Agriculture durable de moyenne montagne

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AGRICULTURE DURABLE DE MOYENNE MONTAGNE 2008 – 2009

Etude réalisée avec le soutien financier de :


TABLE DES MATIERES

I – Eléments de contexte : le réseau CIVAM et la Moyenne Montagne........................ 4 II – Les objectifs visés : mise en place d’un réseau « Moyenne Montagne » .............. 11 III – Les enjeux des territoires concernés..................................................................... 17 IV – Les agriculteurs CIVAM concernés..................................................................... 27 V – Les premiers résultats en terme de durabilité des systèmes de production ........... 29 VI – Identification des actions à mener........................................................................ 94 VII – Les réponses déjà engagées au sein des territoires ............................................. 98 VIII – Les suites à donner au projet ............................................................................. 99

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Introduction : La moyenne montagne est constituée d’une multitude de territoires aux contextes pédoclimatiques, socio économiques, culturels et agronomiques différents. On la trouve très largement représentée en France du Massif Central aux zones de piémont, en passant par les grands massifs montagneux ou la Corse ; des régions humides aux montagnes sèches de type méditerranéen. Le réseau CIVAM y est implanté depuis longtemps et les différents groupes présents y développent des initiatives qui leur sont propres. Les thématiques sont variées : de l’économie d’intrants à l’accueil éducatif et social, en passant par les circuits courts et la biodiversité… Depuis le Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, la politique du mouvement CIVAM est de s’inscrire dans une démarche d’agriculture durable prenant en compte de manière synchrone les trois dimensions (environnementale, sociale et économique) de celui-ci, et en se basant sur les 27 principes énoncés. Alors que les groupes des territoires du Grand Ouest se sont emparés assez rapidement du concept, avec la création par exemple du Réseau Agriculture Durable, les groupes de moyennes montagnes sont restés ancrés sur leurs thématiques propres. Aujourd’hui, la FNCIVAM se propose de jeter les bases de la durabilité des systèmes de production de moyenne montagne afin d’initier éventuellement une dynamique collective de réflexion et de progression dans la démarche. Le massif, au sens de la Délégation Interministérielle à l’Aménagement et à la Compétitivité des Territoires (DIACT), du Massif Central a été ciblé, de part sa diversité de contextes pédoclimatiques et donc de systèmes d’exploitation agricole, afin d’initier une étude sur 93 exploitations soumises à diagnostics de durabilité. La grille IDEA (Indicateurs de Durabilité des Exploitations Agricoles) de la DGER a été choisie comme base de diagnostic. Les résultats seront soumis à un traitement statistique en vue d’identifier les liens existants entre les trois dimensions du développement durable et de proposer des pistes de progrès en vue d’améliorer collectivement les niveaux de durabilité des exploitations. Ces résultats seront également confrontés aux enjeux des territoires de moyenne montagne identifiés de façon collégiale. Diverses comparaisons seront également présentées que ce soit entre régions, systèmes de production ou encore modes de production (biologique ou plus conventionnel)… et une typologie sera proposée. Enfin, les pistes de progrès seront également présentées et donneront lieu aux suites à donner au projet, pour plus de durabilité des exploitations, mais aussi des territoires de moyennes montagnes.

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I – Eléments de contexte : le réseau CIVAM et la Moyenne Montagne

A – Un réseau « Agriculture Durable » de Moyenne Montagne ? 1. Objectifs du projet : 1.1. Eléments de contexte : rappels Récemment les propositions issues du Grenelle de l’Environnement ont confirmé la pertinence de la majeure partie des actions de terrain de la FNCIVAM. On peut citer comme exemples : La nécessité d’une approche énergétique globale au niveau de l’exploitation agricole, La préservation de la fertilité des sols en lien avec les potentialités agronomiques, Le maintien et le redéploiement de la biodiversité au sein des agrosystèmes, Le développement d’une meilleure alimentation orientée vers l’agriculture biologique et si possible locale, La réduction drastique de l’utilisation des pesticides en agriculture (et des intrants au sens large), Le développement de l’agriculture durable… Or, une des conséquences de ces débats est l’appropriation par l’ensemble des acteurs du développement agricole, sous leurs propres acceptions, du terme « durable ». Ceci nous conduit à réaffirmer les contours du modèle d’agriculture durable que le mouvement CIVAM défend depuis près de quinze ans – rappelons à cet égard que 174 pays, dont la France, ont ratifié la définition du Développement Durable en 1992 dans la déclaration de Rio – et les modalités pratiques de sa mise en œuvre. En particulier : Le fait de considérer l’agriculture comme une partie intégrante de l’activité humaine en interdépendance avec son environnement, la conduisant à prendre en compte le respect du développement endogène des territoires dont ses aspects de protection de l’eau, de la biodiversité, du respect de la fertilité des sols, de la gestion des ressources locales et globales (forêt, énergies,…)… mais aussi ses dimensions sociales et économiques. La nécessaire approche pluridisciplinaire de l’analyse de la durabilité. Les modalités de gouvernance qui doivent être adaptées localement, et que chacun peut concevoir par rapport aux enjeux de son territoire. L’enjeu pour la FNCIVAM est de rendre lisible les formes d’agriculture durable qu’elle promeut sous la forme de références socio-technico-économiques adaptées aux territoires, pour différents couples Territoires-Systèmes de production, à destination des agents de développement agricole ou territoriaux, aux apprenants de l’enseignement agricole, mais aussi des élus, des collectivités territoriales et du grand public. Ainsi, l’ambition de la FNCIVAM (en plus de ces actions générales habituelles) est : - D’identifier un panel de chiffres clés susceptibles de caractériser les dynamiques durables des exploitations agricoles françaises et de les expérimenter en lien avec un réseau de fermes représentatives de leurs territoires respectifs ; - De constituer en zone de moyenne montagne (principalement Massif Central et contreforts pyrénéens) un réseau de groupes d’agriculteurs investis dans la recherche de pratiques agricoles durables adaptées aux exigences de leurs territoires (sols, climat, isolement par rapport aux infrastructures et zones de chalandises…) et de mutualiser les résultats de leurs premières expériences en vue de construire les repères et contours de la durabilité de systèmes agricoles de moyenne montagne ; - De jeter les bases d’une réflexion sur les spécificités de l’agriculture durable en zone méditerranéenne. Aujourd’hui, au sein du réseau CIVAM, des groupes ont déjà commencé des démarches à différents niveaux, que ce soit autour des systèmes herbagers et d’une meilleure utilisation de l’herbe, autour de réflexions sur la fertilité des sols, de la valorisation des produits issus de l’agriculture biologique ou même de la contribution à l’emploi sur les territoires… Le projet « Agriculture Durable de Moyenne Montagne » s’intègre dans cette logique globale et se veut ambitieux dans une approche pluriannuelle. Il est décrit comme suit :

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1.2. Objectifs : Dans un premier temps, il s’agira d’identifier sur les différents territoires de moyenne montagne, les systèmes de production représentatifs support de l’étude. A partir de ces couples « Territoires – Systèmes de production », sera réalisée une capitalisation des expériences menées au sein du réseau CIVAM et partenaires vers plus de durabilité des systèmes de production (diagnostics de durabilité, expérimentations, changements de pratiques en vue d’une meilleure efficience économique des systèmes, d’une plus-value environnementale ou encore de davantage de liens sociaux). Des informations complémentaires seront collectées en vue de réaliser des typologies des systèmes en accord avec les documents plus officiels de type INRA ou Institut de l’Elevage. Ces typologies et cette production de références en termes de développement agricole durable prendront nécessairement en compte et de façon synchrone, les trois piliers du développement durable (environnemental, économique et social). Une fois ces objectifs atteints, des documents de communication seront produits à destination des agents de développement agricole ou plus largement des agents de développement territorial, ainsi que des structures d’enseignement agricole, des élus… Par la suite, à partir d’un réseau d’exploitations pilotes, un programme d’actions pluriannuel sera défini, à partir des pistes de progrès identifiées pour amener les structures agricoles vers plus de durabilité, en vue d’un développement durable des territoires et de leurs enjeux propres. Ce projet se déroulera sur les zones de moyenne montagne où le réseau CIVAM et partenaires sont présents : • Massif Central au sens DIACT (régions Auvergne, Limousin, Midi-Pyrénées, Languedoc Roussillon, et Rhône-Alpes) • Pyrénées (régions Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc Roussillon) • Alpes (région PACA et Rhône-Alpes)

2. Objectifs poursuivis pour 2008-2009 : • • • •

Identification des animateurs et des différents partenaires concernés en vue de définir un comité de pilotage puis un comité technique qui mettra en œuvre les actions sur le terrain. Ce comité de pilotage aura également pour objectif de définir les aspects méthodologiques du projet. Capitalisation des expériences déjà menées sur les territoires, ainsi que des différents diagnostics de durabilité réalisés et analyse des résultats en lien avec les enjeux des territoires. Cette capitalisation pourra faire l’objet de documents de communication. Collecte d’informations complémentaires et mise à contribution des partenaires pour s’assurer d’une représentativité suffisante des résultats. Réalisation de documents de synthèse et de communication à partir des résultats obtenus à destination de différents publics cibles.

Publics cibles : Agriculteurs support d’étude : restitutions aux exploitants et identification des pistes d’amélioration en matière de durabilité de leurs systèmes de production. Autres agriculteurs : sessions de formation en lien avec les résultats obtenus, et via les organismes de développement agricole et partenaires associés. Agents de développement agricole : soit par le biais de formations, soit par les documents produits. Elèves et apprenants de l’enseignement agricole en formation initiale ou continue : par la diffusion des résultats et des documents réalisés.

3. Moyens mobilisés : Moyens humains : Le projet mobilise un animateur national coordinateur de la FNCIVAM et les animateurs régionaux, départementaux ou de groupes concernés géographiquement par les territoires de moyenne montagne. De plus, certains partenaires, des institutionnels et financeurs ainsi que des experts scientifiques, techniques ou de la durabilité des systèmes de production ou des territoires seront conviés au comité de pilotage du projet. Méthodologie de projet : Le comité de pilotage, qui aura la charge de concevoir la méthodologie, de fixer les orientations et de suivre l’avancement du projet, se réunira quatre fois dans l’année. Des conventions seront signées avec les partenaires du projet.

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Déroulement des actions prévisionnelles : i. Conception d’une grille d’expertise des expériences menées dans les groupes d’agriculteurs et remontées des diagnostics de durabilité des exploitations réalisés. ii. Analyse critique des résultats au regard des enjeux des différents territoires de moyenne montagne concernés. iii. Définition des informations complémentaires à collecter en vue d’une meilleure représentativité des systèmes de production ou de meilleure adéquation aux références « officielles ». iv. Collecte et traitement des données, puis analyse des résultats v. Identification des pistes d’amélioration par système de production et/ou par territoire pour plus de durabilité et définition d’un programme pluriannuel d’actions pour plus de durabilité des exploitations et des territoires. vi. Rédaction du rapport du projet et conception des documents de communication.

4. Effet multiplicateur potentiel : Ce projet s’intègre dans une démarche plus globale conduite par la FNCIVAM portant sur l’agriculture durable appliquée aux territoires. Il s’articule en effet avec une démarche similaire portant sur la zone méditerranéenne et en complémentarité avec un travail plus ancien mené par le RAD (Réseau Agriculture Durable, Civam national) dans le Grand Ouest sur les systèmes herbagers, les systèmes fourragers économes en intrants, ou encore le cahier des charges en cours de testage sur les grandes cultures économes. Toutes ces expériences seront mises en commun dans un autre projet sur les indicateurs du développement durable, où un panel simple d’indicateurs, facilement calculables en vue d’une approche de la durabilité des systèmes d’exploitation à l’échelle de n’importe quel territoire et pour n’importe quelle production, serait pertinent. Au final, et dans une démarche pluriannuelle, il conviendra de faire les liens entre ces différents projets menés à des échelles territoriales différentes pour revenir à une dimension plus globale concernant le développement durable de l’agriculture construite à partir des enjeux territoriaux. C’est le défi que s’est lancée la FNCIVAM dans un programme pluriannuel de développement agricole. Par ailleurs et à moins long terme, l’effet multiplicateur pourra être perçu à différents niveaux : - Au niveau local, territorial, par la diffusion d’expériences innovantes au service du territoire, la mise en place de nouveaux échanges et de nouvelles mutualisation des expériences entre agriculteurs - Au niveau régional, par des échanges et des formations dispensées par les réseaux de développement et d’enseignement agricoles. - Au niveau national, par une harmonisation des approches territoriales en vue d’un développement durable de l’agriculture à l’aide de références construites sur les territoires et leurs enjeux propres. - Au niveau européen par la sensibilisation des élus autour d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement, des hommes et compétitive économiquement car moins gourmande en intrants et donc moins sensibles aux variations du cours du pétrole, et moins dépendante des aides publiques. On peut également appréhender l’effet multiplicateur par l’entrée du développement agricole et territorial en permettant la sensibilisation et la formation des agents de développement agricole et/ou de développement local et territorial. De même, la sensibilisation des apprenants en formation initiale et continue grâce à des partenariats pérennes avec la DGER, donc l’enseignement agricole peut s’avérer être une formidable opportunité de multiplication du projet.

B – La moyenne montagne : une grande diversité de territoires Il n’est pas aisé de définir la notion de moyenne montagne. En effet, vue d’en haut, celle-ci se confond avec le piémont, voire avec la plaine ; et vue d’en bas elle ne semble être que le contrefort d’une lointaine et impressionnante silhouette. Suivant les auteurs, les approches sont très différentes : du point de vue du géographe, les notions d’altitude, de relief, de climat, de végétation ou encore d’étagement de celle-ci sont les éléments clés à prendre en compte ; l’économiste, quant à lui, considère plutôt les ressources, les adaptations (notamment celles de l’agriculture), l’industrie et le degré de diversification des activités économiques, dont dépend l’emploi ; le sociologue parle de la pugnacité montagnarde et d’âme paysanne ; enfin l’agronome utilise l’entrée de la conduite des systèmes de production avec de l’élevage extensif (ce qui n’est pas toujours le cas en moyenne montagne) avec des périodes de végétation courtes et des productions sous signes officiels de qualité. Les diversités géographiques, socio-économiques et agricoles de la France font de la moyenne montagne une entité difficilement généralisable.

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1 – Aspects géographiques : une combinaison de plusieurs facteurs On appelle moyenne montagne (par opposition à haute montagne) les régions présentant un caractère montagneux (pente, relief, climat) mais offrant des conditions relativement accueillantes, permettant le développement de la végétation (forêts, alpages). En effet, ce milieu peut être défini au niveau géographique comme ayant une altitude supérieure à 600 mètres ou un dénivelé entre le point culminant et sa base de 400 mètres. Cette définition de la CEE pour la constitution des zones de montagne en 1971 prend ainsi en compte les hauts plateaux dont l’altitude constitue l’élément caractérisant de la montagne, mais aussi les zones de relief dont la pente dessine les volumes du massif. On se propose de compléter cette approche par une vision segmentée et disciplinaire complémentaire. La montagne peut être définie au sens géographique par au moins cinq critères : l’altitude, le relief, le climat, la végétation et l’étagement. 1.1. L’altitude L’altitude, à elle seule, ne constitue pas un facteur restrictif dans la définition de la montagne (contre exemple : hauts plateaux). C’est plutôt l’altitude relative, définie par la dénivellation entre les points hauts et bas de la montagne, ou encore la différence altitudinale entre la montagne et ses régions environnantes, qui doit être prise en compte. « La montagne est alors un relief en saillis, vigoureux avec des versants ». 1.2. Le relief La montagne dessine un important volume de relief. Celui-ci commande le potentiel d’érosion qui s’exprime à travers les pentes. On considère une zone de montagne lorsque la pente moyenne est supérieure à 20%. 1.3. Le climat « On considère comme montagne tout relief qui, par son altitude provoque des modifications du climat zonal ou local ». Ainsi, certains hauts plateaux peuvent être concernés (ex : Grands Causses…). En général, il y a diminution de la pression de l’air et de l’hygrométrie et les versants entraînent une diminution de l’albédo (% de radiation solaire réfléchie), ce qui se traduit par une augmentation de la température. Or, celleci diminue pourtant avec l’altitude. Le gradient thermique altitudinal moyen (référence : les Alpes) est de – 0,55°C / 100m. Cette baisse de température entraîne des précipitations et le gradient pluviométrique varie de 1 à 10 mm de précipitation par mètre de dénivellation selon la zone concernée. Cette relation est toute relative, si l’on considère les montagnes dites « sèches » (partie sud du Massif Central et influence du climat méditerranéen). 1.4. La végétation Celle-ci se dispose suivant l’étagement climatique de la montagne. De même, l’altitude introduit une modification des espèces végétales des plaines environnantes. Les formations arborées deviennent des fourrés, de la brousse, de la lande, de la prairie ou de la pelouse. Plus les montagnes sont élevées, plus les différenciations altitudinales sont importantes. On assiste à la fois à un appauvrissement de la richesse floristique avec l’altitude (de plus en plus de plantes vivaces), et à une augmentation du taux d’endémicité (espèces endémiques / espèces totales) liée aux changements climatiques passés. Enfin, la période végétative est également fonction de l’altitude (températures, durée d’éclairement…). Dans les Alpes, par exemple, celle-ci diminue de 7 à 9 jours par 100 m. Elle est par ailleurs influencée par le type de climat dominant (continental, océanique ou méditerranéen) qui influence notamment les conditions estivales et hivernales. 1.5. L’étagement Les Alpes servent de modèle pour caractériser les différents milieux montagnards : De 0 à 900 m : étage collinéen, exploité par l’homme (cultures), domaine des feuillus (chêne, charme, châtaigner…). De 900 à 1600 m : étage montagnard, dominance de la hêtraie sapinière, pins sylvestres en zone sèche, épicéa en altitude. L’homme exploite cette zone par des prés de fauche et du pâturage.

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De 1600 à 2100 m : étage subalpin, disparition des feuillus au détriment des résineux (épicéa, pin cembro, pin à crochets, mélèze…). De 2100 à 2200 m : zone de combat (« timber line »), limite bioclimatique de l’arbre qui se raréfie au profit de lande à arbrisseaux nains. De 2200 à 3000 m : étage alpin, pelouses ou prairies alpines. De 3000 à 4000 m : étage nival, apparition des neiges éternelles, lichens et plantes pionnières Ces étages sont variables en fonction de la combinaison de nombreux facteurs (latitude, position, climat, sols, histoire…) et selon le type de substrat : calcaire, cristallin ou volcanique.

Au final, du point de vue géographique, la moyenne montagne pourrait se définir, dans les zones tempérées, comme la partie comprise entre l’étage collinéen et l’étage alpin, soit entre 900 et 2200 m, avec des pentes de plus de 20%. La limite inférieure est abaissée à 500-600 m pour le Massif Central, les Vosges, le Jura ou encore les moyennes montagnes méditerranéennes qui présentent des contextes très proches voire semblables à 500 et 900 m.

2 – Aspects socio-économiques : le triptyque enclavement – diminution de l’activité économique – désertification Bien que l’agriculture reste un des piliers majeurs de l’économie des zones montagnardes, et la présence des agriculteurs le dernier rempart, dans bien des cas, contre une totale désertification ; il n’en reste pas moins que l’espace montagnard se caractérise par sa faible densité de population (23% du territoire national pour 8% de la population). De plus, la répartition est inégale : les zones les plus difficiles, souvent les plus fragiles, se dévitalisent et se désertifient, entraînant une relative déprise agricole. D’une autre manière, la pente a pour conséquence des problèmes d’accessibilité et donc un sous-équipement en infrastructures de transport. Cette importante contrainte gène le développement des activités et on assiste donc à un certain manque de diversité économique. Ceci s’est traduit par des décennies d’émigration, accentuant alors le phénomène. Cependant, la montagne présente une longue tradition artisanale voire industrielle de par la présence, parfois importante, de ressources naturelles : eau, bois, matières premières et main d’œuvre, mais aussi un cadre de vie préservé, des espaces, des parcs naturels…qui appellent à une diversification vers le tourisme. L’influence des « bas pays » encadrant est également un facteur déterminant. En effet, ceux-là ont attiré les hommes, les activités, et donc les villes qui sont les centres de décision et où se concentrent les industries. Ce contexte a amplifié davantage encore la baisse de densité de population et d’activité économique des montagnes, conduisant à la concentration des services publics, des sources d’approvisionnement et des marchés dans les pôles urbains. Cet éloignement implique d’importants surcoûts de transport, des pertes de temps et des prix locaux majorés. Outre les surcoûts dans l’achat de biens de consommation courants, ces contraintes se traduisent par des surcoûts dans l’achat des intrants agricoles. Ainsi, il y a une permanence d’un important différentiel de revenus, puisque le revenu disponible des exploitations agricoles de montagne est de 19% inférieur à la moyenne nationale en 2000 et inférieur de 16% par rapport à l’agriculture de plaine (RICA-Agreste ; 2000). Ce phénomène est encore accentué du fait que l’hectare agricole montagnard est moins « aidé » que l’hectare en zone de plaine. Le sénat (mission commune sur la politique de montagne ; 2002) souligne l’hétérogénéité entre cantons. En effet, les montagnes françaises ne sont pas toutes logées à la même enseigne et présentent des typologies différentes. Les typologies dépendent des contextes économiques et géographiques : Zones à « Grand tourisme confirmé » : fortes capacités d’accueil, d’emplois (Alpes du Nord-est, une partie des Pyrénées, Sud de la Corse) Zones à développement diversifié : attractivité démographique (Préalpes du Sud) Zones à économie et démographie fragiles : population en déclin (Massif Central) Zones à forte influence urbaine : population jeune, nombreuse, emplois diversifiés, villes « moteurs » ou situées dans les basses vallées (Alpes du Nord)

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Zones à cantons désertifiés en conversion touristique : faible densité de population, âgée, enclavement, tourisme (étage agro-forestier des montagnes sèches ; Massif Central : Vivarais, Cévennes, Limousin, Auvergne ; Alpes du Sud ; chaînes pré-pyrénéennes) Zones à Industrie en difficulté : fort emploi industriel, mais en recul, peu de tourisme (Vosges, sud du Jura, vallée de la Maurienne, Beaujolais, vallée de la Dore, sites industriels du Massif Central, vallée de l’Ariège, piémont pyrénéen) Zones très agricoles à très forts handicaps : spécialisation agricole, emplois en recul (Massif Central, Corse centrale, petite partie des Pyrénées) Enfin, sur le plan social, plus jeunes, les hommes chefs d’exploitation sont aussi plus souvent célibataires : 28% en zones de montagne, contre 20% sur l’ensemble du territoire. La proportion de célibataires atteint même parfois un tiers. Déjà important chez les agriculteurs, le célibat masculin est amplifié en zones de montagne, où les exploitations sont relativement petites et parfois situées dans des villages isolés qui se désertifient, en raison de l’absence de commerces et services, et donc d’emplois.

3 – Aspects agronomiques : de l’élevage extensif, en majorité, tourné vers des productions labellisées Essentiellement tournées vers l’élevage en raison des conditions pédoclimatiques, les unités de montagne nécessitent une quantité de travail importante. Ce travail est assuré en quasi-totalité par le chef d’exploitation et sa famille (on note d’ailleurs une forte contribution du bénévolat des grands-parents). Les salariés ne fournissent que 7% du travail agricole total, contre 21% sur l’ensemble des exploitations (Agreste ; 2000). Les superficies sont souvent très inférieures à la moyenne nationale, et présentent moins de terres labourables. Ainsi, les cultures pratiquées sont souvent liées à l’élevage, puisque 80% de ces exploitations possèdent des surfaces importantes en prairies permanentes. Les parcours et les landes sont parfois très présentes également, ainsi que les estives. L’importance de la STH (Surface Toujours en Herbe) est évidemment due aux conditions pédoclimatiques et à la pente. Les différents contextes amènent alors les exploitants à piloter finement leurs itinéraires techniques et à toujours fonctionner en termes de gestion du risque. Le matériel agricole est alors adapté à ces structures : destiné à la récolte des fourrages. Cependant, à taille égale, il est parfois plus onéreux (éloignement des fournisseurs et de l’entretien). De la même façon, le commissariat général au Plan a estimé, pour les bâtiments d’élevage, un surcoût de 30% de l’investissement agricole en montagne par rapport à la plaine, en raison notamment du climat (durée de construction) et de la pente (terrassements). Si l’on ajoute à cela une période végétative plus courte et une période hivernale, où les animaux sont en stabulation, plus longue, ce qui implique des capacités de stockage des fourrages plus importantes, on s’aperçoit que les systèmes montagnards ont un coût par animal logé, plus élevé. Du fait de ces contraintes, la production est orientée essentiellement vers l’élevage de ruminants qui représente plus des trois quarts des exploitations de montagne. L’élevage bovin viande y est très largement représenté, puisque l’Agreste estime à environ 78 000, le nombre d’exploitations spécialisées dans cette production, en zone de montagne. On les rencontre notamment beaucoup dans les zones berceaux de races allaitantes (Limousin, Massif Central, piémont pyrénéen, Aubrac…). En ce qui concerne l’élevage ovin viande, en déclin depuis trente ans sur l’ensemble du territoire, il subsiste malgré tout en zones de montagne. En effet, ce ruminant valorise très bien les ressources fourragères « maigres » et se maintient dans les zones sèches (Lot, Aveyron, zone méditerranéenne) mais également dans les zones très herbagères (Limousin, Massif Central, Pyrénées). L’élevage bovin lait est également assez répandu en zone de montagne et n’a rien à envier aux zones de plaine en ce qui concerne les performances technico-économiques, puisque ramenés en marge par UGB, les résultats sont comparables entre plaine et montagne. Le produit brut par UGB est certes inférieur en raison d’une productivité laitière un peu plus modeste, mais les systèmes montagnards sont plus économes en charges opérationnelles, surtout en frais d’intensification fourragère. Certaines productions de montagne sont d’ailleurs très rémunératrices et dépassent les résultats économiques des systèmes de plaine ; c’est notamment le cas des filières AOC Comté ou Laguiole. L’élevage de brebis laitières, quant à lui, n’est présent que quasi exclusivement en zone de moyenne montagne, que ce soit les brebis Lacaune pour la production de Roquefort, ou les brebis Basco béarnaises ou Manech pour la production de tomes de brebis pyrénéennes comme l’Ossau Iraty. Enfin, on peut remarquer que l’élevage caprin, en plein essor, se développe sur la moyenne montagne, notamment sur la partie des contreforts sud du Massif Central (Aveyron notamment).

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De manière générale, cet élevage est nettement plus extensif puisque le chargement moyen est de 0,7 UGB/ha SFP, contre 1,1 UGB/ha SFP pour la France entière. Cependant, cette moyenne masque quelques disparités : certains élevages spécialisés en lait sont en général assez chargés et comparables aux systèmes laitiers de plaine avec une alimentation à base de maïs ensilage et tourteau de soja (ex : châtaigneraie cantalienne, piémont pyrénéen, bordure est du massif central…) ; de même, en ovins lait (Roquefort), certains systèmes pourraient être assimilés à des élevages « extensifs déguisés » qui incluent dans leur SFP des surfaces importantes en parcours (baisse du chargement), et qui conduisent certaines surfaces à meilleur potentiel de façon très intensive. En outre, contrairement à l’idée reçue, seuls 22% des chefs d’exploitation de montagne sont aujourd’hui pluriactifs, ce qui correspond à la moyenne française. La pluriactivité montagnarde est plus répandue dans les Alpes du nord où l’emploi (notamment services liés à la pratique du ski) est plus abondant. Par contre, la diversification tend à se développer, notamment en faveur d’activités liées au tourisme. Enfin, de manière générale et quasi systématique, les exploitations de montagne tirent partie de leur contexte. En effet, les fonctions paysagères et productrices de la moyenne montagne sont orientées vers les marchés d’aval, c’est-à-dire la plaine, et donc la ville et ses habitants qui sont les premiers consommateurs des produits et aménités offerts par la moyenne montagne. C’est donc tout naturellement que les filières de moyenne montagne se sont tournées vers l’image positive qu’offrent les contextes naturels, paysages et races locales en tête. Sur quasiment toutes les zones qualifiées moyenne montagne, on trouve AOC, Labels Rouges, IGP et Agriculture Biologique en nombre. En effet, la moyenne montagne, qui paraît constituer un des biotopes les plus favorables pour de nombreuses espèces sauvages ou domestiques, doit surtout être reconnue pour le développement des savoir-faire des hommes, en particulier grâce à la pugnacité de ses agriculteurs qui ont su tirer profit de leurs contraintes pour les tourner en atouts de communication.

C – L’Agriculture Durable au sens CIVAM L’agriculture durable pratiquée localement en France par le réseau CIVAM se veut une agriculture écologiquement responsable, socialement équitable et économiquement viable en assurant l’emploi sur les territoires. Elle s’appuie sur un développement durable articulé sur des projets de vie individuels et collectifs des acteurs des territoires. Elle permet une production de qualité assurant des revenus décents et elle s’appuie sur des économies d’énergies, le respect des cycles naturels, la combinaison de savoir-faire et les échanges d’expérience. Ce développement est soutenable. Il débouche sur une production répondant aux besoins, une commercialisation locale, une alimentation de qualité et une valorisation de l’accueil familial, social et éducatif en milieu rural qui favorise les échanges ville-campagne. L’agriculture durable se définit sur trois piliers évaluables par des indicateurs mesurant les dimensions environnementales, sociales et économiques auxquels se rajoute un pilier transversal de transmission notamment par les échanges éducatifs et culturels. Elle correspond donc aux quatre dimensions suivantes :

C’est une agriculture qui protège les ressources naturelles afin de permettre aux générations futures de répondre à leurs propres besoins. Cela passe par la préservation de l’environnement, de la biodiversité et des territoires. Elle prend en compte la gestion des paysages, la qualité de l’air, de l’eau et des sols et garantit une alimentation saine. Elle donne la priorité aux cycles naturels et permet une forte réduction des intrants à forte nuisance environnementale (engrais, pesticides, soja importé…). Elle se base sur les potentialités agronomiques naturelles des sols en vue de maintenir leur fertilité à long terme.

