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Clara Zetkin Une figure influente du mouvement des femmes prolétaires

Est-ce précisément parce qu’elle fut à ce point « pionnière » – comme Angela Davis, l’une des figures du mouvement noir américain des années 19601970, également communiste, féministe et pacifiste tout comme elle – que l’Histoire l’a oubliée ? Clara Zetkin, figure influente du mouvement des femmes, qui a donné le 8 Mars, la journée internationale des droits de la femme !

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Par Ilona Zaffagni

Ses jeunes années...

Clara Eißner, nait d’un père instituteur et d’une mère féministe, voit le jour le 5 juillet 1857 à Wiedereau, en royaume de Saxe. Habitante d’un petit village tourné vers l’industrie textile et côtoyant la misère, Clara Zetkin nourrit une révolte contre l’injustice. En 1872, elle emménage à Leipzig avec ses parents et réussit à entrer à l’institut Von Streyber, l’école d’institutrices, notamment grâce à sa mère. La seule formation professionnelle alors ouverte aux filles de la bourgeoisie qui donne accès à l’une des plus hautes éducations qu’une jeune fille puisse rêver d’avoir. À cette époque, l’établissement est dirigé par la militante des droits des femmes, Auguste Schmidt, qui deviendra par la suite sa mentor. À Leipzig, la jeune femme accède aux cercles d’ouvriers, découvre le socialiste et féminisiste August Bebel. Elle rencontre également son premier amour, Ossip Zetkin, un révolutionnaire d’origine ukrainienne. Lorsqu’il est expulsé d’Allemagne, elle le rejoint à Paris. En partant, elle rompt avec sa famille et prend le nom de son compagnon, même s’ils ne se marieront jamais. À la mort d’Ossip, Clara Zetkin se retrouve seule avec, à sa charge, deux très jeunes fils, jonglant avec ses doubles journées. Elle élève ses enfants et subvient à leurs besoins en travaillant comme préceptrice, traductrice, soignante... Sa position à l’égard du travail est claire : c’est la base de leur émancipation. « Vouloir supprimer ou réduire le travail féminin, cela signifie condamner la femme à la dépendance économique, à l’asservissement social et à la prostitution dans le foyer et hors de celui-ci, » déclarait-elle. En 1897, Clara Zetkin épouse le peintre Friedrich Zundel, de 18 ans son cadet. Lorsqu’il veut la quitter pour une femme plus jeune, Clara refuse le divorce, tiraillée entre ses convictions sur l’autonomie des femmes et ses sentiments. Dans un texte intitulé « L’étudiant et la femme », Clara Zetkin se confiera sur cette relation passée auprès de Friedrich Zundel. Dans cet écrit, Clara montre sa facette la plus féminisite en pointant du doigt ce que le mariage et la famille peuvent avoir d’aliénant pour une femme. Elle écrira : « Jusqu’ici, l’épanouissement et la vie des femmes étaient placés sous le signe de la soumission à ces entités. La rupture de liens avec la famille constituait le fondement de leur réévaluation sociale. » Elle souligne aussi « qu’une femme qui, en tant qu’être humain, a goûté au bonheur de l’amour voit grandir le meilleur de son être et ses aspirations... »

Son combat

Dès son plus jeune âge, Clara Zetkin évolue dans une sphère féministe. En plus d’être féministe, c’est une révolutionnaire, une pacifiste et une antifascite. En 1892, elle fonde le journal « Die Gleichheit » (L’Égalité), un outil d’éducation populaire des femmes ouvrières. Ce journal participe à structurer un important mouvement social-démocrate féminin et lui permet de diffuser ses idées jusqu’en 1917. Même si à cette époque les femmes n’ont pas le droit d’adhérer à un parti politique, cela n’empêche pas Clara Zetkin de créer, avec l’aide de sa fidèle amie Rosa Luxemburg, une structure parallèle au parti social-démocrate allemand (SPD). Pour se faire entendre, les adhérentes tentent d’organiser une conférence des femmes socialistes. Celle-ci est empêchée par la police. Ce n’est qu’en 1900 que cette conférence parvient à exister : elle se réunira avant chaque congrès du parti. Clara Zetkin cite : « ... les femmes socialistes de tous les pays organiseront tous les ans une Journée des femmes, dont l’objectif premier est l’obtention du droit de vote. Cette revendication doit être examinée à l’aune de la question des femmes dans la conception socialiste. La journée des femmes sera internationale et fera l’objet d’une organisation soignée... » En 1920, élue au Reichstag, Clara Zetkin assiste à la montée du nazisme en Allemagne, tandis que l’arrivée au pouvoir de Staline à partir de la fin des années 1920 la met à l’écart de l’Internationale communiste. Un an plus tard, l’Union soviétique est le premier pays à fixer au 8 mars la Journée internationale des femmes. Difficile de ne pas voir dans ce choix le fruit de la rencontre entre Lénine et Clara Zetkin. « Elle se sentait proche de la Russie. Son premier compagnon était russe. Au moment de la révolution russe, elle traversait un moment de sa vie où elle avait besoin d’un espoir. Elle l’a trouvé aux débuts de l’URSS, qui fut le premier pays à légaliser l’avortement, entre autres droits accordés aux femmes. »

