sécuritaire absorbe der la frontière avec la Centrafrique, d’ailleurs une partie importante du où il a perdu en influence face à la budget de l’État (30 %), qui a revu à présence russe. Sur son front ouest, Nombre d’habitants : 15,9 millions la baisse ses dépenses publiques en N’Djamena poursuit sa lutte armée PIB par habitant : 861 $ 2016. Le Tchad se remet toutefois peu contre Boko Haram aux côtés des Espérance de vie : 53,2 ans à peu de la chute brutale des cours forces nigériennes, nigérianes et du pétrole et de la dette contractée camerounaises. Soutien du maréchal Alphabétisation : 22,3 % en 2014 auprès du géant du négoce Haftar en Libye, le Tchad doit enfin Inflation : 3 % suisse Glencore, qui étouffait le faire face à des mouvements rebelles Indice de développement Trésor public (elle sera entièrement dans le Nord. e humain (sur 189 pays) : 186 remboursée en 2026, prévoit le FMI) : Investissements directs étrangers : une croissance de 2,3 % était atten662 millions de $ due en 2019, contre – 2,4 % en 2017. « L’îlot » de stabilité tchadien, ferDernier changement L’année 2020 verra-t-elle par ailmement tenu par l’incontournable de président : 1990 leurs l’organisation d’élections légisIdriss Déby Itno, se maintient donc à latives, sans cesse repoussées depuis flot, en partie grâce au soutien de ses Croissance du PIB (%) 5,4 2015 ? Malgré les promesses de l’exéalliés. Face aux menaces extérieures, 2,2 2,4 cutif, qui justifie ces quatre années de le président peut aussi toujours – 2,3 retard par des raisons sécuritaires et compter sur le soutien indéfectible financières, le scrutin n’aura pas lieu de la France, qui n’a pas hésité à PIB (milliards de $) avant le premier trimestre de 2020, bombarder des colonnes rebelles de au mieux. l’Union des forces de la résistance 10,07 11,05 11,02 11,93 Convaincue que le vote ne se serait (UFR), basée en Libye, au début de pas déroulé dans de bonnes condil’année 2019. Le pouvoir central, déstions, l’opposition appelait en effet tabilisé par des conflits intercommuelle aussi à son report pour éviter de nautaires dans des provinces de l’Est « bâcler » ce rendez-vous électoral. et du Nord, est également soumis à Dans une arène politique dominée des menaces internes. En août, la viopar le MPS, l’année 2020 marqueralence de ces affrontements a poussé 2017 2018 2019* 2020* t-elle un renouvellement au sein le gouvernement à instaurer l’état de l’opposition ? Selon certains, ce d’urgence dans le Sila, le Ouaddaï et renouveau pourrait être incarné par le Tibesti. Le Parlement l’a prolongé le jeune Succès Masra, 36 ans, qui a démissionné de son jusqu’à la fin de l’année. poste d’économiste à la Banque africaine de développeÀ la fin de juin 2019, le chef de l’État opérait un remaniement (BAD) pour se lancer en politique. Son mouvement, ment ministériel et renforçait son équipe sécuritaire, en Les Transformateurs (il n’a pas reçu d’agrément pour se nommant notamment Mahamat Abali Salah à la Défense constituer en parti politique), rêverait de mener la refonet à la Sécurité publique. Ce dernier a été chargé de réfordation du Tchad. Et espère participer au prochain scrutin mer la Garde nationale et nomade. Réélu en avril 2016, le législatif. stratège Idriss Déby Itno entamera sa trentième année de * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Restrictions

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Fiches pays

ÉGYPTE

LIBYE

ARABIE SAOUDITE

Port-Soudan NIGER

SOUDAN

Kassala ÉRYTHRÉE Massawa Asmara

Khartoum

TCHAD

El-Obeid

NIGERIA

190 191 192 193 194 195 196 197 198 199 200

Burundi Djibouti Érythrée Éthiopie Kenya Ouganda Rwanda Somalie Soudan Soudan du Sud Tanzanie

Gondar

SOUDAN DU SUD

CENTRAFRIQUE

Golfe d’Aden Djibouti Berbera Dirédaoua Hargeisa Addis-Abeba Harar Djimma

ÉTHIOPIE SOMALIE

OUGANDA Kampala

CONGO RD CONGO

RWANDA Gitega

Lac Victoria Kigali

YÉMEN

DJIBOUTI

Djouba

CAMEROUN

GABON

Mer Rouge

Obbia

Mogadiscio

KENYA

Kisumu

Kismayou

Nairobi

Océan Indien Mombasa

BURUNDI TANZANIE

Dodoma

Zanzibar

300 km

Dar es-Salaam Mbeya

ANGOLA ZAMBIE

MOZAMBIQUE

Afriquedel’Est En quête d’équilibre ans les Grands Lacs, l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi en RD Congo a bouleversé la donne. Le Rwanda, dont les relations avec l’Ouganda et le Burundi ont continué de se détériorer, a engagé un rapprochement stratégique avec Kinshasa.

Les scrutins burundais de mai 2020 s’annoncent tendus. Bujumbura accuse régulièrement son voisin du nord d’être derrière les incursions armées qu’il subit.

Dans la Corne de l’Afrique, le vent d’espoir consécutif à l’arrivée au pouvoir d’Abiy Ahmed à Addis-Abeba a quelque peu faibli. La paix signée avec l’Érythrée en juillet 2018 n’a pas tenu ses promesses. Issayas Afeworki reste accroché au pouvoir à Asmara et la frontière avec l’Éthiopie a été refermée sans explications.

D

Lauréat du prix Nobel de la paix, Abiy Ahmed doit mettre en place des scrutins à haut risque en mai prochain, sur fond de tensions sociales et de conflits interethniques. Ils seront scrutés par les voisins, notamment la Somalie, qui a elle aussi amélioré ses relations avec Addis et tente d’organiser des élections en 2020.

La Tanzanie se prépare également à retourner aux urnes, et John Magufuli part largement favori. Quant au Kenya, s’il lui reste encore deux ans avant ses prochaines échéances électorales, il commence déjà à voir des prétendants émerger, tel le vice-président William Ruto. Le pays se dispute par ailleurs avec Djibouti un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.

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Fiches pays AFRIQUE DE L’EST Lac Kivu

RWANDA TANZANIE

Burundi Suspense présidentiel

RD CONGO

BURUNDI

Bujumbura

Gitega

Le doute persiste sur une potentielle candidature de Pierre Nkurunziza en 2020.

La conjoncture socio-économique reste morose.

100 km

Lac Tanganyika

mandat. La répression de la contestation qui avait accomPierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, tiendra-t-il pagné cette décision puis sa réélection avaient fait au moins sa promesse? Le chef de l’État a surpris en annonçant, en 1200 morts et 400000 déplacés entre avril 2015 et mai 2017, juin 2018, ne pas être candidat à un quatrième mandat, alors selon la Cour pénale internationale, qui a ouvert, à la fin de que les élections présidentielle, législatives et communales 2017, une enquête dont les investigations se poursuivent. se tiendront le 20 mai 2020. La loi l’y autorise pourtant : Depuis octobre 2019, près de 200 000 Burundais réfugiés depuis l’adoption, en mai 2018, de la très controversée nouen Tanzanie sont par ailleurs menacés d’expulsion par velle Constitution, le président peut en théorie garder les Dodoma, qui estime que la paix est rênes du pays jusqu’en 2034. revenue chez son voisin, malgré les Mais depuis cette annonce, le inquiétudes du Haut-Commissariat Conseil national pour la défense de Nombre d’habitants : 11,5 millions aux réfugiés des Nations unies. la démocratie-Forces de défense de PIB par habitant : 309 $ la démocratie (CNDD-FDD), parti au Espérance de vie : 57,9 ans pouvoir à qui revient le choix du candidat, n’avait encore adoubé aucun Sur le plan sanitaire, le pays est frappé Alphabétisation : 61,6 % dauphin du chef de l’État à l’heure où par une vaste épidémie de paludisme.

Inflation : 7,3 % nous écrivions ces lignes. « Je reste Plus de 5 millions de cas ont été enreIndice de développement dubitatif, car aucun congrès n’a eu lieu gistrés entre janvier et juillet (soit e humain (sur 189 pays) : 185 au sein du CNDD-FDD pour annoncer près de la moitié de la population), Investissements directs étrangers : un quelconque candidat, alors que les une hausse de 97 % par rapport à 1 million de $ élections approchent », constatait en la même période en 2018, s’inquiéDernier changement octobre Armel Niyongere, avocat et tait le Bureau de coordination des de président : 2005 figure de la société civile en exil. affaires humanitaires de l’ONU. À cela Face au tout-puissant CNDD s’ajoute une recrudescence du choCroissance 0,5 0,41 FDD, Agathon Rwasa a obtenu en léra : les autorités en ont enregistré du PIB (%) février 2019 que son nouveau parti, le 245 cas en juin dernier, surtout dans 0,14 0 Congrès national pour la liberté (CNL), la province de Bujumbura, désormais soit autorisé, à l’issue d’un long bras capitale économique du pays.

PIB (milliards de $) de fer avec les autorités. Cette reconLa crise politique affecte durement naissance officielle n’a pourtant rien le pays : en 2019, son PIB devrait len3,7 3,5 3,4 3,3 d’une sinécure: les intimidations et les tement croître de 0,4 %, selon le FMI, arrestations se sont multipliées à l’ennotamment grâce à l’augmentation contre des partisans de l’opposant, qui de la production et de l’exportation a clairement laissé entendre ses ambide thé et de café. Les finances du tions pour la prochaine présidentielle. pays dépendent grandement de l’aide « Des membres des Imbonerakure [la internationale, dont une part imporligue des jeunes du parti au pouvoir, tante demeure gelée en raison des 2017 2018 2019* 2020* que l’ONU a qualifiée de milice] ont sanctions de l’UE. arrêté et passé à tabac des dizaines Malgré ces signes de tensions et de membres du CNL », écrivait ainsi d’inquiétudes, Gitega peut se targuer l’organisation Human Rights Watch en juin 2019 dans un d’avoir renoué avec l’Hexagone. En juillet 2019, l’ancien rapport documentant les arrestations et les exactions parambassadeur français au Burundi dévoilait la « reprise profois meurtrières commises à l’encontre d’opposants, ou de gressive d’une coopération dans le domaine de la défense », Burundais perçus comme tels. datant d’octobre 2018, après la visite à Paris du ministre En parallèle, la conjoncture socio-économique n’a cessé des Affaires étrangères et ex-leader des Imbonerakure, de se dégrader depuis le début de la crise, née de la canEzéchiel Nibigira. Une décision décriée par les ONG, dont didature, en 2015, de Pierre Nkurunziza à un troisième bon nombre ont dénoncé la position ambiguë de Paris. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Paludisme et choléra

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YÉMEN

ÉRYTHRÉE

Djibouti Promesses en stand-by

ÉTHIOPIE

DJIBOUTI Golfe d’Aden

Djibouti

Les négociations avec l’Érythrée semblent au point mort.

Le pays entend devenir un hub portuaire pour toute la côte est-africaine.

SOMALIE 30 km

sentir en 2019 dans le port, plusieurs compagnies mariL’année 2018 avait vu naître de belles promesses pour times ayant préféré renoncer à leurs projets d’implantaDjibouti, que 2019 n’a pas confirmées, tout au moins sur tion sur ses quais après avoir été menacées de poursuites le plan extérieur. Dans le grand jeu diplomatique qui judiciaires par les Dubaïotes. DP World entend même bouleverse la donne dans la Corne de l’Afrique depuis lancer une « guerre des ports » à travers la sous-région, avril 2018 et le rapprochement entre l’Éthiopie et l’Éryen multipliant les projets à Berbera, au Somaliland, ainsi thrée, la situation n’évolue plus depuis de longs mois. La qu’à Assab et à Massawa, en Érythrée. poignée de main historique, survenue en septembre 2018 Bien décidé à conserver son entre Ismaïl Omar Guelleh (IOG), avance sur cette future concurle président djiboutien, et Issayas rence, Djibouti poursuit sa poliAfeworki, son homologue érythréen, Nombre d’habitants : 974 000 tique d’investissements ambitieux, est, jusqu’à ce jour, restée sans lenPIB par habitant : 2 936 $ destinés à faire de la République demain, et c’est tout le processus de Espérance de vie : 62,6 ans un hub portuaire incontournable normalisation des relations entre pour toute la côte est-africaine. les deux pays, opposés depuis 2008 Alphabétisation : NC La construction d’un second compour des questions frontalières, Inflation : 2,2 % plexe industrialo-portuaire – aux qui est aujourd’hui au point mort.

Indice de développement proportions identiques à celui qui Comme si le plus important pour e humain (sur 189 pays) : 172 fut inauguré en 2018 – vient de l’Érythrée avait été acquis à la fin Investissements directs étrangers : démarrer, grâce à un nouveau prêt de 2018, avec la levée des sanctions 265 millions de $ chinois de 600 millions de dollars. internationales qui pesaient sur le Dernier changement Le principal partenaire financier pays depuis dix ans. De quoi justifier de président : 1999 de Djibouti a été rassuré par la une nouvelle fois la méfiance d’IOG, baisse drastique du niveau d’enqui a pourtant plusieurs fois ouvert Croissance 6 6 dettement du pays, ramené à 71 % la porte des négociations ces derdu PIB (%) du PIB à la mi-2019, après avoir été niers mois. Sans suite côté érythréen 5,5 estimé à 104 % quelques mois plus pour l’instant.

5 tôt par les experts du FMI. Le pays a donc retrouvé une certaine capaPIB (milliards de $) cité financière, qui va permettre à Au point mort également, le diffé3,42 3,16 IOG d’accélérer le plan social grâce rend qui oppose l’autorité portuaire 2,92 2,76 auquel il s’était fait réélire en 2016. de Djibouti à l’opérateur émirati C’est déjà le cas dans le domaine DP World, chassé du terminal de du logement, avec plusieurs proDoraleh au début de 2018. En cause, grammes importants lancés ces une clause du contrat de concession derniers mois. Ce devrait l’être en signé en 2006 qui attribuait aux matière d’emploi, où beaucoup reste Dubaïotes un monopole de trente 2017 2018 2019* 2020* à faire. Djibouti a beau enregistrer ans sur l’ensemble du littoral djibouchaque année un taux de croistien, « au mépris de la souveraineté sance de son PIB proche de 7 %, le du pays », avance la direction du chômage, notamment chez les jeunes, ne descend pas port pour justifier sa décision. sous la barre des 60 %. Un véritable paradoxe, auquel le Conforté plusieurs fois par le tribunal d’arbitrage de chef de l’État a promis de s’attaquer d’ici à la fin de son Londres, DP World demande le respect du contrat signé, mandat. Surtout si le président, qui a fêté le 8 mai les quand les autorités djiboutiennes se disent prêtes, elles, vingt ans de son accession au pouvoir, compte se présenà payer pour y mettre un terme définitif. Un véritable diater à sa propre succession en 2021 – comme de nombreux logue de sourds s’est donc déployé au fil des mois, alors indices l’ont déjà suggéré ces derniers mois. que les premiers effets négatifs du conflit se sont fait * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Dialogue de sourds

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Fiches pays AFRIQUE DE L’EST SOUDAN

Mer Rouge

ARABIE SAOUDITE

ÉRYTHRÉE

YÉMEN

Asmara

Érythrée Deux pas en arrière

ÉTHIOPIE Assab

Des conflits frontaliers subsistent malgré le dégel des relations avec l’Éthiopie.

La dépendance à l’égard de l’économie chinoise devient préoccupante.

DJIBOUTI 200 km

ont fait quelques vagues en 2019, et le gouvernement va proAprès une année 2019 très calme, 2020 pourrait-elle s’avérer bablement poursuivre les arrestations arbitraires en réacplusmouvementéepourIssayasAfeworki?L’économieesten tion. L’opposition en exil, plus unifiée, est mieux organisée. difficulté et la population de plus en plus mécontente, certes, L’économie, elle, dépend largement de l’agriculture plumais le système reste bien en place. Les progrès qui avaient viale, de l’exploitation minière et des transferts de fonds. suivi l’accord de paix signé entre le président érythréen et Les pourparlers avec le FMI ont repris en juillet: l’institution le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, en juillet 2018 offre un soutien technique à Asmara, mais l’aide financière – rétablissement des relations commerciales et réouverture n’est pas à l’ordre du jour. de la frontière; levée de l’embargo sur Or la diaspora pourrait diminuer les armes décrété par l’ONU contre les montants des sommes qu’elle l’Érythrée – se sont essoufflés, voire Nombre d’habitants : 3,5 millions envoie au pays, qui dispose cependant ont été stoppés. Et surtout, les princiPIB par habitant : 342 $ d’autres sources de financement, dont paux territoires contestés restent sous Espérance de vie : 65,5 ans la BAD. Et de meilleures relations avec contrôle éthiopien. les pays voisins – comme le Soudan La frontière avec l’Éthiopie, ouverte Alphabétisation : 64,7 % ou, plus loin, les pays du Golfe – ont pour la première fois en deux décenInflation : – 27,6 % ouvert la voie à davantage d’investisnies, a été sommairement fermée au Indice de développement sements étrangers. début de 2019 sans explication offie humain (sur 189 pays) : 179 Les deux mines actuellement en cielle. Concurrence éthiopienne diffiInvestissements directs étrangers : exploitation dans le pays sont gérées cile pour les entreprises érythréennes 61 millions de $ par des groupes chinois qui emploient ou risque sécuritaire, étant donné le Dernier changement 15 330 personnes, soit environ 1,1 % différend avec le Front populaire de de président : 1993 de la population active. À la fin de libération du Tigré? Les suppositions 2018, Zijin Mining Group a acquis le varient. Néanmoins, les ressortissants Croissance du PIB (%) 12,1 gisement de cuivre et de zinc Bisha, érythréens continuent d’arriver en 3,1 3,8 jusqu’alors détenu par une société Éthiopie : plus de 60 000 s’y seraient – 9,6 canadienne. Un troisième site chinois, réfugiés depuis septembre 2018. situé près d’Asmara, devrait être mis PIB (milliards de $) en service en 2020. Une dépendance à l’égard de la croissance chinoise assez Rien n’indique que le gouvernement 2,19 2,11 1,91 2 préoccupante, car cette dernière pourva s’attaquer à la cause principale de rait ralentir en 2020. cet exode: le service national à durée Par ailleurs, l’australien Danakali indéterminée. Bien qu’une « étude cherche à lever des capitaux pour ait été menée pour [le] ramener à sa exploiter des gisements de potasse limite initiale [d’un an et demi] », les avec l’entreprise publique Eritrean autorités ont déclaré qu’il n’était pas National Mining Corporation. Deux encore possible d’en mettre en œuvre 2017 2018 2019* 2020* nouvelles mines, l’une détenue les résultats. par des Saoudiens, l’autre par des D’autres fruits de la paix se font Britanniques et des Érythréens, attendre. La Constitution de 1997 n’est devraient aussi étoffer le secteur dans les années à venir. toujours pas appliquée. Loin de relâcher son emprise, le Mais la mise en œuvre de l’accord de paix avec l’Éthiopie pouvoir semble accroître la répression. L’Église catholique a reste essentielle pour stimuler l’économie. Un programme été sa cible principale en 2019, ses écoles et ses hôpitaux ont de remise en état des routes financé par l’UE permettra de été fermés. Et la situation pourrait s’aggraver car Afeworki relier les ports érythréens à la frontière éthiopienne – si voit en l’institution une menace politique. l’Érythrée rouvre la frontière et donne accès à ses ports à Dans ce contexte, l’opposition, bien qu’encore majoritairel’Éthiopie enclavée. ment clandestine, est appelée à se renforcer. Les dissidents * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Arrestations arbitraires

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Mer Rouge

ÉRYTHRÉE

YÉMEN DJIBOUTI

Addis-Abeba

Éthiopie Élections sans compétition

SOUDAN DU SUD

Dirédaoua

Golfe d’Aden

SOMALIE

ÉTHIOPIE KENYA

300 km

Abiy Ahmed va pouvoir mesurer sa popularité lors des scrutins de mai 2020.