C’est une agriculture qui garantit une efficience économique avec des revenus décents et qui s’appuie sur des systèmes économes et autonomes. Elle permet une baisse des charges, une diminution des coûts pour la collectivité tout en valorisant le travail. Elle est plus autonome par rapport aux aides publiques et plus en cohérence avec les ressources locales et les enjeux territoriaux. Elle favorise les conditions de travail.

C’est une agriculture qui favorise l’équité sociale en valorisant le travail et les emplois avec un partage équitable des richesses et des droits à produire. En permettant une multifonctionnalité, elle participe à la vie et au dynamisme des territoires ruraux. Elle contribue à l’emploi ; elle facilite la transmission ; elle crée des liens sociaux entre le monde rural et les villes. La prise en compte des réalités locales et territoriales et la dynamique sociale créent une solidarité avec les pays du Sud.

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C’est une agriculture à dimension humaine et éthique qui a un impact culturel et éducatif. D’après la déclaration de Rio, « l’homme est au centre des préoccupations pour une vie saine et productive en harmonie avec la nature, dans le respect des générations présentes et futures ». Elle favorise les échanges, la mutualisation, l’initiative et la solidarité. Elle assure un nouvel équilibre entre les hommes, les territoires et le vivant. Les hommes s’associent ainsi à des choix responsables pour être acteurs de l’évolution de leur cadre de vie, dans un réel modèle démocratique de gouvernance.

II – Les objectifs visés : mise en place d’un réseau « Moyenne Montagne »

A – Rappel des objectifs •

Identification des animateurs et des différents partenaires concernés en vue de définir un comité de pilotage puis un comité technique qui mettra en œuvre les actions sur le terrain. Ce comité de pilotage aura également pour objectif de définir les aspects méthodologiques du projet.

Capitalisation des expériences déjà menées sur les territoires, ainsi que des différents diagnostics de durabilité réalisés et analyse des résultats en lien avec les enjeux des territoires. Cette capitalisation pourra faire l’objet de documents de communication.

Collecte d’informations complémentaires et mise à contribution des partenaires pour s’assurer d’une représentativité suffisante des résultats.

Réalisation de documents de synthèse et de communication à partir des résultats obtenus à destination de différents publics cibles

B – Méthodologie du projet 1 – La définition commune de la moyenne montagne et le zonage proposé : Un travail en commun a été effectué au sein du réseau de groupes présents sur les territoires de moyenne montagne afin de définir la moyenne montagne au sens du réseau. Cette approche est présentée ici dans la partie précédente (B – La moyenne montagne : une diversité de territoires). Pour cela, un travail préparatoire a été réalisé (bibliographie assez rare), qui a été validé par la suite en comité de pilotage au début 2008. Les différents enjeux communs ont également été validés sur une base de raisonnement

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consistant à définir un socle commun de la problématique ainsi que les réponses possibles. La synthèse de ce travail est présentée dans la partie IV – B – Les enjeux communs aux groupes de la moyenne montagne.

2 – Les diagnostics de durabilité : la prise en compte simultanée des trois dimensions du développement durable 2.1. – les différents diagnostics utilisés

Le diagnostic IDEA (Indicateurs de Durabilité des Exploitations Agricoles) :

Cette méthode s’appuie à l’origine sur la définition de l’exploitation durable par LANDAIS (1998) : « une exploitation viable, vivable, transmissible et reproductible ». Par ailleurs, et dans une plus large mesure, l’agriculture durable est quant à elle communément qualifiée comme écologiquement saine, économiquement viable et socialement juste et humaine. « La viabilité implique, en termes économiques, l’efficacité du système de production et la sécurisation des sources de revenus du système de production agricole, face aux aléas du marché et aux incertitudes qui pèsent sur les aides directes. (…) La vivabilité s’attache à analyser si l’activité agricole assure une vie professionnelle et personnelle décente à l’exploitant et à sa famille. (…) Enfin, la reproductibilité environnementale des écosystèmes liés aux exploitations peut s’analyser à l’aide d’indicateurs notamment agri-environnementaux qui caractérisent les impacts sur les milieux des pratiques agricoles. » (Colloque international Indicateurs Territoriaux du Développement Durable ; é et 3 décembre 2005 ; Aix en Provence) La méthode a alors été conçue pour permettre un diagnostic de durabilité des exploitations agricoles à partir d’enquêtes dur le terrain. Celle-ci est structurée autour d’objectifs regroupés au sein de trois échelles de durabilité regroupant au total 42 indicateurs (dans la dernière version, version 3). « Les objectifs de l’échelle agro écologique se réfèrent aux principes agronomiques de l’agriculture intégrée ; ils doivent permettre une bonne efficacité économique pour un coût écologique aussi faible que possible. Ceux de l’échelle de durabilité socio territoriale se réfèrent davantage à l’éthique et au développement humain, caractéristiques essentielles des systèmes agricoles durables. Enfin, les objectifs de l’échelle de durabilité économique précisent des notions essentielles liées à la fonction entrepreneuriale de l’exploitation. » Les 42 indicateurs sont regroupés et répondent à dix composantes majeures de la durabilité issues du rapport Bruntland (dont le titre est « Notre Avenir à Tous »), repris par la suite lors du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro. Ces dix composantes sont les suivantes, elles sont regroupées par dimensions : DIMENSIONS Agro écologique

Socio territoriale

Economique

COMPOSANTES Diversité (domestique essentiellement) Organisation de l’espace (dont infrastructures agro écologiques, ou de régulation…) Pratiques agricoles (fertilisation, pesticides, protection des ressources, énergies…) Qualité des produits et des territoires (produits de qualité, patrimoine, paysages…) Emploi et services (filières courtes, contribution à l’emploi, travail collectif…) Ethique et développement humain (équilibre alimentaire mondial, bien-être animal, intensité de travail…) Viabilité (revenus, spécialisation économique) Indépendance (autonomie financière, sensibilité aux aides) Transmissibilité (capital à transmettre hors foncier par UTH) Efficience du processus productif (part des intrants dans le produit d’exploitation)

En annexe figure la description de la grille IDEA version 3, ainsi qu’un exemplaire du document d’enquête IDEA (l’ensemble des indicateurs et modalités de calcul).

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Le diagnostic du RAD (Réseau Agriculture Durable) :

Le diagnostic de durabilité synthétise trois types de d’évaluation de la durabilité (IDEA, Solagro et Fadear). C’est une méthode d’évaluation permettant de fixer des objectifs à atteindre et de suivre l’évolution de la durabilité de l’exploitation. Cette évaluation s’appuie sur 22 indicateurs répartis sur trois pôles d’intérêts que sont la durabilité économique, la durabilité sociale et la durabilité environnementale. Le diagnostic obtenu est avant tout un outil d’autoévaluation. En Annexe est présentée la grille de durabilité.

Le diagnostic de l’Agriculture Paysanne (FADEAR : Fédération Associative pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural) :

« L’agriculture paysanne consiste à produire de façon combinée et avec la qualité exigée par la demande sociale, les biens marchands et non marchands. C’est donc le refus d’une agriculture duale, d’une bipolarisation. C’est également le refus d’une agriculture à deux vitesses, d’un côté une agriculture à vocation exportatrice et de l’autre une petite agriculture à laquelle seraient dévolues les fonctions d’entretien de l’espace rural. L’agriculture paysanne porte en elle trois dimensions aussi fondamentales les une que les autres : •

Elle a une dimension sociale basée sur l’emploi, la solidarité entre paysans, entre régions, entre paysans du monde. Le respect du droit à produire par chaque paysan et chaque région est fondamental, sinon les plus puissants empièteront sur le droit de vie des autres, ce qui n’est pas gage d’équilibre et d’humanité. L’agriculture paysanne permet à un maximum d’actifs d’exercer la profession agricole.

Elle doit être économiquement efficace. Elle doit créer de la valeur ajoutée, par rapport aux moyens de production mis en œuvre et aux volumes produits. C’est la condition pour que les paysans puissent vivre avec des volumes de production relativement modestes, condition pour maintenir des actifs nombreux. Cette production économiquement efficace va de pair avec une production de qualité.

Elle doit respecter les consommateurs et la nature. C’est la contrepartie obligatoire à la contribution de la collectivité au secteur agricole. Il s’agit ici de la qualité alimentaire, des équilibres écologiques, des paysages, de la biodiversité, etc.… »

D’après : www.fadear.org En annexe, une présentation des indicateurs de l’agriculture paysanne. 2.2. – les modalités et l’évaluation des exploitations Ont d’abord été sollicitées les Fédérations Régionales des CIVAM, pour lesquelles des travaux avaient déjà été réalisés, dans le but de les capitaliser. Dans un second temps, il a fallu définir les zones sur lesquelles le travail était à mener. Pour réaliser l’évaluation de la durabilité des systèmes de production, le choix s’est porté vers la grille IDEA, plus complète et donc, a priori, plus simple à utiliser pour une mise en cohérence des résultats obtenus (mise en cohérence des différents diagnostics).

3 – Les groupes concernés Au départ, l’objectif était orienté vers l’exhaustivité des territoires de moyenne montagne : c'est-à-dire l’ensemble des régions suivantes où des groupes CIVAM étaient présents: • Aquitaine (Pays basque, Béarn) • Midi-Pyrénées (zone pyrénéenne et partie nord-est de la région sur le Massif Central) • Languedoc Roussillon (partie pyrénéenne et extrême nord en zone liée au Massif Central) • PACA (pré alpes du sud et contreforts sud-ouest du massif alpin) • Rhône-Alpes (contreforts ouest du massif alpin, monts du lyonnais et contreforts est du massif central) • Auvergne (dans sa quasi-totalité, sauf plaine de la Limagne) • Limousin (dans sa quasi-totalité sauf plaine de Brive)

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Suite à l’évaluation du coût engendré par cette zone importante, et par le nombre élevé de productions différentes sur ces zones, il a été nécessaire de resserrer l’objectif de participation. De plus, il était financièrement impossible pour le réseau d’effectuer un trop grand nombre d’enquêtes. Il a donc été décidé de restreindre cette première étude aux groupes présents sur le Massif Central (au sens DIACT). C’est-à-dire : La région Limousin, avec ces groupes (et partenaires) travaillant sur l’herbe au sens large ; La région Auvergne, et son dispositif d’accompagnement des petites et moyennes exploitations ; Le groupe APABA : groupe d’agriculteurs biologiques en Aveyron Le groupe « Semailles », récent dans le réseau CIVAM et souhaitant identifier des pistes de progrès ; Quelques élevages en Rhône-Alpes ; Et quelques exploitations du réseau « Démonstration en AD » de Midi-Pyrénées. La carte suivante schématise le positionnement géographique des acteurs concernés.

4 – La collecte des données La collecte s’est faite en deux temps : capitalisation de diagnostics existants et recueil de données sur le terrain. Au final, près d’une centaine de diagnostics ont pu être rassemblés (110). Cependant, tous n’ont pu être intégrés à l’étude pour diverses raisons : • Trop anciens (le risque étant de ne pouvoir les comparer surtout pour les dimensions économiques liées aux conjonctures des années en question). Il a donc été décidé de ne prendre que ceux effectués dans les deux années précédentes. • Trop différents et donc impossibles à mettre en cohérence les uns avec les autres. C’est le cas par exemple de diagnostics de l’Agriculture Paysanne, où les critères sont trop différents et auraient nécessités de retourner sur le terrain pour avoir des informations complémentaires. • Incohérents : résultats curieux et suspectés d’être erronés, souvent à l’avantage de l’exploitation. Au final, 93 diagnostics ont été récoltés et mis en cohérence sous la version IDEA 3, pour servir de base de traitement statistique.

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5 – Le traitement des données 5.1. – les résultats moyens traités sur un fichier IDEA Les résultats ont été mis en base de données sur Excel, et les différentes moyennes (effectif total, par région, par territoire, par type d’agriculture conventionnelle ou biologique, par type de production) ont été traitées sur le « fichier IDEA » (document Excel – DGER – enseignement technique – www.idea.portea.fr). La mise en cohérence des données : Parmi les 93 diagnostics récoltés, il a fallu mettre en cohérence les deux versions d’IDEA disponibles. En effet, les versions IDEA II et III présentent quelques différences minimes, pour lesquelles il a fallu arbitrer. Sur la première échelle (agroécologique), qui compte 18 indicateurs dans sa version 3, elle perd un indicateur de diversité par rapport à sa version 2. Ceci entraîne une augmentation du maximum attribué d'un point pour les 3 autres indicateurs de la composante. De même l'ancien indicateur « Pesticides et produits vétérinaires » qui comptait 10 points a été scindé en deux, créant les indicateurs « pesticides » de 13 points et « traitements vétérinaires » de 3 points. De plus, l'indicateur « bien être animal » a été relayé à l'échelle socio-territoriale. Ces deux changements modifient le nombre maximum attribué de 6 autres indicateurs. L'échelle socio-territoriale qui détient 18 indicateurs, voit 11 d'entre eux modifiés : 3 ont vu leur maximum augmenter, 7 au contraire diminuer et un nouvel indicateur apparaître : l'indicateur « autonomie et valorisation des ressources locales ». Celui-ci mesure la recherche de l'agriculteur vers un développement agricole autonome se traduisant par une meilleure valorisation des ressources locales et par une moindre dépendance vis-à-vis des fournisseurs. Cette autonomie commence par une adéquation entre les ressources fourragères disponibles sur l'exploitation et ses besoins (en fourrages grossiers, pailles, céréales et protéagineux). L’échelle économique, est, quant à elle, identique entre les deux versions. Il a donc été décidé d’effectuer un prorata sur les indicateurs identiques où seuls les notes totales avaient varié. Pour l’indicateur « Pesticides et produits vétérinaires », scindé en deux, il a été convenu que la note obtenue en version 2, serait ré attribuée de façon égale entre les deux composantes « pesticides » de 13 points et « traitements vétérinaires » de 3 points, au prorata de la note initiale. Enfin, pour l’indicateur « autonomie et valorisation des ressources locales », l’arbitrage s’est fait de la manière suivante : • 40% de B12 « contribution à l'équilibre alimentaire mondial » : cet indicateur fait part de la quantité d'aliments achetés par ha SAU et donc mesure l'efficacité du système cultural à répondre aux besoins de l'exploitation. • 30 % de B 9 « contribution à l'emploi » : celui-ci évalue la contribution à l'emploi de l'exploitation et par conséquent la gestion des ressources humaines locales. • 30% de B 1 « Démarche de qualité » : les démarches de qualité permettent en général une meilleure valorisation économique, avec le plus souvent la fabrication de produits traditionnels ou spécifiques d'un territoire. Ces AOC ou autres IGP permettent de dynamiser et de valoriser au mieux le potentiel économique du territoire. 5.2. – le traitement statistique via Modalisa© Modalisa© est un logiciel de traitement statistique permettant de traiter des bases de données importantes et comprenant de nombreuses variables et modalités. Il présente de nombreux atouts pour un traitement statistique approfondi (mise en classes, définition personnelle de bornes, limites, diverses analyses bi variées, multi variées) permettant même de réaliser des typologies. Plusieurs tests statistiques seront utilisés, parmi eux : • Droite de régression et coefficient de corrélation pour croiser deux variables quantitatives entre elles ; sachant que pour une population de 93 individus, on a R = 0,205 pour un seuil de significativité de 5% et R = 0,274 pour un seuil de 1%. • Le test du χ² (Khi deux) pour croiser deux variables qualitatives entre elles, où le seuil « p » devra être inférieur ou égal à 0,05 (risque 5%) ou à 0,01 (risque 1%) ; • L’analyse de variance pour croiser une variable quantitative avec une variable qualitative, où les seuils « p » devront être inférieurs à 0,05. Il sera effectué par la suite une typologie des exploitations à partir des résultats obtenus. Les note aux indicateurs de durabilité étant des variables quantitatives, la typologie sera réalisée à partir d’une ACP (Analyse en

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Composantes Principales), à partir de laquelle seront à nouveau effectués des croisements pour définir les types obtenus.

6 – Les diagnostics de territoires : identification des enjeux pour un développement durable Une synthèse bibliographique a été réalisée par le chargé de mission national à partir des différents diagnostics de territoires issus des DIACT (notamment à partir des schémas interrégionaux et conventions de massif). Les zones de « massif » ont été les cibles privilégiées et les synthèses ont concerné les massifs pyrénéen, alpin et du Massif Central. Ensuite, un socle commun de la problématique a été défini par le groupe de travail, en lien avec les enjeux purement agricoles. Les autres massifs n’y ont pas été intégrés car aucun groupe CIVAM n’y figure à l’heure actuelle, ou n’a souhaité intégrer le projet initial. Au final, compte tenu de la zone retenue, nous nous cantonnerons aux enjeux du Massif Central, même si les autres massifs sont cités pour davantage de complémentarité des zones de moyenne montagne.

7 – La durabilité des exploitations confrontés aux enjeux territoriaux, et définition des pistes d’action pour une réelle implication territoriale A l’issue des résultats de durabilité et du traitement statistique, mais également à partir des connaissances des pratiques et orientations collectives des groupes, une expertise sera réalisée eu égard aux enjeux des différents territoires. Ces comparaisons permettront dans un premier temps d’évaluer la pertinence des actions CIVAM menées depuis quelques temps déjà, mais aussi d’évaluer les actions à mener dans l’avenir pour répondre à ces enjeux. Ces actions identifiées devront être validées par les administrateurs des groupes pour imaginer qu’elles soient traitées sur le terrain par la suite. Ce n’est qu’en effet s’ils y voient un intérêt pour eux-mêmes et/ou pour leurs territoires que les agriculteurs CIVAM se lanceront dans celles-ci.

C – Les limites de l’étude La première, et la plus importante limite de ce travail, pourrait être la représentativité des exploitations enquêtées. Ce problème s’est posé rapidement. En effet, les exploitations CIVAM sont souvent des exploitations de taille plus modeste, ou ayant mis en place des systèmes de production innovants comparés aux structures moyennes de ces zones. Une attention toute particulière a donc été apportée aux systèmes de production enquêtés. Au final, l’échantillon est composé de productions emblématiques de la moyenne montagne (bovins viande, lait, ovins viande, lait, caprins (souvent présents dans le réseau avec transformation à la ferme voire vente directe), et quelques productions originales et innovantes au regard des grandes filières classiques. Cet échantillon s’avère finalement représentatif des structures du réseau CIVAM (taille des structures, productions). La seconde est liée à la mise en cohérence des différents diagnostics de durabilité, que ce soit pour IDEA où trois versions potentielles existent, pour le RAD où les informations collectées sont un peu plus allégées ou enfin pour l’agriculture paysanne où les informations sont assez différentes. Pour pallier ce problème, il a été convenu que les diagnostics IDEA (version 3 la plus récente) seraient la base de comparaison des systèmes. Ainsi, les diagnostics RAD où les informations complémentaires nécessaires pour une conversion en IDEA 3 n’étaient pas disponibles ont été rejetés. Pour les diagnostics d’agriculture paysanne, la différence était telle qu’il était plus simple de ne pas les prendre en compte. Au final, sur la centaine de diagnostics disponibles, seuls 93 ont été gardés. Cet effectif est suffisant pour une significativité statistique des résultats. Enfin, la différence d’avancement des groupes sur les thématiques environnementale, sociale et/ou économique aurait pu poser des problèmes en termes de type d’agriculture (conventionnelle, biologique ou durable au sens CIVAM). En fait, ces différences ont permis d’apporter la variabilité nécessaire aux traitements statistiques, et il a été décidé de ne pas prendre en compte l’orientation vers la durabilité, mais simplement les types d’agriculture biologique et conventionnelle (afin de ne pas préjuger des dynamiques d’orientation vers la durabilité).

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III – Les enjeux des territoires concernés

A – Le zonage DIACT et les productions agricoles associées Il n’est pas aisé de trouver des socles communs à la moyenne montagne, tellement les climats sont divers, les contextes pédoclimatiques sont différents pour une altitude donnée, et les productions parfois non directement liées à la région et à son contexte (filières par exemple). De même, au niveau socio économique, les contextes sont également très divers en termes de dynamisme, de potentialités industrielles, touristiques… La proposition la plus simple est donc de raisonner la moyenne montagne en globalisant les massifs (au sens territorial du terme), et les traitant comme une entité, mais en excluant la zone de haute montagne, c’est-à-dire la montagne au dessus de la zone de combat et le début de l’étage alpin (2200 m). Par massif, « il faut entendre, ainsi que le définit l’article 5 de la loi du 9 janvier 1985, chaque zone de montagne et les zones qui lui sont immédiatement contiguës et qui forment avec elle une même entité géographique, économique et sociale » (source : DIACT). Ces massifs, au nombre de six, sont territorialement délimités par le décret du 14 janvier 2004 (cf. carte ci-dessous).

source : www.odit-France.fr et www.diact.gouv.fr Ici, ne seront concernés que les massifs où le mouvement CIVAM est représenté, c’est-à-dire les massifs du Massif Central, des Pyrénées et des Alpes.

Massif Central : La carte ci-après montre les limites du massif du Massif Central. Outre l’Auvergne, il chevauche les régions administratives suivantes : Bourgogne, Rhône-Alpes, Languedoc Roussillon, Midi-Pyrénées et Limousin dans sa totalité ; ce qui en fait le plus grand massif à l’échelle hexagonale.

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Source : www.massif-central.diact.fr Ce Massif est le plus étendu en superficie et concerne un nombre important de productions différentes. En effet, on a tout d’abord une large représentation géographique du berceau bovin allaitant français, avec une partie de la Bourgogne et son emblématique Charolais, très présent dans la zone Nord du massif (du Morvan jusqu’à Clermont Ferrand, incluant donc tout l’Allier) ; l’ensemble du Limousin et son troupeau du même nom sur toute partie occidentale du massif ; le cœur de l’Auvergne et sa rustique vache Salers ; et le plateau de l’Aubrac et sa race allaitante locale. Ces productions sont largement basées sur des systèmes herbagers, pâturant, pour la plupart. Au niveau du troupeau bovin laitier, on note une certaine diversité, avec cependant une forte représentation du système Prim’Holstein – Maïs – Soja (contreforts Est du Massif, incluant Loire et Haute Loire, ainsi que le Puy

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de Dôme et une partie du Cantal et du Lot plus à l’ouest). La diversité est plus marquée au fur et à mesure que l’on se dirige vers le Sud. Les races mixtes Salers et Aubrac (même si cette dernière n’est quasiment plus traite et qu’un programme de relance de la souche laitière est en cours) conduites pour la traite, sont utilisées dans les zones AOC Salers et Laguiole. Enfin, on retrouve progressivement le modèle dominant en se dirigeant hors de la zone massif, mais avec cependant des représentations non négligeables des races Simmental (AOC Laguiole), Montbéliarde et Brune des Alpes en Aveyron essentiellement. Le cheptel ovin, dans ce massif, est également très présent, puisque le cheptel ovin viande « se maintient » (comparé à d’autres régions françaises), notamment en Limousin, de façon éparse sur l’Auvergne, et il valorise toujours les zones de coteaux séchants dans la partie sud du massif en Midi-Pyrénées (Causses du Lot, Quercy, Ségala). Les ovins lait, quant à eux, ne sont présents que sur la zone AOC Roquefort, et valorisent les parcours du PNR des Grands Causses, de même que les prairies du Ségala ou les monts du Lévézou. On les trouve donc dans la partie sud du massif. Bien qu’en très grande majorité tourné vers l’élevage, ce massif présente également quelques zones de productions végétales : la plaine de la Limagne (près de Clermont Ferrand) où les cultures de maïs ou de céréales sont très présentes, le Lot où le tabac, gourmand en main d’œuvre, perdure ; ou encore le Ségala (Sud-ouest du massif) frontière des zones de grandes cultures de Midi-Pyrénées.

Pour informations, un zonage possible des autres massifs est proposé afin de préparer l’avenir du projet étendu à ces territoires. De même, les approches autour des enjeux des massifs ont été généralisées. Par contre, l’approche sur les systèmes de production a été shuntée, simplifiée du fait de l’absence de données en ce sens. Alpes C’est ici un massif de haute montagne par excellence. Il est en effet très délicat de délimiter une zone de moyenne montagne au sein de ce massif, puisque la topographie montre que l’on passe très rapidement de 300 m environ en fond de vallée à plus de 3000 m pour les principaux sommets. Il n’est donc pas envisageable de se baser ici sur le zonage « Massif » au sens DIACT. Les caractéristiques topographiques entraînent également peu diversités dans les activités agricoles possibles. Cependant, de réelles disparités existent en terme d’utilisation agricole. En effet, selon l’endroit du massif des Alpes concerné, le régime de précipitations ou encore plus généralement, le type de climat est différent : du climat continental à influence océanique pour la partie nord-ouest à un climat nettement plus méditerranéen dans sa partie sud. En conséquence les types de productions agricoles sont très différents. Avant de s’interroger sur ces productions, il convient de proposer un zonage du massif afin d’identifier (ou du moins supposer) les zones de moyenne montagne. Le document « espaces naturels protégés » montre que ce massif est très bien pourvu en Parcs Nationaux Parc Naturels Régionaux (PNR) qui constituent un véritable maillage du massif, et on propose de se baser sur les points culminants de ces parcs pour les « classer » en moyenne montagne ou non. Ainsi, pour les PNR dont le point culminant est situé en deçà de la limite de 2200 m d’altitude, on peut estimer qu’ils sont dans des conditions de moyenne montagne. A l’opposé, ceux, dont l’altitude du point culminant ou dont la majeure partie des sommets dépasse cette altitude, seront considérés comme de la haute montagne. Altitude des points culminants des Parcs nationaux et PNR alpins : En Rhône-Alpes : • PNR des Bauges : l’Arcalot – 2217 m (limite tolérable) • PNR de la Chartreuse : la Chamechaude – 2082 m • PNR du Vercors : le Grand Veymont – 2341 m (limite tolérable) • Parc National des Ecrins : le Pic Lory – 4088 m et plus de 100 sommets supérieurs à 3000 m • Parc National de la Vanoise : la Grande Casse – 3855 m En Provence Alpes Côte d’Azur : • PNR du Lubéron : le Mourre Nègre – 1125 m • PNR du Verdon : le Mont Chiran – 1905 m • PNR du Queyras : la Font Sancte – 3385 m • Parc national du Mercantour : la Cime du Gélas – 3143 m et plusieurs sommets à plus de 3000

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Source : www.diact.gouv.fr Ainsi, ne seront considérées en zone de moyenne montagne les zones des PNR des Bauges, de la Chartreuse, du Vercors, du Lubéron et du Verdon, ainsi que les zones hors limites de ces parcs, mais dont les conditions de milieu les rapprochent (altitude, productions agricoles), en Isère ou en Drôme par exemple. Ces aspects se zonage seront, le cas échéant, laissés à l’appréciation des agriculteurs, se sentant ou non en contexte de moyenne ou de haute montagne.

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Source : www.diact.gouv.fr Si on s’intéresse maintenant aux systèmes de productions agricoles de ces zones, il en ressort deux grandes tendances : ce que l’on pourrait considérer comme les « Préalpes de l’ouest » (PNR des Bauges, de la Chartreuse et du Vercors) où les conditions climatiques sont relativement bonnes et les « Préalpes du sud » où les influences méditerranéennes dominent (systèmes avec davantage de handicaps au niveau climatique). L’agriculture, le tourisme et la filière bois sont les principales ressources économiques de ces zones. On trouve en effet une très grande diversité des systèmes de productions agricoles depuis les cultures « sèches » (céréales et plantes à parfum) à l’élevage ovin extensif, en passant par la production bovine laitière, le maraîchage plein champ et les systèmes céréales oléagineux. Au niveau structurel, on assiste à une constante diminution du nombre d’agriculteurs et l’installation ainsi que l’attractivité du métier sont des enjeux majeurs pour ce massif. Pyrénées Pour le massif des Pyrénées, l’approche est différente. En effet, la plupart des zones du massif sont en conditions de moyenne montagne ; les quelques cantons pouvant être considérés comme de la haute montagne se situent plutôt dans la partie centrale des Pyrénées. La carte suivante, propose en effet une typologie des cantons en fonction des enjeux prioritaires (résultant d’une analyse multivariée de 31 critères – INSEE - 2003). « Cantons dont l'économie est structurée par le tourisme Ce groupe se distingue par des caractéristiques très fortes liées à l’accueil touristique. Toute l’économie est structurée par ce fait, et l’agriculture, sans doute présente dans le paysage, s’efface comme mode d’occupation du sol (7% de la surface) et comme facteur d’emploi (6,6%), mais pour subsister les exploitations pratiquent largement la diversification et la pluriactivité. Cette zone (en bleue sur la carte) comporte 12 cantons qui sont tous le siège des stations de sport d’hiver du massif », on les considèrera donc comme de la haute montagne. Cantons résidentiels fragiles (en jaune sur la carte ci-après) Ce groupe qui est plutôt localisé dans l’est du massif présente une forte attractivité, différente de celle du groupe précédent. Sa densité est trois fois supérieure, les gains migratoires sont très forts, l’accueil touristique significatif pour les résidences secondaires comme pour le tourisme marchand. L’agriculture occupe encore une part notable de la population active (deux fois plus que les activités du secondaire). Deux secteurs se détachent dans ce groupe qui compte 27 cantons, le Couserans et les vallées de l’arrière Pays du Roussillon (Têt, Tech, …).

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Source : www.diact.gouv.fr ; www.datar-pyrenees.gouv.fr Cantons agricoles dépendant de l’emploi extérieur (en vert sur la carte) : C’est dans ce groupe que l’agriculture marque le plus l’espace (50% de SAU) et l’emploi (14%), avec des exploitations petites (30 hectares) qui n’assurent qu’un faible revenu aux exploitants. A côté l’économie rurale se répartit de manière assez équilibrée entre le commerce, les services et surtout l’artisanat et la construction. Mais tout ceci ne permet pas aux actifs résidents d’assurer leur emploi, qu’ils doivent rechercher à l’extérieur pour plus du tiers d’entre eux. Ces cantons qui continuaient de perdre des habitants entre 1990 et 1999, se redressent

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depuis, avec des gains cependant inférieurs à la moyenne. Nous sommes ici dans le Pays Basque intérieur, le Comminges. Cantons périurbains aux franges du massif (en orange sur la carte) Ce groupe composé de 22 cantons est plus peuplé que les autres (140 habitants par km²) et connaît une forte croissance depuis maintenant une vingtaine d’années, avec l’accueil de nombreux jeunes ménages avec enfants. Ses caractéristiques périurbaines sont attestées aussi bien par la localisation (à proximité de Bayonne-Biarritz, Pau, Perpignan et Foix) que par les critères associés à ce fait : faible autonomie d’emploi (plus de la moitié de migrants vers l’extérieur), importance de la construction neuve, revenu des ménages attestant de doubles salaires, fort équipement automobile. Leur économie est plutôt tournée vers l’extérieur du massif et ils participent peu à ses logiques de développement. (Source : www.diact.gouv.fr ; www.datar-pyrenees.gouv.fr) Au final, nous considèrerons la zone entière moins les cas particuliers de haute montagne dédiés au tourisme et quelques cas de zones industrielles en déprise.

