AJ Mag (ancien LPH magazine) du 8 fevrier 2024

Jeudi 8 février 2024 29 Chvat 5784 Nº 1006 | Mensuel

DOSSIER

PÉRIL JAUNE EN TERRE SAINTE INTERVIEW

QUALITA : PLUS QUE JAMAIS MOBILISÉE

ÉCONOMIE

TKOUMA : L'AVENIR DÉJÀ EN MARCHE

GRAND ANGLE LA GUERRE VUE PAR LES ENFANTS

‫יחד‬ ‫ננצח‬

ENSEMBLE !

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Des milliers de familles du Sud ont perdu leur travail, ne peuvent plus payer leurs factures et subvenir aux besoins essentiels de leur quotidien.

Les familles déplacées sont particulièrement démunies.

PARRAINEZ UNE FAMILLE DU SUD D’ISRAËL ASHDOD / ASHKELON / NETIVOT / SDEROT

Bons alimentaires – Aide au loyer – Soutien psychologique

Pour faire un don : www.allodons.fr/israel-tsedaka-by-qualita Possibilité d’aller sur le terrain à la rencontre des familles pour distribuer les colis Plus d’informations : +972 54 8909 314 / time@qualita.org.il Je parraine une famille du Sud pendant* : 1 an : 7 200 shekels / 1 800 euros 3 mois : 1 800 shekels / 450 euros Montant libre : 2 AJ MAG N° 1006

6 mois : 3 600 shekels / 900 euros 1 mois : 600 shekels / 150 euros

* Possibilité d’effectuer un don en plusieurs règlements mensuels.

Notre plus belle arme ‫מנכ''ל‬ Directeur de la publication Ariel Kandel

Journalistes : Esther Amar Guitel Ben-Ishay Béatrice Nakache Nathalie Sosna-Ofir Pascale Zonszain Eden Levi-Campana Charles Szlakmann Contributeurs : Yoel Benharrouche Avraham Dray Yoel Haddad Ariela Chetboun Elie Kling Carole Rotneimer Daniel Rouach Correctrice Carine Brenner Direction artistique Studio Actualité Juive Service iconographique Istock – Flash 90

édito

‫עורכת ראשית‬ Rédactrice en chef Anne-Caroll Azoulay caroll@actualitejuive.com

Service commercial et publicitaire contactisrael@actualitejuive.com 058-461-6262 Service abonnements contactisrael@actualitejuive.com Secrétariat AJ MAG/AJ 058-461-6262

Le 24 janvier, Israël célébrait le soixante-quinzième anniversaire de la fondation de la Knesset. « Ce n’est pas un joyeux anniversaire », a cependant déclaré le président de la Knesset, Amir Ohana, en ouverture de cette session spéciale, en présence du Premier ministre B. Netanyahou et du président I. Herzog. « La guerre nous fait payer chaque jour un lourd tribut, depuis maintenant 110 jours. Hier, la matinée fut particulièrement difficile et douloureuse, avec la mort de 24 de nos fils, soldats de Tsahal, vingt-quatre âmes, chacune d’entre elles étant un monde à part entière », a-t-il rappelé.

Et le président Herzog de poursuivre : « Personne ne doute qu’en cette assemblée se tiendront très bientôt les débats les plus importants et probablement aussi les plus houleux qui soient. Même dans ces moments historiques où nous sommes confrontés à des défis auxquels peu de nations sont confrontées […], il est possible d’avoir un vrai débat. Mais lorsque vous êtes en désaccord, restez dignes ! Il ne faut surtout pas revenir aux discours du 6 octobre. Il est impossible de parler de respect mutuel et d’unité si la Knesset ne donne pas l’exemple du changement. Ce que demandent la population, les familles, doit se refléter ici et doit devenir un puissant commandement gravé sur les murs de ce temple. C’est notre devoir envers le pays, envers cette génération. Soyez dignes. » Cet appel sera-t-il entendu par la classe politique ? Car le peuple, lui, n’a pas de leçon de dignité à recevoir. Lors des funérailles, sur le front, dans les hôpitaux et les bases militaires prises d’assaut par les infatigables bénévoles, ensemble, béya'had, la lumière du peuple d’Israël se révèle encore et encore. Afin qu’elle brille toujours plus haut, l’association Qualita d’aide aux olim francophones lance son opération annuelle « Israël Tsedaka by Qualita », pour venir au secours des familles du Sud déplacées, des soldats en détresse psychologique ou financière et des familles défavorisées dont la situation s’est aggravée avec la guerre. Au-delà des chars et des munitions, notre plus belle arme reste la générosité. Sa profondeur et son ampleur surprendront toujours nos ennemis. La solidarité légendaire qui nous unit est le plus puissant dôme de fer qui assure l’éternité d’Israël. Éteignons nos postes de télévision, oublions les divisions alimentées par des débats mortifères et stériles, et prenons conscience de notre capacité à changer les choses, chacun à son niveau. Du temps, de l’argent, une écoute, un sourire : ce sont les ingrédients qui serviront à construire les bases des nouvelles fortifications contre lesquelles les barbares ne pourront rien. Ils guettent nos failles comme des chacals affamés. N’en montrons aucune. Ensemble, nous allons nous dépasser, nous surprendre nous-mêmes par notre force, notre grandeur d’âme et notre détermination à devenir ce peuple que le Créateur a toujours su que nous pourrions devenir.

Al tira, Israël, al tira, ya'had nénatsea'h ! Ne crains rien, Israël, ne crains rien, ensemble nous vaincrons ! n

Adresse 10-12 rehov HaRav Agan, Jérusalem Contact petites annonces contactisrael@actualitejuive.com AJ MAG Supplément mensuel de l’hebdomadaire Actualité Juive ‫ הפצה‬Distribution

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EN COUVERTURE :

© Flash90 et Studio AJ MAG

AJ MAG N° 1006

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sommaire N° 1006 5

INTERVIEW

Qualita : plus que jamais mobilisée

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REPORTAGE

Comment Tel Aviv s’est transformée en ville-refuge

8-21 DOSSIER PÉRIL JAUNE EN TERRE SAINTE

l OMBRE CHINOISE 24

ÉCONOMIE

Tkouma : l'avenir déjà en marche

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TRIBUNE

Le retour de la bête immonde

l GALIA LAVI : « LA GUERRE À GAZA

A TERNI LA RÉPUTATION DE LA CHINE AU MOYEN-ORIENT. » l LA CHINE EN ISRAËL : RISQUE OU

OPPORTUNITÉ ? l EDDY CUKIERMAN : « ISRAËL NE

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BOUILLON DE CULTURE

Isabelle Durin, un violon dans l’histoire

PEUT SE PERMETTRE D'ÊTRE INACTIF SUR LE MARCHÉ CHINOIS. » l LÉORA ARGAMANI : « JE NE

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HISTOIRE

Il y a 80 ans, l'Irgoun proclamait la révolte contre l'Empire britannique 34

GRAND ANGLE

La guerre vue à travers le regard des enfants d’Israël 39

LEADERSHIP

Les trois dimensions du leadership

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DEMANDE QU'À REVOIR MA NOA DANS LE TEMPS QU'IL ME RESTE ! » 40

NEWS À LA LOUPE

Une rentrée universitaire à l’ombre de la guerre

ET AUSSI...

Judaïsme (44), Le Kling du mois (48), Une année avec la Cabale (49), Jeux (51-53), Immobilier (54)...

ARRÊT SUR IMAGE Le capitaine (de réserve) Assaf Peleg, ancien commandant de l'unité Douvdevan de Tsahal et aujourd'hui commandant de l'équipe d'urgence (kitat konenout) à Kiryat Malakhi.

'Hassid empreint d’amour pour la spiritualité et pour le peuple juif, Assaf Peleg représente cet « ensemble » si nécessaire en Israël !

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INTERVIEW

Qualita : plus que jamais mobilisée PAR ANNE-CAROLL AZOULAY

Depuis le début de la guerre, l’association Qualita est elle aussi montée au front pour aider, soutenir, assister des milliers de Franco-Israéliens. À la veille de son opération annuelle « Israël Tsedaka

by Qualita », son directeur général, Ariel Kandel, fait le point sur les différentes opérations qui ont été menées, et livre son analyse de l’état d’esprit de la communauté francophone d’Israël et de la possibilité d’une Alya de France.

Ariel Kandel

© DR

MAG AJ : Comment la guerre a-t-elle impacté Qualita ?

Ariel Kandel : D’une manière générale, la guerre a renforcé notre action, en nous obligeant à créer de nouveaux projets destinés à aider des milliers de personnes en détresse. Dès le début de la guerre, des centaines de bénévoles ont appelé environ 15 000 familles arrivées au cours des dix à quinze dernières années en Israël, avec pour objectif de prendre le pouls d’une population totalement traumatisée et d’évaluer les besoins spécifiques de chaque famille.

Nous avons accompli cette mission au cours des trois premières semaines de la guerre. lll AJ MAG N° 1006

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INTERVIEW Le Studio Qualita reçoit chaque jour des intervenants qui offrent aux auditeurs une analyse pointue des problèmes liés à la communauté francophone en Israël. Ce traitement particulier de l'information a fait du Studio Qualita un média incontournable pour les francophones d'Israël. La proximité que cultive le Studio Qualita est encore renforcée par le centre d'écoute téléphonique permettant de répondre aux questions des olim ou de ceux qui envisagent de faire leur Alya.

lll En parallèle, nous avons ouvert une ligne d’écoute et de soutien psychologique animée par des professionnels pour apaiser les gens en état de stress, les rassurer et, le cas échéant, les adresser à des services de santé. Une seconde ligne, « le moked », a par ailleurs été ouverte pour répondre aux questions liées aux droits, aux démarches administratives, aux aides mises en place par le gouvernement pour les familles concernées du Sud et du Nord, les familles des soldats, les personnes blessées, etc., car les francophones ne maîtrisant pas encore suffisamment l’hébreu ont du mal à actionner les bons leviers et ne connaissent souvent pas leurs droits. Qualita est aussi là pour cela.

Au total, entre nos équipes, les bénévoles et les professionnels, près de 300 personnes ont été mobilisées sur ces trois projets de terrain, après avoir été formées.

Dans le domaine de l’emploi, qui représente un aspect crucial de nos activités régulières, nous avons là encore apporté des réponses ad hoc à des problèmes générés par la guerre. Des gens ont perdu leur emploi, d’autres ne sont plus en mesure de travailler, certains ont dû changer d’activité… Nos équipes à l’écoute ont fait preuve d’une grande réactivité pour proposer des solutions et faire en sorte que les familles ne tombent pas dans un engrenage de paupérisation.

Le Studio Qualita, web TV en français, a fonctionné et fonctionne à plein régime, lui aussi…

Effectivement, et nous avons enregistré des pics d’audience impressionnants. Nous nous sommes démarqués par le ton résolument communautaire que nous avons apporté à la couverture de la guerre. En recevant sur nos plateaux des bénévoles francophones, des familles de soldats et de victimes francophones, des porte-parole de l’armée francophones et des professionnels de la santé francophones, le Studio Qualita a répondu à un public qui avait besoin de ce traitement particulier de l’information – à tel point que le ministère de la Diaspora s’est tourné vers nous pour organiser et diffuser une soirée d’information liée à la « hasbara », qui a été suivie par des milliers de personnes en Israël et en dehors d’Israël.

Justement, qu’en est-il de l’aide sociale ?

Depuis le lancement de l’opération « Israël Tsedaka by Qualita », il y a quatre ans, plus de 5000 francophones en grande difficulté sociale et financière ont été identifiés par Qualita et les associations partenaires. La guerre a malheureusement fait exploser les demandes d’aide financière au sein de familles de olim particulièrement exposées dans le sud du pays, à Ashkelon, Netivot, Ashdod, etc. Nous avons donc immédiatement dû nous adapter en répondant à ces milliers de personnes en détresse et en distribuant aussi des aides d’urgence.

Cette année, l’opération « Israël Tsedaka by Qualita » est plus que jamais nécessaire. Il nous faut en effet répondre aux besoins des familles pauvres que nous aidons avec nos associations partenaires, ainsi qu’au contingent de « nouveaux pauvres » qui est apparu

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INTERVIEW avec la guerre, le déplacement et le traumatisme des personnes, sans oublier les familles qui comptent des blessés et celles qui sont endeuillées. La tâche est ardue mais nous comptons sur la magnifique solidarité du peuple juif pour nous montrer à la hauteur du défi.

La guerre a entraîné une augmentation drastique de l’antisémitisme en France et des ouvertures de dossiers d’Alya. Qualita se prépare-t-elle à une immigration massive des Juifs de France ?

Les gens qui s’intéressent à l’Alya ne concrétiseront leur projet que s’ils sont accompagnés quasiment jusqu’à leur départ. Nous travaillons donc en coopération avec le ministère de l’Intégration sur un projet d’accompagnement, en amont, de ces olim potentiels.

Avec un programme approprié et adapté sur mesure permettant de fournir des réponses concrètes dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, du logement et de l’administration, nous pouvons transformer ces rêves d’Alya en réalité. Sinon, seuls 20 % des dossiers se transformeront en Alya – ce qui représenterait tout de même entre 2000 et 2500 personnes…

À la date d’aujourd’hui, combien de francophones ont bénéficié de l’action de Qualita, d’une manière directe ou indirecte via les associations partenaires ?

Environ 150 000 olim de France ont été impactés par Qualita, que ce soit via le Hub de l’emploi, Studio Qualita, les aides financières, les conférences ou les bénévoles, et avec le concours de nos remarquables partenaires, francophones ou israéliens. L’ADN de Qualita, c’est l’union. Notre collecte de dons est fidèle à ce principe. Il s’agit d’une collecte de dons unitaires permettant de distribuer des bons alimentaires, de financer des formations, des colonies de vacances, des ordinateurs pour étudier par Zoom… Sans relais sur le terrain pour collecter et redistribuer, nous ne serions pas aussi efficaces. n

Scannez le QR code pour faire un don à « Israël Tsedaka by Qualita »

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Péril jaune e

DOSSIER RÉALISÉ PAR NATHALIE SOSNA-OFIR

La guerre redistribue les cartes et incite Israël à faire le point sur ses relations avec le monde. Les amis de nos ennemis sont-ils nos ennemis ? La relation israélo-chinoise, dont l’enjeu économique est colossal, tiendra-t-elle face au copinage de l’Empire du Milieu avec l’Iran ? Et le jeu en vaut-il la chandelle ? Éléments de réponses.

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n Terre sainte

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DOSSIER

Ombre chinoise

L’alliance russo-sino-iranienne et ses représentants actuels (de gauche à droite) : Vladimir Poutine pour la Russie, Li Qiang pour la Chine et Ebrahim Raïssi pour l’Iran. © DR

1992.

Fin de la guerre froide. La Chine et Israël établissent des relations diplomatiques. Pékin voit ainsi une façon de s’ouvrir les portes de l’Europe, importante partenaire commerciale d’Israël, et Jérusalem, celle d'étendre son influence en Asie. Un comité intergouvernemental pour l'innovation est créé ainsi qu’un comité économique israélochinois. Israël, depuis longtemps, suscite l'admiration des Chinois pour sa technologie avancée. En réponse, les grandes universités chinoises ouvrent des centres d'innovation dans des institutions israéliennes de renom, comme le centre Tsinghua à l'Université de Tel Aviv ; et parallèlement, des

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instituts universitaires israéliens s'implantent en Chine, à l'instar du Technion qui ouvre une branche à Shantou, dans le sud de la Chine. Le tourisme chinois connaît une croissance constante, atteignant des sommets en 2016 avec l'arrivée de 80 000 touristes et hommes d'affaires chinois à l'aéroport Ben Gourion – flux interrompu par la pandémie de Covid-19, puis la guerre de Gaza.

Et toutes les petites Chinoises ont les yeux de Chimène pour Eran Zahavi, le footballeur israélien qui évolue dans le club chinois de Guangzhou jusqu'en 2020.

Les yens investis en Israël ont naturellement pour objectif de générer des profits, mais ils servent également, voire principalement, les ambitions géopolitiques de Pékin. La

Chine a clairement l'intention de tirer avantage du déclin de l'influence américaine dans la région pour s'imposer au MoyenOrient et en Méditerranée, par là où l'on s'y attend le moins : Israël. Cependant, depuis 2020, le rythme et le volume de ses investissements en Israël ralentit.

