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entretien avec le Professeur Henri Holec
Fabrice Barthélémy : Vous avez passé, Professeur, plus de vingt ans à la tête du Crapel de Nancy (créé en 1969). Les plus jeunes n’ont peut-être pas une idée bien précise de la vocation et de la spécificité du Crapel, pourriez-vous nous dire quelles sont, selon vous, les principales caractéristiques de cette institution ?
Henri HOLEC : En 1969, le Ministère de l’Education Nationale «officialise», sous le nom de Centre de Recherches et d’Applications Pédagogiques en Langues, le Groupe de Recherches et d’Applications Pédagogiques (GRAP) qui s’était constitué à l’université de Nancy autour d’Yves Chalon dès 1960 pour répondre aux défis de l’enseignement de l’anglais d’abord à l’Ecole des Mines, dont les étudiants ne voulaient plus d’un enseignement écrit et littéraire, puis dans d’autres grandes écoles localisées à Nancy et dans les autres facultés de l’université (Droit, Sciences, Médecine). C’est durant ces neufs premières années que s’est forgée la «philosophie» du Crapel.
1. Conception et pratique de la recherche au CRAPEL : Une équipe constituée de volontaires de la recherche pédagogique (pas de postes CRAPEL), essentiellement des enseignants assurant par ailleurs les enseignements et la recherche liés au statut et aux fonctions définis par leur emploi à l’université, mais aussi des étudiants préparant un CAPES ou une Agrégation;
Des travaux exclusivement orientés vers la résolution des problèmes d’enseignement et d’apprentissage de langue observés dans les enseignements dispensés, impliquant par conséquent une étroite interdépendance entre recherches et applications et l’obligation pour les chercheurs de prendre en charge des cours de langue face à des publics en chair et en os;
Des projets de recherche menés collectivement, avec une réunion hebdomadaire de chaque équipe de recherche et une réunion hebdomadaire de concertation générale;
Une diffusion systématique des résultats de recherche aux plans national et international: organisation de colloques et séminaires, publications (en particulier dans la revue du Centre «Mélanges Pédagogiques»), formations initiales et continues d’enseignants de langue (Certificats de licences de langue, Maîtrise de Pédagogie des Langues, stages et ateliers de formation), communications internationales, missions de formation à l’étranger;
Des publics concernés: étudiants, essentiellement non spécialistes de langues, adultes en formation continue;
Des langues concernées: anglais, français langue étrangère, espagnol dans une formation expérimentale bilingue anglais/espagnol.
2. Orientation de la recherche au CRAPEL :
Par définition historique, la recherche au CRAPEL est avant tout non conformiste, fondée sur la remise en cause de toutes les idées reçues qui fossilisent en permanence la conception (la problématique) et la pratique (la méthodologie) de l’enseignement/apprentissage de langue. De là un bouleversement continu des représentations et des usages qui structurent la didactique des langues, depuis les plus fondamentaux - qu’est-ce qu’enseigner, qu’est-ce qu’apprendre, qu’estce qu’acquérir une langue ? quels rapports entre enseigner, apprendre, acquérir ? qu’est-ce qu’un
apprenant (néologisme formé sur le modèle de l’anglais «learner», forgé et diffusé par le Crapel au début des années 1970, en remplacement de «l’enseigné») etc.- jusqu’au plus spécifiques - quels matériels pour un apprentissage autodirigé; quelles activités pour la découverte, la pratique systématique, et la mise en œuvre spontanée de connaissances culturelles ? etc.
3. Principaux axes de recherche et de développement :
Les principaux axes de recherche explorés au fil des ans et, pour certains, toujours d’actualité, considérés comme les fondamentaux du CRAPEL, ont concerné :
la définition et l’enseignement/apprentissage des compétences langagières de compréhension orale, compréhension écrite, expression orale et expression écrite;
la méthodologie de l’utilisation des documents authentiques,
la dimension culturelle de l’enseignement/apprentissage de langue, l’enseignement/apprentissage à distance ;
le processus cognitif d’acquisition des langues et sa prise en compte dans l’enseignement/ apprentissage;
la problématique de l’autonomie de l’apprenant et la méthodologie de l’apprendre à
apprendre;
la problématique et la méthodologie de l’apprentissage autodirigé.