L’ouverture de l’économie à davantage de concurrence se prépare lentement. politique ethnique – sans toutefois détruire les fondations Les élections nationales de mai 2020 constitueront un grand du fédéralisme. Les tensions ethniques persisteront donc. test pour Abiy Ahmed. Le comité électoral est en retard, le Le gouvernement prétend avoir ramené chez elles les 3 milsystème biométrique également, et le recensement national lions de personnes qui avaient dû quitter leur foyer en 2018, n’aura sans doute pas lieu avant le scrutin. S’il n’y a pas eu mais les origines de la violence ne sont pas éradiquées. d’élections aussi imprévisibles depuis 2005, lorsque le Front Bien qu’encore rapide, la hausse du PIB n’atteindra pas les démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF, 10 % ou plus de la dernière décennie. L’insécurité restera un coalition au pouvoir dont Abiy Ahmed a entrepris la fusion frein à la croissance malgré la réducen un seul parti) n’avait pas obtenu tion des emprunts et le ralentissement la majorité à Addis-Abeba, elles n’en des dépenses publiques. Les investisseront pas pour autant entièrement Nombre d’habitants : 112,1 millions sements directs étrangers ne dépaslibres. Les groupes d’opposition des PIB par habitant : 953 $ seront sans doute pas les 3,5 milliards régions Amhara et Oromo se plaignent Espérance de vie : 65,9 ans de dollars reçus l’an dernier, les invesde harcèlement et d’arrestations arbitisseurs attendant la fin des élections. traires. Dans le fief du tout-puissant Alphabétisation : 39 % Front populaire de libération du Tigré Inflation : 14,6 % (FPLT, membre de la coalition au pouIndice de développement voir), l’opposition fera sans doute peu En septembre 2019, Addis-Abeba a humain (sur 189 pays) : 173e de progrès. dévoilé un programme décennal d’enInvestissements directs étrangers : L’instabilité règne toujours dans viron 10 milliards de dollars qui vise 3,3 milliards de $ plusieurs régions. En juin, le Premier à faire de l’Éthiopie un pays à revenu Dernier changement ministre a dû affronter une « tentative intermédiaire d’ici à 2030. Une stratéde président : 2018 de coup d’État » à Bahir Dar, la capitale gie qui présente plusieurs similitudes de l’Amhara, et l’assassinat du chef des avec les solutions préconisées par les Croissance du PIB (%) 10,1 armées fédérales à Addis-Abeba. La institutions de Bretton Woods : pru7,7 zone Sidama a voté massivement en 7,4 dence budgétaire, privatisation d’en7,1 novembre en faveur de la création d’un treprises d’État, assouplissement de dixième État. Le Front de libération la réglementation, etc. Les réformes PIB (milliards de $) oromo (OLF) et le Congrès fédéraliste les plus attendues concernent les oromo (OFC) ont fait alliance et se tientélécommunications, qui restent un 103,6 91,1 80,2 75,7 dront à l’écart dans certaines circonsmonopole d’État. Le gouvernement criptions afin de réduire les risques délivrera deux licences à des multide dérapage. Mais il est peu probable nationales de téléphonie mobile, ce que le Mouvement national amhara qui pourrait rapporter près de 10 mil(Nama, opposition), beaucoup plus liards de dollars. Il offrira également populaire dans sa région que le parti une participation minoritaire dans au pouvoir, conclue un pacte avec ce Ethio Telecom. La finance ne s’ouvrira 2017 2018 2019* 2020* dernier étant donné que nombre de pas à la concurrence étrangère dans ses membres ont été arrêtés à la suite l’immédiat et de nouvelles banques de la tentative de coup d’État. Quel que locales apparaîtront sur le marché. En soit le résultat global, Abiy restera probablement Premier outre, la privatisation partielle d’Ethiopian Airlines risque ministre, notamment grâce au système électoral. de tarder.

Les appels à réformer le fédéralisme ethnique seront proPoints positifs, au moins trois nouveaux parcs industriels bablement ignorés, surtout si les partis d’opposition ethnodevraient entrer en activité, portant leur total à douze. Une nationalistes font des gains substantiels aux élections. En deuxième ligne de chemin de fer, d’Awash à Kombolcha, cas de réforme constitutionnelle, Abiy tentera de mettre démarrera dès qu’elle sera alimentée en électricité. Et le en place une présidence exécutive pour réduire le pouvoir barrage de la Renaissance entrera enfin en production. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Prudence et privatisation

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Fiches pays AFRIQUE DE L’EST SOUDAN DU SUD

ÉTHIOPIE

OUGANDA

K E N YA

Lac Victoria

Kenya Le legs de Kenyatta

SOMALIE

Kisumu Nairobi Mombasa

Le président accélère les réformes en matière de santé et de finances publiques.

L’avenir de Kenya Airways et de Safaricom va se jouer en 2020.

Océan Indien

TANZANIE 200 km

gouvernement entend par ailleurs nationaliser progressiEntré dans la seconde moitié de son dernier mandat, Uhuru vement la compagnie Kenya Airways, mais le rachat des Kenyatta s’efforce de stabiliser les finances publiques, de lutactionnaires minoritaires sera coûteux. ter contre la corruption et d’apaiser une rébellion croissante Or le gouvernement a beaucoup à faire. Après un grand au sein de son propre parti. Pendant ce temps, la course nettoyage visant à réduire la corruption et le gaspillage pour lui succéder en 2022 s’accélère, notamment entre le public, Henry Rotich a perdu son poste de secrétaire de vice-président William Ruto et l’ancien Premier ministre cabinet du Trésor. En 2020, Kenyatta tentera probablement Raila Odinga. de convaincre le Parlement de suppriEn août 2019, le pays a pour la premer le plafond des taux d’intérêt sur mière fois exporté du pétrole extrait de les prêts bancaires. Et la pression pour la région du Turkana. La compagnie Nombre d’habitants : 52,6 millions libéraliser le crédit au secteur privé va britannique Tullow Oil estime que PIB par habitant : 1 997 $ s’accroître. l’or noir pourrait devenir la deuxième Espérance de vie : 67,3 ans plus grande source de devises du pays, après le tourisme. Mais la viabilité Alphabétisation : 78,7 % commerciale est loin d’être atteinte.

Le gouvernement a alloué 450,9 milInflation : 5,6 % Les travaux sur l’oléoduc Lokicharliards de shillings (près de 4 milliards Indice de développement Lamu n’ont pas encore commencé, d’euros) de son budget 2019-2020 au e humain (sur 189 pays) : 142 et les exportations commerciales ne plan de développement de Kenyatta, Investissements directs étrangers : démarreront pas avant 2024. surnommé le Big Four Agenda. La plus 1,6 milliard de $ Or la pression pour trouver de nougrande partie de ces fonds ira au proDernier changement velles sources de revenus s’intensifie. gramme de couverture maladie unide président : 2013 L’organisation d’un référendum et des verselle. Le domaine du logement, lui, élections de 2022, notamment, coûprésentera plus de difficultés, car le Croissance du PIB (%) 6,3 tera cher. Alors que le pays continuera marché immobilier décline. Troisième 6 5,5 4,8 vraisemblablement d’emprunter pour pilier du Big Four, le secteur manufaccombler ses déficits budgétaires, il turier continuera très probablement sera très probablement difficile de de souffrir en 2020.

PIB (milliards de $) vendre davantage de dette publique, Comme l’Éthiopie, le Kenya réforme car des projets d’infrastructure antéle secteur du textile, mais il n’a pas mis 109,1 98,6 87,9 78,6 rieurs, tel le nouveau chemin de fer, en place suffisamment d’incitations n’ont pas eu les résultats attendus. Le pour réduire les coûts énergétiques et refus chinois de financer la troisième ceux de main-d’œuvre. En outre, les phase de la ligne Naivasha-Malaba a efforts déployés pour stimuler le secconduit le pouvoir à se rabattre sur un teur privé en réglant ses arriérés n’ont plan de modernisation de l’ancienne pas eu d’effet positif sur la croissance. voie ferrée.

Même avant la réélection d’Ahmed 2017 2018 2019* 2020* D’autres projets pourraient avanMadobe, l’allié du Kenya, en août, à la cer en 2020 : la voie express Nairobitête du Jubaland, région somalienne Mombasa, au coût de 3 milliards de autonome, les relations diplomatiques dollars porté par les États-Unis; l’autoroute Jomo Kenyatta avec la Somalie étaient à leur plus bas niveau depuis des International Airport-James Gichuru, financée par la Chine; décennies. L’un des principaux points de discorde porte sur un tunnel d’alimentation en eau à destination de la capitale. la démarcation de la frontière maritime et le désir croissant Safaricom, détenue en partie par Vodacom et l’État, vivra de Mogadiscio d’avoir son mot à dire dans toutes les régions une transition délicate en 2020 sous la direction d’un PDG de Somalie, en particulier celles où le Kenya a une présence par intérim, Michael Joseph. En outre, Airtel et Telkom finamilitaire et des intérêts politiques. Les deux pays se sont lisent une fusion qui va créer un concurrent redoutable. Le engagés dans un accord diplomatique à la fin de 2019. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Couverture maladie

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SOUDAN DU SUD Gulu

OUGANDA

100 km

Ouganda Bobi vs Museveni

RD CONGO

Kampala Mbarara

Jinja

KENYA

Lac Victoria

RWANDA

L’élection présidentielle de 2021 s’annonce mouvementée.

Le lancement de la production pétrolière a de nouveau été retardé, au grand dam des investisseurs.

TANZANIE

pouvoir considère l’industrie laitière comme une imporL’Ouganda va entrer dans une campagne présidentante source potentielle de devises étrangères. Elle s’est tielle mouvementée en vue de l’élection de 2021. Yoweri fixé pour objectif de produire 3,3 milliards de litres de lait Museveni, au pouvoir depuis près de trente-quatre ans, en 2020, mais n’en avait récolté que 1,6 milliard en 2016. va sillonner le pays pour obtenir un sixième mandat de Des entreprises comme Brookside – propriété de la famille cinq ans dans un contexte compliqué: la pauvreté ne cesse du président kényan Uhuru Kenyatta – ont augmenté leur d’augmenter et le chômage des jeunes est très important. capacité de transformation et collaborent avec les agriculOutre la dette publique de 42 % du PIB (la Communauté teurs pour accroître leurs rendements. de l’Afrique de l’Est recommande un Mais le FMI craint que Kampala n’en plafond à 50 %), le retard pris dans la fasse pas assez pour absorber sa croisrelance de l’industrie du pétrole, la Nombre d’habitants : 44,3 millions sance démographique, qui est l’une seule à même d’améliorer la situation, PIB par habitant : 770 $ des plus fortes du continent: plus de lasse les investisseurs. Malgré tout, le Espérance de vie : 60,2 ans 600 000 nouveaux emplois seront gouvernement a lancé un nouveau nécessaires. Le gouvernement restera cycle d’octroi de licences et prévoit Alphabétisation : 70,2 % concentré sur les infrastructures telles d’accorder cinq nouveaux permis d’exInflation : 3,2 % que les routes, qui devraient continuer ploration avant la fin de 2020.

Indice de développement à bénéficier de la part du lion dans le La situation sécuritaire est aussi e humain (sur 189 pays) : 162 budget national. surveillée de près. Tout en déclarant Investissements directs étrangers : un taux de criminalité en baisse de 1,3 milliard de $ 5,2 % en 2018, la police précise qu’« il y Dernier changement a eu une augmentation des homicides, Pour stimuler le tourisme, les autorités de président : 1986 des crimes sexuels, des introductions ont relancé Uganda Airlines avec un par effraction, des vols qualifiés, des premier vol vers Nairobi. Mais la comCroissance du PIB (%) crimes politiques et médiatiques et pagnie aura du mal à concurrencer 6,2 6,1 6,1 des affaires de drogue ». Ce qui pourEthiopian Airlines, Kenya Airways et 5 rait freiner le tourisme, la principale RwandAir, qui ont beaucoup d’avance. source de devises étrangères du pays, La mise en service du barrage PIB (milliards de $) avec 1,4 milliard de dollars en 2018. hydroélectrique de 600 MW de 33,9 En réponse, Museveni souhaite que la Karuma, le plus grand du pays, portera 30,6 26,4 28,1 peine de mort soit appliquée dans les la capacité nationale à 1700 MW. Mais affaires de meurtre. L’opposition, elle, selon le principal distributeur d’élecpointe les défaillances du pouvoir. tricité du pays, Umeme, il faudrait Depuis un an et demi, l’artiste investir au moins 120 millions de dolRobert Kyagulani Ssentamu, alias lars sur dix ans pour donner au réseau Bobi Wine, a pris d’assaut la scène polila capacité d’acheminer l’électricité tique. Il n’a pas encore précisé s’il se jusqu’aux consommateurs.

2017 2018 2019* 2020* présenterait en indépendant à la préL’Ouganda poursuit son propre prosidentielle ou s’il créerait son propre jet de chemin de fer – qui devrait être parti. Ses ambitions pourraient touconstruit par des sociétés chinoises – tefois, en divisant l’opposition, faire le jeu du Mouvement pour relier la ligne kényane, qui doit elle-même être prolonde résistance nationale (NRM, au pouvoir). Et le principal gée jusqu’à la frontière ougandaise. Mais les prêteurs chinois adversaire de Museveni lors des quatre dernières élections, n’ont pas encore approuvé son financement.

Kizza Besigye, pourrait en faire les frais.

Les relations avec le Rwanda restent tendues. Les deux Pour convaincre, le NRM va souligner les récents dévepays s’accusent d’espionnage et de soutien à des groupes loppements économiques. La croissance est stimulée par armés, ce qui a entraîné la fermeture temporaire de la fronle secteur des services et par un rebond de l’agriculture. Le tière et affaibli leurs échanges commerciaux. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Tensions avec le Rwanda

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195

Fiches pays AFRIQUE DE L’EST OUGANDA

TANZANIE

50 km

Rwanda Diplomatie pragmatique

Lac Kivu

R WA N D A Kigali

RD CONGO

En froid avec ses voisins ougandais et burundais, Kigali se rapproche de la RD Congo.

L’économie reste florissante malgré une légère altération du climat des affaires.

BURUNDI

Coopération sécuritaire

196

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* ESTIMATION OCTOBRE 2019

mandat de Joseph Kabila, s’est considérablement accrue.

Après une année 2018 marquée par la présidence rwandaise de l’Union africaine (UA) – dont Paul Kagame a passé Les contours de cette coopération ne sont pas clairement les rênes en février à son homologue égyptien Abdel Fattah connus, mais le pays des Mille Collines semble déterminé à renforcer ses liens avec la RD Congo et sa lutte contre des al-Sissi – et la conquête de l’Organisation internationale mouvements tels que le Front démocratique de libération de la francophonie (OIF), où Louise Mushikiwabo a pris du Rwanda (FDLR) et le Congrès national rwandais (RNC). ses quartiers en janvier, l’offensive diplomatique rwanDiplomatiquement parlant, l’année 2020 sera également daise s’est recentrée sur la région. Depuis le 1er février, Paul marquée du côté du Rwanda par le Kagame occupe la présidence toursommet du Commonwealth, que nante d’une Communauté des États Kigali organise en juin. En cette année de l’Afrique de l’Est (EAC) minée par Nombre d’habitants : 12,6 millions de 25e commémoration du génocide les crispations. Son mandat, qui court PIB par habitant : 824 $ jusqu’en 2020, intervient alors que le des Tutsis, le Rwanda a aussi poursuivi Espérance de vie : 67,5 ans pays est à couteaux tirés avec deux de son rapprochement avec la France. ses voisins, le Burundi et l’Ouganda.

