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DOSSIER Les qualités du chien guide
from Le Guide N°47 (août 2021)
by ACGGSO
QUELLES QUALITÉS POUR ÊTRE CHIEN GUIDE ?
Chaque année, l’Association Chiens Guides Grand Sud Ouest remet gratuitement entre 16 et 20 chiens guides. Chaque rencontre entre la personne aveugle ou malvoyante et son chien guide est une promesse de liberté et de confiance retrouvées. En effet, par la présence de ce fabuleux guide, le champ des possibles s’ouvre à nouveau. Autonomie, fluidité, sécurité permettent aux maîtres déficients visuels de retrouver l’envie et le plaisir de se déplacer. Cependant pour que cette magie opère, nos chiens guides doivent être le plus exemplaires possibles. Quelles sont donc les qualités nécessaires pour devenir chien guide ?
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OBÉISSANT ET À L’AISE PARTOUT !
En tant que chiens guides, nos compagnons rencontrent de nombreuses situations aussi bien en milieu urbain que rural. Les transports en commun, la foule, les travaux, le croisement avec d’autres animaux ne doivent pas les impressionner. Nos chiens guides doivent être à l’aise en toute circonstance. Pour ce faire, la socialisation des chiens guides commence dès la naissance. Au CESECAH, le Centre d’Étude, de Sélection et d’Élevage de Chiens guides pour Aveugles et autres Handicapés, les chiots sont éveillés dès la naissance par des stimuli sonores et visuels ou encore par des textures au sol variées. De même, toutes les activités d’éveil ont lieu en présence des techniciens d’élevage afin de favoriser le contact entre l’animal et l’homme.
Lorsque les chiots sont sevrés et qu’ils arrivent au sein de notre Association à l’âge de 2 mois, nos familles d’accueil bénévoles prennent le relais et poursuivent ce travail de socialisation jusqu’au 1 an du chien. Cette période est appelée la pré-éducation. Accompagnées par nos éducateurs diplômés, les familles d’accueil apprennent les règles d’obéissance aux chiots et leur font découvrir un maximum de situations aussi bien en ville qu’à la campagne.
Benoît Coux, famille d’accueil de Rocket, golden âgé de 6 mois, nous fait part de son expérience : « Les règles que nous instaurons sont adaptées à la future vie de Rocket auprès de son maître déficient visuel. Par exemple à la maison ou sur mon lieu de travail, lorsque je lui apprends à rester « à ta place », un endroit se situant en dehors des lieux de passage, c’est pour éviter que le chien ne prenne l’habitude de se coucher n’importe où au risque de faire trébucher son futur maître déficient visuel ou de déranger les collègues en plein travail. Pour Rocket quand la tentation est trop forte, il n’arrive pas encore à résister. Mais cela progresse de semaine en semaine. Sinon Rocket est un chien éveillé et actif sans être turbulent. Dès les premiers jours, Rocket ne mordillait pas, ne quémandait pas à table et il n’a jamais essayé de monter sur le canapé. En 10 jours, il avait assimilé les besoins au caniveau. Il a fallu attendre qu’il grandisse un peu pour être complétement propre. Concernant la socialisation, Rocket est un chien sensible à l’environnement. L’acclimatation au monde extérieur a dû être faite de manière très progressive. Avec Guillaume, son éducateur, on a donc pris le temps de lui faire découvrir d’abord mon village avant de l’amener à Toulouse. Rocket étant volontaire et curieux, sa sensibilité n’a donc pas pris le dessus. Aujourd’hui, il m’accompagne 3 à 4 fois par semaine au bureau. L’aller se fait en voiture et le retour en train et métro. Je l’emmène également chez mes clients. Il assiste alors aux réunions et se tient tranquille plusieurs heures d’affilées. »