Clara Zetkin organise la première Internationale des femmes socialistes

En 1907, Clara Zetkin organise à Stuttgart la toute première Internationale des femmes socialistes. 59 représentantes de 15 pays différents se rencontrent pour la première fois. Elle devient alors la présidente de l’Internationale et son journal, Die Gleichheit, son organe officiel. Ce jour-là, la conférence adopte une résolution sur le droit de vote des femmes. En 1910, l’Internationale socialiste se réunit à Copenhague. Clara Zetkin propose de mobiliser les femmes, partout dans le monde, à une date unique pour sensibiliser à la cause des travailleuses. Sa proposition est adoptée. Le 19 mars 1911, la journée est célébrée pour la première fois... plus d’un million de femmes venant d’Allemagne, d’Autriche, de Suisse, descendent dans les rues pour manifester.

Après sa mort

Clara Zetkin décédera à Arkhangelskoïe, en Russie, le 20 juin 1933, à l’âge de 75 ans. Après sa mort, le vent pour l’Europe occidentale, avec la venue de la Seconde Guerre Mondiale : Clara Zetkin et ses travaux furent, à l’ouest, victimes de la guerre froide. L’Allemagne de l’Ouest voulut l’occulter, elle et ce pour quoi elle se battait, à commencer par ses principes féministes. Il fallait laisser la priorité aux trois K (Kinder ; Küche ; Kirche), les piliers de la reconstruction et de la repopulation dans les années 1960. Dans le même temps, de l’autre côté du mur, en République démocratique d’Allemagne, on portait aux nues cette héroïne du socialisme et ses valeurs égalitaires, on éditait des timbres à son effigie, on frappait des médailles à son nom et on faisait figurer son portrait sur les billets de 10 marks. Il a fallu attendre la réunification et la mise à jour des archives pour découvrir les travaux dont Clara Zetkin fait l’objet aujourd’hui. Et il aura également fallu attendre plus de quarante ans pour que le 8 mars soit érigé en « Journée internationale des droits des femmes » par les Nations Unies, en 1975, alors que le mouvement de libération des femmes battait son plein et que l’ONU avait décrété une année internationale des femmes. La date est validée vingt ans plus tard, en 1995, par 189 pays lors de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes.

Simone VEIL

Une femme debout

1927

Simone Veil, née Simone Jacob le 13 juillet 1927 à Nice (Alpes-

Maritimes) 1943

Déportée à Auschwitz à l’âge de 16 ans durant la Shoah, elle perd son père, son frère et sa mère. 1974

Nommée ministre de la Santé, elle est chargée de faire adopter la loi dépénalisant le recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) 2018

Simone Veil fait son entrée au

Panthéon avec son époux le 1er juillet 2018.

Elle est la sixième femme en France à rejoindre les « Immortels » et la cinquième femme a être inhumée au Panthéon. Simone Veil a été une figure emblématique de la vie politique française et européenne et reste à jamais celle qui a permis la dépénalisation de l’avortement. Véritable combattante pour les valeurs et les convictions qu’elle porte, elle l’a été aussi au cours de sa vie en survivant à la Shoah.

