École Tables Claudiennes

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Graines de lecteurs RĂŠcits

École Tables Claudiennes - Classe de CM2


Histoires écrites par des classes de CM2 de l’école primaire Tables Claudiennes Avec l’aimable collaboration de Hervé Walbecq



Le pays des Histoires jamais vĂŠcues

par Achille et MaĂŤl


Au pays des Histoires jamais vécues on rencontre surtout des histoires d’action. La plupart se sont tout simplement trompées d’époque. Les gens qui auraient pu se rencontrer ne se sont pas croisés au bon moment, au bon endroit, et leurs histoires n’ont jamais pu voir le jour. Les unes après les autres, elles se rassemblent dans un immense jardin suspendu quelque part entre le Ciel et la Terre. Là, tout au long de la journée, à l’ombre des arbres ou sur les pelouses au Soleil, elles se racontent leurs vies imaginaires.Avec elles tout est possible puisqu’elles n’ont jamais existé. Parfois même leurs récits se mélangent. La dernière fois que j’ai voyagé là-bas, j’ai assisté à des rencontres étonnantes : un chevalier en armure avait attrapé froid. Il a bruyamment éternué sur un robot qui, en retour, l’a fait court-circuiter et exploser sans se poser de questions. Les morceaux ont volé de toutes parts. Certains ont atterri… sur un pirate ! Il s’est mis dans une colère noire et a porté plainte. Un groupe d’enquêteur est arrivé et s’est mis à enquêter pour savoir qui avait éternué et qui avait explosé. C’était le bazar ! Tout cela s’est finalement bien terminé, car tout le monde sait qu’il n’est pas bien de se battre. Des excuses ont été présentées. Les pirates, le robot et le chevalier sont maintenant amis : ils réalisent de belles histoires surprenantes ensemble. Mais moi, je n’aime pas ça. Rien n’a de sens quand ces personnages se mélangent dans une histoire. Le chevalier m’a dit : « on fait ce qu’on veut ici. Si tu n’aimes pas, tu t’en vas ! » Le robot a baragouiné quelque chose que ni le chevalier ni moi n’avons compris. Ils se sont regardés méchamment. Grosse frayeur ! J’ai cru que la bagarre allait reprendre. « Bon mes matelots ! Ce n’est pas tout ça mais on a une histoire à faire ! » Ouf… Et ils sont tous partis ailleurs dans le jardin pour poursuivre leurs histoires ensemble. Je ne les ai jamais revus. Les enquêteurs eux, ils doivent résoudre un meurtre… Moi, je rentre chez moi. Et c’est décidé : je n’irai plus jamais au pays des Histoires jamais vécues. C’est vraiment trop risqué… Ou alors peut-être au pays des Histoires d’amour jamais vécues !


Un très beau dimanche

par Amny, Lou-Maï et Nouralda


C’est l’été. Il fait beau. Elle est assise sur un banc. A ses côtés, elle a déposé son foulard, sur sa jupe, elle a croisé ses mains, et depuis tout à l’heure, elle regarde le ciel. Dans quelques instants, il faudra reprendre le travail. Elle n’en a pas du tout envie. Si elle pouvait disparaitre soudain, devenir invisible, elle le ferait bien volontiers. Doucement, elle se lève, rassemble ses affaires, frotte les plis de sa jupe, et, sans tarder, reprend le chemin de son bureau. Mais voilà qu’apparait devant elle un très beau Dimanche. Il se tient debout, bien droit, sur le trottoir d’en face. « Que fait-il là, se dit elle, il devrait être en weekend… - Je m’appelle Dimanche… - Moi, Sarah. Est-ce que je peux rester avec toi un moment ? - Bien sûr. Tu as l’air un peu triste Sarah. Si tu veux, je t’emmène chez moi un moment. … - C’est beau chez toi. C’est agréable. - Tu sais, c’est tout simple : un hamac, un pré fleuri, du soleil, du vent léger dans les cheveux. Sarah reste, quelques temps. Pourtant, petit à petit, le Dimanche vieillit. Plus vite qu’on ne le pense. Et puis le Dimanche devient le Lundi. Le quotidien redevient le quotidien. Sarah doit partir maintenant. Mais elle se dit que, peut-être, si elle attend quelques jours, le Dimanche reviendra.