Benoît et Guillaume lors d’un suivi à domicile de Rocket
CAPACITÉ DE CONCENTRATION ET DE MÉMORISATION POUR UN GUIDAGE PRÉCIS !
Comme détaillé dans le dossier du Guide n°46, les chiens guides sont capables de réagir à une cinquantaine d’ordres ou de situations de guidage telles que le pointage d’objets ou l’indication des passages piétons… Avoir une bonne mémorisation est donc indispensable. Céline, éducatrice diplômée, nous explique « lors de la phase d’éducation au guidage qui débute vers l’âge d’un an, le chien apprend des scénarios (par exemple à contourner une poubelle qui obstrue le trottoir). Nous répétons l’exercice jusqu’à ce que le chien assimile la situation. Puis, petit à petit, le chien généralise cet apprentissage aux autres obstacles rencontrés sur le trottoir (voiture mal garée, vélo qui bloque le passage…). Le chien doit avoir également une grande capacité de concentration durant le déplacement. Il ne doit pas se détourner de son guidage malgré les nombreuses stimulations rencontrées (odeur, rencontre avec des congénères, sollicitation des autres usagers pour le caresser ou le nourrir).
Enfin, il doit être volontaire et acquérir la désobéissance intelligente. Face à un danger imminent comme le vide ou une impossibilité à passer, le chien n’obéit pas à l’ordre donné par son maître déficient visuel. Il va soit se coucher et refuser d’avancer, soit proposer une solution alternative qui ne mettra pas son maître en danger. Mais pour obtenir le meilleur du chien et lui permettre de trouver un équilibre de vie entre ses besoins innés et ses sessions de guidage, des détentes journalières dans les jardins publics sont nécessaires. Il peut alors à loisir renifler, jouer avec des congénères, courir… Mais surtout, nous lui devons tendresse et affection »

Céline en éducation avec Rafale, labrador de 13 mois
UNE BONNE CONDITION PHYSIQUE
Comme de véritables athlètes, nous surveillons de près la santé de nos chiens. Ils sont nourris avec des croquettes de qualité pour amener tous les nutriments nécessaires à leur développement et pour éviter toute prise de poids. Un suivi régulier chez notre vétérinaire est organisé avec notamment la réalisation d’un fond d’œil pour identifier d’éventuelles tares oculaires. Nous restons aussi attentifs au risque de malformations articulaires par radiographie des hanches, des coudes et des épaules à 7 mois et à 1 an.

PROFESSEUR GENEVOIS
Le Professeur Genevois, responsable du Groupe de Travail Affections Ostéo-Articulaires de la Société Centrale Canine et expert de la Fédération Cynologique Internationale, interprète les radios des hanches afin de détecter précocement tout risque de dysplasie (cause de boiterie des membres postérieurs la plus fréquente chez le chien) :
De même, pour éviter les chocs traumatiques sur les articulations en cours de croissance, les escaliers et les sauts sont proscrits durant les 6 premiers mois du chiot. Si l’une de nos recrues présente un problème de santé l’empêchant de devenir chien guide, nous la réformons pour respecter son bien-être et elle sera adoptée par des personnes vivant dans un environnement adapté à ses besoins. Enfin le gabarit du chien est important. Pour que la personne déficiente visuelle puisse ressentir le mouvement du harnais de guidage dans sa main, nous sélectionnons des chiens dont la taille est comprise entre 55 et 65 cm au garrot.
UNE IMAGE POSITIVE AUPRÈS DU PUBLIC

Phénix, labrador de 2 ans
Depuis le 11 février 2005, la loi autorise l’accès du chien guide à tous les lieux ouverts au public comme les magasins, les restaurants… ainsi que les transports en commun. Le chien guide accompagne donc son maître déficient visuel partout et même sur son lieu de travail. Le chien doit alors rester calme et avoir une tenue irréprochable. Tous nos chiens guides justifient d’une bonne éducation assurant un comportement adapté en toute situation et envers les autres usagers. Pour autant, afin de ne pas effrayer le public, nous travaillons avec des races appréciées du plus grand nombre. Le chien guide étant bien accueilli, il devient un vecteur social. Par sa présence, le dialogue s’initie autour du handicap visuel et l’intégration sociale est facilitée.
LES RACES DE CHIENS GUIDES
Aujourd’hui, nous travaillons principalement avec trois races qui regroupent l’ensemble de ces exigences. Le labrador représente la majorité de nos chiens guides. Sa capacité d’adaptation et sa notoriété le rendent incontournable. Le golden retriever est plus posé et plus doux que le labrador, mais il est souvent plus sensible que son cousin et demande donc plus de doigté dans son éducation. Le croisé reprend les qualités du golden retriever et du labrador. Son caractère très souple en fait un chien très polyvalent.
Ces trois variétés de retriever permettent de répondre, dans 90% des cas, aux besoins des personnes déficientes visuelles. Pour les demandes spécifiques, et tout en restant dans le standard de nos exigences, une autre race peut être proposée comme le caniche royal pour une personne allergique aux poils de chien.
Dans le prochain numéro, nous vous présenterons le certificat d’aptitude, examen national, permettant de valider les compétences de nos fabuleux chiens guides !

Pipa, golden de 2 ans