F. Barthélémy : Il y a une trentaine d’année déjà, vous aviez publié un texte dont l’importance conceptuelle n’a pas été démentie (« Plaidoyer pour l’auto-évaluation ». LFDM n° 165, 1981) : pensez-vous, comme le suggère MJ. Barbot35 qu’il s’agit aujourd’hui d’un concept « galvaudé » ?
Henri HOLEC : Si, en le qualifiant de «galvaudé», MJ Barbot entend souligner que le concept d’auto-évaluation est aujourd’hui «gâché, avili par un mauvais usage», elle a tout à la fois raison et tort.
Raison, car l’usage «débridé» qui a été fait, depuis le milieu des années soixante-dix, du terme d’auto-évaluation a eu pour effet, pour ceux qui en ont été responsables, de faire perdre sa netteté, voire sa pertinence théorique, au concept qu’il est censé dénoter: à force de confondre évaluation interne et externe, évaluation formative et sommative, évaluation externe et certification, auto-évaluation et auto-application d’une évaluation externe, certains ont fini par perdre de vue le concept et à se gargariser de la coquille vide du mot (la même mésaventure est également arrivée au concept d’autonomie, soit dit en passant).
Tort, car en dépit de cet usage dévoyé du terme, le concept d’auto-évaluation n’a fait que se préciser et s’enrichir au fil du temps, grâce à la réflexion continue qui s’est portée sur la notion d’évaluation, et surtout, peut-être, grâce à la clarification du paradigme conceptuel qui définit la démarche dite de l’autonomie (autonomie de l’apprenant et apprentissage autodirigé), démarche dans laquelle est située, rappelons-le, l’auto-évaluation. C’est ainsi qu’actuellement, pour ceux qui se préoccupent plus volontiers du feu qui se cache sous les mots que du nuage de fumée qui
soit dans la perspective autonomie= indépendance // auto-apprentissage=apprentissage avec enseignement ‘à distance’, et se définit alors comme une évaluation externe dont les objectifs, les critères et les seuils sont déterminés dans l’enseignement qu’ils prennent en charge par procuration,
soit dans la perspective autonomie=capacité d’apprendre // auto-apprentissage= apprentissage autodirigé, et se définit alors comme une évaluation interne et constitutive de l’apprentissage dont les objectifs, les critères et les seuils sont déterminés par l’apprenant.
F. Barthélémy : Vous préférez, je crois, le terme « apprentissage autodirigé » à celui « d’apprentissage en autonomie ». Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ?
Henri HOLEC : La dénomination «apprentissage autonome», ou «en autonomie» est pour le moins ambigüe sinon dépourvue de sens. Si l’on définit l’autonomie comme une capacité, la capacité de prendre en charge son propre apprentissage, il est clair que le terme ne peut s’appliquer qu’à une personne, en l’occurrence l’apprenant: un apprentissage exige certes des capacités de la part de ceux qui le pratiquent mais ne peut en aucun cas être lui-même qualifié de capacité. Dans ces conditions, un apprentissage réalisé par un apprenant autonome sera dénommé «apprentissage autodirigé» (plutôt, de mon point de vue, qu’« auto apprentissage », qui ne lève pas l’ambigüité). En revanche, si l’on définit l’autonomie comme une qualité, celle d’indépendance de l’apprenant vis à vis d’une autorité de tutelle concernant le choix du quand et du où de l’apprentissage et éventuellement une certaine liberté de choix parmi les objectifs, les contenus et les ressources d’apprentissage qui lui sont proposés, alors l’apprentissage que conduit cet apprenant indépendant peut être qualifié d’autonome, ou en autonomie.
Mais attention, dans ce cas, au risque de confusion généré par l’utilisation d’un même mot pour faire référence à deux concepts totalement différents, ceux de capacité et de qualité. Parler dans le même temps d’apprenant autonome (capacité) et d’apprentissage autonome (qualité) aura les conséquences calamiteuses que l’on peut déjà observer : on «oublie», par exemple, que l’apprenant a besoin d’acquérir la capacité non innée d’apprendre et on ne lui propose pas de formation spécifique ayant pour objectif d’apprendre à apprendre; on «oublie» qu’apprendre de manière autodirigée exige des ressources matérielles spécifiques bien différentes de celles présentées dans l’enseignement proposé en apprentissage indépendant, etc.
