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Sorcières / Kimpa Vita
Sorcières / Kimpa Vita | DeLaVallet Bidiefono
MAR. 2 JUILLET - 21:00
MER. 3 JUILLET - 21:00
Théâtre Joliette
Danse, musique | Création
Brazzaville / Paris
Durée : 1 h

Figure iconique du continent africain, surnommée la Jeanne d’Arc congolaise, Kimpa Vita inspire à DeLaVallet Bidiefono un spectacle fort, rock, intense, porté par une danseuse, une chanteuse et un musicien. Une création qui fait fusionner les arts et les âmes en hommage au combat des femmes conquérantes d’hier et d’aujourd’hui…
Né à Pointe-Noire, une ville côtière ouverte sur le monde, le chorégraphe et danseur congolais a toujours eu le désir de partir à la rencontre de l’Autre. D’abord à Brazzaville, puis en Europe, pour parler de la différence, de la diversité et du vivre-ensemble. Une traversée personnelle qui a sous-tendu plusieurs de ses pièces collectives (Utopia, Monstres…). Aujourd’hui, il donne voix et corps à Kimpa Vita, prophétesse engagée en 1704 pour l’indépendance de son pays et pour la liberté et, au-delà, à toutes les femmes qui luttent contre l’oppression. La danseuse Florence Gnarigo incarne cette femme martyre, arrêtée, jugée pour hérésie, condamnée au bûcher et brûlée vive. Sur le texte de l’auteur, metteur en scène et comédien Dieudonné Niangouna, complice de toujours du chorégraphe, elle évolue sur un champ de bataille, ses pas se précisent peu à peu puis s’affirment sur un sol sablonneux bientôt jonché de braises incandescentes. L’armure du combat se tisse sous nos yeux. La musique de Benoît Lugué et la voix de la chanteuse malgache Dina Mialinelina l’accompagnent, l’enveloppent et la portent. Danse organique, précision des gestes et force des mots confèrent à la pièce une puissance d’évocation d’une remarquable intensité.
En coréalisation avec le Théâtre Joliette
Parcours
La recherche chorégraphique de DeLaVallet Bidiefono est aussi bien nourrie par les cultures traditionnelles que par des influences contemporaines. Aventurier du mouvement, il cultive aussi les métissages disciplinaires.
Né en 1980 à Pointe-Noire dans un quartier où le mot “art contemporain” n’existe pas, DeLaVallet commence sa carrière de danseur en 2001 lors des ateliers de recherche chorégraphique du centre culturel français de Brazzaville, où il fonde en 2005 la compagnie Baninga.
Sa carrière prend un tournant majeur lorsqu’il rencontre David Bobée, David Lescot et Dieudonné Niangouna, lui offrant ainsi l’opportunité de présenter sa pièce Au-delà au Festival d’Avignon en 2013. Le spectacle a été présenté près de 60 fois à travers l’Europe et l’Afrique et assiéra le chorégraphe parmi les plus reconnus sur le continent africain, mais aussi sur la scène contemporaine chorégraphique au sens large.
En 2017, DeLaVallet Bidiefono crée aux Francophonies en Limousin Monstres / On ne danse pas pour rien pour 8 danseur·ses, 1 performeuse et 3 musiciens sur scène qui tournera en France et en Europe.
Sa création Utopia / Les Sauvages voit le jour en 2022 au Trident – Scène nationale de Cherbourg.
Conception et chorégraphie : DeLaVallet Bidiefono
Danseuse : Florence Gnarigo
Chanteuse : Dina Mialinelina
Musicien : Benoit Lugué
Texte : Dieudonné Niangouna
Scénographie : Estelle Duriez
Création lumière : Stéphane ‘Babi’ Aubert
Création sonore : Marvin Jean
Direction technique : Martin Julhès
Régisseur plateau : Cléo Konongo
Production et diffusion : Emilia Petrakis, puis Philippe Naulot
Coproduction : Les Théâtres de la Ville de Luxembourg
Administration : Jérémie Damamme, puis Philippe Naulot
Photographie : © Alban Van Wassenhove
Remerciements à Nathalie Huerta et à toute l’équipe du Théâtre Joliette pour leur accueil

Prologue à Kimpa Vitae
Née en 1684 d’une famille de la noblesse Kongo, Kimpa Vitae est baptisée dans la religion catholique, sous le nom de Dona Beatriz Marguerite, par le père Luis de Mendonça, un métis d’Angola. À cette époque la grande partie de la population du royaume Kongo est catholique, l’évangélisation ayant commencé dès la fin du XV ème siècle avec le baptême du roi Kongo Zinga Nkuwu.
