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Ministère de la Transition écologique

TAINUI ATEA : LA PLUS GRANDE AIRE MARINE PROTÉGÉE DU MONDE

Après l’annonce faite à la conférence des Nations Unies sur les océans en juin à Nice par le président Moetai Brotherson, l’assemblée de la Polynésie française a approuvé à l’unanimité le changement de statut de l’aire marine gérée en aire marine protégée.

LE RÉSULTAT DE PLUSIEURS ANNÉES DE CONSTRUCTION

L’aire marine gérée de Polynésie française – Tainui Atea – a été créée en 2018 et s’étend sur l’ensemble de la ZEE du territoire, soit 4,55 millions de km2. Elle a pour objectif la préservation des espèces marines, notamment les mammifères marins, requins, raies, tortues et oiseaux marins qui ont fait l’objet d’une protection réglementaire progressive depuis 2002. Elle vise aussi l’utilisation durable des ressources à travers l’accompagnement d’un modèle de pêche local soutenable. La Polynésie a graduellement fait le choix depuis 1997 d’interdire dans ses eaux les pratiques les plus impactantes, comme la pêche à la senne ou à la palangre de fond, pour n’autoriser que les navires palangriers locaux, certifiés depuis 2018 par l’écolabel MSC. Enfin, la récente consolidation de son plan de gestion et de ses instances de gouvernance ont été des étapes structurantes pour la reconnaissance de cet espace en aire marine protégée au niveau international.

La France, deuxième espace maritime mondial, s’appuie sur cette décision de classement en aire marine protégée pour atteindre ses objectifs de 30 % d’océans protégés d’ici 2030.

UNE PROTECTION RENFORCÉE

En septembre, la Polynésie a accentué par arrêté la protection de Tainui Atea en précisant les règles d’encadrement de la pêche, en délimitant des secteurs, autour des Gambier et au nord-ouest des îles de la Société, où toute activité extractive est interdite ou encore en excluant toute possibilité d’exploitation des grands fonds marins. Un calendrier de travail a par ailleurs été défini pour aboutir, en juin 2026, au renforcement de la protection sur les îles Australes et aux Marquises. « La Polynésie française a fait le choix ambitieux d’une protection élevée de son espace maritime pour lequel l’État français met déjà en place d’importantes actions de surveillance qui seront encore accrues, notamment sur les espaces côtiers et proche côtiers », explique le service État des Affaires maritimes.

Raie manta accompagnée de poissons pilotes.
© Simon Hilbourne

L’ACCOMPAGNEMENT DE L’OFB

« Ces dernières années, l’OFB s’est fortement impliqué aux côtés des services du Pays pour accompagner la création de cette aire protégée, notamment en coordonnant la rédaction de son plan de gestion en concertation avec l’ensemble des acteurs. L’OFB soutient aussi, en partenariat avec l’État (Fonds vert) et le Pays, divers projets de connaissance des espèces protégées et des écosystèmes marins portés par les associations et acteurs locaux pour éclairer la gestion de Tainui Atea », souligne Sophie Marinesque, déléguée territoriale de l’OFB en Polynésie française.

Baleine à bosse prenant sa respiration à la surface de l’eau.
© Susan Harris

INTERVIEW CROISÉE

MOETAI BROTHERSON, PRÉSIDENT DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE, ET ALEXANDRE ROCHATTE, HAUT-COMMISSAIRE DE LA RÉPUBLIQUE EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Moetai Brotherson
Alexandre Rochatte
• Comment va se traduire concrètement la mise en œuvre en Polynésie française de la plus grande aire marine protégée du monde ?

Moetai Brotherson - Cette aire protégée ambitieuse prend vie grâce à de nouvelles règles fortes, dont l’interdiction de l’exploitation minière des fonds marins et des dispositifs de concentration de poissons (DCP) dérivants, l’encadrement de la pêche durable et la création de zones réservées aux activités traditionnelles, vivrières et scientifiques afin de protéger les écosystèmes fragiles.

Les instances de gouvernance redéfiniront bientôt, à travers une actualisation du plan de gestion, les actions concrètes pour préserver les espèces marines emblématiques, renforcer les écosystèmes et soutenir un développement bleu vertueux.

Lors de la 3e Conférence des Nations unies sur l’Océan (UNOC-3) en juin 2025 à Nice, la France a annoncé la création de la plus grande aire marine protégée du monde en Polynésie française.

Alexandre Rochatte - Cette nouvelle aire marine protégée vient consacrer un modèle polynésien de préservation de l’Océan qui a montré sa force lors de la 3e Conférence des Nations unies sur l’Océan, à Nice en juin dernier. Il prône une approche respectueuse de l’Océan, qui concilie développement soutenable d’une pêche locale et préservation des espèces marines.

Je salue l’inscription de l’interdiction d’exploiter les grands fonds marins dans le nouveau cadre réglementaire adopté pour consolider cet espace protégé. Je salue également l’approche progressive retenue par le Pays pour mettre en œuvre ce classement de manière concertée.

• Quels seront les défis à relever pour répondre à cette ambition de protection du milieu marin polynésien ?

Moetai Brotherson - Ils portent sur l’équilibre entre conservation, pêche durable et tourisme responsable, essentiels à nos archipels. Garantir l’application des nouvelles mesures s’avère crucial.

La protection d’un espace maritime aussi étendu [presque autant que l’Europe, NDLR] demande des moyens accrus, une bonne coordination locale et une coopération internationale. Il s’agit aussi d’œuvrer en faveur d’une gouvernance mondiale de l’océan pour réduire les pressions exogènes : effets du changement climatique, pêche non durable, usage massif de DCP dérivants et velléités d’extraction minière, qui menacent directement la biodiversité polynésienne.

Alexandre Rochatte - L’État et le Pays doivent poursuivre le travail engagé ensemble bien avant Nice. Au regard du défi que représente la préservation d’un tel espace, l’accompagnement de l’État en matière de surveillance et de contrôle, mais aussi d’expertise pour sa connaissance et sa gestion, sera décisif pour être à la hauteur de l’ambition.

C’était tout l’enjeu de la réunion du comité d’orientation stratégique maritime que nous avons organisée à la rentrée avec le Président Brotherson et le Cluster maritime de Polynésie française. Je peux vous assurer que l’État mettra tout en œuvre pour être au rendez-vous de cet engagement historique.

Rédaction et interview : Lucie Labbouz

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