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découvrir Saint-Remy-Geest, plus beau village de Wallonie
BERTHET, RADELET, SMOES, …
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Le Walhinois est le nouveau Fonctionnaire délégué du Brabant wallon. Il succède à Nathalie Smoes. L’homme connait la maison. Il œuvre dans l’ombre depuis plus de 15 ans. Sa mise en lumière ne devrait toutefois pas faire évoluer sa vision du Brabant wallon.
Texte et photo : Xavier Attout
Le calme après la tempête. Après douze mois pour le moins mouvementés, les services du fonctionnaire délégué du Brabant wallon ont un nouvel homme fort. Cédric Harmant prend le relais de Nathalie Smoes, absente depuis le 3 juin 2021 pour cause de maladie et visée dans le même temps par une procédure disciplinaire. Si le poste est occupé ad interim, Willy Borsus a bien confirmé officiellement le Walhinois dans ses fonctions. De quoi donner une certaine légitimité autour de sa personne et lui permettre de tenter de restaurer plus aisément un climat de confiance. « La fonction n’a jamais été vacante car le CoDT prévoit la continuité, lance-t-il. Cette dernière année ne fut pas facile pour l’ensemble du service, partagé entre les incertitudes liées à l’absence de la Fonctionnaire déléguée en titre, et l’image parfois injustement négative relayée dans les médias. Je tiens donc à remercier chaleureusement mes collègues pour avoir continué à remplir nos missions. »
À 44 ans, Cédric Harmant accède à une fonction qui n’a jamais été un objectif de carrière. « Je n’y pensais pas en effet chaque matin en me rasant », sourit-il. Architecte de formation (La Cambre), il fait un bref passage dans un petit bureau d’architectes avant de prendre la route de Wavre et de la fonction publique. Il y fait son entrée en 2006. Thierry Berthet est alors aux commandes. Il ne le croisera que quelques mois. Christian Radelet prendra ensuite le relais. Les deux hommes se côtoieront pendant 13 ans avec, pour Cédric Harmant, un rôle de fidèle bras droit. « Il nous a laissé beaucoup d'autonomie dans notre travail, ce qui était une belle marque de confiance, et nous a permis de gagner en compétence. » La collaboration avec Nathalie Smoes fut par contre bien plus éphémère. La suite est à tracer. « Lorsque la nomination pour ce poste s’ouvrira, je postulerai bien évidemment. Mais je vois surtout ma fonction actuelle comme la poursuite du travail entamé depuis longtemps. Je ne vais pas radicalement changer suite à cette promotion. J’ai surtout eu un coup de foudre pour l’aménagement du territoire et l’urbanisme avant d’avoir l’idée d’y faire une grande carrière. »
CENTRALITÉ ET CHANGEMENT CLIMATIQUE
La fonction de fonctionnaire délégué a perdu de sa splendeur depuis les années 90 où elle était toute puissante. Une évolution qui s’est encore accentuée avec le CoDT. « Cette nouvelle orientation ne me dérange pas. Nous avons désormais davantage un rôle de conseil par rapport aux communes (NDLR : 11 communes peuvent ou vont bientôt pouvoir prendre des décisions en toute autonomie via la décentralisation). Cela nous permet de remettre des avis plus tranchés. » L’urbanisation du Brabant wallon est un fait indéniable. Et elle est loin d’être terminée. « La pression foncière reste importante, y compris sur les zones non urbanisables. L’enjeu, davantage encore avec la perspective du Stop au béton, est de renforcer les projets dans les centres. La densification est encore trop souvent vue négativement. Alors qu’elle peut vraiment être porteuse d’une meilleure qualité de vie. La mobilité doit également nettement évoluer. On ne peut pas se passer de voiture dans certaines parties du Brabant wallon, mais on peut par contre faire évoluer la mobilité et diminuer la dépendance à la voiture. L’amélioration de la qualité des espaces publics et l’attention portée aux effets du changement climatique sur le territoire (dont les inondations et ilots de chaleur) sont deux autres points sur lesquels je serai particulièrement attentif. »
Cédric Harmant n’est pas un novice. Il est bien connu en Brabant wallon. Et possède donc bien évidemment son lot de détracteurs. « Il faut faire avec. Quand nous refusons un permis, le demandeur n’est pas content. Quand nous l’octroyons, c’est son voisin qui nous en veut. Notre mission est donc souvent celle d’un équilibriste. Ce que je souhaite avant tout, c’est être transparent dans mes avis et que mes décisions soient bien comprises, ce qui est essentiel si on veut les faire accepter. L’urbanisme est une matière compliquée, avec des enjeux financiers et une charge émotionnelle, tant pour les demandeurs que les riverains. » Une fonction qui attire peu néanmoins, si on observe les difficultés de recrutement dans toute la Wallonie. À Wavre, il manque encore sept employés pour remplir le cadre. « Des engagements sont prévus à court terme, dont un spécialiste en aménagement du territoire. Lorsqu’ils se concrétiseront, nous pourrions il est vrai exercer encore mieux nos missions. »
UN CYCLISTE À LA FIBRE SOCIALE
Marié, père de trois enfants, Cédric Harmant vit dans un habitat groupé à Walhain, à deux pas de la nationale 4. Une voirie qu’il emprunte chaque matin à vélo pour rejoindre son lieu de travail dans le centre de Wavre. « J’y vais pratiquement tous les jours à vélo électrique. Notre déménagement en septembre au zoning nord m’obligera à faire quelques kilomètres supplémentaires… » Si ce cinéphile se détend aujourd’hui aussi en lisant des BD et des romans graphiques, il a longtemps donné de son temps dans l’aide à la personne. Dont notamment celles qui étaient porteuses d’un handicap. « J’ai moins de temps aujourd’hui pour me consacrer à ces activités mais, pendant de longues années, j’ai aidé des associations à améliorer le quotidien de ces personnes. J’ai toujours eu une fibre sociale. C’est notamment cela qui m’a motivé à entrer dans la fonction publique, pour œuvrer dans l’intérêt général. »

« L’idée est de ne pas permettre de faire n’importe quoi »
Après Mélin, Saint-Remy-Geest est le second village du Brabant wallon à être labellisé « Plus beau village de Wallonie ». De quoi permettre une préservation urbanistique, paysagère et architecturale de l’entité. Un label qui entraine également quelques contraintes sur le plan règlementaire pour les futurs demandeurs.
