Journal de la meute, numéro 5

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SOMMAIRE ARTICLES « La littérature jeunesse » doit-elle rentrer dans les salles de classe algérienne ?, Sidou TELDJA………………25 Livre papier, Mouna SAIGHI..….…….…27 Camille Claudel, un génie emmuré, Amina BENBOURECHE ………………….. 32 DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres Sur quoi porte le discours sur les Déclin des lettres ?, Lydia SAIDI…..………………6 Histoire & Déclin, Yanis GUENANE…..6 Délices illicites du déclin, Lyes REZKINI…………………………………………….7

Un nouveau genre : Le Steampunk !, Khalil Djebbari…………………………………16 Avenir de la Littérature, Lydia ABERRANE ……………………………………..18 Petites annonces : Meute compagny, Lydia ABERRANE, Lydia SAIDI, Lyes REZKINI, Myriam NIBOUCHA, Yanis GUENANE………………………………………..21 ESSAIS Mienne mon être, Nassim ACHOUR .. 4 Ecrire pour exister, Ly Ab ………….…… 26 La Nuit, K.M ………….…………………………29

Quelles conséquences pour une mort de la littérature ?, Lydia SAIDI…………..9

Parce que l’obscurité nourrit les peurs, Djedjiga B ………………………..…………… 30

Discours sur le déclin du Journalisme, Salah BOUZ……………………………………..11

Le Dépravé, Yanis BEN ……………………31

Comment se porte la littérature ailleurs ?

Mère, R.H ……………………..……………….35 POESIE

- Littérature hispanophone, Myriam

« Adjoun », Nadia Laroussi………………34

NIBOUCHA ……….……………. 13

ART PICTURAL

- Littérature russe, Reira FLOYD .…………………………… 13

Collage : Nabila IKEN ……………………. 26 Photographie : Houssem MOK ……. 30

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EDITO Chers lecteurs, Nous sommes contents de vous retrouver après une longue absence ! Ce numéro a été produit depuis plusieurs mois mais n’a pas eu l’occasion d’être porté à la connaissance du publique jusqu’au jour d’aujourd’hui. En effet, les loups se sont fixés comme objectif d’offrir la 9ème édition d’Une Meute littéraire aux loups de Tizi-Ouzou. Ce passage à l’inter-wilaya ne s’est pas fait sans mal. Et c’est pour cela que nous sommes heureux que vous puissiez enfin lire ces lignes ! Entre temps, des choses ont changé dans les coulisses de La Meute. Un nouveau concept est né, et de nouveaux loups se sont joints à notre équipe pour consolider cette dernière. En vue de tous les changements opérés, nous comptons bientôt produire des horsséries du journal pour vous tenir au courant de nos avancements. Par ailleurs, nous traiterons cette fois-ci d’une thématique à l’actualité poignante, à savoir, le fameux Déclin des Lettres. Ce phénomène dont on parle de plus en plus est l’objet de tous les discours. Les accusés, les victimes et les témoins passeront un à un à la barre dans ce numéro qui tentera d’élucider ce délit commis contre la littérature. Enfin, l’évolution de ce journal se fait de plus en plus sentir. Nous recevons de plus en plus d’articles, que nous n’avons pas pu publier en intégralité cette fois-ci mais que nous promettons de garder pour de prochains numéros. Pour conclure, j’adresse de vifs remerciements à l’Institut Français et plus particulièrement à Monsieur Alik, responsable du bureau du livre pour l’aide précieuse qu’ils nous fournissent. On ne saurait omettre de citer le directeur de la bibliothèque « Les Figuiers » de Tizi-Ouzou pour son accueil et sa confiance aux jeunes assoiffés de mots que nous sommes. Bonne lecture !

Membres permanents

Lydia SAIDI

Lydia ABERRANE

Lyes REZKINI

Yanis GUENANE

TABTI Z.Y

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Mienne mon être La sensation d’exister. Voilà ce dont je me rappelle à l’approche des vagues étranges qui envahirent ma plume à écorcher. J’écorche la vie de mes mots en m’effleurant l’esprit de douces caresses à repos. Décrire les firmaments de mon être tout en les broyant à néant avec l’écriture me rend plus vivace, moins vivant, plus violent, moins vivant, plus sauvage, MOINS VIVANT ! La vie existe par violence, et je me dois d’être violent pour contenir les pulsations intransigeantes de notre mère obscène à tous : la vie. Je regarde subrepticement à droite, à gauche, je lorgne les miroirs de l’esprit, le mien, et je m’aperçois que je suis multiple. S’opère alors un enchaînement de causes à effets surprenantes pour une âme aguerrie comme la mienne ; je respire, je mange, je parle ; je marche, je touche, je goûte ; avec les autres, à travers les autres, dans les autres ; suis-je les autres ? La folie est de penser que mon existence est unique, cloisonnée entre les briques de mes désirs égocentriques ; je me surprends devant les autres, ces parties déconstructives de mon être, mais pas moins constitutives de mes envies, et je gloutonne les masses graisseuses de l’existence à leur côté. Je suis vivant. Je ne sais pas le réel de l’existence, son sens et son but, mais je sais tout au plus qu’elle veut mon annihilation : mère de l’aethuse, nous as-tu fait pour nous plonger dans le néant ? Une giclée ’idéologies,

de doctrines et de courants, de religions, de prophéties et de conjectures, donne des réponses aussi diverses que contradictoires. Je repars de zéro. Je repense à tout ce que je sais, à tout ce que j’ai pu savoir, et je me renfloue vers moi-même par le trou contigu de la folie. Je souffle dedans moi, et ressort l’aliénation pérégrine dont je ne savais que peu. Je suis l’existence à même de savoir ce qu’est le réel de la vie, mais je me perds souvent et que trop facilement dans les dédales de mes sensations, de mes folies, de mes aspirations. Je suis percevant, mais aucunement existant, car devant les autres, je perçois, mais ne ressens incurablement mon être dans le monde. Au contraire, je me sens isolé, dépassé, englouti, telles les racines suivant chacune sa ramification propre dans ces entrailles miasmatiques de la terre boueuse et nourricière ; tous d’une même origine, aucun dans la même direction : voici ce que ma propre perception me renvoie, voilà ce que ma propre vision m’incorpore d’être. Ne pas êtres. L’assujettissement est plus une obligation qu’un devoir, mais qui le sait encore sachant tous ces assujettis qui croient devoir quand on les oblige ? Nous fûmes les amnésiques d’un temps creux où nous nous sommes laissés et se laisseront encore mener jusqu’à notre aurore, pour ne percevoir après que pénombre. Par : Nassim Achour.

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DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres

Sur quoi porte le discours relatif au déclin des lettres ? Et si la littérature était en train de mourir ? Voila la nouvelle et alarmante question qui fait l’actualité des milieux littéraires. Le discours sur le déclin de la littérature s’est prononcé sur plusieurs siècles. Toutefois, en ce début du 21éme siècle, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour attester d’une mort ou du moins d’une agonie de la littérature. Aujourd’hui, ce déclin se fait sentir par l’essoufflement du roman français et l’attente d’un quelconque chef-d’œuvre qui n’arrive pas, qui n’arrive plus. On dénonce le manque de littérarité, le vide et l’auto centration du nouvel

auteur. Selon ces critiques, la littérature actuelle ne serait plus en mesure de dire le monde. Rongée par le doute, elle fait preuve d’un manque de clairvoyance et d’incapacité à l’analyse. Le nouveau discours sur le déclin lettres n’est pas seulement une critique littéraire, elle devient sociale, politique et économique. C’est la critique d’une société « hypermoderne », une société de consommation où l’on est appelé à « consommer plus et penser moins, en attendant la mort » et où le livre n’est devenu qu’un simple produit comme un autre, à la merci des lois du marché.

Les phénomènes historiques ayant fait le lit au déclin « L’œuvre surgit dans son temps et de son temps, mais elle devient œuvre d’art par ce qui lui échappe. », André Malraux.

Depuis, au moins, l’Antiquité, la philosophie s’interroge sur la nature de l’art, il y est décrit comme le système des enseignements universels, vrais, utiles, partagés par tous, tendant vers une seule et même fin. Le déclin de l’art moderne est le résultat des horreurs du XXème siècle, ce qui plongea les artistes et le reste de la société dans la crainte et le désespoir, il est notamment dû à la perte de

valeurs et de traditions séculaires, remplacées par peu de substance, intellectuelle et culturelle, offerte à la place. La première et deuxième guerre mondiales

ont favorisé l’émergence de nombreux nouveaux mouvements artistiques, cependant la plupart des artistes impliqués dans ces mouvements ont déplacé leur base d’activité aux Etats-Unis pour éviter les ravages de la guerre. Après la guerre, le centre de gravité du monde de l’art s’est vu effectivement déplacé de l’Europe vers l’AmériqueLes artistes européens ont fortement interagi avec la jeune génération d’artistes américains, qui on absorbé les dernières tendances de l’art européen d’avant-garde. De nos jours, pour beaucoup de chercheurs, la littérature n’entrerait plus en relation significative

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DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres avec le monde, ce constat ne concerne pas la production littéraire en elle-même mais son statut dans la société, jadis elle faisait office d’informateur et de guide de nos sociétés, car elle faisait revivre les passés lointains dans le présent, elle fustigeait la mauvaise gouvernance de nos chefs, elle se faisait libératrice. Le déclin de la littérature reflète aussi notre culture axée sur l’image. Beaucoup plus de gens choisissent de vivre une histoire sur un écran que dans un livre, malheureusement, tout ceci suggère une sorte de paresse mentale, alors que des heures d’émissions de téléréalité et d’Xbox ne sauraient se substituer à la nourriture intellectuelle fournie par un bon roman. Goethe disait que le déclin de la littérature d’un pays est le déclin de toute une nation, il est vrai que, de tout temps, la littérature a eu tendance à refléter la santé émotionnelle d’une nation parfois même a célébrer l’esprit de la nation, tandis que d’autres fois elle attire l’attention, elle exhorte les parties concernéesa se focaliser sur une tranche de la société marginaliséeou même oubliée. La littérature est le fondement de la vie, elle met l’accent sur de nombreux drames humains alors qu’elle est écrite en mots, elle est un voyage qui est inscrit sur des pages et alimentée par l’imagination du lecteur, mais maintenant un livre doit être rapide, il ne faut surtout pas s’arrêter pour réfléchir ou revenir en arrière, il faut foncer droit devant, il faut le lire vite pour être sûr de ne pas perdre le fil, un livre doit être consommé avec impatience.

Délices illicites du déclin « La décadence se manifeste en premier lieu dans l’art : la civilisation survit un certain temps à leur décomposition »

La notion du déclin peut paraître au premier abord comme la réflexion en contre point d’une époque désenchantée de ses illusions perdues. Elle est intimement liée au climat d’une modernité scientifique et économique en crise. Pour l’historien des idées et des religions, le mythe du déclin est une « vieille connaissance », si, dans les temps qui courent, il fait figure de nouveauté, c’est qu’il satisfait notre goût pour les idées « neuves » et « singulières ». On lui communique une certaine valeur de scandale. En raison du défi qu’il (im)pose aux artistes modernes parvenus aux limites traditionnelles de l’art. Il imprègne pratiquement toute la culture du XIXème et XXème siècles. Pour Baudelaire et Nietzsche, « décadence » et « modernité » sont deux termes désignant une même expérience créatrice à la fois avancée et tardive. Tout se passe comme si deux modernités en interaction composaient l’image même de notre temps : la modernité technologique/économique et la modernité de la culture. Le premier a l’idée de progrès pour guide, le second est placé sous le signe du déclin. Les partisans du progrès et les théoriciens du déclin nous proposent sur ce thème des séries d’explications ayant les mêmes causes et les mêmes symptômes- le bien être, la lutte des classes, la destruction des tabous-, le bien-être est présent à tour de rôle comme l’indice le plus sûr et comme la mesure d’une décadence morale et artistique irréversible. L’une des raisons, aussi, est ce principe actif qui cherche à dévaloriser l’acquis du passé plus qu’il ne s’en proclame héritier et de ce fait le déclin, est né à travers un sentiment d’absence, dont les

Journal de La Meute, numéro 5 E.-M. Cioran, Précis de Décomposition.