Kimpa Vitae grandit dans une période des conflits incessants entre le royaume Kongo et le Portugal et entre le royaume Kongo et certains royaumes voisins. Conflits ayant pour objet les richesses premières et la question de la traite négrière qui opposait différents points de vue entre les peuples. Parallèlement à sa croyance catholique Kimpa Vitae est initiée à la spiritualité Kongo dite Nsaku, par la grande prophétesse Mafuta Fumaria dite Appolonia. Elle intègre la société secrète dite Kimpasi qui avait pour mission de délivrer les gens des forces du mal à travers des cérémonies d’exorcisme. Ainsi dès sa jeunesse, Kimpa Vitae est reconnue comme une nganga marinda, une prêtresse considérée comme intermédiaire entre les hommes et le monde des esprits. Rapidement elle finit par être largement adulée comme prophétesse Kongo. Elle dit avoir reçu des révélations, et annonce que Dieu punira les habitants du royaume Kongo si ce dernier n’est pas réunifié suite à ses incessants conflits à propos de la traite négrière. Pedro IV, roi des Kongo, prend connaissance de l’ampleur du message de Kimpa Vita mais garde ses distances avec elle, du fait de la radicalité de ses propos jugés subversifs par l’église. Car Kimpa Vitae affirme dans toutes ses prophéties « Que Dieu, son fils Jésus, ses apôtres et grand nombre des personnages bibliques sont noirs et sont pour la plupart des Bisi Kongo, qu’ils appartiennent au royaume Kongo le véritable peuple élu. Que la Terre sainte est le royaume Kongo et que Sao Salvador, la capitale du royaume Kongo située dans l’actuel Angola, encore appelé Mbanza Kongo, est la véritable Jérusalem céleste. Que l’ancien roi Kongo, Mvita Nkanga dit Antoine 1e, décapité par les portugais lors de la bataille de Mbwila, doit être considéré comme le véritable « messie » et que son esprit s’est réincarné en elle, en Kimpa Vitae. Que le baptême religieux est une fumerie car Dieu ne s’occupe que de la foi. Que le mariage religieux est une aberration car Dieu ne regarde que la largesse du coeur. Que les missionnaires blancs ont dénaturé le message divin pour tromper la population noire, la dominer, afin de continuer à la piller, la spolier et surtout à la vendre comme esclave pour les Amériques. »
On raconte que Kimpa Vitae meurt chaque vendredi et ressuscite tous les dimanches, après avoir passé deux jours à s’entretenir avec Dieu. Ce qui l’emmène à être considérée comme étant la réplique parfaite du Christ. Kimpa Vitae nomme son mouvement antonien ou antonianiste, en référence à Saint Antoine de Padoue, qu’elle vénère comme saint patron. Elle adapte l’Ave Maria et le Salve Regina en Salve Antoniana. Les enseignements de Kimpa Vitae sont diffusés à travers tout le royaume Kongo, y compris par certains missionnaires et certainsnobles du royaume comme Hypolyta la femme du roi Kongo, et aussi par Pedro Constantinho da Silva, un des généraux de l’armée royale Kongo. La doctrine de Kimpa Vitae menace les conservateurs de l’église catholique autant que certains conservateurs Kongo du fait que cette doctrine est un syncrétisme entre catholicisme et religions traditionnelles Kongo. En revanche Kimpa Vitae reconnaît l’autorité du pape mais se montre hostile aux missionnaires européens principalement à ceux qui, actifs sur la côte atlantique de l’Afrique, au service de la couronne du Portugal, soutiennent la traite négrière et la division du royaume Kongo pour la soumettre sous la tutelle du Portugal.