A la fin des années soixante et au début des années soixante-dix, c’est en référence à leur nécessaire indépendance des structures d’enseignement et de leurs enseignants que furent qualifiés de semi-autonomes ou d’autonomes les adultes en formation continue et les étudiants non spécialistes pris en charge par le Crapel. Il s’était avéré impossible en effet , pour un grand nombre d’entre eux, de s’intégrer dans des cursus communs (objectifs communs, contenus thématiques communs, lieux et moments communs, groupes de niveaux communs) : entre le technicien travaillant chez Kodak soucieux de savoir prononcer correctement les termes techniques employés lors des réunions avec l’encadrement étranger de leur entreprise, l’étudiant qui souhaitait maîtriser la lecture des références bibliographiques de son domaine, et le journaliste qui ne pouvait être assuré de suivre pendant six mois consécutifs des cours à dates et à fréquences fixes, il fallait d’évidence opter pour un «travail indépendant».
Mais à partir de 1972-73, années au cours desquelles furent mis en place au Crapel un centre de
ressources (appelé alors « Bibliothèque Sonore ») et la structure spécifique d’accueil des adultes appelée « Système d’Apprentissage en Autonomie avec Soutien » (SAAS), dans laquelle les enseignants cédaient la place à des conseillers ayant pour rôle d’aider les apprenants à apprendre et non plus de leur dispenser un enseignement, la notion d’indépendance fut rapidement remise en cause. Pour véritablement remettre l’apprentissage entre les mains des apprenants, et leur permettre de l’assumer seuls, il apparut clairement que les entretiens de conseil devaient servir à développer leur capacité d’apprendre (savoir se définir un objectif en fonction de ses attentes, savoir choisir parmi les ressources d’apprentissage disponibles celles qui permettront d’atteindre ces objectifs, ou s’en construire de nouvelles (utilisation de corpus personnels), savoir évaluer ses acquis et son apprentissage en tant que tel). Quant à la bibliothèque sonore, elle ne pouvait être d’aucun secours aux apprenants s’ils n’y entraient pas avec une idée précise de l’apprentissage qu’ils venaient y réaliser. C’est alors que le terme d’autonomie fut petit à petit utilisé pour faire référence à la capacité d’apprendre de l’apprenant et non plus à sa qualité d’indépendance. Et le Système d’Apprentissage en Autonomie avec Soutien devint la Structure d’Apprentissage Autodirigé avec Soutien. « Roma non uno die aedificata est ».
F. Barthélémy : On a vu fleurir (parce que les demandes sont de plus en plus manifestes) un tas de centres de ressources qui ont essayé de s’inspirer du Crapel mais qui n’ont pas su mettre en adéquation les objectifs et les moyens d’y parvenir. Une coquille souvent creuse qui cache souvent une simple volonté d’afficher une certaine modernité. Quels sont les grands principes à respecter lorsque l’on veut se lancer dans une telle démarche ?
Henri HOLEC : Dans le contexte d’une démarche pédagogique orientée vers l’autonomisation des apprenants et la mise en place d’apprentissages autodirigés,un centre de ressources a pour vocation de rendre disponibles les supports d’apprentissage dont auront besoin les apprenants aussi bien pour acquérir les compétences langagières qu’ils souhaiteront maîtriser que pour renforcer et développer leur capacité d’apprendre. Qu’il s’agisse de quelques rayonnages disposés au fond d’une salle de classe, ou d’un local où se trouvent réunis des équipements techniques plus ou moins sophistiqués, la fonction d’un tel endroit est donc bien d’offrir des possibilités multiples d’ «apprendre sans enseignement».