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DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres

matériaux proviennent d’une synthèse en voie de désintégration. Il fait état d’abandon (les valeurs), de dissolution (lien social), de perte (mémoire collective), ou encore d’oubli (savoir-faire). Parmi les autres raisons, ce sont les thèmes bien connus du pessimisme qui reviennent souvent chez les auteurs antiques : la décadence des arts (Pétrone), de l’éloquence (Tacite, Quintilien), des mœurs (Cicéron), les effets débilitants de la prospérité, du luxe (Polybe) et surtout, l’absence d’homme véritablement grand et massification concomitante de la société (Polybe, Cicéron). Dans notre époque moderne, certains critiques, hommes de lettres, personnalités du monde du livre et intellectuels, soutiennent que l’ère démocratique actuelle sous la prise de l’idéologie capitaliste représente l’un des facteurs majeurs du déclin inextinguible de la littérature. Etant régis par le profit à grande échelle, les caisses pleines, l’hyperconsommation et les valeurs pécuniaires, le monde de la littérature lumineuse subit un appauvrissement conséquent avec son entrée dans la sphère des « intérêts commerciaux » et de la commercialisation de masses. Les éditeurs, les régimes politiques, les différentes institutions concernées- les écrivains eux-mêmesvoient le livre comme étant un moyen d’enrichissement, une industrie florissante basée sur le concept de l’inculture des masses et du libre accès. Et du fait de leur contenu sans fond et sans matière savante, le lecteur est projeté dans un monde de mutilation cérébral où la sensation irrésistible de nausée est plus que présente.

Comme l’écrit Citon, l’ordre mondial fait face à un nouveau germe du capitalisme qui a éclos et s’est enraciné sous l’appellation du « capitalisme cognitif », la production immatérielle des connaissances s’est édifiée en tant que nouvelle économie de centre, soutenue par les poutres des compétitions financières et de la richesse qui consistent en la capacité d’invention et d’innover pour atteindre l’hyperproduction éditoriale et l’hypermédiatisation frappante de la littérature de grande diffusion. Le déclin de la littérature dans les œuvres modernes subsiste aussi à cause de ce flot diarrhéique verbal imprégné de formalisme et de nihilisme dévorant et saupoudré de décrépitude morbide qui règne dans le domaine littéraire moderne. Il met en avant le narcissisme de l’auteur, son amour propre décadent, et sa passion indubitable pour le non-sens, le vide romanesque, son abandon de la description et de l’explication du monde, de la nature et de la condition humaine, contribuant à donner au livre une finalité de marketing littéraire. Le déclin s’accomplit en fonction d’une trajectoire unique, le processus de dégradation et d’annihilation de la créativité constructive. En guise de conclusion, citons une phrase particulièrement lucide de Nietzsche : «De la part de philosophes et de moralistes, c’est s’abuser que de croire échapper à la décadence du seul fait que l’on prend parti contre elle. Il n’est pas en leur pouvoir d’y échapper : ce qu’ils choisissent comme moyen, comme planche de salut, n’est en fin de compte également qu’une manifestation de décadence. »

Le livre subit une dévalorisation dont la seule estime se résume au nombre d’exemplaires vendus dans le marché de la mondialisation. Journal de La Meute, numéro 5

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DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres Quelles conséquences pour une mort de la littérature ? Quelles seraient les conséquences d’une éventuelle « mort » de la littérature ? On n’oserait même pas y penser. Pourtant c’est ce qu’annoncent les critiques si ce n’est qu’ils ne font encore que prédire mettant un point d’espoir sur cette cause. Selon Dominique Maingueneau, auteur de « contre Saint-Proust ou la fin de la littérature », « la littérature n’est pas menacée, c’est la Littérature (avec L majuscule), c’est-à-dire dans toute sa royauté, avec tout ce que cela implique. ». Car en effet, des livres, il y en a par millions chaque année, mais quels livres ? Le livre dépendant des lois du marché est devenu un produit culturel comme un autre. Il n’est désormais plus le lieu de tous les enjeux qui font l’actualité, on se tourne vers les nouvelles technologies et même quand il y a débat, c’est sur la télévision, la radio ou internet. Selon Antoine Compagnon, la démocratie qui suppose l’éducation de tous entrainerait en fait au contraire à une déculturation générale à l’américaine puisque en effet le livre selon la logique marchande devrait être accessible à un plus large public pour une meilleure rentabilité. Mais entre les pessimistes et les nostalgiques, il y a aussi ceux qui cherchent des solutions. On s’empresse alors d’écrire sur la nécessité de la littérature, publiant de longues réflexions sur le rôle de plus en plus décisif de cette discipline. On peut citer « La littérature, pourquoi faire ? » d’Antoine Compagnon en 2007, « Que peut la littérature » d’Alain Finkielkraut ou alors « Pourquoi étudier la littérature » de Vincent Jouve en 2010. Dans un débat en 1964 sur « que

Littérature contemporaine Comment répondre à la question "qu'Est-ce que la littérature contemporaine du 20ème siècle" sans en faire une thèse ? D'abord, qui dit littérature contemporaine dit mouvement littéraire et celui-ci est définit comme tant 1« un ensemble d'auteurs et d'œuvres qui présentent à une époque donnée, une communauté d'idées, une vision de l'humanité et de l'art s'appuyant sur des traits communs ». C'est ce qui nous permet de distinguer les différents mouvements littéraires à travers les siècles et d’y classer des auteurs et des œuvres clés, ainsi le 19ème siècle est caractérisé par le réalisme de Balzac et le naturalisme de Zola. Cependant, vouloir classer la littérature contemporaine dans un genre précis relève de l'incorrection puisqu'elle se veut indépendante de tout dogme littéraire et de toute règle d'écriture, c'est d'ailleurs ce qui la caractérise le mieux, un rejet total des méthodes ultérieures à dire la réalité puisque les contemporains veulent la relater d'une manière différente, en utilisant différents styles et en réinventant l'écriture dans son ensemble.

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Selon Philippe Forest (écrivain français), on peut y distinguer trois périodes: Un premier 20ème siècle exprimant le monde et la condition humaine, une sorte d'expérimentation de la pensée et de l'engagement révolté, on y retrouvera Proust, Céline, Sartre et Camus. Un second 20ème siècle qui se veut avant-gardiste, on y retrouve le surréalisme, le nouveau roman, Tel Quel et le théâtre de l'absurde avec comme effigies

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http://cogitoblog.canalblog.com/archives/2010/10/19 /9548933.html

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Breton, Ionesco et Sarraute. Enfin, un changement de paradigme s'opère depuis les années 80 où on constate un épuisement des théories avant-gardiste et une plus grande dispersion des formes et des expérimentations. devient porteuse de messages forts de révolutions et d'insurrection populaire. De Céline à

L’écriture contemporaine L'écriture contemporaine est caractérisée par une innovation et un style diversifié mais propre à elle. Elle utilise le langage soutenu, le langage familier, l'argot et le langage populaire pour décrire la réalité, car elle s'inscrit dans un courant d'idées qui rejette les méthodes antérieures pour relater celle-ci, elle touche au roman, à la poésie, aux essais et au théâtre. Nous retrouvons le genre romanesque dans les œuvres contemporaines de la 2nd moitié du 19ème siècle avec Proust par exemple, cependant, le Surréalisme vient tout bouleverser avec Breton qui inventa l'écriture automatique et qui donna naissance à ce mouvement. Vient l'Existentialisme, courant philosophique représenté par Sartre et Nietzsche. Sarraute, quant à elle, est connue pour le Nouveau-Roman, sans oublier le Théâtre de l’absurde avec Ionesco ou les calligrammes d’Apollinaire. Les exemples cités, loin d’être exhaustifs, relatent en quelques mots les grandes lignes de la littérature du 20ème siècle, avant-gardiste et engagée. Apollinaire, chacun tente de souligner à sa façon le déracinement de l'homme face à l'avancée technologique, élément caractéristique du 20ème siècle, de dénoncer les affronts que subit Née à la suite des deux guerres, ses enjeux sont nombreux, on tend à détruire les dogmes afin de mieux "se" reconstruire, cherchant ainsi un sens à la vie et une meilleure façon de relater la réalité,

ne se contentant plus de son effet de réel dans l'écriture. Elle peut avoir des enjeux politiques lorsqu'elle l'humanité de cette nouvelle société barbare et sanguinaire, une sorte de purgatoire où est exprimé le ras-le bol ressenti par les contemporains qui n'hésitent pas à mélanger les genres pour se rester fidèles à la réalité qui les entoure. L'écriture contemporaine a vu, dans le monde entier, naitre des auteurs suivant la même idéologie, en Russie, au Portugal, en Italie, en Allemagne, tous se joignent à l'idée qu'il faut sortir du miasme que les guerres et les régimes politiques ont imposé à l'être humain.

D’autres genres ont fait leur apparition à la même période. On retrouve la science-fiction, la littérature de guerre, les réécritures ou l’Oulipo (Ouvroir de Littérature Potentielle). Ces genres ont apporté, pour certains, un renouveau littéraire mais aussi linguistique. Certains ont voulu contraindre la langue à de nouvelles règles tandis que d’autres nous emmènent dans des mondes imaginaires autour de la nouvelle technologie. Je citerai, également, le roman de jeunesse qui a connu un essor considérable, touchant le plus jeune publique. Le 20ème siècle a connu une multitude de réformes au niveau de l’écriture et est un siècle innovateur et créateur de styles. Cependant après 1989, nous avons droit à une nouvelle génération sortie de la guerre, les productions qui suivront ces années restent difficiles à classer, je me focaliserai sur ce que 2 Dominique Viart appelle la littérature 2

Voir Dominique Viart et Bruno Vercier, La littérature française au présent, Paris, Bordas, 2008 (2eme édition augmentée)

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DOSSIER SPECIAL : Déclin des Lettres fhgkfdjhgkdfjghdkfghkdfgdfhdghfgfhjhjhjhjhjhjhjghjh j déconcertante et concertante, la première cherchant à bousculer l’ordre établi en invitant à la réflexion tandis que l’autre cherche le scandale et le bruit de fond médiatique.En effet, la littérature actuelle est devenue désengagée, j’ai l’impression que notre siècle est le moins productif, elle me donne l’impression qu’elle ne s’ancre pas dans la réalité de nos vies ou plutôt qu’elle répond à un besoin de lecture rapide. Certains auteurs cherchent uniquement la gloire et non plus ce qu’ils pourraient apporter à la société, refusant de s’engager dans la réalité politique et économique du monde moderne et s’ils le font, c’est souvent pour créer une polémique médiatique qui leur garantit une publicité presque gratuite. Je généralise, bien évidemment, car il subsiste des écrivains qui s’engagent à dénoncer des faits de société ou des injustices sous forme de romans mais s’il doit subsister un seul genre pour « sauver » la littérature contemporaine de sa pauvreté de fond, je

dirai que l’essai est la solution.Avec ces changements radicaux, un 21ème siècle à la pointe de la technologie, je me questionne sur l’avenir de la littérature et sur la capacité créatrice de l’être humain. Sommes-nous vraiment arrivés au sommet de l’innovation et de l’invention ? Ou bien au lieu de se lamenter, ne ferions-nous pas mieux d’accepter toutes ces mutations et de nous dire que finalement il s’agit, là, d’un tournent important de l’histoire de la littérature comme beaucoup de siècles l’ont été ? Au cours de ma modeste recherche sur la littérature contemporaine, je me suis confrontée à l’idée qu’elle est en constante mutation et qu’elle n’est pas « finie », ce qui rend la tâche de la définir plus compliquée et qui donne naissance à des débats controversés.