B – Les massifs et leurs diagnostics territoriaux Ce travail incombait au chargé de mission national. A partir des données glanées sur les sites DIACT, des synthèses sous forme de tableaux ont pu être réalisées. La synthèse globale est présentée dans le tableau cidessous :

Différents aspects en lien avec la démarche de durabilité

Sous thèmes Massifs

Massif Central

Economique

Tourisme

Massif Pyrénéen

Massif Alpin

Enjeux par Massif

Valoriser les offres touristiques comme levier économique (agrotourisme, encourager les démarches territoriales de valorisation et de promotion du patrimoine) Rechercher un équilibre durable de l'offre touristique (valorisation du patrimoine culturel et naturel, impliquer les acteurs et populations locales à des dynamiques de développement touristique, protection des espaces sensibles, développement des énergies renouvelables) Développement économique (diversification de l'économie touristique, préservation des activités agricoles, formation spécifiques aux métiers de la montagne, renforcer les relations avec les régions voisines : Suisse, Italie)

Améliorer la compétitivité et la valeur ajoutée du secteur agricole (appuyer les filières locales, promouvoir les produits de terroir identitaires) Préserver la filière agro-pastorale, partie intégrante de l'identité culturelle du massif (valorisation des produits, Massif Structuration Pyrénéen structuration des filières, accroissement de la valeur ajoutée, animation et mise en réseau des acteurs, partage des des filières compétences...) Massif Central

Renforcement de l'économie

Massif Alpin

Performance des filières agricoles agro-pastorales et forestières (multifonctionnalité de l'agriculture, développement des filières bois construction et bois énergie)

Massif Central

Développer une économie des agro ressources liée à l'environnement et aux produits de qualité

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agricole et des productions locales

Services d'aide à la personne

Massif Pyrénéen

Valoriser la ressource forestière (soutenir les actions de certification, développer de nouveaux marchés (bois énergie, bois construction, produits transformés), organisation de la filière)

Massif Alpin

Développement économique (diversification de l'économie touristique, préservation des activités agricoles, formation spécifiques aux métiers de la montagne, renforcer les relations avec les régions voisines : Suisse, Italie)

Massif Central

Prendre en compte le vieillissement de la population comme facteur de développement (activités d'aides à la personne notamment des plus âgées)

Massif Pyrénéen Massif Alpin

Social Massif Central Gestion du foncier

Massif Pyrénéen Massif Alpin

Massif Central

Environnemental

Gestion de l'eau

Massif Pyrénéen Massif Alpin

Massif Central

Préservation de la biodiversité

Renforcement de l'attractivité du massif en terme d'emploi et de services Amélioration de la qualité de vie des habitants du massif (amélioration de l'offre de service, valoriser la pluriactivité et la saisonnalité) Favoriser la création et la transmission des entreprises. (aide à la transmission et à la mise en œuvre de projets d'exploitation) Réflexions sur le foncier dans le cadre de la préservation de la filière Agro-pastorale Assurer dans la durée la qualité des ressources naturelles et patrimoniales (préservation de ses richesses environnementales de la qualité et de la diversité de ses paysages en oeuvrant sur la gestion du foncier, conservation du patrimoine culturel identitaire L'Agriculture doit contribuer à la préservation des ressources naturelles (gestion globale et valorisée de l'eau, attractivité du territoire, préservation de la biodiversité, protection contre les risques naturels) Rendre plus accessibles et mettre en place des moyens d'assainissement des points d'eau (surtout pour des fins agropastorales) Gestion de la ressource en eau (développer les contrats de rivières, gestion de l'amont vers l'aval, entretien des berges, mobilisation des acteurs : agriculteurs, industriels collectivités…) L'Agriculture doit contribuer à la préservation des ressources naturelles (gestion globale et valorisée de l'eau, attractivité du territoire, préservation de la biodiversité, protection contre les risques naturels)

Préservation et valorisation de la biodiversité pyrénéenne (connaissance gestion et pédagogie de la préservation de cette Massif biodiversité inscrite dans le cadre du Parc National des Pyrénées Pyrénéen pour aller contre la disparition d'espaces naturels, la fermeture de milieux et l'appauvrissement de la biodiversité) Massif Alpin

Préservation de la biodiversité alpine (connaissances, pédagogie, mise en œuvre de démarches de durabilité, mesures pour la valorisation et la préservation des espaces alpins)

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Prévention des risques naturels

Massif Central

L'Agriculture doit contribuer à la préservation des ressources naturelles (gestion globale et valorisée de l'eau, attractivité du territoire, préservation de la biodiversité, protection contre les risques naturels)

Massif Pyrénéen

Protection du massif contre les risques naturels

Massif Alpin

Maintien d'un environnement de qualité (gestion raisonnée des milieux et préservation des risques naturels)

En gras ont été identifiées les thématiques sur lesquelles les groupes travaillent directement ou indirectement. On peut également appréhender ces différents enjeux à l’échelle des différents massifs. En effet, les contextes socio-économiques différents des massifs engendrent des enjeux bien différents. Si l’on compare par exemple, le Massif Central aux Alpes et en considérant le type de population : les alpes sont plutôt tournés vers un rajeunissement de la population alors que le Massif Central présente le contexte inverse.

1 – Les enjeux du Massif Central Massifs

Enjeux des territoires Favoriser la création et la transmission des entreprises. (aide à la transmission et à la mise en œuvre de projets d'exploitation) Prendre en compte le vieillissement de la population comme facteur de développement (activités d'aides à la personne notamment des plus âgées)

Massif Central Améliorer la compétitivité et la valeur ajoutée du secteur agricole (appuyer les filières (Auvergne, locales, promouvoir les produits de terroir identitaires) Limousin, MidiPyrénées, Rhône- Développer une économie des agro ressources liée à l'environnement et aux produits Alpes, de qualité LanguedocRoussillon) Valoriser les offres touristiques comme levier économique (agrotourisme, encourager les démarches territoriales de valorisation et de promotion du patrimoine) L'Agriculture doit contribuer à la préservation des ressources naturelles (gestion globale et valorisée de l'eau, attractivité du territoire, préservation de la biodiversité, protection contre les risques naturels) Les enjeux identifiés sur les autres massifs (Pyrénées et Alpes) sont cités à titre indicatif dans un objectif prochain d’élargissement du projet à ces mêmes massifs.

2 – Les enjeux du massif pyrénéen Massifs Massif Pyrénéen (Aquitaine, LanguedocRoussillon, MidiPyrénées)

Enjeux des territoires Préserver la filière agro-pastorale, partie intégrante de l'identité culturelle du massif (valorisation des produits, structuration des filières, accroissement de la valeur ajoutée, animation et mise en réseau des acteurs, partage des compétences, réflexions sur le foncier...) Valoriser la ressource forestière (soutenir les actions de certification, développer de nouveaux marchés (bois énergie, bois construction, produits transformés), organisation de la filière)

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Rechercher un équilibre durable de l'offre touristique (valorisation du patrimoine culturel et naturel, impliquer les acteurs et populations locales à des dynamiques de développement touristique, protection des espaces sensibles, développement des énergies renouvelables)

Préservation et valorisation de la biodiversité pyrénéenne (connaissance gestion et pédagogie de la préservation de cette biodiversité inscrite dans le cadre du parc national des pyrénées pour aller contre la disparition d'espaces naturels la fermeture de milieux et l'appovrissement de la biodiversité) Protection du massif contre les risques naturels Renforcement de l'attractivité du massif en terme d'emploi et de services Developpement de coopération européenne (coordination des activités pastorales et forestières dans les zones de haute montagne)

3 – Les enjeux du massif des Alpes Massifs

Enjeux des territoires Développement économique (diversification de l'économie touristique, préservation des activités agricoles, formation spécifiques aux métiers de la montagne, renforcer les relations avec les régions voisines : Suisse, Italie) Amélioration de la qualité de vie des habitants du massif (amélioration de l'offre de service, valoriser la pluriactivité et la saisonalité) Maintien d'un environnement de qualité (gestion raisonnée des milieux et préservation des risques naturels)

Massif Alpin

Gestion de la ressource en eau (développer les contrats de rivières, gestion de l'amont vers l'aval, entretien des berges, mobilisation des acteurs : agriculteurs, idustriels collectivités…) Préservation de la biodiversité alpine (connaissances, pédagogie, mise en œuvre de démarches de durabilité, mesures pour la valorisation et la préservation des espaces alpins ) Performance des filières agricoles agro-pastorales et forestières (multifonctionnalité de l'agriculture, développement des filières bois construction et bois énergie) Assurer dans la durée la qualité de ressources naturelles et patrimoniales (préservation de ses richesses environnementales de la qualité et de la diversité de ses paysages en oeuvrant sur la gestion du foncier, conservation du patrimoine culturel identitaire

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IV – Les agriculteurs CIVAM concernés

A – Les groupes CIVAM : un potentiel pour le développement territorial Depuis la création des CIVAM dans les années cinquante, ces groupes ont toujours fait preuve d’innovation et d’anticipation par rapport aux contextes socio-économiques, environnementaux et/ou sociétaux du moment. Ce fut notamment le cas dès leur création pour accompagner la nécessaire modernisation des structures agricoles, ou encore dans le début des années quatre-vingts avec la naissance des premiers groupes d’agriculteurs biologiques, et aujourd’hui avec le Réseau Agriculture Durable ou les circuits courts. En zone de moyenne montagne, ce sont des groupes dont les entrées thématiques sont très diverses : l’autonomie des exploitations, les économies d’intrants et d’énergies, la valorisation des produits par circuits courts, la restauration collective (anticipation sur le Grenelle), la biodiversité, l’accueil social… Le contexte socio-économique des années récentes ont poussé ces structures à faire preuve d’imagination pour pallier les difficultés (baisse des prix agricoles, dépendance aux intrants et donc fragilisation des systèmes, impacts environnementaux négatifs, problèmes de transmission des fermes…), et le faible soutien de la PAC sur ces systèmes de production. Aujourd’hui, dans le cadre de ce travail sur la moyenne montagne, plusieurs agriculteurs et groupes d’agriculteurs font le pari d’essaimer des pratiques en vue d’améliorer la durabilité (au sens du Sommet de la Terre de 1992 à Rio de Janeiro) des structures de production agricole.

B – Les enjeux communs aux groupes de la moyenne montagne L’un des premiers travaux du comité de pilotage a été de valider un socle commun de la problématique dans l’objectif de regrouper les groupes et de rendre cohérentes les différentes démarches propres à chaque groupe dans une même logique de travail. Ce travail a été réalisé à l’échelle du massif du Massif Central.

Socle commun de la problématique Entrée technique Entrée socio-économique -

Fertilité faible à moyenne Stocks sur pied inexploités Présence de PP/PN Mécanisation difficile, parfois impossible Surfaces non épandables (hors SPE) Surcoût de la mise aux normes (terrassements) Hivers longs, climat rude Surcoût des intrants et relative dépendance Liens aux filières et aux organismes professionnels agricoles (engrais, aliments…) Stocks fourragers importants Alimentation estivale délicate parfois Ressources naturelles inexploitées (bois…) Biodiversité importante mais pas abordée en tant que facteur de production …

- potentiel touristique - optimisation de la valorisation des produits - infrastructures routières et éloignement des centres d’activités économiques - installation et transmission insuffisantes (structures de plus en plus lourdes à reprendre)

Réponses possibles

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- optimisation du pâturage de printemps, d’automne - mise en place de mélanges céréaliers rustiques - valorisation des PP/PN, et plus généralement de l’herbe - compostage des effluents d’élevage, et optimisation de leur gestion - itinéraires techniques à adapter - recherche d’autonomie (diminution des engrais, autonomie fourragère, alimentaire, semences fermières…), - réflexion autour des rations des animaux - gestion des zones humides et des pelouses sèches - …

-

SOQ, transformation, vente directe Diversifications Recherche de plus d’autonomie Communications

Les réponses proposées émanent directement des groupes d’agriculteurs et sont étroitement liées au travail déjà en place sur le terrain.

C – Des démarches prometteuses D’ores et déjà, près de 600 agriculteurs et six animateurs sont impliqués dans des réflexions pratiques, de terrain, sur un développement durable de l’agriculture en moyenne montagne. Il s’agit ainsi d’optimiser les potentiels de la moyenne montagne pour trouver des alternatives durables aux handicaps naturels, historiques ou hérités de cette même zone. A titre d’exemples : • En Pays basque (participation aux premières réunions de travail) : l’entrée s’est faite à partir du besoin de valider des itinéraires techniques qui renforcent l’autonomie des structures agricoles, et l’économie d’intrants dans le cadre de pratiques plus respectueuses de l’environnement. Le groupe BLE (Biharko Lurraren Elkartea) par exemple regroupe 100 adhérents, et travaille sur l’optimisation de la fertilité générale des prairies, la maîtrise des coûts, la main d’œuvre et l’emploi dans des exploitations typiques du pays basque d’une superficie moyenne de 24 hectares de SAU. •

En Limousin : L’entrée s’est faite autour de la chasse à toutes les formes de gaspillage sur l’exploitation avant d’aboutir à la maîtrise des coûts et le travail sur les fourrages et les rations des animaux. Cette approche de réduction des gaspillages constitue le point de départ pour des systèmes économes en intrants, vers plus de durabilité des systèmes de production. Le groupe de référence (ADAPA) rassemble environ 60 adhérents produisant sur une surface moyenne de 60 hectares de SAU. D’autres actions existent autour de la diversification et la valorisation locale des ressources du territoire, notamment le chanvre pour l’éco construction, le bois énergie et la valorisation du bois bocager, avec la mise en place de filières locales de valorisation.

En Auvergne : l’entrée s’est organisée autour des contributions du territoire sur le revenu des petites exploitations (superficie variant de 40 à 60 hectares). Le projet se développera vers la maîtrise des coûts, la transmissibilité et la recherche d’autonomie. 36 exploitations seront potentiellement concernées.

En Midi-Pyrénées : Trois groupes distincts travaillent. L’ARDEAR en collaboration avec la FRCIVAM, forte de quelques 80 adhérents a mis en place un réseau de fermes de démonstration en agriculture durable. L’AVEM en Aveyron avec 200 adhérents travaille sur la maîtrise des dépenses vétérinaires et la FRCIVAM dispose d’un réseau de fermes de démonstration en Agriculture Durable. Enfin l’APABA (agriculteurs biologiques en Aveyron) travaille sur la thématique de la valorisation des produits biologiques et sur la restauration collective en anticipation et en réponse au Grenelle de l’environnement.

En Languedoc Roussillon : des agriculteurs ont entamé une réflexion autour de la durabilité de leurs systèmes de production et s'engagent progressivement vers des améliorations de leurs pratiques. Le groupe Empreinte par exemple a initié une approche territoriale en lien avec les collectivités pour entretenir les zones en fermeture par de l'élevage extensif rustique, couplée à une valorisation locale des

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produits. Cette action contribue par ailleurs à lutter efficacement contre les risques d'incendies en limitant les coûts pour les collectivités et en favorisant le maintien de valeur ajoutée sur le territoire.

V – Les premiers résultats en terme de durabilité des systèmes de production

A – Les agriculteurs CIVAM diagnostiqués 1 – Présentation des effectifs Au total quelques 93 exploitations sont concernées par des diagnostics de durabilité IDEA. Sur la centaine de diagnostics (108) différents obtenus, seuls ces 93 ont pu être mis en cohérence pour un traitement statistique valable et satisfaisant. Les différents documents suivants témoignent de la répartition des agriculteurs enquêtés. Répartition des 93 enquêtes par régions 37 Auvergne Limousin Midi-Pyrénées Rône-Alpes

19 7 30

On peut remarquer sur cette répartition régionale la faible représentation de la région Rhône-Alpes, du fait de la fréquence d’exploitations plutôt situées en zone de plaine, en zone alpine (dont certaines concernées par un contexte de haute montagne). N’ont en effet été sélectionnées que les exploitations se situant sur les contreforts Est du Massif Central. Malgré cela, les différents territoires concernés sont relativement variés néanmoins. L’angle territorial aurait pu être pertinent mais la diversité de ces territoires et les effectifs respectifs trop réduits ne permettent pas une approche statistique satisfaisante. On peut citer par exemple les territoires concernés suivants : Livradois Forez, monts du lyonnais, Allier, Cantal, Plateau de Millevaches, la Haute Corrèze, les Combrailles, le Cantal, le Ségala aveyronnais, le Lévezou, les Grands Causses, l’Aubrac… Au sein de ces divers territoires, de nombreuses productions sont présentes. On trouve essentiellement des productions animales, mais de nombreuses exploitations présentent des systèmes diversifiés comme l’indique le graphique suivant. Au final, on a une représentation assez complète des systèmes de production de moyenne montagne, en cohérence avec les systèmes CIVAM, quelquefois atypiques ou innovants. A noter également que la région Midi-Pyrénées n’est représentée que par le groupe APABA, d’Aveyron. On peut le justifier par le fait que ce département est le seul de la région Midi-Pyrénées à être intégralement inclus dans le massif du Massif Central. De plus, ce département, tourné majoritairement vers l’élevage présente une grande diversité de productions. Nous parlerons par la suite des exploitations de l’Aveyron, même pour les approches régionales, pour plus de cohérence et de pragmatisme.

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Les différents systèmes de production concernés : Bovin lait dominant : 32%

Bovin lait Bovin lait+ bovin viande

19%

Bovin Lait + autres bovin viande Ovin viande Allaitant + autres

Caprin

16%

Autres Caprin + autres Ovin lait

Ici, la plupart des productions de moyenne montagne sont représentées. L’objectif de départ n’était pas d’explorer ces productions en respectant des proportions bien définies. Au final, on s’aperçoit que les systèmes bovins sont très présents avec au moins 50% des effectifs, avec une prédominance des systèmes laitiers. La production la plus représentée sur le massif étant le bovin allaitant comme l’indique la bibliographie (70 à 75% d’après AGRESTE ; 2004), l’échantillon diffère donc en termes de représentativité des systèmes. Cependant, et c’est assez typique du réseau CIVAM, une grande diversité apparaît, que ce soit au niveau de chaque exploitation avec relativement peu de systèmes spécialisés pour ces régions, ou au niveau des autres productions présentes. Au sein du groupe « autres productions » on trouve par exemple, la production de petits fruits, l’apiculture ou l’arboriculture, le maraîchage. Une approche différente sera réalisée au cas où les effectifs réduits par production limiteront la validité statistique des résultats. Par exemple en groupant les systèmes par type d’animal (bovins, ovins, caprins, autres) ou encore par système dominant (système laitier, système allaitant, autres). Par ailleurs, les types d’agriculture, biologique ou conventionnelle, sont représentés à peu près à parts égales. En effet, 48 exploitations en agriculture biologique ont été enquêtées (soit 51,6% du total) pour 45 exploitations en agriculture conventionnelle (48,4%). Cette bonne répartition permettra une comparaison intéressante en termes de durabilité.

2 – Représentativité de l’échantillon Comme il l’a été indiqué dans la partie méthodologie, l’objectif de représentativité des productions majeures locales n’était pas prépondérant. Cependant, on peut y voir une certaine similarité avec les filières dominantes en moyenne montagne, même si les proportions sont légèrement différentes. Par contre, ces proportions représentent assez bien le réseau CIVAM sur ces territoires. En effet, les structures sont relativement variées, plus modestes pour les productions emblématiques, plus diversifiées avec des ateliers de transformation par exemple et la présence de vente directe n’est pas rare. De même, des diversifications plus originales sont également représentées : apiculture, arboriculture, maraîchage, petits fruits ou encore accueil à la ferme… Au final, on peut considérer que les résultats sont généralisables au mouvement CIVAM de moyenne montagne, bien qu’il n’existe pas de données pouvant confirmer ces proportions de systèmes et taille des exploitations.

3 – La structure moyenne enquêtée L’exploitation moyenne est de taille modeste pour ces zones d’élevage allaitant (en majorité), avec une SAU moyenne de 75 hectares (µ = 74,61 ha ; = 58,11 ha) pour 1,9 UTH en moyenne (µ = 1,90 UTH ; = 0,88 UTH). Que ce soit au niveau de la surface ou de l’emploi, une grande variabilité est présente ( /µ = 78% pour la SAU et /µ = 46% pour les UTH). Cette variabilité s’explique en partie par la présence dans l’échantillon de grandes structures de plus de 280 ha en système ovin intégrant de grandes surfaces en parcours. Certaines structures présentent jusqu’à 5 UTH pour seulement 75,5 ha, où d’autres sont à plus de 240 ha par UTH !

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Toujours est-il que ces résultats moyens montrent bien la volonté liée à l’éthique du mouvement CIVAM de partager les facteurs de production et d’en vivre correctement. En effet, avec un peu plus de 39 ha/UTH en moyenne, le facteur foncier est à un niveau pouvant paraître relativement modeste ; et si l’on ajoute à cela le fait que ces structures sont relativement peu aidées par la PAC (systèmes ovins, systèmes herbagers, productions non aidées…), on peut supposer que ces structures ont tout à prouver en termes de performances économiques. La partie suivante fera l’état des lieux des performances en termes de durabilité de ces systèmes de production, sur les trois dimensions du développement durable.

B – Etat des lieux de la durabilité des exploitations agricoles Il est important de bien comprendre la « note » de durabilité obtenue. Chaque exploitation est diagnostiquée sur les trois dimensions du développement durable et obtient, bien entendu, des scores différents pour tous les indicateurs. La note finale obtenue est celle du facteur limitant, c’est-à-dire la plus faible parmi les trois dimensions. Pour rappel, la dynamique d’orientation vers l’agriculture durable est à appréhender à travers les trois dimensions – économique, sociale et environnementale – du développement durable, et ce, de façon synchrone. Le fait d’être performant sur une seule des dimensions ne suffit pas. Au final, la note la plus basse correspond au niveau de durabilité obtenu. Enfin, il est également important de souligner que l’approche vers la durabilité est dynamique et qu’elle évolue dans le temps. Les diagnostics réalisés ne représentent une situation qu’à un instant donné.

1 – La durabilité des exploitations CIVAM 1.1. – la population totale enquêtée Comme le montrent les tableaux et graphiques suivants, on remarque que pour les 93 exploitations enquêtées, le niveau de durabilité est correct avec une note moyenne de 52,39 sur 100. Durabilité Agro écologique Socio territoriale Economique Note de durabilité

Valeur moyenne des 93 exploitations 91,79 69,47 52,39 52,39

Maximum 100 100 100

Ces résultats sont obtenus à partir du « facteur limitant » qu’est la dimension économique. En regardant de plus près, on s’aperçoit que selon l’échelle considérée, une grande différence apparaît. En effet, sur la dimension agro écologique les exploitations sont très performantes avec une note moyenne de 91,79 %, ce qui peut être qualifié d’excellent. Ceci témoigne de l’implication déjà ancienne maintenant des exploitations CIVAM pour répondre aux enjeux sociétaux, et notamment environnementaux. Il y a maintenant plusieurs années que ces exploitants s’investissent pour le respect de l’environnement, que ce soit pour les agriculteurs en production biologique ou ceux en démarche conventionnelle ou « durable » (au sens CIVAM du terme). L’écart type n’est d’ailleurs que de 7,14 (soit moins de 8% de la moyenne), ce qui témoigne d’une grande homogénéité des exploitations. Il ya donc peu de chances d’identifier des variables discriminantes sur cette échelle. Pour ce qui est de la dimension socio territoriale, les résultats sont corrects et témoignent d’une implication territoriale intéressante, même si quelques progrès sont possibles. Ici la variabilité de 17% laisse à penser que certains aspects sont plus discriminants, et différencient donc les exploitations. Enfin, c’est nettement la dimension économique qui pèse sur la durabilité globale des exploitations enquêtées, même si celle-ci reste correcte. L’écart type de 17,1 soit près d’un tiers de variabilité autour de la moyenne, suppose des différences importantes entre exploitations qu’il conviendra d’identifier.

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Durabilité de l'exploitation

100,00 80,00

Agroécologique 100

60,00 40,00 20,00

0

iq ue Ec on om

te rri to ria le So cio

Ag ro éc ol og iq ue

0,00

Economique

Socioterritoriale

Les documents qui suivent permettent d’approfondir et d’analyser quelles sont les composantes qui limitent ou qui influencent le plus la durabilité des structures. Si l’on regarde de plus près les différentes échelles, ainsi que le détail des différents objectifs traités par le diagnostic IDEA (à partir des composantes principales de la durabilité), on obtient les résultats suivants :

Valeur des 10 composantes de la durabilité sur l'exploitation à un moment donné (et maximum possible) 40

30

20

10

Efficience

Transmissibilité

Indépendance

Viabilité

humain

Ethique et

développement

Emploi et services

territoires

Qualité des

produits et des

agricoles

Pratiques

l'espace

Organisation de

Diversité

0

On s’aperçoit assez nettement que l’indicateur Viabilité (VE=EBE-BF/UTH non salariée, ainsi que le Taux de Spécialisation économique) pénalise les résultats en termes de durabilité, sachant qu’il est un indicateur important (30 points sur 100) de la dimension économique. Ceci correspond à une rémunération d’environ 1,2 SMIC par UTH, malgré tout. Cependant si on comparait ces résultats avec d’autres structures d’exploitations, notamment plus grandes en moyenne, on s’apercevrait de l’impact des aides PAC (qui sont intégrées à l’EBE) sur le revenu. En effet, ces systèmes d’élevage herbagers à surface relativement modeste présentent des DPU (Droits à Paiement Unique) faibles, comparés aux systèmes de production moyens de ces zones (même si ceux-ci ne sont pas aussi élevés qu’en plaine). Ceci s’explique en partie par le fait que les agriculteurs n’ont pas orienté leurs systèmes dans un objectif de maximisation de l’aide publique, mais, depuis plusieurs années, cherchent à intégrer la dimension environnementale dans leurs systèmes de production. Cela se traduit d’ailleurs par un niveau d’indépendance (comprenant l’Autonomie financière et la Sensibilité aux aides) relativement bon avec 16,7 sur 25 (soit 67%). Nous y reviendrons pour les commentaires par dimension.

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Des exploitations fortement engagées dans le respect environnemental. Avec un résultat de 91,8 sur 100, les exploitations CIVAM de moyenne montagne prouvent leur implication déjà ancienne en faveur de l’environnement. Certes les exploitations en agriculture biologique, nombreuses, peuvent peser sur ces résultats, mais nous verrons par la suite que ce n’est pas si évident… Le graphique suivant montre les différents aspects de la dimension agro écologique ainsi que les marges de progression possibles.

Durabilité agro-écologique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 15

10

5

0

Ici, malgré un résultat plus qu’honorable en termes de durabilité agro environnementale globale, on s’aperçoit que les systèmes de production sont essentiellement basés sur les fondements classiques de la production agricole : productions basées sur les principales races de la production animale (diversité animale moyenne et faible implication dans la conservation du patrimoine génétique) et une conduite des surfaces fourragères relativement classique (diversité des cultures, moyenne) malgré une dominante d’utilisation de l’herbe, on reste souvent dans un schéma de conduite des prairies temporaires classique. Quelques progrès peuvent donc être réalisés sur la conduite de ces surfaces avec un peu plus de diversité (mélange d’espéces et de variétés, prairies multi-espèces…) et l’utilisation du patrimoine génétique local (meilleure valorisation des prairies naturelles, utilisation de races animales locales ou plus diverses), même si ces enjeux ne sont que très secondaires au vu des résultats agro écologiques globaux. En effet, les modèles techniques de plaine, basés sur l’intensification fourragère (végétation courte, fauches précoces, fertilisation importante…), ont largement gagné les zones de montagne. Ainsi, par exemple, la biodiversité reste souvent perçue comme une contrainte et les agriculteurs l’associent le plus souvent à la protection des espèces rares ou remarquables (emblématiques). Ils sont en général enfermés dans un modèle technique professionnel qui consiste à faner (faucher) le plus tôt et le plus souvent possible, avec des doutes sérieux quant aux intérêts agronomiques et économiques réels de ce genre de pratiques (manque de fibres dans les rations et donc achat de paille et de concentrés, soit une délocalisation complète ou presque de l’alimentation et une perte de typicité des produits ; fertilisation accrue et perte de valeur ajoutée avec fragilisation du système de production conditionné aux cours du pétrole). Les problèmes également liés au renouvellement des prairies conduites de façon intensive, dégradées (surexploitation, envahissement d’adventices…), illustrent aussi les coûts importants engendrés par ces modèles. Ces questions ouvrent d’ailleurs des perspectives pour repenser techniquement le lien entre élevage et diversité (domestique et sauvage) sur les territoires de moyenne montagne. Les graphiques suivants viennent confirmer ces aspects : très bonnes pratiques agricoles pour un respect de l’environnement, mais des schémas de production basés sur les principes classiques des filières dominantes.

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Pratiques agricoles 14 12 10 8 6 4 2 0 Fertilisation

Effluents organiques liquides

Pesticides

Traitements vétérinaires

Protection de la ressource des sols

Gestion de la ressource en eau

Dépendance énergétique

Comme le montre le graphique précédent, les pratiques agricoles sont très bonnes. On peut remarquer cependant une marge de progrès possible dans les pratiques de fertilisation, les systèmes étant relativement chargés et nécessitant une productivité à l’hectare très importante au regard des potentialités agronomiques réelles. Le résultat modeste concernant les effluents organiques liquides s’explique par le poids relatif des systèmes laitiers ne mettant pas en œuvre de système de traitement (lagunage ou compostage) de ces effluents liquides. Par ailleurs, des techniques d’optimisation des ressources herbagères, comme le pâturage tournant (cf. ANNEXE : « Produire autant sans engrais : c’est possible » du groupe ADAPA du Limousin), permettent de réduire fortement ses achats d’engrais et d’aliments du bétail, avec, qui plus est, des conséquences non négligeables sur les performances énergétiques et sur le travail.

