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Diaporama d’histoires
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Luciedepret@orange.fr
ManonD@sfr.fr
Pas cool !
Envoyé : mardi 13 juillet 13 : 25
Veinarde4 ! ! ! Les copains ne sont pas là. À Lyon, c’est mort5 ! Pas cool ! ;–)
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Luciedepret@orange.fr objet : Un, deux ! Un, deux ! Le 14 juillet !
Bonjour, chère petite sœur !
Envoyé : jeudi 15 juillet 11 : 58
Hier, je suis allée au défilé6 sur les Champs-Élysées. Les défilés militaires, c’est pas mon truc7 ! Mais mardi soir, j’ai rencontré un Américain sympa (un peu comme Brad Pitt, alors imagine !). Et il aime les parades militaires ! Nobody is perfect ! Après le défilé, on est allés ensemble à Montmartre, on a visité le Sacré-Cœur et on a commandé un café au lait sur la place du Tertre. Oui, oui, c’est kitsch ! Mais so romantic ! ! !
Allez, j’ai rendez-vous à midi avec John et après, j’ai encore ma robe de cocktail à faire.
À plus, ma Lulu.
Manon D.
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Comment ?
Envoyé : jeudi 15 juillet 13 : 34
Tu as rencontré un Américain sympa ? Vous êtes ensemble ? Raconte.
J’ai regardé cinq minutes le 14 juillet* à la télé. Trop nul !
Je suis restée toute la journée à la maison. Trop nul !
Tout le monde est à la mer. Trop nul ! Un bisou à Brad-John quand-même !
L. * Le 14 juillet : en France, c’est le jour de la fête nationale. Un défilé militaire a lieu sur les Champs Elysées en présence du Président de la République.
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Re : Comment ?
Tu fais une crise ?
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Et moi ? Et moi ? Et moi ?
Envoyé : jeudi 15 juillet 13 : 52
Envoyé : jeudi 15 juillet 13 : 56
Une petite crise seulement ! Tu fais carrière dans la mode, tu visites Paris, tu rencontres un mec cool, tu vas parler couramment anglais – et moi alors ? ? ? Non, je rigole. Mon ordinateur marche, mon stage est intéressant, mes collègues sont plutôt sympas et l’été à Lyon, c’est pas si mal9. Mais j’ai quand même envie de te voir ! Snif snif ! ! !*
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C’est la fête !
Envoyé : jeudi 15 juillet 18 : 52
Écoute, Lucie, c’est simple ! Tu prends le TGV vendredi soir et deux heures après, tu es à Paris. On va passer un super week-end ensemble. Samedi soir, Maxie organise une fête avec des stylistes dans sa grande maison avec piscine11 (si, si, c’est pas une blague, avec piscine !). John et ses copains vont aussi être à la fête. Alors, emballée ?
Au fait, Jean Paul Gaultier est passé à l’atelier dans l’après-midi, il a trouvé ma robe de cocktail super et il l’a A-CHE-TÉE pour sa femme ! ! ! Ma robe de cocktail ! Achetée ! Youpi !* OK, OK, j’ai fait une petite blague, le monsieur, ce n’est pas JP Gaultier, mais il a aussi un pull rayé12 comme lui ! Hi hi hi !
Bisous bisous
Manon
* Youpi ! : expression pour indiquer la joie.
* Snif, snif ! : expression pour indiquer la tristesse.
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À moi, Paris !

Envoyé : vendredi 16 juillet 09 : 01
Salut Manon, J’ai eu la dernière13 place dans le TGV * ! J’arrive ce soir à 20 h 11 à la gare de Lyon.
À + *
P. S. J’apporte un sac de couchage14 ?
Lucie
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Dormir ?
Envoyé : vendredi 15 juillet 12 : 20
Tu ne penses pas dormir15 ? On va faire la fête ! Interdit16 de dormir ! ! ! ;–)
Ça marche, rendez-vous à la gare.
Bisous.
M.
* TGV (Train à Grand Vitesse) : la première ligne de TGV reliait Paris à Lyon. C’était en 1981.
* À + : à plus tard.
4. Impression de déjà-vu
Il y a des jours où on a comme une impression de déjà-vu, des jours où tout marche à l’envers1, des jours où tout est compliqué, bizarre…
Tanguy regarde son costume2 gris3 anthracite qu’il a rangé dans son armoire4 .
Lundi, quand5 il a porté sa veste de costume et quand il a vu dans le miroir6 un monsieur élégant, il a pensé : « C’est parfait pour mon entretien d’embauche ! »