Discours sur le déclin du journalisme Il y a une littérature que nous avons oublié, mais qui était pourtant au centre des dernières meutes: la presse, puisque le Journal est devenu un incontournable. Qu'elle soit politique, littéraire, scientifique, généraliste, sportive, people, mensuelle, hebdomadaire, de gauche ou droite, journalisme de guerre ou gonzo, elle ne laisse personne indifférent. C'est un style à part. Sa mission première est de présenter succinctement une actualité dans son contexte : un match de foot dans un championnat, des élections avec ses tricheries et ses coups bas, la

cérémonie des Oscars. Ou des drames de guerres. Avec la rubrique des chiens écrasés, considérée aussi comme une punition, regroupe les faits divers inclassables dans les rubriques traditionnelles, mais qui a la particularité de résumer le sujet en trois mots. Le journalisme fournie aussi une critique, et le sujet traité n'est souvent qu'un tremplin pour lâcher sa verve ou présenter un sujet qui nous touche. Le journalisme fournie aussi une vision de son époque avec les particularités de son temps Aujourd'hui, plus que tout autre littérature, on s’inquiète pour la presse. Pour deux raisons

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principales, toute deux liées au développement de la technologie qui a bouleversé le mode de consommation, mais aussi de production de l'information. Tous les médias ont connu une métamorphose, grâce au numérique en étant accessible partout et en tout temps sur une simple tablette. Le journal connaît aussi sa part de révolutions, qui soulève des questions quant à l'avenir de l'industrie du journal papier. Les grands noms du journalisme adaptent leurs offres et pour quelques euros l'année, une carte Visa et une connexion internet, le Monde Diplomatique est accessible de l'Inde au Pôle Nord. Le journal ne fait que changer de support en permettant de faire des gains non négligeables sur le travail de presse et de livraison. De nouveaux métiers du numérique prennent la place des anciens papetiers, sans que le travail de mise en page soit négligé. Au contraire, le journal numérique est devenu interactif : des hyperliens apparaissent pour compléter l'info avec vidéos, images, archives : le journal devient une véritable médiathèque. Mais l’accès en continue à l'information, porte un coup au journalisme. Il n'y a plus de perspective. La multitude de source et le temps ultra court de traitement de l'information posent de nouveaux défis à la rédaction en terme de fiabilités de sources, puisque la profusion de vidéos, de messages et d'images, ne sont pas évidentes à gérer pour un journaliste qui se doit de suivre des règles d'éthique sur la vérifiabilité des informations fournies, leur diffusions, leur pertinence, tout en fournissant une info en continue.

toutes les ambitions sur ce point-là. Dès lors, tout le monde peut publier, partager, aimer et s'exprimer : la production de l'information s'en trouve bouleversée. Si les grands groupes d'informations avaient le défaut de filtrer l'information sur la base d'une ligne éditoriale pas toujours claire, Internet fournie une orgie et une profusion de blogs, webzines, groupes sociaux où il n'est pas aisé de surfer. Tout le métier de journaliste se base sur la fiabilité des informations transmises et sur l'esprit critique qui la transmets. Journaliste est un métier à part, concurrencé par l'apparition des blogueurs, des lanceurs d'alertes ou le jugement et les valeurs de chacun doivent faire leurs preuves tout comme le photojournalisme est aujourd'hui submergé par la démocratisation des appareils photos qui se limitaient il y a quelques années au professionnels de la photographie avec des moyens conséquents. Les affaires Wikileaks et Snowden, les révolutions arabes ont mis sur en lumières l'évolution de l’information. Deschair, parce qu'il ciblait une catégorie bien spécifique de la population, avec un type particulier d'informations: les hommes d’âge mûr et d'un certain niveau intellectuel qui s’intéressent à l'actualité et à la politique nationale ou internationale. Aujourd'hui la presse de vulgarisation scientifique, les périodiques pour bricoleurs du dimanche, la presse people ne sont pas de simples niches, mais une industrie florissante. Le magazine Science et Vie reste un incontournable, tant sur papier que sur internet, l'avenir n'est pas si sombre qu'on le croirait. Journaliste devient aujourd'hui un métier bien compliqué.

La liberté d'expression fait aujourd'hui l’unanimité et internet fournie les moyens de Journal de La Meute, numéro 5

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Comment se porte la littérature ailleurs ? Littérature hispanophone La littérature en chute libre ?! …pas si sûr ! « Déclin », en voici un bien joli moche mot qui est en vogue. C’est le déclin en tout, de la morale, de l’économie, de la culture et notamment de la littérature. Est-ce si certain? Peut-on affirmer que la littérature est en déclin, en chute libre? N’y a-til donc aucun espoir pour l’humanité, car sans la littérature que serait le genre humain ? Pour contrer tout ce négativisme grimpant, cherchons un semblant d’espoir, rien qu’un peu d’espoir pour pouvoir envisager un avenir pour la littérature, pour l’humanité, un avenir ni heureux ni malheureux, juste une possible continuité, une porte ouverte, une fenêtre donnant sur l’infini… Mais où chercher, où trouver ? Et pourquoi pas en Amérique Latine ou encore en Espagne? Car que l’on se le dise la littérature en langue espagnole se porte bien. D’abord, si nous allons du côté de l’Espagne, au pays des Corridas et de Cervantès nous nous rendrons compte alors que l’œuvre la plus importante et la plus connue (Don Quichotte) de ce dernier est aussi la plus traduite c’est-à-dire la plus lue dans le monde après la Bible (1). Partons ensuite faire un voyage des plus passionnants en Amérique Latine où des pays comme l’Argentine, la Bolivie ou encore l’Uruguay, sont des pays jeunes d’un point de vue politique et économique et d’une richesse et d’une diversité culturelles sans pareil. Un cocktail adéquat pour faire de la littérature.

hispanique mais aussi sur la scène internationale, parmi eux les écrivains du BOOM latino-américain comme : Jorge Luis Borges, Gabriel García Marquez, Mario Vargas LLosa ou encore Julio Cortázar(2). Enfin, de nos jours ce ne sont pas les thèmes à traiter qui manquent, les auteurs latinoaméricains ont matière, ils ont une société á construire, á en décrire les lacunes, á donner de l’espoir et une littérature à réinventer et á inventer. Des auteurs prometteurs font leur entrée sur la scène littéraire tels que Roberto Bolaño, Rodrigo Fresán, Guillermo Fadanelli ou encore Santiago Gamboa (3). Aussi, il est de toute urgence de créer une littérature qui soit á l’image des femmes et des hommes d’aujourd’hui et qu’elle décrive leur réalité mais aussi leurs rêves et leurs attentes. Car á la fin, la littérature n’est pas un témoigne du temps passé mais aussi de notre époque, qui un jour sera un temps évanoui, il ne restera alors que nos écrits qui témoigneront de notre existence, que nous ayons vécu au sein d’une société en déclin ou non. (1) : http://blog.libros.universia.es/los-10libros-mas-leidos-de-la-historia/ (2) :http://americalatina.blog.lemonde.fr/2012/11/22/lescinquante-ans-du-boom-du-romanhispano-americain/

(3) : http://fluctuat.premiere.fr/Livres/News/L es-nouveaux-visages-de-la-litterature-enlangue-espagnole-3337700

La littérature russe : le lourd héritage. « Plus l'objet ou l'évènement sont grands, plus doit être grand le r ecul. », Maïakovski4

Aussi, il y a l’héritage littéraire dont jouissent les jeunes auteurs car ils ont des prédécesseurs qui ont joué un rôle clé non seulement sur la scène Journal de La Meute, numéro 5

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A chaque pays son histoire littéraire. A chaque époque ses genres romanesques. La Russie ne fait pas exception à la règle, les plumes russes, font partie bel et bien de l’histoire littéraire du monde. Et quelle histoire?!

Difficile de penser littérature russe et s’empêcher de penser à l’âge d’or de celle-ci, le XIXe siècle est marqué par le réalisme de Tolstoï et Dostoïevski, pratiquement les plus grands écrivains russes de tous les temps, à côté de Gogol et Tourgueniev. Commençons par les débuts : la littérature de langue russe est né au cours du XVIIe siècle, elle fait ses débuts avec la poésie et le théâtre, mais très tôt nait une riche tradition romanesque, intéressons-nous à cette dernière. Au début du XIXe siècle, le romantisme fait son apparition avec de talentueux auteurs tels que : Alexandre Pouchkine, et Mikhaïl Lermontov. Vient, ensuite, l’âge d’Or avec les auteurs mentionnés au-dessus. Le roman russe prend son essor avec Tolstoï et Dostoïevski, les géants de la littérature russe, ils donnent vie au réalisme russe, différent du réalisme français. « Les âmes mortes » de Nicolas Gogol, est l’un des chefs-d’œuvre de la littérature mondiale, il est classé entre les plus grandes œuvres littéraires comme « Don quichotte », « Gil Blas », une véritable épopée héroïcomique, avec un humour gogolien propre à l’auteur. La fin du XIXe siècle est marquée par l’influence de l’occident : Baudelaire, Mallarmé et Verlaine. La littérature russe se livre à un véritable renouveau, une sorte de « démocratisation » de la littérature qui touche un public plus large. Des auteurs qui, en continuant de s’inspirer du réalisme classique, s’en détachent progressivement. La nouvelle et le récit séduisent de plus en plus cette génération de

la fin du siècle, et même Tolstoï à la fin de sa vie ne s’en privera pas. L’un des nouvellistes les plus marquants de la fin du XIXe siècle et du début du XXe est :Tchekhov (1860-1904) avec sa vision pessimiste de l’univers russe, une vision unique qui rompt avec le style classique, par la forme de ses textes. Deux autres nouvellistes marqueront cette période, il s’agit de Vsevold Garchine (18551888), et Vladimir Korlenko (1853-1921). Le début du XXe siècle voit une vive activité dans le champ poétique avec l'éclosion de diverses tendances telles : le symbolisme, l'acméisme et le futurisme russe. Cette période voit également une intense activité critique et théorique, avec le développement du Formalisme russe. La révolution russe d’Octobre en 1917 et particulièrement l’ère soviétique mettent un coup de frein à la production et à l’évolution littéraire. Dès les années 20, nombreux sont les auteurs qui s’exilent à l’étranger, à Berlin puis à Paris, à l’image de : Bounine (prix Nobel), et Kouprine, qui vivront de grandes difficultés. D’autres ont choisi l’intégration. « La pensée russe », un hebdomadaire de la diaspora russe en France, voit le jour à Paris en 1947. Deux femmes à forte personnalité le dirigèrent pendant de longues années : la princesse Zinaïda Schakhovskoï, historienne, et Irina Illovayskaya-Alberti, petitefille de Léon Tolstoï. Sous la direction de Lénine en 1921, quelques auteurs profitent pour dénoncer les abus du système tels que : Zamiatine, Boulgakov, avec un style ironique, humoristique, cynique, voire grotesque, ce qui coûtera très cher à certains. Avec l’avènement de Staline, la rébellion se tient à carreaux. De nombreux écrivains et intellectuels furent emprisonnés. Après la mort de Staline quelques initiatives voient le jour. Soljenitsyne