Le pays des grandes dĂŠcisions

par Anthony, Alan et Nathan


Je n’aime pas du tout le pays des grandes décisions. Là-bas, tout le monde est sérieux. On ne s’amuse jamais. La dernière que j’y suis allé, j’ai fait un très mauvais voyage. A peine arrivé, je me suis retrouvé enfermé dans une grande pièce sombre. Une sorte de palais antique rempli de juges qui aussitôt m’ont pris à partie. Ils voulaient connaitre mon opinion, savoir ce que j’allais faire, ce que j’allais décider. A mes côtés, se trouvait une énorme balance. Tous me demandaient de peser le pour et le contre. Chacun me soufflait à l’oreille un avis différent… Pourquoi dois-je y retourner ? Car mon père ne peut plus être maire de ce pays. Alors, je vais faire mes valises pour aller le remplacer. Deux jours seulement, car j’ai déjà un travail et je n’ai pas que cela à faire. Si je n’accepte pas, je sais que les habitants de ce pays me chercheront et feront tout pour que je veuille bien être maire. Mais je dois réfléchir à une solution pour me sortir de là. Les grandes décisions, je déteste ça : les élections, les lois, les droits et devoirs,… Et là, j’ai eu une idée ! Je prends le train pour aller au pays des grandes décisions. Ma création est terminée : un robot à mon image et qui prendra les bonnes décisions à ma place (grâce à un mécanisme complexe que je ne détaillerai pas ici). Il est accueilli à bras ouvert par la population et les juges. Mais immédiatement après, on attend de lui qu’il prenne ses premières décisions. Sur le quai de la gare qui doit me ramener chez moi, j’écoute son discours : « chers concitoyens, ma première décision sera d’augmenter le prix des boîtes de conserves ! La seconde, plus sérieuse encore, sera de rajouter une cinquième dent sur chaque fourchette. Très prochainement, de grands travaux seront engagés pour modifier la couleur de chaque brin d’herbe,… » La foule est restée un long moment silencieuse. Je remonte dans le train, un sourire aux lèvres. Je rentre chez moi. C’est ma décision.


J’habite dans une vache

par Colin


J’habite dans une vache. Je n’ai pas trop choisi ce mode de vie. Je me reposais dans un champ, au retour de l’école, et une énorme vache est venue s’asseoir sur moi, en plein sur ma tête. Comme je suis tout petit, j’ai pénétré sans aucune difficulté dans son gros corps… Tant qu’à être dedans je me suis dit que j’allais visiter. Je vais dans sa tête pour observer par ses yeux ce qui se passe dehors. Je vois le champ dans lequel je me reposais quelques instants auparavant. Je trouve cette habitation splendide et décide d’emménager ici. Je sors un instant pour aller me procurer un réveil et de quoi manger : des bonnes pâtes avec du lait de vache, délicieux ! Je me couche et programme mon réveil car demain, il y a école. J’ai du mal à dormir car la vache ronfle un peu ! Le jour suivant, c’est le week-end. Je me réveille tard et me prépare un bon petit déjeuner : la vie dans une vache c’est super parce que je peux avoir du lait et du fromage à volonté. Je vais chercher mes copains pour leur montrer mon nouvel « appartement ». Comme c’est samedi (et qu’il n’y a pas mes parents), je décide d’organiser une soirée pyjama. Je prépare la sono et les enceintes dans les quatre estomacs de la vache. Quand mes amis arrivent, ils me reprochent d’avoir oublié les boissons. Qu’à cela ne tienne : on a qu’à aller chercher du lait. Après la fête, j’ai cinq copains qui restent dormir. Certains de mes amis m’ont demandé s’ils pouvaient vivre ici. Je me suis dit que ce serait super si on était plusieurs dans la vache. De toute façon, il y a vraiment beaucoup de place : les quatre estomacs, c’est le grand salon où on fait la fête et où on reçoit des invités ; les intestins, c’est la cuisine ; la tête sert de lieu de stockage pour le lait et le fromage ; les pattes ce sont les chambres. Donc, depuis ce jour, nous habitons ensemble. Mais avec eux il a fallu s’organiser et avoir plus d’argent pour vivre. Nous avons donc décidé d’ouvrir une fromagerie (bon, de temps en temps,


il nous arrive de piquer un peu de fromage). Notre boutique a pas mal de succès. Parfois, quand on se réveille, on découvre que la vache s’est déplacée et a changé de village. A la longue, ça devient pénible. Du coup, de temps en temps, on accroche la vache à un piquet. Nous avons planté un potager à côté, et dans notre fromagerie, nous vendons aussi des fruits. Nous avons chacun notre rôle pour faire tourner l’affaire. On ajoute régulièrement de nouveaux produits à notre carte et cela a un grand succès. C’est une vie magnifique. Vous devriez essayer !


Le petit chateau dans les fleurs

par Iona et Mily


Un petit château a poussé dans les fleurs. « C’est une mauvaise herbe, a dit le jardinier. Je n’en ai jamais vu une pareille, elle est sûrement dangereuse ! Il faut absolument l’arracher. -Sûrement pas. Ai-je pensé. » Je n’ai rien dit, j’ai attendu la nuit tombée, j’ai pris une pelle et discrètement, je l’ai déterré. Tout au fond de la forêt, je l’ai replanté. Chaque jour, je vais le voir. Il a poussé et a grandi à vue d’œil. De grandes fougères enroulées se sont déployées. J’ai vu pousser des fenêtres, des escaliers, des portes, des fontaines,… Il ressemble maintenant à une petite boule de chewing-gum qu’on aurait mâchée et sur laquelle se seraient assis un ours, un cachalot, une otarie, un dinosaure… Je le trouve très beau ! Moi seule ai le droit d’entrer. Maintenant, j’en suis la Reine… Souvent, je me rends dans la cour du château. Je m’allonge sur une chaise longue. Je contemple la beauté de ce château merveilleux en buvant une eau parfaitement fraîche, j’écoute le chant des oiseaux… Leur chant est si paisible qu’il donne envie de s’endormir… La première fois, une voix m’a faite sursauter : « Heu, excusez-moi de vous déranger, mais…vous buvez mon verre d’eau fraîche… Je crois que le vôtre est là ! » C’était une petite chenille. Maintenant que je la connais, elle me tient compagnie et on s’apprécie beaucoup. Je lui ai tendu le verre en m’excusant. Elle est gentille cette chenille, mais timide. Dans le château, elle vit avec sa famille, entourée d’autres insectes. Je les connais tous, ils sont tous très attachants : la coccinelle est la cuisinière, le scarabée un tailleur, quant à l’asticot, il tient le rôle du Chambellan. Il y en a


encore beaucoup d’autres. Tous s’occupent du petit château, chaque jour… Avec tous mes compagnons, mes journées au château sont inoubliables et resteront à jamais dans ma mémoire. A présent lorsque le jardinier regarde le trou béant, je suis sûre qu’il se demande s’il n’a pas rêvé !