Tanguy est allé encore dans la salle de bains, puis il a pris son petit-déjeuner (un café seulement) et il est allé dans la rue. Le tramway de la ligne C est arrivé à l’heure, Tanguy est monté et huit stations plus tard, il est descendu Place de la Bourse. 8 h 50 pour un rendez-vous à 9 h.
Très bien. Il est entré dans l’entreprise Textra et a demandé la DRH Mme Dumesnil. La secrétaire a cherché sur son ordinateur, puis l’a regardé étonnée : « Monsieur
Tanguy Lemaire, vous dites… Mais vous avez seulement rendez-vous demain. Le 26. »
Se tromper7 de jour, ça peut arriver, mais quand ça arrive, on est un peu ridicule, surtout devant une secrétaire qui continue à vous regarder. « Alors, à demain ! » a rigolé Tanguy.
Mardi, même8 scénario. Costume, salle de bains, petitdéjeuner… Tanguy est monté dans le tramway, ligne C
Bègles-Bordeaux, a pris place à gauche d’un petit garçon qui lui a fait une grimace. Deux stations après, Gare SaintJean, son portable a sonné. La secrétaire de Textra lui a dit : « La DRH* a un problème aujourd’hui. Le rendez-vous est pour demain. »
Mercredi, costume, salle de bains, petit-déj, tramway…
Tanguy a pris place à gauche d’une jolie fille qui lui a fait un sourire. Station Gare Saint-Jean. Le portable de Tanguy a sonné. Ouf ! Une erreur de numéro 9. Six stations plus tard, Tanguy est descendu. La jolie fille lui a fait des gestes. Tanguy lui a fait au revoir avec un grand sourire. Mais la jeune fille a montré un portable, le portable que Tanguy a laissé sur le siège10. Tanguy a fait des gestes au chauffeur qui a fait « trop tard ! » avec sa main11. Tanguy a couru12 , couru , couru, il a tourné à droite comme le tram* et puis il a arrêté de courir. Il a pensé : L’entretien d’embauche d’abord. Tanguy est entré un peu essoufflé13 dans l’entreprise. La secrétaire l’a remarqué et lui a apporté un café. Puis elle a téléphoné à Mme Dumesnil.
La DRH, une dame de 40 ans, est arrivée dans une robe bleue. « Bienvenue, Monsieur Lemaire ! » Tout à coup, la musique de Star Wars* ! Le portable de la DRH a sonné.
« Ma chérie, oui ? Fais vite, je n’ai pas le temps… Ah bon ? Un portable dans le tramway… ? Et tu as vu le propriétaire ?
… Oui, ben, si tu veux… À ce soir ! »
* DRH (Directrice de Ressources Humaines) : personne en charge de la gestion du personnel dans une entreprise.
* Tram (fam.) : tramway.
* Star Wars : film de Georges Lucas plus connu sous le nom de « La guerre des étoiles ».
Tanguy a voulu parler à la DRH, lui dire que le portable, c’est peut-être son portable. La DRH ne l’a pas écouté. Elle a raccroché14 . Elle est allée avec lui dans son bureau et a commencé l’entretien. Elle l’a interrogé sur les études qu’il a faites, sur les langues15 qu’il parle et sur ses loisirs. Elle a présenté l’entreprise, lui a parlé des produits et des partenariats de Textra avec des banques étrangères… Tanguy a posé des questions sur les différents départements et sur la stratégie de marketing de l’entreprise… et pendant une heure, il n’a plus pensé à son histoire de portable.