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publie son roman : « une journée d’Ivan Denissovitch » mais l’arrivée de Brejnev plonge la littérature russe dans une période stérile (19641985), et le réalisme socialiste reste le seul style littéraire autorisé, des auteurs décident de se faire publier à l’étranger sous samizdat qui veut dire littéralement « publier ailleurs ». Dans les années 70, Axionov avec son ton satirique « à l’occidental », qui sait capter l’attention de la jeunesse, met fin à l’esprit littéraire qui s’opposait jusque-là au capitalisme et au mode de vie occidental. La littérature russe contemporaine, essaie tant bien que mal de se détacher de l’époque soviétique, et cherche d’autres horizons pour se replanter dans l’histoire littéraire mondiale, selon Olga Slavnikova (critique littéraire, romancière et nouvelliste) la nouvelle génération ressemble à celle des écrivains des années 60 : « J’observe une nouvelle génération pour qui le règlement de compte avec les autorités russes n’est plus d’actualité. ». Elle ajoute plus loin « Ces jeunes auteurs se prennent souvent pour des cyniques, qui ont tout vu. En réalité, ils représentent la littérature de la nouveauté » La réalité contemporaine évoque une société chaotique ravagée par les changements, là où drogue, sexe, violence et mort donnent le ton. La littérature essaie d’évoquer la vie des nouveaux riches et la vie des pauvres. La littérature policière, le genre dominant aujourd’hui en Russie, se porte bien avec des auteurs comme : Nikolaï Chadrine, Alexandra Marinina, Andreï Kourkovet sa fidèle mascotte « Macha » et Boris Aknounie. Ce dernier, commente la littérature russe policière en disant : « quand la machine soviétique s’est effondrée, le crime nous est

apparu violemment : tous les jours des explosions, des viols, des violences…il ne nous manquait, dès lors, ni crime organisé ni obsédés sexuels. » Zakhar Prilepine (ancien volontaire en Tchétchénie ; auteur journaliste, chanteur et poète) a justement écrit un roman tournant de ce conflit tchéchène : « j’ai grandi dans un pays qui a gagné la pire des guerres », dit-il. La violence du conflit a marqué son esprit, mais aussi sa prose. Comme, très certainement de nombreux autres auteurs actuels. L’un des ennemis de la littérature russe à travers les années reste la censure, d’après Michel Pafenov (directeur de la collection Lettres russes d'Actes Sud) quand on lui demande : Qu’en est-il aujourd’hui de la liberté et de la censure littéraire en Russie ? Il répond que « Il n’y a aucune censure parce que les tirages sont trop petits pour inquiéter quelque pouvoir que ce soit.» Si un roman peut mettre des années à se construire, qu’en est-il quand une société est bouleversée de A à Z ? On n’a plus la même temporalité. Certains styles se sont perdus, d’autres sont nés dans le tas. La société russe évolue, sa littérature aussi. Certains affrontent leur histoire, et suivent le schéma du roman réaliste classique russe, et d’autres plus réservés, fuient les fantômes du passé et essayent d’en construire une nouvelle qui a pour thème leurs existences actuelles. L’histoire de la littérature russe, comme toute histoire, est passée par des moments de gloires et des moments de faiblesses, elle est blessée, mais elle combat toujours pour son existence, on doit suivre de près les pas de ces auteurs au cas où un nouveau Dostoïevski verrait le jour. « Ce n'est pas en enfermant son voisin qu'on se convainc de son propre bon sens. », Fiodor Dostoïevsk.i

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permis, du moins pas sans que je passe pour un fou. Ceci ne m’empêche pas de rêver… rêver d’un monde où deux choses que j’apprécie s’y trouvent : la fantaisie / science-fiction et ce même décor vieux de plusieurs décennies.

Un nouveau genre : Le Steampunk ! Steampunk : Fantaisie Rétro-futuriste « Le XIXème siècle a été la scène de maintes œuvres littéraires, surtout classiques, mais qu’en est-il de la fiction inspirée de cette époque ? Une version alternative de cette période, marquée par la révolution industrielle et l’apparition de l’énergie à vapeur, a vu le jour entre les mains d’auteurs profitant du déclin du Cyberpunk, autre style littéraire relevant de la science fiction, afin de donner vie et mettre sous les feux des projecteurs ce monde qui tire ses origines fictives et sa structure de choses ayant déjà été explorées par de grands noms, tels que Jules Verne

dans « vingt mille lieues sous les mers » ou encore H. G Wells dans « La machine à explorer le temps » par le fait que ces derniers utilisaient les machines et le monde de l’époque comme support de leur imagination des technologies futuristes. » Qu’aurait été le présent si certains éléments du passé n’avaient pas été les mêmes ? Le XIXème siècle me fascine, que ce soit du côté architectural ou du côté des « réalisations ». Mais porter un long chapeau, une veste « queue de pie » avec une montre à gousset accrochée et avoir une canne ne m’est cependant pas permis, du moins pas sans que je passe pour un fou. Ceci ne m’empêche pas de rêver… rêver d’un monde où deux choses que j’apprécie s’y trouvent : la fantaisie / science-fiction et ce même décor vieux de plusieurs décennies. Le Steampunk* est l’aboutissement de la création de cet univers fictif fantaisiste qui, dans un premier temps, fut assimilé à la science fiction (puis maintenant considéré comme sous genre de cette dernière) vu qu’au début, les auteurs de roman d’anticipation faisaient des prédictions sur l’évolution

Le Steampunk* est l’aboutissement de la création de cet univers fictif fantaisiste qui, dans un premier temps, fut assimilé à la science fiction (puis maintenant considéré comme sous genre de cette dernière) vu qu’au début, les auteurs de roman d’anticipation faisaient des prédictions sur l’évolution des machines de l’époque. Cette évolution n’a pas eu lieu et le Steampunk, en tant que genre à part entière, fit son apparition des années plus tard dans la catégorie fantaisie. Et bien que traitant d’un temps relativement passé, cet univers met l’accent sur l’aspect futuriste des machines à vapeur et des technologies résultant de l’évolution de cette source d’énergie dans un monde uchronique** figé esthétiquement au XIX siècle et dans lequel la découverte et l’utilisation massive des machines à combustion n’a pas eu lieu. Ce qui en résulte est le perfectionnement de l’énergie à vapeur et de la mécanique de l’époque afin de donner vie, Dans un présent alternatif, à des technologies inespérées. On pourra donc utiliser le terme de « retro-futurisme » quand on évoque ce style. Souvent, mais pas toujours décrits sous un aspect Victorien, on se retrouvera donc dans un monde où des trains à vapeur lévitent sur les rails et se déplacent à une vitesse surnaturelle, les gens ont un style vestimentaire spécifique à l’époque victorienne mais avec une extravagance accrue et des gadgets improbables accrochés à leurs chapeaux, corsets ou encore capes. Il n’y a pas de manchot ou de personne sans jambes, les prothèses mécaniques, semblables aux bras d’Edward Elric, sont à la pointe de la technologie et bien sûr, on retrouvera en levant les yeux vers le ciel des Zeppelins perfectionnés, des bateaux volants grâce à l’énergie à vapeur et peut-être même le ballon ayant fait le tour du monde en 80

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jours, si on a de la chance, on croisera le vieux qui ne veut pas changer son véhicule. Même si le Steampunk s’éloigne, de la mise au premier plan, du côté politique, résultant du changement causé par la modification majeure du futur à une époque précise, il ne sera néanmoins pas rare de tomber sur des œuvres mettant en avant des versions « apocalyptiques » et lugubres du monde. La dystopie, forme négative et paradoxale de l’utopie, a, en effet, une grande place dans l’univers de la science fiction de façon générale et de la fantaisie spécialement. Evgueni Zamiatine, même si axé sur le Dieselpunk, est l’un des pionniers de l’écriture d’œuvres uchroniques avec une vision sombre de la réalité « rétrofuturiste » dans laquelle la société se voit perdue, les pénuries de matières premières pousseront les régimes, souvent totalitaires, et nations à tomber dans des conflits armés et des guerres dévastatrices causant la destruction totale, ou partielle, de la planète comme c’est le cas dans le manga Trigun d’inspiration « steampunk western ». Le Steampunk quittera rapidement le domaine de la littérature pour s’étendre aux arts visuels et la peinture (les illustrations d’Albert Robida), l’animation/manga(les œuvres monumentales d’Hayao Miyazaki ou autre Full MetalAlchemist) voire même à la musique dans des titres thématiques et se fera une grande place dans les jeux vidéos (on citera à titre d’exemple l’incontournable Bichock ou encore Dishonored).L’architecture a aussi été touchée par ce nouveau mouvement culturel qui gagnât en popularité et inspirera des architectes de renom, comme LebbeusWoods, dans certaines de ses maquettes. Cet univers fictif s’est vu adjugé une place incontestable au sein de la culture moderne mondiale mais reste néanmoins inconnu chez nous, en Algérie, et, c’est en tant qu’amateur de science fiction que, je me permets de recommander aux lecteurs cette catégorie de littérature d’abord, ensuite d’art de façon plus large, qui vous transportera dans un ‘’vieux

futur’’. Il n’est pas nécessaire de commencer, directement, par les œuvres purement fictives, les vieux Jules Verne ou Dickens feront l’affaire pour vous familiariser avec cette époque pour ensuite faire émerger cette vision fantaisiste d’un présent aux couleurs d’un passé futuriste. * Définition et origine du mot Steampunk : littéralement « punk (voyou) à vapeur » le mot a été créé par Kevin Wayne Jetter dans les années 1970 quand il créa le genre avec ses amis Tim Powers et James Blaylock. Le mot a été créé a partir d’une boutade vis-à-vis d’un autre style littéraire, le Cyberpunk.

** Définition d’Uchronie : un genre qui repose sur le principe de la modification d’un fait historique, faisant que dans un univers parallèle et suite aux changements de cet événement tout le déroulement de l’histoire bascule vers une autre direction.

Univers Steampunk

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Avenir de la littérature

Progression ou régression de la littérature ?

