20110706 Pascal Garnier

Page 1

CULTURE

mercredi 6 juillet 2011

10

Début aujourd'hui du Festival d'Avignon

Ouverture et création Cour d'honneur, et Levée des conflits, donnée au milieu d'une grande pelouse entourée du public. Le théâtre offrira , des grands rôles tragiques, traversés par un engagement farouche, souvent contre l'ordre établi. Ainsi, la première soirée sera consacrée à une création de Patrick Pineau, Le suicidé de Nicolaï Erdman, une comédie russe écrite sous Staline et longtemps censurée. Sera également donnée le premier soir une pièce sur le résistant polonais qui témoigna de la tragédie du ghetto de Varsovie pendant la guerre, Jan Karski (Mon nom est une fiction), d'après le roman de Yannick Haenel, dans une mise en scène de Arthur Nauzyciel. La chorégraphe belge Anne Terersa De Keersmaeker offrira un moment exceptionnel avec un spectacle dansé à l'aube. (AFP)

Le Festival d'Avignon 2011 ouvre ce mercredi sa 65e édition avec une volonté affichée de privilégier la création, au risque de se faire accuser d'oublier les grands classiques...

Rue bric-à-brac

Soirée heavy metal à Differdange Le service culturel de Differdange et F.H. Events créent l'événement en proposant une soirée heavy metal le 19 octobre au centre sportif d'Oberkorn. En début de concert, Amon Amarth, les rois du metal viking. Place ensuite au groupe As I Lay Dying. Les Grecs de Septicflesh auront pour mission de chauffer la salle differdangeoise. Billets sur www.luxembourgticket.lu

■ Sur les 35 grands spectacles annoncés, le festival se targue de présenter 22 créations dont 15 conçues spécialement pour cette manifestation qui se déroulera du 6 au 26 juillet. Dans Le Figaro de lundi, cependant, Fabrice Luchini dénonçait l'absence des grands classiques: «Je rêve théâtre et grands textes, à Avignon, pour Avignon et son public. Aujourd'hui, j'en suis très éloigné. J'ai le sentiment que c'est désormais le lieu d'une secte qui rejette les grands textes». «Ce qui est important, réplique Vincent Baudriller, co-directeur du festival avec Hortense Archambault, c'est l'ouverture auprès des artistes et du public. «La première idée du Festival d'Avignon, c'est celle d'un festival de création ou des artistes viennent proposer des nouvelles formes d'esthétique pour le plus grand nombre», insiste-t-il. «Il n'y a que 35 projets», relève-t-il, ce qui limite le nombre des artistes invités. «Tout le monde n'est pas au festival tous les ans». Denis Podalydès, membre de la troupe de la ComédieFrançaise et présent l'an dernier à Avignon, prend sa défense: «Le festival n'est pas là pour célébrer les valeurs consacrées. Il est là

Avignon Off Répétition de la pièce «Enfant» de Boris Charmatz pour créer, pour innover. C'est un lieu de polémique intellectuelle et artistique». Le metteur en scène Jérôme Deschamps doute que le Festival «se doive d'être le reflet de la vie artistique de la France». Le festival, dont l'artiste associé est le chorégraphe Boris Charmatz, attend parmi les stars Jeanne Moreau, qui jouera avec Etienne Daho Le condamné à mort de Jean Genet, et Juliette Binoche, qui sera Mlle Julie d'August Strind-

(Photo: Boris Brussey)

berg. Bertrand Cantat a en revanche renoncé à prendre place dans les choeurs de la trilogie de Sophocle Les Trachiniennes, Antigone, Electre, de Wajdi Mouawad, en raison de la polémique suscitée par sa présence. La danse ouvrira le festival avec Petit projet de la matière, une chorégraphie d'Odile Duboc recréée par Anne-Karine Lescop avec des élèves d'une école élémentaire d'Avignon. Boris Charmatz présentera Enfant, conçu spécialement pour la

Electre, de Sophocle, en... 2012 Le jury mandaté par la Theater Federatioun pour sélectionner la production qui représentera la création théâtrale luxembourgeoise francophone au Festival Off d'Avignon en 2012, a porté son choix sur Electre, de Sophocle, une production du théâtre du Centaure mise en scène par Marja-Leena Junker.

Soit dit en passant

Sortir du lot Le Théâtre XIII à Paris et son Concours pour jeunes metteurs en scène. Pourquoi nous y intéresser plus particulièrement? Parce que l'une des candidates fréquente nos plateaux théâtraux et que son parcours est emblématique des bonheurs et – surtout – des aléas de la vocation scénique. Franco-espagnole, mais ayant passé toute sa jeunesse à Luxembourg, et donc de ce fait typique de tant et tant de ceux qui «s'activent» au pays, Laure Roldan est parvenue à donner une première concrétisation à ses rêves de planches en se dotant d'une excellente formation – celle dont nous déplorons régulièrement qu'elle n'est pas suffisante ou «continuée» –, notamment en ce lieu prestigieux – on y est admis sur concours, on y reçoit l'enseignement de comédiens de référence – qu'est le CNSAD, le Conservatoire national supérieur d'art dramatique de Paris. Un beau diplôme évidemment, mais à peine un aboutissement puisque c'est alors que commence la «chasse aux rôles». Une quête qui, pour la plupart des comédiens – seuls quelquesuns sont réellement sollicités –, se poursuivra durant toute une carrière entrecoupée de longs moments de chômage, une carrière d'intermittence, et d'innombrables séances de casting,