Cela s'explique en partie du fait des pressions qu’exerce l’Amérique, inquiète qu'Israël puisse aider la Chine à devenir une puissance régionale qui ferait de l'ombre à son hégémonie, mais aussi parce que les intérêts chinois, autour du secteur de l’énergie, se sont déplacés vers l’Iran et des pays arabes comme l’Arabie saoudite. Les exportations de pétrole iranien vers la Chine ont triplé au cours des trois dernières années, faisant de

DOSSIER et anti-israéliens – : moqueries sur la mère d’origine Pékin le principal partenaire commercial de Téhéran chinoise de l’otage Noa Argamani qui a demandé depuis 2022. Leur coopération permet également aux l’aide de la Chine, menaces contre les pro-Israéliens deux pays de contourner les sanctions américaines – il y en a –, remise en question du narratif sur qui les visent. la Shoah dans La liste de Schindler actuellement En outre, l’Iran et l’Arabie saoudite jouent un rôle diffusée en Chine… Et sur le radiodiffuseur d'État central dans l'ambitieux projet chinois de la nouvelle chinois : un débat sur le contrôle disproportionné Route de la soie. La signature, en 2021, d'un pacte de des médias américains par les Juifs. Les autorités coopération stratégique et économique de vingt-cinq chinoises tolèrent et ne se pressent pas d'intervenir, ans entre la Chine et l’Iran témoigne de l'importance probablement dans le but de montrer que la croissante de leurs relations. De même, la réconciliation population soutient la cause arabe. entre l’Iran et l’Arabie saoudite, officialisée en Chine, Pourtant, le peuple d'Israël et le peuple chinois revêt une signification cruciale. Ces deux nations sont ont des liens remontant à dix siècles, et ils ont en effet des pièces maîtresses de l'initiative chinoise en commun de de la "Belt and Road provenir de cultures Initiative" ou nouvelle anciennes, et d’avoir Route de la soie, qui réussi à préserver vise à améliorer le leur caractère et développement et les leur patrimoine liaisons commerciales moral tout au long entre l'Asie, l'Europe et de leur histoire. Ces l'Afrique. Cette chaîne liens historiques d’infrastructures, datent de l'époque comprenant des ports, de la communauté des voies ferrées, des juive de Kaifeng, aéroports et des parcs Kaifeng où même industriels, financée aujourd'hui, par des milliards quelques de dollars de prêts descendants de chinois, vise à offrir marchands juifs à la Chine un accès originaires d'Inde élargi à des marchés ou de Perse, ayant bien plus importants 17 avril 2013. Le ministre israélien de l'Économie Naftali Bennett (à droite) signe un accord de Recherche & Développement avec le vice-gouverneur de la province chinoise traversé la Chine au que celui d'Israël et de Guangdong, Chen Yunxian, au ministère de l'Économie à Jérusalem. © Flash90 Xe siècle, résident constitue un moyen stratégique pour encore. Il faut aussi Pékin d'ouvrir de nouveaux horizons commerciaux se rappeler que la Chine a été une terre de refuge à ses entreprises, renforçant ainsi sa position en tant pour de nombreux Juifs pendant la Seconde Guerre qu’acteur majeur sur la scène mondiale. mondiale et déjà avant, dans les années 1930, au Afin de bien montrer dans quel camp elle se situe moment de la montée de l'antisémitisme.

– celui qui s’oppose à l’alliance israélo-américaine –, Malgré la fascination de la Chine pour le peuple juif, en août dernier la Chine a bloqué l’acquisition symbolisée par l'émission, dans les années 1950, par Intel du fabricant de puces israélien Tower d'un timbre chinois à l'effigie de Cholem Aleikhem, Semiconductor, en ne fournissant pas à temps et par des ouvrages de développement personnel l'approbation réglementaire nécessaire, Intel et pour ressembler aux Juifs qui ont réussi, la Chine n'a Tower ayant tous deux des installations en Chine. pas d'alliés, seulement des intérêts. En se liant avec Le rapprochement entre la Chine et l’Iran s’illustre l'Iran, l’Empire du Milieu se rapproche également de aussi dans les prises de positions de Pékin qui, la Russie, sans laquelle sa pénétration dans la région après le 7 octobre, n’a pas condamné les actes du ne peut se faire. S’il y parvient, le flanc oriental de la Hamas. Et alors que l'antisémitisme était plutôt Méditerranée pourrait tomber sous l'emprise sinoinédit en Chine, le voici qui se multiplie sur le Web russe, faisant de l'ombre au front atlantiste polarisé chinois – TikTok favorise les contenus antisémites sur les États-Unis. n AJ MAG N° 1006

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DOSSIER

Galia Lavi,

© DR

vice-présidente du Centre Diane et Guilford Glazer pour la politique israélo-chinoise :

La guerre à Gaza a terni la réputation de la Chine au Moyen-Orient.

habituelle qu’elle réserve aux hostilités entre Israël et les Palestiniens : appels au calme des deux côtés, condamnations des dommages infligés aux civils et exhortations au retour à des négociations fondées sur la solution à deux États.

AJ MAG : Depuis le 7 octobre, la Chine, initialement neutre dans le conflit israélo-palestinien, a adopté une posture davantage propalestinienne. Comment l’expliquer ?

Galia Lavi : Il ne s’agit pas d’un changement radical.

La Chine n'a pas soutenu Israël lors d'événements antérieurs similaires, comme par exemple au moment de l'opération Gardiens des Remparts. À l'époque, en tant que présidente tournante du Conseil de sécurité de l'ONU, elle avait organisé des débats et émis des condamnations à l'encontre d'Israël.

La Chine n’a-t-elle pas saisi l’ampleur du massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre ?

Initialement, en effet, la Chine a considéré que la guerre actuelle entre Israël et le Hamas ne différait pas des conflits passés entre Israël et les Palestiniens.

Cette mauvaise interprétation a conduit à la réaction 14

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Les Chinois n’ont-ils pas réalisé que leur position les associait à « l’axe du mal », dirigé par l’Iran ?

Ils n’ont pas saisi que des pays arabes tels que les Émirats arabes unis, Bahreïn, voire l'Arabie saoudite, ont su faire la distinction entre le peuple palestinien et le Hamas, et condamné l’organisation terroriste ou critiqué ses actions. De ce fait, la Chine s'est retrouvée malgré elle du côté de « l’axe du mal » comprenant l'Iran, la Russie, la Syrie, le Hamas, le Hezbollah et d'autres milices, contrairement à son désir d'être perçue comme « amie de la paix ». Réalisant qu'elle devait minimiser son soutien à l'Iran et améliorer ses relations avec les pays arabes, la Chine a envoyé son émissaire spécial pour des pourparlers au MoyenOrient. Cependant, si la guerre se poursuit, surtout si elle s'étend à d'autres zones et que les pays du MoyenOrient se rangent soit du côté de l'axe iranien soit du côté de l'alliance israélo-américaine, la position de la Chine dans la région pourrait être davantage compromise.

DOSSIER La Chine a-t-elle pris position contre les Houthis ?

Tout dernièrement, la Chine a condamné leurs agissements ; mais il s’agit là, comme souvent avec la Chine, de « belles paroles » pour la façade. En fait, Pékin n’a déployé aucun effort concret pour lutter contre cette milice yéménite et ne tente même pas d'exercer son influence via des canaux secrets ; elle se contente de belles paroles. C’est aussi l’une de ses erreurs.

N'est-ce pas étrange, quand on sait que les attaques des Houthis ont des répercussions sur le commerce maritime et que la Chine est largement concernée ?

En effet, la compagnie Cosco, le plus important transporteur maritime d'Asie, contrôlée par l'État chinois, a suspendu ses liaisons depuis et vers les ports israéliens quelques semaines après OOCL, filiale hongkongaise de Cosco dans les conteneurs, sans préciser les raisons de cette suspension.

Pourtant, des cargos chinois continuent à naviguer en mer Rouge…

Oui, principalement par le canal de Suez, ce qui peut laisser penser que la Chine a conclu un accord avec les Houthis : en échange de l’arrêt de ses liaisons avec Israël, ses navires ne seraient pas visés. La Chine s'est également abstenue de rejoindre la force opérationnelle mise sur pied par les États-Unis pour protéger la navigation dans la région, et ses navires de guerre présents dans la région pour lutter contre la piraterie n'ont pas répondu aux appels de détresse des navires attaqués.

Pourtant, la Chine a l’ambition d’être une alternative aux États-Unis dans la région ?

Comment peut-elle y prétendre, alors que dans la réalité ce sont les États-Unis qui font tout ici, tant du point de vue de la sécurité que de la diplomatie et autres ? Et les dirigeants des pays arabes ne sont pas

Le port de Ningbo-Zhoushan en Chine, à l’heure bleue. Des milliers de conteneurs prêts à être livrés dans le monde entier.

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DOSSIER

stupides : ils voient clairement sur quelle puissance ils peuvent véritablement compter en cas de crise et laquelle n'est que paroles. Bien entendu, les pays arabes ne critiquent pas ouvertement la Chine, car ils désirent les investissements chinois, ce qui est compréhensible. Toutefois, en pratique, cela éloigne considérablement la Chine de son rêve de prendre la place des États-Unis au Moyen-Orient. La guerre à Gaza a terni sa réputation dans la région et ébranlé l’idée qu’elle a vigoureusement promue ces dernières années, selon laquelle les États-Unis se sont retirés du Moyen-Orient et que la Chine y a accru son influence. Plus la guerre durera, surtout si elle s'étend à d'autres arènes et que s’accentue la division entre l'axe dirigé par l'Iran, avec tous ses mandataires, et l'alliance israélo-américaine, plus la position de la Chine au Moyen-Orient sera affaiblie.

Israël doit-il se méfier du rapprochement entre la Chine et l'Iran ?

Cette proximité ne nous réjouit pas – de même que ne nous réjouit pas non plus la Turquie, par exemple, qui entretient elle aussi des liens avec l’Iran – mais nous ne pouvons pas dicter aux pays avec qui ils devraient être amis. Il est vrai que nous espérions toutefois que la Chine pourrait influencer l'Iran et apaiser la 16

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région afin d'éviter une escalade. Malheureusement, cela ne s'est pas produit. Au contraire, Pékin soutient les aspirations iraniennes, y compris en ce qui concerne le programme nucléaire iranien, qu'elle ne considère pas comme une menace majeure pour le Moyen-Orient. En fait, les Chinois disent être opposés aux armes nucléaires, mais ils font une exception pour l'Iran, au prétexte qu’il s’agit d’un programme nucléaire civil.

La Chine peut-elle encore jouer un rôle dans la région ?

Je ne m'attends pas à ce que la Chine joue un rôle particulier, la position anti-Hamas des pays du Moyen-Orient ayant mis en évidence le soutien de la Chine à la Syrie, à l'Iran et à la Russie – des pays qui aident la Chine à créer un axe d'opposition aux États-Unis et qui, dans la situation actuelle, sont perçus comme des partisans du terrorisme. Israël, dont l’intérêt est d’être du côté américain, n’a pas à souhaiter d’implication chinoise, ni dans le processus de paix ni dans aucun processus lié à ce sujet.

Alors la Chine : fausse amie d’Israël ?

La Chine n'est ni une amie ni une ennemie absolue d'Israël. n

DOSSIER

La Chine en Israël : risque ou opportunité ?

© Yossi Zamir/Flash90

La présence d'entreprises chinoises dans des projets d'infrastructures stratégiques en Israël soulève des inquiétudes quant à la sécurité nationale, inquiétudes dues au renforcement des liens entre la Chine et l'Iran.

Le nouveau terminal portuaire dans la baie de Haïfa, le premier des deux terminaux portuaires privés qui représentent une aubaine pour l'économie israélienne. L’entreprise publique chinoise Shanghai International Port Group (SIPG) a remporté l’appel d’offres en 2015 pour exploiter les installations de transport maritime commercial pendant vingt-cinq ans, un arrangement qui a alimenté la controverse en Israël et à l’étranger.​

L

a Chine est devenue l'un des principaux partenaires commerciaux de l’Iran et elle a tacitement choisi le camp de l’axe iranien dans le conflit qui oppose Israël au Hamas depuis le 7 octobre dernier.

Le docteur Harel Menashri, fondateur du système cybernétique du Shin Bet et actuel

président de la Division Cyber à l'Institut de technologie de Holon, dans une lettre adressée au président du Comité des Affaires étrangères et de la Sécurité de la Knesset, a récemment averti Yuli Edelstein du risque potentiel que la Chine décide, quand bon lui semblera, de paralyser les infrastructures clés en Israël,

par exemple sous la forme d’une attaque informatique dans le secteur du trafic maritime.

C’est en effet une société d’État chinoise, Shanghai International Port Group, qui exploite depuis 2021 l’une des plateformes de conteneurs au port de Haïfa, après avoir remporté un appel d’offres que l'ancien ambassadeur AJ MAG N° 1006

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DOSSIER « Il semble qu’il faille plutôt craindre l’influence négative du discours de Pékin sur le conflit israélo-palestinien que d’éventuels actes de cyberattaque ou de sabotage chinois. » israélien en Chine, Matan Vilnaï, avait appelé à annuler, craignant que les Chinois puissent avoir accès à des informations très sensibles ou se livrent à des activités d'espionnage.

Cette décision avait inquiété l’establishment de la Défense à cause de la proximité des sousmarins israéliens, d’autant plus que ni le Cabinet ni le Conseil de sécurité nationale n’avaient eu leur mot à dire. Cependant, il convient ici de relativiser, car si la Chine gère une des six plateformes de conteneurs situées dans le complexe portuaire de Haïfa, une autre est gérée par l’Inde, deux autres par des sociétés privées, et la Chine n'a donc pas le contrôle absolu sur le port. D'après les médias, les États-Unis avaient manifesté leur opposition à l'implication chinoise dans le port de Haïfa, annonçant que désormais les navires de l’US Navy le contourneraient – une annonce non suivie d’effet car un mois après l'ouverture du port de Haïfa 18

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aux Chinois, un navire américain entrait dans le port, suivi de plusieurs autres.

Une entreprise chinoise figure également au nombre de celles qui ont participé à la construction des lignes ferroviaires du train à grande vitesse Tel Aviv-Jérusalem, et la société China Harbor, basée à Pékin, à celle d’un terminal au port sud d’Ashdod et de la ligne rouge du tramway de Tel Aviv, qui passe à quelques dizaines de mètres du ministère de la Défense. Mais en 2022, Washington est intervenue pour que les compagnies chinoises ne puissent pas postuler à l’extension du tramway de Tel Aviv, et c’est finalement la multinationale française Alstom et ses partenaires israéliens qui ont remporté la mise.

L’importance stratégique de ces infrastructures ne peut être négligée, et la question de savoir dans quelle mesure la Chine devrait ou non être autorisée à exercer une influence dans ces domaines reste une source de débats. Des recommandations du

Comité des Affaires étrangères et de la Défense suggèrent la nécessité de mécanismes de suivi pour éviter que les activités chinoises n'affectent les intérêts de la sécurité nationale d'Israël, et la mise en place d’un système qui examinerait attentivement chaque transaction économique avec la Chine.

Malgré ces inquiétudes, maintenir des relations économiques avec la Chine est bien sûr possible – on le fait bien avec la Turquie. Il est toutefois impératif de choisir soigneusement les domaines de coopération, d’adopter une approche équilibrée qui prenne en considération les avantages économiques et les risques sécuritaires, pour garantir que la coopération avec la Chine n'entraîne pas de conséquences néfastes pour Israël. Pour l’heure, en tout cas, il semble qu’il faille plutôt craindre l’influence négative du discours de Pékin sur le conflit israélo-palestinien que d’éventuels actes de cyberattaque ou de sabotage chinois. n

DOSSIER

Eddy Cukierman : « Israël ne peut se permettre d'être inactif sur le marché chinois. » Homme d’affaires franco-israélien, fondateur du groupe Catalyst Funds, entreprise israélienne de premier plan dans le domaine des fonds multiples présente à Hong Kong, et de l'événement Go4Israel rassemblant d’éminents leaders chinois de la communauté des affaires cherchant à découvrir Israël, Eddy Cukierman dresse un état des lieux et esquisse une analyse de l’avenir des relations économiques entre la Chine et Israël.

AJ MAG : Au vu de l’évolution géopolitique, pensezvous que les relations économiques entre la Chine et Israël ont encore un avenir ?

Eddy Cukierman : Oui, je le pense. Les entreprises leaders de l'économie israélienne, fortement axées sur la haute technologie, adoptent une approche mondiale de leurs activités commerciales. Elles cherchent à être présentes aussi bien en Asie qu'aux États-Unis ou en Europe. Le marché chinois représente un potentiel d'exportation crucial pour ces entreprises israéliennes spécialisées dans les technologies innovantes, et les priver de l'accès à ce marché qui est un grand consommateur de nouvelles technologies serait problématique.

particulier le Nasdaq, pour leur financement.

Ainsi, ces entreprises n’ont aucune obligation envers le gouvernement israélien ou américain.

En tant qu'entrepreneur ou membre du conseil d'administration d'une entreprise

Cela signifie-t-il que l'intérêt d'Israël pour la Chine reste inchangé ?