Organisation de l'espace 14 12 10 8 6 4 2 0 Assolement

Gestion des matières organiques

Contribution aux enjeux environnementaux du territoire

Gestion des surfaces fourragères

2-Dimension des parcelles ; 4-Zone de régulation écologique ; 6-Valorisation de l’espace

Au niveau de l’organisation de l’espace, les résultats sont également de très bonne facture, mais sont probablement inhérents au contexte géographique propre à la moyenne montagne : parcelles nombreuses, de dimension modeste et variées selon qu’elles soient mécanisables ou non. De même, la présence de haies, de bosquets, d’arbres isolés…n’est pas rare. Pour la contribution aux enjeux environnementaux du territoire, le « faible » résultat s’explique par le petit nombre d’agriculteurs concernés par des MAE territorialisées, des cahiers de charges territorialisés ou encore des zones Natura 2000. La proportion, importante, d’agriculteurs inscrits dans la démarche d’agriculture biologique et respectant donc un cahier des charges global exigeant, explique également cette modeste implication territoriale.

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Diversité 14 12 10 8 6 4 2 0 Diversité des cultures annuelles et temporaires

Diversité des cultures pérennes

Diversité animale

Valorisation et conservation du patrimoine génetique

C’est à ce niveau donc, en termes de diversité que les marges de progrès sont les plus importantes. Les schémas de production calqués sur les systèmes classiques, normés, de production animale, ne sont pas nécessairement les mieux adaptés aux contextes de moyennes montagne. Il conviendrait de réaliser une analyse technicoéconomique à ce niveau (ce qui n’est pas du ressort de cette étude). En effet, bon nombre d’exploitations ayant largement entamé la réflexion de l’autonomie de leur système, favorisent ces éléments de diversité. Les associations d’espèces, complémentaires, ainsi que l’introduction de nouvelles cultures comme les légumineuses dans l’assolement, contribuent à améliorer les niveaux de diversité biologique. Au final, et au vu des résultats obtenus, et même si des marges de progrès sont toujours possibles, on peut estimer que les exploitations enquêtées sont très performantes en termes agro écologiques. La forte homogénéité de l’échantillon sur cette dimension ( /µ = 8% seulement) atteste de l’excellence environnementale globale. Des exploitations impliquées dans le respect des équilibres mondiaux mais soumises à des charges de travail importantes, et ne valorisant pas assez l’image de la montagne. Le graphique suivant présente les résultats concernant la dimension socio territoriale. Globalement, on remarque une certaine homogénéité sur l’ensemble des indicateurs autour de la moyenne (69,5 sur 100). La variabilité est ici un peu plus importante ( /µ = 17%), ce qui témoigne d’une plus grande dispersion. On peut noter, par exemple, que certains indicateurs pèsent positivement sur le résultat. C’est le cas notamment de l’implication sociale des agriculteurs en faveur d’associations et du fait que tous sont au moins membres d’un CIVAM. Ceci se traduit par des scores très corrects sur les indicateurs « Implication sociale » et « formation » (rôle formateur important des CIVAM par le biais de l’éducation populaire) C’est le cas également de la « Contribution à l’équilibre alimentaire mondial », qui est un indicateur global (prenant en compte les surfaces importées (ou taux d’importation) et la production sur l’exploitation de légumineuses (protéines)) et qui témoigne en partie de l’autonomie des structures. En effet, de manière générale, une bonne part des structures enquêtées produit des légumineuses pour améliorer l’autonomie des exploitations (approche typique du mouvement CIVAM) ce qui favorise un score correct (8,8 sur 10). Certains éleveurs restent malgré tout enfermés dans une approche purement technique en termes de performances d’élevage et sont souvent pénalisés par les achats d’aliments du bétail (aliments complets, correcteurs azotés type tourteaux…). On peut remarquer également, que malgré l’éloignement lié aux distances ou à l’enclavement, les agriculteurs ne sentent pas du tout isolés (indicateur « Isolement » en auto estimation). Le travail en réseau par la formation, les échanges entre agriculteurs, inhérent au mouvement CIVAM peut être un facteur explicatif. Par contre, d’autres indicateurs influent négativement sur le résultat : c’est le cas de l’intensité de travail (note de 1,4 sur 7 en auto estimation, qui témoigne d’une sensation de surcharge de travail de la part des agriculteurs) ou encore des « Services et Pluriactivité » par exemple (note de 0,97 sur 5, qui témoigne d’une faible implication sur les services rendus au territoire, l’agrotourisme ou les pratiques pédagogiques ou d’insertion sociale de l’échantillon enquêté). Ces deux indicateurs sont d’ailleurs étroitement liés puisque lorsque l’intensité du travail est très importante, il est difficile de dégager du temps pour fournir des services au territoire. Seuls les

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agriculteurs ayant développé des diversifications vers l’agrotourisme, ou l’accueil social ou pédagogique influencent le résultat moyen (10 exploitations seulement avec au moins 3 points, la majorité ayant 0 sur 5). Des groupes de moyenne montagne (non enquêtés ici) se sont d’ailleurs spécialisés dans cette approche et cherchent aujourd’hui à faire reconnaître le métier d’agriculteur accueillant social. De même des formations et de l’appui méthodologique sont proposés (Midi-Pyrénées, Auvergne, Limousin) pour les agriculteurs qui seraient éventuellement intéressés par une telle approche.

Durabilité socio-territoriale Valeur sur l'exploitation et maximum possible

10

5

Isolem ent

Intensité de travail

Bien-être anim al

Pérennité probable

Contribution à l’em ploi

Autonom ie et valorisation des ressources locales

Im plication sociale

Gestion des déchets non organiques

Dem arche de qualité

0

2-Valorisation du patrimoine bâti et du paysage ; 4-Accessibilité de l’espace ; 6-Valorisation par filières courtes ; 8-Services, pluriactivité ; 10-Travail collectif ; 12-Contribution à l’équilibre alimentaire mondial ; 14-Formation ; 16-Qualité de vie ; 18-Accueil, hygiène et sécurité.

Des progrès sont envisageables sur cette dimension socioterritoriale, notamment en termes d’intensité du travail. Ceci peut être travaillé en améliorant notamment l’utilisation du pâturage, qui n’est pas toujours optimisé. En effet, des marges de progrès sont envisageables en sortant quelque peu des systèmes à base de stocks fourragers et en revenant à des systèmes pâturant (il n’est d’ailleurs plus très rare de trouver en zone de moyenne montagne des systèmes herbivores hors sol, en bovins lait par exemple). La remise à l’herbe des troupeaux se traduit en général par des changements importants en termes de travail : observation accrue, mécanisation limitée (récoltes, distribution, curage…) ; mais également en termes de perception du métier et de qualité de vie : plus en lien avec la demande sociétale (nature, vie de famille…) et les enjeux globaux (énergies, biodiversité…). Ceci se traduirait par une limitation du temps de travail (sauf en période hivernale), ce qui permettrait l’ouverture à l’extérieur, et donc une meilleure implication socio territoriale. Cependant, l’intensité de travail semble être dans ces zones montagnardes un élément fort de l’identité culturelle, où le temps libre est souvent réservé aux échanges complémentaires entre agriculteurs. Cet aspect mériterait peut être d’être approfondi par une enquête sociologique. Enfin, des marges de progression non négligeables existent au niveau des débouchés des produits. En effet, si l’on part de l’hypothèse que l’image de la montagne est un atout commercial important pour la valorisation des produits, on s’aperçoit que, même si l’ensemble des territoires de moyenne montagne présente un maillage quasi-total de productions sous signe officiel de qualité et d’origine (SOQ), l’écoulement des produits se fait souvent dans les filières classiques. C’est le cas notamment pour la production laitière bovine, la production de broutards pour l’Italie, ou encore pour les produits issus de l’Agriculture Biologique qui, faute de présence de filières structurée, sont souvent écoulés par voie conventionnelle. Une réelle politique pour la valorisation des produits de la montagne pourrait permettre à l’ensemble des exploitations une amélioration de leur résultas en termes socio territorial. Ceci passerait par exemple par la mise

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en place de filières de produits de la montagne, organisées autour de la préservation de l’environnement et du maintien du tissu social. L’enjeu pour l’Agriculture Biologique est, quant à lui, généralisable à l’échelon national, avec le développement des filières AB. Quelques labels existent déjà, mais nombreux sont les exploitants à produire selon les modalités de la plaine (avec évidemment des désavantages comparatifs structuraux), ce qui limite la valorisation des produits, et fait perdre une partie des atouts de l’identité de la montagne. Des systèmes peu soutenus par les aides publiques, mais techniquement efficients et transmissibles ! La dimension économique est définitivement le point faible de la durabilité des exploitations enquêtées. Avec un résultat moyen de 52,39 sur cent, on perçoit aisément les pistes de progrès pour améliorer la durabilité des exploitations, bien que le contexte sociopolitique ne soit pas avantageux, loin de là. Par ailleurs, la variabilité est importante ( /µ = 32,6%), ce qui témoigne d’une grande disparité des résultats.

Durabilité économique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 25

20

15 10

5

productif

processus

Efficience du

Transmissibilité

aides

Sensibilité aux

financière

Autonomie

économique

Taux de

spécialisation

économique

Viabilité

0

Comme évoqué précédemment (contexte de la moyenne montagne), les résultats économiques moyens sont essentiellement dûs à une relativement faible viabilité en partie impactée par les faibles soutiens publics aux systèmes d’élevage herbagers, ou aux systèmes ovins par exemple. Ceci se traduit d’ailleurs par une faible sensibilité aux aides du système de production, même si celles-ci ne sont pas négligeables dans le revenu des éleveurs. En effet, les systèmes de moyenne montagne perçoivent en moyenne moins de 10 000 € par exploitation (aides du 1er pilier de la PAC), malgré le complément à l’extensification de 2005. Ces structures bénéficient cependant de subventions au titre du 2nd pilier (ICHN, PHAE…), mais qui ne comblent pas le fossé existant entre les systèmes de plaine et les systèmes de montagne (AGRESTE - 2008). Ceci est accentué depuis la réforme de la PAC de 2003 avec la mise en place d’une rente de situation liée aux DPU (Droits à Paiements Uniques) issus de références historiques. En effet, ces références historiques basées essentiellement sur la surface ne sont pas favorables aux petites structures et engendrent une situation figée dans le temps. Ainsi, ce panel d’exploitations, disposant d’une surface modeste par UTH (39 ha), basée sur la présence de prairies naturelles, et de troupeaux de taille modeste…, ne peuvent prétendre qu’à peu de soutiens directs. C’est par le biais de l’ICHN (Indemnité Compensatoire de Handicap Naturel), de la PHAE (Prime Herbagère Agro Environnementale), voire des quelques CTE (Contrat Territorial d’Exploitation) et autres CAD (Contrats d’Agriculture Durable) qui courent encore…, que les exploitants sont soutenus ; soit par leur implication dans le développement rural (pilier II de la PAC). Ces faibles soutiens sont inclus dans le calcul de l’EBE (Excédent Brut d’Exploitation), qui sert au calcul de l’indicateur « Viabilité économique » (VE=EBE-BF/UTH non salariée, avec BF : Besoin de Financement (en gros, les remboursements des annuités d’emprunts et la moitié des amortissements)). Cet indicateur témoigne, à peu près, du niveau de rémunération possible de l’exploitant. Ici, le niveau moyen, avec un résultat légèrement

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inférieur à 5 sur 20, correspond à environ 1,2 SMIC par UTH (potentiel de prélèvements privés par unité de main d’œuvre). Cependant, on note une extrême variabilité puisque l’écart type représente plus que la moyenne ( /µ = 129%), ce qui démontre des écarts très importants entre exploitations. Il conviendra donc d’identifier des relations entre variables qui pourraient expliquer en partie ce fait. On remarque également que la plupart des systèmes de production enquêtés présente un taux de spécialisation économique (part de l’atelier principal dans le chiffre d’affaire hors primes, part d’achat par le principal client…) élevé, ce qui a pour conséquence un résultat « faible » sur l’indicateur (note de 2,99 sur 10, avec un écart type de 4,3 soit 143% de variabilité). Ces résultats montrent une très grande hétérogénéité des systèmes de production avec des systèmes très spécialisés qui pèsent négativement sur la moyenne (cas de systèmes laitiers, broutards…) avec des notes de 0/10 ; à l’opposé, on trouve également quelques systèmes très diversifiés, peu nombreux. La diversification des activités et/ou des productions réduit, en principe, la fragilité des entreprises en les rendant moins sensibles aux éventuels aléas économiques, sanitaires voire climatiques. Cependant, dans des structures de taille relativement modeste, il n’est pas toujours simple de mettre en place un atelier nouveau, ni même parfois de se dégager le temps nécessaire. Le système est souvent hérité d’une longue histoire familiale reliant système de production et conditions pédoclimatiques. Ce sont fréquemment les néo ruraux installés hors cadre familial qui mettent en place des systèmes atypiques et/ou innovants. Il est alors bénéfique de s’intéresser à ce genre d’approche nouvelle de la production afin de s’enrichir d’une vision nouvelle sur des territoires parfois très marqués culturellement par des productions emblématiques. Ces deux indicateurs cumulés forment la composante « VIABILITE », point faible de l’échantillon, comme le montre le radar de synthèse qui suit. Au final, on obtient une note moyenne de 7,4 sur 30, avec = 6,6 soit une variabilité de 89% où les résultats varient de 0 à 28 sur 30. Nous essaierons d’identifier par la suite les facteurs de variation de ces résultats. « Cette viabilité implique, en termes économiques, l’efficacité du système de production et la sécurisation des sources de revenus du système de production agricole, face aux aléas du marché et aux incertitudes qui pèsent sur les aides directes. » (www.idea.portea.fr). Ici, même si l’on peut considérer ces résultats comme satisfaisants en termes de rémunération, il convient effectivement de bien avoir à l’esprit que les subventions publiques font partie intégrante de l’EBE. Le SMIC annuel brut équivalant à environ 15 800 €, les primes correspondant en moyenne à 10 000 €, il faut effectivement s’interroger à la viabilité réelle de l’outil, à son avenir, et à la sensibilité aux aides. D’ailleurs, en ce qui concerne cette « Sensibilité aux aides », les exploitations enquêtées montrent leur faible dépendance, puisque le résultat à l’indicateur est de 6,7 sur 10, ce qui signifie que ces aides en moyenne représentent moins de 40% de l’EBE. Des disparités entre systèmes existent ( /µ = 48%) puisque certaines productions ne sont pas du tout éligibles au régime de soutiens alors que d’autres présentent des niveaux d’aides supérieurs à leur EBE (ce qui prouve une existence du système uniquement basée sur le régime de subventions !). Pour l’indicateur « Autonomie financière », la note moyenne est tout à fait correcte (plus de 10 sur 15), ce qui traduit une part inférieure à 25% de dettes (annuités + frais financiers) dans l’EBE. Ce résultat masque malgré tout des différences importantes ( = 58% de la moyenne) puisque certaines structures présentent des niveaux d’endettement supérieurs à 50% de l’EBE, où d’autres sont à un niveau nul. Nous verrons par la suite si des liens existent par système de production ou par type de spéculation économique. Toujours est-il que pour l’échantillon enquêté, les niveaux d’investissements sont relativement faible, ce qui laisse penser que la valeur ajoutée dégagée sur ces exploitations servent en priorité à financer la main d’œuvre plutôt que de consolider l’outil, ce qui fragiliserait sa transmission. D’ailleurs, en ce qui concerne la transmissibilité des exploitations, on peut remarquer que celle-ci est bonne avec un capital d’exploitation en moyenne inférieur à 120 000 € (12.2 sur 20, mais grande variabilité (163%)). Ceci s’explique par le fait que les structures ne sont pas très importantes en termes de facteurs de production, et qu’une des valeurs du mouvement CIVAM consiste « à investir dans l’humain plutôt que dans le matériel », afin de favoriser l’installation de jeunes porteurs de projet. En effet, l’investissement matériel afin d’augmenter artificiellement les charges pour ne pas payer d’impôts, fragilise le système en entraînant une migration des capitaux vers les banques plutôt que vers l’Etat et les services publics, voire vers le dynamisme du tissu rural et l’emploi. Certaines structures sont d’ailleurs très lourdes en capitaux, comme en témoigne la variabilité et sont difficilement transmissibles (capital d’exploitation supérieur à 500 000 € par UTH). Pour ce qui est de l’efficience du système productif, qui prend en compte l’efficacité de l’utilisation des intrants par le système de production, les résultats globaux sont corrects mais là aussi des marges de progrès sont

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possibles, d’autant que les intrants en zone de montagne présentent des coûts supérieurs par rapport aux systèmes de plaine, du fait de l’éloignement des zones de chalandises, et des surcoûts liés aux transports. Le niveau moyen se situe aux alentours d’une part inférieure à 40% d’intrants dans les produits (15,8/25). La variabilité est également très importante ( /µ = 47%) puisque les résultats oscillent entre moins de 10% et plus de 90% d’intrants dans les produits. Il apparaît donc évident que les partages des acquis des divers groupes CIVAM entre eux seraient nécessaires, pour permettre aux systèmes très dépendants des intrants d’améliorer leur niveau de durabilité économique. Radar de synthèse : Score obtenu Maximum

Diversité 100 Efficience

Organisation de l'espace

Transmissibilité

Pratiques agricoles 0

Indépendance

Qualité des produits et des territoires

Viabilité

Emploi et services

Ethique et développement humain

Le radar de synthèse montre bien les forces et faiblesses des exploitations enquêtées en termes de durabilité : •

La durabilité environnementale est expliquée par des pratiques respectueuses de l’environnement et une très bonne organisation de l’espace mettant en valeur le paysage de montagne, mais quelques progrès sont possibles en termes de diversité des systèmes de production, notamment dans la conduite des systèmes fourragers. Les résultats socio-territoriaux sont également améliorables et reposent en bonne partie sur une réflexion pratiques – temps de travail, ce qui permettrait de dégager du temps pour les autres aspects en lien avec le territoire. Par ailleurs, une véritable politique de valorisation des produits de la montagne à grande échelle permettrait d’améliorer ces aspects pour tous les agriculteurs de ces territoires. Enfin, la spécialisation et le faible soutien des aides publiques (aides directes/EBE : faible) pénalisent la viabilité des systèmes de production par rapport à ceux qui ont orienté leurs pratiques dans un objectif de maximisation des primes PAC, même si les résultats sont tout à fait corrects. De même, la valeur ajoutée dégagée sur les structures sert essentiellement à financer la main d’œuvre plutôt que l’outil, permettant ainsi une certaine indépendance financière avec peu de soutiens publics. Dans ce contexte, un travail est possible sur les économies d’intrants pour optimiser encore l’efficience du système productif en vue d’améliorer la viabilité globale. Les systèmes de production sont globalement encore aisément transmissibles.

Ces résultats globaux masquent-ils des différences entre régions, entre type de production, ou encore entre type d’agriculture ?

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1.2. Approche par région administrative Dans un premier temps, seront présentés les résultats globaux de durabilité. Les approches statistiques complémentaires viendront donner plus de précisions quant aux différences régionales. Ces croisements et tests statistiques sont présentés en partie C – Compléments statistiques. Les approches par région présentent les résultats suivants : La région Auvergne se caractérise par des systèmes de productions assez classiques pour la région (prédominance de systèmes bovins pour près de 70% de l’effectif enquêté) avec des productions de bovins lait, bovins allaitant et quelques productions atypiques comme la productions de petits fruits avec transformation, ou l’apiculture par exemple. Ce sous échantillon est composé de 37 exploitations dont 6 seulement en Agriculture Biologique (16,2%). L’Auvergne est ainsi la région la plus représentée, et celle dont la proportion d’agriculteurs « bio » est la plus faible. Répartition des exploitations par type de production en Auvergne

Caprins 8%

Autres prod 11%

BL spé 19%

BL spé BL + BV

BV + Autres 8%

BL + BV 11%

BL + Autres OV BV

BV 24%

BV + Autres

BL + Autres 5%

Caprins

OV 14%

Autres prod

La plupart des systèmes sont assez peu diversifiés et les proportions de chaque type de production sont assez représentatives des systèmes présents en Auvergne avec une majorité de systèmes bovins viande et lait (67%). Les résultats en termes de durabilité sont présentés dans les graphiques suivants : Durabilité Agroécologique Socioterritoriale Economique Note de durabilité

Valeur des 37 exploitations Auvergne 85,95 66,20 45,81 45,81

Maximum 100 100 100

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40


Durabilité de l'exploitation

100,00 80,00

Agroécologique 100

60,00 40,00 20,00 0

iq ue

oc io te r ri

Ec on om

to ria le

Economique

Socioterritoriale

S

Ag ro éc ol og iq ue

0,00

Score obtenu Maximum Diversité 100 Efficience

Organisation de l'espace

Transmissibilité

Pratiques agricoles 0

Indépendance Viabilité

Qualité des produits et des territoires Emploi et services

Ethique et développement humain

Les systèmes enquêtés de la région Auvergne se caractérisent pour la plupart par des productions classiques (BL, BV pour 69.6% de l’effectif enquêté) et des schémas de production fourragère normés (prairies permanentes sur les surfaces non mécanisables et relative intensification sur le reste des parcelles avec présence de maïs ensilage notamment en bovin lait). Ainsi, le système de production fourragère impacte sur la diversité des cultures et de l’assolement, pénalisant les résultats en termes agro écologiques en comparaison à la moyenne globale. Le graphique suivant présente les différents aspects de durabilité agro écologique. On note également la faible évaluation de diversité animale et de valorisation du patrimoine de moyenne montagne : ces systèmes sont basés sur l’élevage de races animales classiques (Charolais pour le bovin viande, Prim’Holstein en bovin lait), déconnectées du territoire. Par ailleurs, la conduite classique des surfaces fourragères dans un objectif d’intensification des prairies temporaires et du maïs ensilage entraîne une baisse des résultats de fertilisation (maïs comme exutoire à effluents et/ou objectifs de rendements surestimés), de protection de la ressource sol (sols nus après maïs) ou encore de dépendance énergétique (conduite intensive des surfaces fourragères et dépendance aux aliments du bétail par application des schémas classiques maïs soja…). On est ici assez typiquement dans l’application des modèles techniques de la plaine, modèles dominants issus de la logique productiviste où les rendements sont souvent les seuls points de mire. La course à la performance est en général « stimulée par la lisibilité de cet indicateur, véritable moteur du modèle de développement » agricole (VILAIN ; 1999). Cette performance technique implique nécessairement une artificialisation croissante du milieu, vecteur de perte de diversité.

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Durabilité agro-écologique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 15

10

5

Dépendance énergétique

Gestion de la ressource en eau

Protection de la ressource des sols

Traitements vétérinaires

Pesticides

Effluents organiques liquides

Fertilisation

Gestion des surfaces fourragères

Valorisation de l'espace

Contribution aux enjeux environnementaux du territoire

Zones de régulation écologique

Gestion des matières organiques

Dimension des parcelles

Assolement

Valorisation et conservation du patrimoine génetique

Diversité animale

Diversité des cultures pérennes

Diversité des cultures annuelles et temporaires

0

En ce qui concerne la dimension socio territoriale, le graphique suivant présente les principaux résultats pour les systèmes enquêtés en Auvergne.

Durabilité socio-territoriale Valeur sur l'exploitation et maximum possible

10

5

Isolement

Intensité de travail

Bien-être animal

Pérennité probable

Contribution à l’emploi

des ressources locales

Autonomie et valorisation

Implication sociale

organiques

Gestion des déchets non

Demarche de qualité

0

2-Valorisation du patrimoine bâti et du paysage ; 4-Accessibilité de l’espace ; 6-Valorisation par filières courtes ; 8-Services, pluriactivité ; 10-Travail collectif ; 12-Contribution à l’équilibre alimentaire mondial ; 14-Formation ; 16-Qualité de vie ; 18-Accueil, hygiène et sécurité.

Ici, le groupe « Auvergne » n’est pas très différent du reste de l’échantillon pour ce qui est de l’intensité du travail. En effet, cet indicateur basé sur la fréquence de semaines surchargées sur l’année montre que la plupart des systèmes de production présente des pointes de travail importantes dues essentiellement aux simplifications des systèmes (vêlages groupés d’hiver, chantiers d’ensilage, foins…). L’approche par systèmes de production donnera plus d’éléments d’analyse. On note également, et c’est assez significatif pour l’Auvergne, une faible implication des agriculteurs dans les démarches de qualité. En effet, la plupart des produits sont écoulées dans les filières classiques (système broutards en BV, lait classique en BL et caprins) et seulement 2 éleveurs sont inscrits dans la démarche AB (2/23

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soit 8,6%). Enfin, comme l’ensemble de la population enquêtée, on remarque également que ces agriculteurs ne rendent pas de services à leur territoire, ce qui est probablement aussi à mettre en lien avec l’intensité de travail. Pour ce qui est de la dimension économique, on s’aperçoit que celle-ci représente le principal facteur limitant de la durabilité des systèmes de production, comme le montre le graphique suivant. Durabilité économique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 25 20 15 10 5

productif

processus

Efficience du

Transmissibilité

aides

Sensibilité aux

financière

Autonomie

économique

Taux de

spécialisation

Viabilité

économique

0

Ici plus qu’ailleurs, le taux de spécialisation élevé (qui n’est amélioré que grâce à quelques exploitations diversifiées) entraîne une viabilité faible. En effet, marqués par des systèmes de production relativement normés, des filières classiques et des conduites fourragères relativement intensives, les exploitations d’Auvergne présentent une compétitivité assez faible comparé à ces mêmes modèles de production basés en plaine. En effet, des progrès en termes de valorisation des ressources locales, de conduite économes et d’autonomie accrue, permettraient à ces exploitations de maintenir davantage de valeur ajoutée sur leurs territoires et ainsi d’améliorer la viabilité des systèmes de production. En outre, dans un contexte d’intrants plus coûteux, d’autant plus qu’ils sont directement indexés sur le cours du pétrole, ces exploitations ont tout intérêt à diminuer leurs niveaux de charges en optimisant l’utilisation des ressources locales (le pâturage notamment).

Les exploitations enquêtées en Aveyron sont typiques des systèmes de production locaux avec une assez grande représentation de systèmes ovins lait en production pour l’A.O.C. Roquefort (49%), mais des systèmes bovins lait et viande sont également concernés. Par ailleurs, le groupe APABA travaille sur l’agriculture biologique ; ainsi tous sont en démarche AB. Cependant, les proportions respectives des différents systèmes enquêtés ne sont pas représentatives des exploitations aveyronnaises. Au final, l’élevage ovin lait est sur représenté au niveau départemental, mais apporte de la diversité dans l’échantillon global. Sur les 30 exploitations du groupe aveyronnais, la répartition par production est la suivante :

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Répartition des exploitations par type de production en Aveyron

BL spé 17%

BL + BV 4%

BL spé BL + BV

BL + Autres 4% OL 49%

BL + Autres OV BV

OV 4%

BV + Autres Caprins

BV 14% Caprins BV + Autres 4% 4%

OL

On s’aperçoit ici que les systèmes Ovins Lait, emblématiques de l’Aveyron sont très représentés. La filière AOC Roquefort étant très rémunératrice, cela peut impacter les résultats en termes de durabilité économique. On peut également noter la faible représentation des systèmes bovin viande en agriculture biologique. On trouve pourtant naturellement en Aveyron bon nombre de systèmes de production de viande bovine avec le Veau d’Aveyron et du Ségala ou encore des systèmes Aubrac allaitant, cependant ces filières ne disposent quasiment pas de débouchés en « bio », ce qui peut expliquer en partie cette faible représentation. Par contre, on dispose d’un effectif assez important de systèmes bovin lait, ce qui peut s’expliquer par la recherche de plus value sur des systèmes de taille modeste. Les résultats en termes de durabilité montrent que les exploitations ne sont pas différentes de la moyenne en terme de durabilité :

m iq ue Ec o

er rit or io t

So c

no

ia le

e iq u lo g Ag r

Agroécologique Socioterritoriale Economique Note de durabilité

Valeur de Maximum l'exploitation 92,85 100 66,08 100 58,50 100 58,50

oé co

Durabilité

100,00 80,00 60,00 40,00 20,00 0,00

On aurait pu penser que les résultats économiques aient été influencés par la filière ovin lait, or, il n’en est rien en termes statistiques. L’échantillon aveyronnais est comparable à la moyenne générale : de très bons résultats agro écologiques, du fait de la démarche AB ; une durabilité socio territoriale similaire et un facteur limitant de la durabilité par les aspects économiques. Le radar de synthèse qui suit montre les résultats sur les 10 composantes évaluées. On y distingue également une dispersion assez proche de celle de la population totale.