Par Anne Ciancanelli

ctive dans la politique française depuis les années 1950, Simone Veil est l’une des personnalités politiques les plus populaires de France. Cadette d’une fratrie de quatre enfants, Simone Jacob (son nom de jeune fille) naît à Nice le 13 juillet 1927, sous le soleil de la Côte d’Azur, et grandit dans une famille juive non-pratiquante AUne enfance épanouie puis dévastée et laïque. Son père André, un architecte primé, avait insisté pour que sa mère, Yvonne, abandonne ses études de chimie après leur mariage. Comme la plupart des autres Juifs de France, il se soumet à contrecœur aux ordres lorsque le régime de Vichy, allié des nazis, arrive au pouvoir en juin 1940 ; la famille Jacob se retrouve inscrite sur le tristement célèbre « Fichier des Juifs » qui aidera plus tard la police française et la Gestapo allemande à rafler les Juifs de France puis à les déporter. En tant que ressortissants français vivant dans la zone d’occupation italienne, la famille Jacob évite les premières rafles qui visent les Juifs étrangers, principalement dans la moitié nord de la France occupée par les troupes allemandes. Les lois antisémites accusent toutefois le contrecoup, contraignent André Jacob au chômage et poussent Simone à adopter le nom de Jacquier pour dissimuler ses origines. La situation s’aggrave après septembre 1943, lorsque l’occupant nazi déferle jusque sur la Côte d’Azur. Simone, alors âgée de 16 ans, vient tout juste de passer son baccalauréat lorsqu’elle est arrêtée par deux membres de la SS le 30 mars 1944. La Gestapo ne tarde pas à rafler le reste de la famille, à l’exception de Denise, la sœur de Simone, qui a rejoint la Résistance à Lyon. Denise sera ensuite arrêtée et déportée au camp de concentration de Ravensbrück, d’où elle reviendra après la guerre. Alors que Denise est traitée comme une résistante, Simone et le reste de la famille sont contraints de subir le sort réservé aux Juifs de France durant cette sombre période de l’histoire. Les femmes ont été déportées à Auschwitz, le plus grand des camps de la mort, le 13 avril 1944, après un effroyable voyage de trois jours coincées dans un wagon à bestiaux surpeuplé. Un mois plus tard, André et Jean embarquent dans le convoi 73, le seul train partant de France en direction des États baltes. Simone n’aura plus jamais de nouvelles d’eux. Les jeunes de son âge sont normalement envoyés directement dans les chambres à gaz d’Auschwitz, mais Simone a menti sur son âge sur les conseils d’un détenu qui parlait français. Elle a été enregistrée pour le camp de travail, rasée de la tête aux pieds et tatouée du numéro de série 78651 sur son bras. « À partir de ce moment-là, chacun de nous n’était plus qu’un numéro, gravé dans notre chair », se souvient-elle des années plus tard dans ses mémoires. « Un numéro que nous devions apprendre par cœur, puisque nous avions perdu toute identité ».

Pendant plusieurs mois, Simone, sa mère et sa sœur endurent l’humiliation rituelle et la routine de travail infernale des déportés, contraints à soulever des rochers, creuser des tranchées et construire des talus - tout en luttant pour rester debout et éviter les redoutables chambres à gaz. Lorsque Auschwitz a été évacué en janvier 1945, à l’approche des chars soviétiques, elles ont pris part aux macabres « marches de la mort », pour finalement atteindre le camp de concentration de Bergen-Belsen, où Simone a travaillé dans les cuisines. Lors de ces ultimes mois de détention, sa mère, Anne Frank et plus de 50 000 personnes y meurent du typhus, d’épuisement, de faim, de froid, de désespoir. « On sentait la fin de la guerre mais une fin de la guerre qui a été épouvantable (...) Ce qui était le plus terrible, c’est cette humiliation permanente, ce sentiment de déchéance et d’essayer de lutter contre. Et ça, c’est incommunicable. Mais on ne tenait plus à la vie. On n’avait de toute façon plus du tout envie de vivre. On avait le sentiment par moment, par exemple, qu’on n’avait plus la capacité de réfléchir à quelque chose, il n’y avait donc plus que des instincts. Et je dirais que c’est peut-être une des choses les plus angoissantes... Estce que je suis encore un être humain ? (...) Et la libération est arrivée dans ce contexte dont on ne pouvait même pas se réjouir parce qu’on ne savait pas du tout si on survivrait. Et d’ailleurs beaucoup de déportés sont morts à Belsen après la libération » se souvenait-elle. Et elle poursuit : « Ce qui me hante le plus, la période la plus terrible que j’ai vécue, c’est celle où les hongrois sont arrivés. Il y a eu entre 450 000 et 500 000 hongrois de tous âges qui ont été déportés en deux mois. On voit la voie ferrée qui a été prolongée jusqu’au crématoire. On voyait la proportion de gens qui entraient ou qui n’entraient pas dans le camp. C’est-à-dire qu’au début il y avait un peu de place dans le camp, et avec le temps qui passe, tout les gens étaient exterminés dès l’arrivée. On voyait qu’ils allaient directement aux chambres à gaz. Et ça reste pour moi la chose qui est la plus dramatique, la plus effroyable, la plus impensable. Celle d’ailleurs à laquelle les gens n’ont pas voulu croire au début, on peut comprendre. » Les troupes alliées libèrent Bergen-Belsen le 15 avril 1945. Lorsqu’un officier britannique demanda son âge à une Simone émaciée, elle lui dit de deviner. « Il a dit que je devais avoir dans les 40 ans », s’est-elle souvenue plus tard. « Sans doute pensait-il être poli ». Faisant partie des plus de 76 000 Juifs déportés de France pendant la Seconde Guerre mondiale, Veil figure sur le Mur des noms du Mémorial de la Shoah à Paris, sous son nom de jeune fille Simone « À partir de ce moment-là, chacun de nous n’était plus qu’un numéro, gravé dans notre chair. Un numéro que nous devions apprendre par cœur, puisque nous avions perdu toute identité »