Puis le garçon est rentré chez lui, à Bègles, il a fait le numéro de son portable… Occupé16 ! Il a alors rangé son costume gris anthracite dans son armoire, l’a regardé et a pensé : « Il ne m’a pas porté chance, mon costume ! » Le téléphone a sonné. « Allô ! Tanguy Lemaire, ici madame Dumesnil, j’ai voulu vous téléphoner sur votre portable, mais c’est ma fille qui a décroché17. Elle a votre portable et vous, vous avez le job*. À bientôt dans notre entreprise ! » Tanguy a raccroché. Le téléphone a encore sonné. « Bonjour ! Je m’appelle Maëlle Dumesnil. C’est moi qui ai trouvé votre portable dans le tram. On se donne rendez-vous dans un café et je vous le rends18 ? » Tanguy a raccroché. Il a regardé avec un grand sourire son costume dans l’armoire. Pour finir19, il lui a plutôt porté chance ! ! !

Il y a des jours où on a comme une impression de déjàvu, des jours où tout marche à l’envers, des jours où tout est compliqué, bizarre, mais c’est peut-être normal…

5. Tout le monde en cuisine !
« Quoi ? Comment est-ce qu’on fait sans chef ? » demande Nina, étonnée et déjà stressée.
« Eh bien, Nina, c’est simple, tu le remplaces1 ! » dit la directrice2 de l’hôtel-restaurant, un quart d’heure seulement avant3 le service4 .
Elle ? Remplacer le chef de cuisine ? Coordonner le travail du personnel ? Donner des consignes ? Et faire la cuisine ? ! ? Mais pourquoi elle ? Seulement parce qu’elle a eu son examen de cuisine et qu’elle n’est plus apprentie maintenant ? Impossible, il faut trouver une autre solution…
Mais la directrice ne veut pas comprendre : « Écoute, Nina, j’ai assez de problèmes comme ça. Une des serveuses5 ne peut pas venir aujourd’hui et le chef est bloqué au lit avec 40 de fièvre6 , tu es notre unique chance. »
Nina fait vite le bilan de la situation.
Un : Le chef ne peut pas travailler.
Deux : Il faut le remplacer.
Trois : Elle est la seule7 à pouvoir le remplacer.
Bilan : Elle va devoir le faire !
De toute façon, Nina n’a plus le temps de penser, le service commence dans dix minutes ! Action !
Nina va dans les cuisines, elle entre dans la chambre froide8 .
En poisson, il y a du saumon, de la truite, du cabillaud… En viande, de l’escalope de veau, de l’entrecôte de bœuf, mais pas de gigot d’agneau.
Nina crie9 : Tout le monde en cuisine pour un briefing !
Léa-Lou et Jules, les apprentis cuisine, sont déjà là. Marie, la serveuse, arrive.
Nina : Il est où, Romain ?
Marie : Il fume10 une cigarette sur la terrasse. Je vais le chercher.
Deux minutes après, l’équipe est au grand complet11 .
Nina : Vous allez bien écouter mes consignes, d’accord ?
Tout d’abord, nous n’avons plus de gigot d’agneau, il faut le rayer12 de la carte. Nous avons encore beaucoup de poissons. Alors, vous recommandez le poisson. Il est extra frais, avec des petits légumes pour accompagner. Tous les arguments sont bons. Le poisson stimule l’intelligence, il y a des Omega 3 et tout et tout…

Tiens, tiens, Nina a toujours son humour même dans les situations critiques, ça plaît bien à Jules, l’apprenti cuisine.
Nina distribue13 maintenant les rôles. La directrice écoute un peu, puis elle retourne à la réception.
Nina : En salle, Marie, tu es responsable des boissons et toi, Romain, tu prends les commandes des plats. En cuisine, Léa-Lou, tu prépares les entrées et les desserts et toi, Jules, tu m’aides à faire les plats.
Tous : Oui, chef !
Nina : Hein ? Quoi ?
Romain : Ben, c’est toi le chef aujourd’hui !
Nina : Ah oui, c’est vrai…
Midi vingt. Romain, le serveur, arrive avec un bon de commande14 et le donne à Nina. Elle lit pour tout le monde :
2 couverts, table 18

Salade niçoise, salade chef
Saumon grillé, steak frites
Tout de suite, Léa-Lou prend des carottes, des tomates, des œufs, un peu de basilic… Une olive noire sur la salade niçoise, une olive verte sur la salade du chef.