Le cimetière des mers oubliÊes

par Janel et Isaure


Toutes les mers qui autrefois peuplaient la Terre se sont envolées. Elles aimeraient bien revenir mais le monde a tant changé depuis l’époque préhistorique qu’elles ne savent plus très bien où elles vivaient. Là où poussaient des algues, voici maintenant une cathédrale, une montagne et des milliers de petits villages. Alors, inlassablement, dans le ciel, elles tournent, avec leur cargaison de fantômes et de monstres suspendus. Car tous les ont suivies dans les cieux. Les rebelles, ceux qui n’ont pas voulu quitter le sable, ont été transformés en pierre. Ils s’appellent fossiles, ammonites ou trilobites, et, quand ils sont particulièrement beaux, on les conserve en bibliothèque, ou dans de grands tiroirs au fond des musées. C’est l’un d’entre eux qui m’a raconté leur histoire : « Tu me vois dur et froid, m’a-t-il dit quand je l’ai ramassé, mais il y a très longtemps, j’avais de longues épines rouges. Il y a très longtemps, je glissais sur le sable, souple et plus léger qu’une fleur. Il y a très longtemps, j’étais un oursin. Sers-moi dans ta main, et, si tu le veux, je t’emmènerai au pays qu’autrefois j’habitais… - Mais comment vas-tu faire?! - Ne t’inquiète pas, ferme les yeux, et ouvre-les quand je te le dirais. » Je ferme les yeux et, une fraction de seconde plus tard, j’entends : ouvre-les maintenant ! Je rouvre les yeux… Je vois un homme, portant un costume semblable à celui des contrôleurs de trains. Sur sa casquette, je distingue les mots « Inspecteur des mers oubliées ». A côté de lui, à ses pieds, une étendue d’eau, une mer visiblement. Elle tremblote, elle est paniquée. Je m’aperçois que cette mer est sale, polluée. L’inspecteur a un papier dans la main. Il prononce les paroles « au cimetière des mers oubliées ! » et fait disparaître la mer. Comme ça ! Je n’avais jamais vu un tel spectacle se produire avant… Je suis triste pour cette mer.


Et puis, tout se précipite : quelqu’un qui pleure, des paroles agressives « pourquoi lui as-tu fait cela à cette pauvre mer ? » C’est l’oursin qui est en train de mordre le mollet de l’inspecteur des mers oubliées. L’inspecteur à l’air terrible, sauvage, très en colère. Il s’en prend à l’oursin. L’oursin me crie qu’il faut repartir. Je referme les yeux… Quand je les rouvre à nouveau, je suis chez moi. Quand je serai grand, je sauverai les mers oubliées et celles qui ne le sont pas encore…


Le chemin de poche

par Johan et Samuel


Je prends un chemin de campagne, je le glisse dans ma poche, et je retourne en ville. Sur le trottoir, je le libère. Aussitôt, il creuse son sillon dans le bitume. Entre les piétons et les lampadaires je le regarde filer. Rapidement, il arrive dans le parc. « Réveillez-vous, dit-il aux autres chemins, le monde est vaste, ne restez pas enfermés ! » Un à un, les autres chemins se réveillent. Ils secouent la poussière des semelles, contournent les bancs poussettes, et tous se retrouvent à la sortie.

et les

« Au secours, siffle le gardien, les chemins s’échappent !... » Les habitants sont d’abord surpris quand ils voient les chemins se réveiller. Ils ont une impression bizarre. Mais pas de peur, des sourires… Ils les saluent sur leur passage. Mais les chemins ne s’arrêtent pas, ils sont pressés. Ils ont le monde à découvrir… Tous ces paysages qu’ils ne connaissent pas, toutes ces nouvelles rencontres à faire. Et s’amuser, courir, faire des blagues, changer de place avec un autre chemin, par exemple. Leur voyage a été long, très long parfois. Pendant tout ce temps, on ne savait plus vraiment où marcher, ni où poser les pieds. Ca a été un peu embêtant au début mais finalement tout le monde s’y est fait… Quand les chemins en ont eu assez, ils sont revenus. Le chemin de campagne s’est blotti à nouveau dans ma poche. J’ai remarqué qu’il avait grandi. Il m’a dit qu’il était temps de rentrer chez lui.


