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UNE AUTRE ANNÉE QUI FRACASSE DES RECORDS

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L’année 2021 avait été celle de tous les records, la lancée s’est poursuivie en 2022. On a vu des records du nombre de salariés, du nombre de femmes dans l’industrie, du nombre d’employeurs, de la masse salariale, du salaire annuel moyen, de la moyenne des heures travaillées ainsi que des investissements en construction. L’ensemble des secteurs a été en croissance dans toutes les régions, sauf celle de la Côte-Nord.

Olivier Aubry, économiste, Direction – Analyses des données stratégiques et diversité, Commission de la construction du Québec (CCQ), explique ces chiffres qui atteignent et dépassent les sommets.

Un record de records

Qu’est­ce qui a marqué l’année 2022 ? Pour la première fois, le nombre d’heures travaillées a dépassé la barre des 200 millions pour atteindre 210,2, une hausse de 7 % ou 13,6 millions d’heures de plus que l’année précédente qui représentait déjà un record. « Il faut toutefois savoir, explique l’économiste, que le calendrier de la construction de l’année 2022 a compté cinq jours ouvrables de plus que celui de 2021. Ce qui n’empêche pas que la croissance, même en soustrayant ces cinq journées supplémentaires, demeure forte, de l’ordre de 4,7 %. »

« Je vais utiliser le mot "record" très souvent », prévient Olivier Aubry, consultant ses documents pour commenter l’analyse de l’année 2022 qui a connu, en effet, des records dans le secteur du génie civil et de la voirie avec 39 millions d’heures, en hausse de 3 % par rapport à l’année précédente ; dans le secteur institutionnel et commercial avec 117,5 millions d’heures, en progression de 12 % ; dans le nombre de salariés actifs avec 197 925 travailleurs, un bond de 6 858 personnes ou de 4 % qui se décline en chiffres jamais vus également chez les apprentis, en augmentation de 5 %, et chez les compagnons, en hausse de 3 %, catégorie qui dépasse pour la première fois la barre des 100 000, ainsi que chez les travailleurs, dont le nombre s’élève à 32 189, une montée de 3 % . Record également d’employeurs actifs avec 27 219 entreprises, en hausse de 2 %, et une moyenne de 7 724 heures par employeur, un niveau jamais atteint par le passé. Quelque 73 milliards de dollars ont été investis dans des projets de construction, une augmentation de 10 %, et un autre record !

Comment expliquer tous ces records fracassés depuis deux ans ?

« La quantité de projets de construction, répond Olivier Aubry, notamment dans le secteur institutionnel, alors que plusieurs projets du Plan québécois des infrastructures sont en cours. La pandémie, qui avait mis un frein aux activités pendant plusieurs mois, a fait en sorte que plusieurs projets en attente ont redémarré. Le secteur résidentiel a aussi connu deux bonnes années, en partie à cause de la pénurie de logements. »

La part des femmes

Depuis quelques années, les femmes intègrent davantage l’industrie de la construction : 7 218 ont été actives sur les chantiers en 2022, une hausse de 15 %. Elles représentent maintenant 3,65 % de la main ­ d’œuvre totale. Plus de 4 300 entreprises ont embauché au moins une femme, soit 16 % des employeurs de l’industrie. En 2022, 1 900 femmes ont grossi les rangs des travailleurs de la construction.

La place des femmes dans le domaine de la construction demeure un défi important, souligne Olivier Aubry, car leur taux d’abandon est plus élevé que celui des hommes. Après un an, en effet, 21 % des femmes quittent les chantiers contre 13 % pour les hommes ; les chiffres grimpent respectivement à 52 et à 32 % après 5 ans. « La situation demeure toutefois encourageante, car les femmes sont plus nombreuses qu’auparavant à intégrer l’industrie et cette hausse se reflète quand même dans la part du total des travailleurs qu’elles représentent », ajoute­t­il.

De gros employeurs et de grands chantiers

Les trois plus gros employeurs de l’année 2022 demeurent les mêmes que l’année précédente et leurs nombres d’heures déclarées sont en croissance. En première position vient NouvLR avec

2,2 millions d’heures travaillées, entièrement dans le secteur du génie civil et de la voirie ; en deuxième place, Coffrages Synergy avec 1,3 million d’heures, dont 96 % dans le secteur institutionnel et commercial ; et en troisième position, Pomerleau avec 1,2 million d’heures réparties entre l’institutionnel et le commercial pour 53 % et le génie civil et la voirie pour 43 %.

Les plus gros chantiers au chapitre des investissements ont été La Romaine, de la division des équipements d’Hydro­Québec sur la Côte ­ Nord (7,2 G$), le développement commer cial Royalmount dans le Grand Montréal (7 G$), le Réseau express métropolitain (REM) aussi dans le grand Montréal (6,9 G$).

D’autres grands chantiers ont également démarré en 2022, soit le prolongement de la ligne bleue de la Société de transport de Montréal (STM), un investissement de 6,4 G$ ; la phase 1 du Centre énergétique de Gatineau (1,5 G$) ; l’unité de désinfection à l’ozone des eaux usées de la station d’épuration Jean­R ­Marcotte à Montréal (717 M$) ; ainsi que l’agrandissement de l’Hôpital Pierre­Le Gardeur à Terrebonne (550 M$).

Du côté des salariés

Dans l’ensemble du Québec, 20 378 nouveaux salariés ont intégré l’industrie, ce qui représente une baisse par rapport à l’année 2021, mais cette donnée demeure à des niveaux historiquement élevés. « C’est la deuxième année d’affilée que nous avons un apport de plus de 20 000 travailleurs », ajoute l’économiste.

En moyenne, les salariés ont travaillé 1 062 heures, une hausse de 3 %, soit 33 heures de plus que l’année précédente. « Il faut par contre savoir, lorsqu’on parle de moyenne, que les travailleurs qui entrent dans l’industrie ou qui la quittent au cours de l’année font baisser la moyenne des heures étant donné qu’ils ne travaillent pas durant l’année complète », explique Olivier Aubry

Presque tous les métiers ont connu une hausse des heures travaillées, à l’exception des chaudronniers (­12 %), des ferrailleurs (­3 %), des opérateurs d’équipement lourd (­2 %) et des briqueteurs maçons. Parmi ceux qui ont vu leurs rangs augmenter viennent, par ordre de croissance, les mécaniciens de machinerie lourde (+12 %), les plâtriers (+10 %), les mécaniciens d’ascenseur (+10 %) ainsi que les poseurs de revêtements souples (+9 %).