Internet a envahi nos vies depuis quelques décennies. Elle est une riche base de données qui permet une connexion au monde en quelques clics. On a vu naitre l'écriture numérique dont l'auteur, au départ, pouvait être identifié à un espace: un site ou un blog. Aujourd'hui, les écritures se sont multipliées et leurs plateformes se sont diversifiées, elles se croisent via les réseaux sociaux. Il y a, ce qu'on appelle, l'extension du domaine de l’hyperlien. L'auteur numérique a un

écosystème qui le caractérise: le site et ses composants (images, design, texte) et ce changement de support nous permet de parler plutôt d’une nouvelle interface que d’un dualisme entre Réel/Numérique. L'écriture numérique Comme le dit si bien Sébastien Rongier, elle est pleinement dans l'invention, elle expérimente l'intensification de l'écriture comme force d'évolution et de déplacement. Les auteurs sont "suivis", "commentés", "partagés" et "aimés", une popularité qui, via les réseaux sociaux, est importante, pour ces auteurs dits numériques mais aussi pour ceux qui publient sur papier et à qui internet sert de médiation pour attirer le lecteur. Il y a du bon et du mauvais. En effet, il y a de nouvelles formes qui voient le jour et des talents exposés. Il y a un renouvellement de la littérature: elle a changé d'espace, elle est devenue hypermoderne et

s'adapte à son public, elle lui propose des lectures simples et fluides pour ne pas l'ennuyer oul'importuner dans ses tracas quotidiens, les « romans de gare » font fureur pour ces raisonslà, le large public ne veut pas réfléchir aux soucis du monde alors il préfère se plonger dans des œuvres qui donnent l'impression d'avoir quelque chose à dire. L'hyperlien rend accessible, en quelques secondes, des œuvres partielles ou complètes, payantes ou gratuites. Les e-books sont très appréciés et les créateurs d'applications l'ont bien compris, il y a une multitude de lecteurs d'E-pub et de PDF qui proposent des bibliothèques virtuelles, nous permettant ainsi de transporter plus de livres, qu'on en aurait acheté durant une vie, partout où on va. Les blogueurs inventent de nouvelles formes de lecture, des textes mis en scènes sur fond de musique, nous imposant un rythme représentatif du texte en question (l’Horloge de Baudelaire), d'autres mettent ça sous forme de dessins,….etc. En tout, il y a une hyperactivité sur internet, tout le monde met la main à la pâte pour créer ou inventer quelque chose. Ça ne cesse de s'accentuer et les réseaux sociaux, comme Facebook, permettent ce partage universel. Il y a des dangers à tout ça, la mort de la littérature peut très bien venir de là, car jusqu'ici, l’édition numérique n'était qu'un support de médiation avec le livre papier. Certains pourraient encourager l’édition numérique mais elle est plus ou moins contrôlable puisqu'il faudra une réglementation qui protègerait les droits d'auteurs de chacun écrivant sur internet, qui veut dire la quasi-totalité de l'humanité.Il y a ceux qui proposent plutôt de n'imprimer QUE les œuvres jugées importantes afin de les sacraliser et de garder le reste numérisé : serait-ce un nouveau prix littéraire ? Comme une récompense ? Qui peut décider, de

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nos jours, si untel a du talent tandis qu'untel n'en a pas ? Peut-on encore parler d'amateurisme quand la toile ne filtre rien et ne sélectionne pas et que, parfois, la popularité est la seule référence du talent ? La littérature numérique tend à être underground, c'est une vraie "littérature-monde" qui voit le jour et qui se prolifère sur les fils de la toile, disons que tout le monde ne cherche qu'à s'exprimer et que le Web 2.0 le permet très bien, il n y a pas de censures ou du moins facilement évitées, il y a plus de liberté, il y a une hyperactivité textuelle. Les auteurs de cette nouvelle forme littéraire sont engagés dans leurs discours, ils sont impliqués et ont un public qui partage le même avis, d'ailleurs des micro-communautés voient le jour partout sur le web, des groupes, des forums…etc. Si le 20ème siècle a été un tournant dans l'abolition des tabous et un gain d’une liberté de pensée et d'écriture, le 21ème siècle explose tout sur son passage et change radicalement les règles établies, celles qui voudraient qu'une "vraie" littérature soit mieux pensée. Il y a de bons et de mauvais côtés. Je suis convaincue que ce qui se fait sur le Web est éphémère (trop de liens, de pages, de sites…etc.) et que le virtuel est une illusion car à mon avis si Virgile n'avait pas mis sur papier ses textes, on n'en aurait jamais eu vent. Je trouve que l'écriture numérique est comme une rumeur, elle apparaît, se propage, se commente et disparaît quand l'intérêt n y est plus. Le Web est en passe de remplacer tout dans nos vies et de par ce fait formater tout l'ordre établi. Il propose une sorte de nouvelle vie, de nouvelles formes conceptuelles, certains y

trouvent leurs comptes car on est face à une génération "Y" qui ne s'intéresse à rien, qui se contente de critiquer, de cliquer sur "j'aime" ou de faire des Vine, la rapidité est de rigueur, tout va à la vitesse de la lumière, on n'a plus le temps de lire un bouquin, il faut vraiment le vouloir et y consacrer du temps, ce n'est plus par besoin de se cultiver qu'on veut lire mais pour dire qu'on lit, pour faire partie d'une communauté, et encore ! La société est aliénée et la littérature est peutêtre l'art qui s'éteindra en premier car la peinture et tout ce qui est pictural a encore du chemin devant lui et le poème a trouvé son successeur, le Slam par exemple. La littérature est prise au piège car elle a été la mère des arts et elle se voit démodée, vieux-jeux et mise de côté. Même si le web stimule l'imagination de l'individu en lui offrant des outils comme Photoshop, collage, montages, vidéos et bien d'autres pour écrire et peindre, il n'en reste pas moins sûr, car il faudrait alors le valoriser en lui donnant le monopole sur le reste. D'ailleurs certains disent que le Web 2.0 est l'œuvre ultime de la modernité, par conséquent l'homme ne va rien inventer de nouveau et qu'il y a un arrêt de la littérature. L'écriture numérique et l'écriture sur papier sont deux mondes bien distincts, car comment juger ces nouveaux écrivains en se basant sur la littérature proprement dite ? Il faudrait alors établir de nouveaux critères et bien distinguer ce nouveau monde où s’articule un renouveau linguistique et syntaxique. Désormais, il n y a plus de courants ou si certains en trouvent toujours, leurs nominations est technique ou technologique : "hyper-roman", "mail-books ‘’, "hyper textes"…etc. certains de ces "courants" ont disparus rapidement car il n y a pas un mouvement particulier qui déterminerait une communauté d'idée ou de "façon de faire", et la

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raison de l'individualisme revient pour expliquer ces auteurs fragmentés. Chacun écrit ce qu'il veut, quand il le veut et comment il le veut. La société de consommation a changé de priorités. Nous ne sommes pas les premiers à parler d’une éventuelle mort de la littérature, c’est un débat, dirai-je, vieux de plusieurs siècles et les raisons sont souvent les mêmes, parmi elles, celle autour du mode de vie changeant de l’être humain. Tout ce tintamarre réduit la littérature à peu de chose, lui enlevant son sens véritable. Avant, nous lisions un livre et nous découvrions la société, la politique d'un pays, de nos jours, Google peut très bien s'en charger. Je me pose des questions sur l'importance qu'a encore la littérature, Antoine Compagnon nous dit dans son ouvrage "démon de la théorie » que « la valeur de la littérature dépend de la valeur qu'une société donnée peut accorder aux valeurs que la littérature transmet » et il renvoie la question de la littérature à celle de la lecture car, pour lui, la valeur d'une œuvre dépend des compétences du lecteur. Ainsi le lecteur est sensé avoir une lecture responsable.

Solutions et Suggestions Face à ces constats tantôt défaitistes, tantôt optimistes quant à l'avenir de la littérature, il n'en demeure pas moins qu'il faut proposer des solutions, faire des hypothèses réalisables et qui pourraient redorer le blason de la littérature. Il faudrait, par exemple, réintégrer la critique littéraire dans les journaux, la presse écrite ou visuelle. Qu'il y ait des critiques objectives et constructives, sans lynchage médiatique ou ultramédiatisation d'une œuvre, comme on a tendance à le rencontrer de nos jours. "N'est pas critique qui le veut", dans l'art de la critique, on tend à apporter une nouvelle vision sur une œuvre, parler de ses dérives ou de ses succès et ainsi

suggérer à l'écrivain une amélioration ou d'éventuels conseils d'écriture. Les médias sont importants car ce sont eux qui font et défont une œuvre, la mettant sous les projecteurs soit pour la descendre, soit pour l'élever, ils établissent une opinion publique et ils ont la responsabilité d’apporter une information objective. La responsabilité incombe aux éditeurs également, le fait de sélectionner d'éditer une œuvre devrait passer par un questionnement essentiel "que va-t-elle apporter au lecteur?" et non « sera-t-elle rentable ? », pour cela, ils pourraient faire des appels d'offre pour des écrits plus engagés afin de pallier à la pauvreté de fond dont fait preuve certains livres. Pourquoi gaspiller du papier lorsqu'un texte raconte juste une histoire qui ne fera, de toute façon, pas long feu ? Les écrivains sont les premiers responsables de ce qu'ils peuvent produire comme idées, ne pas s'engager ou s'impliquer dans un texte, en se contentant de narrer sa propre vie, l'éloigne du lecteur, qui ne se reconnaît pas toujours dans celui-ci, cela entraine également à écrire de façon générale ce que l'écrivain pense personnellement, ce qui donne l'impression qu'il prêche une vérité nouvelle qui pourrait offenser ou tromper le lecteur. De nos jours, on sent que l'écrivain n'est plus inspiré que par sa propre vie et son propre vécu, une déshumanisation totale s'installe et des bulles d'individus voient le jour, chacun pour soi, il n'est parfois intéressé que par l'appât du gain. Afin d'éviter certaines contraintes liées à l'édition papier, il se rabat sur l'édition numérique ou devient son propre éditeur ce qui lui donne un statut de commerçant. Il n'est pas honteux de gagner sa vie en écrivant, ce n'est pas donné à tout le monde de vivre de son art mais il faudrait

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apporter un message, faire de la littérature active, où l'écrivain écrirait pour instruire et pousser le lecteur à réfléchir sur le sens de sa lecture. Tout ceci est, bien évidemment, une tentative de réflexion autour de la littérature, le débat reste ouvert tant il y a une multitude de points à aborder afin de comprendre la décadence que subit la littérature en général et français en particulier.

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Sources : http://sebastienrongier.net/spip.php?article56 http://www.french.hku.hk/dcmScreen/lang3035/l ang3035litteratureactuelle.htm http://www.etudes-litteraires.com/malrauxconceptionroman.phphttp://sebastienrongier.net/spip.php?r ubrique40

http://sebastienrongier.net/spi p.php?rubrique40

Meute Compagny Chers clients, ne vous souciez plus du déclin de la littérature ! Meute & co a trouvé la solution pour vous ! Nous vous proposons notre nouvelle gamme de produits, développés par des spécialistes algériens afin de parer à ce fléau qui ronge nos pages ! Smart Glasses La lecture ne vous intéresse plus ? Pire ! Elle vous ennuie ? Mais vous en avez quand même besoin pour passer vos tests et divers examens ? Ne réfléchissez plus, notre produit est fait pour vous ! Grâce à nos Smart Glasses, il vous sera possible de projeter le texte de vos livres partout où vous irez, ainsi tout en buvant votre café vous ne perdrez pas le fil de l'histoire puisque celle-ci est pratiquement ancrée dans vos yeux. Grace à sa reconnaissance vocale, vous n'aurez plus à cliquer pour tourner vos pages, vous pourrez commander à vos lunettes de le faire pour vous mais aussi de fermer le livre et d'en choisir un autre ou de les éteindre. Vous pourrez connecter celles-ci avec votre ordinateur de bureau, votre lap-top, smartphone et tablette afin d'enregistrer vos données, de les modifier ou de les consulter ultérieurement. Nous vous proposons notre application GlassesAp téléchargeable sur tous vos supports, elle vous permettra d’accéder à une base de données (livres gratuits ou payants, documentations) ainsi qu’une intégrée aux lunettes permettant à vos différents appareils de projeter vos livres numériques au format E-pub ou PDF, ainsi vous pourrez continuer votre expérience avec vos proches en partageant avec eux cette interface ingénieuse puisqu'elle s'adapte également à votre rythme de lecture et vous propose diverses musiques et ambiances pour vous aider à lire sans vous ennuyer. Plongez dans l'univers de "Vingt mille lieues sous les mers" et retrouvez-vous dans le décor du livre, celui-ci évoluera selon la narration et vous permettra de vivre mais surtout lire cette œuvre d'un trait. Journal de La Meute, numéro 5