Je l’ai ramené, je l’ai relâché. Je lui ai promis de revenir le voir pour qu’il me raconte ses découvertes…


Le petit chateau dans les fleurs

par Lilian et Yassi


Aujourd’hui, je me suis encore disputé avec mes frères. Ils n’arrêtent pas de me répéter que je ne suis pas à ma place, que je gêne, que je ne sers à rien… Je suis parti me promener pour me changer les idées. Sans m’en apercevoir, j’ai rapetissé. Au loin, j’ai vu un château, dans les fleurs. Au départ, j’ai été très surpris de voir un château au milieu des fleurs. Il dépassait à peine des lys blancs. On aurait pu marcher dessus sans faire attention. Plus je m’approchais, plus j’entendais du bruit… Je suis rentré à l’intérieur. J’y ai trouvé un tournoi de chevaliers et un banquet. Une vraie fête royale ! Plus tard, j’ai fait la connaissance de ses habitants. J’ai été fait chevalier moi aussi. Ici, je suis un héros. Je me suis installé au château. Le week-end, pendant les vacances et pour les fêtes, je vais voir ma famille. Je me sens plus fort qu’avant. Mais quand je suis loin du château, je me sens seul et sans amis. Mes frères continuent à m’embêter, mais moins qu’avant. Peut-être est-ce aussi parce que je m’aime un petit peu plus qu’avant ? Je me sens mieux dans mon cœur.


Au pays des histoires jamais vĂŠcues

par Lina et Zofia


Au pays des Histoires jamais vécues on rencontre surtout des histoires d’amour. La plupart se sont tout simplement trompées d’époque. Les gens qui auraient pu s’aimer ne se sont pas croisés au bon moment, au bon endroit, et leurs histoires n’ont jamais pu voir le jour. Les unes après les autres, elles se rassemblent dans un immense jardin suspendu quelque part entre le ciel et la Terre. Là, tout au long de la journée, à l’ombre des arbres ou sur les pelouses au Soleil, elles se racontent leurs vies imaginaires. Avec elles tout est possible puisqu’elles n’ont jamais existé. Parfois même leurs récits se mélangent. La dernière fois que j’ai voyagé là-bas, j’ai fait de belles rencontres. Un peu étranges aussi. Comme la jeune lapine amoureuse d’un chat noir. Lui, préférait un kangourou. Finalement, la lapine s’était mariée à un mouton. Ou encore une histoire d’escalier et de rampe électrique. Un petit escalier qui jouait avec une rampe électrique était tombé amoureux d’elle. Mais la rampe, elle, aimait un tapis coloré mexicain qui chantait bien et qui lui promettait un tour du monde. Comme si c’était un tapis volant ! Le petit escalier avait été secoué de jalousie et de haine. Mais à chaque tentative pour chasser le tapis, il échouait. Donc il avait finalement abandonné et décidé de déménager pour se marier avec… une lampe ! Je trouve cela dommage pour lui. Il était pourtant mignon avec son colimaçon. Mais, après tout, ce sont des histoires jamais vécues !


La chanson qui ne voulait pas ĂŞtre chantĂŠe

par Lola-Morgane


« Je ne veux pas qu’on me chante, m’a dit la chanson. Ramène-moi à la maison. » J’ai été très surpris qu’elle me demande cela, à moi, car je ne la connaissais presque pas. Et puis je n’avais aucune idée de l’endroit où elle pouvait bien vivre. J’ai fait comme si je ne l’entendais pas, j’ai continué à la fredonner, l’air de rien, mais en passant près d’un arbre, elle est devenue particulièrement insistante. « Emmène-moi dans la forêt, m’a-t-elle demandé. Trainer en ville ne me va pas du tout. - Pourquoi ne veux tu pas qu’on te chante ? - Je ne sonne pas bien, il faut que je sois dans la forêt. - Je ne te comprends pas. - Je veux être chantée ailleurs que dans la ville. » Elle était de plus en plus pressante. J’ai essayé de ne pas l’écouter mais elle insistait encore et encore. Jusqu’à ce que j’accepte. J’ai accepté juste pour pouvoir la chanter. « Au fait, comment t’appelles-tu ? - Je m’appelle « forêt ». - Ah ! C’est pour ça que tu ne sonnes pas bien dans la ville, il faut que tu sois dans une forêt. - Oui, tu as tout compris ! - Alors, nous allons trouver une forêt parfaite pour toi. Nous visitons plusieurs forêts mais elles ne lui conviennent pas. Après une très longue marche, nous atteignons la dernière forêt que je connaisse : des oiseaux qui chantent, des lapins et des écureuils qui s’amusent, des hiboux qui dorment d’un œil,… Elle m’a dit : « Cette forêt est parfaite, je te remercie, maintenant tu peux me chanter ! » J’ai chanté plusieurs fois la chanson et de plein de façons différentes. Puis est venu le moment de se séparer. On s’est dit au revoir. Je ne l’ai jamais revue mais j’ai toujours son air quelque part dans un coin de ma tête…