Jacob. Il en va de même pour son père André, sa mère Yvonne, sa sœur Madeleine et son frère Jean. Des cinq, seules Madeleine et Simone ont survécu à l’épreuve, mais Madeleine mourra dans un accident de voiture sept ans seulement après la guerre.

Reprendre son destin en main et défendre la loi Veil

Simone, qui n’a que 17 ans, rentre en France dévastée par la perte de ses parents et de sa sœur, mais se montre déterminée à poursuivre la carrière que sa mère n’a pu mener. Elle étudie le droit à l’université de Paris et à l’Institut d’études politiques, où elle rencontre Antoine Veil (1926-2013), futur chef d’entreprise et commissaire aux comptes. Le couple se marie en octobre 1946 et aura trois fils, Jean, Nicolas et Pierre-François. Simone Veil commence à travailler comme avocate avant de passer avec succès le concours national de la magistrature en 1956. Elle a ensuite occupé un poste de direction à l’administration pénitentiaire nationale, qui fait partie du ministère de la justice, ce qui lui a permis d’obtenir une première plateforme pour poursuivre l’action de toute une vie en faveur des droits des femmes. Elle s’est notamment efforcée d’améliorer les conditions de vie des femmes dans les prisons françaises et, pendant la guerre d’indépendance algérienne, a obtenu le transfert en France de prisonnières algériennes, alors que des rapports faisaient état d’abus et de viols généralisés. Passée à la direction des affaires civiles du ministère en 1964, Madame Veil a continué à faire pression en faveur de la parité des sexes en matière de contrôle parental et de droits d’adoption. Dix ans plus tard, sa nomination au poste de ministre de la santé dans l’administration de centre-droit du président Valéry Giscard d’Estaing lui ouvre la voie à sa plus grande épreuve politique. Elle s’est d’abord battue pour faciliter l’accès à la contraception, puis a affronté un parlement hostile pour plaider en faveur du droit des femmes à l’avortement légal.

« Il y avait tellement d’hypocrisie dans cette chambre remplie d’hommes, dont certains cherchaient secrètement des endroits où leurs maîtresses pourraient avorter. »