Il est important de noter qu'en Israël, contrairement à d'autres pays tels que la France, il n'existe pas de financement gouvernemental direct pour la haute technologie. Les entreprises de haute technologie en Israël dépendent du secteur privé ou sont cotées sur les marchés internationaux, en AJ MAG N° 1006

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Le Technion, qui parie sur l'avenir des relations avec la Chine, a ouvert une branche à Shantou, dans le sud du pays.

israélienne, l'obligation première est d'agir dans l'intérêt de l'entreprise et la principale préoccupation demeure le succès des entreprises. Par conséquent, si le développement d'activités commerciales en Chine est jugé bénéfique pour l'entreprise, il sera poursuivi ; et si l'entreprise peut également obtenir de la part d'investisseurs chinois des financements plus avantageux que ceux d'autres pays, son conseil d'administration sera enclin à privilégier les capitaux levés en Chine.

Dans quels secteurs la Chine investit-elle en Israël ?

La Chine oriente ses investissements en Israël principalement dans des secteurs tels que la santé, la haute technologie et les technologies innovantes, qui revêtent une importance stratégique pour les entreprises chinoises.

Y a-t-il des secteurs où les entreprises israéliennes doivent obtenir l'accord du gouvernement ?

Les entreprises israéliennes ont besoin de l'accord du régulateur dans quatre secteurs : le secteur bancaire – créer une banque, par exemple, nécessite l'accord de la Banque d'Israël –, le secteur de la défense, et ceux liés aux télécommunications et aux hôpitaux. Le secteur de la haute technologie n'est pas régulé, sauf s'il est lié à des technologies militaires, et l'intérêt des entreprises israéliennes est de déployer ses technologies dans tous les pays du monde, y compris sur le marché chinois.

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AJ MAG N° 1006

La coopération israélo-chinoise en matière d’infrastructures demeure-t-elle d'actualité ?

Le gouvernement israélien maintient sa collaboration avec des acteurs chinois en raison de l'attrait de leurs conditions très compétitives par rapport aux acteurs occidentaux. Malgré certaines pressions et l’évolution de la situation géopolitique, il n'y a pas de changement de politique notable à ce niveau.

Lorsque le coût d'un projet est nettement moindre avec des partenaires chinois qu’avec d'autres acteurs, le gouvernement israélien continuera de privilégier la meilleure offre disponible.

En ce moment où la Chine semble s’éloigner d’Israël pour se rapprocher de l’Iran, risque-t-il d'y avoir rupture ?

Je ne pense pas que la Chine ait une attitude antiisraélienne, mais elle ne voit, comme elle l’a toujours fait, que ses intérêts, qu’ils soient géopolitiques, stratégiques ou financiers. Elle s'intéresse aux technologies israéliennes parce qu'elles peuvent avoir un impact sur les entreprises chinoises et elle continuera à le faire. Récemment, mon groupe a réalisé plusieurs transactions pour des acteurs chinois qui ont investi dans des sociétés israéliennes, certains pour commercialiser des technologies israéliennes en Chine, notamment dans le secteur de la santé. Les accords continuent donc de se développer. Alors, même si Pékin maintient une relation privilégiée avec l'Iran, cela ne l’empêche pas d'en avoir une avec Israël.

DOSSIER Les entreprises israéliennes peuvent-elles continuer à développer des relations économiques simultanément avec les États-Unis et la Chine ?

Lorsqu'une technologie est vendue aux Américains, ces derniers ne s'enquièrent généralement pas de savoir si la même entreprise a vendu des produits à d'autres pays, y compris en Afrique ou en Chine, qui pourraient ne pas être considérés comme des alliés des États-Unis ; cette question n'est généralement pas soulevée. Ce qui revêt de l'importance, ce sont les termes de paiement, les conditions contractuelles, ainsi que la spécificité du produit.

Lorsqu'elles cherchent à vendre des produits au gouvernement américain, les entreprises israéliennes peuvent se voir questionnées au sujet de leurs actionnaires, notamment si la technologie vendue est liée à des domaines tels que la cybersécurité ou la défense. Cependant, il convient de noter que la majorité des ventes des entreprises israéliennes ne sont pas destinées au gouvernement américain ni aux entreprises militaires américaines, mais plutôt au secteur privé. Et même les Américains choisissent des fournisseurs chinois dans de nombreux projets d'infrastructure portuaire, parce qu'ils font les meilleures offres lors des appels d'offres.

a pris la décision de resserrer la supervision de ces investissements, en les soumettant désormais à justification.

Au profit des investissements américains ?

Lorsque vous siégez au conseil d'administration d’une entreprise et que vous êtes confronté à deux offres identiques, l'une américaine et l'autre chinoise, cette dernière dépendant de l'approbation de l'autorité gouvernementale chinoise selon un processus qui va prendre entre trois et six mois, il peut être préférable de privilégier la vente à l'acteur américain, pour être certain que l'argent sera disponible rapidement et sans objections, alors que le gouvernement chinois, lui, peut éventuellement bloquer la transaction.

Il est toutefois important de souligner que ces considérations et ces mesures de contrôle ne visent pas spécifiquement Israël, mais qu’elles s'inscrivent dans le cadre de la politique générale de prudence de la Chine en matière d'autorisation des investissements et de prévention des investissements spéculatifs à l'étranger.

Comment définiriezvous les relations économiques actuelles entre Israël et la Chine ?

Elles sont confrontées Comment à divers défis, en expliquez-vous le particulier en raison ralentissement des des initiatives investissements chinoises qui chinois en Israël ces ralentissent les dernières années ? investissements en Au cours des cinq Israël. De plus, la dernières années, présence excessive le gouvernement d'actionnaires chinois chinois a renforcé peut être mal perçue son contrôle sur les aux États-Unis. Mais investissements Des centres de Recherche & Développement à Herzliya Pitoua'h © Gili Yaari/Flash90 malgré ces défis, à l’étranger, il est impératif de conformément à la remarquer que s'abstenir de faire des affaires en politique du président Xi Jinping visant à exercer Chine comporte des risques plus importants encore. un contrôle accru sur le transfert de fonds chinois En effet, le marché chinois est en passe de devenir vers l'étranger. Les mesures anticorruption mises en la première économie mondiale et, dans ce contexte, place en Chine ont également eu des répercussions Israël ne peut se permettre d'être inactif sur ce sur les sociétés chinoises. Parallèlement, on a marché qui est passionné par Israël et qui constitue constaté une multiplication des investissements une opportunité significative pour les entreprises spéculatifs réalisés par des milliardaires chinois à israéliennes. n l'étranger. Dans ce contexte, le gouvernement chinois AJ MAG N° 1006

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DOSSIER

Israël made in China

E

n 2014, le groupe chinois Bright Food a acquis une participation majoritaire dans la coopérative alimentaire Tnuva – véritable symbole national créé par des kibboutznikim en 1926 –, participation accordant à la société étatique chinoise 56 % de Tnuva, qui contrôle plus de 70 % du marché des produits laitiers en Israël. (Tnuva était déjà passée aux mains de l’entreprise londonienne Apax, laquelle, avec la société d’investissement israélienne Mivtach Shamir Holdings, avait acheté 76,7 % de la société en 2008, pour la somme de 8,6 milliards de shekels Des manifestants à Tel Aviv en 2014 protestent contre la vente de Tnuva Food Industries au groupe chinois – 2,5 milliards de dollars.) Bright Food. Sur les pancartes, on peut lire : « La nourriture de nos enfants aux mains des Chinois ? » ©Roni L’ancien directeur du Schutzer/Flash90 Mossad, Ephraïm Halevy, haute technologie. Huawei dispose ainsi depuis avait vu dans ce rachat une menace pour la sécurité 2004 d’un centre de Recherche & Développement nationale, soulignant que « la compagnie qui prend en Israël, qui emploie près de 500 chercheurs. aujourd’hui le contrôle de Tnuva est détenue par le Depuis 2016, Huawei contrôle aussi des grands gouvernement chinois, ce n’est pas une entreprise groupes de cybersécurité tels qu’Oga Network et privée avec à sa tête un homme d’affaires chinois ».

HexaTier28.

Pour autant, cette prise de contrôle faisait écho à un Mais l’afflux de capitaux chinois touche également rapport publié la même année par la Banque centrale les universités : au cours de la décennie écoulée, le israélienne, selon lequel d’ici 2035, la part des Technion, les universités de Tel Aviv, Bar Ilan ou exportations israéliennes vers la Chine devait doubler encore Haïfa ont reçu des donations en provenance (elles représentaient alors 5 %), tandis que celles des d’entités chinoises dont les montants se chiffrent États-Unis et de l’Union européenne – les plus gros en centaines de millions de dollars. Là encore, la marchés pour les entreprises israéliennes – devaient question de la recherche duale se pose, certains des décliner. projets en informatique et en intelligence artificielle La croissance des échanges commerciaux entre étant financés par des groupes directement liés à la les deux pays est en effet spectaculaire : de 50 Chine. n millions de dollars en 1992 à 22,8 milliards en 2021, le rapprochement économique sino-israélien se décline dans tous les domaines : agriculture, Source : Note de l’IFRI : « Israël et la Chine : un test de loyauté technologies médicales, transports et bien sûr… pour les États-Unis ? », par Jean-Loup Samaan

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DOSSIER

Léora Argamani : « Je ne demande qu'à revoir ma Noa dans le temps qu'il me reste ! »

L

e 26 décembre, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a envoyé un message à la Chine via l’ambassadeur de Chine en Israël, lors d'une session spéciale de la Knesset sur les otages détenus par le Hamas dans la bande de Gaza. « Il y a quelques jours, j’ai invité l’ambassadeur de Chine en Israël et lui ai demandé de transmettre un message directement au président chinois, Xi Jinping. Ce message concernait une jeune Israélienne, Noa Argamani, une étudiante censée commencer sa troisième année à l'Université Ben Gourion. Noa a été prise en otage avec son petit ami lors de l’événement que vous connaissez tous. J'ai rencontré à plusieurs reprises sa mère, Léora, qui est venue avec son mari, Yaakov. Léora est née en Chine.

J'ai dit à l'ambassadeur que je lui demandais de bien vouloir dire à Xi Jinping, en dehors du protocole, en dehors des règles que je connais très bien, qu'il s'agit de la fille d'une Chinoise et que je lui demande son intervention personnelle concernant Noa Argamani.

Sa mère, qui souffre d'un cancer à un stade avancé, m'a répété ce qu'elle avait dit à plusieurs reprises : " Je ne demande qu'à revoir ma Noa dans le temps qu'il me reste ! " L'ambassadeur m'a répondu que cette demande était parvenue au président chinois. » À l’heure où nous imprimons ces lignes, nous ne savons pas si Noa Argamani, toujours aux mains de l’organisation terroriste, est encore en vie. n

LE SAVIEZ-VOUS ?

Léora Argamani, mère de Noa, otage du Hamas, lors d'une réunion à la © Yonatan Sindel/Flash90 Knesset le 9 janvier 2024

l La présence juive en Chine est attestée par une archive commerciale datant de l’an 718. Quant à la fameuse synagogue de Kaifeng, elle fut érigée en 1163.

gitimité des nationalistes réfugiés à Taïwan. Dès les premières années de la fondation d’Israël, le Premier ministre David Ben Gourion a insisté pour que l’Université Hébraïque de Jérusalem enseigne le chinois.

Il faudra toutefois attendre 1992 pour que des relations diplomatiques soient formellement établies.

l Le 9 janvier 1950, Israël a été le premier pays du Moyen-Orient à reconnaître la République Populaire de Chine (RPC) et a immédiatement adopté le principe d’« une seule Chine », rejetant ainsi la lé-

l Une partie de l’arsenal balistique des Gardiens de la Révolution islamique comprend des composants chinois, et il en est de même pour plusieurs des systèmes fournis par l’Iran au Hamas et au Hezbollah.

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REPORTAGE

Comment Tel Aviv s’est transformée en ville-refuge PAR NATHALIE HAMOU

Malgré des terrasses de café plus ou moins remplies, la vie est loin d’être revenue à la normale dans la capitale économique du pays, qui a accueilli plus de 20 000 évacués des zones de guerre et où les familles des otages ont élu domicile pour mener leur combat.

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© FLASH90

C

omme dans la plupart des localités israéliennes, les bâtiments de Tel Aviv, depuis près de quatre mois, se sont couverts d’immenses drapeaux blancs-bleus, tels des pansements posés sur des plaies béantes. Les poteaux électriques et les arbres, eux, exhibent des affichettes avec les noms et les visages, souvent beaux et souriants, des captifs retenus dans l’enfer de Gaza. Sur les bancs, on trouve des poèmes et des fleurs dédiés aux victimes du 7 octobre. Mais la métamorphose de la Ville Blanche, dont les habitants ont vécu pendant des mois sous les tirs de missiles, va beaucoup plus loin. La capitale économique du pays, qui, l’an passé, a été le centre névralgique des manifestations contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement, s’est instantanément mise au service de l’effort de guerre et de la solidarité, tout en devenant une ville-refuge pour les populations les plus vulnérables frappées par la tragédie.

Le Forum des familles des personnes kidnappées et disparues y a élu domicile, à proximité du Musée de Tel Aviv et de la Kirya, le quartier général du Cabinet de guerre, avec des opérations de sensibilisation quasi quotidiennes et des rassemblements hebdomadaires sur l’esplanade rebaptisée « Kikar ha'Hatoufim » (« place des otages »). Jusqu’à 20 000 évacués des zones de guerre du Nord et du Sud ont été relogés – aux frais de l’État – dans une centaine d’établissements hôteliers et d’appartements de la ville vidée de ses touristes ; la moitié y demeuraient toujours courant janvier. Plus de 80 écoles ont permis de scolariser quelques 3000 élèves faisant partie de

La façade du théâtre Habima ornée d'un énorme drapeau d'Israël

ces « réfugiés de l’intérieur ». Et des centaines de bénévoles, avec l’aide de thérapeutes et d’artistes, ont proposé des activités en tous genres pour améliorer leur quotidien. « Ces derniers mois, nous avons eu le privilège d'accueillir des dizaines d'évacués du Sud et du Nord qui ont dû quitter leur domicile », témoignent Barbara et Guy, du LaLa Boutique Hotel, un petit établissement de charme niché dans une bâtisse ottomane historique, tout au sud de Tel Aviv. « Nous avons reçu beaucoup de sympathie et de soutien de la part de notre voisinage, de dizaines de bénévoles, et nous avons vécu des moments passionnants. Ces hôtes sont devenus une famille. Nos cœurs se sont remplis de l’amour dont nous avions besoin pour

Ci-contre : nuit blanche sur la place des otages à Tel Aviv pour marquer le 100e jour de captivité des personnes enlevées par le Hamas le 7 octobre 2023 Ci-dessous : un faux tunnel a été installé sur le parvis du Musée d'Art de Tel Aviv afin de sensibiliser la population au cauchemar des otages enfermés dans les tunnels sous Gaza depuis plus de trois mois. © FLASH90

© FLASH90

REPORTAGE

essayer de digérer ce que nous avons vécu et de guérir. » Après avoir passé plus de dix semaines dans des hôtels d’Eilat, 435 membres de Réïm, un kibboutz mitoyen de l’endroit où s’est déroulé le festival de musique Nova dont plus de 360 participants ont été massacrés par le Hamas, ont pour leur part été accueillis à la mi-décembre dans 142 appartements situés dans deux tours du quartier branché de Florentine, au sud de Tel Aviv.

Ils pourront y loger pendant un an. Fait significatif : ce projet a été initié et financé par des entreprises du secteur privé, comme Cisco, More Investment House et le groupe Viola. L’entreprise publique de logement et de construction Amidar a depuis repris les baux.

Le responsable de Réïm, David Gabaï, a raconté à la douzième chaîne de télévision israélienne que les membres de sa communauté lui avaient d’abord objecté que venir à Tel Aviv « ruinerait le kibboutz ».

Mais pendant leur séjour à Eilat, David Gabaï a compris, en voyant leurs regards éteints, qu’ils devaient « sortir de là et recommencer leur vie en tant que communauté ». Il s’est alors tourné vers « A'him laNechek » (« Frères d’armes »), un groupe de réservistes réuni à l’origine pour lutter contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement, mais qui depuis le 7 octobre a canalisé ses efforts pour venir en aide aux citoyens pendant la guerre. Le mouvement l’a mis en contact avec l’entreprise de haute technologie Cisco ; et avec l’appui du maire de Tel Aviv-Jaffa, Ron Huldai, un ancien kibboutznik de Hulda, le village collectif de Réïm a pu contourner la

bureaucratie et mettre en place en quelques semaines ce qui, en temps normal, aurait pris des mois. Plus de la moitié des enfants du kibboutz ont intégré l’École de la Nature de Tel Aviv, portée sur l’environnement et la responsabilité sociale, tandis qu’une vingtaine de membres ont décidé de rester au kibboutz vingtquatre heures sur vingt-quatre pour travailler dans les champs, les vergers et les usines.

Dans les rues de Florentine, haut lieu de promenades touristiques et quartier de prédilection des amateurs de graffitis urbains, des peintures murales aux couleurs vives rendent désormais hommage aux disparus comme aux héros du 7 octobre.