Elle regarde les deux assiettes15 , les trouve jolies. C’est prêt. Elle sonne. Ting ! Ting ! Romain arrive et prend les assiettes. Cinq minutes plus tard, le voilà avec un bon de commande « trois couverts16 » pour la table 5.

Nina le lit et voit « Gigot ». Grrrrrr !
Nina : Romain, tu n’as pas écouté ? Il n’y a plus de gigot !
Romain : Ah oui, pardon. Pas de panique ! J’arrange ça tout de suite17.
Nina commande les trois entrées à Léa-Lou et prépare le steak et le saumon de la table 18. Ah, voilà Romain ! Le problème est déjà réglé. Le client prend une entrecôte de bœuf saignante18 .

Parfait ! Le serveur emporte19 les entrées.
Nina commande maintenant les plats à Jules.
Jules : Nina, je ne trouve pas les entrecôtes.
Nina entre dans l’énorme frigo.
Nina : Regarde, elles sont là.
Jules : Excuse-moi, je n’ai pas bien cherché.
Il regarde Nina. Il l’aime bien. Mais pas de chance, elle a un copain. Et de toute façon, ce n’est pas le bon moment ou le bon lieu pour faire des compliments à une fille !
Nina fait griller l’entrecôte et prépare la sauce. Elle fait très attention 20 car comme son chef dit toujours, « une bonne sauce fait toute la différence ». Elle la goûte. Excellente !
Elle place la viande, puis la sauce sur une assiette, Jules ajoute21 des frites et du sel22 .
« Romain ! » Ting ! Ting !
Le serveur entre dans les cuisines, il prend les assiettes. Deux minutes après, il revient23 .

« Le client trouve l’entrecôte trop salée. »
Nina : Zut ! On recommence tout. Jules, tu es amoureux 24 ou quoi ? Une autre entrecôte !
Puis c’est Marie qui a un problème :
« Nina, on n’a plus de pain 25 ! »
« Va vite en prendre à la boulangerie26 . »
Marie revient avec des baguettes dans un grand sac. Ouf ! Et la danse des bons de commande continue. Beaucoup de commandes arrivent. Les apprentis font bien leur travail, ils sont organisés, Léa-Lou prépare les entrées, Nina et Jules les plats. Des plats que Nina complète… avec une petite décoration, un peu de sel (mais pas trop !). À un moment, Nina pense même : « On fait une bonne équipe tous ensemble. »
Alors pour motiver ses troupes, elle dit :
« C’est bien ! Gardez le rythme ! »
Les apprentis rigolent, les serveurs, qui arrivent avec des assiettes, sont aussi contents. Tout à coup, comme un miracle, la danse des bons s’arrête, il reste seulement les desserts, encore une demi-heure et le service est terminé.
Marie arrive :
Marie : Nina, le client de la table 5 veut te parler.
Nina : Me parler, mais pourquoi ? Une réclamation ?
Marie : Il ne m’a pas dit.
Nina regarde son tablier27 blanc qui n’est plus très blanc.
Elle doit le porter devant un client ? Oui ? Non ? Oui ! Ça fait professionnel !
Nina arrive dans la salle. Le client, un monsieur en costume-cravate28 , lui demande : « C’est vous, le chef ? »
Nina : Euh… oui.
Le monsieur : J’ai mangé une entrecôte délicieuse.
Ouf, un compliment ! Ça fait plaisir ! Les clients aussi motivent avec leurs compliments.
Nina : Vous buvez un digestif * ? Cadeau de la maison !
Le monsieur : Bonne idée ! Je voudrais aussi vous demander… Je prends ma retraite dans un mois et je veux organiser un grand repas avec mes collègues dans votre restaurant. C’est possible ?
Nina : Mais bien sûr !
La directrice à la réception a écouté la discussion, elle est contente, on le remarque.
Nina retourne dans les cuisines. Les deux apprentis et les deux serveurs la regardent.
Nina : Mission accomplie ! Merci à vous tous. Pause pour tout le monde. Et rendez-vous dans quatre heures pour un autre service… Quel métier29 !
6. Tête en l’air
Nina lui dit souvent :
« Alex, tu es un amour, mais tu es tête en l’air1 ! »
Quand sa voiture commence à ralentir2 , Alex ne pense pas à la panne, non, il pense à sa petite amie*, Nina. Pas seulement parce qu’il va la voir ce week-end dans le nouveau restaurant à Dax* où elle travaille, mais aussi parce qu’elle a RAISON3 ! Quelle tête en l’air ! C’est pas vrai ! Est-ce qu’on est tête en l’air quand on ne pense pas à faire le plein de sa voiture ? Oui, oui, c’est ça être tête en l’air ! Et Alex en a marre* d’être comme ça !
Il faut dire, il n’a pas de chance. Il a acheté sa 106* depuis un mois et seulement maintenant il comprend quelque chose : le voyant4 rouge de l’essence5 ne marche pas ! Alex regarde devant lui, à droite, puis à