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Le i-Classics

Au fil des années, le fossé entre les anciennes et futures

générations se creuse de manière inquiétante. Les nouvelles générations trouvent les anciennes œuvres de plus en plus difficiles et ennuyeuses. Sommes-nous alors prêts, de voir ces anciens chefs-d’œuvre disparaitre sous la poussière au fin fond des bibliothèques ? Non, car aujourd’hui, « Bookcreate » vous présente, sa dernière et toute nouvelle invention : le i-Classics. L’i-Classics est une machine à hologramme avec 5 pouces, 50 mm de largeur et 6 mm de profondeur, avec écran tactile capacitif multi-touch de 4 pouces et une très haute résolution. En allumant l’appareil, vous avez sous les yeux une bibliothèque numérique contenant plus de 2000 livres anciens et classiques. Vous pouvez évidemment choisir la langue et avoir ces mêmes livres dans toutes les langues possibles. En cliquant sur un livre, plusieurs options s’offrent à vous : Costumes, Lieux, Situations, Biographie, Vocabulaire et Autres Références. Vous pouvez donc, visionner en 3D suspendu en l’air, les costumes féminins ou masculins de l’époque dans laquelle se passent les faits et situer dans un worldmap, le lieu de naissance de l’auteur et le lieu de l’écriture de l’œuvre, ainsi que les lieux où se déroulent les faits dans les livres et les spécificités géographiques. En cliquant

sur « Situations », vous pouvez avoir une vue générale sur les situations économiques, politiques et sociales de l’époque dans lesquelles l’œuvre fut écrite ou celles de l’époque dont il est question dans l’œuvre. Vous avez également une biographie complète et détaillée des auteurs, une liste du vocabulaire ancien ou difficile,nécessaire pour la compréhension du livre. En plus, d’autres références : des ouvrages spécialisés, articles et vidéos sur le net, disponibles avec la connexion à internet par wifiafin d’approfondir vos recherches. Avec son option infrarouge, vous pouvez appliquer le rayon sur un extrait dans le livre que vous aurez en main et visionner en 3D les lieux où se passe la scène. Vous pouvez également, utiliser cette option pour le dictionnaire en dirigeant le rayon vers le mot voulu en vued’entendre et voir affichée la signification. Le i-Classics est un outil qui révolutionne la lecture et qui fera désormais envie des plus vieux et « ennuyeux » classiques.

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LIVRELIUM CRASH TEST Vous sentez vous prisonnier du system élaborer par le théoricien du groupe Verkhovensky dans les Démons de Dostoïevski ? Vous sentez vous enclin au Chigaliovisme, a une obéissance sans bornes a un monde ou une société qui vous étouffe et vous restreint a une dépersonnalisation absolue ? Maintenant vous faites face a cette question monumental que c‘est poser Lénine en 1917 « que faire ? », et bien future client ne vous tracassez plus ! ne rudoyer plus votre cerveau, car nous avons la solution adéquate a vos soucis. Oui ! Quand le présent n’est pas a la hauteur du passé, c’est vers l’avenir qu’on ce tourne ! Et l’avenir c’est « Livreliume » ! Solution injectable livré en boite de 5 ampoule de 3 ml, contenant chacune, l’ADN d’un livre choisit au volet, livré avec son extracteur d’ADN hautement performent, qui vous permet d’extraire le génome fondateur de toute œuvre souhaitée et de le liquéfier dans une petit ampoule injectable et pratique, et ce à tout moment de la journée. Vous chercher à vous exiler loin du monde des vivants d’un pas chancelant, et côtoyer dans votre divine distorsion avec le réel, les esprits les plus fins que la sainte terre ait pu engendre. Le pack Livrelium présenté a la 175éme assemblée mondial de la santé sous le titre Anglais de « The manufacture and quality control of drugs and pharmaceutical specialities » ayant fait preuve de bonne pratique de fabrication et de contrôle de qualité, la production a l’échèle global fut lancée. Le pack Livrelium se trouve en vente chez tous les libraires et les marchands de journaux. Jaillissant comme le feu de l’enfer tout droit sortie du Styx, Livrelium mettra fin à vos journées moroses. N.B : si addiction s’en suit, veuillez vous renseigner chez votre fournisseur.

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L’attrape-idées : Vous en avez marre des idées innovatrices et inédites qui vous traversent l’esprit et qui s’évanouissent aussitôt sans même avoir eu le temps de les noter ?! Une solution ? Oui. L’attrape-idées : une puce sous forme neuronale que l’on connecte au système nerveux par le biais des vaisseaux sanguins en envoyant des micro-décharges électriques, les idées une fois capturées sont enregistrées dans la carte mémoire de la puce. Pour la consultation des idées sauvées, il suffit de connecter la puce à un ordinateur quelconque. La puce est rechargeable. Et adieu les idées perdues…

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LIVROPHONE

Le Livrophone est une plaque extensible, que chacun peut agrandir ou rapetisser au format de son livre. Ça s'applique sur la page et dont l'écouteur lisait le texte imprimé cette voix non seulement lit Goethe Dante Mistral ou Céline avec l'accent d'origine, mais aussi reprenait si l’on le désirait en haut de chaque page pour en donner la traduction en n'importe quelle langue. Elle possède un grand registre de tons, se fait doctorale pour les ouvrages de philosophie, sèche pour les mathématiques, tendre pour les romans d'amour, grasse pour les recettes de cuisine. Elle lit les récits de bataille d'une voix de colonel et d'une voix de fée les contes pour enfant. Au dernier mot de la dernière ligne elle faisait connaitre par un Hum hum discret qu'il était temps de changer de plaque de page.

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Articles « La littérature jeunesse » doit-elle entrer dans les salles de classe algériennes ? La question, pour le moment, n’a été évoquée ni par les médias ni par le milieu scolaire et éducatif. Comme je suis soucieux de l’avenir de notre jeunesse, je me pose cette question, non pas par obligation mais par nécessité.

privilégient l’écriture et la lecture du langage SMS, un langage qui permet de créer un lien direct avec l’extérieur alors que la littérature tisse des liens avec le moi intérieur.

On remarque depuis des années le recul du niveau scolaire qui se répercute, notamment, sur le niveau universitaire. Les raisons sont aussi différentes que multiples dues au terrible vide dans la classe intellectuelle de notre société.

Pour remédier à chaque casus belli social, il faut remonter à la source : l’école, source de formation et d’éducation, en particulier l’école primaire. À l'heure actuelle, l'enseignement dans le primaire reste défaillant pour beaucoup de raisons, notamment liées à la répartition du temps entre l'apprentissage technique (sciences, physique et mathématiques) et l’apprentissage plus ludique (musique, dessin, littérature ...) axé sur des méthodes cognitives.

La lecture chez les jeunes : Les jeunes perçoivent souvent la lecture comme une activité qui les éloigne de leur monde. Ils en ont une impression négative, voire dangereuse par certains aspects. Avec un livre, ils se sentent seuls alors qu’ils ont besoin de liens avec leur entourage. L’information rapide qu’ils reçoivent sur les choses et sur les êtres les maintient dans une agitation qui leur semble vitale. Ils

Quelles sont les solutions ?

pour la traduction des grands classiques de la littérature jeunesse vers la langue Arabe ainsi que pour l’enseignement amazigh, mais aussi promouvoir la littérature algérienne (poésie et autres écrits ) en organisant des activités parascolaires. Sidou TELDJA

Introduire la littérature jeunesse devient impératif, plus que nécessaire, cela implique l’intervention de plusieurs instances académiques, notamment Journal de La Meute, numéro 5

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Essais Ecrire pour exister Neuf lettres, un mot, un sens, un monde. « L’écriture » est la lettre d’amour adressée au monde. Elle s’appelle Léïna, elle est orpheline. Elle vit dans une maison d’accueil. Adolescente rebelle, elle n’en fait qu’à sa tête. Chaque matin, quand ses grands yeux bleus s’ouvrent à ce monde qui la fait souffrir, elle prie. Non-croyante mais elle prie. Une âme contradictoire. Mais on ne cessait de lui répéter qu’en chaque grand écrivain, sommeillait une âme qui se contredit.Léïna ne trouvait plus de sens à sa vie. Solitaire, elle souffrait. Ses professeurs avaient l’espoir qu’un jour elle sorte de sa coquille, qu’elle aille de l’avant et fasse ressortir toute cette colère, cette

haine et tous ces démons qui la rongent. Dehors, le monde la voyait comme une fille bizarre, narcissique et effrayante. Mais au fond, qui la connaissait pour la juger ? Quel droit avaient-ils pour dire des obscénités sur elle ? Le fait de ne pas laisser paraître sa faiblesse faisait d’elle une personne forte. Mais en son for intérieur, c’était une autre personne. Sous ces allures d’adolescente révoltée, se cache une petite fille brisée, mal dans sa peau et qui en veut au monde entier. Chaque soir, allongée sur son lit, un stylo entre les doigts, une feuille et elle écrit. Son poignet danse suivant la mélodie de ses pensées. La pointe de son stylo dessine des mots,

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Essais /Articles des émotions, sa souffrance. Dans les jours où tout va mal, où la mélancolie se fait ressentir, ces jours où la solitude pèse sur sa vie, c’est à ce moment précis qu’elle vient. Sa fidèle amie, l’écriture, l’invite à poser des mots sur ses maux. L’écriture ! L’écriture lui sert de pansement pour ses plaies ouvertes et ses cicatrices. Quand son ciel devient gris, que son monde s’écroule sous ses pieds, elle a la plus merveilleusedes compagnies. Le monde de la prose et de poésie lui ouvre ses bras et la hisse vers la lumière, vers un monde nouveau, vers une renaissance. Dans l’obscurité, écrire est l’étincelle qui l’éclaire, le seul moyen d’arriver à la sérénité. Dans son carnet, elle a écrit : « Je m’exprime peut-être pas bien, mais quand j’ai cette impression d’être dans une cage sans pouvoir m’échapper, quand je me sens prisonnière et coincée, je laisse paraître mes faiblesses et je m’en sers pour faire de cette cage une prison dorée. Les gens pensent que dans ma tête c’est tout blanc ou tout noir. Non, ce n’est pas le cas. Ils pensent tous que mon esprit est torturé. Je suis navrée de les décevoir, mais j’ai la plus belle des armes. C’est mon exutoire, ma façon à moi de vivre, d’être heureuse. Mon sourire est un masque, l’écriture est ma réalité ». Léïna souffre peut-être de solitude, de lassitude ou d’autre chose, mais l’écriture représente pour elle un monde secret qu’elle porte en elle, jusqu’au jour où elle aura décidé de le dévoiler et de l’exposer aux autres. La vie de Léïna ressemble à plusieurs autres vies, mais ce qui la distingue des autres, c’est ce qu’elle a pu accomplir grâce à ce don que Dieu lui a donné. Pour échapper à la routine, pour redonner sens à son existence, elle écrivait. Au début elle avait peur, les exigences et les responsabilités que cet acte impliquait pesaient lourd sur ses faibles épaules. Néanmoins, elle ne pouvait pas quitter ce monde sans avoir donné vie