« Aucune femme ne recourt à l’avortement de gaieté de cœur. Il suffit de les écouter : c’est toujours une tragédie », déclare Veil dans un discours d’ouverture désormais célèbre, le 26 novembre 1974, devant une Assemblée nationale presque entièrement composée d’hommes. Elle ajoutait : « Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les 300 000 avortements qui, chaque année, mutilent les femmes de ce pays, foulent aux pieds ses lois et humilient ou traumatisent celles qui les subissent. » Après son discours d’une heure, la ministre a subi un torrent d’injures de la part des membres de sa propre coalition de centre-droit. Un législateur a affirmé que sa loi « tuerait chaque année deux fois plus de personnes que la bombe d’Hiroshima ». Un deuxième a reproché à la survivante de l’Holocauste d’avoir « choisi le génocide ». Un autre encore a parlé d’embryons « jetés dans les fours crématoires ». « Je n’avais aucune idée de la haine que j’allais susciter », a déclaré Veil à la journaliste française Annick Cojean en 2004, se remémorant le débat au vitriol qui avait eu lieu des décennies plus tôt. « Il y avait tellement d’hypocrisie dans cette chambre remplie d’hommes, dont certains cherchaient secrètement des endroits où leurs maîtresses pourraient avorter. » La loi a finalement été adoptée, grâce au soutien de l’opposition de gauche, même si Veil a dû supporter l’affront de croix gammées peintes sur sa voiture et sa maison. Aujourd’hui, la « loi Veil » bénéficie d’un soutien écrasant en France, où peu de politiciens traditionnels osent la remettre en question. « On me demande souvent ce qui m’a donné la force et la volonté de continuer le combat (pour cette loi). Je crois profondément que c’est ma mère, elle n’a jamais cessé d’être présente pour moi, à côté de moi »

Une carrière pour l’Union Européenne

Simone a consacré la majeure partie du dernier volet de sa carrière politique à la cause de l’intégration européenne, quittant le gouvernement en 1979 pour se présenter aux premières élections directes du Parlement européen. Cette année-là, elle remporte le premier de ses trois mandats consécutifs et devient la première femme présidente du Parlement, poste qu’elle occupe jusqu’en 1982. Après avoir repris son poste de ministre de la santé entre 1993 et 1995, Simone Veil est nommée trois ans plus tard au Conseil constitutionnel français, la plus haute autorité constitutionnelle du pays. Plus tard, en 2008, Sarkozy a modifié les règles régissant la Légion d’honneur - la plus haute distinction française - afin que Simone Veil puisse recevoir la médaille de grand officier sans passer par les ordres inférieurs. La même année, elle a été élue à l’Académie française, devenant ainsi la sixième femme seulement à rejoindre les prestigieux « Immortels » qui président à la préservation de la langue française. Son épée de cérémonie était gravée de la devise de la République française (« Liberté, Égalité, Fraternité »), de celle de l’Union européenne (« Unie dans la diversité ») et des cinq chiffres tatoués sur son avant-bras dans l’enfer d’Auschwitz, qu’elle n’a jamais retirés.

Décès, hommage, et une place au Panthéon

Décédée le 30 juin 2017, un hommage national a eu lieu aux Invalides le 5 juillet 2017. À sa mort, la décision d’inhumer sa dépouille au Panthéon a été prise en un temps record ; elle est seulement la cinquième femme à y être inhumée et la première personne de la Cinquième République. Elle y a rejoint de grands noms comme Marie Curie, Alexandre Dumas, Victor Hugo, Jean-Jacques Rousseau et Emile Zola, pour ne citer que quelques-uns des 77 qui y reposent. Le cortège vers le Panthéon a débuté au Mémorial de la Shoah et s’est arrêté à trois reprises pour commémorer son impact dans trois domaines : les droits des femmes, notamment la loi Veil qui a légalisé l’avortement, l’Union européenne, dont elle a été la première femme à présider le Parlement, et la mémoire de la Shoah, dont elle a été une survivante. Après une journée d’honneur dans l’entrée principale du Panthéon, elle a été placée dans la même partie de la crypte que d’autres grands défenseurs de la liberté (Jean Moulin, André Malraux, René Cassin et Jean Monnet). Simone Veil est sans doute la personne qui a le plus fait progresser les droits juridiques des femmes en France au cours des XXe et XXIe siècles. C’est certainement celle dont le nom revient le plus souvent, chaque fois que l’on évoque la loi qui porte son nom, celle qu’elle a proposée et défendue au Parlement français légalisant l’avortement, et entrée en vigueur il y a 47 ans, un 17 janvier 1975.

Evita La dame de son peuple

Evita, actrice et femme politique argentine qui marqua son époque par sa lutte pour l’égalité féminine dans son pays. Mariée au Président de l’Argentine, Juan Peron, elle est la première Première Femme a avoir pris une part active dans la campagne de son mari.

