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JAKE GYLLENHAAL Star Fighter

Le très professionnel Jake Gyllenhaal, l’inoubliable cowboy de Brokeback Moutain, va revenir cette année dans un remake du film culte Roadhouse. L’acteur de 42 ans s’est encore une fois transformé physiquement pour jouer son rôle de combattant de MMA, une routine pour celui qui aime s’imprégner de ses personnages.

l serait difficile de trouver un acteur qui parle avec autant d'éloquence de sa profession que Jake Gyllenhaal. Il répond à chacune de nos questions avec une grande attention, parfaitement conscient du statut exagéré des acteurs dans le contexte de la culture actuelle de la célébrité. Mais il croit aussi à l'importance du cinéma, à sa capacité à toucher les gens et à explorer la condition humaine, les questions importantes et les événements cruciaux.

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L’enchaînement des succès commerciaux sur grand écran jusqu'à Spider-Man : Far From Home en 2019 a préparé l'acteur de 42 ans à une sorte de pause, mais il est revenu en force au cours de l'année écoulée avec une ribambelle de projets, à la fois en tant qu'acteur et producteur, qui semblent d'une ampleur pharaonique.

La liste des prochains rendez-vous de Gyllenhaal - projets annoncés, rumeurs ou en préproduction - dépasse largement les deux chiffres, allant des thrillers (The Interpreter, The Division, Road House, Snow Blind) aux drames (Francis et The Godfather), en passant par des films d'action (The Anarchists vs ISIS et Combat Control).

Deux mini-séries sont également prévues : The Son, dans laquelle il incarne un détenu évadé, et Lake Success, où il joue le rôle de Barry Cohen, un gestionnaire de fonds spéculatifs qui cherche à se défaire des chaînes de la routine.

L'acteur s'est également remis au théâtre en jouant le rôle principal dans Sunday in the Park with George au Savoy Theatre.

En tête se trouve Road House, un brillant remake du film de Patrick Swayze de 1989. Gyllenhaal y incarne Elwood Dalton, un ancien combattant de l'UFC qui se retrouve à travailler dans un relais routier à Florida Key, où les choses ne sont pas ce qu'elles semblent être.

Le film renvoie Gyllenhaal au sommet du box-office, même si l'acteur tient à préciser qu'il ne se limite pas aux productions à gros budget. Il est à un stade de sa carrière où il semble ne pas avoir grand-chose à prouver... et s'il a quelque chose à prouver, c'est uniquement à lui-même.

: Avec Road House, vous revenez dans un rôle physique. Avezvous dû vous préparer physiquement pour ce rôle ?

Jake Gyllenhaal : Je me suis un peu musclé mais, d'une manière générale, j'ai essayé de garder la forme depuis que j'ai joué dans La rage au ventre (Southpaw) et Prisoners. J'ai pris soin de moi et je suis satisfait de mon apparence, de la puissance et de la concentration que me procure le fait d'être en forme, alors il n'a pas été trop difficile de me mettre dans le bon mode pour ce rôle. La rage au ventre a nécessité six heures de travail par jour - je ne pense pas que je pourrais recommencer pour n'importe quel film !

: Beaucoup considèrent le film original Road House comme une icône...

J. G. : Je pense qu'il représentait un moment où Patrick [Swayze] était au sommet de son art. Il avait fait Dirty Dancing et Ghost allait suivre, il y avait quelques films à cette époque qui exprimaient vraiment son talent en tant qu’acteur, cette période de la fin des années 80 / début des années 90 où l’univers du cinéma avait commencé à évoluer vers quelque chose de plus grandiose.

: Cela signifie-t-il beaucoup pour vous de reprendre un rôle rendu célèbre par quelqu'un de si respecté et regretté ?

J. G. : Bien sûr, il n'y a aucun doute sur l'importance de Patrick, même toutes ces années après sa mort. Il y a beaucoup de lui dans le remake - beaucoup de sa personnalité et de sa présence. Ce serait une erreur de refaire toute l'histoire sans reprendre certains de ses traits dans le rôle. Je pense que c'est pour cette raison que ce film m'a semblé particulièrement spécial.

