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Produits locaux et bio à la restauration collective de Lons-le-Saunier

La restauration municipale de Lons-le-Saunier sert cinq mille repas par jour aux scolaires, personnes âgées à domicile, hôpitaux. La majorité des produits y compris l’eau sont locaux et plus de 20 % de ces repas sont « bio ». Ville active du PNNS depuis 2007, Lons mise sur l’accessibilité au plus grand nombre d’une nourriture de qualité, dans le respect d’un commerce équitable local et sans surcoût majeur pour le budget communal.

Lons-le-Saunier, capitale du Jura, mise sur la qualité de vie. Ses thermes, sa gastronomie, ses monuments et paysages ont fait la réputation de cette ville qui a vu naître l’auteur de la Marseillaise : Rouget de l’Isle. La collectivité gère en direct son eau et sa restauration. Pour protéger sa ressource en eau (contaminée en 1950 par un milligramme de nitrates puis vingt-cinq en 1980), la Ville a passé des contrats avec les agriculteurs propriétaires de terrains sur la plaine de captage. Actées en 1992, les conventions incitent à réduire les intrants lors des cultures et préconisent même la culture biologique. En 2001, un premier agriculteur souhaite cultiver du blé bio. Pour l’aider, la Ville propose d’acquérir ses blés et de les faire transformer afin de servir du pain bio dans la restauration collective, laquelle travaillait déjà sur l’amélioration de la qualité de son pain. C’est aujourd’hui soixante tonnes de blé issu de la filière du GIE Bio Comtois, dont vingt-cinq tonnes proviennent de la plaine de captage, qui sont consommées en restauration collective chaque année. Le surcoût global des achats, pris en charge par le service restauration, s’avère, a contrario, très rentable pour le service de l’eau, qui a pu réduire ses investissements dans des filtres à particules, extrêmement coûteux.

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Yaourts locaux « bio »

Forte de cette expérience, la municipalité a décidé, au regard de la balance agricole départementale, de travailler sur trois autres axes. Les produits laitiers, fleuron de la gastronomie franc-comtoise, sont venus agrandir la famille des produits bio locaux. La rencontre et la collaboration entre les agriculteurs bio locaux et l’École nationale de l’industrie laitière et des biotechnologies (Enilbio) de Poligny a permis de fabriquer des yaourts avec du lait bio local dans les locaux de l’Enil. Un appel d’offres a ensuite été lancé, en 2005, pour l’achat de bœufs vivants, abattus à l’abattoir de Lons-le-Saunier, puis consommés au self de la cuisine municipale. C’est le travail engagé avec les chambres départementales et régionales d’agriculture qui a permis de multiplier et reconduire ces expériences sur d’autres sites de la région. Ces collaborations ont, enfin, permis de voir émerger de jeunes maraîchers bio qui, grâce au soutien des élus et du maire de la ville, récoltent aujourd’hui des légumes qui sont en partie consommés dans la collectivité.

Débouchés pour agriculteurs locaux

La réussite de la restauration municipale de Lons-le-Saunier est essentiellement due à une volonté forte des personnes en responsabilité tant au niveau de la Ville que de la cuisine. La présence systématique d’un représentant des intérêts du service de restauration lors des réunions agricoles a permis de faire connaître les ambitions et les objectifs en termes d’approvisionnement. Il est impératif que la cuisine soit identifiée par les acteurs agricoles locaux comme un débouché pour leurs produits. La restauration collective est un des plus grands consommateurs de produits. C’est ce qui permet aux agriculteurs de livrer de larges quantités de matière et d’être sûrs d’être rémunérés convenablement. La consommation de ces matières, tout au long de l’année, permet aussi aux producteurs de vivre de leurs fabrications. Elle supprime aussi, parfois, des intermédiaires qui n’apportent pas de valeur ajoutée aux produits.

Mais les efforts doivent être partagés. Les acteurs de la restauration collective doivent aussi remettre en question l’ensemble des pratiques actuelles et s’orienter vers le type de produits et de conditionnement que sont susceptibles de livrer les acteurs locaux. Un choix de produits bruts ou de conditionnements non négociables peut bloquer les capacités de fourniture des acteurs locaux. Une communication importante doit donc être faite afin de sensibiliser les convives à la qualité et à la provenance des matières premières.

Enfin, différents choix s’offrent au responsable de l’intégration de produits bio locaux dans la restauration collective mais avec la contrainte des marchés publics, qui laissent toutefois aujourd’hui davantage de latitude dans le choix des fournisseurs. Pour promouvoir les approvisionnements régionaux, il faut connaître la capacité de réponse des acteurs locaux et ne pas bloquer leur capacité à postuler à ces marchés, s’adapter pour que ces marchés ne soient pas réservés aux généralistes de la fourniture alimentaire.

Un repas bio sur cinq permet d’atteindre le seuil des 20 % fixé par le Grenelle de l’environnement et les circulaires du Premier ministre. L’intégration, un par un, des produits dans la production est plus longue mais permet de donner plus de chance aux producteurs locaux et les aide à s’engager dans une démarche gagnant/gagnant. L’ensemble de ces choix ne peut se faire sans une volonté forte et incitative des élus locaux. La restauration municipale de Lons-le-Saunier a, d’ores et déjà, pu atteindre cet objectif de 20 % grâce à un engagement à tout niveau des acteurs en la matière. La réussite de tels projets repose prioritairement sur la motivation d’un personnel de restauration qualifié ou formé. Par ailleurs, il semble préférable, pour rester dans l’esprit des produits bio, d’instaurer des critères de proximité et un principe de commerce équitable local pour que ces actions puissent durer dans le temps.

Didier Thévenet

Responsable de la restauration municipale, Lons-le-Saunier, Jura.

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