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Score obtenu Maximum

Diversité 100 Efficience

Organisation de l'espace

Transmissibilité

Pratiques agricoles 0 Qualité des produits et des territoires

Indépendance

Viabilité

Emploi et services

Ethique et développement humain

Valeur des 10 composantes de la durabilité sur l'exploitation à un moment donné (et maximum possible) 40

30

20

10

Efficience

Transmissibilité

Indépendance

Viabilité

humain

Ethique et

développement

Emploi et services

territoires

Qualité des

produits et des

agricoles

Pratiques

l'espace

Organisation de

Diversité

0

Bien qu’inscrites dans la démarche « Agriculture Biologique », les exploitations aveyronnaises ne présentent pas de meilleurs résultats que l’ensemble de l’échantillon au niveau agro écologique (92.85 sur 100 pour le groupe Aveyron contre 91,79 pour l’ensemble). Ceci s’explique comme il l’a déjà été noté par une implication environnementale ancienne (10 à 15 ans pour la plupart des agriculteurs enquêtés) des agriculteurs des CIVAM des autres régions. Pour ce groupe d’agriculteurs, la principale limite est également liée à la spécialisation des systèmes de production, qui se traduit au niveau de la composante « VIABILITE » et au manque de diversité des systèmes fourragers. Les pratiques agricoles sont évidemment très respectueuses de l’environnement et l’organisation de l’espace dépend en grande partie de l’utilisation de prairies permanentes et du maintien des haies. FNCIVAM – Projet Agriculture Durable de Moyenne Montagne – 2008-2009 – Michaël CHARIOT

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Durabilité agro-écologique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 15

10

5

0

On note malgré tout une marge de progression en termes de diversité : il semblerait que l’on ait affaire à des systèmes assez spécialisés au niveau animal, avec peu de valorisation de races locales et un minimum contraint de diversité des cultures pérennes. Par ailleurs, il est à noter la faible contribution aux enjeux environnementaux du territoire qui s’explique le manque en Aveyron de cahier des charges territorialisé (type MAE territorialisée), mais également du fait que très peu des agriculteurs enquêtés se situent en zone Natura 2000 par exemple. Il faut malgré tout nuancer ce résultat du fait de l’implication dans le cahier des charges de l’agriculture biologique, qui peut être considéré comme une contribution aux enjeux environnementaux, mais à une échelle plus large. Enfin, on remarque également, que pour la plupart des systèmes (influence des Ovins Lait, présents quasiexclusivement en Aveyron ?), la gestion des effluents liquides représente un facteur limitant de la durabilité agroécologique et que, cet aspect est un facteur de progrès important. Cela passe notamment par la gestion des effluents de salle de traite. On peut par contre s’affranchir de la gestion d’effluents type lisier, car les ovins n’en produisent quasiment jamais (déjections relativement sèches, solides). Au niveau socio territorial, le résultat, convenable, diffère peu par rapport à l’ensemble de la population enquêtée (66.08 % contre 69.63 pour l’ensemble), mais varie quelque peu quant aux progrès à réaliser. En effet, ce groupe d’agriculteurs se caractérise par une intensité de travail importante, un relatif faible recours aux services extérieurs (type CUMA) et une contribution à l’emploi assez faible. En outre, il s’avère que les produits, bien qu’issus de l’Agriculture Biologique, ne sont que rarement valorisés par filière courte. Il est même fréquent qu’ils soient écoulés par la voie des filières conventionnelles. Un projet de structuration avec la restauration collective est d’ailleurs en cours d’élaboration. Ceci peut également s’expliquer par les nombreux systèmes laitiers présents dans ce groupe. En effet, en système laitier, on est souvent affilié à une laiterie qui collecte l’ensemble de la production. Et, les investissements nécessaires à la transformation à la ferme (atelier fromager), ou au conditionnement (pasteurisation, emballage), sont souvent lourds. Comme pour la population totale, on rencontre peu de services au territoire et peu de pluriactivité, et une forte intensité de travail ressentie par les agriculteurs. Par ailleurs, un faible résultat sur l’indicateur « Accueil, Hygiène et Sécurité », lié au faible recours à de la main d’œuvre autre que familiale, comme souvent en Aveyron.

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Durabilité socio-territoriale Valeur sur l'exploitation et maximum possible

10

5

Isolement

Intensité de travail

Bien-être animal

Pérennité probable

Contribution à l’emploi

locales

Autonomie et valorisation des ressources

Implication sociale

Gestion des déchets non organiques

Demarche de qualité

0

2-Valorisation du patrimoine bâti et du paysage ; 4-Accessibilité de l’espace ; 6-Valorisation par filières courtes ; 8-Services, pluriactivité ; 10-Travail collectif ; 12-Contribution à l’équilibre alimentaire mondial ; 14-Formation ; 16-Qualité de vie ; 18-Accueil, hygiène et sécurité.

Ces aspects sont confirmés au niveau économique et notamment au niveau de la transmissibilité des exploitations (très moyenne). On peut ainsi supposer, comme il est fréquent en Aveyron, que les exploitants font peu appel à de la main d’œuvre extérieure, se trouvant pénalisés d’une part avec une importante intensité de travail par UTH, mais également d’autre part en investissant beaucoup pour des raisons fiscales, pénalisant alors la transmissibilité de leurs exploitations (capital trop important à transmettre). Par ailleurs, le taux de spécialisation important vient confirmer ce qui avait été pressenti sur la partie diversité de la dimension agroécologique, et confirme ce fait au niveau de la viabilité. Les systèmes sont assez spécialisés au niveau de la production, mais également en ce qui concerne les débouchés.

Durabilité économique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 25

20

15 10

5

productif

processus

Efficience du

Transmissibilité

aides

Sensibilité aux

financière

Autonomie

économique

spécialisation

Taux de

Viabilité

économique

0

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Par ailleurs, au niveau économique, les résultats de durabilité économique peuvent quelque peu être influencés par la présence significative (9/26 soit près de 30%) de producteurs d’ovins lait en filière AOC Roquefort impactant la viabilité de façon positive (production rémunératrice) et la transmissibilité dans l’autre sens (taille des exploitations un peu plus importante avec parfois des surfaces élevées en parcours et un capital d’exploitation élevé à transmettre). Nous y reviendrons dans l’approche par type de production, pour confirmer ou non cette hypothèse.

Les résultats de durabilité des 19 exploitations du Limousin sont significativement différents de la moyenne. Ils représentent pour la majorité des systèmes bovins viande typiques de la région (43%) mais également quelques systèmes tels que des productions d’ovins viande ou de bovins lait, qui témoignent de la diversité des systèmes de production présents chez les agriculteurs des CIVAM. Répartition des exploitations par type de production en Limousin

Caprins 11%

Autres prod. 17% Autres prod.

BL + BV 11%

BL + BV BL + Autres BV

Allaitant + Autres 28%

Allaitant + Autres

BL + Autres 6%

Caprins

BV 27%

En effet, si l’on comparait les proportions des exploitations typiques du Limousin, probablement que l’échantillon ne serait pas représentatif de la population agricole classique. On remarque cependant la prédominance des systèmes allaitants (où quelques systèmes Ovins sont présents), ce qui témoigne malgré tout d’une certaine représentativité des filières (pas au sens statistique). Les résultats des systèmes du Limousin enquêtés sont les suivants :

io t So c

Ag r

m iq ue no

oé co

lo g

er rit or

iq u

ia le

e

100,00 80,00 60,00 40,00 20,00 0,00

Ec o

Valeur de Maximum l'exploitation Agroécologique 95,35 100 Socioterritoriale 75,85 100 Economique 62,66 100 Note de durabilité 62,66 Durabilité

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Score obtenu Maximum Diversité 100 Efficience

Organisation de l'espace

Transmissibilité

Pratiques agricoles 0

Indépendance

Qualité des produits et des territoires

Viabilité

Emploi et services

Ethique et développement humain

Les résultats de durabilité des exploitations CIVAM du Limousin résident dans leurs particularités. En effet, la majorité des exploitations enquêtées dans cette région sont issues du groupe CIVAM ADAPA qui travaille sur l’utilisation optimisée de l’herbe et du RAD Limousin, ce qui permet par exemple aux agriculteurs ayant poussé la réflexion de ne plus utiliser d’engrais pour une production identique (cf. ANNEXE). Au niveau agroécologique, les résultats sont très bons et témoignent de l’efficacité environnementale des systèmes herbagers. Certaines exploitations sont extrêmement diversifiées avec plusieurs productions animales associées à du maraîchage, de l’agroforesterie ou de l’arboriculture. Quelques maigres progrès pourraient potentiellement être réalisés au niveau de la diversité des races animales par exemple, mais cela n’apparît que peu pertinent eu égard aux résultats.

Durabilité agro-écologique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 15

10

5

0

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Pour ce qui concerne la dimension socioterritoriale, les exploitations du Limousin sont les plus performantes, et cela s’explique notamment par le fait que les structures sont relativement plus modestes et permettent ainsi une meilleure contribution à l’emploi avec des surfaces inférieures à 40 ha par UTH. Par ailleurs, ces agriculteurs participent à davantage de formations. En outre, le fait de travailler sur la thématique de l’herbe et de sa valorisation depuis plusieurs années a permis à ces exploitants d’aller vers plus d’autonomie et ainsi de mieux contribuer aux équilibres alimentaires mondiaux. L’approche statistique apportera davantage de compléments (cf. partie III – C). Durabilité socio-territoriale Valeur sur l'exploitation et maximum possible

10

5

Isolement

Intensité de travail

Bien-être animal

Pérennité probable

Contribution à l’emploi

locales

Autonomie et valorisation des ressources

Implication sociale

Gestion des déchets non organiques

Demarche de qualité

0

2-Valorisation du patrimoine bâti et du paysage ; 4-Accessibilité de l’espace ; 6-Valorisation par filières courtes ; 8-Services, pluriactivité ; 10-Travail collectif ; 12-Contribution à l’équilibre alimentaire mondial ; 14-Formation ; 16-Qualité de vie ; 18-Accueil, hygiène et sécurité.

On remarque également que ces exploitations ont des niveaux élevés en termes de valorisation des produits par filières courtes, d’implication sociale, de travail collectif, de formations et sur l’indicateur « Accueil, hygiène et sécurité ». Ceci s’explique en partie par l’approche globale et territoriale de la durabilité de certains agriculteurs du Limousin : après avoir réduit drastiquement les intrants, l’interrogation sur la valorisation locale et en direct des produits est apparue naturellement lorsqu’ils se sont écartés (et leurs produits avec eux) de la logique de filières. C’est également le cas de systèmes territoriaux atypiques axés sur la production de produits rares sur le territoire (maraîchage par exemple), couplé à de la production animale de petite taille entièrement valorisée en circuits courts. Ces systèmes ne demandent pas beaucoup de surface, nécessitent de la main d’œuvre et n’ont rien à envier aux productions emblématiques, et ce, quelle que soit la dimension de la durabilité considérée, au contraire. Enfin, au niveau économique, les résultats montrent également que leurs réflexions les ont progressivement amener à une bien meilleure efficience du système productif, avec des niveaux d’intrants très faibles. La réflexion a commencé sur l’autonomie des systèmes de production et elle est parfois poussée à l’extrême avec des ateliers conduits en complémentarité. Cette approche permise, entre autres, par un pilotage des parcelles herbagères très pointu (pâturage tournant, mesure des hauteurs d’herbe pour gérer l’entrée et la sortie du troupeau, méthode des degrés-jours…), se traduit au niveau économique par des résultats plus que convenables. Il conviendra de confirmer ces aspects au niveau statistique.

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Durabilité économique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 25

20

15 10

5

productif

processus

Efficience du

Transmissibilité

aides

Sensibilité aux

financière

Autonomie

économique

spécialisation

Taux de

économique

Viabilité

0

Malgré une viabilité modeste (correspondant tout de même à environ 1,3 SMIC par UTH) liée à une taille modeste des structures, on s’aperçoit que l’efficience du système productif est remarquable (les charges opérationnelles représentant moins de 40% du produit). De même la transmissibilité des exploitations est à un niveau très intéressant, qui montre le potentiel d’installations sur ce genre d’exploitation. Ce sont également des systèmes peu dépendants des aides publiques, qui ont du s’adapter afin de survivre dans un contexte tendu (ovin viande peu rémunérateur ou système bovin viande et broutards très dépendant du marché italien).

La région Rhône-Alpes est essentiellement représentée par des systèmes bovins lait (4 sur 7 exploitations enquêtées) présents sur la bordure est du Massif Central ou sur les contreforts des Alpes (Ain). Les proportions indiquées sur le graphique suivant ne sont à considérer qu’à titre indicatif, les résultats ne sont absolument pas généralisables au niveau régional, ni aux groupes CIVAM présents dans cette région. On parlera plutôt en termes d’effectifs de 4 exploitations en bovin lait pour 2 en caprin et un allaitant diversifié. Répartition des exploitations par type de production en Rhône-Alpes

Caprins 29% BL spé Allaitant + Autres BL spé 57%

Caprins

Allaitant + Autres 14%

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Ces sept exploitations présentent en termes de durabilité les résultats suivants : Valeur de Maximum l'exploitation 89,57 100 69,14 100 40,57 100 40,57

iq ue

100,00 80,00 60,00 40,00 20,00 0,00

Ag ro éc ol og iq ue So cio te r ri to ria le

Agroécologique Socioterritoriale Economique Note de durabilité

Ec on om

Durabilité

Score obtenu Maximum

Diversité 100 Efficience

Organisation de l'espace

Transmissibilité

Pratiques agricoles 0

Indépendance

Qualité des produits et des territoires

Viabilité

Emploi et services

Ethique et développement humain

Pour ce qui concerne la dimension agroécologique, « la région Rhône-Alpes » n’est pas différente de la moyenne, malgré un score légèrement plus faible. Les résultats sont évidemment à prendre avec une extrême précaution compte tenu de la faiblesse de l’effectif enquêté. Cependant, on remarque des marges de progrès en termes de diversité domestique pour ces systèmes d’élevage. En effet, les trois indicateurs de diversité ne sont pas à leur optimum, de même que l’indicateur « Assolement » qui témoigne soit de la présence d’une culture annuelle en forte proportion dans la surface assolable, soit de diversité associée à une présence de monoculture. On peut imaginer un système laitier basé sur la culture de maïs ensilage et peu de pâturage par exemple. Il semble également, d’après le radar de synthèse précédent, que ces exploitations présentent une efficience du processus productif inférieur à la moyenne, ce qui traduit de l’achat important d’intrants. Cela peut être le cas par exemple de systèmes caprins pour lesquels beaucoup d’achats d’aliment du bétail sont réalisés. De même, il semble que la viabilité de ces systèmes soit faible, ainsi que l’indépendance financière.

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Durabilité agro-écologique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 15

10

5

0

D’après ce graphique, on peut remarquer qu’en termes de gestion des effluents et de fertilisation, des progrès potentiels sont possibles. Si l’on accepte les hypothèses précédentes, on imagine aisément un système maïs exutoire à effluents, les autres parcelles, trop pentues n’étant pas mécanisables, avec un bilan azoté par conséquent excédentaire. Il convient ici de n’émettre que des hypothèses, les compléments statistiques viendront préciser ces données. Durabilité socio-territoriale Valeur sur l'exploitation et maximum possible

10

5

Isolement

Intensité de travail

Bien-être animal

Pérennité probable

Contribution à l’emploi

locales

Autonomie et valorisation des ressources

Implication sociale

Gestion des déchets non organiques

Demarche de qualité

0

2-Valorisation du patrimoine bâti et du paysage ; 4-Accessibilité de l’espace ; 6-Valorisation par filières courtes ; 8-Services, pluriactivité ; 10-Travail collectif ; 12-Contribution à l’équilibre alimentaire mondial ; 14-Formation ; 16-Qualité de vie ; 18-Accueil, hygiène et sécurité.

Pour ce qui est des aspects socio territoriaux, les exploitations de Rhône-Alpes ne différent pas de la moyenne des exploitations sur l’ensemble de la durabilité socio territoriale, mais présentent malgré tout, quelques particularités. C’est notamment le cas sur la valorisation des produits par filières courtes, qui s’explique par le

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fait que la majeure partie des produits (laitiers) est écoulée par les filières classiques, bien que 5 des 7 exploitations soient en Agriculture Biologique. En effet, des marges de progrès semblent possibles en ce sens du fait de cette orientation biologique, en proposant par exemple de la vente directe. On peut également que les systèmes de production allaitants relèvent, pour cette région, le niveau de contribution à l’équilibre alimentaire mondial, avec un degré d’autonomie alimentaire plus élevé que les systèmes bovins laitiers (en termes de potentialités). On remarque également un faible recours au travail collectif, ce qui se traduit par conséquent en termes d’intensité du travail par un niveau faible (auto estimation), qui témoigne de nombreuses semaines ressenties comme surchargées. Au niveau économique, ces différents aspects engendrent les résultats suivants, et viennent appuyer les hypothèses annoncées. Durabilité économique Valeur sur l'exploitation et maximum possible 25

20

15 10

5

productif

processus

Efficience du

Transmissibilité

aides

Sensibilité aux

financière

Autonomie

économique

spécialisation

Taux de

Viabilité

économique

0

En effet, bien que ces systèmes soient relativement peu dépendants des investissements (autonomie financière correcte, dénotant peu d’annuités et de frais financier par rapport à l’EBE (moins de 25%)), et transmissibles car peu capitalisés (moins de 120 000 € par UTH) ; ceux-ci s’avèrent très spécialisés et peu efficients (rendement des intrants faible), ce qui se traduit par une viabilité économique faible (environ 1 SMIC par UTH). Ces systèmes ont tout intérêt à entrer dans une démarche de réduction d’intrants et de valorisation de leurs produits par filières courtes, d’autant plus qu’ils sont « bio » pour certains d’entre eux (5 sur 7). Ici, un véritable enjeu de développement des filières locales avec la restauration collective ou même par la vente directe, apparaît. Nous identifions bien l’intérêt qu’il peut y avoir à organiser un réseau d’échanges des pratiques et des acquis des uns vers les autres.

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1.3. Approche par système de production Parmi les productions identifiées (Bovins Lait, Bovins Viande, mixte BL-BV, BL+autres prod., Syst. Allaitant+autres prod., Ovins Viande, Caprins+transf., Caprins+autres prod., Ovins Lait, et Autres Prod.), les résulats sont indiqués dans le tableau suivant : Durabilité

Bovins Bovins mixte Lait Viande BLBV

Agroécologique Socioterritoriale Economique Note

87,08 61,85 46,47 46,47

86,86 90,49 59,78 70,89 56,77 51,14 56,77 51,14

Ovins Caprins Caprins Ovins Syst. BL+ autres Allaitant Viande +transf +autres Lait prod prod +autres prod 98,33 100,00 82,83 88,60 100,00 89,00 70,18 73,83 66,05 69,37 85,65 63,78 53,71 55,64 45,50 56,00 76,88 60,11 53,71 55,64 45,50 56,00 76,88 60,11

Autres Prod

78,05 70,29 72,20 70,29

Ces résultats montrent certaines différences selon les productions, différences qu’il conviendra de traiter statistiquement. Cependant, les effectifs de tailles modestes risquent de perturber les résultats, il sera probablement nécessaire de grouper certaines productions. Au regard des résultats globaux, on remarque malgré tout que les systèmes ovins viande et bovins lait apparaissent comme les plus fragiles économiquement. Ceci s’explique en partie par les conjonctures économiques de ces deux marchés. Les systèmes ovins viande sont depuis près de trente ans concurrencés sur le plan international par les productions du Commonwealth et se montrent peu aidés au niveau public. Pour les systèmes bovins lait, la libéralisation progressive ainsi que la mondialisation des échanges ont entraîné une baisse significative des prix du lait depuis le début des années 2000. Par ailleurs, ces systèmes sont les plus « normalisés » avec l’hégémonie du système « Prim’Holstein – Maïs – Soja », très gourmand en intrants, dépendant du tourteau de soja importé, lui-même assujetti au cours du pétrole, et peu pertinent dans les zones de moyenne montagne, puisque largement concurrencé par les systèmes de plaine. Par ailleurs, on peut noter la performance agro-environnementale des systèmes bovins viande associés à d’autres productions, ainsi que les systèmes caprins diversifiés, même si les résultats de ces derniers sont à prendre avec précaution étant donnés les faibles effectifs concernés (4 seulement). Les autres productions (maraîchage, arboriculture, petits fruits, apiculture…) semblent se différencier du reste de l’échantillon, mais là aussi les résultats sont à prendre avec précaution du fait des faibles effectifs (7 au total) et de la diversité des spéculations. De façon générale, il est à noter que les systèmes diversifiés sortent du lot au niveau agroécologique. Il serait également de porter une attention particulière aux systèmes caprins diversifiés qui semblent être très performants en termes de durabilité. Une étude avec un échantillon plus large serait intéressante.

1.4. Approche par type d’agriculture Enfin, l’effectif total est composé pour 51,6 % d’exploitations en agriculture biologique et pour 48,4 % d’exploitations en agriculture conventionnelle. Les résultats en termes de durabilité sont au final assez proches entre ces deux types d’agriculture. Il est cependant à noter que bon nombre d’agriculteurs du groupe « conventionnel » s’est engagé dans la démarche CIVAM de l’Agriculture Durable, et donc ont déjà travaillé sur les aspects environnementaux, sociaux et économiques, et même pour certains ont déjà entamé une réflexion territoriale. AGRICULTURE BIOLOGIQUE Durabilité Agroécologique Socioterritoriale Economique Note de durabilité

Valeur de l'exploitation 94,26 70,99 55,33 55,33

AGRICULTURE CONVENTIONNELLE

Maximum 100 100 100

Durabilité Agroécologique Socioterritoriale Economique Note de durabilité

Valeur de l'exploitation 89,15 67,85 49,26 49,26

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Maximum 100 100 100

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20,00

0,00

0,00

te r ri So cio

Ec on om Score obtenu

Score obtenu

Maximum

Maximum

Diversité 100

Diversité 100 Organisation de l'espace

Efficience

Pratiques agricoles

Transmissibilité

Organisation de l'espace

Efficience

Pratiques agricoles

Transmissibilité 0

0 Qualité des produits et des territoires

Indépendance

Viabilité

iq ue

20,00

Ec on om

40,00

to ria le

40,00

te rri

60,00

So cio

60,00

Ag ro éc ol og iq ue

80,00

iq ue

80,00

to ria le

100,00

Ag ro éc ol og iq ue

100,00

Emploi et services

Ethique et développement humain

Qualité des produits et des territoires

Indépendance

Viabilité

Emploi et services

Ethique et développement humain

A la vue des radars de synthèse, on s’aperçoit que les modes d’agriculture au sein du réseau Civam, se différencient peu en termes de durabilité. Quelques différences apparaissent autour de la diversité (plus importante en AB) et en ce qui concerne la qualité des produits puisque inscrits dans la démarche AB et donc entraînant une meilleure note globale. Sinon, les graphiques sont à peu près superposables. Il conviendra de préciser ces différences au niveau statistique.

C – Compléments statistiques Il convient de traiter statistiquement l’ensemble de ces résultats afin de confirmer ou d’infirmer les différences entre les exploitations ; ceci viendra consolider l’approche par régions, par productions ou encore par type d’agriculture. Pour réaliser les traitements statistiques, l’ensemble des diagnostics réalisés a été saisi dans une base de données puis traité à l’aide du logiciel Modalisa. Nous utiliserons pour cela trois types de test : • Droite de régression et coefficient de corrélation pour croiser deux variables quantitatives entre elles ; sachant que pour une population de 93 individus, R = 0,205 pour un seuil de significativité de 5% et R = 0,274 pour un seuil de 1%. • Le test du χ² (Khi deux) pour croiser deux variables qualitatives entre elles, où le suil « p » devra être inférieur à 0,05 (risque 5%) ou à 0,01 (risque 1%) ;

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L’analyse de variance pour croiser une variable quantitative avec une variable qualitative, où les suils « p » seront traiter comme précédemment.

Enfin, nous proposerons une typologie des exploitations sur la base de l’ensemble des indicateurs de la grille IDEA afin d’identifier quels sont les indicateurs qui orientent le plus les résultats de durabilité. Nous croiserons ensuite celle(s)-ci avecl’enssemble des indicateurs puis les variables régions, production, type d’agriculture et note de durabilité afin d’expliquer les types obtenus.

Dans un premier temps, nous ferons une approche par dimension, par pilier de la durabilité, où nous croiserons la variable « TOTAL » obtenu à une échelle avec les différents indicateurs qui la composent ; ceci afin d’identifier quels sont ceux qui expliquent le plus le résultat. Ensuite, nous croiserons ce même total avec l’ensemble des autres indicateurs afin d’identifier des éventuelles relations entre variables et trouver des hypothèses explicatives. Dans un second temps, et toujours par dimension, nous évaluerons les différences régionales, dans le but d’affiner les résultats et de mettre en évidence les particularités régionales. Ensuite, nous tenterons d’affiner les différences entre modes de production biologique et conventionnelle. Puis un approfondissement sera proposé par systèmes de production (et par type d’animal et par spéculation). Enfin, une typologie sera effectuée par Analyse en Composantes Principales (ACP) où les types proposés seront à nouveau croisés avec l’ensemble des variables dans l’objectif de les différencier.

1 – La dimension environnementale ou agro-écologique 1.1. – approche générale et relations entre variables La dimension agro écologique (résultat total) a ici, été croisée avec l’ensemble des autres indicateurs afin d’évaluer les liens qu’il peut y avoir entre performance environnementale et résultats socio territoriaux et économiques. Nous évaluerons au préalable quels sont les facteurs les plus explicatifs du résultat environnemental. Comme nous l’avions évoqué précédemment, la dimension agroécologique est fortement corrélée avec les indicateurs de diversité, ce qui est à priori normal, étant donné que la biodiversité domestique est un élément déterminant du potentiel environnemental d’une exploitation, et qu’elle favorise de surcroît la biodiversité per se.

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 l 82 l 79 e 76 d 73 e 70 67 -2

y=0,887x + 81,609 r2=0,36 r=0,6 DW=1,665 n=93

° ° ° ° °

° °° °

° ° °° ° ° °° °°

° ° ° °

°

° °°

2

° °

° ° ° °°°

° °

°

°

°

°° ° °° ° ° ° ° °° ° °

°° °° ° ° °°° °° ° °

°

° °° °

0

°

°

°

4 6 8 10 12 14 Diversité des cultures annuelles et temporaires

16

18

Ici, nous pouvons remarquer le lien étroit et important entre diversité des cultures annuelles et temporaires avec le résultat total de durabilité agroécologique (R=0,6) au seuil de 1%. C’est également le cas pour la diversité des cultures pérennes (R=0,284) ou la diversité animale (R=0,65).

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Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

y=1,305x + 78,476 r2=0,422 r=0,65 DW=1,402 n=93

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 82 l l 79 e 76 d 73 e 70 67 -2

° °° °° ° ° °° °° ° ° °° °° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° 0

° ° ° °° °° ° °

°

° ° °

°

°

° °

°°

°°° ° °° °°° °

°° °

°

° 2

4

6

8 10 Diversité animale

12

14

16

18

Au final, il y a un lien très étroit entre le résultat « environnemental » et la diversité domestique (R=0,832).

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

y=0,905x + 67,007 r2=0,692 r=0,832 DW=1,715 n=93

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 82 l l 79 e 76 d 73 e 70 67

°° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° °° °°°° ° ° °° ° ° ° ° ° ° °° ° ° °°° ° °°° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° 6

9

° 12

15

°°°° ° ° °° ° °°

° 18 21 24 27 DIVERSITE DOMESTIQUE

30

33

36

39

Pour ce qui concerne les autres indicateurs de l’échelle agroécologique, ceux-ci ne sont pas toujours en lien avec le résultat global. Le sous-total « Organisation de l’espace » est corrélé au seuil de 5% et expliqué seulement par l’indicateur « Gestion des matières organiques » au seuil de 1% (R=0,561). Enfin, les autres indicateurs de pratiques agricoles interviennent également dans le résultat global. En effet, le résultat global en termes agro écologiques est corrélé positivement au seuil de 1% (R = 0,371) avec ce sous total. Ceci est principalement expliqué par : • L’indicateur de gestion de la ressource en eau (R = 0,284 ; seuil de 1%) • L’indicateur de dépendance énergétique (R = 0,318 ; 1%) Au final, bien qu’il soit normal que le total de l’échelle agro écologique soit corrélé positivement avec certains des indicateurs qui le compose, on peut affirmer que celui-ci est essentiellement expliqué par : • Une diversité domestique importante, élément déterminant pour favoriser in extenso une biodiversité per se. • Des pratiques agricoles respectueuses, notamment en termes de dépendance énergétique. Les résultats des exploitations Civam au niveau environnemental sont tout à fait satisfaisants et méritent d’être mis en lien avec les résultats socio-économiques pour une durabilité accrue.

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Intéressons-nous donc maintenant aux éventuelles relations entre échelle agro écologique et échelles socio territoriale et économique. Tout d’abord, au niveau socio territorial, on s’aperçoit que plus l’indicateurs « démarche de qualité » est élevé, meilleur est le résultat « environnemental » (R = 0,342 ; 1%). Ceci peut s’expliquer par l’adhésion à des cahiers des charges pouvant être exigeants prenant en compte certains aspects environnementaux ; c’est le cas par exemple du cahier des charges « Agriculture Biologique » ou de certaines productions en Label Rouge.

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

T o t a l : E c h e l l e d e

y=0,764x + 84,192 r2=0,117 r=0,342 DW=1,712 n=93

106 103 100 97 94 91 88 85 82 79 76 73 70 67 -2

°° ° ° °°

°

° °

°

° ° ° °

°

° ° °°

° ° °° ° °° °

° °

°

° 0

2

°° ° °° °°°° ° °° ° ° °° ° ° °° °

°

°

° ° ° ° ° ° °°° °°° °

° 4

6 8 Demarche de qualité

10

12

14

Par ailleurs, et ce qui est intéressant pour la suite du projet, une plus grande autonomie et une meilleure valorisation des ressources naturelles et locales, permettent d’améliorer également les performances environnementales (R = 0,418 ; 1%).

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

y=1,855x + 75,265 r2=0,175 r=0,418 DW=1,644 n=93

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 82 l l 79 e 76 d 73 e 70 67

° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °

° 0

2

°

° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° °° ° ° ° ° ° ° °°° ° ° ° ° ° ° ° °° °° ° ° ° °° °° °° ° ° °° ° °° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °

4 6 8 10 Autonomie et valorisation des ressources locales

12

14

Ceci est d’ailleurs confirmé par l’indicateur « Contribution à l’équilibre alimentaire mondial » (indicateur qui prend en compte le taux d’importation d’aliments du bétail par exemple, ainsi que la production de plantes dites à protéines), avec un coefficient de 0,223 significatif au seuil de 5%. Ces résultats nous permettent d’affirmer que mieux on valorise les ressources qui sont à disposition sur le territoire (ou sur l’exploitation) en termes d’autonomie alimentaire, en engrais, voire en énergies, sans par ailleurs, dépendre des achats extérieurs d’aliments du bétail, plus on améliore ses performances environnementales. Ces aspects sont d’ailleurs très liés à une diversité des conduites techniques, des cultures

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notamment, qui impliquent le plus souvent de cultiver la diversité des ressources territoriales en associant par exemple pour l’élevage, sources énergétiques, fourragères et protéiques (cas des prairies multi espèces, incorporation ou associations de légumineuses dans l’assolement…). On comprend alors le lien qu’il peut y avoir entre ces aspects de ressources locales et la diversité domestique. Ce lien entre le territoire et l’environnement est déterminant et représente un angle d’approche primordial pour les agriculteurs Civam. Prenons le cas par exemple en Limousin du programme Bois-Energie qui a été mis en place avec la communauté de communes du Pays de Tulle qui a conduit à l’élaboration d’un cahier des charges pour la production de plaquettes de qualité issues d’un entretien durable des haies, des bords de prés et de la forêt paysanne. Pour le reste des indicateurs socio territoriaux, seuls l’indicateur « Formation » et le sous total « Emplois et Services », sont corrélés avec le total de l’échelle agro écologique, et tous deux de manière positive (au seuil de 1%) comme le montrent les graphiques suivants.

