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Quand les hormones sont

Si vos hormones sont en parfait équilibre, c’est que vous êtes mort

LE PROFESSEUR GUY T'SJOEN AIDE À DISSIPER LES MALENTENDUS

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Les hormones sont un sujet qui suscite de nombreux mythes et croyances populaires. Le Professeur Guy T'Sjoen, Chef du service d'endocrinologie de l’UZGent, lève le voile sur de nombreux malentendus.

“Hormones... Rien que le mot en lui-même entraîne déjà une certaine tension. Les hormones nous paraissent un peu dangereuses. ‘C’est à cause de mes hormones’ est une phrase qu’on entend souvent. Les personnes émotives, fatiguées ou stressées, en surpoids ou qui souffrent d'acné... Les hormones sont à chaque fois pointées du doigt, explique le professeur Guy T'Sjoen. "Pourtant, quand quelque chose cloche vraiment sur le plan hormonal, c’est une toute autre histoire. Par exemple, un problème au niveau de l'hypophyse (une glande située sous le cerveau qui contrôle votre activité hormonale), de la glande thyroïde ou des glandes surrénales peut entraîner le développement de maladies graves. Cela n’a rien à voir avec les plaintes assez vagues qui sont toutes attribuées aux hormones.”

Ces symptômes légers ou i mprécis, peuvent-ils quand même être dus aux hormones ?

“Certainement. Un excès de testostérone, l'hormone mâle, peut provoquer de l'acné. La fatigue, quant à elle, peut être due à un manque d'hormone thyroïdienne. Nous prenons ces plaintes au sérieux. Mais bien souvent, elles ont d'autres causes. Les malentendus ont la vie dure. L’un d’eux concerne la fatigue, qui serait due à l’épuisement des glandes surrénales. Permettez-moi d'être clair : cela n'existe pas. Lorsqu’il y a un véritable problème au niveau des glandes surrénales, le tableau clinique est sans appel, et l’analyse de sang donne des résultats évidents. Il est alors question de la maladie d'Addison. Pourtant, nous recevons de plus en plus de personnes en consultation qui ont suivi un traitement de longue haleine à la cortisone pour un soi-disant épuisement des surrénales. En fait, ces personnes sont dopées. La cortisone leur donne justement plus d'énergie. Il faut sans cesse augmenter la dose pour que l’effet se maintienne. Et c'est ainsi que ces patients se retrouvent avec une véritable insuffisance surrénale.”

Qu'en est-il du déséquilibre hormonal dont on entend beaucoup parler de nos jours ?

“En fait, les hormones sont toujours en déséquilibre. Elles recherchent constamment l'équilibre, mais ne l'atteignent jamais. Certaines hormones ont également un rythme de jour et un rythme de nuit. Je dis toujours que lorsque vos hormones sont en parfait équilibre, c’est que vous êtes mort. Bon, maintenant, il est évident que des problèmes peuvent surgir. Par exemple, en cas de stress intense et prolongé, on peut observer une surproduction à long terme de l'hormone du stress, le cortisol. Celle-ci affecte particulièrement le métabolisme. Vous avez envie de manger salé et sucré, ces fringales n’ont évidemment pas un effet favorable sur votre régime alimentaire. De plus, un excès chronique de cortisol réduit le fonctionnement de votre système immunitaire. Mais le stress chronique vraiment intense, est moins fréquent qu’on ne l’imagine.”

D’après vous, les hormones peuvent-elles jouer un rôle important dans l'obésité ?

“Le surpoids n'est presque jamais causé par des gènes. Il est généralement dû à une combinaison de mauvaises habitudes alimentaires et de manque d'exercice. Cependant, les hormones y jouent un rôle insidieux. Lorsque vous mangez, surtout des aliments qui contiennent du sucre, le niveau de glucose augmente dans votre sang. Le corps fabrique alors de l'insuline pour se débarrasser de ce glucose. Une partie est utilisée comme énergie directe ou stockée dans le foie ou les muscles, le surplus est stocké sous forme de graisse. Le tissu adipeux fabrique lui-même une hormone, la leptine, qui vous donne une sensation de satiété, et vous pousse à arrêter de manger. Lorsque vous suivez un régime et que vous perdez du tissu adipeux, la production de leptine diminue aussi. Si vous avez moins de leptine que d'habitude, vous vous sentez moins rassasié(e) et vous avez envie de manger. Il vous faut alors une volonté de fer pour continuer à résister. C'est pour cette raison qu’un régime intensif est la pire chose que vous puissiez entreprendre.”

Le surpoids entraîne à son tour un impact sur les hormones masculines et féminines.

“Les hommes en surpoids ont en effet parfois moins de testostérone. La testostérone est convertie dans le tissu adipeux en œstrogène, l’hormone féminine. Le cerveau remarque cette quantité élevée d'œstrogènes et freine l’hypophyse. Celle-ci inhibe à son tour la production de testostérone. Chez les femmes, il existe un lien entre le surpoids et le syndrome des ovaires polykystiques, bien que nous ne comprenions pas encore pleinement ce lien. Cela entraîne le développement de différents kystes sur les ovaires. Le cycle devient irrégulier, voire s'arrête complètement. La fertilité diminue. Toutes ces vésicules ou kystes produisent un peu d’hormones mâles. Ces femmes se retrouvent à terme avec trop de testostérone. Cela peut provoquer une pilosité indésirable, de l'acné et parfois une perte de cheveux selon un schéma masculin. Par ailleurs, lorsque le pourcentage de graisse corporelle est trop faible, le fonctionnement de l'hypophyse diminue, ce qui réduit la production de testostérone et d'œstrogène.”

Selon le Dr Google, le soja agit aussi comme une hormone féminine dans l'organisme.

“Il existe peu d'études scientifiques de qualité sur ce sujet. Nous savons que chez les hommes, il n'a aucun effet sur la testostérone ou les spermatozoïdes. Je dois aussi décevoir certaines femmes : rien ne prouve qu’il augmenterait le volume des seins. De plus, ces doses restent finalement très faibles, même en cas de régime végétarien dans lequel vous mangeriez une quantité assez importante de soja.”

Quel est l'impact des perturbateurs endocriniens présents dans notre environnement ?

“Les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques qui peuvent interférer avec l'action de nos propres hormones corporelles. On les retrouve notamment dans certains plastiques, cosmétiques, peintures, parfums et textiles. Nous voyons plus d'hommes qu'auparavant atteints d'un cancer des testicules et constatons une baisse générale de la qualité du sperme. Ce phénomène pourrait être dû à la quantité accrue de perturbateurs endocriniens. Ils peuvent être nocifs à long terme et doivent absolument être évités pendant la grossesse.”

POUR EN SAVOIR DAVANTAGE www.partena-mutualite.be/magazine, et cherchez ‘perturbateurs endocriniens’