Texte : Xavier Attout – Photos : Rita Photographie
Découvert sous le soleil, il ressemble à un paisible petit village du sud de la France. Deux rues principales, une église, un espace pavé qui fait office de place de village, une petite école, aucun commerce et, surtout, des dizaines de maisons assemblées à la pierre de Gobertange. Se plonger dans les rues de Saint-Remy-Geest, un petit village situé à deux pas de Jodoigne, c’est partir à la découverte d’un monde où le temps semble s’être figé. Des caractéristiques particulières qui en font depuis le mois de mai l’un des trente-et-un « Plus beaux villages de Wallonie ». Le second du Brabant wallon, après Mélin, le village voisin construit dans le même moule. Le « pays blanc » se voit ainsi récompensé de la beauté de son bâti. « C’est une belle satisfaction, explique Frédéric Jacoby, président de Vivre à Saint-Remy, l’association qui a déposé le dossier de candidature, en concertation avec les autorités communales. L’objectif de cette candidature était en quelque sorte de se protéger contre une évolution du village qui pourrait nuire à son avenir. Nous sommes maintenant soulagés que la préservation urbanistique, paysagère et architecturale soit officiellement reconnue. »
Installé sur le flanc de la colline, Saint-RemyGeest compte précisément 222 bâtisses et 524 habitants. « Le recensement a été réalisé l’an dernier lors de la rédaction du dossier de candidature que nous avons rentré. Il est donc à jour. » Dans le village, on remarque assez rapidement que la majorité des maisons ont été construites avant 1750.
La Cense Bivort et son jardin. Cette ferme en U du XVIIIe siècle est posée en contrebas de l’église.

La couleur beige, caractéristique singulière des pierres de Gobertange, tapisse le moindre recoin de l’entité. Et si les pierres ont parfois été recouvertes d’un enduit, toutes les maisons ont aujourd’hui réparé les erreurs du passé.
Frédéric Jacoby, président de Vivre à Saint-Remy
Une culture urbanistique bien définie
Quand on se balade dans le village, il ne faut pas marcher bien longtemps pour découvrir l’édifice le plus emblématique, à savoir l’église Saint-Remy, qui domine le village. Elle a été entièrement bâtie au XVIIIe siècle, empilant les pierres de Gobertange. Autre élément singulier : le moulin de Genville, l’unique bâtiment classé. « On perçoit clairement la grande linéarité du bâti de ce village, explique Frédéric Jacoby, qui a construit sa maison il y a 15 ans sans être au courant de la culture urbanistique des lieux, ce qu’il souhaite désormais
LA WALLONIE SUR SON 31
Le club ne cesse de s’agrandir. On recense désormais trente-et-un villages labellisés « Plus Beaux Villages de Wallonie ». « Ils sont le reflet des richesses patrimoniales, paysagères et touristiques de notre Wallonie rurale, lance Mark Rossignol, coordinateur de l’asbl « Les Plus Beaux Villages de Wallonie ». Chacun possède sa propre identité, son histoire, son ambiance, sa chaleur, son charme qui le rend unique pour celui qui y habite autant que pour celui qui le visite. » Un ou deux villages s'ajoutent chaque année à la liste. Alors qu’un « bilan de santé » effectué tous les six ans pour analyser l’évolution architecturale, paysagère et urbanistique permet de prolonger ou de retirer la labellisation. « Nous avons déjà écumé la Wallonie de long en large, poursuit Mark Rossignol. Et je pense qu’il est envisageable de se dire qu’un maximum de 35 villages pourront être labellisés. Il n’y en aura donc plus beaucoup. »
Les candidatures sont déposées par des associations ou des communes. Elles doivent respecter les critères d’éligibilité de la Charte Qualité du Réseau. L’objectif est le plus souvent le même, à savoir le maintien du cadre de vie et du cadre bâti. « Il y a aussi la volonté de recréer une dynamique autour d’un projet mobilisateur. La qualité du patrimoine est obligatoire tout comme la dynamique touristique potentielle. »
La candidature de Saint-Remy-Geest a clairement séduit le jury. « Que ce soit le moulin de Genville, la vallée de Gobertange, la variété des espaces et du bâti, la variété d’implantations (ferme en U), les ruelles pavées, la qualité des matériaux ou encore la dynamique associative, tous ces éléments ont été particulièrement remarqués. »

Au loin, l'église locale.