Plus de cent jours après la tragédie, la vie semble parfois revenir à la normale, mais c’est tout sauf le cas. On se retrouve le soir dans les bars et aux terrasses des cafés, mais un grand nombre de clients réguliers combattent à Gaza ou sont postés à la frontière nord. Comme lors de la « révolte des tentes » en 2011, ou des grands rassemblements de 2023 qui ont incarné la force de la société civile israélienne, Tel Aviv ne peut décidément plus être qualifiée de « bulle » (titre d’un film réalisé en 2006 par le cinéaste Eytan Fox sur la jeunesse de la métropole laïque) qui serait indifférente aux conflits qui l’entourent. n AJ MAG N° 1006

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ÉCONOMIE

Tkouma : l'avenir déjà en marche Les communautés de la bordure de Gaza envahies par les terroristes du Hamas le 7 octobre dernier ont été dévastées : maisons et infrastructures incendiées, détruites, et milliers de personnes déplacées. En réponse, sur décision du Premier ministre Benyamin Netanyahou, un organe gouvernemental a été fondé avec pour objectif de les réhabiliter, de les développer, de promouvoir leur prospérité et de soutenir les populations exilées. Son nom : Tkouma.

U

n nom qui n’a pas été choisi au hasard : dans le judaïsme, « Tkouma » évoque la résilience et la survie du peuple juif face à l'adversité, et symbolise sa capacité à se relever et à reconstruire après les épisodes tragiques de son histoire, comme ce fut le cas notamment après la Shoah. Ce nom est associé à la foi en un avenir meilleur, que ce soit sur le plan spirituel, historique ou collectif, voire même en la vision d’une épreuve dont on sort grandi, vision partagée par le chef de la direction de Tkouma, Moshé Edri, qui a annoncé qu’au-delà de la simple restauration, il est prévu de moderniser et d’étendre les localités frontalières de Gaza touchées. Après la guerre, celles-ci pourraient doubler de taille afin d’attirer de nouveaux résidents, notamment des jeunes couples.

Pour mener à bien les missions de Tkouma, qui seront réalisées en coopération avec les conseils locaux et les ministères concernés, le gouvernement a approuvé un budget quinquennal ambitieux de 18 milliards de shekels, dont 3 milliards devront être transférés en 2024. Dans un premier temps, ces fonds seront alloués à la

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réinstallation des habitants dans les localités évacuées, d’où la première nécessité : réparer les infrastructures endommagées lors des attaques du Hamas, un processus déjà en cours depuis quelques semaines. La décision du retour sera prise en collaboration avec les autorités locales, le gouvernement et la société civile, en tenant compte de la sécurité, de la réhabilitation environnementale et de la protection de la vie communautaire. Ce retour ne pourra en tout cas pas se faire avant que les jardins d'enfants et les écoles ne soient opérationnels – or la proposition de décision actuelle ne fait pas état de mesures concrètes à cet égard, se contentant d’évoquer de manière générale la « fourniture d'une éducation de qualité, avancée et adaptée aux habitants de la région, y compris la promotion de l'innovation, de l'excellence et de la science ».

Dans le domaine de l'énergie, un plan quinquennal sera mis en place, comprenant le renforcement de l'indépendance énergétique de la région, notamment par la production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable, et la

promotion de l'utilisation de véhicules électriques.

Le retour se fera progressivement.

Dans un premier temps, d'ici la fin février, il concernera les localités situées dans un rayon de 4 à 7 kilomètres de la frontière avec Gaza ; ensuite et dans la mesure où la situation sécuritaire le permettra, les localités du conseil régional d'Eshkol ; enfin, le retour dans les localités se trouvant dans un rayon de 0 à 4 kilomètres de la frontière est prévu pour le 1er août. Les habitants qui ne pourront pas revenir dans leur localité dans un proche avenir bénéficieront du financement intégral des frais de location d'appartements temporaires.

Par exemple, les résidents de Nir Oz, qui déménageront bientôt dans un complexe résidentiel à Kiryat Gat, verront leurs loyers ainsi que leurs taxes d’habitation, leur consommation d’eau et d’électricité payés pendant au moins un an. De plus, l'administration réglera toutes leurs autres dépenses, y compris leurs achats d’appareils électroménagers, grâce à un budget de 80 000 shekels par famille. Ceux qui ne souhaiteront

Un véhicule militaire en patrouille dans la forêt à la frontière de la bande de Gaza. La région est parsemée d'anémones qui caractérisent le renouveau de la la nature – tout un symbole dans cette région dévastée par le terrorisme. © Liron Moldovan/Flash90

pas déménager avec l'ensemble de leur communauté et choisiront plutôt de louer un logement de manière autonome recevront le même soutien budgétaire, tout comme les habitants de Sdérot où 55 habitations ne sont pas réintégrables et qui seront soutenus financièrement jusqu'à ce que leurs logements soient réhabilités.

Il sera sans doute nécessaire d’adopter une loi de planification et de construction pour faciliter la construction d'hébergements temporaires pour les résidents, en attendant le développement de solutions plus permanentes.

Pour les Israéliens qui auraient l’autorisation de revenir dans leur localité mais ne le souhaiteraient pas, il n’existe pas de solution budgétaire pour le moment.

Cependant, sur les 3 milliards prévus en 2024, il manque encore environ 750 millions de shekels, et les conseils régionaux et locaux se demandent d’où ils proviendront.

Il semble que le ministère des Finances hésite sur les sources de

financement, et les tensions sont déjà palpables.

Parallèlement aux initiatives de Tkouma, le ministère de la Protection de l'environnement a annoncé le plan Green South (Sud vert) pour protéger les résidents de la bordure de Gaza de la pollution et d’autres risques environnementaux, auquel il allouera dans un premier temps 84 millions de shekels. En effet, il résulte des dommages considérables causés par l'attaque du Hamas un accroissement de la pollution de l’air, d’importantes atteintes aux toits en amiante dues aux incendies, ou encore une fragilisation, voire une destruction des sols causées par le déplacement de véhicules lourds. Ce plan, élaboré en collaboration avec les autorités locales et qui devrait être achevé d’ici cinq ans, prévoit des mesures pour assurer la réduction des déchets, améliorer les pratiques de construction, restaurer les espaces naturels tels que la zone de loisirs du parc Shikma, la route

Habsor entre le parc Eshkol et le kibboutz Tze'elim, et les zones « Darom Adom » – dans la région nord du Néguev, où se tient de mi-janvier à fin février le festival éponyme, pendant la saison de floraison des anémones – et en créer de nouveaux afin de susciter le tourisme, tandis que les agriculteurs recevront des subventions pendant une période transitoire pour s’équiper en broyeurs et tamis.

La reconstruction de ces communautés dévastées, quel que soit le temps qu’elle prendra et le montant des fonds qu’il faudra lui consacrer, incarne incontestablement l'idéal de résurrection du peuple juif, suivant ainsi la voie tracée par l'esprit pionnier qui a donné naissance à l'entreprise sioniste il y a plusieurs décennies : le retour à la terre, concept fondamental et constitutif de l'identité juive. De ce retour et de celui des otages dépendra la résilience de la nation.

Et pourquoi ne pas rebaptiser Otef Aza : Otef Tkouma ?… n AJ MAG N° 1006

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BON À SAVOIR

Les impôts sur les plus-values immobilières réalisées en Israël : comment optimiser ?

I

l est tout d'abord primordial de comprendre qu'il existe des exemptions d'impôt sur les plus-values immobilières pour tout résident fiscal israélien qui est propriétaire d'une seule habitation dans le monde entier.

Rappelons qu’un résident fiscal n'est pas nécessairement un citoyen (avec numéro d'identité israélien) mais une personne qui vit en Israël plus de 183 jours par an. En 2023, l'exemption d'impôt sur la plus-value d'une habitation unique était limitée aux ventes de biens ne dépassant pas un plafond de 4 846 000 shekels.

Quel est le pourcentage d'impôt sur la vente d’une habitation de particulier ?

Sachant que le régime fiscal des plus-values immobilières a subi de nombreuses évolutions durant ces trente dernières années, il est important de commencer par l'évolution des pourcentages selon la date d'acquisition du bien. Allons du plus récent au plus ancien, sachant que la période globale entre l'achat et la vente du bien pourra être segmentée de façon linéaire, chaque segment étant imposé à un taux différent : l La date d'achat est postérieure au 1.1.2014, jusqu’à aujourd'hui Le pourcentage de la plus-value est de 25 % de façon linéaire.

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l La date d'achat est antérieure au

1.1.2014 Le pourcentage d'impôt est nul sur la période allant de l'achat du bien jusqu'au 31.12.2013, puis de 25 % sur la période du 1.1.2014 jusqu’à la vente, selon un calcul linéaire.

Il est tout à fait possible de diminuer l'impôt à payer, voire même jusqu’à l'annuler totalement.

Quel est le pourcentage d'impôt sur des biens immobiliers autres que des habitations de particuliers ?

L'articulation des taux est différente sur ce genre de ventes : l La date d'achat est postérieure au 1.1.2014, jusqu’à aujourd'hui Le pourcentage de la plus-value est de 25 % de façon linéaire. l La date d'achat est entre le 7.11.2001 et le 31.12.2012 La plus-value est répartie linéairement entre la période qui va jusqu'au 31.12.2012, puis

celle qui s’étend du 1.1.2013 jusqu’à la vente : - Sur la période allant jusqu'au 31.12.2012, la plus-value sera imposée à 20 %.

- Sur la période s’étendant du 1.1.13 jusqu’à la vente, la plusvalue sera imposée à 25 %. l La date d'achat est antérieure au 7.11.2001 Là encore, la plus-value est répartie linéairement sur les différentes périodes : - Le pourcentage d'impôt sur la plus-value jusqu’au 7.11.2001 est de 47 %.

- Sur le reste des périodes, la plus-value sera imposée comme expliqué dans le paragraphe précédent.

Peut-on diminuer l'impôt à payer ? Une procédure : la « prissa »

Il est tout à fait possible de diminuer l'impôt à payer, voire même jusqu’à l'annuler totalement. Pour ce faire, il est d’abord essentiel de rassembler toutes les dépenses liées à l'achat et à la vente de ce bien, mais également à son entretien, surtout s'il n'était pas loué.

La première étape est de procéder à une « prissa ». Cela consiste à demander aux autorités fiscales que la plus-value soit répartie rétroactivement sur quatre années civiles, depuis l'année de la vente

BON À SAVOIR

inclue. Par exemple, si la date de vente est en 2023, la « prissa » se fera sur les années 2023-20222021-2020.

Les quatre années sont limitées à la période de « propriété » du bien, cette « propriété » débutant officiellement l'année qui suit l'achat du bien. Ainsi, si le bien a été acheté en 2022, la première année de propriété au regard de la loi fiscale sera 2023. Donc si la période de propriété est de trois ans, la « prissa » se fera uniquement sur trois ans. l En quoi cette procédure est-elle avantageuse pour le vendeur ?

Elle lui permet de diminuer, voire d’annuler, les impôts à payer : - Si le vendeur a plus de 60 ans, l'impôt marginal de 47 % pour la

période qui précède le 7.11.2001, à calculer selon chaque cas, se réduit considérablement et peut ne pas dépasser 10 %.

- Le vendeur et son conjoint peuvent se partager la plus-value immobilière entre eux, ce qui permet une réduction d’impôt supplémentaire.

- Le vendeur et son conjoint pourront bénéficier des abattements fiscaux non utilisés lors des années antérieures (nekoudot zikouï).

- Le vendeur et son conjoint pourront déduire les dons Cerfa non utilisés lors des années antérieures afin de profiter des abattements fiscaux non utilisés les années précédentes.

Qui doit faire la demande de « prissa » auprès des autorités fiscales ?

La « prissa » doit être faite en deux étapes : - La première étape doit être faite par un avocat lors de la présentation de la plus-value immobilière aux autorités fiscales immobilières.

- La seconde étape doit être effectuée par un expert-comptable qui fera les démarches nécessaires pour que les autorités fiscales puissent rendre le trop-perçu des impôts. n

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TRIBUNE

Le retour de la bête immonde PAR MICHEL GAD WOLKOWICZ

Mag AJ : Que signifie pour vous un pogrom sur la Terre d’Israël ?

Michel Gad Wolkowicz : L’État d’Israël s’est créé avec les idéaux du sionisme, en se donnant ce qui lui avait manqué pendant plus de deux mille ans : l’émancipation du peuple juif souverain sur sa terre historique, réuni dans une Alliance, la Loi, la terre, le peuple – un peuple recouvrant le droit à la terre et à la guerre, ainsi que l’écrivait mon ami Michaël Bar-Zvi dans Éloge de la guerre après la Shoah.

Nous avons vécu un traumatisme abyssal : une effraction psychique massive par quelque chose d’irreprésentable, d’inconcevable, d’inélaborable, qui nous a sidérés, pétrifiés, déréalisés. Effraction d’autant plus massive et anéantissante de la pensée que l’intrusion sur notre Terre d’Israël de milliers de terroristes sanguinaires participait de nos pires angoisses, que nombre d’entre nous en avaient rejeté la possibilité et qu’elle est venue réactiver un traumatisme transgénérationnel, sonner le rappel de ce qu’ont subi nos parents et grands-parents en Russie, en Pologne, en Ukraine. Les mots qui nous sont alors remontés sont en effet « pogrom » – car c’était le plus important pogrom depuis ceux de Kichinev et de Lodz –, « Shoah », « Shoah par balles »…

Et l’humain dans tout ça ?

Le « déshumain », plutôt. La destruction des apparences, du semblable-différent, la mise hors monde, hors espèce, hors espace trans-subjectif.

Le traumatisme extrême est l’actualisation de l’inimaginable, de l’impensable, de l’innommable, de l’indicible. Or nous devons, et particulièrement nous, les psychanalystes, penser l’impensable, imaginer l’inimaginable, nommer l’innommable : il nous faut 30

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Comment entendre, comment comprendre les événements du 7 octobre ?

Michel Gad Wolkowicz, psychanalyste, professeur de psychopathologie fondamentale et clinique à l'Université Paris 11, à Tel Aviv et à Glasgow, nous donne quelques pistes.

TRIBUNE donner un nom spécifique à ce qui s’est passé, à ce qui nous arrivé. Nous devons parvenir à distinguer cet événement sans faire d’amalgame – et j’emploie à dessein ce terme « événement », en référence à ce que Claude Lanzmann puis Éric Marty ont nommé « l’événement Shoah », désignation spécifique attribuée à la destruction des Juifs par les Allemands nazis (au lieu du terme « Holocauste » qui assimilait cette destruction à un sacrifice humain associé au péché originel, figeant les Juifs dans un statut d’éternels coupables). Ainsi devons-nous donc, en cherchant à le nommer, distinguer ce qui s’est passé le 7 octobre d’autres événements historiques.

Pour paraphraser George Steiner, je dirais que si les mots nous manquent, nous ne devons pas, nous, manquer aux mots.

Alors comment nommer les massacres perpétrés, cette rupture anthropologique, ces atrocités génocidaires de masse comme on n’en a pas connues depuis la Shoah, et peut-être dans l’histoire de l’humanité ? Comment nommer les assassins, ces fanatiques fondamentalistes haineux, à la fois dans la passion destructrice et dans la froideur calculatrice de l’extermination programmée, bien sûr dans la planification générale de l’opération, mais aussi dans la planification de chacune des cruautés, plus terrifiantes les unes que les autres, à faire subir à chacune des victimes, et ce, jusque dans les plus infimes détails ?

Et comment nommer ces Palestiniens qui travaillaient depuis des dizaines d’années dans la région, étaient reçus comme des amis par les kibboutznikim – des militants de la paix et de la coexistence –, qui ont donné les noms, la composition des familles, les âges et sexes des parents et des enfants, afin que soit programmé chacun des actes, des sévices ?

singularisation, de subjectivation, des processus vitaux notamment pour les victimes, pour leur permettre d’établir un lien symbolisant entre le collectif et le singulier, a contrario d’un universel confusionnant – comme l’est par exemple l’abstraction générique d’Auschwitz, déviation du devoir de mémoire introduit par Primo Levi et devenu instrument d’une culpabilité perverse, au travers de la compulsion de répétition de commémorations de repentance visant à l’absolution des crimes passés pour mieux couvrir les crimes présents, et à entretenir la possibilité d’inversion et de substitution entre victimes et bourreaux.

Construire un nom, se porter vers un nom, c’est creuser dans le langage comme dans la terre afin d’y faire une place à la mémoire, une place retrouvée dans l’Histoire, modifier le sol de la mémoire, selon Walter Benjamin, et peut-être aussi le rapport au passé subi et figé.

Nous avons vécu un traumatisme abyssal : une effraction psychique massive par quelque chose d’inconcevable...

Que dire du traumatisme ?

