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Ailleurs. Le Mexique

Fantastique Mexique

La géographie de ce pays offre une diversité de cultures qui donne naissance à autant de spiritueux, aux déclinaisons de saveurs et couleurs multiples.

LA PLURALITÉ des productions repose ici sur un socle commun pétri d’histoire. «Peu de temps après l’arrivée des Espagnols, au XVe siècle, les conquistadors enseignèrent la technique de distillation aux autochtones. On se mit à tout distiller, mais cela nécessitait alors un travail spécifique de la matière première, à l’origine d’une véritable évolution agricole et culturelle dans le pays», explique Alexandre Vingtier, expert en spiritueux et auteur de 151 Rhums (Dunod, 2022).

Quand l’agave se mue en mezcal

Cette succulente aux longues feuilles pointues et épaisses pousse dans les régions arides. Sa sève, si on la laisse fermenter, devient du pulque, à l’origine du mezcal et de la tequila (el tequila, en espagnol). Si le premier peut être produit à partir d’une trentaine de variétés d’agaves différentes – la plus communément utilisée étant l’espadin– la tequila n’est produite qu’à partir de l’agave bleu. Comme le précise Alexandre Vingtier, « la tequila est finalement un mezcal qui a bénéficié d’une reconnaissance». Chez Lokita, pépite de la production artisanale, le maître distillateur opère une sélection minutieuse d’agave bleu répartie dans différents terroirs – les sols argileux du sud, pour le profil minéral, et les hauteurs de l’État de Jalisco, pour le fruit subtil – afin de produire des tequilas à l’équilibre parfait. Pour les mezcals, il compose à partir d'une palette de variétés d’agave, qui sont une ode au temps long : espadin, tobala, madrecuishe ou tepztate, qui nécessitent de patienter respectivement 8, 12, 14 et 20 ans avant d’être récoltées. Le résultat est d’une grande élégance.

Canne à sucre et rhum culte

Coupant le pays en deux, des chaînes de montagne placent certaines régions à très haute altitude. L’État du Michoacán –à l’ouest de Mexico, à 2000 mètres– est historiquement producteur de charanda rum, issu de la double distillation de la canne à sucre cultivée à 1250 mètres d’altitude, sur un sol volcanique rouge, riche en minéraux. Ces conditions favorisent la naissance de rhums secs uniques au monde. La famille Pacheco, à la tête de Casa Tarasco, l’une des six distilleries qui subsistent aujourd’hui dans l’État, pérennise ce savoir-faire depuis plus d’un siècle.

L’iconique maïs devient whisky

Céréale mexicaine par excellence cultivée pour la première fois vers 5 500 avant J.-C., le maïs irrigue tout l’art de vivre du pays, notamment culinaire, avec la fameuse tortilla. Si la variété de maïs est fondamentale, une étape l’est aussi dans la confection de ces galettes: la nixtamalisation. Ce terme d’origine nahuatl –la langue des Aztèques, toujours parlée– est composé de nextli (cendres) et de tamalli (farine de maïs moulu). La recette ancestrale consiste à faire tremper les grains, puis à les cuire dans une solution alcaline –avec de la chaux– afin de les transformer chimiquement pour préparer une pâte souple. C’est ce même principe, traditionnel et unique, qui est utilisé par la toute première distillerie de whisky mexicaine créée à Jilotepec de Abasolo, à plus de 2000 mètres d’altitude, par Iván Saldaña, grande figure des spiritueux mexicains. Il l’applique à une variété de maïs autochtone et ancestrale, sans OGM, identifiée pour son fort potentiel aromatique, le cacahuazintle. De cette méthode exclusive – qui le distingue fondamentalement du bourbon – naît Abasolo, un whisky 100 % mexicain d’une grande finesse, aux notes singulières de maïs grillé, de cacao, de vanille, de miel et de cuir. Unique.

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