inculquer aux nouveaux habitants. Il faut la préserver car c’est très rare. Toutes les maisons doivent suivre un cadre bien précis. » Comme cette maison en cours de construction découverte lors de notre balade dans le village. On y aperçoit clairement que les pierres de façade en cours de maçonnerie sont de Gobertange. Ou encore cette extension qui s’est inscrite dans la lignée du parement local. « Il serait en effet très inopportun qu’un nouvel habitant arrive et construise une bâtisse qui irait à contre-courant du bâti actuel. Ce ne serait pas la meilleure manière de se faire bien voir et de recevoir un bon accueil (sourire). »
QUELS RÈGLEMENTS SPÉCIFIQUES S’APPLIQUENT ?
Être labellisé « Plus beau village de Wallonie » ne fait pas passer tout demandeur d’un permis d’urbanisme dans une nouvelle dimension. Il reste soumis aux mêmes règles que tout autre demandeur de la commune. Seule différence : toutes les demandes de permis sont envoyées pour demande d’avis à une commission des Plus beaux villages de Wallonie. « De quoi lui permettre d’être au courant de tous les projets et de pouvoir faire des remarques », précise Stéphanie Louis, conseillère en aménagement du territoire à la Ville de Jodoigne.
À Saint-Remy-Geest, le Guide régional d’urbanisme s’applique, tout comme le Règlement général sur les bâtisses en site rural (RGBSR). La Ville de Jodoigne est en train de réviser un Guide communal d’urbanisme qui pourrait à l’avenir donner un nouveau cadre urbanistique au village. « Le Collège communal est très attentif au maintien des caractéristiques paysagères, urbanistiques et architecturales du village, précise Stéphanie Louis. Ce qui explique la grande homogénéité du bâti. Nous avons travaillé de la même manière à Mélin.»
Car ceux qui construisent leur maison doivent respecter quelques règles, le Guide communal d’urbanisme jodoignois étant le plus élevé. Il n’y a pas de règlement spécifique pour Saint-RemyGeest. « Cette labellisation nous a toutefois permis de créer un groupement local qui étudiera les demandes de permis d’urbanisme qui concernent Saint-Remy-Geest. Elles sont également envoyées à l’asbl des Plus Beaux Villages de Wallonie. Le but n’est pas de faire office de second service d’urbanisme, à côté de celui de Jodoigne, ni de se substituer à ses prérogatives mais bien de permettre aux habitants de préciser leurs sensibilités sur un projet et d’être au courant. »
Village voisin de Mélin, Saint-Remy Geest entend profiter de son expérience pour favoriser les événements communs, de manière à renforcer la mise en lumière des deux villages. « Ils sont tous les deux très proches. Même si, par rapport à Mélin, notre village a une structure plus concentrée du bâti. » Les bâtisses sont en effet principalement disposées le long de deux rues parallèles, coupées par une troisième voie transversale qui ouvre la vue vers un magnifique fond de vallée.
Parmi les découvertes à effectuer, on peut signaler un « Porche-colombier » qui marque l’entrée d’une ferme du XVIIIe siècle dans la rue de la Vanne, une ancienne grange en colombage, d’anciennes fermes en L ou tri cellulaire, ou encore « La Cense Bivort » et son jardin. Il s’agit d’une ferme en U du XVIIIe siècle qui est posée en contrebas de l’église.
L’ouverture au contemporain
Des maisons contemporaines sont parvenues à se glisser, avec succès, dans le bâti ancien. Comme cette maison en brique rouge dont les appuis de fenêtre en pierre font office de rappel ou encore cette maison en bois dont les murs d’enceinte sont construits en pierre de Gobertange, de quoi leur permettre de s’insérer parfaitement dans le village. « Cela démontre que nous avons également une certaine ouverture, poursuit Frédéric Jacoby. Ces petits rappels sont autant de témoignages qui permettent de maintenir l’histoire du village. »
Une Maison de Village destinée à accueillir les visiteurs sera bientôt créée. Un point relais qui leur permettra d’être davantage sensibilisés à l’architecture des lieux. Et de voir la légende perdurer.