Un jour Kimpa Vitae décide d’aller rendre visite à son roi, Pedro IV, destitué par la couronne du Portugal, exilé dans son propre royaume, au près du Mont Kimbangu et assigné à domicile en réside,ce surveillée, pour lui demander la permission de mener une campagne en vue de chasser les esclavagistes portugais qui se sont emparés de la capitale du royaume Kongo. Mais n’ayant pas obtenu l’autorisation de son roi, Kimpa Vitae s’autorise de mener la guerre par les moyens de son mouvement antonianiste et avec l’aide de quelques généraux du royaume. Elle réussit à reprendre la capitale, ravir le royaume Kongo des mains du Portugal, instaurer la paix et de façon pratique à réinstaller le roi Pedro IV sur son trône. Mais ce dernier inquiet du succès rencontré par Kimpa Vitae et son mouvement antonianiste finit par la faire arrêter en prime comme sorcière, ensuite pour avoir eu un enfant sans mariage avec son compagnon et garde du corps, et la livra aux autorités de la couronne du Portugal.
Kimpa Vitae subit un procès en hérésie devant un tribunal civil dirigé par les missionnaires capucins Bernardo da Gallo et Lorenzo da Lucca. À l’issue de ce procès, Kimpa Vitae, son compagnon et ange-gardien, Joào Barro, et leur fils nouveau-né sont condamnés à être brûlés vifs sur le bûcher. Le 02 juillet 1706, dans la ville d’Evolulu, actuel Angola, près de Mbanza Kongo, la capitale du royaume Kongo, la sentence fut exécutée. Kimpa Vitae et son compagnon subissent la sentence, ils sont brûlés vifs sur le bûcher. Leur fils est sauvé grâce à l’intercession auprès du roi de leur dernier confesseur, le père Lorenzo da Lucca. Il est baptisé par ce dernier et porte le nom de Jeronimo, contrairement au souhait de sa mère qui voulait le nommer Antonio. À l’heure de sa mort Kimpa Vitae dira ces derniers mots : « Kongo Tadi Kaba swé ba singa », ce qui se traduit par « Kongo est une pierre qu’on ne brisera jamais ! »
On raconte que quand le bûcher fut éteint une lumière s’éleva de la cendre pour monter au ciel en une étoile rayonnante. Jusqu’à ce jour Kimpa Vitae demeure l’initiatrice des religions messianiques du Congo-Brazzaville, de la RDC et de l’Angola comme les Matsouanistes, les Kimbanguistes, les Zéphirins, les Bula Manangna, les Croix Koma, les Bundu dia Kongo, les Ngunza qui la reconnaissent comme Mama Wa Ndombi : la grande dame noire. On retrouve également certains de ses préceptes dans d’autres spiritualités afro-américaines et afrocaribéennes, du fait du commerce transatlantique des noirs venus du royaume Kongo, comme dans le Candomblé au Brésil. Plusieurs historiens l’ont surnommée La Jeanne d’Arc Africaine. Le combat de Kimpa Vitae reste et restera d’actualité sur tous les fronts où il est et sera toujours question de liberté, d’indépendance, de souveraineté, de lutte contre l’esclavage et de liberté de croyance.
Vata misiélo mia mazulu !
Mia ntoto !
Mia langu !
Na mia mbawu !
Kuzulu mbangui !
Va ntoto mbangui !
Nkagui-Kanga !
Ah ! Mama wa ndombi !
Traduction du spectacle Kimpa Vita / Sorcières
La marche vers Mbanza Kongo
Je marche vers Mbanza Kongo, la ville à douze clochers ; l’hymne de St Antoine à ma bouche, le corps vivifié et l'esprit éveillé, l’âme en transe. Je sais que je vaincrai. Cela ne vient pas de moi mais du tout puissant perché au plus haut des cieux. Le chant de la résurrection des corps et des esprits a sonné. A chaque temps son prophète. Seule, la lutte libère. Nous sommes un théâtre de guerre. Nos paroles sortent de notre feu intérieur pour libérer. Il n’y a pas de place, pour aucun autre mouvement. Dans ma vie, mes arts sont des luttes acharnées ; ils se doivent de vaincre le mal ou de mourir ! Ma voix, poème de guerre. Kimpa Vita, dites mon nom !