En fin de compte, lorsque j'incarne un personnage, la chose la plus intéressante et la plus excitante pour moi est de pouvoir m'exprimer différemment et intensément - me voir ressentir et me comporter de la même manière que mon personnage sans même en être conscient. Je pense que cela a ramené mon interprétation de James Dalton (rebaptisé Elwood pour ce remake) à un niveau parfois plus contrôlé, et c'était donc une dynamique intéressante à mettre en place.

: Vous vous investissez à l’extrême dans vos rôles et vous êtes réputé pour ça dans la profession...

J. G. : En tant qu’être humain, j'ai un regard différent sur le monde quand je travaille sur un film - je vois les choses du point de vue de mes personnages, je ressens constamment le besoin de me remettre en question et je veille à écouter mon instinct, en poursuivant toujours des projets qui me plaisent tant sur le plan artistique que sur le plan personnel.

J'aime travailler avec des personnes qui partagent la même vision et la même approche artistique que moi, tout simplement parce que cela rend le processus beaucoup plus agréable, et dans ce cas, avec le réalisateur Doug Liman, j'ai certainement eu cette chance.

En fin de compte, j'ai développé de merveilleuses relations créatives au cours des dernières années et je veux continuer à travailler avec des gens qui m'aident à être aussi créatif et expressif que possible.

: Vos collègues vous décrivent comme quelqu'un de très exigeant dans votre travail...

J. G. : [Rires] Je prends mon travail très au sérieux, à tel point que les personnes étrangères au métier pourraient ne pas apprécier ou ne pas juger cela particulièrement intéressant. Ce qui me motive à faire l’acteur, c'est ma curiosité. Je suis beaucoup moins aventureux dans ma propre vie que dans mon travail, il me donne la possibilité de dépasser mes limites et d'en apprendre plus sur moi-même que si je ne le faisais pas.

Il y a quelque temps, j'ai pris la décision de mettre tout le reste de côté et de considérer le métier d'acteur comme un vrai métier... ce qui semble un peu extrême [rires], mais si vous regardez les plus grands, ils s'engagent à fond. C'est une priorité pour moi, car c'est en se forçant à sortir de sa zone de confort que l'on grandit en tant qu'individu. Pour moi, la vie est faite de découvertes, de risques et d'exploration de nouveaux aspects de ma personnalité et du monde en général.

: Vous arrive-t-il de faire une pause ?

J. G. : Je n'ai pas le tempérament pour cela. J'ai très peu de patience, ce qui est typique du Sagittaire. Je n'aime pas rester assis très longtemps, voire pas du tout. >

Avec l'âge, je me suis rendu compte que ce métier n'est pas seulement une question de talent, d'habileté ou de compétence. Il faut y consacrer une énorme quantité de travail et se préparer, ce qui permet d'être percutant quand il le faut, quel que soit le moment.

: Vous avez dit que vous n'aviez jamais eu l'intention de devenir acteur.

J. G. : Je ne sais toujours pas si je veux être acteur [rires]. Non, je suis très reconnaissant pour ce que je fais, mais il y a toujours la crainte qu'on ne me laisse pas continuer à le faire. Mais j'adore ça, et ce que j'aime probablement le plus dans ce métier, c'est jouer avec de grands acteurs.

: Comme votre sœur Maggie. Quand pensez-vous la retrouver à l'écran après le film Donnie Darko ?

J. G. : Pas dans un avenir proche... parce que nous avons une excellente relation [rires]. Parce qu'elle fait partie de la famille, je l'aime, c'est ma sœur, et nous voulons profiter de notre relation familiale au lieu d'en faire quelque chose d'autre. Le travail - et c'est toujours quelque chose que mes parents nous ont enseigné, enfants et adultes - passe après la famille. Nous ne voulons pas que le travail s'immisce dans la famille. Nous n’en parlons pas du tout.

: Il est étrange que des frères et sœurs travaillant dans le même secteur ne parlent pas de leur travail.

J. G. : Nous ne le faisons pas.

: Vous arrive-t-il de la féliciter pour son travail ?

J. G. : Oui, bien sûr, et je suis un grand admirateur de son travail - elle est extraordinaire et m'inspire.

: Ce n'est un secret pour personne que la célébrité n'est pas la partie de votre travail que vous préférez. Avec l'âge, commencez-vous à l'accepter ?