Pour que ceci soit le cas, deux conditions fondamentales doivent être satisfaites :
- les supports offerts en libre accès doivent être de nature telle que chaque apprenant puisse en faire les outils de l’apprentissage personnel qu’il se sera défini, puisse donc en faire un usage conforme à ses choix d’objectifs, de contenus et de méthodologie; il s’agira de matériaux d’apprentissage adaptables ;
- les utilisateurs potentiels de ces supports devront avoir reçu une formation préalable adéquate, minimale si parmi les ressources proposées se trouvent des documents et activités d’autoformation, ou même des conseillers disponibles: l’exploitation des supports d’apprentissage ne peut être le fait que d’utilisateurs avertis et en aucun cas celui de consommateurs passifs.
Dans bien des centres de ressources qui se sont mis en place partout dans le monde l’une ou l’autre de ces conditions, voire les deux, n’a pas été satisfaite, avec pour résultat une sous utilisation, ou une utilisation infructueuse de ces centres.
F. Barthélémy : On connaît assez peu le travail du Crapel par rapport à la question de l’enseignement précoce des langues. Pourriez-vous nous en dire quelques mots ?
Henri HOLEC :Dans les années 1980, une équipe s’est constituée au Crapel sur un projet de recherche-développement ayant pour thème l’enseignement/apprentissage des langues dans les Ecoles Primaires. Deux institutrices chargées d’enseigner les langues dans des écoles de Nancy avaient été intégrées à l’équipe Crapel pour deux raisons principales: seules ces enseignantes du terrain pouvaient institutionnellement prendre en charge la mise en place et l’observation des pratiques que l’équipe allait définir, et elles seules maîtrisaient les spécificités de la communication avec des écoliers de CM1 et de CM2.
L’objectif du projet avait, dès le départ, été défini non pas en termes d’un enseignement destiné à développer les compétences en langue étrangère des écoliers, mais un enseignement orienté vers le développement de la capacité des écoliers à apprendre les langues étrangères (le débat autour de ces deux orientations était assez vif à l’époque, avec un assez grand avantage numérique pour les tenants de la première !). Notre démarche n’écartait pas la possibilité pour les apprenants d’accroître leurs capacités langagières, bien entendu, mais prévoyait que ces acquisitions porteraient alors sur deux ou plusieurs langues et non pas sur une seule (le débat autour du choix des langues à enseigner était également très vif à l’époque, beaucoup craignant une domination excessive de l’anglais !).
Les travaux menés par l’équipe concernèrent en priorité le développement de la «culture langagière» des écoliers («language awareness», pour les pédagogues anglais tels qu’ Eric Hawkins), par la prise de conscience de leurs représentations sur différents aspects du langage et de son fonctionnement : qu’est-ce que communiquer, comprendre, s’exprimer ? qu’est-ce que le sens d’un mot ? quels rapports entre l’oral et l’écrit ? etc. (à la lecture de ces questions, on comprend pourquoi il était nécessaire de profiter des savoir-faire communicatifs des institutrices !). Quelques aspects de la composante «culture d’apprentissage» de la capacité d’apprendre furent également abordés : qu’est-ce qu’apprendre, acquérir ? comment apprendre le vocabulaire ? etc.
La sensibilisation des écoliers à ces différents aspects, et la consolidation de leurs représentations , s’articulaient autour d’activités d’observation et de réflexion sur leur langue maternelle et sur différentes langues étrangères voisines ou plus «exotiques» : ainsi, une description rapide des huit genres d’une langue bantoue permet de faire voler en éclat la représentation «genre grammatical= sexe / masculin-féminin= mâle-femelle» du petit français moyen !; écrire, en français, une petite carte postale fictive à un copain, puis à sa grand’mère, puis à son institutrice, fait saisir sans efforts la notion de registre de langue et de discours. Un certain nombre d’activités à pratiquer en classe furent alors élaborées et leurs supports écrits, oraux, picturaux furent mis au point.
Par un malencontreux hasard, à la rentrée des classes suivante, l’une des institutrices obtint une mutation qu’elle espérait depuis longtemps, et l’autre fut délestée de ses heures d’enseignement de langue... Le projet ne fut jamais repris : le ministère avait opté pour l’autre démarche, commencer l’enseignement traditionnel d’une langue à l’école, avec le résultat que l’on connaît, en particulier au niveau du suivi de cet apprentissage en collège. L’histoire semble d’ailleurs en bonne voie de se répéter ces temps-ci !