Le cimetière des mers oubliÊes

par Marco et Auguste


Toutes les mers qui autrefois peuplaient la Terre se sont envolées. Elles aimeraient bien revenir mais le monde a tant changé depuis l’époque préhistorique qu’elles ne savent plus très bien où elles vivaient. Là où poussaient des algues, voici maintenant une cathédrale, une montagne et des milliers de petits villages. Alors, inlassablement, dans le ciel, elles tournent, avec leur cargaison de fantômes et de monstres suspendus. Car tous les ont suivies dans les cieux. Les rebelles, ceux qui n’ont pas voulu quitter le sable, ont été transformés en pierre. Ils s’appellent fossiles, ammonites ou trilobites, et, quand ils sont particulièrement beaux, on les conserve en bibliothèque, ou dans de grands tiroirs au fond des musées. C’est l’un d’entre eux qui m’a raconté leur histoire. « Tu me vois dur et froid, m’a-t-il dit quand je l’ai ramassé, mais il y a très longtemps, j’avais de longues épines rouges. Il y a très longtemps, je glissais sur le sable, souple et plus léger qu’une fleur. Il y a très longtemps, j’étais un oursin. Sers-moi dans ta main, et, si tu le veux, je t’emmènerai au pays qu’autrefois j’habitais, au moment où les mers vont nous quitter… » Je respire un bon coup, ferme les yeux et serre doucement l’espèce de pierre dans le creux de ma main. Je sens du sable chaud sous mes pieds maintenant déchaussés. Je rouvre les yeux et admire l’océan qui s’étend à perte de vue. J’observe le sable de la rive et remarque que l’oursin est tombé, et comme il l’avait dit, il est maintenant recouvert de longues épines rouges. « Je vais te raconter pourquoi les mers vont partir : le problème c’est que les mers se trouvent trop salées. Elles ont donc ordonné aux animaux de manger tout le sel sous peine de quitter la planète pour toujours. Malheureusement pour elles, les requins, les oiseaux marins, les plantes marines… tous ont refusé ! Les mers s’apprêtent à partir mais toi et moi savons maintenant qu’elles regretteront leur décision. Elles voudront revenir mais ne le pourront pas. Tu peux m’aider à les convaincre en allant leur parler… » Je m’approche de l’océan et hurle au vent : « Ca ne sert à rien de partir ! » Pas de réponse que l’écho de ma voix… Silence.


Puis, je vois les eaux qui s’élèvent devant moi. C’est le grand départ des mers. Avant qu’elles ne disparaissent complètement de ma vue en direction du cimetière, je crie à nouveau : « Si vous souhaitez revenir un jour, vous n’aurez qu’à venir chez moi. » Je rassure l’oursin, le laisse tomber de ma main et ferme à nouveau les yeux. Je me retrouve devant chez moi, et constate amusé que ma maison est remplie d’eau. Toutes les mers oubliées s’y sont installées. Finalement, elles ont changé d’avis, elles sont revenues. Bon… Ca ne va pas être très pratique, je vais commencer par m’acheter des palmes.


Le pays des histoires jamais vĂŠcues

par Margaret


La plupart des histoires se sont tout simplement trompées d’époque. Les gens ne se sont pas croisés au bon moment, au bon endroit, et leurs histoires n’ont jamais pu voir le jour. Les unes après les autres, elles se rassemblent dans un immense jardin suspendu quelque part entre le ciel et la Terre. Là, tout au long de la journée, à l’ombre des arbres ou sur les pelouses au Soleil, elles se racontent leurs vies imaginaires. Avec elles tout est possible puisqu’elles n’ont jamais existé. Parfois même leurs récits se mélangent. La dernière fois que je me suis promenée là-bas, je suis tombée sur un mur. Comme j’étais un peu fatiguée, je m’y suis appuyée. Et je suis passée au travers ! J’ai atterri devant un château. Intriguée je suis rentrée à l’intérieur. Et là, à ma plus grande surprise, j’ai vu des millions de livres qui se promenaient. Ils m’ont tous vue ! J’ai eu peur et me suis dit qu’ils allaient me torturer ou je ne sais quoi… Mais, au lieu de cela, ils m’ont reçue comme une reine ! En découvrant ce château, j’ai rencontré un ours jongleur. J’ai été impressionnée par sa technique ! Il m’a raconté son histoire : il voulait apprendre à jongler, il avait demandé à plusieurs animaux qui avaient tous refusé. Le grand lion, le petit éléphant,… Finalement, c’est Kiki le singe qui lui avait appris à jongler et à réaliser des tours incroyables ! Depuis ce jour, ils sont meilleurs amis et ne se quittent jamais. L’ours jongleur est devenu mon meilleur ami à moi ! Je lui ai donné un surnom : Nounours. Dans ce pays, on m’appelle « le vrai ». Je pense que c’est parce que mon Histoire est vraiment vécue. Maintenant cela fait trois mois que je vis au château. Un jour, j’ai rencontré le chef du pays des Histoires jamais vécues. Il s’appelle le Loup Tueur. Brrr… Je pense qu’il est chef parce que tout le monde a peur de lui ! Et pour cause : il passait son temps à massacrer tout ce qu’il croisait.


La police l’avait finalement arrêté mais il avait réussi à s’échapper en grignotant les barreaux du cachot. Puis, il avait disparu dans la nature. Comme ça… Quand je l’ai vu devant moi, il m’a dit d’une voix glaciale : « Tu n’a plus le droit de rester ici ! Ton histoire est vécue…» Et il m’a ordonné de quitter le pays. J’ai dû retourner chez moi. Mais je ne me suis pas laissée faire : j’ai inventé ma propre Histoire jamais vécue. Elle a été acceptée par le chef. Ouf ! Je n’ai plus jamais quitté le pays des Histoires jamais vécues. Quelle était mon histoire ? Celle d’une petite fille qui veut accomplir ses rêves coûte que coûte et qui y parvient !


