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Un modèle informatique pour évaluer l’efficacité des stratégies de vaccination
SPÉCIALISÉ dans la recherche agronomique pour les régions tropicales, le Cirad peaufine depuis 2013 un outil informatique pour évaluer le rapport coût-bénéfice des stratégies de vaccination ou d’abattage préventif des poules pondeuses et des poulets de chair, face aux différents virus de l’Influenza Aviaire (IA). Le modèle, baptisé Evacs, a été expérimenté en 2015 en Égypte avant d’être déployé au Vietnam et au Bangladesh, en partenariat avec l’entreprise Ceva santé animale. Une thèse, soutenue le 1er avril 2021 par une doctorante en contrat Cifre, examine pour la première fois l’application d’Evacs en France.
« Lorsque l’outil a été appliqué au Bangladesh, les élevages ont été regroupés en fonction de leurs niveaux d’industrialisation et d’intégration et de leur taille. Cette classification n’était pas pertinente pour les élevages français, pour lesquels les critères pris en compte étaient le niveau d’intégration et le mode de production (en claustration ou en plein air), leur taille n’étant pas un critère de sélection », précise Claire Hautefeuille. Vétérinaire de formation, la chercheuse a travaillé pendant deux ans à l’Anses pour coordonner des travaux d’expertise scientifique portant notamment sur l’influenza aviaire. Sa thèse en épidémiologie se penche cette fois sur « les réseaux de production de volailles en lien avec les mobilités humaines, matérielles et animales ».
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Le Sud-Ouest ou l’Ouest de la France ne sont effectivement pas comparables à l’Asie du Sud-Est, où de nombreux petits élevages villageois de subsistance en « basse-cour » cohabitent avec de grands bâtiments intensifs en claustration totale. La France, elle, a développé des filières d’élevage en plein air pour un marché de produits vendus sous label, en bio comme en conventionnel. « L’analyse du réseau a dû être adaptée à l’intégration horizontale des élevages (autour d’un producteur d’aliment), alors que les filières étudiées jusqu’à présent portaient essentiellement sur des élevages intégrés verticalement [ndlr : production, transformation, et distribution] », expose Claire Hautefeuille.
RISQUES PLUS FAIBLES EN PLEIN AIR. Bousculant les idées reçues, la thèse souligne que « le risque de transmission entre les élevages de reproducteurs et les élevages de production en claustration n’était pas négligeable, contrairement à ce qui pouvait être attendu, compte tenu de leurs modes d’élevage très différents ». Le modèle Evacs conclut même à un risque de transmission plus faible entre élevages en plein air qu’entre élevages de poulets de chair en claustration intégrés au sein de la même organisation de production. « Bien que les élevages de reproducteurs soient considérés comme à haut niveau de biosécurité, le risque de transmission entre élevages de reproducteurs est équivalent à celui estimé entre élevages de poulets de chair en plein air », constate Claire Hautefeuille. Le modèle Evacs doit encore être « spatialisé » pour produire des cartes de gestion des risques à l’échelle locale. Et le séquençage génétique des différentes souches de virus IA permettrait de savoir si tel ou tel type d’élevage est une source privilégiée d’introduction virale dans le réseau, souligne la thèse. « Ces données sont essentielles pour définir notamment les rôles respectifs des élevages villageois (extensifs) et industriels (intensifs) dans la circulation, l’amplification et l’émergence de nouveaux sous-types. Ces études restent encore très limitées alors que les élevages villageois sont toujours pointés du doigt dans certains pays lorsqu’une épidémie d’IA se diffuse »
Claire Hautefeuille poursuit ses recherches en postdoc au sein de l’équipe Astre, une unité mixte de recherche du Cirad et d’Inrae, dans le cadre du projet BioFluARN. Les études sont étendues aux risques d’introduction et de diffusion des virus influenza dans les filières porcines. ●