Invité aux cérémonies du 7 avril 2019, Alphabétisation : 68,3 % Kigali et Kampala s’attaquent Emmanuel Macron s’est finalement Inflation : 3,5 % mutuellement depuis plusieurs mois. fait représenter par le député Hervé Indice de développement Soupçons d’espionnage, arrestations Berville. Le président français a néane humain (sur 189 pays) : 158 et détentions arbitraires de Rwandais moins mis en place une commission Investissements directs étrangers : en Ouganda, suspicion de soutien à d’historiens chargée de faire la lumière 398 millions de $ des mouvements rebelles hostiles à sur le rôle de l’Hexagone entre 1990 et Dernier changement Kigali… La tension n’a cessé de mon1994. Un rapport doit être rendu en de président : 2000 ter, notamment avec la fermeture 2021, mais une note intermédiaire d’un poste-frontière côté rwandais en devrait être présentée en avril 2020.

Croissance du PIB (%) mars 2019. Une médiation entreprise L’Élysée a aussi promis d’augmen8,6 8,1 7,8 par l’Angola et la RD Congo a permis ter les moyens du pôle crimes contre 6,1 d’aboutir à la signature, le 21 août, l’humanité pour traiter les nombreux d’un mémorandum d’entente entre dossiers liés au génocide instruits en PIB (milliards de $) le Rwanda et l’Ouganda. L’année à France. À ce titre, le Rwanda continue venir permettra d’en évaluer l’efficade plaider pour une plus grande coo11 10,2 9,51 9,14 cité. Avec le Burundi en revanche, la pération entre États dans la traque des situation promet d’être compliquée génocidaires en fuite. par l’organisation en mai 2020 d’une Peu de changement en politique présidentielle à haut risque après les intérieure. Les élections sénatoriales, violences de 2015. en septembre, n’ont pas modifié un rapport de forces favorable au Front patriotique rwandais (FPR, au pou2017 2018 2019* 2020* voir). Certaines personnalités, comme Les relations avec le voisin congolais Victoire Ingabire, continuent de réclase sont, elles, considérablement amémer une plus grande ouverture. liorées depuis l’arrivée au pouvoir de Sur le plan économique, le Rwanda poursuit sur sa lanFélix Tshisekedi, en janvier. Persona non grata à Kinshasa cée avec une croissance estimée par le FMI à 7,8 % en 2019. lorsqu’il devait conduire une mission de l’UA destinée à faire Mais le pays est descendu à la 38e place du classement la lumière sur une présidentielle contestée, Paul Kagame est arrivé sous les applaudissements au stade des Martyrs « Doing Business » de la Banque mondiale la même année. de Kinshasa à la fin de mai pour les obsèques de l’opposant Le Financial Times avait supposé une manipulation des historique, Étienne Tshisekedi. Autre signe que les temps chiffres rwandais de la pauvreté, créant la polémique. Une changent: la coopération sécuritaire, renforcée à la fin du enquête dont les autorités nient en bloc les conclusions.

DJIBOUTI Hargeisa

ÉTHIOPIE

Somalie Branle-bas de combat

SOMALIE

Océan Indien

Mogadiscio

KENYA

Malgré un bilan peu convaincant, « Farmajo » devrait se présenter en 2020.

Le pays fait face à une triple crise, politique, sécuritaire et humanitaire.

200 km

En septembre, plus de 2 millions de Somaliens souffraient La Somalie est censée élire un nouveau président en 2020, de famine, selon les Nations unies. Un scénario similaire est mais pas au suffrage universel, même si les autorités réfléattendu en 2020 en raison de la persistance de la sécheresse chissent à une réforme. L’insécurité, le manque d’infraet de crainte d’un sous-financement des agences de l’ONU. structures et l’absence de volonté politique rendent un tel Par ailleurs, les rebelles Shebab représentent toujours mode de scrutin impossible. Le chef de l’État sera choisi par une menace régionale sérieuse malgré la densité redoublée les membres du Parlement, eux-mêmes nommés par les des frappes aériennes américaines. En janvier, les insuranciens de leur clan – ce qui nécessitera un soutien imporgés ont tué vingt et une personnes à tant des donateurs du Golfe.

Nairobi. À la fin de juillet, ils ont attaMohamed Abdullahi Mohamed qué Mogadiscio, entraînant la mort de « Farmajo » va se présenter, mais la traNombre d’habitants : 15,4 millions son maire. Plus tôt, les milices Shebab jectoire mouvementée du pays depuis PIB par habitant : NC avaient commis un attentat à Kismayo, la guerre civile n’a jamais favorisé de Espérance de vie : NC dans le Jubaland, à la veille des élecprésident sortant. Vu l’insatisfaction tions régionales de la fin d’août, faigénérale à l’égard de son bilan, une Alphabétisation : NC sant 26 morts. Leurs attaques se sont année difficile l’attend. À son entrée Inflation : NC poursuivies dans la région frontalière en fonction, en 2017, des réformes Indice de développement du Kenya et à travers la Somalie, et se radicales et une sévère répression humain (sur 189 pays) : NC multiplieront probablement à mesure de la corruption étaient attendues.

Investissements directs étrangers : que les politiciens se concentreront sur Mais la centralisation du pouvoir à 409 millions de $ les élections.

Mogadiscio et les ingérences répéDernier changement tées du gouvernement dans les États de président : 2017 membres fédéraux (FMS) ont miné la sécurité régionale et sapé les procesBien qu’elle ait affirmé vouloir quitCroissance du PIB (%) 3,2 2,9 sus politiques. Farmajo n’a pas tenu la ter le pays en 2020, la mission de l’UA 2,8 plupart de ses promesses, en particuen Somalie (Amisom) ne semble pas 1,3 lier celle d’améliorer l’économie et la prête. Elle n’a pas réduit significativesécurité dans un pays perçu comme ment son nombre de soldats. Et si son PIB (milliards de $) l’un des plus dangereux au monde. chef, Francisco Madeira, promeut un Unepoignéedepoliticiensvadépen« plan de transition » qui prévoit que 5,21 4,95 4,72 4,5 ser sans compter pour prendre en 2020 les forces locales assureront la sécula tête d’une nation qui reste au bas du rité du pays d’ici à 2021, l’armée natioclassement de l’ONU évaluant le sysnale n’est pas encore prête à porter ce tème de santé, l’économie et le dévefardeau. loppement. Les ex-présidents Hassan Du coup, les investissements interCheikh Mohamoud et Charif Cheikh nationaux sont limités. La Banque Ahmed sont ainsi rentrés au pays dans mondiale a encouragé les réformes 2017 2018 2019* 2020* la perspective de l’élection. financières et la limitation des impôts, Le Premier ministre Hassan Ali mais la croissance reste faible. Et si les Khaire, considéré comme un contrerecettes augmentent, la principale poids à la présidence, voire comme une menace, pourrait brisource de revenus est encore la diaspora, qui transfère enviguer la magistrature suprême, mais il devra composer avec ron 1 milliard de dollars par an. les jeux politiques de clans. Certes, il a de bonnes relations Les efforts pour alléger la dette extérieure, de 5,1 milliards avec la communauté internationale et a réussi à survivre à un de dollars, se sont intensifiés, mais la Banque mondiale et mandat entier, mais cela n’est pas gage de succès en Somalie. le FMI sont encore loin d’autoriser tout emprunt. Principale Le pays oscille toujours entre crises politique, sécuritaire et action du gouvernement à ce jour, cet allègement constituera humanitaire. La sécheresse sévit encore dans les campagnes. une priorité essentielle en 2020. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Indispensable diaspora

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Fiches pays AFRIQUE DE L’EST 400 km

ÉGYPTE

LIBYE

Soudan L’envers de la transition

Khartoum

ARABIE SAOUD.

e ug Ro

TCHAD

r Me

Port-Soudan

ÉRYTHRÉE

SOUDAN ÉTHIOPIE CENTRAF.

SOUDAN DU SUD

L’organisation d’élections en 2022 s’annonce particulièrement compliquée.

La faiblesse des revenus et le niveau élevé de la dette augurent de graves difficultés économiques. général Abdel Fattah al-Burhan et Hemedti sont accusés Le gouvernement de transition du Premier ministre, Abdallah d’avoir commis des crimes au Darfour. Afin d’éviter toute Hamdok, aborde 2020 avec une longue liste de défis majeurs perturbation du plan de transition, Hemedti bénéficie d’un à relever pour organiser des élections en 2022. La période qui accord d’immunité. a suivi la chute d’Omar el-Béchir a été tendue, les chefs miliAprès des années de mauvaise gestion, les finances sont taires craignant de perdre influence et privilèges. La coalition dans le rouge. Le FMI prévoit une croissance au mieux atone d’opposition au pouvoir, les Forces de la liberté et du chanjusqu’en 2024 au moins, avec une inflation à deux chiffres. gement (FLC), a joué un rôle moteur dans les manifestations qui ont fait tomber l’ancien président.

Son programme est vaste : mettre fin aux conflits civils, stabiliser La nouvelle administration n’a pas Nombre d’habitants : 42,8 millions l’économie en difficulté, réformer la accès aux crédits et aux prêts du FMI PIB par habitant : 714 $ Constitution et établir un système et de la Banque mondiale en raison Espérance de vie : 64,7 ans judiciaire équitable et indépendes arriérés de Khartoum. Hamdok dant notamment. L’administration et le ministre des Finances, Ibrahim Alphabétisation : 53,5 % Hamdok cherche à mettre un terme à al-Badawi, ne sont toutefois pas de Inflation : 50,4 % la lutte armée au Darfour et a fait des grands adeptes des politiques d’ajusIndice de développement concessions afin de lancer des discustement structurel qu’apprécie le FMI. e humain (sur 189 pays) : 167 sions avec le chef rebelle Abdel Wahid La dette totale du gouvernement est Investissements directs étrangers : al-Nour. L’une des principales revendiestimée à 62 milliards de dollars, et un 1,1 milliard de $ cations de ce dernier est la dissolution allégement de la dette internationale Dernier changement des Forces de soutien rapide (RSF), est à l’ordre du jour. Le gouvernement de président : 2019 dirigées par le général Mohamad espère voir des progrès en ce domaine Hamdan Daglo « Hemedti », qui siège en 2020. En attendant, il dépend larCroissance du PIB (%) 1,6 au Conseil de souveraineté du gouvergement des dons des pays amis pour nement. Les militaires craignent que financer son budget national et a l’in– 1,5 – 2,2 leur budget – qui représente une part – 2,6 tention de réformer les subventions énorme de celui de la nation – ne soit pour le carburant et le pain.

PIB (milliards de $) réduit si la paix revient dans le pays.

Hamdok et Badawi se concentrent 45,9 Les pourparlers avec Abdel Aziz sur le secteur agricole. Comme il a 33,6 34,2 30,8 al-Hilu, chef du Mouvement popuété convenu en 2015, ils veulent que laire de libération du Soudan-Nord l’Arabie saoudite développe 1 million implanté dans les monts Nuba, ont d’acres de terres dans l’est du Soudan. progressé. Toujours sur le front de De même, le pouvoir cherchera à s’asla sécurité, les autorités ont négocié surer que les pays du Golfe respectent le retrait progressif des troupes souleurs promesses d’investissement de danaises des combats soutenus par les 8 milliards de dollars.

2017 2018 2019* 2020* Saoudiens au Yémen. Le pouvoir veut Une grande partie du pétrole souégalement améliorer les liens avec danais étant allée au Soudan du le Soudan du Sud, grâce à un nouvel Sud lors de sa sécession en 2011, accord sur le transit du pétrole et à des discussions sur le l’extraction d’or demeure une source cruciale de devises contrôle d’Abyei dès que Djouba aura un nouveau gouverétrangères. Le pays en a produit 93 tonnes en 2018, contre nement. Khartoum a cessé de soutenir le chef rebelle Riek 107 en 2017, mais une grande quantité provient de sources Machar, qui doit devenir le vice-président du Soudan du Sud artisanales et finit par passer la frontière en contrebande. dans un gouvernement de transition.

L’Égypte va donner un coup de pouce au Soudan en mettant Les États-Unis n’ont pas dit quand ils pourraient retirer à sa disposition, au premier trimestre de 2020, une capacité le Soudan de leur liste d’États soutenant le terrorisme. Le installée d’électricité équivalente à 300 MW. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Pain et carburant

198

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TCHAD

SOUDAN

CENTRAFRIQUE

Soudan du Sud Pas d’union à l’horizon

SOUDAN DU SUD

ÉTHIOPIE

Djouba

RD CONGO

L’accord de paix achoppe encore sur plusieurs points.

Un redressement économique s’esquisse avec la diminution des combats.

200 km

OUGANDA

KENYA

d’avant conflit de 350 000 b/j d’ici à la mi-2020. Le gouLe président Salva Kiir et son ancien adjoint devenu chef vernement veut attirer davantage d’investissements dans rebelle, Riek Machar, étant toujours au centre d’une crise le raffinage et le transport d’hydrocarbures et lancera un politique, l’avenir du pays reste incertain. L’accord de paix cycle d’appels d’offres pour les blocs au cours de l’année signé le 12 septembre 2018 a perdu de son élan, mais la à venir. révolution chez le voisin soudanais – qui avait joué un L’équipe de Salva Kiir s’est engagée à financer un rôle de pacificateur entre les factions du Soudan du Sud – programme de construction de routes avec une partie pourrait l’aider. La formation d’un gouvernement d’unité, de l’or noir. Avec un objectif global prévue pour le 12 novembre, a cepende 17 000 km, le gouvernement a dant échoué. signé un accord initial de 700 milRiek Machar s’est brièvement Nombre d’habitants : 11,1 millions lions de dollars pour la construcrendu à Djouba en septembre, mais PIB par habitant : 275 $ tion de 392 km d’axe entre Djouba et il n’est pas encore revenu pour régler Espérance de vie : 57,3 ans Rumbek (Centre). Le gouvernement les problèmes qui subsistent dans livrera à la China Export-Import l’accord de paix, qui achoppe sur Alphabétisation : 26,8 % Bank 30 000 b/j pour le chantier, qui plusieurs points. Le premier est le Inflation : 24,5 % sera réalisé par Shandong Hi-Speed nombre d’États que devrait compter Indice de développement Co Ltd. Malgré les efforts du pouvoir le pays : le gouvernement en propose e humain (sur 189 pays) : 187 pour attirer des investisseurs, la plu32 et l’opposition 10 ou 21, au plus.

Investissements directs étrangers : part attendent que la situation sécuUn autre problème tient à la sécurité, 191 millions de $ ritaire et politique s’améliore. notamment l’unification des forces Dernier changement rebelles et gouvernementales pour de président : 2011 défendre le pays au cours des trois années de transition.

L’inflation devrait rester très inféCroissance du PIB (%) 8,2 7,9 L’embargo sur les armes décrété rieure à son plus haut pic de 2016 par l’ONU est en vigueur au moins (400 %) et pourrait tomber à 25 % – 1,1 – 5,4 jusqu’en mai 2020 en raison de l’aben 2020, selon le gouvernement, qui sence de progrès en matière de paix. mise sur le maintien de l’accord de Les poches d’insécurité dans le sud paix et l’arrivée d’investissements PIB (milliards de $) et le nord du pays sont appelées à dans le pays. Les prix se stabilisent 4,5 perdurer. Elles abritent des groupes à mesure que s’ouvrent les routes 3,6 3,4 3,3 rebelles ayant refusé de participer commerciales. Avec seulement à l’accord de 2018, parmi lesquels 300 000 réfugiés de retour, le secteur ceux d’hommes qui s’affichaient agricole est loin d’être à son niveau aux côtés de Salva Kiir pendant la d’avant la crise. Environ 2,3 millions crise : son ancien chef d’état-made Sud-Soudanais, dont beaucoup jor Paul Malong et son ancien chef d’agriculteurs, vivent encore dans 2017 2018 2019* 2020* d’état-major adjoint Thomas Cirillo. les pays voisins.

Ils reprochent à l’accord, notamment, L’insécurité alimentaire persisde ne pas s’attaquer à la corruption ni tante, qui a touché plus de la moitié au népotisme et de ne pas engager de réforme agraire. de la population en 2019, risque de persister.

Malgré l’impasse politique, l’économie commence à Sur le front de l’intégration régionale, la Communauté rebondir grâce à la diminution des combats. Bon nombre de l’Afrique de l’Est (EAC) doit se prononcer sur le stade gisements de pétrole fermés au début de la crise de la tut du Soudan du Sud courant 2020 et décider d’évefin de 2013 ont redémarré, faisant passer la production de tuelles sanctions voire d’une suspension du pays. Djouba 130000 barils par jour (b/j) pendant la guerre à 180 000 b/j cherche par ailleurs à exporter son pétrole pour réduire à la fin de 2019. Selon les autorités, elle atteindra le niveau sa dépendance à l’égard du Soudan. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Insécurité alimentaire

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Fiches pays AFRIQUE DE L’EST RD CONGO RWANDA

Tanzanie Zanzibar prendra-t-il le large ?

L’opposition risque de faire pâle figure face à Magufuli en 2020.

Le nationalisme économique inquiète les investisseurs internationaux.

BURUNDI

OUGANDA Lac Victoria

KENYA Arusha Océan Indien

Dodoma

TANZANIE

400 km

ZAMB. MAL.

Dar es-Salaam

MOZAMBIQUE

En raison de son passé communiste et de l’appétit chinois Le président entame une année d’élections générales avec pour les ressources minérales, la Tanzanie pourrait envisaconfiance. Après avoir écrasé la dissidence et surpassé ses ger un accord de libre-échange avec le géant asiatique. Un rivaux potentiels au sein du Chama Cha Mapinduzi (CCM, partenariat économique avec l’Europe reste en revanche au pouvoir), John Magufuli s’en est garanti le soutien quasi suspendu, l’EAC ne parvenant pas à parler d’une même unanime pour un second mandat. En outre, le principal voix. Cela complique les relations de la Tanzanie avec le parti d’opposition, le Chama Cha Demokrasia na Maendeleo Kenya, qui pousse la communauté à conclure un accord.