Le petit château dans les fleurs

par Mathis et Fayssal


Un petit château a poussé dans les fleurs. « C’est une mauvaise herbe, a dit le jardinier. Il faut l’arracher. -Sûrement pas. Ai-je pensé. » Je n’ai rien dit, j’ai attendu la nuit tombée, j’ai pris une bêche, et discrètement, je l’ai arraché. Tout au fond de la forêt, je l’ai replanté. Autour de lui, des centaines de châteaux ont poussé : des châteaux de cartes, des châteaux d’eau, des chapiteaux, des châteaux de sable, des châteaux à chapeau,… Chaque jour, je vais les voir. Moi seul ai le droit d’entrer car je suis le seul à connaitre leur mot de passe : « rêve ». J’y entre, plein de curiosité… A l’intérieur du château, je vois : une grande table (recouverte de plans de guerre, de cartes tactiques), une couverture en peau d’ours, un marchand de bonbons... Je me sens bien ici. Dehors, je n’ai pas d’amis, ni de famille. Je retourne chez moi uniquement pour dormir. Le matin, quand je me lève, je vais chercher à manger pour mes nouveaux amis du château : des pains au chocolat, de la confiture, des croissants… Puis, je les rejoins au château de Versailles (c’est celui dans lequel je me sens le mieux) et on mange tous ensemble. Dans le château, je suis « homme à tout faire ». Quand quelqu’un demande quelque chose. Hop ! C’est fait. Je transporte qui veut sur mon dos, je fais les courses, la cuisine, je bricole des cabanes, je répare le château,… Bref, j’essaie d’être gentil avec tout le monde, surtout avec mes amis. Un jour, la Reine a quitté le château. Elle avait disparu… Bran le bas de combat ! Le Roi, les princes, les chevaliers, les cuisiniers, les marchands, les médecins,…


tout le monde s’est mis à sa recherche. Le Roi était très inquiet, terrifié même, il a beaucoup pleuré. Les gardes ont essayé de le consoler mais sans y arriver. Tout le monde croyait que la Reine avait été kidnappée. Ca a duré deux jours… Finalement, la Reine était cachée chez moi. Elle voulait seulement savoir comment le roi réagirait si elle venait à disparaître pour de vrai. Elle a été rassurée par l’amour qu’il lui portait. Elle en était sûre : il ferait tout pour la retrouver, avec l’aide de tous les habitants du château. J’ai décidé de la ramener au château. Sur le chemin du retour, nous avons été arrêtés par une bande de voyous. Ils voulaient de l’argent ou des bijoux. Mais nous avons appelé les gardes qui nous ont entendus et sont intervenus. Le Roi est maintenant rassuré, il a récupéré son amour. On me remercie pour avoir retrouvé et protégé la Reine. On me remercie pour avoir permis l’arrestation des voyous. Le Roi m’a demandé de rester et a fait de moi… … un Prince.


La chanson qui ne voulait pas ĂŞtre chantĂŠe

par Oriano


« Je ne veux pas qu’on me chante, m’a dit la chanson. Ramène-moi à la maison. » J’ai été très surpris qu’elle me demande cela, à moi, car je ne la connaissais presque pas. Et puis je n’avais aucune idée de l’endroit où elle pouvait bien vivre. J’ai fait comme si je ne l’entendais pas, j’ai continué à la fredonner, l’air de rien, mais en passant près d’un arbre, elle est devenue particulièrement insistante. « Emmène-moi dans la forêt, m’a-t-elle demandé. Trainer en ville ne me va pas du tout. » Alors je l’ai emmenée dans la forêt la plus proche. Une fois arrivée, la chanson m’a dit : « cette forêt ne me va pas du tout, elle est trop sombre ! » Donc nous sommes allés dans une autre forêt et là, la chanson ma dit : « celle-ci est trop lumineuse ! » Nous sommes allés à la mer, à la campagne, à la montagne… On a fait des kilomètres et des kilomètres. Mais rien ne correspondait à ce qu’elle cherchait. Les vacances étaient maintenant terminées. J’étais épuisé. Je suis allé me coucher mais la chanson, elle, n’arrivait pas à dormir. Je lui ai demandé ce qui n’allait pas. « Je repense à ce qui m’est arrivé autrefois. Il s’appelait Nicolas, c’était mon compositeur. Nous devions participer à notre premier concert. Nous avions le trac tous les deux. Tout commençait pourtant bien mais, au milieu du premier couplet, il s’est brusquement arrêté de chanter. Tout est devenu silencieux. Nous, le public,… Il m’avait oublié ! Le blanc. Ca a été une honte terrible... Depuis ce jour, je ne souhaite plus que qui que ce soit me chante. » Une bonne partie de la nuit, j’ai essayé de trouver une solution pour l’aider.


En vain. J’ai fini par m’endormir de fatigue. J’ai fait un rêve étrange dans lequel je connaissais la chanson par cœur, je la chantais même en entier avec une grande facilité. Quand je me suis réveillé, j’ai crié en sursautant « j’ai trouvé, j’ai trouve ! ». J’ai pris la chanson avec moi et je suis vite parti à l’école. Sur le chemin de l’école, je me suis repassé la chanson en boucle dans ma tête. Pour être sûr de ne pas l’oublier. En classe aujourd’hui, c’est le jour des récitations de poésie. J’ai voulu passer le premier. J’ai eu la meilleure note. « Que s’est-il passé ? -Je t’ai chantée et… on a eu beaucoup de succès ! La chanson a été très fière. D’elle et de moi. Maintenant, avec moi, j’ai une chanson qui veut être chantée.


Le pays des grandes dĂŠcisions

par Rislain


Je n’aime pas du tout le pays des grandes décisions. Là-bas, tout le monde est sérieux. On ne s’amuse jamais. La dernière que j’y suis allé, j’ai fait un très mauvais voyage. A peine arrivé, je me suis retrouvé enfermé dans une grande pièce sombre. Une sorte de palais antique rempli de juges qui aussitôt m’ont pris à partie. Ils voulaient connaitre mon opinion, savoir ce que j’allais faire, ce que j’allais décider. A mes côtés, se trouvait une énorme balance. Tous me demandaient de peser le pour et le contre. Chacun me soufflait à l’oreille un avis différent… Moi, je ne voulais pas décider quoi que ce soit. Et aucun de leurs avis ne me plaisait. J’ai annoncé que je souhaitais rentrer chez moi mais les juges m’ont dit que ce n’était pas possible, qu’il fallait que je décide. Quoi que ce soit, voire n’importe quoi ! Ils m’ont laissé dans cette pièce sombre. Je me suis aperçu que, dans cette pièce, à côté de moi, il y avait un autre garçon. Comme moi, il était juste de passage pour ses vacances. Nous avons discuté de ce qui se passerait si nous ne prenions pas de décisions. Apparemment, le pays s’effondrerait, comme ça ! Une catastrophe quoi : des habitants furieux, un pays en ruines,… Et pourtant, c’est ce que nous avons fait. Effectivement, cela a été le chaos : des cris, des hurlements, des CRAC, des BOUM,… Plus de juges, plus de garçon à mes côtés. Plus que moi, plus que mo, plus que m, plus que… Plus rien.


Le semeur de vagues

par Sophie


J’ai tellement nagé qu’au sommet d’une vague je me suis endormie. Quelques semaines, j’ai dérivé, sans m’en apercevoir, et me suis réveillée chez le Semeur de vagues. A l’endroit même où le ciel et la mer se rencontrent. De là, on peut voir tout ce qui se passe sur Terre. Comme une île. L’île des Retrouvailles. « Puisque je suis ici, me suis-je dit, autant être utile. Je vais regarder ce dont le monde a besoin. » J’ai commencé par aider les enfants. J’ai d’abord crée un pont qui relie la Terre à mon île. Je me suis rendue à l’école (transformée en nouvelle élève évidemment) et suis rentrée dans une classe. Tous mes nouveaux camarades me regardaient… Pour les aider à comprendre les consignes, je leur envoie des pensées énergétiques, comme des ondes. Assez rapidement, tous les enfants de la Terre sont devenus intelligents. Je me suis ensuite penchée sur un petit garçon qui avait l’air triste : « personne n’est arrivé à trouver un remède pour me rendre heureux » m’a-t-il dit. Je lui parle de l’île des Retrouvailles et lui explique que, sur cette île, on peut trouver tout ce qu’on a perdu ou tout ce que l’on n’a jamais eu… « Je voudrais tellement retrouver mon sourire » dit le petit garçon. Une fois arrivé sur l’île, le petit garçon a fait un vœu. Il a sorti une pièce de sa poche mais je lui ai dit que ce n’était pas nécessaire. Puis, nous avons attendu un moment, en silence. Après un temps, il a senti comme une vague de chaleur à l‘intérieur de lui. Sa bouche s’est ouverte, elle avait aussi la forme d’une vague. Il m’a souri. Je l’ai installé au sommet d’une vague pour qu’il rentre chez lui. Il devait être bien, car il s’est endormi… C’est maintenant à son tour de semer une vague.


La fête des creux

par Théodore


J’ai été très déçu par la fête des Creux. Jamais de ma vie je ne me suis autant ennuyé. Cette étrange célébration a lieu tous les ans, dans un gigantesque trou, aux alentours du mois de Janvier. C’est un pays parfaitement vide dans lequel tous les Creux du monde se rassemblent. Creux du dos, des mains, des routes, creux des conversations, des tasses, des verres… Tous s’y retrouvent. Il ne s’y passe à vrai dire pas grand-chose. Le but étant d’être le plus vide possible, les Creux n’ont évidemment pas beaucoup à partager. Ils ne mangent rien, ne s’offrent rien, et, pendant des heures, tiennent des propos tout à fait inintéressants. Pour passer le temps je ferme les yeux et j’écoute des Creux de mémoire qui viennent de se rencontrer : « Salut, ça va ? - Heu… je crois. Et toi ? - Peut être. Comment t’appelles-tu ? - Mmm… j’ai oublié. - Bon. On se revoit ? - Je ne sais pas trop -…» Puis ils se séparent, et repartent avec la mémoire creuse. Comme moi, je ne me souviens déjà plus de rien. A creuser… Je rouvre les yeux et je vois un Trou couronné. Sa couronne est vide, très vide. Il semble que ce soit le gagnant de la soirée. Le plus creux de tous. Plus loin, je vois des Creux de vagues se courir après : ils roulent sous les tables, ils noient le poisson, ils remplissent les Creux de tasses, ils bousculent des vieilles rides qui en perdent l’équilibre. Ils sont punis par leur père, un Creux de tsunami. Je n’aurais jamais dû venir à la fête des Creux. Il est temps de partir. En quittant la fête, je passe devant un miroir et me regarde. Mes mains ne sont plus là, mes jambes non plus. Ma tête est vide. Je suis un creux.