J. G. : Cela fait partie du métier, je ne l'aime pas, mais je ne la déteste pas. Je suis plus qu'heureux de prendre des photos si c'est au bon moment, mais pas quand je suis avec un ami dans le métro et que quelqu’un m'interrompt au milieu d'une conversation. Je lui dis alors : « Oui, mais pas maintenant, si ça ne te dérange pas ». Et il pense : « C'est un connard » [rires].

Je trouve que lorsqu'ils viennent prendre des photos, c'est toujours par rapport à eux. Par exemple, si quelqu'un vient me voir pour me dire qu'il a détesté ce que j'ai fait dans ce film, ou qu'il l'a aimé, j'aime en parler, j'aime l'interaction. Mais ce n'est pas ce que les gens veulent - ils ont tendance à se concentrer sur les ‘likes’ des photos. J'aime communiquer, je me souviens que Paul McCartney disait la même chose. Venez pour discuter, pas pour une photo ou une signature.

: Spider-Man vous a ramené dans le domaine des superproductions, mais malgré cela, vous avez continué à poursuivre des projets plus profonds avec de la substance. Y a-t-il un moment où votre agent vous dit : « Très bien Jake, il nous faut quelque chose de gros... il faut que nous gagnions beaucoup d'argent » ?

J. G. : Ce n'est jamais ce qui me vient à l'esprit. Ce n'est pas une discussion que j'ai envie d'avoir à ce moment de ma vie. Il faut que cela naisse de quelque chose en quoi je crois, qui a quelque chose à dire, que ça plaise à mon instinct, ce qui peut paraître vague, mais c'est là où j'en suis.

: Y a-t-il une leçon à tirer du fait d'être trop serein ou de ne pas être assez critique dans la façon dont nous menons notre vie ?

J. G. : Je pense que ce qui est vrai dans la vie, c'est qu'à chaque fois que vous pensez suivre une voie conventionnelle, quelque chose vient vous mettre en échec. Je pense que la vie nous pousse à rester vigilants, et c'est une bonne chose.

: Quelle impression cela procure d'avoir autant d'influence dans la vie des autres ?

J. G. : L'influence, ce n'est pas de jouer dans un film. Tout ce que vous faites, c'est présenter une histoire - il peut s'agir d'une histoire réelle, d'un biopic, d'un aperçu de la vie de quelqu'un, mais ce n'est pas de l'influence. Cela ne devrait pas aider quelqu'un à vivre sa vie différemment. N'oubliez pas que la plupart des films sont destinés à divertir.

Bien sûr, si les gens se sentent inspirés par ce qu'ils voient à l'écran, c'est une bonne utilisation de l'expérience, si vous voulez mon avis ; mais j’en resterais là. Je ne pense pas que les gens devraient s'inspirer davantage des personnages que j'incarne.

: Le métier d'acteur n'est donc pas si important ?

J. G. : C'est important pour moi, mais je ne m'attends pas à ce que les autres en retirent quelque chose de profond. Il n'y a aucune obligation à cet égard. Je repense aux choses les plus importantes que j'ai faites dans ma vie. Bien sûr, il y a quelques-uns de mes films, mais il y a aussi des choses très ordinaires... comme la fois où, à l'école, nous devions écrire des lettres de réclamation. J'ai donc décidé d'écrire à Kentucky Fried Chicken pour leur dire que j'étais contrarié qu'ils aient décidé d'arrêter les Chicken Littles, qui étaient un type particulier de mini-hamburgers avec du poulet frit.

Cela m'a vraiment bouleversé à l'époque, et j'ai pensé qu'ils devaient les ressortir. Et je pense qu'indirectement, je les ai aidés à le faire ! [rires]. C'est ça l'influence : écrire des lettres, faire campagne, demander du changement.

: Êtes-vous sérieux ?

J. G. : Bien sûr, écrire des lettres de réclamation donne du pouvoir et j'encourage tout le monde à s'exprimer et à reprendre ce qu'ils pensent qu’on leur a enlevé dans leur vie. Dans mon cas, il était très important que Kentucky Fried Chicken ramène les Chicken Littles - sérieusement !

: Et vous avez réussi...

J. G. : J'ai réussi. Nous avons réussi !

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