(Chadema), est en plein désarroi depuis qu’Edward Lowassa Résultat, une guerre commerciale suba rejoint le camp du chef de l’État et tile entre les deux pays perdure. que son leader, Freeman Mbowe, a Ces querelles et la faiblesse des été emprisonné pour outrage. Seul le Nombre d’habitants : 58 millions échanges commerciaux avec l’Ouretour de Tundu Lissu, qui se remet PIB par habitant : 1 104 $ ganda poussent la Tanzanie à se d’une tentative d’assassinat, pourrait Espérance de vie : 66,3 ans tourner plus encore vers ses voisins rendre son élan à la formation. du sud pour ses exportations, en parLe Chadema doit également faire Alphabétisation : 77,9 % ticulier agricoles. Ce secteur a connu face à l’Alliance pour le changement Inflation : 3,6 % une bonne année, mais les dépenses et la transparence (ACT), de Zitto Indice de développement électorales élevées risquent de faire Kabwe, qui a fusionné avec la face humain (sur 189 pays) : 154 décoller les tarifs des produits de base tion du Front civique uni (CUF) de Investissements directs étrangers : et l’inflation ira sans doute au-delà des Seif Sharif Hamad, le pilier de l’op1,1 milliard de $ 5 % ciblés. position zanzibarienne. L’acte le plus Dernier changement décisif de ces élections générales se de président : 2015 jouera sur l’île, dont le président sortant, Ali Mohamed Shein, se retire en Pour diversifier ses sources d’énergie, Croissance du PIB (%) 2020. Or le CCM est à court de cadres le pays va utiliser davantage son gaz 6,9 6,7 prêts à briguer un poste susceptible de naturel, notamment afin d’alimenter 5,7 5,2 voir naître des violences électorales. ses véhicules. Outre une production L’archipel va aussi représenter un agricole élevée, la croissance tirera sa PIB (milliards de $) grand défi pour l’avenir de l’Union. Le force d’un approvisionnement réguCUF en est bien conscient, et Hamad lier en électricité, de l’essor du secteur 67,2 56,8 62,2 53,2 pourrait s’allier à la figure montante de de la construction et du rebond des l’opposition, Fatma Karume, avocate revenus miniers survenu grâce à la à qui le pouvoir a retiré sa licence à la hausse des cours de l’or. Toutefois, Cour suprême. les investissements directs étranEn raison des positions tranchées gers resteront modérés, l’adminisde Magufuli et de ses tendances tration Magufuli semblant susciter nationalistes, ses affrontements la prudence chez les investisseurs.

2017 2018 2019* 2020* diplomatiques avec les institutions Cela pourrait réduire les chances du internationales risquent de perdurer. gouvernement de conclure avec des En revanche, grâce à des projets ou à sociétés pétrolières un accord pour des intérêts communs, il conserve de bonnes relations au une usine de gaz naturel liquéfié. sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) et de Un tel projet bénéficiera de peu de transparence car le la Communauté de développement de l’Afrique australe gouvernement maintient un contrôle étroit sur les médias (SADC). Par ailleurs, les élections pourraient détourner l’attraditionnels. Il pourrait aussi surveiller de plus près encore tention du pays de la menace jihadiste qui pèse à sa frontière les réseaux sociaux, ce qui suscitera des réactions dans les avec le Mozambique, même si la coopération sécuritaire classes urbaines aisées mais fera peu de remous parmi les entre les deux pays n’a jamais été aussi étroite. populations rurales, où le CCM garde une bonne assise. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Peu de transparence

200

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Fiches pays

RD CONGO

TANZANIE Luanda 300 km

Huambo

MALAWI

Lilongwe

ZAMBIE

ANGOLA

Lusaka

Nampula

Blantyre Harare

204 205 206 207 208 209 210 211 212 213

Afrique du Sud Angola Botswana Eswatini Lesotho Malawi Mozambique Namibie Zambie Zimbabwe

NAMIBIE Océan Atlantique

Bulawayo

BOTSWANA Windhoek

Gaborone

MOZAMBIQUE Pretoria

Johannesburg Kimberley

AFRIQUE DU SUD Le Cap

Beira

ZIMBABWE

Maputo Mbabane

ESWATINI

Océan Indien

Maseru

LESOTHO

Durban

Port Elizabeth

Afriqueaustrale La fin des turbulences ? a sous-région organisait en 2019 quatre scrutins aux enjeux divers. Hage Geingob en Namibie, Mokgweetsi Masisi au Botswana et Filipe Nyusi au Mozambique partaient tous favoris et ont été, logiquement, réélus. Les regards se tournaient surtout vers l’Afrique du Sud, où Cyril Ramaphosa a finalement renouvelé son mandat à la tête du pays malgré un score en deçà des performances habituelles de l’ANC. Parviendra-t-il enfin à asseoir son autorité sur le parti, alors que les pro-Zuma y mènent toujours une fronde ? Le congrès de mi-mandat de la formation, qui doit se tenir en 2020, apportera des réponses.

Au Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa devra de son

L

côté composer avec la montée des tensions sociales dues à une situation économique toujours précaire.

L’ONU a alerté fin novembre sur les risques d’une famine « créée par l’homme » dans le pays. À un an d’une présidentielle prévue pour 2021, la Zambie pourrait elle aussi connaître quelques turbulences en cette nouvelle année. Autorisé par la Cour constitutionnelle à se représenter (une décision controversée), Edgar Lungu ambitionne d’amender la Constitution avec un projet qui renforcera considérablement ses prérogatives. Vent debout contre le projet, l’opposition dénonce une atteinte à la démocratie. Le projet a déjà été avalisé par le Parlement.

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Fiches pays AFRIQUE AUSTRALE

ZIMBABWE BOTSWANA

Afrique du Sud Ramaphosa met le bleu de chauffe L’enquête sur la corruption sous l’ère Zuma tarde à donner des résultats tangibles.

L’ANC promet de redresser les entreprises publiques déficitaires.

Pretoria NAMIBIE

Océan Atl.

Johannesburg

AFRIQUE DU SUD Le Cap

MOZ.

ESWAT.

LESOTHO Durban Océan Indien 300 km

Pour Ramaphosa, le taux de chômage officiel de 29 % – et Cyril Ramaphosa entame sa deuxième année de présidence de 55,2 % chez les moins de 35 ans – constitue le plus grand avec une économie en difficulté. Il devrait néanmoins landéfi du pays. Et le gouvernement n’a pas pour le moment les cer les grands chantiers annoncés en début de mandat moyens d’y remédier. En 2019, la confiance des entreprises – division du fournisseur d’électricité Eskom, coupes dans a chuté à son plus bas niveau depuis les années 1980. Parmi la fonction publique, création d’un système d’assurance les trois grandes agences de notation, seule Moody’s n’a pas maladie nationale (NHI), etc. Les divergences économiques attribué à l’Afrique du Sud un statut inférieur ou nul, mais et politiques persistantes au sein du Congrès national afrielle a une perspective négative. cain (ANC, au pouvoir) ont entravé Afin d’obtenir plus de financements, de nombreuses réformes. Le parti est le gouvernement cherche des moyens tiraillé entre alliés de Ramaphosa et Nombre d’habitants : 58,6 millions pour que les régimes de retraite invespartisans de l’ancien président Jacob PIB par habitant : 6 100 $ tissent davantage dans les obligations Zuma, dont le secrétaire général de Espérance de vie : 63,4 ans d’État ou dans les entreprises d’État en l’ANC, Ace Magashule. Certains cadres difficulté. « Une meilleure option que pro-Zuma aimeraient se débarrasser Alphabétisation : 94,4 % d’approcher le FMI ou la Banque mondu président.

Inflation : 4,4 % diale », selon le responsable éconoLa commission d’enquête sur les Indice de développement mique de l’ANC, Enoch Godongwana. allégations de « capture d’État », qui e humain (sur 189 pays) : 113 Pour augmenter les recettes fiscales, recueille des preuves détaillées de Investissements directs étrangers : les Sud-Africains vivant à l’étranger l’ampleur de la corruption et de la 5,3 milliards de $ devront payer l’impôt sur le revenu sur fraude sous l’ère Zuma, devrait en terDernier changement des montants supérieurs à 1 million de miner avec la série de témoignages à de président : 2018 rands (61 millions d’euros) à partir de la mi-2020. mars 2020.

Croissance du PIB (%) 1,4 Le programme de développement 1 automobile se poursuit, avec l’arriSous la pression des Combattants 0,7 vée d’un plus grand nombre d’entrepour la liberté économique (EFF) 0,6 prises appartenant à des Noirs dans le de Julius Malema, l’ANC a pris des PIB (milliards de $) domaine des composants. Plusieurs mesures pour redistribuer les terres sociétés, dont Volkswagen, Toyota, aux agriculteurs noirs. Mais le proces349,4 368,1 358,8 369,8 BMW et Mercedes-Benz, vont créer sus législatif nécessaire pour réviser la un fonds de 4 millions de rands pour Constitution afin de préparer l’exprosoutenir les industriels noirs désireux priation sans indemnisation s’enlise. de travailler avec le secteur.

Le gouvernement doit concevoir un La technologie et la finance doivent plan pour le NHI, qui doit commenaussi s’attendre à des changements. cer en 2026. Mais certains acteurs du Le secteur bancaire compte trois nousecteur privé et des formations d’op2017 2018 2019* 2020* veaux acteurs, dont la TymeBank du position ne soutiennent pas ce sysmilliardaire Patrice Motsepe, tandis tème étant donné l’état désastreux de que les opérateurs attendent patieml’économie. ment la possibilité de déployer la 5G. En 2020, l’Alliance démocratique (DA, principal parti Si Ramaphosa renforce les relations avec la Chine, il a d’opposition) va se concentrer sur les locales de 2021. Son affaibli ses liens avec la Russie. Lorsqu’il prendra la présileader, Mmusi Maimane, a démissionné en raison des dence tournante de l’UA, en 2020, le président devrait se piètres performances du DA aux élections de 2019. Avec un concentrer sur le commerce et l’investissement. À l’ordre peu plus de 10 % des voix, les EFF ont confirmé leur statut de du jour, l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange troisième force du pays, mais ils vont devoir montrer à leurs continental africain. partisans qu’ils peuvent tenir leurs promesses. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Les EFF à l’épreuve

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RD CONGO Luanda

Angola Réformes tous azimuts

Océan Atlantique

ANGOLA Lobito

Huambo

ZAMBIE

João Lourenço doit convertir sa promesse de changement en résultats concrets.

La question de ses relations avec le clan dos Santos demeure.

NAMIBIE 200 km

prochaines élections générales. Pour y parvenir, le pays João Lourenço, qui a pris les rênes de l’Angola après trentedoit accroître ses recettes, en majorité issues des exportahuit années de règne de José Eduardo dos Santos, sait que le tions d’hydrocarbures, tout en diminuant ses dépenses. temps lui est compté. Après son élection, en 2017, et sa prise Afin de compenser le déclin des champs exploités au large de contrôle du Mouvement populaire de libération de l'Ande Luanda, l’État encourage l’exploration dans deux zones gola (MPLA) en 2018, le chef de l’État termine sa première du sud du pays. Les contrats de concession devraient être année de présidence avec les pleins pouvoirs mais dans un signés en avril 2020. pays en récession. Cela ne l’a pas empêché de lancer des L’autre chantier de Lourenço est un réformes tous azimuts. serpent de mer : la diversification de Outre la nomination d’une femme l’économie. Il a ainsi fait de l’agriculde 35 ans, Vera Daves de Sousa, au Nombre d’habitants : 31,8 millions ture une priorité. Mais, pour être signiposte clé de ministre des Finances PIB par habitant : 3 037 $ ficative, la hausse de la production (une première dans l’histoire du Espérance de vie : 61,8 ans nationale (en particulier de maïs, de pays), il a annulé des appels d’offres et pomme de terre et de poulet) enregisdes contrats entachés d’irrégularités, Alphabétisation : 66 % trée au premier trimestre de 2019 doit présenté un ambitieux programme de Inflation : 17,2 % s’accélérer en 2020, d’autant qu’elle privatisations et mis en place une taxe Indice de développement intervient en même temps qu’une sur la valeur ajoutée afin d’abonder e humain (sur 189 pays) : 147 réduction des importations agricoles son budget. Ces efforts ont été salués Investissements directs étrangers : liée aux difficultés d’accès aux devises. par le FMI, qui a accordé au pays un – 5,7 milliards de $ prêt de 3,7 milliards de dollars sur trois Dernier changement ans en décembre 2018. de président : 2017 Sur le plan politique, le président Des tensions politiques s’annoncent 1,1 a accédé à une demande de longue également. Les premières élections Croissance du PIB (%) date du principal parti d’opposition, municipales du pays doivent se tenir – 0,2 – 0,1 l’Union nationale pour l'indépenen 2020. Or nul ne sait quand l’Assem– 1,2 dance totale de l’Angola (Unita), lui blée nationale terminera l’examen permettant de récupérer la dépouille des textes permettant de les orgaPIB (milliards de $) de son ancien chef charismatique, niser. Si le parti présidentiel plaide Jonas Savimbi, pour l’inhumer dans pour un vote graduel, l’Unita défend 122,1 105,9 91,5 88,9 sa province d’origine, Bié (Centre). l’organisation d’élections simultanées Cet esprit d’ouverture s’est étendu à la dans les 164 municipalités du pays. société civile. L’activiste anticorrupCe point sera l’un des premiers chetion Rafael Marques, bête noire du vaux de bataille du nouveau chef du régime dos Santos, a reçu la médaille parti, Adalberto da Costa Júnior, élu du Mérite pour son engagement dans en novembre. Un sujet explosif pour « la construction de l’Angola ».

Lourenço, car il risque un revers électo2017 2018 2019* 2020* Reste que la tâche est immense. Les ral s’il tient sa promesse et une bronca réformes engagées tardent à se trapolitico-sociale s’il ne l’honore pas. duire dans la vie quotidienne. Même En attendant, le président devra s’assi le FMI prévoit une reprise de la croissance en 2020 (1,15 %), surer que le MPLA le soutient, en contrôlant les réactions l’exécutif devra jouer serré pour tenir ses engagements sans à l’égard de sa lutte anticorruption. En 2019, Lourenço a renforcer une grogne sociale latente. Outre juguler l’infladénoncé des manœuvres de déstabilisation quand le clan tion (17,2 % en 2019), il doit mettre fin aux subventions sur dos Santos a déploré une « chasse aux sorcières ». Et les les carburants et l’eau, des mesures impopulaires. João choses ne devraient pas s’arranger. Le procès pour fraude Lourenço a aussi promis de faire passer le déficit public du fils de José Eduardo, José Filomeno, s’est ouvert le de 90 % du PIB actuellement à 60 % en 2022, année des 9 décembre. Un véritable casus belli. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Scrutin explosif

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Fiches pays AFRIQUE AUSTRALE ANGOLA

ZAMBIE ZIMBABWE

NAMIBIE

Botswana Masisi mène la danse

Francistown

BOTSWAN A Gaborone

L’opposition n’a pas réussi à détrôner le parti au pouvoir lors du scrutin d’octobre.

Les fruits de la diversification économique se font attendre.

AFRIQUE DU SUD

200 km

Véhicules électriques

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* ESTIMATION OCTOBRE 2019

Les principaux défis auxquels doit faire face le chef de Fort d’une victoire décisive du Parti démocratique du l’État sont la réduction de la corruption – les délits d’iniBotswana (BDP) aux élections d’octobre, le président tié et l’affaiblissement du système judiciaire étaient deveMokgweetsi Masisi va poursuivre les réformes qu’il avait nus courants sous Khama – et l’amélioration des droits entamées après avoir succédé à Seretse Ian Khama en humains.

2018. Malgré leurs dissensions – Khama a quitté le BDP à Afin de réduire le chômage et de stimuler l’esprit d’enla mi-2019 pour former un nouveau parti allié à l’oppositreprise, Masisi a annoncé des plans destinés à améliorer tion –, le BDP s’est maintenu au pouvoir avec 38 députés le climat des affaires. Le chef de l’État sur 57 sièges – soit un de plus qu’en veut briser le modèle de dépendance à 2014. Il a remporté tous les sièges à l’extraction de diamants. Mais à court Gaborone, et en a gagné beaucoup Nombre d’habitants : 2,3 millions terme, celle-ci va rester le principal dans le Sud – des bastions de l’oppoPIB par habitant : 7 859 $ moteur de la croissance économique. sition, traditionnellement. Contre Espérance de vie : 67,6 ans La production de Debswana Diamond toute attente, le Front patriotique du (détenueàpartségalesparlegouverneBotswana (BPF) de Khama – qui ne Alphabétisation : NC ment et par De Beers) avait augmenté s’était pas présenté, mais avait espéré Inflation : 3 % de 6 % à 24,1 millions de carats en 2018, que son retrait du BDP provoquerait Indice de développement mais elle a baissé de 2 % à 17,4 millions l’exode de ses partisans – n’en a reme humain (sur 189 pays) : 101 de carats au cours des neuf premiers porté que trois.

Investissements directs étrangers : mois de 2019. La demande mondiale Pour sa part, le Collectif pour le 229 millions de $ demeure faible en raison des incerchangement démocratique (UDC), Dernier changement titudes macroéconomiques et de alliance de l’opposition, s’est princide président : 2018 difficultés dans la chaîne d’approvipalement fixé dans l’Est et le Nordsionnement. Le gouvernement espère Ouest. Il a obtenu 15 sièges, soit deux Croissance du PIB (%) 4,3 augmenter la part des revenus tirés de de moins que la dernière fois. L’UDC 4,4 3,4 cette industrie en négociant un nourisque de s’effondrer, et ce d’autant 2,9 vel accord avec De Beers, qui a fait de plus que son président, Duma Boko, Gaborone son centre de tri final pour a été vaincu, tout comme Ndaba PIB (milliards de $) ses mines du Botswana, de Namibie et Gaolathe, le leader de l’Alliance des 19,6 d’Afrique du Sud. progressistes (AP).