Par Sophie Cristiani

UUne place de choix qui l’aidera à œuvrer en faveur du droit de vote des femmes, qui fut finalement adopté en 1947. Après l’obtention de l’égalité politique entre hommes et femmes, elle lutte pour l’égalité juridique des conjoints dans le droit matrimonial, mise en œuvre en 1949. En cette même année, elle fonde le Parti Péroniste Feminin tout en déployant une ample activité sociale : construction d’hôpitaux, asiles, écoles, colonies de vacances, mise en place des bourses d’études, aides aux logements. Evita s’efforce d’ameliorer le statut de la femme dans la société sur différents plans, une mission qu’elle poursuivra jusqu’à sa mort à l’âge de 33 ans, d’un fulgurant cancer du col de l’utérus. Un an avant son décès, en 1951, le mouvement propose que leur icône nationale pose sa candidature à la vice-présidence. Malheureusement, sa santé déclinante et la pression des oppositions internes de la société, ainsi qu’au sein même du péronisme devant l’éventualité qu’une femme appuyée par le syndicalisme puisse se hisser à un tel rang, lui font renoncer le 31 août à toute carrière politique, une date connue sous le nom du Jour du Renoncement. Honorée de nombreux titres honorifiques qui reflètent l’influence de cette femme à contre-courant des idées de son pays : Jefa Espiritual de la Nacion, Mujer del Bicentenario, Gran Cruz de Honor, Distincion del Reconocimento de Primera Categoria ainsi que le collier de l’ordre du Libérateur San Martin, la plus haute disctinction argentine. Des films et des séries, Evita sur les écrans en 1996 avec Madonna dans le rôle-titre. Il est aujourd’hui dans la mémoire collective le souvenir d’une véritable femme du XXe siècle.

Malala Éducation à tout prix

Icône du “female empowerment”, près de 14 ans de lutte pour les droits des femmes au Pakistan qui lui coûta presque la vie lors d’un attentat. En 2009, Malala avait commencé à écrire un blog, sous un pseudonyme, sur l’intensification des activités militaires dans sa ville natale, et sur ses craintes que son école soit la cible d’une attaque.

Par Louise Koehler

Malgré le fait que son identité ait été révélée, Malala et son père Ziauddin ont continué à défendre le droit à l’éducation. L’attaque à mains armées des talibans contre Malala, le 9 octobre 2012, alors qu’elle rentrait de l’école avec ses amis, a été condamnée par le monde entier. L’Assemblée Nationale ratifie alors la première loi sur l’éducation gratuite et obligatoire du pays après la signature de plus de 2 millions de pakistanais en faveur du droit à l’éducation. En 2013, Malala et son père ont tous les deux fondé le Fonds Malala pour sensibiliser le monde à l’impact social et économique de l’éducation des filles, et pour leur donner les moyens de réclamer des changements. Rencontres de présidents, premiers ministres représentant ces jeunes femmes défavorisées autour du globe, et ce discours devant les Nations Unies le jour de son seizième anniversaire qui changea le cours de son histoire. En décembre 2014, seulement âgée de 17 ans, et tout en enchaînant les A au GCSE (General Certificate of Secondary Education), elle est devenue la plus jeune lauréate à recevoir le Prix Nobel de la paix. Un partenariat avec

AppleTV ainsi qu’une Masterclass en 2021, tous deux précédés d’« I am Malala », son livre publié en 2013 qui deviendra un best seller international et inspirera, peut-être, tant d’autres femmes pour élever la voix en direction de causes nobles qui, au final, ne devraient même pas l’être, pour être juste la normalité.

Ocean : Histoires d’eaux

C’est le nouveau projet de l’UNESCO ! En collaboration avec Alexis Rosenfeld, spécialiste reconnu de la grande bleue, la commission océanographique intergouvernementale des Nations Unies et le photojournaliste sont partis pour collaborer ensemble pendant 10 ans, afin d’explorer le monde fascinant qu’est l’océan à travers une multitude de clichés.

Par Maïa Mercier

UNE EXPOSITION GARE DE LYON

En 2021, une vingtaine d’images ont été présentées en très grand format sur le parvis de Paris Gare de Lyon par la Commission Océanographique Intergouvernementale de l’UNESCO et SNCF Gares et Connexions. Ces photographies ont été prises depuis la Méditerranée jusqu’au Parc Naturel de la Mer de Corail en Nouvelle Calédonie. C’est aussi l’un des systèmes récifaux les plus étendus du monde, abritant une variété exceptionnelle d’espèces de coraux et de poissons. À l’occasion du lancement de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques (2021-2030), un gigantesque travail d’exploration et de partage s’annonce. Il s’est déjà concrétisé, avec cette première exposition à ciel ouvert et en libre accès sur le parvis de la Gare de Lyon. Cette exposition a également été présentée courant mars à Paris Gare du Nord. Bien plus qu’un projet photographique : une décennie d’exploration

