7 minute read

POLITIQUE ÉCONOMIQUE

Next Article
CHE-MAIN DE VIE

CHE-MAIN DE VIE

SUISSE-UE L’ÉROSION DE LA VOIE BILATÉRALE SE POURSUIT, HÉLAS...

Septembre 2022. Seize mois se sont écoulés depuis que le Conseil fédéral a pris la décision de mettre fi n, de manière unilatérale, aux négociations sur un accord-cadre institutionnel avec l’Union européenne ; des négociations qui, rappelons-le, avaient formellement commencé en… 2013 ! Et où en sommes-nous aujourd’hui ? Diffi cile de ne pas reconnaître que nous sommes dans une impasse, malgré les nombreux appels des milieux académiques, scientifi ques, culturels et politiques. La Suisse et l’Union européenne se regardent en chiens de faïence.

Advertisement

Toutes les négociations destinées à mettre à jour les accords bilatéraux existants sont au point mort. L’érosion de la participation au marché intérieur européen est ainsi une réalité pour bon nombre d’entreprises suisses. Le désormais fameux accord sur la reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité (ARM) n’est plus applicable aux dispositifs médicaux in vitro depuis le 26 mai dernier ; un secteur qui compte 232 entreprises, emploie 14’300 personnes en Suisse et génère 2 milliards de francs suisses de valeur ajoutée. Les industries du textile et de la construction sont les prochaines victimes de cette érosion. Viendront ensuite les secteurs des machines, ses équipements électriques et des métaux, dont la nouvelle réglementation devrait entrer en vigueur encore cette année. Son application est prévue dans un délai de 36 mois. Si l’ARM n’est pas adapté entre-temps, les produits de l’industrie MEM subiront en 2025 le même sort que l’industrie des Medtechs aujourd’hui.

Et voulons-nous parler de la participation de la Suisse aux programmes de recherche européens (Horizon Europe) ? Plusieurs entreprises de Genève ou de Zurich, actives notamment dans le domaine quantique et des sciences de la vie, ont ainsi décidé de développer leurs nouvelles activités et leurs centres de compétences en dehors de notre pays, notamment en France, en Allemagne et en Autriche. Le délai de soumission pour l’ERC Starting Grant de 2023 (soit les fi nancements européens les plus prestigieux pour des chercheurs indépendants) expire... le 25 octobre 2022 !

Il faudrait un véritable miracle pour que n chercheurs puissent encore participer a programmes de recherche Hor on Europe.

Autant dire qu’il faudrait un véritable miracle pour que nos chercheurs puissent encore y participer. Le savoir et l’éducation font partie des principales ressources de la Suisse. Si les domaines de pointe et les hautes écoles sont affaiblis, la place économique suisse perd également de son attractivité. Nous sommes en septembre 2022 ; il ne manque qu’une « grosse » année avant les élections fédérales de 2023. Les spécialistes assidus du dossier européen chantaient en chœur que le gouvernement voulait attendre cette échéance. Force est de constater qu’ils avaient, hélas et au grand dam de plusieurs pans de notre société, raison.

Carmelo Laganà Suppléant romand d’economiesuisse geneve@economiesuisse.ch economiesuisse.ch

RÉFORME FISCALE OCDE DES PISTES POUR FRIBOURG

Les grandes manœuvres fiscales internationales n’iront pas sans conséquences sur la Suisse et le canton de Fribourg. Les pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du G20 se sont entendus sur un taux plancher de 15% pour l’imposition des bénéfices des grandes entreprises internationales. La Suisse n’y coupera pas: les Chambres fédérales vont adopter une loi qui devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2024 déjà. Pour Fribourg, comme pour la Confédération, ces changements entraîneront une hausse des recettes fiscales. La CCIF est d’avis que ces dernières doivent être utilisées en vue de renforcer la compétitivité de notre économie.

Dans une réponse à une question des députés Annick Remy-Ruffieux et Claude Brodard, le Conseil d’État a indiqué le 7 juin dernier qu’entre 30 et 70 entreprises fribourgeoises devraient être concernées par cette adaptation. Ce sont des sociétés actives à l’international qui dégagent un chiffre d’affaires d’au moins 750 millions d’euros. Fribourg imposant les sociétés à environ 13,5% aujourd’hui, le passage à 15% générera des recettes additionnelles, dont une partie reviendra dans le canton. Dans sa réponse, le Conseil d’État estime «raisonnable de penser» que le montant se situera entre 5 et 10 millions de francs. Avec cette harmonisation de l’imposition des grandes entreprises – rien ne change pour toutes les autres sociétés – le canton perdra toutefois une partie de son attractivité. Depuis la réforme acceptée en 2019, le taux d’imposition actuel des bénéfices est en effet au-dessous du nouveau standard. Pour la CCIF, il est donc logique que les impôts supplémentaires générés par cette hausse de la fiscalité soient utilisés de manière à améliorer les conditions-cadres de notre économie.

