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Chronique

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Assemblée générale de la CVI

LA CRISE DU COVID BOOSTERA L’IMMOBILIER

Avec le semi-confinement et l’hyperinflation redoutée, les investissements dans la pierre seront plus profitables que jamais. Le professeur Didier Sornette (ETH Zurich) s’exprimait ainsi lors de l’assemblée générale de la Chambre vaudoise immobilière.

Didier Sornette. ETH Zurich

«Durant la crise du Covid, le monde politique a opéré un choix historique, celui de fermer ses économies. C’est unique dans l’histoire de l’humanité...» L’immobilier a des beaux jours devant lui, mais sachons sur veiller les indices pour se prémunir des risques de bulles.

Professeur à la chaire des risques entrepreneuriaux de l’Institut fédéral suisse de technologie de Zurich ainsi qu’au département des Sciences de la Terre à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (ETH), le volubile Français a frappé fort lors de l’Assemblée générale de la Chambre vaudoise immobilière tenue le 6 octobre à Lausanne. Selon ce spécialiste du risque, notamment des tremblements de terre, la Corée du Sud, le Japon et Singapour sont trois des pays qui ont su le mieux tirer leur épingle du jeu. Ils ont agi à la vitesse d’un TGV, alors que les pays occidentaux avançaient plutôt à la vitesse du vélo. Pour le professeur Sornette, ce sont les méthodes de confinement «à la chinoise» parties de Wuhan pour gagner ensuite le nord de l’Italie, qui ont fait école dans les pays occidentaux, la Suède exceptée. Il tient à remettre en perspective le taux de mortalité enregistré sur la planète: le Covid-19 a tué 0,059% de la population mondiale (avec un maximum possible à 0,196%), alors que la grippe espagnole de 19181919 a frappé 29 fois plus et que le sida a été 10 fois pire. Plus loin dans l’histoire, les grandes épidémies de peste ont fait

L’immobilier a des beaux jours devant lui, mais sachons sur veiller les indices pour se prémunir des risques de bulles. LDD

disparaître un bon tiers de la population mondiale, ce qui correspondrait à près de 3 milliards de morts d’aujourd’hui!

Le mirage du risque zéro «La leçon numéro un de la pandémie est que nos sociétés n’étaient pas préparées, rappelle le professeur. Et surtout qu’elles n’ont pas retenu les leçons de la grippe asiatique de 1957 ou celles de Hongkong de 1968-69, l’année où le festival hippie de Woodstsock avait accueilli un demi-million de spectateurs sans précautions particulières . L’OFSP avait un bon plan de pandémie en 2018, mais le Conseil fédéral n’a pas exécuté tout ce qui y était décrit. Les décisions des politiciens ont été influencées par des modèles mal conçus qui ont effrayé tout le monde. Les médias en tant que marchands d’attention, via la peur et les émotions, ont joué un rôle extrêmement négatif, renforcé par les réseaux sociaux et leur dynamique tyrannique.» C’est le mirage du «risque zéro» qui est remis en cause par le prévisionniste avec une société occidentale victime de maux comme l’obésité (48% des Américains souffrent de co-morbidité qui les rend vulnérables au Covid), de graves conflits d’intérêts avec les gains faramineux des pharmas et le manque de solidarité internationale avec un accroissement des inégalités: «A l’exception d’Israël, les sociétés les plus riches de l’histoire de l’humanité ont décidé de ne plus se reproduire.» C’est aussi le spectre de la stagnation économique avec l’illusion de l’argent perpétuel. Plus les populations s’enrichissent, plus elles s’avèrent réticentes au risque. Il voit le centre de gravité du monde se déplacer inévitablement vers l’Asie du Sud-Est. Il dénonce aussi la stratégie du «quoi qu’il en coûte» mise en œuvre par le gouvernement Macron depuis mars 2020 pour soutenir l’économie face aux répercussions de la pandémie: «La politique est gérée par les extrêmes sous l’influence des réseaux sociaux. Au lieu de développer les centres de soins intensifs, les gouvernements ont pris des mesures dignes d’une troisième guerre mondiale. Ils se sont tournés à 100% vers la vaccination aux dépens des remèdes thérapeutiques.»