d'audition, aux (non-)résultats si souvent frustrants. Un métier d'angoisse perpétuée donc, et dans tous les cas de figure: celle de l'absence de rôle, et, en cas d'un premier succès, celle de savoir si ça va durer. Il y a le talent et le métier, mais la chance aussi joue son rôle. Etre la/le partenaire d'une star généreuse ou s'imposer face à elle; faire partie de la distribution d'une production que la critique parisienne a eu le temps d'aller voir, ou plus sûrement aujourd'hui être l'invité «réactif» d'une de ces émissions de télé dont la controverse a priori est le mode de fonctionnement – encore fallait-il que ce jour-là, il y ait de la place dans le journal ou dans la distribution du talk show. «A eu le temps d'aller voir» venons-nous d'écrire. C'est que le marché culturel croule sous l'offre. Jetez un coup d'œil, en pleine saison, sur les deux cent cinquante propositions hebdomadaires parisiennes, la septantaine de propositions bruxelloises. La semaine prochaine, à Avignon, ce seront plus de 1.100 spectacles qui seront à l'affiche chaque jour! Sortir du lot? Il y a aussi des carrières discrètes, faites d'une accumulation de petits rôles. Loin du rêve quand même. ■ Stéphane Gilbart

L'enfer est en soi blient avec ce récit une préface inédite de Jean-Bernard Pouy qui écrit: «En le lisant, on comprend vite la force étonnante de ce regard, enveloppant, acerbe, dérangeant, humaniste et rageur. Ses textes sont comme des peintures. Ça se regarde, se détaille longtemps. C'est fait pour durer.» Et il est vrai que cette satire restera gravée dans les mémoires, comme perdurera également le sentiment de malaise et de claustrophobie qui s'en dégage. Preuve que Pascal Garnier a réussi ici un roman noir à forte valeur ajoutée, qui a d'ailleurs été porté à l'écran par Laurent Jaoui dans un téléfilm intitulé La Résidence et diffusé sur France 3 en mai dernier. ■ Nathalie Cailteux

Roman noir à l'humour grinçant, Lune captive dans un œil mort, de Pascal Garnier propose un huis clos dévastateur et terriblement captivant. ■ Le cadre de ce récit se situe dans une résidence de luxe réservée aux seniors, les Conviviales, avec promesse de soleil, confort et surtout sécurité. Martial et Odette sont les premiers à emménager dans l'une des nombreuses villas de la résidence. Ils attendront avec impatience la venue du prochain couple qui ne tardera pas, suivi de celle d'une femme seule et énigmatique. Dans ce cocon aseptisé, l'ennui s'installe doucement, et pour le tromper, les résidants s'observent, se comparent, se jugent. L'auteur varie avec humour et plaisir les points de vue des uns et des autres. Les craintes du monde extérieur écartées, ce sont les névroses personnelles qui reprennent le devant et mèneront la danse jusqu'à la note finale et tragique. Nul besoin d'une intrigue sophistiquée pour écrire un roman, confiait le romancier décédé en 2010: «La seule et véritable intrigue, c'est la vie. Ce sont les personnages qui créent l'histoire». Pascal Garnier, dont Lune captive dans un œil mort est l'un des derniers romans, démontre son talent de fin psychologue et ana-

lyste de la condition humaine. Les personnages sont criants de vérité avec leurs failles et leurs lâchetés. Ils se retrouvent seuls face à leurs souvenirs, à leurs défauts et à leur paranoïa, lorsqu'enfin il ne reste vraiment rien d'autre à craindre que soi-même, le rêve peut vite tourner au cauchemar. Et l'auteur n'est pas en reste pour instiller un humour grinçant dans le portrait des protagonistes et de leur résidence prétendument paradisiaque: «C'était un peu comme s'ils s'étaient payé l'éternité, ils n'avaient plus d'avenir. Preuve qu'on pouvait s'en passer». En hommage au romancier et peintre français que fut Pascal Garnier, les éditions Points pu-

Lune captive dans un œil mort, de Pascal Garnier, paru aux éditions Points (ISBN 978-2-7578-2360.6; 153 pages.

Jeu-concours Pour gagner le poche de la semaine, envoyez un SMS au 644 47 avec le code: Voix (espace) Nom (espace) Prénom (espace) Garnier Les gagnants tirés au sort seront prévenus par retour de SMS et pourront retirer leur exemplaire à la librairie LIBO au 11, rue du Fort Bourbon à Luxembourg. www.libo.lu


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.