Gontran, l’ ecuyer endormi

Il y a bien longtemps de cela, vivait à la cour du seigneur Guillaume de Hautmur un bel écuyer au cœur vaillant. Il rêvait d’être fait chevalier et avait tout pour le devenir : il était fier, courageux et savait se battre comme personne.

Mais Gontran, car c’était son nom, souffrait d’un mal curieux…

Il tombait dans un profond sommeil chaque fois qu’il aurait pu prouver son courage au seigneur et être ainsi fait chevalier.

Un jour, en plein tournoi, alors qu’il ne lui restait plus qu’un adversaire à battre, il s’était endormi profondément.

Au beau milieu d’une bataille, alors qu’il venait d’affronter vingt guerriers d’un château ennemi, il s’était assoupi tout d’un coup ! Son camp l’avait emporté grâce à lui, mais c’est Paulus, qu’il détestait, qui avait été fait chevalier.

La récompense lui échappait toujours au dernier moment et Gontran se désespérait :

« Resterai-je toujours écuyer à cause de cette malédiction ? » se lamentait-il.

Il avait consulté des médecins, des pharmaciens et même des sorcières ! En vain ! Gontran décida un jour d’aller rencontrer la fée Réjane qui habitait dans la forêt d’émeraudes.

« C’est curieux, lui dit la fée après avoir écouté son histoire, je n’avais pas entendu parler de ce mal depuis cinq cents ans. Tu dois ton malheur à une mouche. Une petite mouche qui pique et donne aux hommes la maladie du sommeil. On l’appelle la mouche tsé-tsé.

− Une mouche ? avait hurlé Gontran.

J’ai affronté des chevaliers, fait tomber des murailles, brisé des armures et je ne suis pas chevalier à cause d’une mouche ?

– Oui, une petite mouche ! Mais sa piqûre est très puissante et il ne faut pas sous-estimer ainsi les petits !

Ta volonté, seule, pourra lutter contre son venin.

En attendant, je te donne un cheval magique !

Il s’appelle Samson et tant que tu seras dessus, tu ne t’endormiras pas ! »

Gontran était reparti avec Samson vers son château.

« C’est vrai que tu es magique, lui disait-il. Il me semble que tu galopes à la vitesse du vent et je me sens encore plus fort avec toi ! »

À peine avait-il passé la colline qu’il vit, devant le château de son seigneur, un dragon terrifiant qui crachait du feu. Les murailles étaient en flammes et tous les habitants du château criaient, épouvantés.

«

Il ne faut pas que je m’endorme, il ne faut pas que je m’endorme… pensait Gontran. Mais maintenant, j’ai un cheval magique », se disait-il. Et il alla bravement affronter la bête. Samson, fidèle, ne recula pas devant le danger et l’écuyer s’approcha tout près du dragon pour aller lui planter son épée dans le cœur. La bête s’écroula.

« J’ai vaincu le dragon et j’ai vaincu la mouche tsé-tsé ! pensait Gontran en souriant. Merci, Samson ! »

Le seigneur Guillaume décida aussitôt de faire Gontran chevalier pour le remercier de son courage.

La fée Réjane, qui assistait à la cérémonie, s’approcha doucement de Gontran.

« Bravo, chevalier ! lui dit Réjane en souriant.

Tu as été très courageux et je dois t’avouer un secret maintenant… Samson est un bon cheval, mais il n’est pas magique ! Tu dois ta victoire uniquement à ta volonté. »