L’avenir radieux de l’immobilier Face à l’endettement endémique en croissance perpétuelle, face aux dettes explosives de la plupart des Etats qui dépassent largement leur PIB, le professeur Sornette ne se démarque pas par un optimisme béat. Au contraire, il redoute les coûts exorbitants de la transition énergétique («nous ne sommes pas prêts») et les risques d’instabilité sociale face aux risques d’hyperinflation. En revanche, il prédit un avenir radieux aux investissements effectués dans la pierre. Si l’on assiste à rebattage des cartes pour l’immobilier commercial et les bureaux avec le développement du télétravail, on voit apparaître une forte demande des biens à la campagne «pour se sortir de la tyrannie des confinements». Avec les nouvelles politiques monétaires des taux zéro et l’hyperinflation qui pourrait survenir, le secteur de l’immobilier a de beaux jours devant lui. Mais cela nécessite un besoin de surveillance continue des indices afin de se prémunir des risques de bulles: «On est dans un monde où tout ce qui était inconcevable devient aujourd’hui concevable». Olivier Grivat

Ecoquartier

A NYON, LA CODHA REPENSE LE LOGEMENT

Projet novateur dans l’ouest vaudois, l’écoquartier de 131 appartements s’apprête à recevoir ses premiers habitants. Le point final d’un processus entamé il y a plus de dix ans.

Le complexe de trois bâtiments compte 131 appartements. LDD

C’était il y a dizaine d’années: la crise du logement dans la région nyonnaise était à son pic et les politiques décidaient de prendre le problème à bras-le-corps. Avec un double objectif: non seulement favoriser les constructions de logements, en débloquant des plans de quartier, mais surtout en veillant à ce que les prix finaux soient accessibles à des populations variées, en usant de divers leviers avec les promoteurs. C’est ainsi qu’une parcelle communale de 20’000 m2 était mise à disposition, après concours, de la Coopérative d’habitation Codha, créée à Genève en 1994. Ainsi encore que le concours d’architectures validait le pro«Nous avons choisi de ne pas créer de sous-quartiers dans le quartier: les trois types d’appartements seront mélangés, favorisant les interactions», détaille Guillaume Kaeser, vice-président de la Codha.

Processus participatif Là où le projet se démarque également, c’est que certains des futurs habitants sont partie-prenante de l’opération depuis le début du processus. En effet, des Nyonnais souhaitant bénéficier d’un appartement dans le quartier ont participé aux réflexions menées par la Codha sur les infrastructures nécessaires aux interactions quotidiennes. «Pour quelques

jet du bureau Farra Zoumboulakis & Associés. Aujourd’hui presque terminé, le complexe se compose de trois bâtiments cumulant 131 appartements. Un écoquartier (Minergie P et Eco) privilégiant à la fois la production d’énergie sur site, grâce notamment à des panneaux photovoltaïques, mais aussi la mixité sociale. Pour ce faire, la Codha a tablé sur une triple offre: 30% des appartements seront des loyers modérés (à 190 francs par année le m2), 40% seront des loyers abordables (à 250 francs par année le m2) et 30% seront des appartements en loyer libre (à 300 francs par année le m2). Notons d’ailleurs que les appartements ont tous les mêmes finitions.

LDD

Une ministructure locale gère la consommation de l’électricité produite sur le site, avec des prix favorables pour les membres

futurs locataires, il s’agit d’une étape longue de dix ans», commente encore Guillaume Kaeser.

Habitants écoresponsables Des discussions qui ont notamment abouti à la création d’une crèche d’une quarantaine de places et d’un local de quartier accessible à tous. Mais aussi à la conception d’un Regroupement de consommation propre (RCP). Derrière ce terme technique se cache une mini-structure locale gérant la consommation de l’électricité produite sur le site, avec des prix favorables pour les membres. Quant à l’excédent d’énergie produite et non-consommée en directe, elle est revendue aux Services industriels de la ville de Nyon, partenaires de l’opération. Avis donc aux amateurs qui souhaiteraient s’installer dans un cadre agréable (à proximité d’un cordon boisé) et désireux de s’insérer dans une communauté d’habitants écoresponsables: ce quartier flambant neuf, qui aura couté 60 millions de francs, compte encore des appartements libres. Quant à la Codha, structure romande, elle poursuit son développement dans le canton de Vaud, où elle a d’ailleurs ouvert un bureau lausannois. Elle gère aujourd’hui près de 500 appartements. Rodolphe Haener

Logements vacants

«LES CHIFFRES ALARMISTES NE REFLÈTENT PAS LA RÉALITÉ VAUDOISE»

Le taux de logements vacants au 1er juin 2021 est de 2,09% et non 1,66% comme l’assure l’Etat de Vaud, corrige l’USPI Vaud qui a diligenté sa propre enquête. Interview de son secrétaire général, Frédéric Dovat.

Frédéric Dovat, secrétaire général de l’USPI Vaud.

L’enquête de l’USPI Vaud repose sur un solide échantillonnage de 123'544 logements mis en location répartis sur tout le territoire cantonal. Nous arrivons à 2'580 logements vacants soit un taux de 2,09%. Les chiffres communiqués par le canton se situent hors de la réalité.

