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À FOND LA FORME

Le Monde en réseaux

Au Monde, un service est dédié à la production de contenus pour les réseaux sociaux. Un pari réussi qui se ressent dans ses abonnements numériques.

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Les journalistes du Monde préparent la vidéo Snapchat du jour.

L’avenue Pierre-Mendès-France est paisible. Il est 15 heures, le mercredi 2 mars 2022. Seules les rumeurs de la gare d’Austerlitz viennent troubler la quiétude de ce coin du 13e arrondissement de Paris, à deux pas de la Seine. Sous la voûte du bâtiment flambant neuf du groupe Le Monde, quelques journalistes discutent, cigarette à la bouche. Au quatrième étage, réservé à la rédaction du Monde numérique, tout est calme. L’édition papier est bouclée depuis 10h30. Mais, au bout de l’open space aux murs blancs, au service Réseaux sociaux, une équipe s’active. Au milieu des ordinateurs et des plantes artificielles, Olivier Laffargue, chef du service Snapchat-TikTok, et son équipe d’une dizaine de personnes s’occupent des contenus du jour. Alors que certains sont chargés du montage, Benoît Le Corre, téléphone à la main, filme Pierre Lecornu, à la lumière de l’immense baie vitrée, pour la vidéo Snapchat quotidienne. «Mais imaginons que l’Ukraine intègre l’UE », répète-t-il pour la dixième fois alors qu’il termine les scènes du sujet principal. Ce dernier est choisi en conférence de rédaction à 9 heures. Ensuite, les journalistes en charge de la production rédigent le script. Avant la pause déjeuner, la vidéo est entièrement écrite. Le tournage a lieu en début d’après-midi. Une fois la vidéo prête et validée, elle est publiée aux alentours de 18 heures.

«Le nombre d’abonnés expLose » Sur TikTok, pas d’émission quotidienne, mais «trois à quatre vidéos par semaine», indique Marion Huysman, journaliste en charge de ce réseau. Le Monde y est présent depuis juin 2020. Après cinq ans passés sur Snapchat, le journal comptabilise 1,5 million d’abonnés. « L’impact des réseaux sur l’audience n’est pas quantifiable mais cela fait deux ou trois ans que le nombre d’abonnés explose», explique Olivier Laffargue. En effet, en 2021, le titre a dépassé pour la première fois les 500000 abonnés, dont 414000 sur le numérique. «L’influence est évidente, la moitié des nouveaux abonnés de l’année passée ont moins de 24 ans, soit la cible préférentielle de Snapchat et Tiktok», précise-t-il. «Le directeur de la publication est venu nous féliciter, c’est très flatteur», se souvient Marion Huysman. Le succès est là car «on a réussi à aller chercher les jeunes sur leur terrain, avec leurs codes, tout en gardant la ligne éditoriale du Monde et en fournissant de l’info sérieuse», explique Arthur EryehFort. Pourtant, ce n’était pas gagné, notamment sur TikTok. Les utilisateurs, souvent très jeunes, ont entendu parler du journal pour la première fois sur la plateforme. Des regards se tournent et des sourires s’esquissent lorsque Marion Huysman raconte l’anecdote de leur arrivée sur le réseau social : «Les premiers commentaires disaient : “T’es qui toi ?”, “Pourquoi t’es certifié alors que j’ai plus d’abonnés que toi ?”» Des questions qui n’ont plus lieu d’être au vu de la réussite rencontrée et près de 560000 abonnés sur la plateforme. Olivier Laffargue s’en félicite : «On veut rendre Le Monde accessible à tous et que ce soit nous, la rédaction, et même la direction, on en est tous fiers.»

Sélim OUMEDDOUR et Marie STOUVENOT

Podcast et politique, un mariage de saison

À l’approche de l’élection présidentielle, de nombreux podcasts voient le jour. Les journalistes proposent une autre manière d’aborder la campagne.

Comme toujours, quand une élection approche, les rédactions se lancent dans l’innovation. Cette année, certaines rédactions ont choisi d’investir le podcast pour raconter la campagne autrement. Franceinfo lance «Elysée, la bataille» en février 2021. Le média en ligne The Conversation propose sa version «Moi Président.e». Libération produit «Libélysée» depuis février. La liste n’est pas exhaustive mais elle montre qu’une réflexion sur la façon de raconter la politique s’est imposée chez les journalistes. Grâce à Internet, le contenu audio est de plus facile d’accès. De nombreuses émissions sont hébergées sur des plateformes comme Apple Podcast, Deezer ou Spotify. Ouest-France a fait le choix de dédier une partie de son site à la diffusion d’épisodes de « Moi Président.e ». La journaliste Clea Chakraverty anime ce podcast avec Fabrice Rousselot. Pour elle: «Le format est intéressant. Il libère la parole, notamment celle des chercheurs avec lesquels nous travaillons. Ce support leur offre la possibilité de s’exprimer sur le temps long. Notre émission met en retrait les journalistes, nous ne participons pas à une surenchère des opinions.» Les podcasts permettent d’allier journalisme et politique dans un format qui a l’avantage de raconter la présidentielle de manière plus ludique. «C’est l’occasion d’attirer des publics qui n’ont pas l’habitude de nous lire », affirme Clea Chakraverty. Ces contenus n’ont toutefois pas l’ambition de se substituer à la presse écrite traditionnelle: «C’est un outil complémentaire, il ne remplace pas les articles », poursuit l’animatrice. Le modèle économique des podcasts ne le permettrait de toute façon pas: ils sont le plus souvent disponibles gratuitement. Malgré tout, ce support est investi par une grande partie des groupes de presse qui ne souhaitent pas laisser le champ libre à leurs concurrents.

Les vieux médias rafraîchissent la page

Instagram, Snapchat et maintenant TikTok : depuis plusieurs années les médias traditionnels s’emparent des réseaux sociaux. Un développement réfléchi qui leur permet de toucher un nouveau public, plus jeune.

Infographie : Marie Stouvenot, Sélim Oumeddour et Célio Fioretti/EPJT Les différents réseaux sociaux utilisés par les médias et leur nombre d’abonnés.

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