18,6 18,6 17,3 Du côté du charbon bitumineux, les projets d’exploitation des ressources nationales – estimées à 212 milliards La combinaison des politiques popude tonnes – vont s’accélérer. L’idée listes du président et des divisions au étant de développer de nouvelles sein de l’opposition a joué un rôle clé mines pour l’approvisionnement dans la victoire du BDP. Les décisions local en électricité et, à terme, pour de lever l’interdiction de chasser les 2017 2018 2019* 2020* l’exportation. éléphants décrétée par Khama, de En août, la société Minergy Coal, réduire les taxes sur la consommation cotée à la Bourse du Botswana, a d’alcool et de licencier Isaac Kgosi, le annoncé que sa mine de Masama exportait son premier patron des services de renseignement, ont été généracharbon commercialisable en Afrique du Sud et en Namibie. lement saluées. Masisi a promis des augmentations de Elle entend porter sa production à 100 000 t par mois au salaire, notamment dans l’armée et dans la police, tout en début de 2020. C’est ensuite le gisement à ciel ouvert de annonçant des propositions ambitieuses pour diversifier Mmamaboula (90 millions de tonnes de charbon exploil’économie, dépendante des diamants, et créer des emplois table), propriété de la société sud-africaine Maatla Energy, – par exemple en faisant du pays un centre régional de qui devrait entrer en production. fabrication de véhicules électriques.

AFRIQUE DU SUD

Eswatini La (sur)vie en son royaume

MOZAMBIQUE Mbabane

ESWATINI

Le bras de fer entre Mswati III et le mouvement prodémocratie se poursuit.

Le FMI préconise une réduction des dépenses publiques.

30 km

* ESTIMATION OCTOBRE 2019

de télécommunications et d’électricité afin d’améliorer le Le roi Mswati III ne montre aucun signe d’assouplissement dans sa mainmise sur la politique et garde un rôle démeclimat des affaires. Mais, dans le même temps, le gouversuré dans l’économie, qui traverse une période difficile. nement a subi la pression de la rue, les employés de l’État Les mouvements pour le changement tentent de décupler – infirmières et enseignants compris – exigeant des augl’indignation populaire afin de modifier le rapport de force mentations de salaire et de meilleures conditions de travail.

Le ministre des Finances, Neal Rijkenberg, a promis avec le pouvoir. Environ 3000 personnes ont manifesté en des changements radicaux, mais le pouvoir tarde à les faveur de la démocratie à Manzini en mai. Le gouvernement mettre en œuvre. L’administration a répondu en envoyant les forces de a réduit certaines dépenses, notamsécurité. En novembre, la famille royale a réceptionné plus de cent véhiment les voyages en première classe Nombre d’habitants : 1,1 million cules de luxe, ce qui a provoqué un des membres du gouvernement.

PIB par habitant : 4 176 $ tollé chez les fonctionnaires en grève, Rijkenberg promeut l’agriculture et Espérance de vie : 58,3 ans les militants du Mouvement démocral’exploitation minière pour diversifier l’économie. Il entend également tique populaire uni (Pudemo), dirigé Alphabétisation : 83,1 % faciliter la vie des entreprises privées par Mlungisi Makhanya, et les syndiInflation : 2,8 % afin de générer davantage de recettes cats, qui mobilisent beaucoup alors Indice de développement fiscales et de créer plus d’emplois. Sa que de nombreuses formations d’ope humain (sur 189 pays) : 144 position sont hors la loi. À la même critique du rôle de l’État dans l’éconoInvestissements directs étrangers : époque, les étudiants protestaient mie ne semble cependant pas avoir le 25 millions de $ contre les mauvaises conditions de soutien du roi.

Dernier changement travail dans les écoles du pays. Reste à Le tourisme constitue une ressource de président : 1986 importante pour le pays, qui investit savoir si ces groupes seront en mesure dans de nouveaux hôtels et centres de de canaliser l’indignation afin de Croissance du PIB (%) conférences. Mais la fréquentation a transformer le pays.

2,3 2,0 diminué de 5,1 % (1,3 million d’entrées Jusqu’à présent, aucun des États 1,3 de la région n’a cherché à jouer le rôle en 2018), la plus forte baisse venant des 0,5 de médiateur dans le long débat sur visiteurs européens. Selon le ministère PIB (milliards de $) la démocratisation d’Eswatini, pas des Finances, le gouvernement devrait plus que la Communauté de dévepromouvoir les aires protégées en tant 4,78 4,71 4,45 4,65 que destinations touristiques. loppement de l’Afrique australe ou Les autorités veulent par ailleurs que l’Union africaine. Le pays étant le réduire les importations d’électricité, dernier allié diplomatique de Taïwan dont la majeure partie provient d’Essur le continent, il est probable que le gouvernement chinois augmente kom, un service public sud-africain bientôt la pression sur le roi pour qu’il peu performant. Elles examinent des change de camp. projets de centrales solaires et d’ex2017 2018 2019* 2020* ploitations de biomasse censés produire 40 MW à partir de 2020 et 2021.

Le pays connaît des niveaux éleL’administration vit au-dessus de ses vés de pauvreté, de chômage chez les jeunes et d’infection moyens, et le niveau d’endettement augmente. Depuis 2016, par le VIH/sida. L’agriculture emploie beaucoup, mais le le gouvernement ne s’est pas adapté à la baisse des recettes Programme alimentaire mondial affirme que ses rendede l’Union douanière de l’Afrique australe due à la libéraments moyens sont inférieurs à ceux des pays comparables lisation du commerce. Le FMI prévient que la croissance en raison de la sécheresse et du manque d’investissement continuera de ralentir si Mbabane n’agit pas, lui conseildans le secteur. Environ 15 % de la population nationale a lant de réformer les entreprises publiques en difficulté. Il souffert d’insécurité alimentaire en 2018. lui faudra aussi investir davantage dans les infrastructures

Pression de la rue

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207

Fiches pays AFRIQUE AUSTRALE AFRIQUE DU SUD Maseru

LESOTHO

Lesotho Retour aux temps troublés

AFRIQUE DU SUD

30 km

Le Premier ministre a suspendu le Parlement et tente de reprendre la main au sein de l’ABC. L’endettement de l’État va se creusant, tandis que la croissance se contracte.

Congrès démocratique, principal parti d’opposition, dirigé L’instabilité est de retour. Le Premier ministre, Thomas par Mathibeli Mokhothu, et le Mouvement pour le chanThabane, a suspendu le Parlement en juillet et refuse de le gement économique, de Selibe Mochoboroane, semblent convoquer à nouveau pendant qu’il gère les luttes internes convaincre l’opinion en ces temps troublés. de son parti, le Congrès du Basotho (ABC). L’accord trouvé L’opacité politique se répercute sur l’économie. grâce au président sud-africain, Cyril Ramaphosa, médiaL’endettement de l’État va se creusant. Mais les industries teur de longue date de la Communauté de développement de la laine et du mohair, principales exportations agricoles de l’Afrique australe (SADC) dans les crises du Lesotho, pour nationales, devraient revenir à la norfaire avancer les réformes constitumale. Les autorités en ont interdit la tionnelles et sécuritaires dont le pays a vente via l’Afrique du Sud pour en besoin n’a eu aucun impact immédiat.

Nombre d’habitants : 2,1 millions confier le monopole à l’investisseur La faiblesse des coalitions politiques PIB par habitant : 1 338 $ chinois Guohui Shi. Les agriculteurs et la méfiance entre dirigeants civils Espérance de vie : 54,6 ans ont protesté, se disant sous-payés, et forces de sécurité qui ont conduit voire pas payés. Le Lesotho représente Thabane à l’exil créent à nouveau des Alphabétisation : 76,6 % plus de 15 % des réserves mondiales de incertitudes.

Inflation : 5,9 % mohair.

Thabane a fermé le Parlement après Indice de développement qu’un membre de l’ABC a lancé un humain (sur 189 pays) : 159e vote de défiance à son égard. L’ancien Investissements directs étrangers : comité exécutif national du parti n’a Après une faible hausse en 2018 et en 39 millions de $ pas voulu céder sa place au nouveau 2019, la croissance devrait se contracDernier changement en février et ses cadres se sont plaints ter. Deux de ses moteurs résistent de président : 2017 de l’influence de l’épouse du Premier néanmoins: le secteur de la construcministre, Maesaiah Thabane. L’ABC tion et celui de l’industrie médicale Croissance du PIB (%) dispose de 53 sièges sur 120 à l’Asdu cannabis, légalisée en février 2017.

2,7 2,7 semblée et dirige une coalition avec Américains et Canadiens sont les plus 0,5 – 0,1 l’Alliance des démocrates, du vice-Pregros investisseurs dans le domaine de mier ministre Monyane Moleleki, le la marijuana. À noter, parmi les proPIB (milliards de $) Parti national Basotho, de Thesele grammes d’infrastructures notables, Maseribane, et le Congrès réformé du les zones industrielles de Tikoe et de 2,6 2,7 2,7 2,8 Lesotho, de Keketso Rantšo.

Belo, les routes Mpiti-Sehlabathebe Thabane pourrait appeler à de nou(Sud-Est) et Marakabei-Monontša velles élections – ce que demande (Nord-Est), ainsi que la deuxième l’opposition – ou rouvrir le Parlement phase du projet hydraulique des juste pour permettre la création de Highlands (LHWP). l’Autorité nationale pour la réforme Le pays importe de l’électricité pour législative, qui doit appliquer le prosatisfaire 50 % de sa demande inté2017 2018 2019* 2020* cessus défini via la médiation de la rieure – la centrale hydroélectrique de SADC. Autre possibilité à l’étude : Muela fournit le reste –, et les autorités la formation d’un gouvernement prévoient d’investir dans des câbles d’union nationale avec l’opposition. Mais il y a des désacpour alimenter des projets miniers tout en augmentant la cords sur la manière de revoir le secteur de la sécurité, cerproduction. Elles ont aussi signé un accord pour un projet tains demandant la libération de l’ancien commandant d’énergie solaire d’une capacité de 80 MW. Tlali Kamoli. Une requête qui semble peu envisageable Le gouvernement veut encourager les investissements compte tenu des fortes tensions entre le ministre de la dans les activités extractives. En octobre, il a renouvelé Défense, Tefo Mapesela, et le commandant des forces de la licence de la mine phare de Letšeng, détenue par Gem défense du Lesotho, le général Mojalefa Letsoela. Seuls le Diamonds, pour dix années supplémentaires. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Industrie du cannabis

208

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TANZANIE

Lac Malawi

Malawi Pas encore tiré d’affaire

M A L AW I ZAMBIE

Lilongwe

MOZAMBIQUE

MOZAMBIQUE

La réélection de Mutharika est toujours contestée par ses opposants.

La hausse de la production agricole a redonné des couleurs à l’économie.

Blantyre 150 km

le maïs, sa principale culture de base. Il devait en produire La présidentielle contestée de mai 2019 n’a pas fini d’avoir 206,9 millions de kilos en 2019, contre 202 millions en 2018. des répercussions. Les manifestations – parfois violentes – Le gouvernement fait par ailleurs pression pour augmenter s’enchaînent, surtout dans les bastions de l’opposition que les productions de coton et de légumineuses. sont le nord et le centre du Malawi. Cette dernière cherche à L’éducation, les infrastructures et la diversification font forcer le gouvernement à négocier. On ignore quand la Cour partie des principales priorités de Mutharika. Mais le proconstitutionnelle rendra sa décision, peut-être en août 2020. gramme triennal du FMI en cours pour juguler la dette et Les observateurs internationaux ayant jugé les élections les déficits publics élevés va limiter sa libres et équitables, les chances de capacité à dépenser. l’opposition d’obtenir une annulation Malgré les dévastations causées par semblent minces. L’ancien président Nombre d’habitants : 18,6 millions le cyclone Idai en mars, qui a rendu de Bakili Muluzi et certains groupes de PIB par habitant : 370 $ nombreuses personnes dépendantes la société civile ont cherché à jouer Espérance de vie : 63,7 ans de l’aide alimentaire, l’économie les médiateurs, mais n’ont pas encore connaît une poussée de croissance à réussi à trouver de compromis entre Alphabétisation : 62,1 % court terme. Selon les prévisions, la les deux parties.

Inflation : 8,8 % production de maïs devrait connaître Le président Peter Mutharika, Indice de développement une hausse de 25,7 %, tandis que celles connu pour sa lenteur à prendre des e humain (sur 189 pays) : 171 de riz et de coton augmenteraient resdécisions et son ambition de faire du Investissements directs étrangers : pectivement de 19,5 % et de 35,3 %.

Malawi un pays de type Singapour, a 102 millions de $ été réélu au terme d’une course serrée.

Dernier changement Le chef du Parti démocratique prode président : 2014 gressiste (DPP, au pouvoir) a obtenu Afin de diminuer la dépendance du 38,6 % des voix, tandis que Lazarus pays à la pluie, des systèmes d’irriCroissance du PIB (%) 5,1 Chakwera, du Parti du congrès du gation sont en cours d’extension. La 4,5 4 Malawi (MCP), en recueillait 35,4 %.

Banque mondiale appuie financière3,1 Saulos Chilima, qui était l’adjoint de ment l’Initiative de la ceinture verte Mutharika et a fait campagne sur l’an(GBI), qui couvrira 4 000 ha sur les ticorruption, a atteint 20,2 %. Ces deux rives du fleuve Shire.

PIB (milliards de $) derniers continuent d’attaquer le chef Améliorer la production élec8,05 7,52 6,90 6,23 de l’État sur sa gouvernance et veulent trique, principalement d’origine que Jane Ansah, la patronne de la hydraulique, constitue un défi. Le Commission électorale, soit licenciée. pays a une capacité de 350 MW qu’il Aux législatives, le DPP n’a remporté cherche à porter à 720 MW en 2020 que 62 sièges sur 193. Il est suivi du et à 1 000 MW d’ici à 2023. Il s’apMCP, avec 55 sièges, et des indépenprovisionne en Zambie depuis la fin dants, avec 55 sièges également. Le de 2018. La construction de la cen2017 2018 2019* 2020* Mouvement uni de transformation trale à charbon de Kam’mwamba, (UTM) de Chilima, lui, n’en a remporté d’une puissance de 300 MW, devrait que quatre. Cela laisse à l’opposition reprendre en 2020 pour s’achever suffisamment de puissance pour perturber le programme l’année suivante. législatif du DPP si elle rallie assez de députés indépendants.

Quant aux projets miniers, ils ont perdu de leur intérêt Le MCP prévoit de boycotter le Parlement jusqu’à ce que la pour les investisseurs en raison des troubles postélectoCour se prononce sur sa contestation électorale. raux, d’après les autorités. La société canadienne Mkango Le programme de Mutharika pour l’année à venir est larconduit une étude de faisabilité sur les terres rares de gement axé sur l’économie. Le pays est tributaire de l’agriSongwe Hill et recherche des investisseurs pour son projet culture pluviale, le tabac étant sa première exportation et d’uranium, de tantale et de niobium à Thambani. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Ceinture verte

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Fiches pays AFRIQUE AUSTRALE TANZANIE MALAWI

MOZAMBIQUE

ZAMBIE

Nampula

Mozambique Tout reste à prouver

ZIMBABWE

Beira

AFRIQUE DU SUD Maputo ESWAT.

En position de force, le Frelimo continue de régner sans partage.

La dette cachée de 2 milliards de dollars grève l’économie.

Océan Indien

MADAGASCAR

300 km

valorisation de ces ressources pourrait générer 1,5 milliard Au Mozambique, l’année 2019 s’est achevée sur la réélection de dollars de recettes par an d’ici à 2022. du président sortant, Filipe Nyusi. Une victoire sans surprise La révélation des prêts frauduleux pèse également sur pour le candidat du Front de libération du Mozambique le mandat de Filipe Nyusi, qui faisait partie du gouverne(Frelimo). Ce parti règne sans partage sur la vie politique ment de son prédécesseur, Armando Guebuza, au moment du pays depuis 1975, en dépit de l’effet désastreux qu’a prodes faits. Jugé à New York dans l’affaire de la dette cachée, voqué la révélation, en avril 2016, d’une dette publique de le Libanais Jean Boustani a ainsi affirmé lui avoir versé plus de 2 milliards de dollars (130 % du PIB).

1 million de dollars en 2014 pour sa Réélu avec près de 73 % des voix, campagne électorale. Acquittté le le président renoue avec les scores 2 décembre, il était accusé par la jushistoriques de son parti. Cette Nombre d’habitants : 30,4 millions tice américaine d’être l’un des maîtres fois-ci, il n’aura donc laissé aucune PIB par habitant : 484 $ d’œuvre du montage financier qui a chance à son adversaire historique, la Espérance de vie : 58,9 ans permis au Mozambique d’emprunter Résistance nationale du Mozambique illégalement 2 milliards de dollars.

(Renamo), une guérilla reconvertie Alphabétisation : 50,6 % L’année 2020 verra-t-elle l’extradition en parti d’opposition. Son candidat, Inflation : 5,6 % – réclamée par Washington et par Ossufo Momade, crédité de 22 % des Indice de développement Maputo – de l’ancien ministre des voix, a rejeté les résultats du scrutin du e humain (sur 189 pays) : 180 Finances Manuel Chang, exilé en 15 octobre.

Investissements directs étrangers : Afrique du Sud? 2,7 milliards de $ Sur le plan intérieur, le pays est Dernier changement menacé par des troubles sécuritaires Des soupçons de fraude massive ont de président : 2015 non négligeables. Depuis deux ans, pesé sur le parti au pouvoir tout au la province de Cabo Delgado est agilong de la campagne électorale, égaCroissance du PIB (%) 6 tée par les attaques récurrentes d’une lement émaillée d’incidents violents.