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 82 l l 79 e 76 d 73 e 70 67 -0,75

y=1,108x + 84,677 r2=0,118 r=0,343 DW=1,572 n=93

°

° ° °° °°

°

°

° ° ° ° ° °

°

° °° ° °

° ° ° ° °

° °

° ° ° °

°

°

° ° ° °

°°° °

°

° °

°

°° ° ° ° ° °°°° °° °°° °

°

° 0,75

° °

°

°

0

°°

°

1,5

2,25

3 3,75 Formation

° 4,5

5,25

6

6,75

7,5

Ici, le graphique montre bien que plus on s’implique dans des formations, meilleurs sont les résultats environnementaux. Cette donnée n’est pas neuve et est un des principes de base du mouvement Civam, puisque chaque groupe, fédération départementale, régionale voire même nationale dispense des formations tous les ans. Il est évidemment à noter que seuls les agriculteurs se posant en amont des questions globales sur les répercussions de leurs systèmes de production, sont susceptibles de solliciter des formations sur des thématiques qui sortent de la classique approche technique ou encore de la seule veille règlementaire.

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

y=0,423x + 79,761 r2=0,1 r=0,317 DW=1,526 n=93

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 82 l l 79 e 76 d 73 e 70 67

°

°

° °

°

° ° ° ° ° ° ° ° °° ° °° °° ° ° ° ° ° ° °

° ° ° °

° 7

10

13

16

° ° °° ° ° ° °° ° °° ° ° ° ° ° °° ° °

°

°°° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° °

°

° 19 22 25 EMPLOI ET SERVICES

° 28

31

34

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37

60


Pour le sous total « Emplois et Services », c’est une approche beaucoup plus globale, comprenant la sollicitation du travail collectif (CUMA, Banque de travail, Travail en réseau…), l’agro-tourisme, les services rendus au territoire (déneigement par exemple, entretien des chemins communaux, des haies…), etc. qui est liée à la performance environnementale. Curieusement, aucun des indicateurs n’est corrélé significativement avec le total de l’échelle agro écologique, mais la somme des indicateurs, elle, l’est. C’est donc une approche plus délicate à expliquer, mais on peut supposer qu’une remise en question permanente de l’agriculteur sollicitant des formations et s’impliquant sur son territoire, permet d’associer performances environnementales et performances socio territoriales. Enfin, au niveau économique, seul l’indicateur « Efficience du système productif » prenant en compte la part des intrants dans le chiffre d’affaire (on la calcule par le rapport (Produits – Intrants) / Produits (hors primes PAC)), est corrélé avec le résultat agro environnemental et ce, de manière positive (R = 0,205 ; au seuil de 5%).

Total Echelle de Durabilité Agro Ecologique

106 T o 103 t 100 a 97 l : 94 E 91 c 88 h e 85 l 82 l 79 e 76 d 73 e 70 67 -3

y=0,199x + 85,478 r2=0,042 r=0,205 DW=1,424 n=93

°

° ° ° °

° °°°

° °

° °°

° °

°°°

° ° °°°

° ° ° ° °

° °

°

°

° °° ° ° ° ° ° °° ° °° °

3

6

°

° °° ° ° °° ° ° ° ° °

°

°

°

9 12 15 18 21 Efficience du processus productif

24

° 0

°° ° ° ° ° ° °° °

27

30

Là aussi, ce résultat est cohérent avec les résultats précédents. L’efficience du système productif prend en compte le niveau de charges lié aux intrants dans le chiffre d’affaire. Ainsi, plus on est autonome, et donc mieux on valorise les ressources de son territoire, moins on est dépendant des intrants. Ceci se traduit alors forcément (dans les systèmes d’élevage de moyenne montagne) au niveau agro écologique par plus de diversité en cultures annuelles et temporaires, donc en termes de diversité domestique. C’est le cas notamment pour la conduite des surfaces fourragères par plus de production de légumineuses (fabacées), ce qui entraîne une moindre dépendance aux compléments azotés et par voie de conséquence moins d’achats d’engrais (la fiche PACAUD en ANNEXE le montre bien, puisqu’il est possible de produire autant voire plus sans achat d’engrais, et ceci en cinq années d’adaptation). L’approche technique n’est cependant pas à négliger, bien au contraire. Valoriser ces ressources locales, nécessité de piloter finement les itinéraires techniques. Là encore, prenons l’exemple du pâturage tournant qui nécessite de mobiliser plusieurs techniques de façon simultanée : la gestion des paddocks, la bonne gestion des hauteurs d’herbe en entrée et sortie des animaux afin de ne pas pénaliser la repousse suivante, la méthode des degrés-jours qui implique la logique de pousse et développement des plantes… Toutes ces bases nécessitent une observation accrue et engendrent des économies d’intrants substantielles.

1.2. Approche régionale Qu’en est-il au niveau régional ? Des analyses de variance ont été effectuées pour différencier les régions entre elles, et ce, pour chacun des indicateurs. Il conviendra de faire le lien entre les résultats exprimés par les tests statistiques et les particularités propres aux exploitations enquêtées, ainsi qu’aux différents groupes Civam. Pour une analyse de variance (ou ANOVA), chaque test s’exprime par la valeur « p » obtenue. Ainsi, pour p ≤ 0,05, les différences repérées entre régions seront affirmées au seuil de significativité statistique de 5% (c’est-àdire le risque statistique d’erreur que les différences perçues soient dues au hasard). Il en est de même pour p ≤

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0,01 ce qui signifie que les différences observées peuvent être validées à 99% de chances (risque d’erreur = 1%) en termes d’écarts à la moyenne. Ainsi, au niveau agro environnemental, des différences très nettes entre régions apparaissent avec parfois des résultats aux tests statistiques très significatifs. Le tableau suivant récapitule l’ensemble des différences significatives entre régions.

Total DIVERSITE DOMESTIQUE

Assolement

Gestion des organiques

Zones de régulation écologique Contribution aux enjeux environnementaux

Valorisation de l’espace

Total ORGANISATION DE L’ESPACE

Effluents organiques liquides

Protection de la ressource des sols

Gestion de la ressource en eau

matières

Valorisation et conservation du patrimoine génétique

cultures Diversité pérennes

0,001

0,001

0,001

0,004

0,001

0,001

0,014

0,01

0,001

0,022

0,008

0,001

0,001

0,039

+ +

--+++++

• +

• • +

-++ ++

+ • •

+ •

• +

• -•

• • •

+ • +

-• +

• • --

• • •

88,6

7,9

7,0

2,1

23,9

6,5

3,3

9,7

1,5

4,6

31,4

1,0

4,7

3,8

des

Diversité des cultures annuelles et temporaires

Valeur de «p» Auvergne Aveyron Limousin RhôneAlpes MOYENNE des 93 EA

TOTAL ECHELLE AGRO ECOLOGIQUE

Indicateur

NB : seules les différences par rapport à la moyenne ont été exprimées afin de ne pas alourdir la lecture des résultats. « • » : pas de différence par rapport à la moyenne ; « - » : résultat inférieur à la moyenne ; « + » : résultat supérieur à la moyenne. A noter que plus il y a de signes, plus la différence à la moyenne est importante.

Dans un premier temps, il est à noter que la région Rhône-Alpes présente systématiquement des résultats identiques à la moyenne de l’échantillon total. Ceci s’explique du fait du faible effectif (7 au total) enquêté en Rhône-Alpes. Ensuite, nous pouvons remarquer que la région Limousin, ainsi que les exploitations enquêtées en Aveyron se distinguent de l’échantillon total sur cette échelle agro écologique de façon positive, ce qui n’est pas le cas des exploitations auvergnates qui présentent un résultat moyen inférieur. Tout d’abord, la région Limousin se différencie de l’échantillon total sur plusieurs indicateurs. Elle présente en effet de meilleurs résultats sur : La diversité des cultures pérennes : qui s’explique par la présence significative de prairies permanentes dans l’assolement, mais aussi par la présence d’agroforesterie sur une part non négligeable de la surface totale des exploitations, ainsi que grâce à la présence de vergers dans quelques exploitations. La valorisation et la conservation du patrimoine génétique : par la présence de races animales dans leur berceau d’origine (races bovine et ovine limousines par exemple), mais aussi du fait de la présence fréquente de systèmes diversifiés, voire même très diversifiés (2 exploitations avec au moins 5 espèces animales différentes) Ceci se traduit par un sous total de diversité domestique supérieur à la moyenne.

Les zones de régulation écologique : caractéristiques de la région Limousin, les prairies humides non drainées sont nombreuses, les haies et bordures de forêts également. Il est aussi à noter que la ripisylve est souvent entretenue. L’organisation de l’espace : prenant en compte les éléments précédemment cités.

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Et les effluents organiques liquides : soit ils sont absents dans les systèmes allaitants traditionnels, soit on note un effort de gestion importante en termes d’investissements pour les quelques systèmes laitiers ovins, caprins ou bovins présents.

Au final, les exploitations du Limousin se montrent très performantes au niveau environnemental avec la meilleure moyenne agro écologique (95,35 / 100), notamment de part leur réflexion sur la valorisation de l’herbe et la conduite des troupeaux vers l’autonomie alimentaire.

Pour ce qui est des exploitations aveyronnaises enquêtées, elles sont toutes inscrites dans la démarche « Agriculture Biologique » puisque c’est la caractéristique principale du groupe support : l’APABA (Association pour la Promotion de l’Agriculture Biologique en Aveyron). A l’instar du Limousin, ces exploitations présentent un résultat moyen sur l’échelle agro écologique supérieur à la moyenne (92,85 / 100). Ceci s’explique en partie par de meilleurs résultats sur les indicateurs suivants : Une nette différence sur la diversité des cultures annuelles et temporaires, élément de base des systèmes en production biologique par des associations d’espèces complémentaires et des mélanges variétaux pour les cultures mono spécifiques, afin d’optimiser la lutte contre les adventices et les parasites ; mais également dans l’objectif d’une meilleure autonomie fourragère et alimentaire. Ce seul indicateur permet également de faire la différence par rapport à l’échantillon sur le sous total « diversité domestique ». en effet, les systèmes de production aveyronnais enquêtés ne sont pas spécialement diversifiés au niveau du patrimoine génétique et sont souvent spécialisés (cf. partie économie). La gestion des matières organiques : celle-ci est optimisée en Aveyron du fait de la présence quasi systématique de systèmes d’élevage, souvent chargés (poids de l’histoire). Donc, la matière organique présente sur l’exploitation est valorisée sur la plupart des parcelles mécanisables et le recours au compostage pour limiter les déplacements n’est pas rare. Néanmoins, on remarque que ces systèmes ont certains résultats inférieurs à la moyenne générale : Sur les zones de régulation écologique : probablement du fait du passé d’intensification de l’Aveyron. En effet, à partir de l’arrivée de la chaux en Aveyron (viaduc du Viaur) et de la diversification des cultures ainsi permise, la plupart des zones humides ont été drainées (zones de Rougier), les haies ont été en partie rasées, et aujourd’hui, la quasi-totalité des zones mécanisables sont intensifiées. Peut être les exploitations enquêtées subissent-elles encore le poids de cet héritage ? La contribution aux enjeux environnementaux du territoire : plus faible en Aveyron que dans les autres zones enquêtées. Ce constat peut s’expliquer par deux phénomènes conjugués : d’une part le fait que la majeure partie des exploitations enquêtées ne se situent pas dans des zones à enjeux environnementaux de type Natura 2000 (sur le PNR des Grands Causses ou sur l’Aubrac). Et du fait de l’engagement des éleveurs dans la démarche AB d’autre part ; où certains se satisfont de cet état de fait et ne jugent pas opportun de s’impliquer dans une superposition de démarches. Certains pensent d’ailleurs que la démarche AB est une fin en soi et qu’elle supplante toute autre démarche environnementale. On peut également considérer qu’elle représente une contribution aux enjeux environnementaux, mais à une échelle plus large et globale que celle du territoire.

2 – La dimension sociale ou socio-territoriale Au niveau de la dimension socio territoriale, nous allons procéder de la même façon, c’est-à-dire qu’au sein même de cette dimension nous allons identifier quels sont les indicateurs qui expliquent le plus le résultat total, puis nous regarderons si des liens existent entre les différentes dimensions. Ici, on s’aperçoit que le résultat total de la dimension est fortement corrélé positivement avec deux des trois sous-totaux : la « qualité des produits et duterritoire » (R = 0,632 seuil de 1%) et « l’éthique et le développement humain » (R = 0,654 seuil de 1%).

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Total Echelle de durabilité socio territoriale

y=1,483x + 40,109 r2=0,399 r=0,632 DW=1,176 n=93

103 98 93 88 83 78 73 68 63 58 53 d 48 e 43 38 T o t a l : E c h e l l e

°

° ° °°

°°

° °° ° °° ° ° °° ° °° °

°° °

° °

° °° ° °° ° °° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °°° ° °°° ° °° °°°°°° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° °

° ° 7

10

13

16 19 22 25 28 QUALITEDES PRODUITS ET DU TERRITOIRE

31

34

37

Comme nous pouvons le déduire du graphique suivant, il existe un lien important entre la qualité des produits et du terroir, sans pour autant qu’il y ait de lien avec les démarches de qualité. Ce sont essentiellement les indicateurs « Valorisation du patrimoine bâti et du paysage » (R = 0,472 seuil 1%), « Gestion des déchets non organiques » (R = 0,294 ; 1%) et « Implication sociale » (R = 0,531 ; 1%) qui expliquent ce lien. Il convient donc a priori de s’impliquer dans la valorisation du patrimoine du territoire en entretenant le bâti, mais aussi en favorisant une bonne intégration paysagère des bâtiments de l’exploitation ; de bien gérer les déchets non organiques en favorisant le recyclage et le non brûlage des plastiques, en évitant les consommations excessives de type plasticulture ou enrubannage ; et enfin de s’impliquer territorialement dans des structures associatives ou de développement, voire de favoriser l’ouverture de l’exploitation aux consommateurs, pour optimiser ses résultats en termes socio territoriaux.

Total Echelle de durabilité socio territoriale

103 98 93 88 83 78 73 68 63 58 53 d 48 e 43 38 12 T o t a l : E c h e l l e

y=1,277x + 35,063 r2=0,427 r=0,654 DW=1,245 n=93 °° °°° ° ° °°° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° °°°° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °

° ° ° °

° ° 15

18

21 24 27 30 ETHIQUEET DEVELOPPEMENT HUMAIN

33

36

39

Au niveau du sous total « Ethique et Développement humain », les indicateurs explicatifs sont les suivants : « Formation » (R = 0,498 ; 1%), « Qualité de vie » (R = 0,207 ; 5%) et « Accueil, hygiène et sécurité » (R = 0,584 ; 1%). Toutes ces corrélations étant positives. Ces relations entre indicateurs montrent que les performances socio territoriales globales obtenues par les exploitations enquêtées sont influencées par une implication dans la formation (de l’agriculteur lui-même ou bien d’apprenants de l’enseignement agricole) et par une sécurisation des installations (ceci est d’autant plus important qu’il y a présence de salariés ou accueil de jeunes), comme le local « Phyto » en conformité. L’indicateur « Qualité de vie » est à prendre avec précaution car il est une auto-estimation de la part de l’agriculteur.

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Enfin, on peut noter qu’au sein de cette dimension, le résultat de cette échelle est également positivement influencé par les indicateurs socio territoriaux suivants : • « Valorisation par filières courtes » : R = 0,59 (1%) • « Autonomie et valorisation des ressources locales » : R = 0,355 (1%) • « Services, pluriactivité » : R = 0,343 (1%) • « Contribution à l’emploi » : R = 0,485 (1%) • et « Travail collectif » : R = 0,275 (1%). A titre d’exemple, le graphique suivant montre le lien entre le résultat total de l’échelle socioterritoriale avec l’indicateur d’autonomie te de valorisation des ressources locales.

Total Echelle de durabilité socio territoriale

y=2,351x + 56,409 r2=0,126 r=0,355 DW=1,249 n=93

103 98 93 88 83 78 73 68 63 58 53 d 48 e 43 38 T o t a l : E c h e l l e

° ° °° ° °

° °° ° ° ° °° °°

° °° ° ° ° ° °° ° ° ° ° °° ° °° ° °° ° ° ° °° ° °

° °

°

°

° °° ° ° ° °°° °°°° ° °° °

° ° ° ° ° ° °° ° °° °° ° °° ° ° ° °

° °

° ° 0

2

4 6 8 10 Autonomie et valorisation des ressources locales

12

14

Cet indicateur est déterminant sur deux des trois échelles de durabilité, nous avons vu précédemment les intérêts agro-écologiques de la valorisation des ressources locales pour moins de dépendance aux intrants et donc plus de diversité en conséquence. La valorisation du territoire est également importante au niveau de l’image de celui-ci, ce qui présente un potentiel non négligeable en termes de valorisation des produits, surtout en zone de moyenne montagne. Par ailleurs, et c’est dans l’air du temps, cela permettrait une communication sur des produits locaux, des produits issus du territoire qu’il conviendrait de valoriser en filières courtes par exemple, voire même pour le développement de cahiers des charges pour des produits locaux et saisonniers. Par ailleurs, les aspects de travail sont également très importants pour plus de durabilité socio territoriale. En effet, le fait de favoriser le partage des facteurs de production (foncier, cheptel, bâtiments, matériels…) en permettant l’installation de jeunes et la transmission, plutôt que l’agrandissement, ainsi que de faire appel au travail collectif (CUMA, Banque de travail…), aux groupements d’employeurs et au travail en réseau (CIVAM, GDA…), participe au développement durable des territoires en favorisant l’emploi et un tissu rural assez dense garant du maintien des services publics et des commerces dans ces zones fragiles économiquement. En conclusion, on peut dire que les résultats de durabilité socio territoriale sont influencés par de nombreux indicateurs. C’est donc une approche globale de son métier au sein de son territoire qu’il convient d’avoir pour s’assurer un bon niveau de durabilité sur ce pilier. Voyons maintenant les liens qui existent entre cette échelle et les autres (agro écologique et économique). Au niveau environnemental, les performances socio territoriales sont liées positivement avec plusieurs indicateurs agro écologiques. C’est notamment le cas pour les indicateurs de « diversité des cultures pérennes » (R = 0,357 ; 1%), ainsi que de « diversité animale » (R = 0,277 ; 1%). Ceci témoigne ainsi de la nécessité de diversifier ses productions afin de permettre une diversité de produits sur les territoires de moyenne montagne, même si ceux-ci seront fortement dépendants des productions animales (contexte pédoclimatique limitant). En outre, la diversité des cultures pérennes est souvent la marque même de l’identité territoriale : prairies naturelles en montagne, le bocage… C’est aussi le cas pour d’autres territoires hors montagne : zone de coteaux et vignes... Par ailleurs, les indicateurs « Zones de régulation écologique » (R = 0,263 ; 5%) et « Contribution aux enjeux environnementaux du territoire » (R = 0,278 ; 1%) témoignent de la nécessité pour les agriculteurs de

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s’impliquer envers leurs territoires. En effet, que ce soit en faveur de la biodiversité ou pour des enjeux environnementaux plus globaux comme la qualité de l’eau ou encore l’implication sur les zones Natura 2000 ou les PNR, les agriculteurs et leurs rôles dans l’aménagement du territoire peuvent participer grandement au développement durable des territoires ruraux. Enfin, en ce qui concerne les pratiques agricoles, seul l’indicateur « Effluents organiques liquides » est corrélé avec le résultat socio territorial (R = 0,256 ; 5%), de façon positive. On peut supposer qu’il y a un lien entre territoire et gestion des effluents liquides, notamment par la mise aux normes des bâtiments d’élevage et la limitation des pollutions diffuses. Ceci est d’autant plus important que le territoire présente un enjeu en termes de qualité des eaux souterraines et/ou de surface (ex : Zone Vulnérable). En zone de montagne, ceci peut apparaître particulièrement important du fait de l’origine même des cours d’eau. Il est en effet primordial de préserver la qualité de la ressource en eau à ce stade, les zones en aval étant déjà bien assez touchées.

Au niveau économique, il semble important de noter que les totaux des deux échelles sont corrélés positivement, au seuil de significativité de 5%. En effet, plus les indicateurs socio territoriaux sont bons, meilleurs sont les résultats économiques, comme le montre le graphique suivant :

Total Echelle de durabilité socio territoriale

T o t a l : E c h e l l e d e

103 98 93 88 83 78 73 68 63 58 53 48 43 38 10

y=0,141x + 66,009 r2=0,051 r=0,227 DW=1,302 n=93

°

°°

°

° °° °° ° ° °° °° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °°

°° ° ° °

° °

° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °

° ° °

° ° 20

30

40 50 60 70 80 Total:Echelle de durabilité économique

90

100

110

Ce lien entre les échelles socio territoriale et économique est expliqué par les indicateurs économiques suivants : • « Taux de spécialisation économique » : R = 0,409 ; 1% • « Transmissibilité » : R = 0,293 ; 1% • « Efficience du processus productif » : R = 0,23 ; 5%. Ces résultats viennent confirmer au niveau économique, ce qui a été identifié précédemment. En effet, on voit que moins on est spécialisé, plus on contribue au développement de son territoire. Parallèlement, il convient de favoriser la transmissibilité des exploitations agricoles et d’en favoriser l’autonomie en valorisant les ressources locales. Il est très important de souligner que le développement économique des territoires passe par un réel développement au niveau social.

Y’a-t’il des différences entre les régions ? Au niveau de cette dimension socio territoriale, bien que l’ensemble des régions présente des résultats corrects, il semble que la région Limousin ait des résultats supérieurs aux autres régions. Là aussi, cela s’explique en partie par l’ancienneté des démarches vers plus de durabilité des exploitations (dans une approche globale de la durabilité), comparativement aux autres groupes enquêtés. Ce bon résultat global s’explique par les différences suivantes : • Une meilleure accessibilité de l’espace sur les exploitations, notamment par davantage d’accessibilité du public (clôtures passantes, circulation VTT, chevaux randonneurs…) mais aussi par une fréquence supérieure chez les agriculteurs limousins de l’entretien des chemins ou encore l’aménagement des abords des fermes ;

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Davantage de valorisation des produits par filières courtes (caissettes de viande, transformation du lait en fromage et vente directe…) ; • Une meilleure contribution à l’emploi grâce à des surfaces modérées par UTH, couplées à des créations d’emplois, éventuellement en commun, et une valorisation de la main d’œuvre saisonnière mobilisable sur le territoire ; Ceci se traduit par une meilleure note en termes d’emplois et services territoriaux (note de 24,5 contre environ 21 sur 33 en moyenne pour l’ensemble de l’effectif enquêté). Par ailleurs, on note également : • Davantage de formations sont dispensées aux agriculteurs du Limousin, et c’est notamment le cas sur l’ensemble de la démarche de valorisation de l’herbe et d’optimisation du pâturage ; • Une meilleure qualité d’accueil et d’hébergement de la main d’œuvre temporaire (stagiaires, accueil de publics…), une meilleure sécurité des installations liée dans certains cas à la présence d’outil de transformation aux normes européennes. Ce qui se traduit au final, par une note « Ethique et Développement humain » très supérieure à la moyenne.

Accessibilité de l’espace

Valorisation courtes

Autonomie et valorisation des ressources locales

Contribution à l’emploi

Pérennité probable

TOTAL Emplois et Services

Formation

Accueil, hygiène et sécurité

0,001

0,001

0,001

0,03

0,037

0,05

0,007

0,001

0,001

0,001

0,001

• +++

++++ •

+ -•

• +

• • +

• •

• • +

• •

• • +

• ++

+ ---+

+++++ --++++++

+

73,35

5,81

5,19

3,81

3,78

7,2

3,91

2,12

20,96

3,57

2,67

29,98

TOTAL Ethique Développement humain

par

et

Valorisation du patrimoine bâti et du paysage

0,001

filières

Démarche de qualité

Valeur de «p» Auvergne Aveyron Limousin RhôneAlpes MOYENNE des 93 EA

Total ECHELLE durabilité SOCIO TERRITORIALE

Indicateur

Le tableau suivant présente les différences significatives entre régions pour cette dimension :

Pour ce qui est des exploitations auvergnates, davantage orientées vers des modes de production conventionnels (hormis quelques exploitations), on note bien évidemment une moindre note en « Démarches de qualité », mais aussi en termes « d’autonomie et valorisation des ressources locales » du fait d’orientations « classiques » (exemple : bovins lait en système maïs – soja). De ce fait, on note également une moindre « Contribution à l’équilibre alimentaire mondial », conséquence des achats de concentrés extérieurs, bien que cette différence ne soit pas significative sur la comparaison régionale. Au niveau de l’estimation de la pérennité de l’exploitation, ces agriculteurs sont moins confiants que ceux des autres régions enquêtées. Peut être qu’une remise en cause des schémas de production vers des systèmes plus autonomes et économes permettrait à ces « petites » structures et à leurs pilotes de retrouver davantage de confiance en l’avenir. On note également une moindre implication dans les formations, ce qui peut d’ailleurs expliquer en partie la non remise en cause des schémas productifs, alors que le réseau Civam dispense depuis plusieurs années déjà des formations concernant l’autonomie des fermes et l’optimisation des ressources locales notamment par le biais du pâturage. Malgré cela, on note cependant, une meilleure valorisation du paysage et du patrimoine bâti chez ces exploitants, probablement du fait du contexte régional et paysager, avec éventuellement une mise en valeur des paysages volcaniques par un aménagement des abords des exploitations. Mais également du fait de la présence de bâtiments anciens et typiques de la culture montagnarde auvergnate mis en valeur et entretenus.

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Enfin, on note également une différence significative sur le total « Ethique et Développement humain », favorable aux agriculteurs d’Auvergne. Cette différence est difficilement explicable du fait du peu de différences existantes dans les indicateurs de cette composante. Cependant cinq des sept indicateurs qui participent à cette composante sont en auto estimation, on peut alors supposer qu’en termes d’auto estimation, les agriculteurs auvergnats se sont montrés généreux et se sont attribués de bonnes notes sur les indicateurs « Bien être animal », « Intensité de travail », « Qualité de vie » et « Isolement ».

Au niveau aveyronnais, les 30 exploitations enquêtées présentent un résultat moyen sur cette dimension socio territoriale, inférieur à la moyenne. Essentiellement impliqués sur la dimension agro écologique, puisque inscrits dans la démarche AB, les agriculteurs peuvent progresser encore sur cette échelle sociale et territoriale. Les principales pistes de progression sont les suivantes : Bien qu’impliqués à 100% dans une démarche de qualité AB, ce qui traduit une note bien supérieure aux moyennes des autres régions sur l’indicateur « Démarches de qualité », ce groupe présente des résultats inférieurs sur : • La valorisation du patrimoine bâti et l’intégration paysagère des bâtiments ; • L’accessibilité de l’espace, qui passe également par des aménagements permettant la circulation des personnes (promeneurs, randonneurs, VTTistes, cavaliers…) et par quelques services communaux (entretiens de chemins, de haies…) ; • La sécurisation des bâtiments de l’exploitation et la mise aux normes éventuelles d’ateliers de transformation par exemple.

Enfin, pour ce qui concerne la région Rhône-Alpes, là encore le faible effectif empêche toute conclusion statistique. Cependant on peut remarquer que sur les sept exploitations enquêtées, les agriculteurs participent régulièrement à des formations, et ce plus que la moyenne des effectifs enquêtés.

3 – La dimension économique La dimension économique de la durabilité est certainement la plus importante, puisque quels que soient les résultats des autres dimensions, il est nécessaire pour chaque agriculteur de vivre convenablement de son travail, de maîtriser son efficience du processus productif en limitant sa dépendance aux aides publiques et permettre la transmission de son outil de travail. Nous avons vu précédemment qu’une grande variabilité existait sur ces résultats. Aussi, il est intéressant de souligner les liens éventuels qui existent entre les différentes dimensions afin d’identifier notamment les relations entre variable. Autrement dit, lorsque j’oriente mes pratiques en faveur de l’environnement ou du social, cela pénalise t’il mes résultats économiques ? Avant de s’intéresser aux liens entre variables, il est à noter des liens importants avec des éléments du système de production. D’ailleurs, seule la dimension économique présente des liens significatifs avec des éléments du système. En effet, dans un premier temps, la durabilité économique est liée avec la quantité de main d’œuvre présente sur l’exploitation, comme le montre la régression suivante :

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102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 0,39

y=4,247x + 43,841 r2=0,048 r=0,219 DW=1,456 n=93

T o t a l : E c h e l l e

Total Echelle de durabilité économique

°

° ° ° ° ° ° °

° °

1,92

2,43

° °

° °°° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° 0,9

1,41

°

°° ° ° °°° °° °° °° ° ° °° °° ° °° °

°

°

°

° °° ° °

°

°

°° ° °

2,94

3,45

3,96

°

4,47

4,98

5,49

6

uth

Ici, il est délicat de lire ce graphique dans un sens ou dans l’autre : est-ce parce qu’il y a du monde sur l’exploitation que la durabilité économique est bonne ou est-ce l’inverse ? C’est peut être grâce aux bons résultats économiques qu’il y a beaucoup de main d’œuvre. Toujours est-il que la durabilité économique est liée statistiquement (n=93) au seuil de 5%. De plus, il est difficile d’appréhender le système à ce niveau, puisque la présence de différents ateliers sur une même exploitation peut influencer grandement ces constats. Il existe également un lien relativement important entre le total de l’échelle de durabilité économique et la SAU de l’exploitation. Ce résultat est très intéressant et remet en cause les idées reçues concernant les grandes exploitations. En effet, le graphique suivant montre ce lien.