Le traumatisme est généré par effraction de quelque chose qu’on a justement pu imaginer dans nos pires cauchemars, mais que nous avons rejeté et qui fait retour, en télescopage avec le Réel. Discerner l’événement par un nom propre participe de processus nécessaires et fondamentaux d'historicisation, de

Quelles vont être les conséquences du 7 octobre ?

Outre l’idéal sioniste constitutif de la création de l’État d’Israël moderne, celui-ci a été investi en tant qu’État Juif, État des Juifs, comme un État qui, après des siècles d’exil, de persécutions et de destructions, après l’extermination systématique des Juifs d’Europe lors de la Seconde Guerre mondiale, après les guerres d’Indépendance (1948), du Canal de Suez (1956), des Six Jours (1967) et de Kippour (1973), assurerait désormais la sécurité des Juifs en Eretz Israël et même dans la Diaspora. Le massacre génocidaire de masse perpétré par les Palestiniens sous la férule de l’Iran le 7 octobre dernier et la prise d’otages, qui renvoie davantage à l’image d'une rafle de près de 280 personnes de tous âges, ont gravement entamé le sentiment de sécurité individuel et collectif, la confiance dans les institutions – y compris les services de renseignement et Tsahal, notre Armée de Défense, dont nous sommes légitimement fiers – et bien sûr aussi notre confiance dans nos leaders politiques – qui en avait, il est vrai, déjà pris un sérieux coup depuis quelques années. n Propos recueillis par Eden Levi-Campana AJ MAG N° 1006

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BOUILLON DE CULTURE © DR

Isabelle Durin, un violon dans l’histoire PAR EDEN LEVI-CAMPANA

Paris, Grande synagogue de la Victoire : une soirée est organisée par le Maguen David Adom et Steve Suissa pour venir en aide à la population israélienne.

Le comédien est accompagné par Isabelle Durin, une violoniste douée, précise, sensible. En préambule à cet entretien, l’artiste m’assure : « La musique a toujours accompagné le peuple juif dans ses errances et les catastrophes qui ont jalonné son histoire. » Certes. Et nous savons que les errances et les catastrophes du peuple juif sont innombrables, douloureuses, et répétitives comme un violon dans l’histoire.

AJ Mag : Vous avez apporté votre soutien au Maguen David Adom…

Isabelle Durin : Steve Suissa, le metteur en scène du spectacle En plein cœur, que je donne avec Francis Huster et Maxime Zecchini, m’a appelée pour me proposer de participer avec lui à cette soirée. J’ai accepté, bien sûr, la cause étant fondamentale : aider ceux qui sauvent des vies, le symbole est fort.

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La musique fait partie de votre ADN ?

J’ai grandi entourée de musique, ma maman et ma sœur étudiant la guitare classique au Conservatoire de musique de Drancy où nous habitions à l’époque.

C’est là que j’ai commencé le violon. J’ai poursuivi des études de philosophie à la Sorbonne et, en parallèle, je suis rentrée au Conservatoire National Supérieur de Musique de Lyon ; j’ai arrêté avec un DEA en poche.

BOUILLON DE CULTURE Puis, j’ai fait quelques années de musique de chambre au CNSM de Paris, et des concours de violon et d’orchestre pour réussir celui de l’Orchestre national d’Île de France dont je suis membre.

Comment avez-vous vécu ce qui s’est passé le 7 octobre en Israël ?

Comme un événement d’une rare barbarie ! Je suis restée sans mot, ahurie par tant de violence et une question qui se pose, qui arrive comme un boomerang historique, au retour de l’innommable : « Quelle différence avec la barbarie commise par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale ? » La comparaison est légitime. De même qu’à l’époque, les SS orchestraient des massacres à la chaîne à Auschwitz dans le but d’éradiquer la « race » juive et d’aryaniser la population allemande, ces groupes extrémistes musulmans ont un seul but : éliminer les Juifs et rayer Israël de la carte. Je ne vois pas vraiment de différence.

Comme beaucoup de Français d’origine juive, j’ai de la famille en Israël ; et j’y suis allée en mars dernier pour jouer En plein cœur.

Israël se voulait la terre promise, et la promesse, c'était justement la fin de l’enfer, la lumière au bout d’un tunnel synonyme d’horreur et d’extermination – un vœu pieux ?

la monstruosité. Mon dernier album, Un violon dans l’histoire (NoMadMusic/Collection Solo ONDIF), est dans cette même veine, racontant les destins des résistants, des combattants, des hommes de l’ombre, ceux qui ont œuvré pour que l’humanité reste debout (Le dictateur, L’armée des ombres, Casablanca, Le dernier métro…). L’art, qui est une sorte de méditation (musicale et fictionnelle) face à la tentation du chaos, essaie d’apporter des réponses.

Le chaos, l’antisémitisme…

La France a connu ses heures troubles et honteuses : l’Occupation, Vichy, la rafle du Vel' d’Hiv', Drancy – mais aussi les attentats : Copernic, les écoles de Villeurbanne et de Toulouse, Mireille Knoll et j’en passe. Durant mes études de philosophie, je m’étais intéressée à l’antijudaïsme des Lumières et j’avais lu un des ouvrages de Léon Poliakov, qui a consacré son œuvre à l’antisémitisme. Grosso modo, l’antijudaïsme a fait le lit de l’antisémitisme (à l’origine, il était là pour combattre l’obscurantisme religieux et dissimuler ainsi son attaque contre la religion chrétienne), qui est lui-même l’antichambre de l’antisionisme. Cet antisionisme peut réveiller l’instinct grégaire et séculaire de l’antisémitisme. Et il s’avère que ce dernier semble être de tout bord, qu’il tisse sa toile aussi bien du côté des lettrés que des obscurantistes religieux, des fanatiques, et ce, depuis des siècles, comme ancré de manière quasi anthropologique dans l’inconscient collectif d’une catégorie de la population. La prégnance antijudaïque du christianisme semble avoir changé de camp au profit d’un antisémitisme radical et décomplexé au regard du conflit israélo-palestinien, la frontière entre antisionisme et antisémitisme étant vite franchie. À cause de la politique également, les termes « Juif » et « sioniste » semblent se confondre. Il n’y a plus de nuances, tout est extrême dans les propos, blanc ou noir, oppresseurs/opprimés ; et les réseaux sociaux n’arrangent rien dans le nivellement d’une pensée unique où l’injonction est de choisir son camp. Nous avons des leçons à tirer du passé, et la création de l’État d’Israël est indissociablement liée à cet antisémitisme éruptif qui a conduit à la Shoah en Europe. Quand on connaît les rapports que le grandmufti de Jérusalem al-Husseini entretenait avec Adolf Hitler, cela fait réfléchir. n

L’art joue un rôle de garde-fou, de paravent contre

la monstruosité.

Votre sensibilité passe par l’art. Lors de la soirée de soutien au Maguen David Adom, vous avez interprété de grandes œuvres tirées d’un de vos albums…

Oui, Mémoire et Cinéma (Paraty), que j’ai enregistré, de même que mes deux autres albums, avec le pianiste Michaël Ertzscheid. Il s’agit d’une anthologie de musiques de films évoquant les traditions juives (Yentl, Un violon sur le toit, Yidl mitn Fidl) et la Seconde Guerre mondiale, et plus précisément la Shoah (La liste de Schindler, La vie est belle, Le journal d’Anne Frank, Exodus…). Mon souci était de transmettre cette mémoire, qui se doit d’être collective, par le biais d’un autre outil que l’archive historique, les témoignages écrits ou l’apport des historiens. Ici, c’est la musique qui, par son pouvoir évocateur et sa charge émotionnelle, nous enseigne ce que les mots ne peuvent pas expliquer. Ces films sont des témoignages indirects, sublimés, cathartiques (parfois pour les réalisateurs eux-mêmes), et l’art joue alors son rôle de garde-fou, de paravent contre

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HISTOIRE

Il y a 80 ans, l'Irgoun proclamait la révolte contre l'Empire britannique

I

l y a 80 ans, au début du mois de février 1944, les murs des villes d'Eretz Israël furent tapissés d'une déclaration peu conventionnelle.

Un petit organisme du nom d'« Organisation Militaire Nationale en Eretz Israël » y annonçait déclarer une révolte contre l'Empire britannique qui, en 1922, avait reçu de la Société des Nations un mandat pour administrer Eretz Israël.

Dans le deuxième article du « Mandat pour la Palestine », il était écrit : « Le Mandataire assumera la responsabilité d'instituer dans le pays un état de choses politique, administratif et économique de nature à assurer l’établissement du foyer national pour le peuple juif, comme il est prévu au préambule, et à assurer également le développement d’institutions de libre gouvernement, ainsi que la sauvegarde des droits civils et religieux de tous les habitants de la Palestine, à quelque race ou religion qu'ils appartiennent. » Cependant, l'Empire britannique ne tint pas son engagement et l'abandonna officiellement en 1939, en publiant un document attestant de la nouvelle politique britannique en Eretz Israël, selon laquelle, après que 75 000 Juifs auraient retrouvé leur patrie ancestrale, l'arrivée de nouveaux immigrants juifs serait

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PAR ZEEV B. BEGIN Zeev B. Begin

conditionnée à l'approbation de la population arabe locale – qui s'y opposait farouchement et violemment. À cette époque, les Juifs ne représentaient qu'un tiers de la totalité de la population en Eretz Israël. La conséquence inévitable de cette nouvelle politique britannique

était donc la pérennisation de la majorité arabe en Eretz Israël et l'impossibilité pour les Juifs d'y fonder leur foyer national. Face à cette démarche, les différents courant sionistes protestèrent vigoureusement et exigèrent l'annulation de cette transgression de l'engagement du titulaire du

HISTOIRE mandat envers la Société des Nations et envers le peuple juif.

L'Irgoun, qui à la fin de l'année 1943 nomma Mena'hem Begin à son commandement, ne se contenta pas d'exiger l'annulation de la nouvelle politique d'immigration britannique, mais exigea également le retrait total de l'Empire britannique de la partie occidentale de la Terre d'Israël (le territoire compris entre la Méditerranée et le Jourdain) et la formation d'un gouvernement juif sur ce territoire. Il était évident que les Britanniques ne feraient pas ce pas de leur plein gré, et l'Irgoun décida donc d’opérer des actions de guerre, dont le but était d'amener les Britanniques à la conclusion que le prix de la poursuite de leur domination en Eretz Israël était bien trop élevé.

Le rapport de forces était clair : il y avait alors 60 000 soldats britanniques et quelques milliers de policiers en Eretz Israël, alors que début 1944, l'Irgoun ne comptait que 600 membres, et parmi eux seulement 200 combattants, nombre qui allait s’élever à quelques milliers dans les quatre années suivantes. Durant l'année qui précéda la proclamation de la révolte, Mena'hem Begin et ses amis consacrèrent beaucoup de temps à réfléchir au moyen d'atteindre leur objectif dans de telles circonstances.

Pendant cette période, Begin rédigea ce qu'il intitula « La logique de la révolte », l'idée fondamentale qui devait permettre à l'Irgoun d'agir efficacement pour atteindre son objectif malgré son infériorité numérique. Quelques années plus tard, il écrira dans son livre La révolte : « L'Histoire, ainsi que notre perception des choses, nous ont appris que si nous arrivons à briser le prestige britannique en Eretz Israël, c'est la domination britannique ellemême qui sera brisée. »

Cette affirmation s’incarna, pendant quatre ans, en centaines d'actions dont le but essentiel n'était pas de porter atteinte aux civils, aux policiers, ni même aux soldats britanniques, mais aux institutions britanniques en Eretz Israël, comme l'a écrit Begin : « Ce sera une guerre politique, qui sera menée par des moyens militaires. » Évidemment, la guerre entraîne aussi des atteintes aux personnes, même si elles ne sont pas intentionnelles.

Cependant, durant toutes les années de la guerre de l'Irgoun contre les Britanniques, il n'y en eut proportionnellement pas beaucoup, comme en témoignera plus tard celui qui fut le commandant de la police britannique en Eretz Israël entre 1946 et 1948, le commissaire William Gray : « Les pertes humaines ou les atteintes aux biens, nous pouvions les surmonter : l'armée britannique a subi plus de pertes dans des accidents de la route que du fait des actions clandestines. Mais un empire ne peut supporter une atteinte à son prestige. » Une action caractéristique de ce type fut réalisée par l'Irgoun fin 1946, après que les Britanniques infligèrent à plusieurs jeunes de l'Irgoun la sanction humiliante, dont l'usage était répandu dans leurs colonies, de dix-huit coups de fouet : en réaction, l'Irgoun captura quatre soldats britanniques, dont un officier du grade de « major », et leur infligea la même peine.

L'Empire britannique n'avait jamais connu une telle humiliation. Cet acte de nature symbolique eut un effet bouleversant en GrandeBretagne et les Britanniques devinrent sujets de dérision. À Paris, on vit paraître une caricature représentant un soldat britannique protégeant son postérieur avec

son casque. En janvier 1947, le Parlement britannique se saisit de ce douloureux sujet durant deux jours de débats, au terme desquels le Secrétaire d'État aux Colonies, Arthur Creech Jones, envoya un télégramme au Haut-Commissaire britannique en Palestine, le général Alan Gordon Cunningham : « Je sens que je dois vous dire à quel point le sentiment est fort, au gouvernement et au Parlement, concernant les derniers événements, qui sont totalement humiliants et destructeurs pour notre prestige et notre autorité à l'étranger. » Des actions efficaces contre une domination étrangère affectent sa capacité à dominer, et les atteintes de l'Irgoun au prestige britannique avaient pour objectif de défaire aussi la volonté britannique de dominer. La proclamation de la révolte, qui, au départ, ne semblait qu'une manifestation déconnectée de la réalité, se traduisit ensuite par des actions audacieuses et intelligentes qui contribuèrent significativement, bien que pas exclusivement, à la décision finale des Britanniques de quitter Eretz Israël, décision qui permit la création de l'État d'Israël. n Article traduit de l'hébreu par Yoël Haddad, chercheur au Centre Begin

Zeev Binyamin Begin, fils d'Aliza et de Mena'hem Begin, est né en 1943 à Jérusalem, alors sous domination britannique. En 1963, il épouse Ruth Shoer, assistante sociale. Ils ont 6 enfants et 18 petits-enfants. Entre 1965 et 2008, il travaille comme géologue à l'Institut Géologique d'Israël. Entre 1988 et 2022, il remplit plusieurs mandats de député à la Knesset, à laquelle il siègera au total pendant vingt ans. Aujourd'hui, il travaille au MEMRI (Institut de recherche des médias du Moyen-Orient).

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GRAND ANGLE

La guerre vue à travers le regard des enfants d’Israël Comme elles sont difficiles, ces montagnes russes émotionnelles par lesquelles nous passons malgré nous durant cette guerre, entre la foi, la peur, l’espoir et le deuil !…

Qu’en est-il des enfants ? Comment comprennent-ils cette guerre ?

Est-ce qu'à l'heure des réseaux sociaux, il suffit d'éteindre la télévision pour les empêcher d’être exposés à l’horreur ? Réussissentils à rester des enfants malgré tout ou leur a-t-on volé à jamais leur naïveté ? Nous sommes allés à la rencontre de quatre enfants dont nous avons recueilli les témoignages : deux sœurs, Lilyrose, 9 ans, et Bella, 10 ans, issues d’une famille francophone, et deux frères, Eviatar, 11 ans, et Enzo, 13 ans, d’une famille de « sabras », habitant tous les quatre le centre d’Israël.

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Lilyrose (à gauche) et Bella

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Lilyrose, 9 ans, et Bella, 10 ans AJ Mag : Est-ce que vous savez ce qui se passe en ce moment en Israël ?

Lilyrose : Ben y’a la guerre.

Entre qui et qui ?

Lilyrose : Les Arabes et nous.

Tous les Arabes ?

Lilyrose : Tous les Arabes sauf les Arabes gentils.

GRAND ANGLE Savez-vous comment elle a commencé, cette guerre ?

Lilyrose : J’sais pas.

Qu'est ce qui est différent pour vous en temps de guerre ?

Lilyrose : Les azakot [les sirènes] et les boums.

La première fois que vous avez entendu une sirène, c’était comment ?

Lilyrose : J’avais rien compris, j'ai cru que c'était le truc, là où il faut se lever [les sirènes de Yom HaShoah et de Yom HaZikaron – ndlr] Alors quel est le rôle de ces sirènes ?

Lilyrose : C'est quand il y a des boums qui peuvent exploser sur notre maison, alors on doit aller au miklat [abri], comme ça, si ça explose sur notre maison, eh ben nous, ça nous fait rien.

Tu as peur quand tu entends la sirène ?

Lilyrose : Non. Bella : Moi oui !

Lilyrose : Oui, elle pleure !

Est-ce que tu veux savoir ?