3,7 3,2 1,8 insurrection jihadiste. Elles ont proFilipe Nyusi aborde donc l’année 2020 voqué la mort de plusieurs centaines victorieux, mais avec tout à prouver. de personnes depuis la fin de l’anSaura-t-il faire oublier la catastrophe PIB (milliards de $) née 2017. Certaines violences ont été économique de la dette cachée? revendiquées en 2019 par l’État islaLa révélation du montant astro16,6 15 14,3 12,5 mique. Les jihadistes s’en sont aussi nomique illégalement emprunté pris à plusieurs reprises aux convois par des sociétés nationales avait d’entreprises étrangères, forçant les entraîné le retrait des aides du FMI et multinationales à se doter des services de la Banque mondiale, précipitant de sociétés de sécurité privées pour le pays dans une crise sans précéprotéger leurs employés. dent. Le gouvernement est parvenu Malgré la signature, le 1er août 2019, depuis à renégocier les termes de son 2017 2018 2019* 2020* emprunt avec certains de ses créand’un accord de paix scellant la fin ciers, mais se trouve tout de même en des hostilités entre le Frelimo et la défaut de paiement sur une partie de Renamo, des actions armées de l’ansa dette. cienne guérilla, menées par des éléments dissidents, ne Avec une croissance de 1,8 % en 2019, le Mozambique sont pas à exclure. En dépit des dispositions prévues par reste à la peine. Heureusement, 2020 devrait lui permettre l’accord de paix, cette « junte militaire » refuse de dépode relever la tête avec un taux de 6 %, selon le FMI. Le chef ser les armes et de reconnaître la légitimité de son leade l’État entend bien tirer profit de la découverte, entre 2010 der, Ossufo Momade. Elle a, par ailleurs, mené plusieurs et 2013, d’immenses réserves offshore de gaz au large de la attaques à la veille de l’élection présidentielle et pourrait région de Cabo Delgado, située dans le nord-est du pays. La continuer à causer des troubles dans le centre du pays. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Crise sans précédent

210

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ANGOLA

ZAMBIE

NAMIBIE Windhoek

Namibie Victoire en trompe l’œil

BOTSWANA

Walvis Bay Océan Atlantique

Le président a été réélu mais avec une marge nettement plus étroite qu’en 2014.

Des réformes structurelles sont prévues en 2020 pour redresser l’économie.

AFRIQUE DU SUD

300 km

investissements directs étrangers (IDE). Le gouverneHage Geingob, 78 ans, a remporté la présidentielle du ment a confirmé que la version finale de sa loi de Black 27 novembre avec 56,3 % des voix. Ce qui est certes netEconomic Empowerment (BEE) exclura une proposition tement supérieur au score de son principal opposant, très controversée de participation minimale de 25 % des Panduleni Itula (30 %), mais bien inférieur aux 86 % Namibiens historiquement défavorisés dans toutes les qu’il avait obtenus en 2014. Son parti, l’Organisation des entreprises. peuples du Sud-Ouest africain (Swapo), a lui perdu la Les autorités misent beaucoup sur les partenariats majorité au Parlement et n’y occupera plus que 63 des 96 public-privé pour obtenir des invessièges. Le Mouvement démocratique tissements dans des secteurs priopopulaire (PDM), la principale force ritaires tels que les infrastructures. d’opposition, a pour sa part remNombre d’habitants : 2,5 millions Elles ont reçu pour 20 milliards de porté 16 sièges. Le mécontentement PIB par habitant : 5 842 $ dollars namibiens (1,2 milliard d’eupopulaire reste élevé face à la lenteur Espérance de vie : 64,9 ans ros) de promesses de la part d’orgade la redistribution des terres – le nismes donateurs et d’entreprises gouvernement a échoué à mettre Alphabétisation : 88,3 % lors d’un sommet sur la croissance en œuvre les réformes convenues Inflation : 4,8 % économique en 2019. en octobre 2018 –, à l’insuffisance Indice de développement Après s’être contractée en 2019 de de logements urbains et à l’impact e humain (sur 189 pays) : 129 0,2 % en raison d’une forte baisse de la de la récession de 2017-2018 sur le Investissements directs étrangers : production agricole, d’une réduction niveau de vie. Geingob a déclaré 196 millions de $ temporaire de la production de dial’état d’urgence en mai en réponse Dernier changement mants bruts et de la faible demande à la sécheresse prolongée, avec plus de président : 2015 des consommateurs, la croissance de 700 000 demandes d’aide alimendevrait repartir en 2020, mais de taire publique, dont la distribution a 1,5 Croissance du PIB (%) façon modeste. L’imprévisibilité des été très difficile. Il a également érigé – 0,07 – 0,1 – 0,8 précipitations et la faiblesse persisen urgence nationale le problème des tante des prix de l’uranium sont les constructions anarchiques, en partiprincipales menaces qui pèsent sur culier près de Windhoek.

PIB (milliards de $) la reprise. La production de ce métal n’augmentera que progressivement 14,9 14,5 14,3 13,5 en 2020, car la mine Husab a presque Les pressions pour que le gouverneatteint sa pleine capacité, avec ment mette en œuvre des mesures quelque 5500 tonnes par an. La Chine de grande envergure afin de relancer détient maintenant un quasi-monol’économie et l’emploi vont s’accenpole sur la production namibienne tuer. Le FMI et les agences de notapuisque, en juillet, la China National tion ont conseillé à la Namibie de Nuclear Corp. a conclu l’achat d’une poursuivre son assainissement bud2017 2018 2019* 2020* participation de 68,6 % dans la mine gétaire afin de réduire son déficit et Rössing de Rio Tinto. de freiner la tendance à la hausse de La société Namdeb Corp., détela dette publique, qui devrait dépasnue à parts égales par l’État et par De Beers, augmente sa ser 50 % du PIB en 2020-2021. Le pays va aussi mettre en capacité d’extraction en haute mer pour compenser la ferœuvre les réformes controversées qui avaient été suspenmeture de la plupart de ses mines terrestres d’ici à 2021. dues – réduction de la fonction publique et fin des subAprès un record de 2 millions de carats de pierres de quaventions aux organismes parapublics déficitaires – afin lité gemme extraites en 2018, la production de Namdeb de tenter de retrouver sa note, perdue en novembre 2017. est tombée à environ 1,7 million de carats en 2019. Elle Parmi les autres recommandations figurent des devrait remonter à 1,8 million en 2020. réformes structurelles et des mesures visant à attirer les * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Mesures controversées

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211

Fiches pays AFRIQUE AUSTRALE RD CONGO

Zambie Gouvernance à crédit

ANGOLA

Ndola

ZAMBIE

MOZ.

Lusaka

Le président fait le forcing pour obtenir un troisième mandat.

La faiblesse des prix du cuivre et la dette publique plombent l’économie.

NAM.

TANZANIE

BOTSWANA

ZIMBABWE

MALAWI

200 km

la nécessité de satisfaire des besoins urgents en matière de Alors que le FMI a refusé son aide à la Zambie en raison production électrique et de sécurité alimentaire et hydrique de son endettement caché, Edgar Lungu se prépare pour va peser sur le budget de 2020. Le gouvernement augmente la présidentielle de 2021. Il a obtenu que la Cour constitules impôts des sociétés minières à mesure que le prix du tionnelle l’autorise à briguer un troisième mandat, et un cuivre s’élève, et ces dernières ont demandé un plafonneamendement en cours d’examen pourrait lui donner plus ment des redevances. d’influence sur le pouvoir judiciaire et sur la politique monéAutre sujet préoccupant : la dette à l’égard de la Chine, taire du pays tout en affaiblissant le contrôle parlementaire. estimée officiellement à environ 30 % Mais ce projet suscite une vive oppode la dette extérieure et qui, selon cersition, et le Front patriotique (PF), au tains militants, pourrait contraindre pouvoir, n’a pas la majorité des deux Nombre d’habitants : 17,9 millions l’État à céder des actifs clés aux prêtiers nécessaire.

PIB par habitant : 1 307 $ teurs chinois s’il ne parvenait pas à En prévision du prochain scrutin, le Espérance de vie : 62,3 ans rembourser ses dettes. La Zambie gouvernement se fait aussi plus auton’ayant pas déclaré son endettement ritaire et menace les organisations Alphabétisation : 83 % total, en particulier son exposition aux de la société civile de diverses repréInflation : 10 % prêts chinois, ni réduit ses dépenses, le sailles. Du côté des formations d’oppoIndice de développement FMI lui a refusé tout plan de sauvetage. sition, Hakainde Hichilema, le leader e humain (sur 189 pays) : 144 du Parti uni pour le développement Investissements directs étrangers : national (UPND), a fait des incursions 569 millions de $ sérieuses dans des circonscriptions Le gouvernement a choisi d’investir Dernier changement considérées comme des bastions dans les infrastructures routières, de président : 2015 du PF. Autre opposant redoutable, mais cela n’a pas stimulé la croissance Chishimba Kambwili, ancien pilier ni réduit la pauvreté, qui augmente Croissance du PIB (%) 3,6 du PF aujourd’hui à la tête du Congrès depuis 2000.

3,5 national démocratique (NDC), n’a de L’agriculture a souffert de la séche2 cesse d’accuser Lungu de corruption resse en 2018-2019. La récolte de maïs 1,6 malgré l’arrestation de ses partisans. de 2019 est estimée à 2 millions de PIB (milliards de $) Plus important encore, le NDC a arratonnes, soit moitié moins que d’haché une importante circonscription bitude. Le secteur agricole repré25,8 26,7 23,9 23,3 du PF dans la province de Copperbelt sente environ 50 % des emplois, mais et pourrait s’allier à l’UPND, soutenu, seulement 10 % du PIB faute d’inlui, dans l’Ouest et le Sud. vestissement dans les activités de Mais Lungu doit aussi relever des transformation à valeur ajoutée. Le défis au sein de son propre parti. gouvernement estime que 2,3 millions Originaire lui-même de la province de personnesont besoin d’aide alimende l’Est, il affronte le puissant bloc taire. Seule note positive, l’entreprise 2017 2018 2019* 2020* politique du Nord, qui estime que sa agro-industrielle Zambeef s’attend région ne reçoit pas son dû. pour sa part à des bénéfices, en partie L’économie est en difficulté, avec grâce au soja, au blé et au maïs. des perspectives incertaines pour 2020 et un gouvernement Le pays a mis du temps à diversifier son bouquet énerqui peine à respecter ses obligations: la dette extérieure est gétique. En raison des faibles pluies et de sa dépendance à passée à 10,2 milliards de dollars (près de 9 milliards d’euros) l’hydroélectricité, le producteur public Zesco a dû mettre en juin 2019 et la dette intérieure à 60,3 milliards de kwachas en œuvre un programme de délestage. Mais la centrale de (plus de 4 milliards d’euros). Selon les analystes, ramener le 750 MW de Kafue Gorge Lower devrait bientôt entrer en déficit budgétaire à moins de 5,5 % du PIB sera difficile. La production, et le japonais Univergy Solar compte investir dette publique doit atteindre 91,6 % du PIB en 2019. En outre, 200 millions de dollars dans des unités photovoltaïques. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Soja, blé et maïs

212

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MALAWI ZAMBIE Harare

Zimbabwe Pas de trêve pour la crise

ZIMBABWE BOTSWANA 200 km

La Zanu-PF, au pouvoir, est traversée par de profondes divisions.

Mnangagwa cherche à redresser l’économie, mais les investisseurs restent prudents.

Océan Indien

Bulawayo

AFRIQUE DU SUD

MOZAMB.

Mais les exportations ne rapportent pas suffisamment Plus de deux ans après l’arrivée au pouvoir, avec l’appui de de devises pour répondre aux besoins intérieurs. En 2019, la l’armée, d’Emmerson Mnangagwa, le Zimbabwe a du mal Banque centrale a adopté le dollar du Zimbabwe, et il a fallu à garder la tête hors de l’eau. Le président est en butte aux imprimer plus de monnaie pour combler le vide créé par l’inattaques de certaines factions de l’Union nationale afriterdiction du dollar américain et par celle d’autres devises. caine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF). Il ne serait Un marché parallèle est en plein essor, et le conseiller du préplus en bons termes avec le vice-président Constantino sident, Kudakwashe Tagwirei, ainsi que son neveu, Tarisai Chiwenga (le général qui avait mené le coup d’État contre Mnangagwa, ont vu les comptes banMugabe), qui se positionnerait pour caires de leurs sociétés bloqués. prendre les rênes du pays.

Le président a étendu le pouvoir de Mnangagwa a voulu neutraliser Nombre d’habitants : 14,6 millions la nouvelle Commission anticorruptoute menace potentielle des forces PIB par habitant : 859 $ tion, dirigée par l’ancienne juge de armées en redéployant certains leaEspérance de vie : 61,7 ans la Haute Cour, Loice Matanda-Moyo, ders militaires. Anselem Sanyatwe, épouse du ministre des Affaires étranancien chef de la Garde présidentielle Alphabétisation : 88,7 % gères, le général Sibusiso Moyo. qui dirigeait les troupes ayant ouvert le Inflation : 161,8 % feu sur les manifestants en août 2018, Indice de développement est ainsi devenu le premier diplomate humain (sur 189 pays) : 156e du Zimbabwe en Tanzanie.

Le ministre des Finances, Mthuli Investissements directs étrangers : La mort de Mugabe à Singapour, Ncube, prévoit d’entamer au début 745 millions de $ le 6 septembre, a relancé la rivalité de 2020 des pourparlers sur l’apuDernier changement entre le groupe Génération 40 (G40) rement de la dette internationale de président : 2017 de la Zanu-PF et la Team Lacoste de du Zimbabwe. Le pays doit à la Mnangagwa. Le G40 juge Mnangagwa Banque mondiale et à la BAD près de Croissance du PIB (%) 4,7 illégitime, comme le Mouvement 2 milliards de dollars. Les banques 3,4 2,7 pour le changement démocratique chinoises ont fait marche arrière sur (MDC, principal parti d’opposition), le financement de trois projets d’in–7 de Nelson Chamisa, qui demande la frastructure d’une valeur de 1,3 milPIB (milliards de $) démission du chef de l’État. Le parti liard de dollars après que le Zimbabwe passera son véritable test en 2023, lors a saisi 10 millions de dollars sur un 21,8 20,9 des élections générales. compte ouvert pour la rénovation 12,6 12,8 La situation économique se détéde l’aéroport international Robertriore, et plusieurs manifestations ont Gabriel-Mugabe de Harare. été organisées à Harare à la fin de 2019.

Mnangagwa attribue la crise éconoLa nourriture est de plus en plus chère. mique aux sanctions que lui impose Le carburant, l’électricité et l’eau font l’Occident et il a sollicité le soutien défaut. Le gouvernement a adopté un de la Communauté de développe2017 2018 2019* 2020* Programme de stabilisation transiment de l’Afrique australe (SADC) et toire qui s’étend jusqu’à la fin de 2020 d’autres alliés pour obtenir la levée et donne notamment la priorité à inconditionnelle des mesures restricl’agriculture, aux mines et au tourisme. La production d’or, tives. Harare compte aussi améliorer l’environnement des en baisse depuis deux ans, devrait se redresser en 2020 affaires en introduisant un centre d’investissement à guid’après les autorités, mais les pannes d’électricité pourraient chet unique et en réduisant la facture salariale de 130 milaffaiblir ces prévisions. Sur le plan des infrastructures, l’État lions de dollars (0,4 % du PIB) dans la fonction publique entend combler les lacunes dont souffre le pays et veut accéen 2020. Pour le moment, les investisseurs font montre de lérer les travaux de l’autoroute qui relie le pays à l’Afrique du prudence à l’égard du Zimbabwe, et certains accords sont Sud et à la Zambie, au coût estimé de 2,7 milliards de dollars. tombés à l’eau. * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Apurement de la dette

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213

Fiches pays Victoria

SEYCHELLES

Océan Indien TANZANIE

COMORES ZAMBIE

Moroni

Dzaoudzi Mayotte (FRANCE)

MOZAMBIQUE MALAWI

Antsiranana (Diégo-Suarez)

Mahajanga Canal de Mozambique Antananarivo

ZIMBABWE

MADAGASCAR

Toamasina (Tamatave)

MAURICE Saint-Denis

Fianarantsoa

Port-Louis

La Réunion (FRANCE)

Toleara (Tuléar)

217 218 219 221

Comores Madagascar Maurice Seychelles

300 km

OcéanIndien

Réajustements en cours

’année 2019 aura été rythmée par l’arrivée ou la reconduction au pouvoir de plusieurs chefs d’État ou de gouvernement dans la région.

En janvier, Andry Rajoelina, élu à la fin de 2018, est intronisé président de la République de Madagascar et remplace Hery Rajaonarimampianina. Quelques mois avant qu’Azali Assoumani soit reconduit à la présidence de l’Union des Comores, en mars, et que Pravind Jugnauth soit maintenu à son poste de Premier ministre à Maurice, au début de novembre. Ils seront rejoints à la fin de 2020 par le nouvel exécutif seychellois. L’archipel devrait connaître l’élection présidentielle la plus ouverte de son histoire, entre le camp de l’actuel président, Danny Faure, qui a confirmé sa candidature,

L

et une opposition, devenue majoritaire au Parlement en 2016, regroupée au sein de l’Union démocratique seychelloise (LDS), derrière Wavel Ramkalawan. À charge pour ces dirigeants, en poste ou à venir, de veiller à la bonne santé de l’économie de leurs pays respectifs.

Qu’il s’agisse de Maurice et des Seychelles, pays à revenus intermédiaires, ou de Madagascar et des Comores, qui sont en voie d’émergence, les taux de croissance marquent en effet le pas, essentiellement faute d’investissements dans la diversification économique. Chacun a donc dégainé son plan de relance ou de développement pour redresser la situation, en misant, avec une belle unanimité, sur les multiples possibilités offertes par l’économie bleue.