à ses personnages, sans laisser de traces de son passage sur terre. Elle a créé un monde, le sien. Elle se voua corps et âme à cette passion, débuta timidement mais l’envie d’atteindre ses rêves était plus forte que tout. Ecrire pour Léïna était un témoignage ; celui de sa propre existence. Une existence qu’elle avait tracée sur ces feuilles blanches durant ces soirées où elle sentait seule, son but était atteint : Elle a fait de ses rêves une réalité. lle est désormais un écrivain de renommé, elle a fondé sa petite famille. Elle continue de penser à ses parents, morts à jeune âge, en leur rendant hommage à chaque publication d’un nouveau roman. L’écriture a changé sa vie, tout son être a été changé. Grâce à elle, elle fait un élan vers l’éternité. Elle a toujours écrit pour exister. Elle exista grâce à l’écriture. Et même cent cinquante ans après, elle existe à travers ses écrits. Ly Ab Collage : Nabila IKEN

Livre papier ! L’année 2014 est presque morte, nous entamerons bientôt une nouvelle course de 365 jours vers le futur, vers l’avenir. La technologie et les innovations de tous genres ne cessent de nous étonner de par leur ingéniosité et leur développement de plus en plus rapide. En effet, et le domaine de la littérature ne fut en aucun cas épargné. Bien au contraire, l’apparition des « livres numériques » ou plus communément appelé « e-book » a

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Articles révolutionné la vision des lecteurs à travers le monde. Ainsi ce sont des livres adaptés aux outils électroniques, depuis 2008 nous pouvons constater un boom dans le marché des bibliothèques en ligne. L’apparition des tablettes a ainsi favorisé l’expansion des « digital book ». En 2010, Amazon (célèbre entreprise électronique de commerce américaine) a déclaré au dernier semestre avoir vendu plus de livres numériques que de livres imprimés. Plus récemment encore, cette même année, on a évalué en France la part de lecteurs numérique à plus de 15 % de la population. Des chiffres record. Nous pouvons aisément en comprendre les raisons : meilleure accessibilité, l’espace

lus restreint que tient un e-book, le coût (qui est généralement de 30% moins cher qu’un livre papier), préviens en quelque sorte la déforestation... Et pourtant des millions de lecteurs restent toujours adeptes des livres usités depuis l’invention de l’imprimerie (merci oh grand Gutenberg qui voulait étendre la sagesse et surtout le savoir). La culture du papier est ancrée dans l’apprentissage de la lecture. Depuis notre plus jeune âge on nous enseigne à prendre soin des livres que l’on nous tend, à respecter ces grands espaces appelés « bibliothèques » où des milliards de mots y sont conservés, où le savoir est à portée de main. Comment peuton comparer la joie d’entrer dans une Journal de La Meute, numéro 5

libraire et être confronté à une multitude de choix « physique », à une liste de titres en ligne sans aucun charme ? Nos doigts palpant les pages presque vivantes des livres aux senteurs uniques, aux effluves de rêves et d’histoires. Son espérance de vie est imbattable, des livres sont préservés depuis des centaines d’années nous donnant une brève image de notre passé. La lecture est quant à elle plus plaisante éloignée d’un écran, meilleur dans le touché des pages que l’on peut feuilleter, corner, raturer, annoter à notre guise (même si je trouve que cela relève plus d’un crime contre l’humanité.. Corner et raturer ? Qui oserait ?). Ainsi le livre papier n’est pas mort 28


Articles/ Essais malgré toute l’avancée technologique du monde il restera toujours des idéalistes qui se voudront être protecteurs de ces feuilles de dialogues que s’échange lecteurs et écrivains depuis des centaines voire des milliers d’années ! Le livre papier n’est pas mort et sa magie est à jamais inépuisable. Mouna Saighi

La Nuit Hantée par une mélancolie profonde, debout devant cette fenêtre, puisant mes mots dans les abysses de mon âme, contemplant ces cieux si lointains et pourtant si proches, ces cieux qui t'approchent plus tu les repousses et te repoussent à chaque fois que tu veuilles les approcher, à travers cette pénombre et ce silence, je crus entendre la terre crier et gémir, souffrance, compassion ou déception, elle ne sait plus quoi penser, quoi sentir, comment agir et surtout pourquoi agir! C'est dans un tel instant que des pensées perfides et exécrables frôlent mon

esprit, me renvoyant à de lointains souvenirs que j'avais cru perdus à jamais, mais qui refont surface avec plus de présence et d'anxiété. Dans cette confusion, cette ambiguïté de la vie, l'horizon de mes pensées tente de s'éloigner de la raison, mais quelle raison!? D'abjectes et effrayantes projections défilent dans mon esprit à chaque fois que je ferme les yeux, le silence, la pénombre, les présences-absentes de la nuit éveillent en moi de profonds sentiments, de fortes émotions que je ne pourrais raconter car je ne trouve pas de mots pour les décrire. esprit, me renvoyant à de lointains souvenirs que j'avais cru Journal de La Meute, numéro 5

perdus à jamais, mais qui refont surface avec plus de présence et d'anxiété. Dans cette confusion, cette ambiguïté de la vie, l'horizon de mes pensées tente de s'éloigner de la raison, mais quelle raison!? D'abjectes et effrayantes projections défilent dans mon esprit à chaque fois que je ferme les yeux, le silence, la pénombre, les présencesabsentes de la nuit éveillent en moi de profonds sentiments, de fortes émotions que je ne pourrais raconter car je ne trouve pas de mots pour les décrire. Soudain, mon corps tressaillit, une agitation, un trouble, une peur, mes souvenirs qui défilent, cette mélancolie qui sévit en moi, ces Questions, ces 29


Essais/ Photographie et enfin ce soupir, profond et soulageant suivi d'impénétrables et d'interminables sanglots... les yeux fermés, écoutant ma respiration, lente, profonde et agitée, agitée par les souvenirs de la journée qui défilent sous mes yeux faisant sourire mes lèvres et battre mon cœur, essayant mais hélas sans succès de chasser cette mélancolie dont mon âme s'est imprégnée, qui s'est emparée de chaque parcelle de mon corps se nourrissant du sang qui coule dans mes veines pour grandir et s'accentuer. Allongée sur mon lit, mes yeux regardent le plafond, ce plafond qui a su garder une certaine blancheur malgré le noir de la nuit. Mon cœur sent la peine, les gémissements, les cris et les hurlements tant enfuis dans cette pièce que la nuit ne dégage que pour les cœurs misérables Est-ce donc toujours en pleine nuit? Dans ces moments sombres et pensifs où le silence règne, où on peut sentir en profondeur nos cœurs qui saignent, ces cœurs enflés, troublés, perdus dans une profonde confusion, aaahhhh pourquoi la vie a-telle donc un goût si amer la nuit !!?? K.M – Photo : Houssem Mok

Parce que l’obscurité nourrit les peurs

Elle a du mal à décrire ce qui la ronge. Elle ferme les yeux, respire profondément, resserre la couette qui la couvre dans cette nuit étouffante d'été. Comme si elle voulait se convaincre que le mal venait de là. Elle reprend son souffle une deuxième fois, rejette la couette et se lève calmement. Elle va à la fenêtre et respire le silence, d'habitude apaisant, de la nuit. Elle sent sa gorge sèche et prend un verre d'eau. Rien n'y fait, son cœur menace d’exploser sous la pression de sa poitrine, comme si cette dernière était devenue trop étroite pour lui. La sensation devient insupportable. Elle n'a jamais aimé l'insomnie, bien

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qu'elle se soit toujours forcée à croire qu'elle aimait la solitude que lui imposaient ces longs monologues nuptiaux. Mais aujourd'hui, c'était diffèrent de toutes ces autres fois. Aujourd'hui, bien qu'elle ne veuille pas se l'admettre, la raison était toute autre. Elle ne souffrait pas de lassitude mais d'un mal un peu plus profond. Vous savez, quand vous fermez les yeux pour ne plus rien voir, comme si le fait de ne pas apercevoir les dangers les supprimait radicalement de votre existence. Quand vous cherchez dans tous les discours que vous entendez cette goutte d'hésitation qui fait que vous n'êtes plus très 30


Essais sûrs de pouvoir y croire. Quand vous ne pouvez vous empêcher de penser à ce qui se passerait si vous veniez à échouer bien que les chances soient minimes, quasi inexistantes. Quand vous voyez le mal partout et n'arrivez plus à vous accrocher à rien. Après tout, le risque zéro n'existe pas, se dit-elle. L'être humain n'est pas fiable. Et pourtant elle croit en tellement de choses. Elle a des rêves, des espoirs qu'elle refuse de s'avouer. Et si elle avait raison ? Si tout cela n'était que chimère ? Et bien c'est que plusieurs insomnies l'attendaient. Elle se demandait si il y avait moyen d'être plus torturée que ça, si au fond, le fait de voir toutes ses craintes se réaliser ne la libérerait pas de ce poids. Peut-être qu'être définitivement malheureuse lui offrirait la paix. Elle aurait au moins une raison de ne plus dormir la nuit. Elle reprend un verre d’eau et ferme la fenêtre. Elle se remet au lit et ferme les yeux. Là, dans le noir, elle continue à méditer sur toutes ces peurs. Elle imaginera tous les scénarios pessimistes qui soient jusqu'à ce que la lumière rassurante de l'aube vienne adoucir ses craintes. Djedjiga B

LE DÉPRAVÉ C’était un écrivain comme tant d’autres. Il n’était ni trop bon, ni trop mauvais, et ses livres se vendaient plus ou moins bien. Cependant, il menait un train de vie digne d’un hédoniste. Il ne croyait pas en l’amour, seulement aux plaisirs que pouvaient lui procurer certaines substances illicites comme l’alcool ou encore la compagnie nocturne d’une belle femme. Il était lui-même très bel homme, ce qui lui rendait la tâche aisée à cette époque où le physique est devenu l’unique critère de jugement. Mais malgré son niveau intellectuel supérieur, un défaut s’était insidieusement développé en lui, qui allait au-delà de sa routine dépravée ; il était constamment enclin à l’autodestruction. Cette tendance lui avait coûté beaucoup d’amis et avait engendré de nombreux ennemis car même ses pensées les plus sombres, il les exprimait sans retenue et sans aucun respect pour les conventions sociales. Mais un jour, alors qu’il assistait à un gala de charité, organisé par ces philanthropes présomptueux mariés à des cheminées en botox qu’il exécrait, il fit la connaissance Journal de La Meute, numéro 5

de cette femme qui, sans le savoir, allait bouleverser ses idées préconçues et pessimistes qu’il avait du sexe féminin, que la communauté masculine phallocrate qualifiait depuis la nuit des temps comme faible. Elle était belle comme de nombreuses femmes, mais elle exerçait sur lui un magnétisme qu’il ne pouvait interpréter, il était comme mesmérisé. Elle s’appelait Julia et elle était médecin, mais ses connaissances s’étalaient bien au-delà du domaine médical. Julia était de ces femmes avec lesquelles on pouvait converser des heures durant. Bien évidemment, leur attirance était réciproque et leur rencontre donna suite à de nombreuses autres. Ainsi, leur romance dura deux longues années, période durant laquelle les démons de notre écrivain avaient disparu ; mais cela était sans compter l’annonce que lui fit Julia un soir, elle portait son enfant. Il s’en réjouit bien sûr, mais il ressentait au plus profond de lui une anxiété qu’il n’avait jamais perçue auparavant. Neuf mois plus tard lorsque leur fils naquit, ce sentiment devint de plus en plus pernicieux le menant inexorablement à sa fâcheuse tendance. Malgré ses efforts pour être un bon père, ses 31