* Petite amie : amie avec qui il a une relation amoureuse.
* Dax : ville d’Aquitaine, célèbre pour ses thermes, son rugby et la tauromachie.
* En avoir marre : en avoir assez de quelque chose ou de quelqu’un.
* La Peugeot 106 a été un modèle de voiture très populaire chez les jeunes Français dans les années 90.
Diaporama d’histoires gauche. Il ne voit pas de station-service. La dernière qu’il a vue est à 20 minutes et quand il a vu le prix de l’essence, il a pensé, oh là là, c’est cher ici, il a regardé l’aiguille6 sur le tableau de bord7 et il a encore pensé, je vais continuer, il y a des prix intéressants ailleurs, c’est sûr, et puis, la voiture va bien rouler encore un peu et de toute façon, le voyant rouge n’est pas allumé…
Alex gare la voiture à côté d’un champ8 , il descend. Il fait le tour et regarde dans le coffre. Il lui faut une bouteille ou quelque chose dans le genre pour transporter l’essence. Il voit sa guitare et son sac à dos. Mais pas de bouteille. Il ferme9 les portes et commence à marcher, marcher, marcher. Il a bien choisi10 son jour pour avoir une panne ! Marcher sous le soleil, ce n’est jamais facile. Mais marcher quand il fait 40° C, c’est terrible !

Il y a des champs partout, pas d’arbres11 pour faire une pause. Une voiture passe, très vite. C’est dangereux. Enfant, on lui a dit de marcher dans le sens inverse12 des voitures pour les voir arriver. Il traverse donc. Il marche, il marche où il peut. Il transpire et bien sûr il n’a pas d’eau. Encore un exemple de tête en l’air ! Il ne peut pas faire des kilomètres et des kilomètres sous ce soleil. Il décide de faire du stop* . Mais il n’y a pas beaucoup de voitures qui passent. Il n’a pas pris l’autoroute13 parce que payer les péages14 , non merci, trop cher, il a préféré prendre les départementales*. Et sur les départementales, il n’y a pas beaucoup de voitures cet après-midi !
Tout à coup, il voit de grands arbres là-bas. Ouf, c’est déjà ça, il va pouvoir faire une pause. Un peu à gauche, Alex voit aussi une grande maison blanche aux volets15 bleus.
* Faire du stop : mode de déplacement qui consiste à faire arrêter une voiture pour voyager gratuitement.
* En France, il y a des routes nationales (RN) et des routes départementales (RD).

Encore une fois, il pense : Quelqu’un va bien m’aider, m’accompagner à une station-service, me donner un verre d’eau…
Alex entre dans la cour de la maison. Un grand chien noir et blanc arrive. Il a l’air vieux et sans énergie (avec ce soleil, on comprend pourquoi…), mais pour la forme, le chien fait deux ou trois waouf, waouf.