Néanmoins, ils montrent tous une forte disparité suivant les régions? Selon nos données, le taux de logements vacants dans le district de Lausanne est de 1,25%, 7,36% dans celui d’Aigle, 2,1% dans celui de Morges et 5,3% dans la Broye-Vully. Même si ces taux ne tiennent pas compte des logements vacants mis en vente, cela ne saurait expliquer une telle différence avec les chiffres de Statistique Vaud. A savoir 0,8% pour le district de Lausanne, 2,3% pour Aigle, 1% pour Morges et 2,1% pour la Broye-Vully.

Comment cela s’explique-t-il? Statistique Vaud utilise les chiffres absolus remis par les 309 communes et les compare à l’entier du parc de logements, alors qu’ils ne se rapportent qu’à une partie de ce parc. Ces chiffres plus élevés que les taux officiels confortent l’USPI Vaud dans son appréciation de la situation. C’est la première fois que nous procédons à l’exercice. Alors que le canton a fait appel aux communes, nous avons sondé nos membres et aussi obtenu les données de quelques grands acteurs vaudois de l’immobilier non-membres (réd: USPI Vaud, regroupe 80% du marché et une centaine de membres).

«Avec un marché qui se détend, la pression sur les prix s’inscrit globalement à la baisse pour la location»

Les chiffres officiels cacheraient-ils une volonté politique? Non, il n’y a pas une volonté de l’Etat de minimiser les données, mais la méthodologie utilisée ne peut refléter la réalité. Sur le plan suisse, c’est l’Office fédéral de la statistique qui impose la méthode de calcul et détermine le taux de logements vacants. Tous les cantons n’ont pas la même manière de recueillir les calculs. Le taux de logements vacants se détermine actuellement par rapport à l’ensemble du parc de logements, y compris ceux occupés par leur propre propriétaire, ceux mis à la vente, etc.

Pourquoi ces différences sont-elles si importantes? Ces chiffres sont très importants. Ils vont déterminer si nous nous trouvons ou pas en situation de pénurie de logements, ce qui a de nombreuses conséquences. Par exemple, en cas de pénurie de logements, le droit du bail permet la contestation du loyer initial. Il impose l’usage d’une formule officielle lors de la signature du contrat de bail et en matière de loi sur la préservation et la promotion du parc locatif vaudois, le propriétaire qui effectue des travaux doit demander l’autorisation du service du logement, auquel cas le loyer peut être contrôlé pendant plusieurs années.

A partir de quel pourcentage, y a-t-il pénurie? Pour l’Etat de Vaud il y a pénurie de logements lorsque le taux de logements vacants est inférieur à 1.5%. Autrement dit, il est d’usage de considérer le marché comme équilibré lorsqu’il affiche un taux de vacance de 1,5%, ce qui n’est plus le cas depuis 1999 selon lui. Ce dernier note également que ce taux ne cesse de varier depuis 2009 et que seuls trois des dix districts vaudois affichent un taux supérieur à 1,5%: Aigle, la Broye-Vully et le Jura-Nord vaudois. Le seuil de 1,5% par district est un seuil clé, mais le canton devrait effectuer une extrapolation des chiffres absolus remis par les communes. Nos chiffres traduisent un marché de l’immobilier légèrement plus détendu que l’alarmisme annoncé par l’Etat. Cette détente du marché immobilier démontre qu’il s’autorégule et que des interventions étatiques ne sont pas nécessaires.

Quelles conséquences en tirer? Avec un marché qui se détend, la pression sur les prix s’inscrit globalement à la baisse pour la location, mais cela dépendra du lieu et du type d’objet. Le marché n’a pas besoin d’intervention étatique. Par exemple, la commune de Lausanne a fait usage de son droit de préemption pour créer des logements d’utilité publique, elle l’a exercé pour six immeubles. Mais est-ce que c’est à l’autorité de jouer le rôle de promoteur? Nous ne le pensons pas. Les projets de construction mettent souvent plusieurs années à se réaliser, alors que le marché et les besoins de la population peuvent changer. On l’a vu avec le télétravail. Les intérêts négatifs ont aussi pour conséquence que les placements immobiliers sont encore plus attractifs. Il peut y avoir un décalage dans le temps. A Lausanne, où le taux de logements vacants est bas, il n’est pas facile de construire des logements. Outre les oppositions du voisinage, celle de la commune ne rend pas la vie facile aux investisseurs privés. Il faudrait pourtant construire davantage afin de lutter contre la pénurie de logements et que les autorités publiques y mettent du leur. Il ne faut pas subventionner la construction de logements, mais la faciliter. Cela donne aussi du travail aux entreprises de construction. Propos recueillis par Olivier Grivat

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