J’ai vu Dieu ! La perception est à notre regard, à notre propre entendement. Il n’y a de vérité qu’en soi. Dieu est apparu à tous les peuples de la terre et il leur ressemble. Tous les peuples de l’univers sont faits à l’image de Dieu et ils lui ressemblent. Les blancs l’ont vu et il est blanc. Les arabes l’ont vu et il est arabe. Les juifs l’ont vu et il est juif. Dieu est culturel, le diable aussi. Il ne peut se trouver de démon dans une autre culture que la sienne, tout comme il n’y a pas de Dieu en dehors de chez soi. Nous ne sommes pas vos démons, n’ayez pas peur.
J’ai vu Dieu, et c’est une femme !
Kimpa Vita et les trois piliers
Makuku mâ tatou ma simba Kongo.
Trois piliers tiennent le royaume Kongo selon nos ancêtres : Nsaku, Mpanzu et Nzinga. Nsaku représente la spiritualité, Npanzu la science et Nzinga la politique. Tout le royaume se reconnaît en ces trois piliers, c’est la structure organique de la pensée Kongo : la gravitation, l’élévation, l’attraction.
Kimpa Mvitae a été élevée dans le culte de Nsaku depuis son enfance. Elle a le grade de prêtresse Nganga Marinda par moi, Mafuta Furia dit Appolonia. Il est de notre devoir de protéger les trois piliers.
Par ailleurs, elle a été baptisée à l’église catholique par le père Luis de Mendoça et vit avec les deux croyances comme nombreux d’entre nous. Ces croyances régissent notre feu intérieur nous permettant de jouir d’une rationalité sans bornes. C’est ainsi que St Antoine est apparu délivrant le message de la rédemption : le Mlolo.
Nous avons ordre de reconquérir le royaume, le libérer de la gangrène de l’esclavage et de travailler à la réunification de l’empire ! Ingeta.
Depuis, nous prêchons le Mlolo par monts et par vents. Nous avons conquis des villages entiers à la cause. Aujourd’hui, nous sommes à la tête de trente mille anges de la délivrance, femmes et hommes engagés dans le combat spirituel. Le roi Pedro IV considère la popularité de Kimpa Mvitae comme une menace pour sa diplomatie. Mais cette puissance n’est pas une arme tournée contre vous, ni contre tous ceux qui veulent voir disparaître l’esclavage.
Je ne suis pas une Nzinga, mais une Nsaku : mon autorité n’est donc pas politique mais spécifiquement spirituelle.
La bataille
Brouillard opaque au-dessus de la mêlée ! Douleurs d’enfantement sur le champ de bataille ! Visages défaits, nerfs tirés, muscles tendus, cheveux dressés, bouches écarquillées ! Mes oreilles n’entendent plus la chamaille, encerclée par ces vents qui épouvantent les masques !
Le ciel vrille, l'atmosphère se casse, le ciel se déchire, un cauchemar en lambeaux !
Les canons pleuvent sur la terre qui danse sa plus folle ritournelle de la mort ! Mais ici, la mort n’achève pas la mort. On l’emprunte à la vie pour appeler la lutte !
Nous sommes un théâtre de guerre ! Seule, la lutte libère !
Le procès hérétique
Vous n’êtes pas le saint esprit, jeune femme. Vu l’état dans lequel vous vous présentez à ce tribunal pour répondre de vos crimes, j’aurais parié qu’une gouine babylonienne a chapardé un ange a marché pour nous tirer les larmes. Vous suez par tous les orifices de votre corps impur, je vois ça ! Cela ne fait aucun doute, vous êtes souillée par des pensées hérétiques.Sauf votre respect, tous les Kongos ne sont pas d’accord avec votre hérésie, voyez-vous ? Visiblement, ils vous ont fait le coup de Jeanne d’Arc. Vos autorités vous ont livré au Portugal après votre prétendue victoire sur Mbanza Kongo. Votre roi a été le premier à affirmer qu’il viendra lui-même cracher sur vos cendres. Pourquoi les autres vous ont abandonné, d’après vous ? Et maintenant, je sonde votre esprit. A cet effet vous me semblez parfaite pour une charlatane du dimanche. Vous reflétez le charme païen d’une fétichiste féticheuse. Votre regard a l’âpre acuité d’une rebouteuse de bas étage. Vos yeux lubriques parlent comme une Sibylle à la carte. Mais qui êtes-vous réellement sinon une Cassandre sans cervelle avec la violence d’une Gorgone alligator pétée de philistine attardée ! Dans la cambrousse d'où je viens, on vous aurait tout simplement appelée une bouillasse de truie.