« Qu’est-ce que c’est ? Figaro, chut ! Je peux vous aider, monsieur ? »
C’est une vieille dame qui habite ici.
« Ma voiture est en panne. Vous avez peut-être de l’essence ? » demande Alex.
« Mon arrière-petit-fils16 revient dans cinq minutes, il va vous aider. Entrez, vous devez avoir envie de boire une orangeade… »
Alex transpire beaucoup. Il ne peut pas dire non. Il entre dans la cuisine. Le mobilier17 est simple, mais on est bien ici et surtout, il fait frais ! Alex boit son orangeade faite maison et commence à raconter sa nouvelle voiture, son permis de conduire, l’aiguille sur le tableau de bord, la panne, son côté tête en l’air…
La vieille dame dit : « Figaro et moi, on est aussi tête en l’air, mais pour une autre raison, pas vrai, Figaro ? … L’âge… »
Le chien la regarde, il a l’air de comprendre. Tout à coup, un géant18 entre.
« Hugo, il faut de l’essence pour le monsieur. Sa voiture est en panne… »
Hugo regarde Alex et rigole.
« Alex ? Mais qu’est-ce que tu fais là ? Dans la cuisine de mon arrière-grand-mère19 ? »

« Hugo ? ! Le Hugo du festival de DJ à Lyon ?
« Oui, oui, c’est bien moi ! »
« Ça alors ! Et toi ? Tu n’habites plus à Marseille ? »

« Mais si, mais pendant les vacances, je viens voir ma famille. Allez, viens, on prend ma voiture et tu vas tout me raconter. »

La vieille dame les regarde et dit à son chien.
« Tu vois, mon vieux Figaro, ça peut aussi avoir du bon d’être tête en l’air, hein ? »
7. Les voix1 du Maroc
5 septembre
Voilà, elle est prête ! Là dans la rue, devant la maison. Enfin prête pour le grand voyage ! Elle est belle, avec tout le confort, un grand lit et une mini-cuisine (avec même un petit frigo). C’est le travail de deux années et de deux copains, Alexis et moi, Léo. Vingt-trois ans tous les deux, la camionnette2 , une Peugeot rouge, seize ans. Juin, on a eu nos examens et la camionnette aussi (je veux parler du contrôle technique !). Juillet et août, on a travaillé comme des oufs* pour gagner du fric*. Et voilà septembre ! Prêts

* Ouf (fam.) : fou en verlan (procédé linguistique qui consiste à inverser les syllabes d’un mot).
* Fric (fam.) : argent.
Diaporama d’histoires pour le grand voyage ! Demain, c’est décidé, on s’en va. Adieu Lyon ! Direction le Maroc ! Vous nous accompagnez sur mon blog (y a bien des cybercafés sur le chemin) ?
6 Septembre
Ca-ssés ! Nous surtout, la camionnette, elle, elle est en excellente forme ;-) On a roulé pendant cinq heures, deux heures et demie moi, deux heures et demie Alexis. Dans une voiture normale, cinq heures de route, c’est pas beaucoup, mais dans notre camionnette… dur dur ! Alors quand on est arrivés à Saintes-Maries-de-la-Mer, on n’a pas résisté3 , on est allés se baigner. Ce soir, on passe la nuit ici en Camargue. Mais pas dans notre camionnette quatre étoiles. Non, à la belle étoile4 ! Mais d’abord, des jeunes qu’on a rencontrés au café nous ont proposé de boire une bière ensemble. Ils sont musiciens. Ce soir, concert gratuit5 sur la plage ! Le bon plan ! Allez, on y va. À +.

7 Septembre
La nuit a été courte, mais on s’est quand même levés ce matin, on a décidé de continuer notre chemin. Direction l’Espagne. Avec nous, dans la camionnette, Hugo, Ahmed et Ombline qu’on a rencontrés la nuit dernière. Il y a aussi leurs sacs à dos, leurs guitares et même leur gros chien
Pluche. Avec eux, on n’a pas eu besoin de mettre la radio, ils ont chanté pendant tout le voyage, même le chien !
10 Septembre
Barcelone. Le soleil, la mer, les bars à tapas*, le parc Guell, la Sagrada Familia… Quelle ville ! Et quelle ambiance ! Hugo, Ahmed, Ombline et Pluche ont décidé de rester ici. Pour nous, c’est direction Gibraltar.