Lylirose : Oui. Bella : Moi, des fois, je fais des cauchemars, je pense aux trucs à Gaza, parce que dans les 'hadachot [les informations] ils montrent plein de photos et de vidéos. Mais je préfère ne pas voir parce que ça fait peur. Sur TikTok, j’ai vu des vidéos où y’a plein d’Arabes qui aident les autres Arabes de Gaza, et aussi j’ai vu une vidéo ou ils brûlaient un drapeau d’Israël, alors j’ai mis un bouz [ ] ! Et aussi j’ai fait un cauchemar que mon papa il partait en milouïm [réserve de Tsahal] et il y avait plein de terroristes qui couraient derrière lui avec leur camion.

👎

Tu en as parlé à ton papa ?

Bella : Non, je préfère ne pas en parler.

Est-ce que vous ressentez le besoin de savoir ce qui se passe ou vous préférez ne pas savoir ?

Lylirose : Moi je veux savoir comment la guerre a commencé !

Bella : Moi je préfère ne pas trop savoir… lll

Qu’est ce qui te fait peur ?

Bella : Ben en fait, la sirène, ça fait un truc dans le cœur… Quand elle commence, ça fait comme un truc dans le ventre, qui remonte.

Et toi, tu as compris tout de suite ce qu’était cette sirène, la première fois ?

Bella : Non, j’ai cru que c’était dans mon cauchemar.

Où étiez-vous la semaine dernière quand il y a eu une sirène ?

Lilyrose : On était dans le bus de l'école. On s'est toutes cachées en dessous des sièges. Tout le monde était en train de pleurer et moi je leur ai dit : « Mais allo ?! C'est juste une sirène ! Calmez-vous ! » Est-ce qu’il y a quelque chose dans vos vies qui a changé depuis le début de la guerre ?

Bella : On a changé d’école parce qu’il y avait pas de miklat à l'école.

Lilyrose : Maintenant, quand y’a une alerte, on continue à apprendre, on s’en fiche, parce que notre classe elle est dans le miklat !

Vous parlez de la guerre avec vos copines ?

Lilyrose : Moi, ma copine elle m’a demandé : « Est-ce que tu sais comment la guerre a commencé ? » Ben moi j’en sais rien du tout ! [rire gêné] AJ MAG N° 1006

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GRAND ANGLE

lll

Qui ?

Gaza.

Tout le monde à Gaza ?

On va tuer tous les Arabes qui nous font la guerre, pas ceux qui n’ont rien fait.

Et ceux qui étaient là, qui ont vu et qui n’ont pas aidé ?

Ils ne pouvaient rien faire, s’ils nous avaient aidés ils seraient morts aussi !

Combien de temps crois-tu que la guerre va durer ?

Deux ans. D’abord, il faut qu’ils nous rendent tous les otages, même ceux qu’ils ont pris avant la guerre.

Après on va les bombarder !

Mais si tu leur dis ça, ils ne vont jamais te rendre les otages…

Mais je leur dis pas !

Qu’est-ce que cette guerre te fait ressentir ?

Je ne suis pas content mais on va gagner. Si je pouvais, j’irais me battre.

Eviatar

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Eviatar, 11 ans AJ Mag : Il y a des alertes aux missiles aujourd’hui : vous êtes allés aux abris, à l’école ?

Eviatar : Oui, et dans ma classe il y a même des enfants qui ont eu tellement peur qu’ils ont pleuré.

Pourquoi ont-ils pleuré ?

Parce que leurs parents sont venus les chercher avant la fin de la classe, alors ils ont eu peur qu'il leur soit arrivé quelque chose…

Et toi, tu n’as pas eu peur ?

Si, mais j’ai pas pleuré, j’ai juste un peu tremblé…

Est-ce que tu sais comment a commencé la guerre ?

Ils nous ont bombardés avec des missiles et ils nous ont tués, volés, et ils ont pris des otages.

Comment sais-tu tout cela ?

J’ai vu des films… Y’avait des morts et ils leur donnaient des coups de pied. J’ai pas vu les corps, ils étaient cachés [floutés – ndlr], mais j’ai vu eux.

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Si tu étais le Premier ministre, qu’est-ce que tu ferais ?

J’enverrais toute l’armée là-bas, les garçons et les filles, ramener tous les otages et tuer tout le monde.

Et qu’est-ce qu’il y aura après ?

Gazaland.

Gazaland ?

C’est comme Disneyland…

Enzo, 13 ans AJ Mag : Entre qui et qui se déroule cette guerre ?

Enzo : Israël contre les Palestiniens.

Israël contre les Palestiniens ou Israël contre le Hamas ?

Israël contre le Hamas. Mais les Palestiniens soutiennent le Hamas.

Tous les Palestiniens ?

Non. 80 %. Le 7 octobre, on a vu comment ces 80 % faisaient la fête dans leurs rues : des feux d'artifices, des distributions de bonbons… J’ai compris que c'était pas seulement le Hamas… Les Palestiniens aussi, ils

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nous détestent, parce que si c'était que le Hamas ils auraient pas fait la fête comme ça !

Où as-tu vu ça ?

Sur Instagram.

Qu'est ce qui s’est passé exactement le 7 octobre ?

3000 terroristes du Hamas sont rentrés en Israël et dans les kibboutzim, et ils ont tué et kidnappé des Israéliens, et brûlé leurs maisons.

Qu’est-ce que cela t’a fait ressentir ?

C’est nous qui leur avons donné la possibilité de faire ça ! On aurait dû en finir à [l’opération] Tsouk Eitan.

Mais on n’a pas terminé le travail à l’époque, et c’est pour ça qu’on en a pris plein la gueule !

Est-ce que tu te sens en sécurité aujourd’hui comme avant le 7 octobre ?

Oui… Non… Parce que je sais qu'à dix minutes d’ici et à dix minutes de Tel Aviv, et à dix minutes de presque partout en Israël, l’Autorité palestinienne, qui n’est pas considérée comme une organisation terroriste, a une immense armée et qu’ils font des entraînements, comme ceux du Hamas, et qu’en un instant ils peuvent être à Tel Aviv, à Herzliya et dans toute la Shfela [région du centre d'Israël située entre les monts de Judée et la plaine côtière], et faire huit fois plus que ce qu’ils ont déjà fait… Et tout le monde le sait mais personne ne fait rien !

Combien de temps crois-tu que la guerre va durer ?

Encore trois ou quatre mois.

Et que penses-tu qu’il va se passer dans cette période ?

La fin du pouvoir du Hamas à Gaza, le retour des otages. Même si on sait déjà qu’ils vont en tuer beaucoup.

Pourquoi penses-tu cela ?

Parce qu’ils en ont déjà tué plein et qu'ils en montrent d’autres dans des films. C'est de la terreur psychologique, parce qu’ils veulent que Bibi fasse tout pour récupérer les otages. Mais on ne peut pas arrêter la guerre tant qu’on a pas détruit le Hamas et repris le contrôle de Gaza ! Ça veut dire quoi, « reprendre le contrôle de Gaza » ?

Gaza, c'est pas un pays, c’est comme un État, comme la Californie, alors il faudrait que celui qui dirige là-

Enzo

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bas soit comme un gouverneur qui soit un homme de paix et soutienne Israël.

Mais tu as dit que 80 % de la population palestinienne soutient le Hamas, alors comment pourraient-il choisir quelqu’un comme ça ?

On les laissera pas décider qui est le gouverneur.

C'est nous qui choisirons ?

Oui. Tu crois qu’ils seront d’accord ?

Parce que tu crois qu’on doit leur demander leur avis ?!

Je ne sais pas… Israël a donné ce territoire en 2005, donc ce n’est plus à nous… … [profonde inspiration] Ils n’auront pas le choix : c’est soit nous qui reprenons le contrôle de Gaza, soit on choisit un homme de paix qui gouverne.

lll AJ MAG N° 1006

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GRAND ANGLE lll Et dans les territoires, c’est quoi la solution ?

Il faut reprendre ces endroits, pareil pour la JudéeSamarie, partout où ils nous menacent ; on ne peut plus faire confiance aux Palestiniens. On ne peut pas laisser l’Autorité palestinienne gouverner le camp de réfugiés de Jénine : on sait que c’est un immense camp de terroristes…

Comment sais-tu cela ?

Parce que je l’ai vu sur Instagram. Ils m’écrivent que notre peuple fait un génocide, alors que c’est le Hamas ! Ils sont débiles !

Tu as peur quand tu entends les sirènes ?

Non, mais le 7 octobre j’ai eu une crise de panique avec la première sirène. Je dormais dans la soucca, c’était comme se réveiller dans un cauchemar ; et au début j’ai eu peur que le Fatah arrive de Qalqilya, parce que là-bas aussi il y a des terroristes. Mais aujourd’hui, j’ai plus peur des sirènes.

Alors d’après toi, c’est de l’antisémitisme ?

Oui.

Tu veux parler d’autre chose que je ne t’ai pas demandé ?

Les gens en dehors d’Israël ne comprennent pas ce qu’il se passe vraiment. Ils pensent que notre armée tue des civils, des enfants.

On peut s’habituer à la peur ?

Oui. Ce que tu vis au quotidien, semaine après semaine, tu finis par t’y habituer. T’as plus peur… n

Et tu leur réponds ?

Et comment que j’leur réponds ! Je leur explique qu’on est attaqués, qu’on est bombardés de missiles tous les jours, à toutes les heures, et que si on n’avait pas le Dôme de Fer on serait dans une situation 18 000 fois Qu’est-ce que tu crois qu’il va se passer après la plus grave qu’eux et qu’on aurait beaucoup plus de guerre ? morts. Ils ne comprennent même pas la situation des Il y aura des élections, parce que tout le monde a habitants de Gaza : aujourd’hui, les habitants de Gaza changé d’avis. Ils pensent que Bibi a foiré. sont contre le Hamas parce que le Hamas leur vole tout, les frappent quand ils essaient de prendre En quoi aurait-il « foiré » ? de l’essence, de l’eau et à manger, et ils Parce qu’il n’a pas terminé le boulot avec comprennent qu’ils sont dans cette le Hamas en une seule opération il y a situation à cause du Hamas. Mais les quelques années. gens de l’extérieur ne comprennent pas que le Hamas est une Mais si je suis ton raisonnement, Ce que tu vis au organisation terroriste : ils nient alors je dois remonter en arrière les pogroms du 7 octobre. jusqu’aux précédentes guerres, quotidien, semaine à Ariel Sharon, à Moshé Dayan, Comment peut-on nier quelque et dire que toutes les guerres après semaine, tu chose sur lequel on a tellement qui sont survenues depuis finis par t’y habituer. de témoignages, dont des vidéos 1948 étaient aussi de leur faute prises par les terroristes du puisqu’eux aussi n’avaient pas Hamas eux-mêmes ? « terminé le boulot » ?

Ils connaissent la vérité mais ils ne Oui, c’était aussi leur erreur. Bibi, c’est veulent pas la reconnaître parce qu’ils pas sa faute à 100 %. soutiennent les Palestiniens.

Alors la faute à qui ? Qui est responsable de ce qui Comment expliques-tu cela ? s’est passé le 7 octobre ?

Parce que la plupart, ce sont des Arabes et des Musulmans La faute est partagée… Entre les commandants de comme les Palestiniens, alors ils les soutiennent. Ils nous l’armée qui n’ont pas écouté les observateurs qui les détestent, ça n'a aucun rapport. Même si on ne se battait ont prévenus qu’il se passait quelque chose et Ariel contre personne, ils nous détesteraient.

Sharon qui a donné Gaza à des terroristes.

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Au début de notre entretien, tu m’as dit que tu avais eu peur et que maintenant tu n’as plus peur : pourquoi ?

Je m’y suis habitué… Il y a déjà eu plus de quinze sirènes là où j’habite.

Propos recueillis par Anne Amoyal Da Costa

LEADERSHIP

Les trois dimensions du leadership PAR ANDRÉ DAN

« To lead » est un verbe anglais qui signifie mener, guider, diriger – tout un programme !

L

bien formuler et faire entendre ses arguments tout en écoutant ceux des autres, et finir par les persuader !

Mener les autres, c’est avant tout les aider, leur être utile.

e « leader » est celui qui réussit à mener, entraînant ainsi des « suiveurs ».

Les trois dimensions du leadership sont : se mener (« Lead yourself »), mener les autres (« Lead others »), et mener une organisation (« Lead an Organization »).

Se mener – diriger sa vie – est absolument indispensable pour toute personne normalement constituée !

Cela exige de se connaître soimême, de savoir ce que l’on veut, ce que l’on fait et où l’on va. Cela inclut le fait de lire, d’étudier et d’apprendre (cours, formations).

Cela nécessite de s’aimer et d’aimer les autres, d’avoir une vie sociale, une vie professionnelle, et une bonne hygiène de vie. Il faut aussi savoir gérer son temps et son image.

Se mener, c’est également avoir une vie intérieure et remplir sa vie de la manière la plus intéressante qui soit. Dans la vie privée, cela se traduit par la volonté de vivre avec sa famille, ses amis, et par une aptitude à apprécier les bons moments passés avec eux. C’est également savoir affronter les problèmes en cherchant à les résoudre.

Dans la vie professionnelle, cela implique la volonté d’exercer ses compétences, de les renforcer quand c’est nécessaire, de savoir chercher un travail, de bien

s’intégrer dans une entreprise en ayant de bonnes relations avec ses collègues et ses clients, et d’apporter de la valeur à son environnement professionnel en fonction de ses responsabilités et de sa rémunération.

Enfin, se mener, c’est savoir prendre des décisions pour soi, savoir prendre des initiatives et saisir des opportunités, en s’engageant à faire de soi la meilleure personne possible !

Mener les autres – influencer les autres – ne signifie pas qu’il faut s’imposer sur tous les sujets. Il faut aussi accepter d’être influencé par les autres, notamment lorsqu’on pense qu’ils ont raison !

Mener les autres, c’est être capable de partager ses idées et ses convictions, sans arrogance.

C’est souvent réussir à convaincre les autres, pour les aider à prendre des décisions et les inciter à agir.

Dans ce domaine, toutes les capacités de communication orale et écrite sont utiles, pour

Mener une organisation, c’est diriger, même en partie, une famille, un projet, une association, une entreprise…

Mener une organisation requiert une bonne analyse de la situation et nécessite de construire une stratégie pour développer l’organisation en tenant compte de la volonté des personnes concernées (parties prenantes).

Pour simplifier, selon le psychosociologue Rensis Likert, il y a quatre modèles de direction d’organisation : autoritaire, paternaliste, consultatif ou participatif. Je suis un militant résolu du style participatif, car d’après mon expérience, c’est ce style de direction d’organisation qui permet d’allier durablement efficacité et satisfaction.

Réfléchissez à ces trois dimensions du leadership en les appliquant à votre vie. Foi de coach, vous en sortirez grandi ! n

André Dan Coach en leadership a@andredan.com

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SANTÉ

Zoom sur le curcuma PAR ORLIE NABET

J

Avec Orlie Nabet, naturopathe, nous nous intéressons chaque mois aux vertus d’un aliment, d’une plante ou d’une épice.

e suppose que vous connaissez tous le curcuma – curcuma longa de son nom botanique – et que vous avez déjà agrémenté vos plats avec cette épice.

Cette plante, qui a fait l’objet d’énormément de recherches et d’études à travers le monde, pousse sous la terre sous forme de longues tiges d’où émergent plusieurs excroissances : c’est de ces rhizomes que sont extraits tous les bienfaits du curcuma, un des principes actifs de cette racine étant la curcumine.

Star des épices mais aussi des plantes médicinales, on utilise le curcuma aussi bien dans nos cuisines que dans le domaine de la santé, pour ses vertus médicinales reconnues depuis toujours par les populations du monde entier.

Quelles sont ses propriétés thérapeutiques ?

Le curcuma a des propriétés antiinflammatoires et antioxydantes.

Il joue un rôle bénéfique dans pratiquement toutes les fonctions du corps. Contribuant à réduire l’inflammation des muscles due à l’activité physique, il aide aussi à maintenir la flexibilité et la souplesse des articulations, et peut également aider à soulager l’arthrite/arthrose. Au niveau cardiovasculaire, il fait légèrement baisser le taux de triglycérides (graisses dans le 42

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sang), contribue à une meilleure circulation sanguine et améliore la fonction des vaisseaux sanguins.

Antioxydant, il protège les cellules et ralentit le vieillissement cellulaire. Au niveau du système digestif, le curcuma améliore l’assimilation des aliments en stimulant la production des enzymes digestives qui, elles, vont avoir un effet sur une meilleure digestion des graisses, et il protège

le foie. Sur le plan métabolique, il peut aider à empêcher l’apparition du diabète pour les personnes qui sont prédiabétiques, et il contribue à réduire les complications du diabète (neuropathie, etc.) Au niveau du système nerveux, le curcuma améliore les fonctions cognitives (notamment au tout début de l’apparition de la maladie d’Alzheimer), contribue à diminuer le stress, la migraine…

SANTÉ L’épice Le rhizome frais séché puis moulu donne l’épice de couleur jauneorangé qui agrémente nos plats et rajoute de la valeur nutritionnelle à nos préparations culinaires.