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215

La chaîne Art de vivre

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Fiches pays OCÉAN INDIEN NGAZIDJA (GRANDE COMORE) Moroni

Comores Azali seul maître à bord

Océan Indien

COMORES

NDZUANI

Mutsamudu (ANJOUAN)

MWALI (MOHÉLI)

Le président a été réélu dès le premier tour en mars.

La priorité est d’attirer les investisseurs internationaux.

30 km

Dzaoudzi

MAORÉ (MAYOTTE) (France)

a également dû renoncer à se lancer dans la course, Pari gagné pour Azali Assoumani. Le chef de l’État comoalors qu’il n’avait été battu que de 4 000 voix par Azali rien, au pouvoir depuis 2016, n’a eu besoin que d’un tour Assoumani en 2016. pour conserver son fauteuil en récoltant plus de 60 % des Débarrassé de ses principaux adversaires, le chef de l’État votes le 24 mars. Un résultat qui n’a rien d’une surprise sortant a eu beau jeu de régler son compte à la douzaine tant le président de l’Union des Comores semble avoir eu d’opposants, incapables de s’entendre sur une candidapour préoccupation essentielle de réviser la Constitution ture unique et qui, plutôt que de mordre sur son électorat, de 2001, qu’il juge dépassée, pour permettre au chef de se sont affaiblis mutuellement. Ils l’État d’exercer désormais deux manont bien essayé de faire descendre la dats au lieu d’un seul. Et ce ne sont population dans les rues de Moroni au pas les violences qui, une fois encore, Nombre d’habitants : 85 100 lendemain de la publication des résulont émaillé ce scrutin présidentiel, PIB par habitant : 1 349 $ tats, mais sans succès. Et personne pas plus que les protestations d’une Espérance de vie : 63,9 ans n’ose aujourd’hui, ni à l’intérieur ni à opposition réunie pour dénoncer l’extérieur du pays, remettre en quesun hold-up électoral qui vont faire Alphabétisation : 49,2 % tion la victoire d’Azali Assoumani. Pas dévier Azali Assoumani du destin Inflation : 3,2 % plus les observateurs internationaux qu’il semble s’être tracé. Car s’il a Indice de développement envoyés sur place que la France qui, bien remis en jeu son mandat plus e humain (sur 189 pays) : 165 depuis de nombreux mois, observe tôt que prévu lors de cette élection Investissements directs étrangers : la plus grande prudence. Mayotte anticipée, le nouveau texte consti8 millions de $ oblige. Les deux pays sont toujours tutionnel, adopté par référendum Dernier changement en pourparlers à propos du statut en juillet 2018, lui permet désormais de président : 2016 de la « quatrième île », aujourd’hui de rester en fonction jusqu’en 2029. département français. Les ministres Croissance du PIB (%) 4,2 des Affaires étrangères multiplient 2,9 2,9 les rencontres avec, à la clé pour les Les mois qui ont précédé ce scru1,2 Comores, un accord de coopération tin ont ressemblé à la chronique qui porterait sur le décaissement d’une victoire annoncée, entre renPIB (milliards de $) de plusieurs centaines de millions forcement du pouvoir présidentiel d’euros investis essentiellement à et affaiblissement des principaux 1,25 1,18 1,17 1,08 Anjouan. leaders politiques du pays. « Tous Une bonne nouvelle pour le pour des raisons pénales », insiste le pays, qui ne dispose pas des fonds camp au pouvoir. L’ex-chef de l’État nécessaires à son développement Ahmed Abdallah Sambi ne pouvait économique, alors que la situation, se présenter à ce poste, réservé cette notamment en matière énergéfois aux ressortissants de la Grande tique, est toujours aussi insuffisante.

Comore, selon le principe de prési2017 2018 2019* 2020* Cela n’a pas empêché l’Union des dence tournante entre les trois îles Comores d’enregistrer un taux de maintenu dans la nouvelle Loi foncroissance de 4 % à la fin de 2018, damentale. De toute façon, le leader soit son meilleur score depuis plus d’une décennie, grâce du parti Juwa est toujours en détention dans le cadre de notamment aux infrastructures – routes, hôpitaux… – l’enquête sur la « citoyenneté économique » qui a rendu réalisées ces deux dernières années. Mais les Comores ses conclusions un an plus tôt. Et malgré la dégradation doivent encore parvenir à attirer les entrepreneurs privés de son état de santé, l’ancien dirigeant a vu toutes ses dont leur économie a besoin. Une priorité pour le prédemandes de remise en liberté provisoire refusées par sident Assoumani, qui dispose d’un nouveau mandat le pouvoir. Mis en examen pour la même affaire, l’anpour mettre son pays sur les voies de l’émergence. cien vice-président Mohamed Ali Soilihi, dit Mamadou, * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Extrême prudence de Paris

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217

Fiches pays OCÉAN INDIEN

COMORES

Madagascar Deuxième chance

MADAGASCAR Toamasina Antananarivo

Fraîchement élu, Andry Rajoelina a cinq ans pour moderniser la Grande Île.

La bonne dynamique économique est boostée par le secteur privé.

300 km

Océan Indien

MAURICE LA RÉUNION (France)

Politique anticorruption

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* ESTIMATION OCTOBRE 2019

l’importance du poste de maire de la capitale, Antananarivo.

Enfin un retour à la normale à Madagascar ? Le 8 janvier, L’opposant explique qu’il conservera ainsi les coudées la Haute Cour constitutionnelle confirmait les résultats franches pour contrer le pouvoir de son grand rival. annoncés – et sitôt contestés – deux semaines auparavant Le mandat de Rajoelina et sa capacité à mettre en œuvre par la Commission électorale nationale indépendante. Ils ses promesses de campagne seront scrutés attentivement consacraient la victoire d’Andry Rajoelina à la présidendans le cadre de l’Initiative Émergence Madagascar (IEMv). tielle avec 55,66 % des voix face à son concurrent, Marc Il est ainsi attendu au tournant sur sa politique anticorrupRavalomanana. Une deuxième victoire pour le milliardaire, tion, la production d’électricité ou les et par la voie des urnes cette fois – en moyens des forces de sécurité. Il devra 2009, il avait emprunté celle des armes également lutter contre l’impunité des pour déposer Marc Ravalomanana Nombre d’habitants : 27 millions trafiquants de bois de rose, résoudre avec le soutien de l’armée.

PIB par habitant : 463 $ la crise financière qui frappe la comEn 2020, le président fraîchement Espérance de vie : 66,3 ans pagnie nationale d’eau et d’électricité élu devrait poursuivre la stabilisation Jirama, endettée à hauteur de 412 milde la vie politique et économique du Alphabétisation : 71,6 % lions d’euros en 2019, et relancer un pays, qui se redresse après la crise de Inflation : 6,7 % secteur touristique prometteur mais 2009. Pour cela, Rajoelina bénéficie Indice de développement toujours fragile. de la stabilité parlementaire qui a e humain (sur 189 pays) : 161 Le président pourra toutefois comptant fait défaut à son prédécesseur, Investissements directs étrangers : ter sur la bonne dynamique éconoHery Rajaonarimampianina. Le chef 349 millions de $ mique, boostée par le secteur privé, de l’État a en effet remporté la majorité Dernier changement qui se remet de la crise de 2009. À la absolue aux législatives de mai, avec de président : 2019 fin de 2019, l’accord financier conclu 84 sièges sur 151. Un chèque en blanc entre Madagascar et le FMI en 2016 après plusieurs mois passés à légiféCroissance du PIB (%) 5,3 5,2 expire: de la capacité du chef de l’État rer par ordonnance – la précédente 5,1 à rassurer les investisseurs dépendra législature ayant expiré le 4 février.

4,2 la conclusion d’un nouvel accord.

Néanmoins, les taux d’abstention très D’un point de vue tant économique forts qui ont caractérisé les élections, PIB (milliards de $) que diplomatique, la victoire de présidentielle (moins d’un électeur Rajoelina lui permet de revenir par la sur deux au second tour) et législatives 13,6 12,5 12 11,4 grande porte sur la scène internatio(60 %), semblent témoigner d’un cernale face à des interlocuteurs qui quatain désaveu des Malgaches pour leurs lifiaient dix ans plus tôt son accession responsables politiques. au pouvoir de « coup d’État ». Visites du président de la Banque mondiale, David Malpass, en avril (avec prêt de Vaincu dans les urnes, Ravalomanana 392 millions de dollars à la clé), du entend continuer à jouer son rôle 2017 2018 2019* 2020* pape François en septembre, du Medef d’opposant. Avec 16 députés (contre International en octobre…

46 indépendants), son parti, le TIM, Rajoelina a également rencontré son lui confère de facto la position de chef homologue français, Emmanuel Macron, à Paris, en mai. de file de l’opposition à l’Assemblée. Mais une loi ratifiée en À la fin de 2019, une commission mixte chargée de résoudre août l’empêche de jouir de ce statut officiel: le texte réserve le différend entre les deux États au sujet de la souveraineté cette fonction à un député – ce que n’est pas Ravalomanana. sur les îles Éparses, réclamée par Madagascar depuis 1976, Une modification qui le viserait directement, ont dénoncé a timidement démarré ses travaux. Elle a la lourde tâche de les députés du TIM, qui ont boycotté le vote. devoir trouver une solution à ce démêlé, qui date de l’indéÀ la surprise générale, Ravalomanana a renoncé à pendance, avant juin 2020. se présenter aux municipales du 27 novembre, malgré

Maurice Paysage en recomposition

10 km

Océan Indien

Port-Louis

MAURICE Océan Indien

Le Premier ministre a été plébiscité lors des élections générales.

L’île est louée pour son climat propice aux affaires.

le rapport « Doing Business » 2019 de la Banque mondiale Les Mauriciens ont offert une éclatante victoire à la coaévaluant l’environnement des affaires, qui place Maurice lition du Premier ministre, Pravind Jugnauth, qui restera en tête des pays du continent et en vingtième position à donc aux commandes du pays ces cinq prochaines années. l’échelle mondiale. L’institution y applaudit un climat L’Alliance Morisien a largement remporté les législatives propice à la création d’entreprises et félicite l’île pour son du 7 novembre et dispose désormais de 42 sièges sur les système fiscal jugé attrayant, sans grande surprise.

70 que compte l’Assemblée. Cette majorité absolue offre la De fait, Maurice est depuis plusieurs années critiquée légitimité des urnes à Pravind Jugnauth, qui avait succédé pour son optimisation fiscale débrià son père, Anerood, en janvier 2017, dée. Depuis 2017, elle figure sur la liste après la démission de ce dernier, alors grise des paradis fiscaux de l’Union que l’opposition avait en vain réclamé Nombre d’habitants : 1,3 million européenne. En juillet, son système de nouvelles élections.

PIB par habitant : 11 360 $ a fait les gros titres de la presse après Le Premier ministre, 57 ans, peut Espérance de vie : 74,9 ans une enquête du Consortium interégalement se targuer d’avoir larnational des journalistes d’investigement battu ses adversaires. Les Alphabétisation : 92,7 % gation (ICIJ), les « Mauritius Leaks », représentants de l’Alliance nationale, Inflation : 0,9 % démontrant comment des multimenée par Navin Ramgoolam, et du Indice de développement nationales profitent du cadre fiscal Mouvement militant mauricien, de e humain (sur 189 pays) : 65 mauricien pour réduire au maximum Paul Bérenger, ont concédé leur Investissements directs étrangers : leurs impôts dans les pays africains défaite. Elle est cuisante pour l’ancien 372 millions de $ où elles exercent. Un tour de passechef du gouvernement : comme en Dernier changement passe légal, encadré par des accords 2014, Navin Ramgoolam a échoué à se de président : 2017 bilatéraux signés entre l’île et plufaire élire dans sa propre circonscripsieurs États du continent, ainsi prition. Pravind Jugnauth a donc prêté Croissance du PIB (%) 3,8 vés de recettes fiscales. Des traités serment à la mi-novembre à la State 3,8 3,7 3,6 dénoncés depuis par plusieurs pays, House. Dans la foulée, il annonçait un dont le Sénégal. nouveau gouvernement composé de En dépit des investissements réa23 membres.

PIB (milliards de $) lisés dans les infrastructures (dont 14,8 témoigne la construction d’une ligne 14,2 14,3 13,2 de tramway), de la mise en place Cette nouvelle administration devra d’un salaire minimum et de la revaaffronter plusieurs dossiers épineux, lorisation de la pension vieillesse, dont celui des Chagos. En mai, le les critiques sociales sont de plus Royaume-Uni subissait un cuisant en plus vives. « Malgré la croissance revers à l’Assemblée générale de économique que votre pays a connue l’ONU, où une majorité de pays lui ces dernières décennies, ce sont les demandait, dans une résolution 2017 2018 2019* 2020* jeunes qui souffrent le plus, qui resnon contraignante, de rétrocéder à sentent le plus le chômage », a averti Maurice d’ici à la fin de l’année cet le pape François en visite à Maurice archipel stratégique qui abrite une en septembre, en s’inquiétant aussi de la préservation base britannico-américaine. de l’environnement. Ce sujet s’est imposé comme une Nul doute que les gagnants des scrutins seront également préoccupation majeure tant Maurice est vulnérable aux confrontés aux fortes attentes sociales des Mauriciens, tempêtes tropicales, de plus en plus destructrices. « Une dont une frange grandissante demande une meilleure grande partie de la population et des actifs productifs est répartition des fruits de la croissance économique. Ces derexposée à de multiples risques induits par les cyclones », nières années, celle-ci est restée stable, passant de 3,5 % en s’inquiétait ainsi la Banque mondiale.

2012 à 3,7 % attendus en 2019. Une conjoncture saluée par * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Épineux Chagos

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219

Bien s’informer, mieux décider ALGÉRIE

NIGER État de choc

TEBBOUNE : LES DÉFFIS D’UN PRÉSIDENT

GABON Enfin la relance ?

Spécial 38 pages

RETROUVEZ

BELGIQUEAFRIQUE

+ D’INFORMATIONS EXCLUSIVES, + D’ANALYSES, + DE DÉBATS POUR MIEUX COMPRENDRE L’ACTUALITÉ

Réunion de famille 8 pages

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3075 DU 15 AU 21 DÉCEMBRE 2019

POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE L’AFRIQUE.

Il est considéré comme le dauphin d’Alassane Ouattara.

Si le président s’abstient de briguer un nouveau mandat, le Premier ministre sera sans doute le candidat du RHDP en 2020. Quel bilan dresse-t-il de son action ?

Quel est son programme ?

Comment juge-t-il les possibles adversaires ?

Interview exclusive.

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Île Praslinn

Seychelles Ambiance de fin de règne

SEYCH H ELLES Île Silhouette

(Archippel central)

Océan Indien

Victooria

La présidentielle de 2020 pourrait se révéler délicate pour le parti au pouvoir.

L’archipel cherche à diversifier son économie.

Île La Digue

MAH HÉ 10 km

ambiance de fin de règne, pour certains symbolisée par Les Seychellois seront bientôt appelés aux urnes. L’élection la mort, en février 2019, de France-Albert René, 83 ans, présidentielle, prévue pour la fin de 2020, bousculera-t-elle président de 1977 à 2004 et monument de la vie politique l’échiquier politique de l’archipel ? Depuis sa cuisante seychelloise. défaite aux législatives de 2016, l’indéboulonnable parti Sur le plan économique, l’archipel fait face à un ralentisau pouvoir semble moins certain de sa victoire. Son candisement de sa croissance. De 4,3 % en 2017, celle-ci est passée dat, le président sortant Danny Faure, a déjà annoncé qu’il à 4,1 % en 2018 et est attendue à 3,5 % en 2019. En cause, briguerait un second mandat. notamment : le recul des projets de S’il occupe le fauteuil depuis plus construction liés au tourisme – prinde trois ans, il s’agira en revanche de cipal secteur économique – en raison sa première campagne pour ce poste Nombre d’habitants : 98 000 du moratoire sur l’octroi de nouveaux en son nom propre. Danny Faure était PIB par habitant : 17 052 $ permis pour les grands hôtels, décidé devenu président après la démission Espérance de vie : 73,7 ans en 2015 et prolongé jusqu’en 2020. La surprise de son prédécesseur, James fréquentation, elle, est restée stable.