F. Barthelemy : La question de la formation linguistique des migrants est revenue au devant de la scène Fle (avec la création récente de ce label fli décrié). Vous êtes-vous intéressés, comme le Crédif avait pu le faire en son temps, à ces publics ?
Henri HOLEC : Petit rappel historique : pendant très, très longtemps, l’enseignement du fran-
çais à des non francophones a consisté en une simple transposition de l’enseignement dispensé dans les écoles en France. Je me souviens d’avoir, au cours de ma dernière année d’Ecole Normale d’Instituteurs, en 1956-57, «alphabétisé» des migrants d’Afrique du Nord parlant à peine le français avec le manuel du cours préparatoire « Rémy et Colette » ! Ce n’est qu’avec la création du CREDIF en 1959 que s’est trouvé légitimé un domaine de recherches et d’applications pédagogiques nouveau répondant au souci de certains pédagogues d’enseigner, à l’étranger, la langue en tant que telle, la langue orale, de fait (la même révolution s’était produite quelques années plus tôt pour l’anglais). D’orientation linguistique au départ, avec une réflexion centrée sur le quoi enseigner (français élémentaire) le domaine s’est petit à petit diversifié pour incorporer le comment enseigner, à qui, et dans quelles situations. La pédagogie des langues étrangères s’est ainsi trouvée enrichie du domaine de la pédagogie du français langue étrangère, comme a, par la suite, été dénommée cette nouvelle orientation de l’enseignement/apprentissage du français.
Petites clarifications terminologiques : par FLE, FLS, etc. on entend bien entendu Pédagogie, ou Didactique du FLE, FLES, etc. Le FLE n’est pas une variété de français, comme peut par exemple l’être le français du Québec, ou le français des banlieues, ou le français de Rabelais. Et, historiquement aussi bien que par nature, la qualification de «langue étrangère» permet de spécifier qu’il s’agit du français appris par des non francophones et non du français enseigné à des francophones, le français langue maternelle.
Le domaine du FLE est donc celui de l’enseignement/apprentissage du français à/par tous les apprenants qui n’ont pas cette langue comme langue maternelle (quelle que soit la définition que l’on donne de cette notion). A l’intérieur de ce domaine, on a pu distinguer des zones présentant des particularités à fort impact sur la problématique et/ou la méthodologie de l’enseignement/ apprentissage : caractéristiques de la situation d’apprentissage, français langue seconde, apprise dans un environnement francophone; caractéristiques du type d’apprenant, français pour migrants résidant en France; caractéristiques des objectifs poursuivis, français langue de spécialité; etc. Et chacune de ces grandes zones peut encore être subdivisée selon des critères additionnels ou par simple croisement des critères initiaux : français pour étudiants étrangers, langue seconde et besoins spécifiques; français pour migrants non alphabétisés, ou alphabétisés mais dans un système graphique différents de celui du français; français pour apprenants de langue latine, ou germanique, ou finno-ougrienne, ou à tons; enseignement du français en grands groupes, etc.
Toutes ces spécialisations de recherche et d’enseignement ont en commun d’être incluses dans le champ de la Didactique du Français Langue Etrangère : elles contribuent à le jalonner, participent à la définition de sa problématique, sans pour autant constituer des champs séparés autonomes. Elles ne peuvent donc pas se définir en termes d’opposition ou de concurrence, comme certains voudraient le faire.
Remarque finale: La Licence et la Maîtrise de FLE (je ne connais que ces anciennes dénominations) ont été créées pour offrir une formation initiale professionnalisée adéquate à tous les futurs enseignants de FLE, quels que soient les lieux où ils enseigneront, les publics qu’ils prendront en charge, les conditions dans lesquelles ils enseigneront. A ce titre, elles offrent des enseignements généraux en didactique des langues étrangères aussi bien que des modules plus spécialisés en fonction de visées professionnelles plus spécifiques, à définir par les postulants à l’habilitation. La création d’une maîtrise de FLI, et non l’incitation à ouvrir une option FLI dans les maîtrises FLE existantes, résulte donc d’un pur choix politique et non d’une volonté de combler un vide supposé dans les formations offertes par les universités. Elle ne constitue pas, par conséquent, un progrès dont on devrait se réjouir.