Pour une meilleure assimilation du curcuma en tant qu’épice, il est recommandé de l’accompagner d’une pincée de poivre, car le curcuma fait bon ménage avec la piperine contenue dans le poivre.

On trouve du curcuma en poudre dans tous les supermarchés.

Attention : lorsque vous en achetez, assurez-vous que c’est bien 100 % curcuma (ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas) !

Essayez d’introduire du curcuma également dans vos salades fraîches, et pas seulement

dans vos plats cuisinés : c’est très bon, et l’on n’y pense pas toujours. L’avantage de cette épice, c’est qu’on peut l’utiliser quotidiennement et en absorber ainsi de petites doses régulièrement.

La racine-rhizome de curcuma frais Il est de plus en plus tendance de rajouter un peu de curcuma frais dans les shakes et les jus, ou même d’en râper sur un plat ou une salade. Mais attention : le curcuma frais tache ! (Il est d’ailleurs utilisé pour teindre des tissus et comme additif pour colorer en jaune des denrées alimentaires.) Pour le manipuler, utilisez des gants et protégez vos habits !

La plante médicinale sous forme de complément alimentaire On utilise le plus souvent le curcuma en gélules et en teinture mère. Énormément de laboratoires et de firmes commercialisent le curcuma sur le marché à travers le monde, et la qualité et l’assimilation de la plante peuvent varier selon les différentes techniques de fabrication. De nos jours, la technologie liposomale est celle qui permet une meilleure assimilation du curcuma par l’organisme, et donc de tirer le meilleur profit de toutes les propriétés thérapeutiques de la plante.

Conseils d’utilisation La consommation de curcuma sous forme d’épice est bénéfique pour tous, sans contre-indication.

En revanche, sous forme de complément alimentaire en

gélules, il peut y avoir des contreindications pour certaines personnes, ou utilisé avec d’autres médicaments. Il est donc recommandé de vérifier s’il est adapté pour vous avec votre médecin ou votre pharmacien.

En conclusion Le curcuma est la star aux mille vertus, riche d’innombrables bienfaits pour votre santé ! Alors si vous n’avez pas encore introduit cette épice dans vos habitudes alimentaires, c’est le moment d’essayer ! n

Boisson chaude au curcuma • 1 verre de lait de riz ou d’amande • 1 cuillère à café de cannelle en poudre ou un bâton • 1 cuillère à café de curcuma en poudre ou un petit morceau de racine • Une pincée de poivre • 1 cuillère à café de gingembre en poudre ou un petit morceau de racine Si vous utilisez de la racine de curcuma, faites bouillir le tout.

Si vous utilisez du curcuma en poudre, faites seulement chauffer le mélange.

Dégustez !

C’est une boisson antiinflammatoire et qui renforce le système immunitaire, particulièrement recommandée en hiver.

Orlie Nabet, naturopathe : 058-6277009 Consultations Zoom Ateliers détox/nutrition santé/perte de poids

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NEWS À LA LOUPE

Une rentrée universitaire à l’ombre de la guerre PAR NATHALIE HAMOU

I

En Israël, l’année académique a commencé début janvier avec deux mois et demi de retard et alors que de nombreux étudiants étaient encore sous les drapeaux. Retour sur les défis d’une rentrée universitaire placée sous le signe du traumatisme et de l’incertitude.

nitialement prévue à la mi-octobre, la rentrée universitaire de quelque 380 000 étudiants israéliens, repoussée à plusieurs reprises, s’est finalement déroulée lors de la première quinzaine de janvier, dans l’ombre de la guerre et en dépit des incertitudes sur la durée du conflit. La décision n’a pas été facile à prendre alors que plus de 20 % des effectifs (étudiants, employés et professeurs) étaient encore sous les drapeaux. Mais il a fallu trancher. « Dans la foulée du 7 octobre, près de 110 000 étudiants, dont plus de 70 000 réservistes et environ 30 000 évacués des zones de guerre au Sud comme au Nord, n’ont pas pu reprendre les cours », résume Moria Tretiakov, la porte-parole de la Fédération nationale des étudiants. « Pour autant, il était important de sauver l’année universitaire, sachant qu’en temps normal le taux de décrochage est déjà de l’ordre de 22 %. » D’évidence, les défis restent de taille, à commencer par l’intégration des réservistes au fur et à mesure de leur démobilisation. Sur le plan financier, la plupart des centres

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académiques ont levé des fonds d’urgence afin d’allouer des bourses, d’un montant de 1600 à 6000 shekels (400 à 1500 euros) selon les cas, à ces étudiants réservistes. Ils ont aussi prévu

des formules de semaines « marathons », afin de remettre à niveau ceux qui auront raté le coche de la rentrée universitaire.

Mais ces aménagements, dépourvus d’accompagnement

Des étudiants de l'Université hébraïque de Jérusalem lâchent des ballons pour marquer le 100e jour de captivité des otages du Hamas. © Yonatan Sindel/Flash90

NEWS À LA LOUPE personnel ou de rattrapage individuel, ne font pas l’unanimité. « Comment des réservistes qui sortent de trois mois de guerre peuvent-ils se plonger dans une semaine de rattrapage ? C’est complètement fou ! », a ainsi dénoncé sur le site d’information Walla ! Aviv Astruck, une réserviste de 24 ans qui a ouvert une page Facebook dédiée au « Combat des étudiants en uniforme ». « Cela prouve à quel point les universités ne comprennent pas la situation. Elles ne parlent pas avec des combattants sur le terrain. Beaucoup d’entre eux ont des traumatismes psychologiques – comment en sortent-ils ? » Dans l’ensemble, les responsables des campus estiment pourtant avoir fait le nécessaire. « Le semestre d'été que nous avons intégré dans notre plan, comme

Le vivre ensemble « made in Israël » Une expérience singulière, rapportée par le journal HaAretz, s’est déroulée sur le campus Mount Scopus de l'Université hébraïque. Sous la bannière « apprendre à vivre ensemble », quelque 45 étudiants et 3 professeurs se sont réunis pour un cours intitulé « Créer un espace inclusif en temps de guerre : un toit vert sur le mont Scopus ». Il s’agit du seul cours académique dispensé en présentiel qui a été donné à l’Université hébraïque depuis le début de la guerre et avant la reprise de l’année universitaire. Parmi les étudiants : un habitant de Kiryat Arba, une jeune Palestinienne du quartier At-Tur à Jérusalem, un étudiant de Metoula dont le père est l'officier de sécurité de la ville et donc l'un des seuls à ne pas avoir été évacué, un doctorant du camp de réfugiés de Shuafat et des étudiants de la ville arabe de Tayibe. « Une expérience sociale et académique inhabituelle, destinée à tester la possibilité de continuer à étudier et à travailler ensemble – Palestiniens et Israéliens – alors que tout autour s’embrase. » N.H. l'octroi d'exemptions d’unités de valeur, permettront de mieux répartir les études, et d'alléger la charge émotionnelle et académique », assure Chaim Hames, le recteur de l'Université Ben Gourion. « Revenez-nous en bonne santé physique et mentale après avoir accompli avec succès vos tâches, et nous vous aiderons également à réussir vos études », a-t-il promis aux étudiants réservistes. L’Université Ben Gourion, située à Beer-Sheva, dans le Néguev, a payé un tribut particulièrement lourd depuis le 7 octobre, avec pas moins de 86 victimes parmi ses étudiants, ses professeurs ou leur premier cercle, ainsi que quelque 300 familles déplacées.

Autre cheval de bataille des centres académiques du pays : garantir la liberté d’expression sur les campus, qui comptent environ 20 % d’étudiants non juifs – même si pour l’heure aucun incident significatif n’a été signalé –, tout en veillant à ce que la perception internationale de la guerre à Gaza et le climat antiisraélien, voire antisémite, qu’elle a suscité dans de nombreuses

universités étrangères n’ait pas d’impact négatif sur les publications des chercheurs israéliens, ni sur la continuité des collaborations ou les échanges à l’international.

Suite aux auditions du Congrès américain, durant lesquelles les présidentes d’Harvard, du MIT et de Penn avaient refusé de statuer sur la question « appeler au génocide des Juifs constituet-il oui ou non une violation de votre code de conduite relatif au harcèlement ou à l’intimidation ? », l’Association des présidents d’universités de recherche israéliennes était montée au créneau : « Au lieu d’offrir un soutien aux étudiants israéliens et juifs à la suite du massacre brutal du 7 octobre, les campus ont été témoins de manifestations prônant l’anéantissement de l’État hébreu (“du fleuve à la mer”) et approuvant les activités terroristes contre les citoyens israéliens (“Intifada”). La liberté d’expression, bien qu’elle soit un droit fondamental, doit céder face à l’incitation à la haine. » n AJ MAG N° 1006

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JUDAÏSME On parle souvent du rôle des parents dans l’éducation de leurs enfants en général et dans leur rôle de passeurs de la Torah en particulier. Mais que nous disent nos Textes sur la place des grands-parents ? C’est ce que Yaël nous propose de découvrir dans cette rubrique. Pédagogue, titulaire d’un doctorat en études juives et bénévole auprès de clubs de grands-parents, elle s’est penchée sur le rôle éducatif des grands-parents selon le judaïsme. Elle nous invite à revenir aux Textes, et à découvrir si le judaïsme a un message à proposer aux papis et aux mamies.

Épisode 6

Et les grands-mères, alors ? © DR - Collection Motais de Narbonne - (1720) par François Lemoyne

P

our être juif de naissance, selon la loi rabbinique, il faut avoir une mère juive ; et c’est « malgré eux » que les enfants sont juifs. N’est-ce pas là une lourde responsabilité qui pèse sur la branche familiale maternelle ?

En fait, les femmes juives sont les bâtisseuses du peuple. D’ailleurs, lors des noces, moment de l’édifice du foyer, de la famille, ne cite-t-on pas systématiquement, ce verset : « Que l’Éternel rende l’épouse qui va entrer dans ta maison semblable à Rachel et comme Léa, qui ont édifié à elles deux la maison d’Israël. » (Ruth IV, 11) Bila et Zilpa, servantes de Jacob, ne sont pas citées, alors qu’elles étaient pourtant mères d’une partie des tribus !

N’ont-elles pas aussi épousé Jacob et l’avenir d’Israël ? En effet, mais elles n’étaient pas issues de la famille, elles l’ont intégrée, et cela fait une différence.

Alors que le statut social au sein du peuple passe par le père, l’appartenance familiale dépend de la mère.

La réalité montre que certes nos petits-enfants sont juifs car leur maman est juive, mais ils portent le patronyme de leur père et ce nom de « famille » est déterminant au niveau du sentiment d’appartenance. À l’inverse, si leur père est juif mais que leur maman ne l’est pas, les enfants, Bensoussan comme Rubinstein, peuvent avoir un très fort lien avec leurs racines juives, d’autant que selon la définition sartrienne, ils sont reconnus comme Juifs par leur entourage ; et bien souvent, pour être en phase avec leur sentiment d’identité juive, ces personnes pousseront les portes de la conversion.

PAR YDOT

Alors retournons aux sources.

Le Livre de Ruth se termine avec la mise au monde de son fils. Cette femme, Mère des convertis, décida d’entrer dans la destinée du peuple juif et 46

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Jacob et Rachel au puits

JUDAÏSME d’épouser la foi du judaïsme en reconnaissant son Dieu unique. Le Texte considère le fils que Naomi, morte en couches, enfanta comme étant celui de Naomi, sa belle-mère, qui l’élèvera comme un fils.

Quoique les versets insistent sur la lignée de pères en fils depuis Péretz (petit-fils de Jacob, fils de Juda et de Tamar) jusqu’au roi David, nous trouvons, en texte crypté, des mères vaillantes : Tamar, mère de Péretz, et Ruth, mère d’Oved. L’histoire de la lignée d’Israël est parsemée de femmes étrangères qui, une fois convaincues de leur appartenance au peuple juif, portent les enfants d’Israël. Il en est de même, par exemple, pour Tzipora la Madianite, femme de Moïse.

Le texte ne cherche pas à dissimuler les origines de nos héroïnes quand elles ne nous arrangent pas. Il préconise au contraire la grande mitzva d’aimer l’étranger, le converti qui se lie à la destinée d’Israël. Nous devons en tirer une leçon importante et c’est tout à son honneur que ce Livre, qui porte le nom de Ruth, se termine par sa descendance qui débouche sur la royauté d’Israël.

Les grands-mères jouent donc un rôle de transmission de l’identité, non pas du point de vue génétique, mais bien dans une tradition de filière familiale. Les femmes transmettent avec une grande sensibilité les récits, les détails, les parfums, les berceuses et les chagrins. Elles portent la tradition du foyer qu’elles ont reçue de leurs mères. Elles savent rassembler les membres de la famille et la table est bien souvent ce lieu de réunion. Les échanges conviviaux renforcent les connaissances et les liens.

L’héritage familial lie les descendants juifs !

Le rôle des femmes dans la Bible n’est plus à prouver.

Il est résumé dans le merveilleux chant à la gloire de ces héroïnes (selon le Midrach Michlei XXXI), dans le poème de Salomon, « Échète 'Hayil ». Chacune est un exemple, un maillon porteur de la chaîne éternelle d’Israël. « Savta » – « Mamie », en hébreu – est l’acronyme de « ‫ » סמכות באהבה תורמת אחריות‬: « L’autorité par amour contribue à la responsabilité. » C’est une lourde tâche qui incombe à toute grandmère juive : incarner une attitude exemplaire de référence dans le cœur de ses petits-enfants, individuellement mais aussi vis-à-vis de leur fratrie ainsi qu’avec leurs cousins germains. Cette appartenance familiale engendre l’implication, l’engagement et l’assurance de la continuité d’Israël. n

Horaires de chabbat Chabbat Michpatim – Roch 'hodech Adar 1 9 février 2024-30 Chvat 5784 Jérusalem 16h39 17h58 Tel Aviv 16h59 18h00 Netanya 16h58 17h59

Chabbat Tetsavé 23 février 2024-14 Adar 1 5784 Jérusalem 16h51 18h09 Tel Aviv 17h11 18h11 Netanya 17h10 18h11

Chabbat Terouma 16 février 2024-7 Adar 1 5784 Jérusalem 16h45 18h04 Tel Aviv 17h05 18h06 Netanya 17h04 18h05

Chabbat Ki Tissa 1er mars 2024-21 Adar 1 5784 Jérusalem 16h57 18h15 Tel Aviv 17h16 18h16 Netanya 17h16 18h16

« Durant le Chabbat, nous avons l'occasion d'apprécier ce que nous avons dans la vie, au lieu de nous inquiéter pour ce que nous n'avons pas. »

(Rabbi Yéchiel Spero)

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JUDAÏSME

« Cela ne dépend que de moi »

P

arfois cette phrase est réconfortante, mais elle est aussi très contraignante.

Nous aimons et nous voulons que les choses dépendent de nous, c’est plus simple ; cependant, la vie ne nous en offre pas toujours la possibilité. Par exemple, dans un entretien d’embauche, ou lorsqu’on veut intégrer une unité spéciale à l’armée, ce n’est pas nous qui décidons mais d’autres qui prennent les décisions pour nous.

Le seul domaine où cela dépend seulement de nous est celui de notre « avodat haMidot », notre travail sur nos valeurs. Comme cela ne dépend que de nous, c’est donc censé être plus simple – et c’est l’aspect réconfortant de la chose.

Je décide que demain matin je vais me lever pour la tefila, je décide que je ne vais pas m’énerver, je décide de faire attention à ma façon de parler et de ne pas dire de gros mots – et d’autres choses que pour chacun d’entre nous il est important d’améliorer.

Au quotidien, j’accompagne mes élèves dans leur programme de préparation à l’armée, « Gour Arié », et je vois des jeunes de 18 ans qui se battent vraiment comme des lions pour s’adapter aux changements qui s’imposent à eux. Ce n’est pas simple, car il est plus facile d’abandonner lorsqu’on est face à soi-même que lorsqu’on est face à d’autres, surtout que de nos jours tant de choses nous font changer d’avis et nous poussent à chercher la facilité.

Un vrai combattant, ce n’est pas celui qui est dans Sayeret Matkal ou Douvdevan (unités d’élite de Tsahal), un vrai combattant c’est celui qui se bat pour ses principes : contre 48

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les mauvaises actions et contre les mauvaises habitudes, dans le but de s’améliorer. Nos ancêtres disaient « ‫ » איזהו גיבור הכובש את יצרו‬: « Qui est un héros ? Celui qui domine son penchant » – au sens où le vrai héros, c’est celui qui est capable de surmonter ses défauts.

En hébreu, le mot « héroïsme » (« guevoura ») vient du mot « surmonter » (« lehitgaber ») : une personne qui, malgré une forte émotion qui surgit en lui – comme la peur de mourir, par exemple –, y résiste et part se battre contre l’ennemi, peut à juste titre être qualifiée de « héros ».

