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L’étable de Vissoie a 50 ans

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Cinquante ans

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de passion pour l’étable de Vissoie

C’est le titre de la brochure éditée pour cette noble occasion. Cinquante ans, un demisiècle, la maturité bien installée, étape où de nouvelles questions surgissent, où des décisions importantes doivent se prendre pour un futur difficilement prévisible. Le retour aux produits de proximité, à l’élevage local, la revalorisation des richesses de la terre devraient favoriser la dynamique en cours à l’étable en consortage de Vissoie.

Un panel de personnalités a participé à cet important document, qui constitue une pierre dans l’édifice historique de notre vallée. Des tractations difficiles du début de l’avant-projet à la réalisation de l’étable, que de doutes, de questions, de recherches de solutions, de discussions parfois très animées entre les membres fondateurs et les consorts. Une telle aventure ne peut se conduire sans moments compliqués, sans controverses. Mais le résultat a été à la hauteur des espoirs et l’étable a été inaugurée en octobre 1971. On sait bien que l’agriculture de montagne souffrait beaucoup à cette périodelà, elle était en état de survie. La construction des étables doit son émergence à une réaction forte du futur conseiller d’Etat Guy Genoud qui, en visite dans notre vallée dans les années soixante et constatant l’état désastreux des belles prairies de fauche à l’abandon fit part du constat suivant : si les Anniviards n’étaient pas capables de faucher leurs prés, comment voulaient-ils développer un tourisme de qualité pour leur vallée ? Anecdote fondatrice rapportée par Urbain Kittel. Cette sentence claqua comme un coup de fouet, les actes concrets se sont alors succédé. L’étable de Grimentz, la première fut inaugurée en automne 1969, deux ans avant celle de Vissoie. En 1972 a vu le jour celle d’Ayer, en 1974 celle de Chandolin, en 1975 celle de St-Jean, celle de Mission en 1976 et enfin, celle de StLuc en 1988.

Rémy Epiney, Euchariste Massy et Marc Melly ont constitué le comité d’étude de l’étable de Vissoie, les mêmes ont fonctionné au premier comité de 1971. Cinquante ans plus tard, ce sont Gérard Monnet, Didier de Courten et Justin Monnet qui assument cette fonction. Et trois personnes voguent sur ce bateau depuis le début : Rémy Epiney, Urbain Kittel et André Melly.

Le rôle des femmes

Eh oui, je vous vois venir, mais où sont les femmes ? Comme souvent à cette période, elles étaient bien là, à l’arrière, non pas calfeutrées, mais assurant l’intendance, soutenant bien souvent la passion de leur homme. Solange Melly a toujours accompagné, supporté, aidé son époux. Irma Epiney a baigné dans le milieu paysan et poursuivi ce parcours dans l’étable en consortage, complétant l’implication

Sigfroid Bonnard, Jean-Bernard Epiney, Jean-Claude Massy, Rémy Epiney, Urbain Kittel, André Savioz, Marc Melly, André Melly, Prosper Zufferey, Serge Abbé

de son Rémy. Quant à Lucie Savioz, elle a immortalisé la plupart des mélanges des étables et des alpages avec sa caméra 8mm, puis VHS, documents précieux.

L’une des deux conseillères communales d’Anniviers est responsable du dicastère de l’agriculture. Peut-être jouera-t-elle le rôle de coach, de conseil, de soutien pour une future femme responsable d’étables en consortage ? C’est mon souhait.

Les vachers

Ces personnages, si importants pour la bonne marche de l’étable, ont été particulièrement fidèles. Trois ont rempli ce rôle en cinquante ans, c’est remarquable. Louis Pralong, d’abord, de 1971 à 1978, puis Sylvain Zufferey, qui l’a remplacé jusqu’en 2010 et, depuis lors, c’est Gabriel Venacio qui œuvre à ce poste. Il redoute de prendre un congé, de peur que ses protégées souffrent d’un bobo en son absence, c’est dire l’estime qu’il porte à son travail et à ses protégées.

Une belle diversité de thèmes

La brochure passe en revue plusieurs aspects : l’évolution du cheptel, les reines de l’étable, les étables privées, les consorts, le regard du sociologue, la diversification de l’agriculture, le futur de l’étable. Les divers auteurs nous font part de leurs considérations de l’intérieur, sans concession. Les côtés négatifs de l’aventure ne sont pas occultés. Et même si on a surnommé les consorts « paysans du dimanche », le temps leur a donné raison : se mettre ensemble pour s’en sortir, quoiqu’il en coûte. Car la charge financière était lourde, pas à la portée de tous.

Les points de vue abordés représentent bien sûr un morceau d’histoire de chez nous, que chacun espère inscrire dans la continuité encore pour longtemps. Pour Didier de Courten, l’élevage permet une transformation artisanale des produits de haute qualité, locaux et vrais, celle-ci répond à l’évolution des demandes des consommateurs d’ici et d’ailleurs. La fromagerie d’Anniviers est fournie exclusivement en lait de notre vallée, provenant de 6 étables et de 6 producteurs indépendants. Le fromage est fabriqué à base de lait cru et entier, travaillé dans des cuves en cuivre et affiné sur des planches d’épicéa. Il est régulièrement noté 19 sur 20 par l’interprofession Raclette du Valais AOP. Quoi de plus normal ? Nos vaches profitent d’un pâturage floral exceptionnel. Concernant la viande, le label Fleurs d’Hérens assure une qualité d’exception.

Liens entre les générations

A l’occasion de ce bel anniversaire, des échanges chaleureux entre la nouvelle génération de consorts et les anciens sont relatés dans la brochure. Elodie de Courten et Urbain Kittel croisent leurs regards et leurs ressentis ; Alexandre Crettaz écoute André Melly qui pense qu’on peut « connaître le caractère d’un homme en fonction de sa relation avec son bétail ». Jérôme Savioz retient l’ambiance d’un temps décrit par son grand-père André. Justin Monnet relate sa passion née pour les Hérens depuis ses 11 ans et entend Rémy Epiney qui comprend que les enfants des consorts ne peuvent pas tous assumer la suite à l’étable. Quant à Johan Vianin, il fait connaissance avec Georges Theytaz, responsable pendant 10 ans de la gestion administrative et comptable du consortage. Cette rencontre a été positive pour Johan, quand Georges affirme que l’étable a contribué au maintien de la centrale laitière, de l’abattoir et encouragé les artisans bouchers et traiteurs.

Le mot de la fin

Il revient à Aimé Bonvin, le rassembleur des participants à la brochure marquant l’alerte cinquantenaire, « une histoire humaine, une histoire de passions ». Mais, affirme-t-il « la flamme est restée pour une cause qui va à l’encontre des valeurs de rentabilité… ». Cinquante ans d’une aventure qu’une équipe de rédaction motivée a contribué à finaliser, grâce aux encouragements indéfectibles d’Urbain Kittel.

texte Simone Salamin photos privées de la brochure

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