Allumez le bûcher !
Vous êtes accusée de crime contre le Portugal. Quelle est votre défense ?
Dernières paroles de Kimpa Mvitae
Pourquoi ? Pourquoi dois-je vous répondre ? Parce que vous n’êtes pas Dieu. A Dieu seul je rends des comptes. Une Nganga Marinda comme moi ne peut pas aller au-delà de son destin. Mama Mafuta Furia m’avait prédit tout ce qui devait arriver. En vertu de quoi, je ne suis coupable de rien. J’ai reconsidéré ce qui était à moi. Mes désirs vaincus se sont transformés en salve chant d’honneur. Des passions qui abondent comme une victoire tissée par plusieurs mains, cousue de bras multiples aux couleurs indicibles : comme une marée de vengeresse qui déferle sur la canopée du ciel pour lui ôter son chapeau et laisser planer l'immensité de l’univers gaillard entre mes reins, mes jambes, mes bras, volant à travers mon corps pour finir par déclarer l’infinité de l’univers en moi.
Ils reviennent ces filles et fils de mâma. Non comme de spectres, mais habillés en manteau de vie, visage de soie distillant le bonheur comme une utopie prophétique.
Sorcières et témoignages
Je suis Joséphine. Ma famille m’a promise en mariage à un homme lorsque j’avais 8 ans. Enfant et innocente, je n’en comprenais pas les conséquences. Cet homme écrit une lettre à ma famille quelques années plus tard pour se plaindre : je ne veux pas d’une danseuse à la maison. Je souhaite une femme qui s’occupe de mon repas, de mes enfants, de ma maison, de mes chaussures ! Vous comprendrez que cela ne me convient pas. Cela ne convient à aucune autre femme d’ailleurs. Alors je danse car pour moi la danse est un bouclier, une protection qui me permet de me sentir libre.
Je suis Lamia. Une étrangère. Je vis dans un modeste appartement avec ma fille de 3 ans. Je voulais retourner dans mon pays depuis que son père nous a quittés. Mais la guerre a éclaté, et je me retrouve coincée. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour protéger ma vie et celle mon enfant.
Je m’appelle Abigail. Il y a quelques jours, j’ai fait “coming out” en disant à mes parents que la personne que j’aime est une femme. Ils m’ont dit que je souillais le nom de la famille et que je leur faisais honte. Ils m’ont posé un ultimatum : soit je redeviens “normale”, soit je ne suis plus jamais leur fille. J’ai déjà fait mes bagages.
Je suis Fatou. Je m’en souviens, j’avais à peine 7 ans. “C’est le grand jour pour toi” disait ma famille. Ils m’ont emmenée voir le sage du village. Tu verras, tu seras une femme “complète” ! Ils m’ont tenu fort par les bras pour que je ne puisse pas fuir. Malgré mes cris et mes pleurs, les miens ont détourné leur regard. Alors “celui qui sait” s’est approché, a écarté mes jambes et a coupé ma fleur. Je veux que ça s’arrête !
Moi aussi ! Je suis Martine, je suis Sarah, je suis Jeanne, Béatriz, Fatima, Lisa, Nina, Agnès, Rosa, Mami Wata, Malala, Mirana, Frida, je suis Julie, Lucie…
Regarde comme je suis fière ! Tu vois mes cheveux ? C’est une menace, boucles sauvages devenues flammes. Regarde comme je suis droite entre les lignes de l’histoire ! Je suis la déesse en armure que tu crois muette, alors que je suis ton maître !
Je suis Marie, je suis Joséphine, Abigail, Marcelle, Malou, Louise, Estelle, Tsanta, Lalao, Dina, Florence… Je suis Kimpa Vita !

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