Nous sommes habitués à ne voir l'héroïsme que sur les champs de bataille et dans les situations entre la vie et la mort. Mais en réalité, un héros peut ne jamais détenir d’arme ni approcher d’un champ de bataille. Cela peut être une personne qui surmonte sa colère, qui se tait et ferme la bouche même lorsqu'elle est très énervée.

Cela peut aussi être quelqu’un qui retient sa langue et évite de dire des mauvaises choses (lachone haRa), même si cela lui brûle les lèvres. Cela peut être quelqu’un qui ressent un énorme désir pour quelque chose d'interdit qui est là, disponible devant lui, mais qui se contrôle et s'arrête. Les exemples sont nombreux. Plus la tentation est forte, plus elle est attrayante, plus l'héroïsme est grand.

Il est facile de faire porter la faute aux autres : « il m'a énervé », « à cause de lui j'étais en retard au travail », « c'est le professeur qui ne croit pas en moi »… Rejeter la faute sur quelqu’un d’autre équivaut à se dire que l’on n’a pas de problème et que c’est l’autre qui

est à blâmer. Ainsi, on se dégage de toute responsabilité.

La première chose à faire pour amorcer le processus de progrès sur le plan personnel est de commencer à pointer les flèches vers l’intérieur, en se demandant à quel moment je me suis trompé. Je ne pourrai pas changer l'autre, donc le blâmer ne me servira à rien. Le seul dont je suis responsable et que je peux changer, c'est moi-même, et cela ne dépend que de moi ; et c'est là que commence le vrai changement. Dès que je prends conscience que tout dépend de moi, je peux grandir et avancer.

Je terminerai en citant un beau passage du livre Learim eth haChamayim (« Élever le ciel »), d'Adin Steinsaltz : « Une personne ne doit pas rester là où elle était ; et si elle ne s’élève pas, alors elle descend. La question n'est pas seulement de savoir si je ne suis pas tombé, quelle faute j’ai commise ou quelle mitzva j'ai accomplie, la question est de savoir si je me suis élevé aujourd'hui, si je me suis amélioré par rapport à hier.

Est-ce qu'aujourd'hui est un meilleur jour qu'hier ?

Si la réponse est non, alors je m’abaisse. Cela veut dire que pour ne pas tomber, je dois faire de grandes choses, plus audacieuses qu’hier. Il ne s’agit pas ici d’une exigence de vivre constamment dans l'instabilité, mais d'établir une chose stable qui vit, progresse et impressionne. » n Yehouda Salama Directeur du programme Gour Arié de préparation à l’armée israélienne pour les jeunes Juifs français Yehuda@betar.org.il

UNE ANNÉE AVEC LA CABALE

Secrets du Temps

Pardès – le Verger – ce sont les quatre niveaux

L'homme, la mort, le temps

Kabbala et 'Hassidout. Que cet éclairage vienne

PAR ARIELA CHETBOUN

L

e Messie s’inscrit dans un mouvement qui arrive très progressivement. Comme le passage de la nuit au jour, voilà la forme que prend le dévoilement messianique : des degrés d’évolution dont on ne perçoit pas l’avancée, nécessairement lente, depuis la Création du monde. Le retour à la Lumière originelle de la Création est lent pour nous habituer graduellement à son intensité.

Ce processus aura connu beaucoup d’écrans : les quatre exils que sont Babylone, la Perse, la Grèce et enfin Édom/Ismaël – le Christianisme et l’Islam, qui fonctionnent ensemble. Ces quatre voiles dissimulateurs correspondent aux quatre lettres du Tétragramme. La dernière – Hé – prend beaucoup de temps pour édifier la Maison, le Royaume de Dieu sur terre, la Gueoula.

L’arrivée du Messie, attendue par le peuple juif, consacrera ce temps nouveau, celui d’un âge d’or lumineux, bon et éternel. « À jamais il anéantira la mort et ainsi le Dieu éternel fera sécher les larmes sur tout visage et disparaître de toute la terre l'opprobre de son peuple : c'est l'Éternel qui a parlé. » (Isaïe 25, 8) À titre individuel, on dit aussi que chaque Juif connaîtra 40 voyages et 42 étapes dans sa vie – ou dans ses vies –, qui lui permettront de se connaître, de s’éprouver et de progresser, jusqu’à devenir celui qu’il doit être : 42 massaot,

d’étude de la Torah. Ariela Chetboun met par écrit l’enseignement oral reçu de ses maîtres en ‫ בסייד‬compléter ce que nous savions jusqu'ici.

comme l’ont vécu les Hébreux dans le désert, qui ont connu autant d’errances en quarante ans de haltes, quarante ans de maturation. Ces chiffres ne sont pas donnés au hasard. Ils correspondent aux six directions dans l’univers (les quatre points cardinaux + le haut + le bas) et aux sept temps, les sept jours de la semaine : 6 x 7 = 42 massaot.

L’humanité a commencé avec l’apparition de la mort et donc avec l’apparition du temps. Il est tout aussi vrai d’affirmer que le temps coïncide avec la naissance de l’humanité. Le temps et l’humanité – l’histoire – sont liés dans leur essence. Si Adam n’avait pas fauté avec Ève en consommant du fruit de l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal, il n’aurait pas été chassé du Jardin d’Éden, il n’aurait pas été séparé de la source de Vie, privé de la Présence permanente de Dieu ; il aurait continué à se trouver dans Son immédiate proximité et, donc, dans la connaissance évidente que tout est Dieu. La vie éternelle n’aurait pas été suspendue pour lui ; la mort n’aurait pas commencé son œuvre funeste, ni, avec elle, le temps qui permet l’histoire des hommes.

C’est dire la centralité du temps dans l’équation humaine. À l’extrémité opposée de ce temps qui a un début, il y a une fin. Cette fin du temps humain, c’est l’éternité retrouvée d’Adam, autorisé à entrer en Éden après

n’en avoir connu que le Jardin qui l’entoure puis le monde de la matière, notre réalité depuis 5784 ans. À travers les fils d’Adam, l’humanité aura fait une sorte de boucle dans l’espacetemps, de l’éternité perdue à l’éternité retrouvée, pour acquérir – comme un supplément précieux à sa conscience collective – les milliards de consciences individuelles augmentées de l’expérience de la vie. n

Une année avec la Cabale.

Secrets de l'Âme et du Temps En vente en librairie francophone en Israël et sur Amazon www.belles-ames.com

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LE KLING DU MOIS

Les deux images PAR ELIE KLING

N

ous vivons, pour le pire comme pour le meilleur, dans un monde d'images.

Des images terrifiantes ou émouvantes, des images choc, des images fausses ou authentiques, des images qui souvent renforcent notre conviction mais qui, parfois, peuvent aussi les remettre en question. On nous dit que les gens ne lisent plus : ils regardent. Or la vision est souvent trompeuse.

Le judaïsme lui a toujours préféré l'écoute. Matin et soir, deux fois par jour, nous récitons un des textes fondateurs du judaïsme, qui commence par « Écoute, Israël » et qui se termine par : « Ne vous laissez pas entraîner par vos yeux. » Cela fera bientôt quatre mois que nous sommes envahis par un flot incessant d'images, souvent bouleversantes. Des scènes d'horreur que nous souhaiterions oublier, et des scènes d'héroïsme et de générosité qui nous redonnent espoir et qui nous rendent fiers de ce que nous sommes. Dans ce tourbillon ininterrompu d'images, sommes-nous capables de faire le tri ? D’effacer de notre mémoire toutes celles qui sont inutiles et nocives pour ne ne retenir que celles qui nous seront utiles, qui contribueront à nous rendre meilleurs, plus vigilants, plus grands, plus aimants, plus dignes, moins naïfs face à la cruauté de nos ennemis, mais malgré tout plus confiants en l'avenir grâce au courage de nos héros ?

Parmi toutes ces images, il y en a deux qui ne me quittent pas. Depuis des mois, il ne 50

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se passe pas un jour sans qu'elles ne m'apparaissent, tantôt simultanément, tantôt séparément. La première date d'avant le massacre, la seconde lui succède.

La première : le 24 septembre au soir, à Tel Aviv. Kol Nidrei, la prière qui introduit Kippour.

Affrontements Kikar Dizengoff.

La tension monte. Juifs contre Juifs. Une me'hitsa a-t-elle été posée contre l'avis des tribunaux ?

Le maire se déclare décidé à « empêcher que l'on modifie le caractère laïque de la ville ». La prière est interrompue par des manifestants en colère. Du jamais vu en Israël.

La seconde, c'est la photo d'Eli Valentin Ghenassia souriant sous son béret de parachutiste, Eli Valentin Ghenassia, originaire de Montpellier, que rien ne prédestinait à venir servir le peuple et l'État juifs, et encore moins à donner sa vie pour eux – un voyage en Israël aura suffi pour réveiller sa fibre identitaire, ce « nitzotz » dont parlent les 'Hassidim –, et qui, après avoir sauvé, avec ses amis, mon village de Kfar Maïmon, est tombé à Be'eri.

La question qui ne cesse de me hanter depuis des semaines est celle-ci : quel est le vrai visage d'Israël ? Quand notre peuple porte-t-il un masque et quand présente-t-il son vrai visage ?

Et c'est en me posant de nouveau cette question qui m’obsède depuis des mois que je me suis souvenu, il y a quelques jours, de ce texte du Rav Kook, écrit suite à l'assassinat en juin 1933, sur

une plage de Tel Aviv, de Haïm Arlozoroff, étoile montante du parti Mapaï de Ben Gourion. Ce crime est commis dans un climat particulièrement tendu. En effet, Arlozoroff est l'un des principaux négociateurs du fameux accord passé avec les nouveaux maîtres de l'Allemagne afin de sauver une partie des biens juifs que les nazis veulent s'accaparer. Mais les révisionnistes de Jabotinsky, eux, s'insurgent contre l'idée même de négocier avec le diable, et les dissensions dégénèrent en affrontements parfois violents lors du congrès sioniste de 1933. L'assassinat d'Arlozoroff déchaîne alors les passions : les révisionnistes sont rapidement accusés du crime et le Yichouv semble plus divisé que jamais. À l'approche de Pourim, le Rav Kook publie ce texte dont je vous livre des extraits significatifs : « Haman n'avait pas tort de qualifier Israël de “peuple un, dispersé et divisé” (Esther 3, 8).

Le paradoxe ne doit pas te surprendre : le monde est parfois étonnant. Notre peuple est uni par essence, tout en étant dispersé et divisé… On est en droit de se demander comment Esther peut exiger (de Mordekhaï) : “Va, rassemble tous les Juifs” ?

Comment peut-on les réunir tous sous un même drapeau, malgré tous leurs partis et toutes leurs chapelles ? Comment peuventils tous se rapprocher les uns des autres jusqu'à former la collectivité d'Israël ?… On voit pourtant bien de nos propres yeux comment des Juifs sont capables de se lever contre d'autres Juifs,

LE KLING DU MOIS

25 septembre 2023, Kikar Dizengoff à Tel Aviv. Des activistes protestent contre la discrimination faite aux femmes obligées, selon eux, de prier séparées des hommes. © Itai Ron/Flash90

comment des frères peuvent se déchirer jusqu’à devenir l'un pour l'autre des loups et des serpents…

Et pourtant, nous serons bien obligés de reconnaître notre erreur, qui consiste à croire que l'essence de notre peuple, c'est l'aspect extérieur qu'il donne de lui-même, alors qu’il ne constitue en fait que son côté superficiel qui parfois nous effraie nousmêmes, nous faisant croire que

nous ne sommes capables que de nous haïr et de nous diviser. C'est aussi l'erreur de tous les Haman de chaque génération qui veulent nous atteindre par le venin de leur haine, croyant trouver notre point faible parce qu'il est le plus visible : notre apparente division. Mais ils ne savent pas qu'en réalité leur haine fera tomber les masques, et que notre véritable essence de peuple uni apparaîtra alors et nous

étonnera nous-mêmes ! Dans ces moments d'adversité, notre âme collective se dévoile, plus puissante que jamais, et vient à bout de tous ces disciples d'Amalek qui, croyant avoir trouvé notre faiblesse, ont en fait réveillé notre véritable nature, unie et solidaire, notre véritable visage ! » Arrêtez-moi si je dis des bêtises… n klingelie@gmail.com AJ MAG N° 1006

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RECETTE

Quiche aux champignons

INGRÉDIENTS

PRÉPARATION

Pour 8 personnes l l l l l l

Foncer un moule à tarte avec la pâte brisée et la piquer à l’aide d’une fourchette.

La mettre à cuire au four à 240°C (thermostat 8) pendant 20 minutes, avec des haricots secs sur le fond de la tarte.

Pendant ce temps, nettoyer, essuyer et émincer les champignons, puis les faire revenir à feu très doux dans une poêle beurrée.

Les arroser du jus de citron, saler, poivrer, ajouter la moutarde et laisser cuire jusqu’à évaporation complète du jus de cuisson.

Battre ensuite les œufs entiers avec la crème et le gruyère râpé, puis saler et poivrer le tout.

Sortir la pâte du four, la garnir de la préparation aux champignons, puis l’enfourner pour 20 minutes à 210°C (thermostat 7).

Bon appétit !

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• • • • • • • • • •

1 kg de champignons de Paris 270 g de gruyère râpé 2 c. à s. de moutarde 6 c. à s. de crème fraîche Sel et poivre 1 pincée de noix de muscade 40 g de beurre 1 rouleau de pâte brisée 1 citron 5 œufs

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JEUX SE BATTENT POUR UN SALAIRE VOISIN DU MEXIQUE

SIGNE DE PRINTEMPS PAYS D’AFRIQUE

ÉTAGE BRIGAND

AU MILIEU DE NULLE PART

ÉTAT AMÉRICAIN VACHEMENT PETIT

INFIRME

DÉCHIRA BONNE BLAGUE

POSSESSIF

LIEU SAINT

BERNÉE

PARADIS DES CASINOS S’EN VA DIFFICILEMENT ILS VIDENT NOS POUBELLES

DÉVASTÉE DÉGRAISSÉ

DINGUES RÉDUIT EN MIETTES

FANGE CAPITALE DU TOGO

SOURCE DE SIROP INCROYABLE GROS BIDE OPPOSÉ AU ZÉNITH

METTE SOUS TERRE

COMPOSANT DU GRANITE VOUTE

ON LES PREND EN CURE

DE NOMBREUSES DIVISIONS

SORTE D’AUTRUCHE NÉGATION

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Un type assiste à un match de foot. Il y a une place libre à côté de lui. Un autre type s’approche et lui demande : – La place est libre ? Je peux m’assoir ?

– Non, non, la place est réservée !

– Ah ? Bon. – Oui, vous savez, pendant trente ans, ma femme m’a accompagné à tous les matchs du PSG, alors maintenant qu’elle a disparu je garde une place en souvenir d’elle.

– Je comprends, c’est très touchant. Mais enfin, vous pourriez en faire profiter un membre de la famille ou un ami…

– C’est impossible !

– Et pourquoi ?

– Ils sont tous à l’enterrement !

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Rabinovitch appelle le KGB afin de savoir si son perroquet n’aurait pas atterri dans leurs locaux. À l’autre bout du fil, en arrière-fond, il entend une voix empesée proférer des jurons innommables.

– Excusez-moi, dit Rabinovitch, mais je voulais seulement vous prévenir que je ne partage pas ses opinions politiques !

Mme Benzaken réveille son fils : – Michaël, lève-toi, c’est l’heure d’aller à l’école !

Michaël râle et remonte la couverture sur sa tête : – Pas aujourd’hui, j’ai pas envie !

– Ah non, pas de ça ! Tu dois y aller !

– Mais m’man, les profs ne m’aiment pas, et tous les enfants se moquent de moi et me tirent la langue !

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– Michaël, tu n’as pas le choix, tu dois aller à l’école !

– Pourquoi ? Donne-moi donc une seule bonne raison !

– Je vais t’en donner deux : tu as quarante-cinq ans et tu es le directeur.

Un Juif riche meurt et rencontre Dieu en arrivant au Paradis. Il se plaint : – J'ai laissé toute ma fortune à mon fils par testament, à une condition : qu'il reste juif. Et voilà qu'il s'est converti au christianisme !

– Ce sont des choses qui arrivent, lui répond Dieu. Mon propre fils s'est lui aussi converti au christianisme.

– Mais c'est effroyable ce que vous me dites là !

Il faut absolument faire quelque chose pour les ramener sur le chemin de la vérité !

– Eh bien, tu n'as qu'à faire comme moi.

– Comme vous ? Et qu'est-ce que vous avez fait ?

– Un nouveau testament !

Les blagues sont issues du livre de Josy Eisenberg, Ma plus belle histoire d'humour. Avec l'aimable autorisation de la famille.

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