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Lieu de travail sans obstacles

Lorsque les personnes touchées retournent à leur poste de travail après un accident, des adaptations architecturales sont souvent nécessaires.

Felix Schärer

Dès la rééducation primaire, la question de la réinsertion professionnelle est abordée. C’est aussi le moment d’évaluer s’il faut procéder à des travaux de modification du poste de travail lorsque la personne concernée souhaite retourner chez son ancien employeur. Cela peut également devenir nécessaire en raison de changements de l’état de santé. Afin de mesurer ces besoins, le service d’ergothérapie organise une visite du lieu de travail avec les architectes du Centre construire sans obstacles (CSO) de Muhen. Le rapport de visite du CSO énonce les mesures à prendre et, sur demande, contient en plus une estimation des coûts. Le mandat de prestations du CSO est ainsi rempli.

Accès au monde du travail

La demande d’offres, l’argumentation auprès de l’office AI compétent et la direction des travaux restent souvent du ressort de l’employeur et/ou de la personne concernée. En cas d’adaptation complète du poste de travail, l’office AI pourrait en théorie approuver les frais d’accompagnement des travaux. Dans la pratique, cette prestation est toutefois souvent refusée. Pour que les personnes en situation de handicap puissent faire partie intégrante de notre société sur un pied d’égalité, l’accès au marché du travail est extrêmement important. C’est également ce que stipule la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées. Or les deux exemples suivants montrent que le chemin est souvent ardu.

Cas no 1: commerce de détail Madame A. souffre d’un handicap moteur depuis 2014 et travaille à la caisse d’un magasin suisse. Son état de santé s’étant détérioré, elle est devenue de plus en plus dépendante d’un fauteuil roulant et a fait appel au Centre suisse des paraplégiques pour un nouveau traitement. Avec des collègues de l’ergothérapie du CSP et de la Fédération suisse de consultation en moyens auxiliaires (FSCMA), nous nous sommes rendus sur le lieu de travail de cette patiente qui devait reprendre son activité professionnelle le 23 novembre 2022.

Le grand magasin dans lequel travaille Mme A. a été entièrement transformé et rénové en 2019. Dès ce moment, l’employée s’est efforcée de convaincre l’entreprise de veiller à l’accessibilité des lieux, mais cela a été difficile. Nous n’avons pas pu consulter le permis de construire. La question de savoir si, selon la loi sur l’égalité des personnes handicapées (LHand), cette transformation aurait dû être réalisée sans obstacles ou si, le cas échéant, il existe également un problème de mise en œuvre, reste ouverte.

Lors du conseil en construction, le CSO a visité toutes les pièces concernées et a fait des propositions d’adaptation sans obstacles. Pour que Madame A. puisse passer de l’espace clients, où se trouve la caisse où elle travaille, à l’espace réservé au personnel, il faudrait un monte-escalier. Après l’envoi du procès-verbal détaillé, qui consignait l’état actuel, ainsi qu’une liste des adaptations nécessaires (monte-escalier et automatisation de la porte), le conseil gratuit en construction était terminé. Le projet a été transmis au détaillant pour qu’il le réalise.

En décembre 2022, le représentant du conseil social et le chef de chantier internes à l’entreprise de Mme A. ont pris contact avec notre cliente. Les devis ont été rassemblés et l’employeur a décidé de préfinancer les mesures d’aménagement, avec l’intention de déposer une demande auprès de l’office AI compétent. ParaWork et le CSO l’ont accompagné dans cette démarche. À ce jour (début avril), l’AI n’a encore rendu aucune décision – et ce, quatre mois après le début prévu des travaux. Une situation intolérable, en particulier pour l’employée. «Mes efforts pour pouvoir retravailler durent depuis trois ans et demi.» commente Madame A, désabusée. La transformation du poste de travail, y compris le monte-escalier, devrait commencer fin avril, si tout va bien.

Cas no 2: aéroport

Le poste de travail de Monsieur B. se trouve dans la zone de sécurité d’un aéroport suisse. Avant de pouvoir entrer ou sortir de l’enceinte, un contrôle précis du personnel est effectué, comme pour les passagers et passagères. À l’étage inférieur (rez-dechaussée surélevé), il y a des salles avec des écrans. C’est de là que l’ensemble de l’aéroport est surveillé et contrôlé. Le premier étage abrite des bureaux. Monsieur B. a deux postes de travail: un au rez-de-chaussée et un autre à l’étage.

Le 3 décembre 2021, le CSO les a tous les deux examinés avec Monsieur B., son ergothérapeute, le coach professionnel de ParaWork et des représentants de l’entreprise de sécurité ainsi que de la FSCMA. Dans ce cas également, le CSO a rédigé un rapport détaillé avec des propositions d’adaptation concrètes. Étaient proposés des aménagements de l’accès et des toilettes, un monte-escalier et l’automatisation des portes. En outre, le CSO a établi une estimation approximative des coûts de construction et a obtenu un devis d’un installateur de monte-escaliers.

Ce dossier et la justification des moyens auxiliaires de l’ergothérapeute ont permis de déposer une demande auprès de l’AI. En règle générale, la FSCMA donne un deuxième avis et établit aussi une expertise qu’elle remet à l’AI. Le 6 juillet 2022, l’office AI compétent a rejeté la demande, car selon un permis de construire antérieur, le bâtiment serait exempt d’obstacles et conforme à la LHand. L’Institut de conseils juridiques de l’ASP est intervenu et l’AI a partiellement révisé sa décision le 7 mars 2023. Les coûts de planification et de direction des travaux n’ont pas été approuvés, bien que les monte-escaliers extérieurs nécessitent un permis de construire dans le canton concerné. Cette décision a été rendue près d’un an et demi après l’éva- luation du poste de travail. Une telle situation est intolérable pour la personne concernée qui souhaite travailler, mais aussi pour son employeur. Dans une entreprise comme celle de l’exemple présent, il est important que des spécialistes, familiarisés avec les normes de sécurité strictes, s’occupent des projets de construction de ce type. Nous estimons que les frais de planification et de direction des travaux devraient être pris en charge par l’AI au même titre que les coûts de construction.

Grâce à la Fondation suisse pour paraplégiques et à l’employeur, qui participent aux dépenses actuellement non couvertes dans le cadre d’un préfinancement dont la procédure administrative est simplifiée, la transformation est maintenant planifiée et pourra, espérons-le, être réalisée rapidement. La question de savoir si l’AI sera à nouveau sollicitée est actuellement à l’étude.

Ces deux exemples soulignent l’importance des interventions du Centre construire sans obstacles et des autres institutions. À l’avenir, le réseau d’intérêts pour la construction sans obstacles s’investira de manière ciblée pour que la LHand soit systématiquement appliquée et dans tous les projets de construction qui le justifient, jusqu’à la réception des travaux. C’est la seule façon de réussir l’inclusion. Insertion

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