Pour le plongeur professionnel Alexis Rosenfeld, cette collaboration, c’est bien plus qu’un projet photographique ! Il représente une décennie d’exploration où vont être mobilisés les moyens les plus innovants pour aller à la rencontre d’écosystèmes marins méconnus et des scientifiques qui œuvrent pour leur préservation. Grâce au talent de plongeurs émérites, véritables aquanautes qui repoussent les limites de leur discipline pour atteindre des profondeurs inexplorées, grâce aussi à une équipe de grands professionnels de l’image et du son qui allient technicité et inventivité, ils vont capter des images encore jamais vues.

Explorer, documenter, transmettre

Chaque exploration fera l’objet d’une production photographique, de films, d’interviews, pour réaliser des films documentaires, des expositions et du matériel pédagogique. L’objectif : permettre au plus grand nombre de découvrir les merveilles de l’océan, mais aussi les dangers qui les menacent et les solutions qui sont imaginées pour les protéger. En portant les valeurs de l’UNESCO et de la COI, « 1 Océan le plus grand témoignage sur l’Océan » veut transmettre à tous et valoriser les travaux et résultats scientifiques entrepris. À travers ce projet, ils veulent susciter l’émerveillement en montrant les refuges de la biodiversité, endroits exceptionnels dont beaucoup sont classés patrimoine mondial. « 1 Océan le plus grand témoignage sur l’Océan », ce sont 1 000 photographies inédites qui chacune raconte une histoire, un phénomène naturel, une curiosité biologique, un écosystème fascinant ou un projet scientifique. Un arrêt dans le temps de quelques centièmes de seconde qui raconte l’océan et ceux qui s’engagent pour sa préservation.

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Les récifs coralliens en mer Rouge 02

Les récifs coralliens de Mayotte 03

Les récifs des Gambier 04

Mer de Sulu Philippines

4récifs dans l’objectif d’Alexis ROSENFELD

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ALEXIS ROSENFELD

Les récifs coralliens en mer Rouge : « Nous sommes ici en plein milieu de la mer Rouge, entre l’Arabie saoudite et l’Égypte. Techniquement, cette photo est très compliquée à réaliser. La technique particulière que je garde secrète permet de restituer cette immensité corallienne. Ici, il faut imaginer qu’il y a au moins 40 mètres de large et plus de 20 mètres de haut. » Maldives, mer Rouge, Philippines, Polynésie française, Mayotte... Armé de son appareil photo et de son arsenal de plongée, Alexis Rosenfeld arpente depuis plus de deux ans les coraux du monde entier. Retour sur ses impressions, mais aussi sur ces quatre récifs qui l’ont marqué.

Les récifs coralliens de Mayotte : « La découverte du parc naturel de Mayotte a été vraiment marquante pour moi. Le niveau de préservation de ce récif est pour l’instant impressionnant. Je dis pour l’instant, car il y a un contraste entre un lagon sublime et un site terrestre absolument horrible. Mayotte est une poubelle et son récif va terriblement être touché dans peu de temps si on ne fait rien. Pour protéger la mer, il faut déjà gérer la terre. »

Les récifs des Gambier : « Les îles Gambier font partie de la Polynésie française, un des endroits les plus touchés par les essais nucléaires dans les années 1970 de Mururoa et Fangataufa à cause des retombées radioactives. Depuis, il y a une maladie, la ciguatera: une toxine présente dans le poisson et dangereuse pour l’homme. La pêche est donc interdite dans cette zone. C’est un endroit fabuleux car hyper sauvage. »

Au cœur de la mer de Sulu, aux Philippines, une zone ultra protégée : « Les récifs de Tubbataha aux Philippines sont gardés par des Rangers armés, comme dans les zones protégées d’Afrique. Au moindre manquement, c’est la prison directe. La zone est ouverte au public trois mois par an, et les autorités limitent la fréquentation à 3 000 touristes par an. Le niveau de protection et l’état du récif sont logiquement impeccables. Cela fait d’ailleurs 25 ans que le site est classé au patrimoine mondial de l’Unesco. »