Michel, en raison de la défaite histoAlphabétisation : 94 % En 2018, 362 000 touristes ont visité rique de son parti, le Lepep, au scrutin Inflation : 2 % l’archipel – soit le triple de la populade 2016, moins d’un an après sa rééIndice de développement tion locale –, un chiffre en légère auglection, avec une très courte avance, à e humain (sur 189 pays) : 62 mentation, de 3 %, par rapport à 2017. la tête de l’archipel. Danny Faure, son Investissements directs étrangers : Malgré ces bons résultats, la fidèle vice-président, avait alors pris 124 millions de $ dépendance des Seychelles à l’égard le relais pour terminer le mandat de Dernier changement de cette activité et leur endettement cinq ans. de président : 2016 provoquent des inquiétudes. Pour diversifier les ressources, les autoCroissance du PIB (%) rités se sont attelées à développer Le président sortant a été adoubé 4,3 4 « l’économie bleue », en misant sur par sa formation politique, United 3,4 3,3 l’essor d’une aquaculture durable et Seychelles, nouveau nom de l’ex-parti en favorisant la transformation locale unique. Danny Faure espère ne pas PIB (milliards de $) des produits de la pêche, deuxième faire mentir les statistiques: depuis le secteur économique. Autre point de retour du multipartisme, en 1993, sa 1,67 1,64 1,50 1,58 crispation: si le plein-emploi domine formation a remporté tous les scrutins dans l’archipel – le taux de chômage présidentiels. Mais les législatives de y était de 3,5 % au second trimestre 2016 ont redonné de la vigueur à l’opde 2019 –, le secteur privé peine pourposition, qui, pour la première fois, tant à recruter localement une maina obtenu la majorité au Parlement, d’œuvre qualifiée, de plus en plus grâce au rassemblement de plusieurs recherchée. partis au sein de la coalition Linyon 2017 2018 2019* 2020* Mais la principale inquiétude vient Demokratik Seselwa (LDS, « l’union du réchauffement climatique et de la démocratique seychelloise »). montée des eaux, qui menace direcOpposant historique, Wavel tement les 115 îles et îlots seychellois. « Nous avons besoin Ramkalawan représentera LDS à la prochaine présidend’une action internationale coordonnée et décisive », plaitielle. En 2015, il avait perdu d’une marge infime de 193 voix dait ainsi le chef de l’État en avril dans un message vidéo face à James Michel, contraignant l’ancien homme fort du diffusé depuis un sous-marin situé à près de 124 m de pays à un second tour – fait inédit depuis 1993. LDS fera profondeur dans l’océan Indien. Avant d’ajouter: « Ce pronotamment campagne contre la corruption dans cet archiblème est bien plus grand que nous, et nous ne pouvons pas pel que l’Union européenne a placé sur sa liste grise des attendre qu’il soit résolu par les prochaines générations. » paradis fiscaux en 2017. L’opposition mise donc sur une * ESTIMATION OCTOBRE 2019

Le pari bleu

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ANNONCES CLASSÉES

Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

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HEAD OF LEGAL SHELTER-AFRIQUE is a leading pan - African Development Finance Institution and a Bachelor’s Degree in Law (i.e. LLB or equivalent) from a recognized that is dedicated to investment in housing and urban development in Africa. The institution. company provides advisory services and project management services for delivery • Admission to the bar (as an attorney, advocate, barrister or equivalent) in the of large-scale affordable housing projects, as well as lines of credit to financial jurisdiction of qualification. institution to finance access to affordable housing in 44 African countries. The • Qualification to practice English Law will be an added advantage.

Company invites applications from suitably qualified nationals of its member • Experience in international financing in Africa will be an added advantage. countries to fill the position of Head of Legal available at its Regional office • Minimum of 8 to 10 years of combined relevant experience, including in Nairobi, Kenya. international work experience in a commercial, financial or legal advisory institution and/or public sector financial body (e.g. law firm, multi-national Main role and responsibilities corporate, bank, insurance company, investment advisory firm, DFI, Provide administrative and professional leadership to the Company’s legal function Ministry of Finance, National Treasury, Sovereign Wealth Fund).

• Ensures that Company’s operations are conducted in compliance with its • Knowledge of French is an added advantage.

Statutes and constitutive documents, regulations, policies and other legal • Robust background as a banking or finance lawyer. requirements.

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Applicants are invited to send a cover letter illustrating their suitability against the • Ensures that loan agreements, security documents, and other agreements to listed qualifications and detailed curriculum vitae as well as names and addresses which Company is a party are properly negotiated, documented, perfected of the referees to hr@shelterafrique.org and, where applicable duly registered.

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EXECUTIVE DIRECTOR & CHIEF INVESTMENT OFFICER AFRICA FINANCE CORPORATION Africa Finance Corporation (“AFC” or the “Corporation”) is Africa’s investment grade multilateral finance institution established in 2007 to be Africa’s leading infrastructure solutions provider. AFC provides project development, and technical solutions, debt, equity, and financial advisory services. To date, AFC has invested over USD6.6 billion in infrastructure projects in 30 countries across Africa, focusing on energy, transport & logistics, natural resources, heavy industries and telecommunications.

AFC’s unique feature as a multilateral organization is its delineation between membership and shareholding structure. Whilst the Corporation allows for private sector ownership, only sovereign states can be both members and shareholders. The Corporation currently has 26 institutional shareholders, with private sector investors accounting for ~54.7% of AFC’s capital. The Central Bank of Nigeria is the largest shareholder with 44.8% as well as other notable shareholders such as the African Development Bank, the Ghana Infrastructure Fund and the African Reinsurance Corporation. https://www.africafc.org/Who-We-Are/An-Overview.aspx The Corporation is looking to recruit and appoint a new Chief Investment Officer for a period of 3 years, renewable for up to 9 years. This executive will be based in Lagos, Nigeria, to lead and oversee the origination, development, and execution of the infrastructure asset class investment strategies and plans across all of AFC’s sectors.

AFRIKA

Women are strongly encouraged to apply.

Candidates should have the professional experience and standing to command the respect and trust of business and government and will have: • At least 25 years relevant experience; • Experience in complex infrastructure, project and corporate financing; • Experience in originating, executing and managing equity, loan, mezzanine, exotics and guarantee transactions; • Experience in other aspects of managing a world class financial institution including; negotiation, governance, asset and liability management, climate finance, risk management, environmental and social management; • Experience in emerging/frontier market financing and investments in Africa; • Strong analytical, communication and presentation skills.

The successful candidate will be offered an internationally competitive compensation package.

AFC has retained the services of Egon Zehnder for this search. Applicants are requested to send a detailed CV, cover letter, and references to AFC@egonzehnder.com Applications must arrive by email no later than midnight on January 25th 2020. Egon Zehnder will only enter into further correspondence with shortlisted applicants.

RECRUTEMENT - BOURSE

The CIO will have the responsibility to drive the corporate and project finance deployment of AFC’s investment products – debt, equity, mezzanine, project and structured finance to maximise the potential of AFC’s investments and further strengthen the Corporation’s credit rating. This CIO will bring a compelling vision, a deep understanding of infrastructure development and will be a highly credible leader who has had visible leadership roles throughout her/his career internationally and specifically in Africa. The CIO must possess

excellent diplomatic and leadership skills, a natural ability for investment, fundraising, asset management and a proven capability to manage multiple stakeholders; institutional, sovereign, capital markets, regulatory, media and civil society. The CIO will work closely with the CEO, the Executive team and the Board of Directors to develop and execute on strategies to achieve AFC’s mission and goals.

KOMMT!

Une initiative des entreprises allemandes pour les futurs dirigeants de l’Afrique Programme de bourse AFRIKA KOMMT! est une initiative conjointe des entreprises allemandes pour le développement des compétences. Le programme vise les jeunes professionnels hautement qualifiés des pays de l’Afrique avec quelques années d’expérience professionnelle.

Pendant un séjour de 12 mois en Allemagne, un stage de huit mois au sein d’une entreprise partenaire est au cœur du programme. Le stage offre aux participants l’opportunité d’acquérir une expérience de première main des pratiques de gestion et de participer dans des processus de changement économique, social et organisationnel. A partir de cette expérience, les participants peuvent initier des réseaux de coopération entre l’Afrique subsaharienne et les entreprises allemandes.

QUALIFICATIONS / EXPÉRIENCE REQUISE • Diplôme universitaire dans un des domaines suivants: Administration des Affaires, Biologie, Chimie, Communication, Economie, Finance, Gestion des produits, Ingénierie Industrielle, Mécanique ou Electrique, Sciences de la vie, Logistique, Marketing, Médecine, Pharmacie, Physique, Distribution, Ressources Humaines, Santé publique, Technologie Informatique ; • Diplôme des études post-universitaires (par exemple MBA) est un avantage ;

• Deux à cinq années d’expérience professionnelle pertinente ; • Excellentes compétences de la langue Anglaise ; • La connaissance du français, portugais et allemand est un avantage ; • Compétences interculturelles, ouvert aux nouvelles expériences à l’étranger et volonté d’apprendre l’allemand.

DÉTAILS DE LA BOURSE • Vol aller-retour, voyages et logement en Allemagne ; • Frais pour un cours d’allemand ; • Allocation de subsistance ; • Couverture d’assurance maladie, d’assurance-accidents et d’assurance responsabilité civile ; • Courses de Gestion Internationale ; • Frais de relocalisation.

Les applications pour AFRIKA KOMMT! 2020-2022 peuvent être soumises jusqu’au 10 janvier 2020 à travers le système de candidature en ligne sur www.afrika-kommt.de Les candidats sélectionnés seront invités à un centre d’évaluation en Afrique en Mars 2020.

En coopération avec

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RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE Union - Discipline - Travail

MINISTÈRE DE L’ÉQUIPEMENT ET DE L’ENTRETIEN ROUTIER

AVIS D’APPEL D’OFFRES

APPEL D’OFFRES

Date : 17 Décembre 2019 - Accord de Prêt n° IC-P2 - AAO n° T 934/2019 1. Le Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire a reçu un Prêt de l’Agence Japonaise de Coopération Internationale (« la JICA ») afin de financer le Projet de Construction de Trois Échangeurs à Abidjan. Il est prévu qu’une partie des fonds provenant de ce Prêt sera utilisée pour les paiements éligibles en vertu du Marché du Projet de Construction de Trois (03) Échangeurs à Abidjan.

2. L’Agence de Gestion des Routes (AGEROUTE) invite, par le présent Avis d’appel d’offres, des Soumissionnaires éligibles à présenter leurs offres sous pli fermé, pour la réalisation des travaux de construction de Trois (03) Échangeurs sur le Boulevard François Mitterrand, aux carrefours de l’École de police, de la Riviera 3 et de la Palmeraie, à Abidjan (« les Travaux »).

3. L’appel d’offres sera mené selon les procédures spécifiées dans les Directives applicables pour les passations de marchés sous financement par Prêts APD du Japon, et il est ouvert à tous les Soumissionnaires des Pays d’origine éligibles, tels que définis dans la Section V du Dossier d’Appel d’Offres.

4. Les Soumissionnaires éligibles intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires et examiner le Dossier d’Appel d’Offres dans les bureaux du Sécrétariat de la Cellule de Coordination du PTUA (CC-PTUA) dont l’adresse figure ci-dessous, les jours ouvrables (lundi au vendredi) de 8 heures à 12 heures et de 15 heures à 17 heures.

5. Les Soumissionnaires intéressés peuvent obtenir le Dossier d’appel d’offres complet sur soumission d’une demande écrite à l’adresse ci-dessus et moyennant paiement des frais non remboursables suivants : deux cent mille francs CFA (200 000 FCFA).

6. Les dispositions des Instructions aux soumissionnaires et du Cahier des Clauses administratives générales sont celles du Dossier Standard d’Appel d’Offres pour les passations de marchés de travaux financés par Prêts APD du Japon.

7. Les offres doivent être remises à l’adresse ci-dessus au plus tard le 17 mars 2020 à 10 heures 00 temps universel et doivent être accompagnées d’une garantie d’un montant de Un milliard six cent cinquante millions de francs CFA (1 650 000 000 FCFA), ou de leur contre valeur dans une monnaie convertible.

8. Les offres doivent être valides durant une période de cent vingt jours (120) jours suivant la date limite de dépôt des offres.

9. Les offres seront ouvertes en présence des représentants des Soumissionnaires qui souhaitent assister à l’ouverture des plis le 17 mars 2020 à 10 heures 30 minutes temps universel, à la salle de réunion de la Cellule de Coordination du PTUA, sise, à Cocody Riviéra 2, Eglise Sainte Famille,Lot 29 04, îlot N° 242.

10. Le marché issu du présent Appel d’offres sera soumis aux formalités de timbres et droit d’enregistrement et à la redevance de régulation de 0.5% du montant Hors Taxes du Marché. Tous ces frais seront pris en charge par l’Etat de Côte d’Ivoire. La proposition financière du soumissionnaire doit inclure cette redevance.

11. Le marché issu de cet Appel d’Offres sera passé sur prix unitaires.

12. Le délai d’exécution des travaux est de : trente-trois (33) mois.

L’adresse à laquelle, il est fait référence aux points 4 et 7 est la suivante : AGEROUTE Secrétariat de la Cellule de Coordination du PTUA Sis Cocody Riviera 2, Eglise Sainte Famille, Lot 2904, îlot N° 242 08 BP 2604 ABIDJAN 08 - CÔTE D’IVOIRE Tél. : (225) 20 25 10 00 / 20 25 10 02 / 20 25 14 82 - Fax : (225) 22 51 01 51 - Site web : www.ageroute.ci Email : ageroute@ageroute.ci et copie à isouattara@ageroute.ci et bopeyena@ageroute.ci Le Directeur Général de l’AGEROUTE, DIMBA Pierre.

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Retrouvez

SECRÉTARIAT DE SMART AFRICA

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL POUR LE RECRUTEMENT D’UN PROJECT MANAGER ET D’UN CABINET DE CONSULTANTS RELATIFS À L’INITIATIVE DE SMART AFRICA SUR L’IDENTITÉ NUMÉRIQUE EN AFRIQUE

toutes

1. Le Secrétariat de Smart Africa lance un appel d’offres dans des enveloppes fermées aux candidats éligibles qui remplissent les conditions requises définies dans les Termes de Références (TdR) suivants :

nos

• TdR pour le recrutement d’un Project Manager pour l’initiative sur l’Identité numérique de Smart Africa : https://smartafrica.org/careers_archive/recruitmentof-a-consultancy-firm-to-develop-a-digital-id-blueprint-for-smart-africamember-states-that-facilitates-and-enables-pan-african-interoperability/ • TdR pour le recrutement d’un cabinet de consultants pour l’élaboration d’un plan directeur (blueprint) pour une identité numérique pour l’Afrique : https://smartafrica.org/careers_archive/recruitment-of-a-consultant-projectmanager-in-charge-of-digital-identity/

3. Les offres doivent être soumises à l’adresse ou à l’adresse électronique indiquée au point 3 au plus tard le 10 janvier 2019 à 15 h 30. Les offres tardives ne seront pas acceptées.

Les offres seront ouvertes en présence des représentants des soumissionnaires s’ils le souhaitent à l’adresse indiquée, le 10 janvier 2020, à 13 heures. Les offres doivent rester valables pendant une période de quatre-vingt-dix (90) jours à compter de leur ouverture.

sur le site : www.jeuneafrique.com

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2. Les candidats intéressés peuvent obtenir des informations auprès du Secrétariat de Smart Africa (www.smartafrica.org/jobs) et demander des renseignements supplémentaires à l’adresse électronique suivante : procurement@smartafrica.org

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POST-SCRIPTUM Fouad Laroui

Critiquez-les toutes – ou aucune a se passe dans la ville d’Utrecht, où fut signé en 1713 le fameux traité qui mit fin à la guerre de succession d’Espagne et signala le début du déclin du pays des hidalgos… mais qu’ai-je à divaguer là-dessus? Ce n’est pas de cela dont il s’agit. C’est un peu par hasard que mon histoire se déroule à Utrecht. Il y a quelques jours, dans une sorte d'université du troisième âge de cette ville, un conférencier est en train d'évoquer Avicenne, Razi et Alzahen quand soudain… (un peu de suspense) … quand soudain un homme d’un certain âge, au bord de la congestion, se dresse et l’interrompt : – Monsieur, vous nous parlez de l'Âge d’or des sciences arabes, je veux bien croire qu’il y en eut un, je n’ai pas vérifié, je n’y étais pas ; mais parlez-nous plutôt d’aujourd’hui, de notre époque troublée, de la violence inhérente à l’Islam !

Silence stupéfait dans la salle.

Puis quelques murmures signifient au butor qu’on n’interrompt pas un conférencier pour lui intimer de changer séance tenante de sujet.

Mais l’homme reste debout, le sourcil froncé, comme s’il exigeait une réponse. À en juger par ce qui s’ensuivit, ce n'était pas la première fois que

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l’universitaire se trouvait dans ce genre de situation. Il était armé. Non pas qu’il dissimulât un tromblon sous son pourpoint ou un poignard dans ses chausses, mais il avait un petit livre qu’il tira prestement de sa serviette. Il susurra: – Cher monsieur, je ne peux qu'être d’accord avec vous.

Et il se mit à lire des extraits du livre sacré. Il n’y était question que de mises à mort, de lapidations, de massacres : « Ils firent sortir du camp le blasphémateur et le lapidèrent » ; « Celui qui mérite la mort sera exécuté sur la déposition de deux ou de trois témoins… »; « Si un homme livre à Moloc l'un de ses enfants, le peuple le lapidera ». À chaque phrase, l’irascible butor exprimait bruyamment son dégoût: « honteux! », « horrible! », etc. À la fin, le conférencier lui demanda son avis. L’autre rugit : – Vous voyez bien qu’il est sanguinaire, le Coran! À quoi le conférencier rétorqua : – Mais monsieur, toutes ces citations sont tirées de la Bible, plus précisément du Lévitique. Le Nouveau Testament prêche l’amour, certes, et Jésus n'était pas violent, mais

l’Ancien Testament, c’est le bruit et la fureur ; et quelques petits massacres, holocaustes et lapidations. On se demande s’il s’agit du même Dieu.

Le fâcheux, ébahi, s’assit et se tint coi. Mais je ne suis pas sûr qu’il ait compris la leçon.

Il y a une génération, avant l’Ayatollah, l’islamisme et le 11-Septembre, l’homme qui apportait la contradiction dans ce genre de conférences était souvent affable et modéré, et on ne pouvait lui dénier un trait important de son caractère : il s’efforçait à l’objectivité. Lorsque le sujet était l’islam, il ne manquait pas de souligner que toutes les religions sont porteuses de violence – toutes peuvent être dévoyées. Cette affirmation peut se discuter, mais elle présente l’avantage de ne pas accabler une des trois religions abrahamiques en épargnant les autres, alors qu’elles sortent du même moule.

Le choix du mensonge

Aujourd’hui, cet honnête homme semble avoir disparu. De plus en plus d’intellectuels et de politiciens ont choisi de restreindre leur critique des religions au seul islam.

Même quand ils savent ce qu’est la réalité des choses, ils font désormais le choix cynique de mentir. Heureusement qu’il y a encore des Morin, des Vaneigem ou des Sloterdijk (dans La Folie de Dieu, celui-ci dénonçait les excès des trois monothéismes) pour sauver l’honneur. Critiquer les religions, pourquoi pas ? Mais soit on les critique toutes, soit on n’en critique aucune.

Les religions sortent toutes du même moule.

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