Total Echelle de durabilité économique

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -40 T o t a l : E c h e l l e

y=-0,068x + 56,975 r2=0,053 r=-0,23 DW=1,485 n=93 °

° °

° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° °° °°° °° ° °°° °°° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° °°° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° °° 0

40

80

120

° ° ° ° ° °° °

°

° °

°

160

200

240

280

°

320

360

400

sau

Comme le montre ce graphique, il apparaît que les grandes exploitations présentent une durabilité économique moindre par rapport à celles de tailles plus modestes. En effet, les grandes exploitations sont moins transmissibles, du fait d’un capital d’exploitation généralement très lourd à l’actif du bilan comptable. Aussi, les exploitations les plus modestes doivent souvent trouver des solutions pour valoriser leurs produits d’une manière innovante ou originale dans l’objectif de trouver une meilleure rentabilité. C’est le cas par exemple de la mise en place d’ateliers de transformation et de circuits courts (vente directe, valorisation sur les marchés…). Par ailleurs il convient d’approfondir cette approche par des ratios. Qu’en est-il de l’influence de la surface par actif ?

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Total Echelle de durabilité économique

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -30 T o t a l : E c h e l l e

y=-0,165x + 58,985 r2=0,109 r=-0,33 DW=1,487 n=93 °

° °

° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° °° °° °°°° ° °°°° ° ° ° °°°° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° °°°° ° ° °° ° °° °° ° ° °° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° °° ° 0

30

60

90

°

°

120

150

180

210

240

270

300

Variable calculée SAU /UTH

Là aussi, ce graphique montre un lien encore plus important (seuil statistique de 1% ; R = - 0,33) entre la surface par actif et la durabilité économique. Ceci peut être expliqué par la nécessité, lorsque l’on a beaucoup d’hectares à gérer, de mettre en place des systèmes simplifiés ne laissant que peu de place à l’agronomie et à l’observation et donc favorisant « des recettes » à base d’intrants. Ces aspects de simplification, couplés à une recherche de productivité maximale orientée par les techniciens commerciaux et autres conseillers de gestion se révèlent donc moins efficaces au regard des résultats économiques. Il conviendrait d’approfondir encore ces résultats afin d’identifier le facteur le plus limitant. On peut instinctivement penser à la transmissibilité de ces exploitations surdéveloppées, mais peut être la spécialisation accrue ou encore une faible efficience d’un processus productif gourmand en intrants…sont-ils très influents voire une combinaison de tous les indicateurs de façon négative. Cette approche tendrait à montrer la spirale infernale et négative d’un raisonnement de type : agrandissement, simplification du système, spécialisation, investissements non maîtrisables… ainsi que ces conséquences sociales et territoriales en termes de baisse des installations, baisse de la densité de la population rurale, disparition des services et commerces, désertification. Les relations entre variables économiques viennent-elles confirmer ces hypothèses ? Le « score » total de l’échelle de durabilité économique est corrélé positivement et de façon très marquée (au seuil de 1%) avec l’ensemble des composantes et indicateurs qui le compose. Ainsi, la viabilité de l’exploitation (bonne viabilité économique en termes de salaire par UTH et faible taux de spécialisation), l’indépendance (bonne autonomie financière et faible sensibilité aux aides et quotas), la transmissibilité de celle-ci (capital d’exploitation limité par UTH non salarié), et une bonne efficience du processus productif (faible part des intrants dans le produit d’activité), assurent une bonne durabilité économique. Les graphiques suivants montrent les liens avec les quatre composantes de durabilité économique (liens significatifs au seuil de 1%) :

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Total Echelle de durabilité économique

Total Echelle de durabilité économique

Total Echelle de durabilité économique

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -4 T o t a l : E c h e l l e

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -3 T o t a l : E c h e l l e

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -3 T o t a l : E c h e l l e

y=1,873x + 38,011 r2=0,521 r=0,721 DW=1,613 n=93 °

°

° °

° °

° ° ° ° °°° ° ° ° °° ° °°° ° °° ° °° °° ° ° ° ° 0

°° °

° °

° °° °° ° °°

° ° ° ° ° ° °

°

°

° ° ° ° ° °

° °

° °

°

° ° ° ° °

° °

°

4

8

12

16 20 VIABILITE

24

28

32

36

y=1,663x + 23,791 r2=0,519 r=0,721 DW=1,481 n=93

° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° °° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °°° ° ° °°

°

° °° ° °°

°

° ° °

° °

° 0

3

° °

°

° ° ° ° ° ° ° °° °

° °

° ° ° ° ° ° °° ° °° ° ° °

° °

6

9

12 15 INDEPENDANCE

18

21

24

27

30

y=0,962x + 40,156 r2=0,106 r=0,325 DW=1,582 n=93

° ° ° °

° ° ° ° °

° ° °

° 0

3

°

° °

°

°

° °

° ° ° °

°

° °

6

°° ° °

°

° ° ° ° ° ° °° ° °°° °

9 12 Transmissibilité

°° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° °°

15

° ° ° ° ° °°° °° ° ° ° ° °

18

°° °

21

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24

71


Total Echelle de durabilité économique

y=1,512x + 27,999 r2=0,422 r=0,65 DW=1,884 n=93

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -3 T o t a l : E c h e l l e

° ° ° ° ° °° ° ° °° ° ° °° °

° ° ° °

° °

° °

0

° °

°

° ° °°°

° ° °° °

°° ° ° °° ° °

3

6

° °°° ° ° °° ° ° ° °° °

°° ° ° ° °°°

° ° °° ° ° °

°° ° °°

9 12 15 18 21 Efficience du processus productif

24

27

30

Ces graphiques montrent donc les dépendances fortes entre composantes et résultat global. C’est d’ailleurs la seule échelle qui présente des liens si exhaustifs, ce qui montre qu’au niveau économique, il convient d’avoir une démarche globale et non cloisonnée (entrée par l’investissement, ou par la fiscalité ou encore par les primes…). On peut donc affirmer que pour les 93 exploitations enquêtées, plus ou moins engagées dans des démarches de durabilité, de façons différentes et avec une ancienneté variable, que : Le taux de spécialisation pénalise la durabilité économique ; L’investissement systématique dans les bâtiments et/ou le matériel nuit également au résultat global en augmentant le capital à transmettre et en accentuant la dépendance financière ; Le poids des intrants est pesant dans le résultat global et il convient donc de développer l’efficience du processus productif plutôt que d’apporter des solutions techniques à base d’intrants et de capital. Ces orientations seront développées dans les actions à mener en faveur d’une durabilité accrue des territoires, en accord avec les groupes. Intéressons-nous maintenant aux liens qui existent entre variables de type économique et les autres types de variables. Environnement et performance économique : un équilibre subtil à trouver ! Bien qu’il n’y ait pas de lien statistique entre les totaux des deux échelles, il existe quelques relations entre le résultat économique des exploitations et leurs pratiques en faveur du respect de l’environnement. Ainsi il semblerait que la diversité domestique soit bénéfique aux résultats économiques.

Total Echelle de durabilité économique

y=0,626x + 36,965 r2=0,057 r=0,24 DW=1,59 n=93

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 T o t a l : E c h e l l e

°

° ° °

°

° °

° ° 6

9

12

° ° ° ° 15

°°° ° ° ° °° °° ° ° ° °

° ° ° ° °°

°° °

° °

° ° ° ° ° °

° ° ° ° ° °° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °

°

°° °

°° ° °° °° °°

° ° 18 21 24 27 DIVERSITE DOMESTIQUE

30

33

36

39

Ceci peut s’expliquer par l’entrée de la spécialisation des activités agricoles et productives. En effet, on peut aisément imaginer que la diversité domestique est liée en partie à une certaine diversité des productions permettant ainsi de limiter le taux de spécialisation économique en favorisant une diversité de débouchés, et par conséquent limitant la dépendance à un ou deux acteurs de filières.

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De même, il existe d’autres relations positives entre aspects environnementaux et économiques ; c’est le cas par exemple de la valorisation et conservation du patrimoine génétique (qui se traduit dans la plupart des cas par de la valorisation en produits locaux et typiques, bien valorisés au niveau local voire plus largement), ou encore les bonnes pratiques de fertilisation (qui témoignent d’une bonne gestion des intrants par un solde du bilan azoté faible)… Cependant, on note des relations négatives qui permettent de nuancer le « tout environnement » : C’est le cas notamment de l’indicateur « protection de la ressource des sols » calculé à partir de la superficie en travail du sol simplifié, de la présence de couverts végétaux quasi permanents, de la présence d’aménagements anti-érosifs…(R = - 0,206 ; seuil de 5%). Il semblerait que ces techniques engendrent un coût direct que l’agriculteur doit supporter et que le bénéfice économique soit négatif. Ceci est toutefois à nuancer, car ces techniques et aménagements qui concourent à préserver les sols sont à considérer dans le moyen voire le long terme. En effet, si l’on devait évaluer les coûts engendrés pour rétablir la structure ou la fertilité des sols, à cause de mauvaises pratiques répétées, on peut supposer que les conséquences économiques seraient encore plus pénalisantes pour les agriculteurs. C’est également le cas de la « dépendance énergétique » (R = - 0,228 ; seuil de 5%). Il semblerait que les agriculteurs « consommateurs » d’énergie fossile soient les plus durables économiquement comme le montre la régression suivante :

Total Echelle de durabilité économique

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -2 T o t a l : E c h e l l e

y=-1,613x + 66,345 r2=0,052 r=-0,228 DW=1,415 n=93 ° ° ° ° ° °

° ° °

° °° ° °

°

° °

° °° °° °

° °

°

0

2

4 6 8 Dépendance énergétique

°° ° °° ° °° °° °° ° °°° °° ° °°° °° ° ° °°

?

10

12

14

Bien que le lien statistique soit présent, on peut cependant nuancer ce lien et remarquer que la dispersion de la population n’est pas optimale puisque 4 exploitations, ayant un résultat nul sur cet indicateur, présentent un résultat de durabilité économique très important. Il s’agit en fait d’exploitations inscrites pour trois d’entre elles dans la démarche AB, et qui justifie cette forte consommation par le remplacement de la chimie et de la fertilisation minérale, par respectivement du travail du sol ainsi que du désherbage mécanique et de la gestion d’effluents d’élevage. Sans ces quatre exploitations, la pente est inversée, mais le seuil de significativité est légèrement trop faible pour établir un lien entre les deux variables. Il faut également noter que la dispersion éventuelle des parcelles et les distances par rapport au siège d’exploitation ne sont pas prises directement en compte dans le bilan énergétique global. En conclusion, il faut donc bien évaluer le niveau d’implication en faveur de l’environnement afin de ne pas trop pénaliser ses performances économiques. De plus, les actions inscrites dans une réflexion à long terme (comme celles liées à la fertilité des sols, ou à la mise en place d’aménagements particuliers comme les couverts végétaux hivernaux par exemple), sont difficilement quantifiables dans une approche économique annuelle.

L’approche territoriale : un atout économique majeur ! Comme le montre le graphique suivant, les échelles économique et socio territoriale sont corrélées positivement au seuil de 5%, ce qui signifie que l’implication territoriale et sociale des agriculteurs est bénéfique pour les résultas économiques.

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102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 37

y=0,364x + 25,218 r2=0,051 r=0,227 DW=1,553 n=93

T o t a l : E c h e l l e

Total Echelle de durabilité économique

°

°

° ° ° °° ° °° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °° °° ° ° ° ° ° °° °° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° °

°

° ° ° °

°

° °

° ° ° 43

49

55

61 67 73 79 85 Total:Echelle de durabilité socioterritoriale

91

97

103

Cette relation s’explique essentiellement par la note globale obtenue sur la composante « Emploi et Services » (R=0,301 ; seuil de 1%), qui témoigne du degré d’ouverture de l’exploitant sur son territoire par des services marchands rendus au territoire (déneigement, entretien des haies et des chemins communaux…), par l’accueil pédagogique ou social sur la ferme, mais aussi par le partage des facteurs de production en termes de surface limitée par actif, la création d’emploi récente et par le recours au travail collectif et au travail en réseau.

Total Echelle de durabilité économique

y=0,963x + 31,732 r2=0,09 r=0,301 DW=1,635 n=93

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 T o t a l : E c h e l l e

°

° ° °° °

° °

° 7

10

°

°

° °

°

°

° ° °° ° ° ° ° ° ° °° ° °°° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° ° °°° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° ° °° ° ° ° ° 13

16

19 22 25 EMPLOI ET SERVICES

28

°

31

34

37

Par ailleurs, et ce n’est pas neutre, l’implication de l’agriculteur et la valorisation de ses produits par l’intermédiaire des filières de qualité, très présentes sur les territoires de moyenne montagne (Label Rouge, AOC ou Agriculture Biologique…), représentent un atout économique non négligeable. C’est le cas de la plupart des 93 agriculteurs enquêtés, que ce soit pour les 48 agriculteurs impliqués dans la démarche AB ou pour les 45 autres exploitants qui produisent pour la plupart sous signe officiel de qualité. On l’a vu précédemment dans l’analyse des résultats de l’échelle socio territoriale, les démarches de qualité sont importantes (qu’elles soient liées au territoire : AOC, IGP… ou liée au process de production lui-même : Label Rouge, voire AB…) et expliquent en grande partie les résultats au niveau social. La répercussion sur les résultats économiques est également évidente, comme le montrent les graphiques suivants (démarche de qualité et total de l’échelle économique (R=0,219 ; seuil de 5%) et total de la composante « Qualité des produits et du terroir » (R=0,268 ; seuil de 1%) :

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Total Echelle de durabilité économique

Total Echelle de durabilité économique

y=1,173x + 45,11 r2=0,048 r=0,219 DW=1,511 n=93

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 -2 T o t a l : E c h e l l e

° ° °

°

° °° °°

° °

°

° °

°

°

° ° °° °° ° °° °° ° °° ° °° ° °°

°

°°

° °°° °

°

0

°° ° °°

° °

°

°

°

° ° ° ° ° ° °°

°

2

4

°

6 8 Demarche de qualité

10

12

14

y=1,011x + 29,268 r2=0,072 r=0,268 DW=1,5 n=93

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 d 25 e 18 11 T o t a l : E c h e l l e

°

°

° °

° °

° °°

°

° °

°

° ° °

°

°

10

13

° ° ° ° ° ° °

° °

7

° °° °° °° ° ° ° ° ° °° ° °° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° ° °° ° ° ° ° °° ° ° °° ° °° ° ° ° ° ° ° ° ° °

°

° °°

°

°

16 19 22 25 28 QUALITEDES PRODUITS ET DU TERRITOIRE

31

34

37

Enfin, et là non plus ce n’est pas négligeable, la valorisation des produits par filières courtes (en proportion de vente directe ou de proximité sur le chiffre d’affaire), contribue directement (R=0,397 ; seuil de 1%) à un niveau de durabilité économique élevé. Ceci s’explique souvent par le fait que de « petites » structures sont amenés à diversifier leurs débouchés en vue de maintenir de la Valeur Ajoutée sur le territoire et sur l’exploitation, les volumes fournis dans les filières classiques n’étant pas assez rémunérateurs. Au niveau statistique, même si cette tendance existe, elle n’est pas significative au seuil de 5%. On ne peut donc pas affirmer que la surface de l’exploitation entraîne systématiquement une valorisation par filières courtes en cas de « petite » surface. Au final, on peut donc identifier l’approche territoriale par la qualité des produits de montagne et leur valorisation locale, ainsi que l’implication de l’agriculteur dans son territoire comme des atouts pour améliorer les résultats économiques de l’exploitation.

Ces résultats obtenus sur l’ensemble de la population enquêtée suivent-ils les mêmes tendances au niveau régional ?

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TOTAL Echelle de durabilité ECONOMIQUE

Viabilité

Taux de spécialisation économique

Sous total Composante VIABILITE

Sensibilité aux aides

Sous total Composante INDEPENDANCE

Efficience du système productif

Indicateur Valeur de «p» Auvergne Aveyron Limousin Rhône-Alpes MOYENNE des 93 EA

0,001

0,001

0,004

0,004

0,003

0,023

0,001

• + •

+ • •

• + •

• • •

• ++ • •

• + • •

• • +++ -

51,92

4,44

2,99

7,43

6,69

16,91

15,82

Le tableau de comparaison générale entre régions, basée sur des analyses de variance (ANOVA), montre que globalement au niveau de la durabilité économique, la région Limousin présente les meilleurs résultats, la région Auvergne les plus fragiles, et que pour la région Rhône-Alpes ou l’Aveyron les résultats correspondent à la moyenne des 93 exploitations enquêtées. Quelques différences sont malgré tout à souligner. Mais avant de chercher à expliciter ces différences, il convient de comparer de façon relativement simple quelques éléments des systèmes de production. Pour cela, quelques comparaisons statistiques sont nécessaires : des ANOVA et des tests du χ² vont nous aider à mieux appréhender les différences de systèmes entre régions.

Région effectif SAU moyenne Auvergne 37 63,2 ha Aveyron 30 101,9 ha Limousin 19 58,5 ha Rhône-Alpes 7 62 ha MOYENNE 93 74,6 ha p = 0,018 (très significatif)

Ecart 95% • • • •

Ici, malgré des différences apparentes entre régions pour la SAU des exploitations, le test statistique montre qu’il n’y a pas de différence entre régions. La SAU est équivalente.

Région

Par contre, au niveau du nombre d’actifs présents sur les exploitations, pour une moyenne globale de l’ordre de 1,9 UTH par exploitation, l’Auvergne présente un niveau inférieur aux autres régions.

effectif

Nb d’UTH moyens Auvergne 37 1,51 Aveyron 30 2,14 Limousin 19 2,21 Rhône-Alpes 7 2,14 MOYENNE 93 1,90 p = 0,005 (très significatif)

Ecart 95% • • •

En ce qui concerne les types de production, des recoupements et des suppressions ont du être effectuées afin d’avoir des résultats significatifs étant donné la trop grande diversité de productions présentes. On a donc regroupé les systèmes par type de mammifère et par orientation (spéculation économique). Par ailleurs, pour obtenir des tests significatifs, il a fallu exclure la région Rhône-Alpes qui présentait des effectifs trop faibles (7 enquêtes), ce qui engendrait systématiquement des « valeurs théoriques » (valeurs obtenues en fonction des pourcentages réels et extrapolées par le test) inférieures à 5, ce qui invalide automatiquement les résultats et empêche toute conclusion statistique. Enfin, il faut aussi souligner que quelques productions à faibles effectifs représentés (autres productions) ont du également être supprimées. Au final, seul 79 exploitations contribuent à ces tests statistiques.

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Les comparaisons ont ensuite été faite par des tests du χ². Effectifs selon la production principale de l’exploitation (simplifiée par type d’animal principal) : Bovins Caprins Ovins Total

limousin 13 2 1 16

Auvergne 25 3 5 33

aveyron 14 1 15 30

Total 52 6 21 79

χ² = 13 ; ddl = 4 ; p = 0,012 (très significatif) Ce tableau montre une dispersion assez générale des effectifs bovins et caprins, alors que les ovins sont très représentés par l’Aveyron. Pourtant, bien des systèmes mixtes sont présents par exemple en Limousin, les éleveurs les considérant alors comme une production secondaire. Pour préciser davantage, un regroupement par spéculation lait et viande a été effectué sur la production principale. Effectifs (et pourcentage) selon la spéculation économique principale : Allaitant Lait Total

limousin 9 (56,3%) 7 (43,7%) 16 (100%)

Auvergne 17 (51,5%) 16 (48,5%) 33 (100%)

Aveyron 6 (20%) 24 (80%) 30 (100%)

Total 32 (40,5%) 47 (59,5%) 79 (100%)

χ² = 8,54 ; ddl = 2 ; p = 0,014 (très significatif) Globalement, on s’aperçoit que la répartition entre les systèmes laitiers et allaitants est quasi équilibrée, à l’exception de l’Aveyron qui présente une très grande majorité de systèmes laitiers. Au final, en ce qui concerne les systèmes de production sur les différentes régions, on peut dire que : • L’Auvergne présente des systèmes plutôt peu employeurs, avec une main d’œuvre peu nombreuse ; • Les surfaces sont équivalentes selon les régions autour de 75 ha en moyenne ; • L’Aveyron présente plutôt des systèmes Ovins Lait. • La répartition entre systèmes laitiers et allaitants sur l’ensemble de l’échantillon est quasi équivalente.

Revenons maintenant à la comparaison des résultats de durabilité économique entre régions. Tout d’abord pour la région Auvergne, le niveau plus faible de durabilité économique globale s’explique essentiellement par la composante de viabilité (revenu dégagé par UTH) qui se situe autour de la note 2,2 sur 20 soit un revenu dégagé de l’ordre de 1,2 SMIC par UTH. Ceci est accentué par un taux de spécialisation (identique à celui de l’échantillon) de l’ordre de 80% et donc élevé (production principale très importante dans le chiffre d’affaire et plus de 50% de la production écoulée chez un seul client). Ces résultats sont d’autant plus préoccupants que les systèmes auvergnats, pour une surface équivalente, n’arrivent pas à générer de revenu supérieur aux autres avec moins de main d’œuvre. Il y a donc une marge de progrès importante dans cette région et notamment par des transferts d’innovations à partir d’autres groupes du réseau. Par ailleurs, et si l’on fait le lien avec les interprétations précédentes : il s’agit pour ces agriculteurs de pouvoir s’insérer dans des filières de qualité par exemple, de valoriser une partie de leur production en circuits courts, de mieux valoriser leurs ressources locales en limitant le recours aux intrants et en sortant des schémas de production classiques peu compétitifs sur ces territoires (ex : sortir du modèle maïs-soja et mieux valoriser l’herbe comme en Limousin). Par ailleurs, et comme il est montré dans l’analyse de la durabilité agro écologique, il s’agit en lien avec ce qui vient d’être énoncé de diversifier leur assolement, afin de remettre davantage d’agronomie au cœur de leurs systèmes. Ces éléments étant tous corrélés positivement avec la performance économique, il apparaît nécessaire pour ces producteurs de revoir leur mode de production par l’approche systémique. Les acquis du Limousin couplés à ceux du Pays Basque leur seraient probablement très bénéfiques.

Pour les systèmes aveyronnais, on note l’influence de la filière Roquefort, en général très rémunératrice. En effet, la corrélation entre viabilité économique (en termes de revenu) et production ovin lait est très marquée. De plus, le groupe est en totalité engagé dans la démarche AB, et à condition de bien valoriser ses produits dans les filières biologiques, ce qui n’est pas le cas de tous, il peut y avoir une plus-value intéressante. Ces performances se traduisent par un revenu dégagé d’environ 1,5 SMIC par UTH pour plus de 2 UTH par exploitation, ce qui est

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tout à fait satisfaisant. Un petit bémol peut être cependant noter en ce qui concerne le taux de spécialisation important de ces exploitations (probablement la filière lait pour Roquefort). Une évolution des exploitations vers de la diversification serait bénéfique pour le niveau de durabilité global, à condition de ne pas raisonner celle-ci par un accroissement du volume de production sur une surface équivalente, ce qui entraînerait certainement une dépendance accrue aux intrants, un travail accru. Il faut également noter que, même si la différence n’est pas significative, les systèmes aveyronnais sont les moins transmissibles (environ 150 000 € par UTH hors foncier sur l’échantillon). Il conviendrait donc d’orienter une éventuelle diversification sans investissement : par exemple une légère désintensification avec une conduite économe, ce qui libèrerait éventuellement un peu de surface pour de la production liée au territoire. On note également une bonne indépendance financière de ces structures, qui pour un niveau d’aides publiques à peu près équivalent (environ 20% de l’EBE pour une moyenne proche de 50%), dégagent un EBE supérieur (prix du produit). Des marges de progrès existent sur l’efficience du processus de production qui témoigne d’une certaine dépendance aux intrants (aux alentours de 40% du produit total).

Au niveau de la région Limousin, les systèmes diversifiés ancrés sur leur territoire témoignent de leur pertinence économique. En effet, avec une note globale aux alentours de 62,5 sur 100, ces exploitations se caractérisent surtout par l’efficience du processus de production, c’est-à-dire leur faible dépendance aux intrants. C’est également le cœur de leur identité : l’autonomie des systèmes de production. C’est une approche globale du système qui caractérise l’ADAPA (Association pour le Développement d’une Agriculture Plus Autonome). L’évaluation du potentiel agronomique est le point de départ du raisonnement : c’est ce qui définit le potentiel de production, le but étant de limiter au maximum les intrants. C’est un raisonnement qui va à l’encontre des idées reçues et de l’accompagnement des candidats à l’installation par voie classique où on part du revenu, on déduit le volume à produire et on essaye d’y arriver par les intrants en oubliant le potentiel réel des sols… et les conséquences environnementales et sociales de ces pratiques. Concrètement, les acquis de ce groupe doivent pouvoir bénéficier aux autres. Par ailleurs, nous avons vu l’implication de ces agriculteurs sur leur territoire et le lien qui existait avec la performance économique. Sur une surface relativement modeste et avec de l’emploi, en conduisant son système de manière économe, et en valorisant une partie de ses produits localement… ne serait-ce pas une bonne définition de la durabilité en agriculture ?

Pour la région Rhône-Alpes, la problématique est quelque peu différente. Bien que les résultats des exploitations ne soient pas différents de la moyenne sur la note globale de durabilité économique, une marge de progrès est perceptible sur l’efficience du système productif. Il convient pour ces groupes de se rapprocher des autres et de transférer une partie des acquis des autres groupes en termes d’indépendance aux intrants, gage de meilleures performances économiques. Cela passera dans un premier temps par de l’expérimentation à petite échelle : sur quelques parcelles, sur quelques animaux… puis d’y trouver peut être son compte. Il est délicat, ici, d’identifier des pistes d’action précises. Le faible effectif et la variabilité inhérente ne permettent pas de généraliser les résultats. Cependant, il semble important d’améliorer les échanges entre groupes, et du moins pour les 7 agriculteurs qui ont pris part aux résultats.

4 – Comparaison par mode de production Biologique et Conventionnel Au niveau des résultats globaux en termes de durabilité, pour les 48 exploitations engagées dans la démarche d’Agriculture Biologique et les 45 produisant en mode conventionnel, il n’y a pas de différence significative sur la durabilité globale des exploitations. En effet, les deux modes de production se situent à des niveaux équivalents. Une seule dimension différencie les deux modes de production : l’échelle agro écologique. Comme le montre le tableau suivant, même si la différence est significative au seuil de 1% sur un test du χ², les résultats sont globalement satisfaisants dans les deux modes de production. Mode de production Conventionnel Biologique MOYENNE 93 exploitations

45 48

Moyenne sur 100 86,1 90,0

93

88,6

effectifs

Ecarts 95% +

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Même si cela peut être rassurant pour les agriculteurs impliqués dans la démarche AB, il faut tout de même relativiser cette différence au profit des « conventionnels ». En effet, une bonne partie d’entre eux (et c’est un peu l’identité de bon nombre de groupes Civam) est engagée depuis maintenant plusieurs années pour certains dans une démarche globale de durabilité. Cette approche se traduit par un écart non négligeable aux schémas de production classiques que l’on peut rencontrer généralement. Leurs pratiques sont souvent plus proches des modes de productions biologiques que des modes conventionnels. Si l’on prend l’exemple des traitements phytosanitaires, la politique globale des agriculteurs inscrits dans une démarche de durabilité mais non (encore ?) biologique, est de s’autoriser une éventuelle intervention en cas de « coup dur », les traitements préventifs étant un terme banni de leur vocabulaire. La différence sur l’indicateur « Pesticides » qui prend en compte la pression polluante sur la surface traitée, même si celle-ci n’est pas significative statistiquement, est de 13 sur 13 pour les « bio » et de 12,83 sur 13 pour les « durables », soit une différence quasi nulle. La seule différence significative se situe sur les notes de diversité domestique, les agriculteurs biologiques faisant légèrement la différence. Il est donc délicat au final de comparer ces deux modes de production, puisqu’au sein du réseau Civam, et sur la population enquêtée ici, les « conventionnels » ne reflètent pas le réel mode de production conventionnel. La majorité des agriculteurs enquêtés est en effet inscrite dans une démarche de durabilité (au sens dynamique du terme : remise en question permanente).

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5 – Approche par systèmes de production : Une comparaison statistique a été réalisée selon les orientations de production principales des exploitations. Les comparaisons entre systèmes ont été effectuées par des analyses de variance. Le tableau suivant récapitule les principales différences observées : SYSTEMES DE PRODUCTION VARIABLES • •

BLBV • •

BL+Autr es •

BV

OV

• +

• •

Allaitant + Autres • •

• SAU • SAU/UTH • Diversité Cult.annuelles et temp. • Div. Cult. Pérennes • Div. Animale • Conserv. Patrimoine génétiq. • DIVERSITE • Gestion de la MO • ZRE • Valoris. Espace • Gestion surfaces fourragères • Trts vétos • Dépend. Energétiq. • PRATIQ AGRICOLES • TOT AGROECO • Démarche qualité • Valoris. Patrimoine Paysage • Filières courtes • Contrib. Emploi • EMPLOI SERVICES • Bien-être animal • Accueil hygiène et sécurité • ETHIQ-DEV HUMAIN

+

-

• -

• •

--

• •

• +

• •

• • •

• + +

• TOT SOCIOTERR • Tx spécialisation • VIABILITE • Sensibilité Aides • INDEPENDANCE • TRANSMISSIBIL ITE

Valeur de « p »

• •

Cap + Autres ---

Cap + Transf. --------

Autres Prod. ----

+++

0,001

• •

• •

• •

• ++

• •

0,006 0,002

• •

• -

• •

+++ +

• •

• •

• •

0,002 0,001

+ • •

• • +

• • •

• • •

+ • •

• • •

• • •

• •

0,001 0,002 0,003

• • +

• • •

+ + •

• • •

• • •

• +

• • •

• • •

• • •

0,015 0,034 0,001

+ -

• • •

• + •

• • •

• •

• • •

• + ++

• • •

• • •

• • •

0,038 0,001 0,035

• --•

• • •

• • •

• • -

• • •

• • •

• •

• • +++

+ • •

• • +

0,033 0,001 0,002

• •

• •

• ++

• •

• +

• -

++ •

• •

• •

0,004 0,004

--

0,002

• • • • •

• • • • • •

• • • • •

• • • • • • •

++ • --• • •

• • • • • • •

--• ++ • -

• • ++ • • • •

• • + • + • ++

+ + • • ++++ +++++ •

0,001 0,004 0,001 0,02 0,001 0,02 0,024

BL

OL

0,01 0,001

Les différences constatées sont très significatives puisque les seuils observés (valeur de « p ») sont très faibles. La plupart sont en effet significatives à un seuil inférieur à 1%, ce qui explique, malgré des effectifs parfois restreints, une part due au hasard infime. Il est important de souligner qu’aucune différence en termes de note de durabilité minimum n’apparaît entre les différents systèmes de production. Ceci est appuyé par le fait que les résultats en termes de durabilité économique sont équivalents, quel que soit le système de production. Les systèmes Bovins Lait strict présentent les résultats suivants : • Un résultat sur l’échelle agroécologique inférieur à la moyenne dû essentiellement à un manque de diversité domestique (peu de diversité animale et peu d’engagement en faveur de la conservation du patrimoine génétique locale (systèmes Prim’Holstein pour la plupart)), et ce, malgré de meilleurs

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résultats sur la composante « Pratiques agricoles » et ses indicateurs « traitements vétérinaires » et « dépendance énergétique ». Une faible implication dans les démarches de qualité (type AOC), peu de valorisation des produits lait en filières courtes, ce qui se traduit par un résultat inférieur à la moyenne sur la composante « Emploi et Services ». Ces résultats se répercutent d’ailleurs sur le total de l’échelle socioterritoriale avec un résultat également inférieur à la moyenne globale. Un taux de spécialisation économique élevé qui se traduit par une note inférieure à la moyenne. Ceci, en relation avec les éléments précédents, s’explique par le fait que les éleveurs de bovins laitiers livrent en général la totalité de leur production à une seule et même laiterie, transforment rarement leur lait et ne vendent que rarement à la ferme.