25 Septembre
Ouf ! On revient du hammam*. On ne pue plus ! ! !* On n’a pas encore installé la douche6 dans notre super camionnette… Je n’ai pas écrit dans mon blog depuis deux semaines. Trop occupé7 ! Et puis pendant le voyage, on a eu des problèmes avec le moteur et les freins de la camionnette. La galère* ! Les Marocains nous ont beaucoup aidés. Ah oui, j’ai oublié de le dire, mais vous l’avez compris, on est enfin arrivés au Maroc. On a déjà visité Tanger, Rabat, Casablanca et maintenant Essaouira (au fait, on dit « Swira »). Les Marocains sont des gens très sympas, comme Jamel qu’on a rencontré au hammam. Cet après-midi, on va aller faire du quad* avec lui sur la plage, son frère en loue8 , il va nous faire un prix. C’est beau ici, même très beau. Surtout la médina* et le marché aux poissons. Hier, on a mangé des poissons bizarres (mais très bons) qu’on ne voit pas en France.
* Hammam : bains arabes.
* La galère : expression pour dire qu’une situation est longue et difficile à surmonter.
* Puer (fam.) : sentir mauvais.

28 Septembre
Nous voilà à Marrakech ! Jamel qui a de la famille ici nous a accompagnés. Marrakech, c’est la grande ville. Ça change d’Essaouira. Jamel est allé voir des copains, nous, on a préféré visiter les souks9 de la place Jemaa-el-Fna.
Cette place est la principale attraction touristique de Marrakech. À la nuit tombée, cette place se transforme en un vrai restaurant en plein air.

Alexis a voulu acheter une gandoura10, il l’a essayée, puis on a discuté le prix avec Saïd, le vendeur. On commence à avoir un peu d’expérience maintenant, discuter le prix, c’est le folklore local ici. On a sympathisé avec Saïd autour d’un thé à la menthe11. Il nous a demandé : « Je vous raconte comment Marrakech est née ? Il y a longtemps un homme bleu*, c’est comme ça qu’on appelle les hommes12 qui se déplacent et habitent dans le désert13 , un homme bleu donc est venu ici, pour seulement deux ou trois jours, il a mangé beaucoup, beaucoup de dattes14 et une palmeraie15 en est née. Si vous avez envie, je vous en montre une… »
Saïd a confié sa boutique à un cousin et on est allés dans une grande et belle palmeraie. J’ai pensé encore une fois à la jolie légende de l’homme bleu. Puis Saïd nous a proposé : « Venez donc manger un couscous dans ma famille. » On est montés à trois (!) sur sa vieille moto16 et on a traversé la ville. On est entrés dans une petite maison blanche. Saïd nous a présentés à ses parents et ses frères et sœurs. Puis on a mangé un délicieux couscous tous ensemble sur de grands canapés. Et tout à coup, surprise ! Qui est arrivé ? Notre copain Jamel. Incroyable, mais vrai ! C’est un cousin de Saïd ! Ici, les familles sont grandes… Après le repas, père et mère, frères et sœurs, cousins et cousines se sont couchés sur les canapés pour passer la nuit. Ils nous ont fait une petite place.

3 octobre
Au revoir, Marrakech ! Au revoir Jamel, Saïd et leur famille ! Merci pour tout. On a continué notre chemin, on a eu envie d’aller voir le désert, on s’est dirigés vers Ouarzazate. Là, on a dû laisser la camionnette. Le sable, ce n’est pas pour elle, on doit déjà contrôler le filtre tous les jours et elle commence à être vieille…
À Ouarzazate, on s’est renseignés dans une agence de voyages qui organise des excursions dans le désert. On en a réservé une de deux jours. Quand on est arrivés à l’entrée du désert, des hommes bleus se sont dirigés vers nous avec leurs dromadaires, ils se sont occupés de nous, ils nous ont aidés à nous préparer parce qu’on n’improvise pas une excursion dans le désert. Si le dromadaire peut rester trois jours sans boire, pas nous ! Cinq litres d’eau par personne, obligatoire, des pulls pour la nuit et une chèche (c’est ce turban très sexy !) contre17 le soleil, le vent18 et le sable.

Prêts pour la grande aventure du désert. Quel silence !
Quel repos ! Quelle expérience ! Après quatre heures