Plusieurs pistes sont possibles. La CCIF préconise de soutenir davantage l’innovation, en pérennisant par exemple les mesures mises en place dans le plan de relance lié au Covid-19 (chèques R&D et chèques digitalisation). Au niveau fiscal, l’une des options serait de stimuler davantage les investissements dans la recherche en augmentant le plafond des dégrèvements liés à la patent box. À ce titre, la CCIF note avec satisfaction que le Conseil d’État s’est engagé dans ce sens dans son « Programme gouvernemental de la législature 202226» publié en juin dernier, en affirmant qu’il «entend mettre en place un écosystème favorable et attractif pour stimuler la compétitivité et l’innovation par le développement d’une fiscalité attractive (patent box plus conséquente)».

Une autre mesure consisterait à stimuler le marché du travail. Comment? En augmentant à 25’000 francs le plafond déductible au niveau cantonal pour les

La CCIF préconise de soutenir davantage l’innovation, en pérennisant les mesures mises en place dans le plan de relance lié au Covid-19.

frais de garde des enfants. On le porterait ainsi au même niveau que celui que la Confédération appliquera dès le 1er janvier 2023. Frais de garde et impôts trop importants incitent souvent les parents à renoncer à travailler à des taux d’activité plus élevés, faute d’intérêt financier. Ce serait une bouffée d’oxygène bienvenue pour les entreprises dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre.

Philippe Gumy T.026 347 12 23 pgumy@ccif.ch ccif.ch

INNOVATION VERS UNE LOI CANTONALE

L’innovation permet d’apporter des solutions nouvelles dans le cadre de nombreux défis: transition énergétique, mobilité, manières de produire et de travailler, durabilité, entre autres. Pouvons-nous faire davantage pour la soutenir? La CCIF en est persuadée, s’y engageant ellemême avec un service dédié. Au niveau politique, elle plaide depuis 2020 pour une loi cantonale sur l’encouragement de l’innovation. Bonne nouvelle, une motion vient d’être déposée au Grand Conseil demandant la création d’un tel texte législatif.

La motion des députés Sébastien Dorthe et Hubert Dafflon a été déposée le 8 septembre 2022. Elle constate que l’innovation n’est aujourd’hui pas absente des préoccupations de l’État, puisqu’elle constitue un instrument au service de la loi sur la promotion économique (LPEc) ainsi que son règlement d’application (RPEc). Les élus notent toutefois que «ces textes légaux ne traitent pas de manière suffisamment structurée et élaborée la question de la politique concrète que doit mener le canton en matière d’innovation, cela notamment sous l’angle des responsabilités, des objectifs et des moyens pour y parvenir».

La motion poursuit plusieurs buts. Tout d’abord, elle demande de définir des objectifs clairs en matière d’appuis à la recherche universitaire ainsi qu’à la recherche appliquée, deux domaines chapeautés aujourd’hui par deux directions, à savoir celle de la formation et des affaires culturelles (DFAC) et celle de l’économie, l’emploi et la formation professionnelle (DEEF). Ensuite, la loi serait l’occasion de « reconnaître et catégoriser les différents centres technologiques et d’innovation existants sur le territoire fribourgeois », à savoir le Marly Innovation Center (MIC), le Vivier (Villaz-st-Pierre) et Bluefactory (Fribourg) et AgriCo (St-Aubin). Des synergies pourraient être dégagées.

Troisièmement, la loi apporterait une simplification des structures actuelles de soutien, qui apparaissent « particulièrement éclatées », de l’avis des motionnaires. La création d’un guichet unique pourrait permettre de « significativement simplifier et coordonner les efforts entre les différents acteurs ». En matière de financement, il est enfin proposé de créer un « fonds à l’innovation », qui permettrait aux PME de pouvoir bénéficier d’un accès supplémentaire aux capitaux.

Pour la CCIF, le canton se doit de faire de l’innovation un but, pas uniquement un moyen de se développer. L’emploi, la formation, la population et les entreprises en bénéficieraient. Dans un contexte caractérisé par une incertitude malheureusement appelée à durer, se donner les moyens de forger l’économie de demain constitue le meilleur investissement dans l’avenir.

Pour la CCIF, le canton se doit de faire de l’innovation un but, pas uniquement un moyen de se développer.

Philippe Gumy T.026 347 12 23 pgumy@ccif.ch ccif.ch

This article is from: