9 minute read

ELEVAGE Le travail à la longe (II

Le travail à la longe (II)

L’aspect technique

Dans le numéro précédent de ce journal, nous avons décrit tous les bienfaits du travail à la longe. Nous allons maintenant entreprendre l’aspect technique de ce sujet : le matériel, le terrain de travail, le cercle idéal, le cercle parfait…

Le matériel

La longe : durant la plus grande partie de ma carrière, j’ai longé quotidiennement avec une longe plate, jusqu’au jour où j’ai découvert l’emploi de la longe ronde (ou corde) que je n’ai plus quittée. On en trouve de très bonne qualité dans les bonnes selleries sous le nom de « longe éthologique ». Il vaut mieux la commander sur mesure car la longueur idéale est de 6m et elle ne se trouve pas toujours de série. La longe ronde tient mieux en main que la plate et son poids supérieur engendre une meilleure connexion.

Le licol éthologique est avantageux dans le sens où les cordes qui le composent sont fines et exercent des pressions plus fortes sur la tête du cheval, en vertu du principe de physique qui veut que « la pression exercée soit inversement proportionnelle à la surface sur laquelle elle s’exerce ». Avec un cheval pas trop fort, un licol normal peut très bien faire l’affaire, ou bien un caveçon.

Le bridon : il faut choisir un mors de filet simple à assez gros canons. Le bridon doit être bien ajusté à la tête de votre cheval. Le mors ne doit pas plisser la commissure des lèvres, mais il ne doit surtout pas être ajusté trop bas, afin que le poulain ne passe pas la langue au-dessus. L’ajustement de la muserolle est lui aussi capital : la muserolle française doit se situer juste au-dessous de l’apophyse zygomatique du cheval et ne jamais être trop serrée ; elle doit juste être « en contact ». On ne serre jamais une muserole ! Si la muserolle est trop basse, lorsque le mors agit, la lèvre est pincée entre le mors et la muserolle, ce qui est très douloureux pour le cheval. Lorsqu’on bride un jeune cheval pour la première fois, il faut allonger le montant gauche du bridon afin de faciliter le passage de la têtière au-dessus des oreilles, ensuite on l’ajuste rapidement. Certains chevaux sont très sensibles au passage des oreilles au début de leur apprentissage. Très important : on ne branche jamais la longe sur le bridon tant que le cheval ne tourne pas parfaitement au licol éthologique (5 ou 6 séances). C’est une règle qui ne peut jamais être transgressée. Le bridon peut être posé sur la tête du poulain dès la 2ème ou 3ème séance, mais le licol éthologique doit être posé par-dessus et la longe ne doit agir que sur le licol. Seulement lorsque le cheval tourne parfaitement au licol et aux deux mains, on profite d’une séance particulièrement calme pour fixer la longe au bridon selon le système Colbert, c’est-à-dire que si l’on est à main gauche, on passe la longe dans l’anneau du filet gauche, puis au-dessus de la nuque, et on l’attache ensuite à l’anneau droit. On fait évidemment l’inverse à main droite. Passer la longe dans l’anneau, puis sous le menton et attacher à l’anneau extérieur provoque un mouvement de tenaille sur la mandibule inférieure, ce qui est très douloureux. Un cheval qui a mal n’apprend rien ! De plus vous risquez de devenir son ennemi alors que le but de l’apprentissage est que l’homme et le cheval s’estiment mutuellement.

La première fois que l’on branche la longe sur le bridon (en Colbert), le cheval doit être en fin de séance et bien détendu ; il faudra se contenter de très peu et être très doux avec les aides. S’il fait quelques tours correctement à chaque main, vous avez gagné et votre élève a gagné son écurie… La chambrière : elle doit être longue, souple et en parfait état. C’est elle qui dirige l’impulsion et qui remplace la jambe du cavalier. Il n’y a pas deux chevaux au monde qui réagissent de la même manière à la chambrière. Certains y sont peu sensibles et il faut parfois leur appliquer énergiquement la chambrière sur les fesses pour leur faire comprendre qu’il faut avancer. A l’opposé, il existe des chevaux terrorisés par la chambrière et qui entrent en transe dès que vous la bougez. Avec ces derniers, vous devez entreprendre progressivement des exercices de DESENSIBILISATION que maîtrisent si bien nos amis adeptes de l’équitation « naturelle » ou « éthologique ». Après une semaine, vous devez être capable de déposer la partie souple de la chambrière sur tout le corps du cheval sans que ce dernier ne s’énerve. Il est important de pouvoir employer la chambrière avec n’importe quel cheval. Puisque nous évoquons le cas du cheval très sensible, sachez que ce type de cheval vous demandera trois fois plus de travail qu’un autre mais sans doute qu’au bout du chemin, il vous donnera dix fois plus de satisfaction qu’un autre… C’est à cette occasion que votre intelligence, votre patience et votre tact seront mis à l’épreuve. Avec l’évolution actuelle du sport et la sélection de chevaux de plus en plus compétitifs, cette catégorie de chevaux « sensibles » va en augmentant. S’ils tombent en de mauvaises mains, tout est perdu en très peu de temps, des trésors sont ainsi détruits…

Le rôle de la chambrière est d’entretenir l’impulsion et le mouvement vers l’avant. Elle joue aussi le même rôle que la jambe du cavalier et règle le pli du corps du cheval. Un bon longeur doit être capable de toucher à tout moment avec précision et finesse, tous les endroits du corps du cheval afin de rectifier le mouvement ou la posture ; toucher l’épaule est souvent utile pour donner du pli ou remettre un cheval sur le cercle.

Le terrain de travail

Même si l’on peut admettre qu’un cheval puisse être longé à n’importe quel endroit, il faut être conscient que pour un travail parfait, le terrain sur lequel on longe est très important. Le sol en sable est idéal, il doit être de bonne qualité, bien drainé, surtout pas trop profond et bien entretenu, c’est-à-dire hersé fréquemment. La qualité de sol doit aider le cheval dans ses mouvements et surtout ne pas être une entrave à son déplacement. Chaque éleveur devrait disposer d’un bon paddock doté d’un sol bien drainé et clôturé en lisses de bois, les dimensions idéales sont 15m x 30m avec les coins arrondis. des opérations qui seraient périlleuses dans une grande prairie. Cela dit, une fois que le cheval sera capable de réaliser les exercices de base à la longe dans le paddock (après 4 à 6 semaines), il sera intéressant de le longer dans une grande piste afin de réaliser les exercices décrits plus loin. S’il est connecté, même au milieu d’un champ de cent hectares, vous le bougerez sans problème.

Le cercle idéal

Un cheval qui travaille parfaitement à la longe décrit un cercle parfait et son corps s’inscrit parfaitement sur l’arc du cercle depuis le bout de son nez jusqu’au bout de la queue.

Le longeur n’est jamais statique au milieu du cercle mais marche toujours vers le centre de gravité du cheval (qui se trouve au niveau de la sangle), se déplaçant ainsi par un petit cercle concentrique. Seul un très bon longeur avec un cheval bien connecté est capable de produire des cercles parfaits. Les plus grands défauts constatés sont : - Le cercle qui n’est pas un vrai cercle mais plutôt une sorte d’ellipsoïde - La longe qui se détend - Le cheval qui change de rythme - Le cheval qui penche vers l’intérieur - Le cheval dont les épaules et/ou les hanches ne sont pas sur le cercle - Le cheval qui tire exagérément vers l’extérieur.

Un cheval novice ou non connecté a tendance à tirer vers la sortie et à sortir du cercle de ce côté, alors qu’à l’opposé du cercle, il détend la longe et rentre dans la courbe. Le centre d’intérêt du cheval n’est pas son longeur mais la sortie, en résumé il n’est pas connecté.

Le cercle idéal

Zone où le cheval met trop de tension

La connexion

Zone où le cheval ne met plus assez de tension

Un cheval est connecté quand il ne pense qu’à faire ce que vous souhaitez et quand vous-même et le contact de la longe sont ses seuls centres d’intérêt. Avec un cheval bien connecté, la tension de la longe est rigoureusement la même sur toute la longueur du cercle. Si la tension change ou si la longe se détend, vous n’êtes pas connecté.

Combien de temps faut-il pour connecter un cheval ? Si vous avez de l’expérience, un début de connexion s’installe déjà lors de la première séance de longe d’un cheval vert. Après trois séances, le cheval est déjà assez bien connecté. Si vous n’avez aucune expérience, c’est le cheval qui va vous bouger ! Mais ce n’est pas grave, lancez-vous sans complexe en faisant fonctionner votre intelligence. Vous observerez vite que le cheval qui résiste, qui tire très fort et ne pousse pas vers l’avant est celui qui met son jarret intérieur à l’intérieur du cercle et utilise le principe du « bras de fer ». Nous verrons plus tard par quels exercices on peut remédier à ce défaut.

Dernière remarque : un cheval bien connecté prend son temps pour poser ses pieds, s’il précipite le mouvement de ses jambes, il n’est pas connecté.

La mauvaise attitude la plus souvent rencontrée

Épaule extérieure en dehors du cercle

Postérieur interne en dedans du cercle

Trop de pli de l’encolure

Autre mauvaise attitude du cheval sur le cercle

Le cheval prend un pli contraire à celui du cercle

L’objectif intermédiaire

Une fois que vous arrivez à décrire des cercles parfaits aux deux mains, avec du rythme et un cheval parfaitement relâché, vous pouvez être satisfait et vous avez déjà bien travaillé. Mais ne croyez pas que tous vos objectifs à la longe sont atteints : vous avez simplement installé les bases et le vrai travail va commencer avec les exercices que nous étudierons dans le numéro suivant de ce magazine.

Daniel Boudrenghien

Bulletin d’Information édité par la Société Royale “Le cheval de sport belge” asbl Studbook SBS

Avenue Prince de Liège 103 bte 4 5100 NAMUR (Jambes) - Belgique Tel. : +32 81 330 660 (9 à 12 h de préférence) Fax : +32 81 330 666 TVA : BE 0408 630 613 Website : www.sbsnet.be e-mail : sbs@sbsnet.be Editeur responsable M. Marcel POULAIN Rue des En Hauts, 43 à 7070 Le Roeulx Président : M. Marcel POULAIN Vice-Président : M. Jacques FRASELLE Secrétaire général : Dr Marc PIERSON Trésorier: Dr Jan STERKX Membres : M. Daniel BOUDRENGHIEN M. Francis CARLENS Dr Benoît DEVILLERS M. Ludovic HAMMER Mme Annick LANGENSCHEID Dr Patrick MAHIEU M. Christophe MAYERUS Mme Laurence MEUNIER

Responsable administrative : Mme Anne-Françoise FABRY Secrétariat : Mme Nyssia RENS Chargée des Relations internationales : Mme Morgane LIBOTTE Rédaction et Communication : Mme Christine RASIR Webmaster : Mme Christel AGRAMME Graphisme : Créastyl Concept srl • www.creastyl.be Traduction : Mme Patricia BORGENON Compte financier : 250-0090000-69 IBAN BE71 2500 0900 0069 BIC GEBABEBB Cotisation annuelle (HTVA 6%) : 75 € (Belgique) • 90 € (Europe) 145 US $ (reste du monde)