Essais /Articles nuits d’ivresse dégradèrent progressivement sa relation tel un delirium tremens qui détruit la santé mentale d’un alcoolique en sevrage. C’est ainsi qu’un an plus tard, alors que Julia l’avait quitté en emportant leur fils, et qu’il sortait d’un boxon avec une énième péridurale de l’esprit, une voiture le percuta de plein fouet. C’est alors que pendant qu’il s’éteignait sur le bas-côté de la route, qu’il trouva dans la mort une paix et une exaltation qu’aucune drogue ni aucune femme, en dehors de Julia, n’avait pu lui procurer. Il pensa à son fils et se dit qu’il valait mieux qu’il grandisse sans une telle figure paternelle, et mourut ainsi avec un sourire narquois sur le visage car la mort lui parut bien plus attrayante que la vie qu’il avait vécue. Yanis Ben

Camille Claudel, un génie emmuré De ces yeux immensément tristes, Camille Claudel a vu pour la première fois le monde en 1864. Née d’une famille aisée, passionnée de sculpture depuis son adolescence, elle déménage à Paris où elle suivra des études en art à l’Académie Colla Rossi (les Beaux-Arts étant fermés pour les femmes à l’époque). En 1882, elle est praticienne avec un groupe de jeunes filles à l’atelier du sculpteur Alfred Boucher, c’est alors que les chemins de Camille et de Rodin se croisent. L’artiste, déjà renommé (célèbre), sera très vite subjugué par le talent de la jeune femme et ne tardera pas à en tomber amoureux. Désormais ils travaillent ensemble, joignant (mettant) leur vie privée et artistique dans le même moule, elle réalisera avec lui un de ses chefs d’œuvre les plus connus : « le baiser ». C’est alors une période mouvementée, où les deux artistes ne cessent de s’influencer mutuellement.Dix ans passent depuis leur première rencontre, Camille et

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Rodin se quittent en 1892. Camille est alors une artiste accomplie et passe les 10 années suivantes à produire profusément. Ses œuvres les plus retentissantes restent « Les Causeuses » en 1895 et « L’âge Mûr » réalisée entre 1898 et 1913. Après sa rupture tragique avec Rodin, Camille ne recevait presque plus de commandes de l’état, elle était petit à petit vouée à l’oubli, « elle vivait seule entourée de chats » comme témoignera une connaissance de l’artiste, c’est ainsi que débuta sa descente aux enfers, Camille commença à accuser son ancien amant de chaque échec subit, et développera un sentiment de persécution qui l’entraina peu à peu dans les abysses de la paranoïa. L’an 1913 marquera sa coupure soudaine avec le monde et l’art.Un artiste se formera toujours une multitude d’identités, par rapport aux impressions qu’il a imprimé, aux sentiments qu’il a pu susciter chez le public. On préfère toujours romancer sur un artiste… ce qui est écrit ici n’a peut-être aucune

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Articles relation avec la réalité, et d’ailleurs, ce n’est pas le souci de vérité qui influence ces lignes. D’abord le portrait de la femme en soi. Ensuite le nom de Rodin, puis une paranoïa et 30 ans d’internement. Le tout est tragiquement beau, vous en consentez, j’espère, qu’il y’a une beauté incontestable à tout cela ? Mais jusqu’à quel point la tragédie d’un artiste, mis à part son talent, peut-elle nous pousser à lui porter davantage d’intérêt que pour un autre ? Que serait, pour moi, Camille si elle n’avait été l’élève de Rodin, si elle avait simplement mené une vie monotone, pris mari et engendré un bataillon d’enfants ? Son art aurait-il la même portée ? Regardez ses sculptures, regardez la femme. Était-elle une transition entre l’amoureuse et l’indépendante de Beauvoir ? Ne réussissait-elle pas grâce à l’amour et n’échouait-t-elle pas à cause de lui ? Ou n’avait-elle pas seulement supporté qu’on lui usurpa son art, seule consolation ? Qu’est-il resté à Camille après le désintérêt subit pour son art ? À quel point a dû souffrir l’artiste en elle, quels doutes devaient la

torturer… A quel point un artiste peut-il vivre sans échos ?Que peut-il advenir d’une âme lucide rongée par le doute ? Quand la sensibilité de l’artiste devient dangereuse, ce qui sépare « sensibilité » et « hypersensibilité » peut être aussi fin qu’un fil de soie. Et quand le tout bascule en délire ?Pour le monde, elle était l’élève de Rodin…et pour moi elle le reste aussi,au fond, élève prodige certes, mais néanmoins toujours définie par lui, à travers lui. De lui, elle a essayé de se détacher, mais son échec la rappelait à lui. Suite à leur rupture, elle le tenait (à tort ou à raison ?) pour seul responsable du désintérêt de la communauté de l’art pour son travail, elle voyait un complot amoureux, une expression de ressentiment dans le piège dans lequel tous les amoureux déchus finissent par tomber ; la trahison de sa famille venait renforcer son sentiment de persécution (leurs convictions catholiques et la condamnation de la société qui ne pouvait tolérer qu’une femme puisse sculpter le nu !)Par les soins de son frère diplomate et à l’appui de sa famille, Camille fut enlevée de sa maison et internée de force

jusqu’à la fin de ses jours. Privée de sa liberté de sculpter, elle souffrira de la faim, du froid et du mauvais traitement- alors réservé aux malades de psychiatrie pendant les années troubles de la seconde guerre mondiale-et finira par s’éteindre le 19 octobre 1943. Outre ses sculptures, elle laissa des lettres déchirantes adressées à sa famille et connaissances où se dépeint l’immensité de l’horreur et du chagrin d’un génie emmuré. Amina Benboureche

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Camille Claude

Camille Claudel, la jeune flle à la gerbe /Auguste Rodin, Galatée, 1889

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‫‪Poésie‬‬ ‫أجنّ‬ ‫أنهكته صحراء رجل برّ ي‬

‫أجن‬

‫رجل وحشي‬

‫أجنّ ‪ ...‬وليست لكلماتي‬ ‫مفردات‬

‫هل يبكي؟‬ ‫هل يحكي؟‬

‫أُحِنّ ‪ ...‬وليست لدموعي‬ ‫حكايات‬

‫أم يمارس طقوس الصمت‬ ‫‪.‬األسود المعمي‬

‫أحبّ ‪...‬وليست آلهاتي مُس ّكنات‬

‫أعانق الدموع كالعاد‬

‫أتأمل‪ ....‬وليست آلمالي إال‬ ‫خيبات‬

‫أواسي ضحايا العشق المغدور‬ ‫كالمعتاد‬

‫أحزن‪ ...‬وليست لمآسي نهايات‬

‫‪.‬وأر ّتل أشعاري العذراء للعباد‬

‫أفرح‪،‬أطير‪،‬أشتاق‪،‬أضحك‬ ‫‪..‬بصرخات و صرخات‬

‫فهل من مجاوبي فؤاد‬ ‫ابتاله العشق ّ‬ ‫الزهّاد؟‬ ‫هكذا قدري ! ‪ ..‬وهكذا تقتل‬ ‫األقدار العاشقات‬ ‫نادية لعروسي‬

‫‪34‬‬

‫أتكلم‪ .....‬وحروفي ليست من‬ ‫اللغات‬ ‫أعيش‪ ...‬وقلبي قد أعلن يوم‬ ‫الممات‬ ‫أمشي ‪ ..‬وخطاي أُتلفت في‬ ‫الممرات‬

‫‪.‬أنا فقدت تلك المعطيات‬ ‫‪.‬أهتف بأعلى الصيحات‬ ‫وأنادي أنا هنا اليوم واألمس ‪.‬‬ ‫والغد فهل من مستمعات أنيقات‬ ‫؟‬ ‫! لدروسي متعلّمات‬ ‫و لدموعي شاهدات؟‬ ‫أنا هنا اليوم شبه أنثى‬

‫أموت‪.....‬بالجسد وتحيا المفاجع‬ ‫بالذكريات‬

‫بنصف عقل‬

‫‪.‬أجنّ ‪ ...‬و ليس للجنون ديانات‬

‫و بربع قلب حائر‬

‫‪Journal de La Meute, numéro 5‬‬


Essais

Mère…

t’aimaient tant, eux tes vrais enfants ? Te voilà, pourtant, colonisée à nouveau par leur propre descendance.

Toi, mère, qui as vu grandir sous ton aile tes ravisseurs d’aujourd’hui. Ceux que tu as vu sourire, pleurer et mûrir. Oui, EUX que tu croyais tes alliés te poignardent, en ce jour, en plein cœur. Ça me fait mal, mère. Ça me tue de ne pouvoir te venir en aide. Ça me brûle vive de ne pouvoir t’offrir que ces mots trop vrais et trop durs. Mais telle est la réalité. Te souviens-tu ? Te souviens-tu des nombreux projets que j’avais ? Te souviens-tu de tous mes rêves ? Je voulais te rendre fière… Tellement fière… Mais vois-tu mère, ce n’est pas ma faute si on m’a amputé les ailes ! Je suis prise de nostalgie quand je repense à ceux que je qualifie de « tes enfants ». Ceux qui se sont donnés pour toi, cœur, corps et âme. Nous ? Rien… on n’a rien donné pour, ne serait-ce qu’un souffle de détresse de ta part. Nous nous contentons de te vider les veines… Tiendras-tu encore, mère ? Combien de temps tes seins vontils encore nous nourrir ? Jusqu’à quand tes trésors traceront-ils notre avenir ? Quand j’y pense, j’ai honte. Est-ce ta faute ? Les as-tu trop gâtés ? Je n’en sais rien… Le temps me le dira peut-être. Mais en attendant, que faire, mère ? Que faire pour t’aider à redresser la tête de nouveau ? Te faire revoir des années noires ? Ou bien te saouler du sang de tes amants ? Rien n’y fait. Ils gagnent, on perd. Devrons-nous t’offrir cela ? Notre sang ? On a peur, mère. On a peur quand on pense qu’il faudrait te détruire pour mieux te reconstruire. Je ne pense pas que ça en vaudrait la peine. N’est-ce pas ce qu’ils ont fait il y a 60 ans déjà ? Ne t’ont-ils pas détruite pour t’offrir ta dignité, eux qui

Si tu savais l’amour que je te porte, mère. J’aurais tout fait, tout donné… Fais-moi juste un signe, un seul qui m’indiquerait qu’ils n’abuseront plus de toi. Je vois tout sombre, je désespère. J’entends tes cris. Je distingue chacune de tes larmes. La douleur qui t’habite est grande… Et qu’elle est

immense ta déception ! Te sens-tu salie mère ? Je le ressens mère, je le sais, je le vois, je le vis. Pardonne-moi mère, de ne pas être à la hauteur. Pardonne-moi de t’abandonner à eux, tes ravisseurs. Patience, mère. Viendra le jour où, de mes mains, je signerai ta liberté. Je ne m’arrêterai pas à ta gloire, je chercherai tes sourires aux plus profonds de tes maux. Je soignerai tes blessures une à une. J’ai peut-être un petit espoir, en fin de compte… Te rappelles-tu de tes jours heureux ? Ces jours pleins d’amour, vides d’hypocrisie, chargés de couleurs, avides de bonheur et évacués d’anarchie… Je ferai renaître ton soleil chaleureux. Je redessinerai la beauté de tes filles ainsi que la force de tes hommes, aujourd’hui, malheureux. Je t’offrirai, mère, un 1er Novembre à ma façon. Promis, je t’en fais même le serment.

Journal de La Meute, numéro 5

R.H

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