J’habite dans une vache

par Youva


Je me reposais dans un champ, au retour de l’école, et une énorme vache est venue s’asseoir sur moi, en plein sur ma tête. Comme je suis tout petit, j’ai pénétré sans aucune difficulté dans son gros corps… Je me réveille. Il fait noir. Il fait chaud. J’ai un peu peur. Mes mains sont gluantes, tout autour de moi est gluant. Il n’y a pas de bruit. Je me redresse et commence à marcher. Je rencontre un veau. Ma première question est de lui demander ce qu’on peut bien manger ici. Il me répond qu’on mange la même chose que la vache : de l’herbe, principalement. Moi, je n’aime pas l’herbe. Heureusement, j’ai toujours une « Vache qui rit » dans la poche. Je la fais goûter au veau. Il trouve ça bon ! S’il savait ce que c’est… Il m’entraîne à l’intérieur du corps de sa mère, il veut me montrer ce que l’on peut voir par les yeux de la vache. Puis, il me fait visiter : le ventre, le cerveau, les dents,… Et si on jouait à « cache-cache » ? C’est à moi de compter car je suis l’invité ici. Décompte… Où es-tu ? Il faut maintenant que je parte. Habiter dans une vache, ce n’est pas pour moi. Veau et moi, nous nous séparons.


Le cimetière des mers oubliées

par Zoï Meï


Toutes les mers qui autrefois peuplaient la Terre se sont envolées. Elles aimeraient bien revenir mais le monde a tant changé depuis l’époque préhistorique qu’elles ne savent plus très bien où elles vivaient. Là où poussaient des algues, voici maintenant une cathédrale, une montagne et des milliers de petits villages. Alors, inlassablement, dans le ciel, elles tournent, avec leur cargaison de fantômes et de monstres suspendus. Car tous les ont suivis dans les cieux. Les rebelles, ceux qui n’ont pas voulu quitter le sable, ont été transformés en pierre. Ils s’appellent fossiles, ammonites ou trilobites, et, quand ils sont particulièrement beaux, on les conserve en bibliothèque, ou dans de grands tiroirs au fond des musées. C’est l’un d’entre eux qui m’a raconté leur histoire. « Tu me vois dur et froid, m’a-t’il dit quand je l’ai ramassé, mais il y a très longtemps, j’avais de longues épines rouges. Il y a très longtemps, je glissais sur le sable, souple et plus léger qu’une fleur. Il y a très longtemps, j’étais un oursin. Sers-moi dans ta main, et, si tu le veux, je t’emmènerai au pays qu’autrefois j’habitais… » Je ferme les yeux, et, en un clin d’œil, je me retrouve allongée dans le sable, chaud et brillant. Le doux murmure de l’eau me berce. Une petite vague vient me lécher les pieds. J’ouvre les yeux, je suis maintenant dans un énorme cimetière, sous un soleil brûlant. De grandes étendues d’eau s’étirent à perte de vue. J’avance dans l’eau peu profonde. De milliers de petites bêtes que je ne connais pas nagent en me chatouillant les pieds. J’entends une voix. C’est le fossile qui me parle. Il va me raconter l’histoire des mers oubliées. Je m’assois sur le sable et écoute attentivement : « Il y a longtemps, toutes ces mers peuplaient la terre. Mais les hommes ont tellement repoussé la nature, que les mers ont décidé de partir. Maintenant elles regrettent leur décision, car elles se plaisaient bien sur terre. Aujourd’hui, il n’y a plus de place, car de nouvelles mers se sont formées au fil des ans. » Ces mers dont me parle l’oursin, et qui s’étaient tenues à l’écart jusqu’à maintenant, s’approchent et viennent se présenter. Elles s’appellent Noi, Ranné, Man, Dité, Ge et Mo. Elles ont l’air triste et me murmurent de les aider. J’ai besoin de réfléchir, un moment à l’écart… Sur terre, il y a déjà les mers Rte, Re, Mé, Che et Bou. Une idée me passe par la tête : si les mers se mélangeaient, elles pourraient vivre ensemble !


Les mers ont été très enthousiasmées et ont tout de suite accepté. Mo est partie vivre avec Rte. Mé, Dité et Ranné sont devenues très amies. Noi et Re sont heureuses depuis qu’elles se sont rencontrées. Man et Che sont ensemble ; quant à Rou et Ge, elles s’adorent. Je suis très heureuse pour elles. Maintenant, quand je pars à la mer, je m’allonge sur le sable, j’écoute le murmure de l’eau. Parfois, j’ai l’impression qu’elles me disent « Merci ! »


16 classes de CM1, CM2 et 6è ont lu, rencontré et écrit avec : A4-cmjn-VECTO.indd 1

Guillaume Guéraud Yves Grevet Pascal Vatinel Hervé Walbecq

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