Les systèmes Bovins Lait-Bovins viande associés ne présentent que deux particularités par rapport aux 93 exploitations de l’effectif enquêté : • Une moindre dépendance énergétique, qui peut s’expliquer par une meilleure valorisation du pâturage par exemple, bien que rien ne ressorte en termes de valorisation des ressources locales. • Une grande sensibilité aux aides, comparés à la moyenne globale. Les systèmes Bovins Lait diversifiés (avec d’autres ateliers comme des monogastriques (porcs, volailles) par exemple) présentent les particularités suivantes : • Une SAU inférieure à la moyenne, ce qui justifie souvent la présence d’un autre atelier (hors sol souvent) pour conforter un troupeau laitier de taille modeste. • Un résultat sur la dimension agroécologique supérieur à la moyenne qui est permise par une composante de diversité domestique supérieure (essentiellement due à une forte diversité des cultures annuelles et temporaires et malgré un résultat inférieur sur la diversité des cultures pérennes), et une meilleure gestion de la matière organique (sur une grande partie de la surface et recours fréquent au compostage). • Par contre, on note là aussi un taux de spécialisation économique important (activité lait), et un résulta sur la composante « viabilité » inférieur à la moyenne (structures de taille modeste, mais pas plus transmissibles pour autant). Les systèmes Bovins viande se distinguent de la moyenne globale par : • Une SAU par UTH plus importante (systèmes herbagers extensifs pour la plupart, mais avec une certaine variabilité malgré tout). • Pourtant, une moindre diversité des cultures pérennes, ce qui traduit davantage de la présence de prairies temporaires au détriment des prairies permanentes et naturelles. • Une meilleure note à l’indicateur « Valorisation de l’espace », qui témoigne d’un chargement moyen proche de 1,4 UGB/ha SFP voire légèrement inférieur (objectif d’accès aux primes à l’extensification). • Une meilleure gestion des surfaces fourragères, bien que le résultat moyen soit déjà très bon. Il en est de même pour les traitements vétérinaires. Ces divers aspects ne permettent cependant pas aux systèmes bovins viande de se distinguer sur la totalité de la dimension agroécologique. • Une moindre « contribution à l’emploi », qui s’explique en partie par la surface importante par UTH, témoignant d’une moins bonne répartition des facteurs de production entre producteurs, mais qu’il faut relativiser du fait du caractère extensif de cette production. • Enfin, un meilleur résultat à l’indicateur « Bien-être animal » : les éleveurs de bovins viande estiment que leurs animaux sont dans des conditions d’élevage optimal (accès à l’eau, confort au champ et dans les bâtiments, état sanitaire). On ne note aucune différence significative en ce qui concerne les indicateurs et composantes de la durabilité économique. Pourtant, on aurait pu penser que ces systèmes eut été davantage dépendants des aides, ou encore moins transmissibles du fait de l’importance de la surface, mais le foncier n’entrant pas le calcul de la transmissibilité, il n’en ressort aucune différence avec l’effectif global. Les systèmes Ovins allaitants ont les particularités suivantes : • Un résultat moyen sur l’échelle agroécologique inférieur à celui de l’effectif total enquêté, du fait d’une moindre diversité des cultures annuelles et temporaires, et d’une note donc inférieure à la composante « Diversité domestique ». Ceci peut s’expliquer par une faible surface de terres labourables (et donc la quasi-totalité en STH) qui indique peu de cultures. • Un résultat bien supérieur à la moyenne sur la composante « Ethique et Développement Humain » bien qu’aucune différence significative ne soit constatée sur chacun des indicateurs qui la constituent. Ceci

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traduit une note systématiquement proche de la moyenne sur les indicateurs, mais supérieure. Ce résultat ne se répercute pas sur le total de l’échelle socioterritoriale. Au niveau économique, les systèmes ovins viande présentent un taux de spécialisation économique élevé (en général peu de débouchés en dehors du groupement d’éleveurs, et des labels auxquels adhèrent les éleveurs), et un résultat sur la composante « VIABILITE » très inférieur à la moyenne. Bien qu’inscrits dans des démarches de progrès, les systèmes allaitants ovins restent fragiles et très concernés par la concurrence mondiale rendant peu attractive cette production.

Les systèmes allaitants (BV ou OV) associés à d’autres ateliers sont globalement très proches de la moyenne. Seul l’indicateur de « Bien-être animal » (en auto estimation) les distingue du reste de la population enquêtée, avec une estimation supérieure à la moyenne. Les résultats globaux montraient pourtant une note parfaite au niveau agroécologique (voir V-B-1.3.) avec 100%, mais le faible effectif présent dans ce groupe ne permet manifestement pas de conclure au sens statistique. Les systèmes Ovins Lait, typique de la zone AOC Roquefort, sont tous situés en Aveyron et conduits sous l’égide du cahier des charges de l’Agriculture Biologique (sauf un élevage conventionnel en Limousin). Ils se distinguent de la moyenne sur les critères suivants : • Un meilleur résultat sur le total de la dimension agroécologique : en grande partie expliqué par un niveau de diversité domestique plus élevé que la moyenne en favorisant la race ovine locale Lacaune (ce qui permet de maximiser l’indicateur « Valorisation et conservation du patrimoine génétique »), et en favorisant une grande diversité des cultures annuelles et temporaires par les associations graminéeslégumineuses par exemple. De même, on note une meilleure gestion de la matière organique par rapport à la moyenne (du fait de l’optimisation de la fertilisation organique en AB), et une moindre dépendance énergétique en partie expliqué par le fort recours au pâturage. Ces systèmes présentent un léger bémol en ce qui concerne les traitements vétérinaires par rapport à la moyenne (qui est excellente). Ceci peut s’expliquer par la nécessité de recourir aux traitements de tarissement et de lutte sanitaire biologique pour les mammites par exemple (le résultat reste malgré tout très convenable). • Au niveau socioterritorial par contre, on note un résultat inférieur à celui de la population totale. Bien que le résultat à l’indicateur « Démarches qualité » soit supérieur en raison de la production de lait biologique, la plupart des indicateurs de durabilité socioterritoriale sont inférieurs à la moyenne : c’est le cas pour la « Valorisation du patrimoine bâti et du paysage », le « Bien-être animal » ou encore l’indicateur « Accueil, Hygiène et Sécurité », et la composante « Ethique et Développement humain ». Ceci s’explique en partie par une faible implication en dehors de l’atelier, et le faible recours à de la main autre que familiale, ce qui ne nécessite pas de se préoccuper des conditions d’accueil sur l’exploitation. • Enfin, au niveau économique, on note une très forte spécialisation économique liée au fait du seul opérateur chez qui les éleveurs livrent leur lait. Une moindre sensibilité aux aides du fait des primes ovines, faibles, et surtout du fait que la production de lait pour l’AOC Roquefort, qui plus est biologique, est très rémunératrice. Enfin, la transmissibilité est inférieure à la moyenne, du fait d’un capital d’exploitation (hors foncier) important par unité de main d’œuvre. Il est à noter que le foncier est également très cher en Aveyron, ce qui pénalise encore plus ces systèmes en général assez grands en surface. Les systèmes caprins associés à d’autres productions se distinguent de l’échantillon par les particularités suivantes : • Une SAU inférieure à la moyenne caractéristique fréquente de ces systèmes de petits herbivores. • Et par conséquent une SAU/UTH très inférieure à la moyenne, puisque ces systèmes sont en plus pourvoyeurs d’emploi agricole par le biais d’ateliers associés. • Ces ateliers associés (ex : bovins viande, ovins viande, accueil…) permettent également un résultat en termes de « diversité animale » bien supérieur à la moyenne. Cette diversité ne permet cependant pas à ces systèmes de se différencier du reste de la population enquêtée sur la dimension agroécologique. • La faible surface par actif traduit également un partage des facteurs de production, ce qui se traduit par une note à l’indicateur « Contribution à l’emploi » nettement supérieure à la moyenne. Cette nette supériorité se répercute sur la composante « EMPLOI ET SERVICES » avec un résultat, là aussi, bien au dessus du résultat moyen. • Au niveau économique, les résultats globaux sont équivalents aux autres systèmes de production. On notera malgré tout un taux de spécialisation économique inférieur aux autres systèmes, s’expliquant par la diversité des activités, des ateliers, permettant ainsi d’avoir plusieurs débouchés.

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Les systèmes caprins avec transformation à la ferme sont souvent mis en place du fait de la petitesse structurelle de l’exploitation, la transformation se développant pour pallier à ce constat et favorisant ainsi le maintien de la valeur ajoutée sur l’exploitation. Les résultats des exploitations enquêtées confirment ces hypothèses : • La SAU est également inférieure à la moyenne de l’échantillon. • Ces systèmes sont également très pourvoyeurs d’emplois ruraux : la SAU/UTH est très inférieure à la moyenne, mais ce fait ne se répercute pas sur l’indicateur « Contribution à l’emploi » du fait du faible effectif observé dans ce système. • Une particularité de ces systèmes est la mise en valeur du patrimoine bâti et du paysage où les résultats sont supérieurs à ceux de l’échantillon. Ceci témoigne de la logique de valorisation du territoire pour mieux écouler les produits transformés à la ferme. Souvent d’ailleurs, ces systèmes associent une activité d’accueil touristique à la ferme afin de vendre les produits (fromages) de l’exploitation. • Au niveau économique, ces systèmes caprins avec transformation sont également peu dépendants au niveau des débouchés, puisqu’ils se caractérisent par un faible taux de spécialisation économique en comparaison de l’effectif total. Souvent une bonne part de la production est d’ailleurs valorisée en vente directe. Par ailleurs, ces systèmes souvent de taille modeste, sont peu dépendants des aides comme en témoigne le résultat sur l’indicateur « Sensibilité aux aides » supérieur à la moyenne. • Enfin, ces systèmes sont les plus transmissibles, avec un capital d’exploitation faible. Enfin, pour les Autres productions, souvent atypiques, et encore davantage en zone de moyenne montagne (ex : production de petits fruits, maraîchage, ferme d’accueil…), les particularités en termes de durabilité sont les suivantes : • Là aussi, la SAU, de même que la SAU/UTH, sont bien inférieure à la moyenne, ce qui semble évident étant donné les types de spéculation. • Ces systèmes sont peu efficace en gestion des matières organiques comparés aux autres, du fait la plupart du temps de l’absence d’animaux et donc de fertilisant organiques. • Ils se caractérisent par une forte orientation vers une démarche socioterritoriale, avec une « Contribution à l’emploi » supérieure à la moyenne et une composante « ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN » forte en regard des résultats moyens. C’est le cas notamment de systèmes exigeants en main d’œuvre comme le maraîchage, ou encore des systèmes orientées vers l’accueil social ou éducatif qui nécessitent également la présence de personnes en nombre suffisant. • Au niveau économique, ces systèmes sont très peu sensibles au aides, dans la mesure où ils n’en touchent quasiment pas ; et bien que leur autonomie financière ne soit pas statistiquement supérieure aux autres, ils présentent un résultat à la composante « INDEPENDANCE » très supérieur à la moyenne. Ceci s’explique par l’absence quasi-totale d’aides publiques dans le chiffre d’affaires.

Ces résultats montrent bien l’hétérogénéité des systèmes de productions, et la variabilité a permis de les différencier bien que les effectifs ne soient pas toujours très importants. Afin approfondir encore l’approche statistique, on se propose de réaliser des regroupements pour étoffer certains effectifs qui ne permettent pas de discriminer certains éléments. Ainsi, deux approches sont effectuées : par type d’animal (où l’on regroupe entre eux les systèmes bovins, et de même pour les caprins, les ovins et les autres systèmes), puis par grande spéculation (les systèmes laitiers, les systèmes viande et les autres). Ces deux approches complémentaires viendront préciser quelques aspects de la durabilité des systèmes de moyenne montagne, bien que des biais soient évidemment induits (par exemple : les atouts économiques des systèmes ovins lait risquent d’être masqués par les résultats des ovins viande…).

6 – Approche par type d’animal Cette approche, bien qu’engendrant des biais en associant des spéculations économiques différentes, doit nous permettre d’appréhender la durabilité des systèmes de productions par grandes catégories d’herbivores. L’ensemble des différences significatives, identifiées par des analyse de variances, est présenté dans le tableau suivant :

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VARIABLE (Indicateurs, Composantes) • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

SAU SAU/UTH Diversité animale Gestion Matières Organiques Valorisation de l’espace Gestion surfaces fourragères Traitements vétérinaires Gestion Ressource en eau Dépendance énergétique PRATIQUES AGRICOLES Démarches Qualité Filières courtes Contribution à l’emploi EMPLOI / SERVICES Bien-être animal Qualité de vie Accueil, hygiène et sécurité ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN Total SOCIOTERRITORIALE Taux de spécialisation économique Sensibilité aux aides INDEPENDANCE TRANSMISSIBILITE Note de DURABILITE

Type d’animal principal concerné Autres BOVIN CAPRIN OVIN productions • --• -• ----• ---• + • • • • • • + • • • + • • • • + • + • • • • • + • • • + • + • • + • + • + • + • • • + • • • • + • + • • • • • • • • • • •

• • +++ +++ • • +

• --+ • •

Valeur de « p »

+ + • ++++ +++++++++ • •

0,001 0,001 0,008 0,001 0,014 0,037 0,002 0,009 0,001 0,001 0,039 0,001 0,001 0,003 0,044 0,036 0,001 0,022 0,01 0,001 0,001 0,002 0,007 0,006

Le regroupement des exploitations permet de « gonfler » les effectifs, ce qui entraîne une augmentation de la puissance des tests statistiques. Cependant, les résultats obtenus confirment en grande partie ce qui avait été perçu, à quelques précisions près. Les systèmes caprins et les autres productions (plus atypiques) disposent de moins de surface et favorisent la main d’œuvre, ainsi que le partage des facteurs de production. Leur démarche est bien socioterritoriale axée sur une politique de valorisation des produits par filières courtes. Ces systèmes sont marqués par une nette différence au niveau économique avec une faible sensibilité aux aides et un taux de spécialisation économique (beaucoup de clients) faible lié à la vente directe. Il est également intéressant de noter que les systèmes caprins sont les plus durables au sein de l’échantillon enquêté. Le regroupement a, ici, permis de discriminer cette production parmi les autres. Les principales différences se situent au niveau économique. Les systèmes bovins se caractérisent par des résultats sur l’échelle agroécologique supérieurs aux autres systèmes. Cette « supériorité » se traduit essentiellement au niveau des pratiques agricoles avec un chargement plus optimal (autour de 1,4 UGB/ha SFP), une meilleure gestion des surfaces par une alternance fauche-pâture liée au besoin en stocks fourragers parfois important. On note également une moindre dépendance énergétique, liée parfois au mode de distribution des fourrages (moins de carburant car libre service en comparaison aux systèmes d’élevage de petits ruminants où toute l’alimentation est mécanisée), parfois aux aliments du bétail achetés ou non, aux engrais… Par contre, on remarque que les systèmes bovins sont les plus sensibles aux aides publiques, ces aides représentant parfois près de 80% du revenu. Les systèmes ovins sont caractérisés par une forte implication dans les démarches de qualité (influence de la sous-population des agriculteurs biologiques, en ovins lait notamment), mais avec un taux de spécialisation économique faible (souvent un seul débouché), et une transmissibilité inférieure à la moyenne (influence négative des ovins lait).

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7 – Approche par grande spéculation économique Le regroupement par grandes spéculations économiques, réparties ici en « systèmes allaitants », « systèmes laitiers » et « « autres » (où on trouve les productions végétales : petits fruits, arboriculture, maraîchage…et autres productions atypiques comme l’accueil). Ces regroupements ont pour but d’apporter quelques précisions aux éléments identifiés auparavant. Le tableau suivant présente les différences statistiques (ANOVA) obtenues : VARIABLES (Indicateurs, Composantes) • • • • • • • • • • • • • • • • • •

UTH SAU SAU/UTH Gestion Matières Organiques Zone de Régulation Ecologique Gestion des effluents organiques liquides Gestion de la Ressource en eau Dépendance énergétique PRATIQUES AGRICOLES Filières courtes Contribution à l’emploi Bien-être animal Accueil, hygiène et sécurité ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN Total Echelle SOCIOTERRITORIALE Autonomie financière Sensibilité aux aides INDEPENDANCE

Spéculations concernées Syst. Allaitant Syst. Laitier • • • • + • • + • • ++ + • + •

Autres • ----• + • • •

Valeur de « p » 0,039 0,012 0,001 0,001 0,003 0,005 0,003 0,001 0,001

• • ++ •

• • • -

+ + • •

0,009 0,011 0,011 0,001

+

-

+

0,001

• • •

• • • •

+ + ++++ +++++++

0,032 0,05 0,001 0,002

Les précisions apportées par ces regroupements se situent au niveau structurel par le niveau d’actifs inférieur dans les systèmes allaitants pour une surface équivalente, ce qui engendre une surface à gérer par actif plus importante. Ceci est directement lié au fait que les modes d’élevage des troupeaux allaitants en moyenne montagne sont pour la plupart extensif ; il n’en ressort pourtant aucune différence en termes de gestion de l’espace, ce qui témoigne de chargements équivalents dans les différents systèmes. Ce résultat n’est donc pas lié au degré d’intensification des systèmes. Or, on a vu précédemment que plus la surface à gérer par actif était importante, plus le niveau global de durabilité était faible. Il y a donc ici des éléments importants de progression à identifier chez les autres systèmes de production, afin de faire progresser les systèmes allaitants. Pourtant, à l’opposé, on s’aperçoit également que ces systèmes allaitants fournissent davantage de zones de régulation écologique que les autres. Ils contribuent donc davantage au maintien de la biodiversité. De même, ils permettent une meilleure gestion de la ressource en eau en limitant le recours à l’irrigation, en maintenant des zones humides… Enfin, il apparaît que ce sont les systèmes les plus dépendants des aides publiques, avec une part dans l’EBE des aides PAC très importante. Il conviendrait ici de favoriser des démarches d’autonomie des exploitations allaitantes, couplées à un développement des filières courtes en vue de diversifier ses sources de revenus, de permettre un maintien de la valeur ajoutée sur l’exploitation et de limiter le recours aux grandes filières de type broutard pour l’Italie, ou encore veau sous la mère… Ces types de démarches existent déjà au sein du réseau, et dans certaines des exploitations enquêtées, démarches qu’il serait pertinent de mutualiser. Pour les systèmes laitiers, peu de précisions nouvelles apparaissent si ce n’est que la gestion des effluents liquides reste quelque peu problématique. C’est notamment le cas en production ovine laitière, où les effluents liquides de salle de traite ne sont pas toujours gérés de façon optimale. De plus la mise aux normes des systèmes laitiers représentant déjà un coût important, la gestion des effluents liquides est souvent perçue comme secondaire. Par ailleurs, on note la faible implication en faveur des zones de régulation écologique en comparaison des autres systèmes de production. En effet, les systèmes laitiers sont souvent calqués sur les systèmes de plaine (au moins pour les systèmes bovins) et font peu de place à ces infrastructures agro-écologiques. L’histoire dans ces zones a montré que le remembrement, bien que partiel, a eu des conséquences considérables sur les haies ou autres murets, mares… La politique d’intensification a vu ces infrastructures décliner et le maïs se propager en altitude.

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8 – Proposition de Typologie de la durabilité des exploitations enquêtées Deux sortes de typologies statistiques peuvent être envisagées sur des diagnostics de durabilité. On peut réaliser une AFC (Analyse Factorielle des Correspondances) à partir de variables qualitatives, ou une ACP (Analyse en Composantes Principales) à partir de variables quantitatives. Il est plus simple d’effectuer une typologie à partir d’une AFC, cependant, il aurait fallu réaliser une mise en classes des variables quantitatives. Or, les essais de mise en classes réalisés ont eu tendance à avoir une connotation politique forte en fonction des bornes choisies. En effet, lors d’échanges sur les bornes à choisir, on s’est aperçu que les limites souhaitées par les uns semblaient trop ambitieuses pour les autres et vice versa. De plus, le fait de fixer des limites par indicateur semblait être perçu comme une limite inférieure de durabilité, à partir de laquelle on était bon ou non. Or, la logique de l’agriculture durable est une démarche dynamique en progression constante. Il n’était donc pas judicieux de procéder à une mise en classes. Malgré la difficulté, il a donc été plus raisonnable de choisir la méthode de l’ACP. Cette méthode consiste à identifier sur deux axes principaux l’essentiel de la variabilité obtenue. Chaque axe est « expliqué » par les contributions à la variabilité de chacune des variables. Un minimum de 20% de la variabilité doit être expliqué par les deux axes principaux. Dans le cas contraire, aucune conclusion ne peut être établie à partir de l’analyse multivariée. Dans le cas ici présent, les deux axes obtenus expliquent 25,4% de la variabilité (14,9% pour l’axe 1 horizontal, et 10,5% pour l’axe 2 vertical). Ce résultat n’est pas exceptionnel, mais doit permettre de réaliser une typologie partielle. Les deux axes sont expliqués principalement par les variables suivantes (contributions relatives des différentes variables aux axes obtenus) : les principales AXE 1 (horizontal) AXE 2 (vertical) variable contribution variable contribution - 0,331 SAU - 0,294 SAU/UTH - 0,488 Diversité des cultures annuelles 0,342 Diversité des cultures annuelles 0,336 Dimension des parcelles 0,525 Diversité des cultures pérennes 0,387 Zone de régulation écologique 0,319 Diversité animale 0,513 Contrib. Enjeux environx du territ. 0,388 Conservation patrimoine génétique 0,468 ORGANISATION ESPACE 0,544 DIVERSITE DOMESTIQUE 0,616 Traitements vétérinaires 0,368 Effluents organiques liquides - 0,363 Démarche qualité - 0,305 Protection de la ressource Sols 0,565 Valorisation patrimoine bâti, paysage 0,394 TOTAL AGROECOLOGIQUE 0,358 Accessibilité de l’espace 0,357 Démarche de qualité 0,405 Implication sociale 0,525 QUALITE DES PRODUITS 0,300 Contribution à l’emploi 0,585 Filières courtes 0,331 EMPLOI ET SERVICES 0,403 Contribution à l’emploi 0,503 Bien être animal 0,708 EMPLOI ET SERVICES 0,593 Accueil, hygiène et sécurité 0,542 Formation 0,703 ETHIQUE, DEVT HUMAIN 0,633 TOTAL SOCIOTERRITORIAL 0,622 TOTAL SOCIOTERRITORIAL 0,314 Viabilité économique - 0,549 Viabilité économique 0,625 Taux de spécialisation économique - 0,433 VIABILITE 0,577 VIABILITE - 0,346 Autonomie financière 0,375 Autonomie financière - 0,426 Sensibilité aux aides 0,421 Sensibilité aux aides - 0,470 INDEPENDANCE 0,458 INDEPENDANCE 0,348 TRANSMISSIBILITE 0,381 TRANSMISSIBILITE 0,534 Efficience du processus productif 0,793 TOTAL ECONOMIQUE 0,814 Note de DURABILITE Au final, cette ACP propose une répartition des exploitations selon deux axes relativement antagonistes, sur lesquels on trouve : - Sur l’axe horizontal : la plupart des variables de durabilité liées à la DIVERSITE DOMESTIQUE, le total de l’échelle AGROECOLOGIQUE, les démarches qualité, la valorisation en filières courtes, la contribution à l’emploi, la formation, les composantes QUALITE DES PRODUITS et EMPLOI ET SERVICES et la note totale de la dimension

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-

SOCIOTERRITORIALE, ainsi que l’ensemble des indicateurs de l’échelle ECONOMIQUE ; ces indicateurs s’opposant aux variables Protection de la ressource sols et SAU/UTH. Sur l’axe vertical : les variables Dimension des parcelles, Zones de régulation écologique, contribution aux enjeux environnementaux du territoire, et la composante ORGANISATION DE L’ESPACE, une bonne partie des indicateurs socioterritoriaux (Accessibilité de l’espace, implication sociale, Accueil hygiène et sécurité, Contribution à l’emploi, valorisation du patrimoine bâti et paysages) notamment la composante ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN et le total de la dimension SOCIOTERRITORIALE, ainsi que la composante TRANSMISSIBILITE au niveau économique. Ces indicateurs s’opposant aux variables de diversité des cultures annuelles, Démarche qualité, viabilité économique, Autonomie financière et Sensibilité aux aides, ainsi qu’aux composantes VIABILITE et INDEPENDANCE.

Le schéma suivant présente les grandes contributions des différentes variables aux axes de la typologie obtenue.

Dimension des parcelles, ZRE, enjeux environnementaux du territoire, ORGANISATION DE L’ESPACE Aspects socioterritoriaux : implication sociale, contribution à l’emploi…ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN TRANSMISSIBILITE DIVERSITE DOMESTIQUE (cultures annuelles, pérennes, div. Animale, conservation du patrimoine génétique), Total de l’échelle AGROECOLOGIQUE Démarche Qualité, filières courtes, Contribution à l’emploi, formation, composantes QUALITE DES PRODUITS et EMPLOI ET SERVICES et Total de l’échelle SOCIOTERRITORIALE Ensemble des indicateurs économiques, Total de durabilité ECONOMIQUE

Protection de la ressource Sols SAU/UTH

Et note globale de DURABILITE SAU Diversité des cultures annuelles et temporaires Démarche Qualité Viabilité économique et composante VIABILITE, autonomie financière, sensibilité aux aides et composante INDEPENDANCE

Cette typologie montre bien – et confirme en partie les relations entre variables (indicateurs) identifiées – que la durabilité des systèmes de production de moyenne montagne est en grande partie expliquée par : Une grande part de diversité domestique, garante de débouchés variés, d’économie d’intrants, et de qualité environnementale ; Une réflexion territoriale en termes de production et de valorisation des produits, mais également un certain partage des facteurs de production pour une meilleure contribution à l’emploi, un accès à la formation, et globalement une forte implication socioterritoriale ; Ces éléments contribuant directement à une bonne performance en termes de durabilité économique. Cependant, on observe également que ces éléments s’opposent à la surface à gérer par actif, ainsi qu’à la protection de la ressource « Sols », qui semblent avoir un impact négatif sur la durabilité des systèmes d’exploitation.

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Enfin, et c’est ce que montre l’axe 2 (vertical), il semblerait qu’une trop forte spécialisation vers une démarche socioterritoriale s’oppose aux aspects de taille des exploitations, de diversité des cultures annuelles et temporaires, de démarches qualité et à certains aspects économiques comme la viabilité et l’indépendance. Par contre, il semblerait que cela favorise la transmissibilité des exploitations. Cette typologie, lancée sur la totalité des exploitations enquêtées, propose alors quatre groupes d’exploitations. Au départ nous souhaitions avoir 3 grands groupes, mais la discrimination était insuffisante et situait la majorité de celles-ci dans la moyenne générale. Au final, avec quatre groupes, on obtient la répartition suivante : Dendrogramme obtenu : Type A (1) Type B (67)

(93) (89)

Type C (22)

(92)

Type D (3)

Répartition des individus selon la typologie ACP et sur les deux axes obtenus : B

C C C

C

CC C CC

C

B B

B B

B B B

B

B B B

B

B

A B

B

BB B

B

B

B

B

B C

B

B

C C

B

B B

B B B B BB

B

C

B

B

BB B

C

C

B

B

B

B B

C

B

C

CC C

C

B B

B

B B

B

B B

B B

B

B

B B B

B B

D D

B D

B

D’après ces résultats, on trouve alors un groupe A constitué d’un seul individu (qui est discriminé systématiquement quel que soit le nombre de groupes demandé), très atypique et dont les résultats de durabilité sont exceptionnels (92%), un groupe B assimilable aux résultats moyens obtenus, à quelques particularités près, un groupe C dont les résultats de durabilité globale sont faibles et un groupe D à faible effectif.

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Les comparaisons entre groupes donnent les résultats suivants (à partir d’analyses de variance entre typologie obtenue et les différentes variables) : Valeur Type (et nombre d’exploitations) A (1) B (67) C (22) D (3) de «p» 0,01 + • -+++ Diversité des cultures annuelles et temporaires 0,002 • • -++++ Diversité des cultures pérennes 0,05 • +++ • Diversité animale 0,002 • ++ • Valorisation/conservation patrimoine génétique 0,001 • -+++++ • DIVERSITE DOMESTIQUE 0,035 • + ----• Contrib. enjeux environnementaux territoire 0,01 ++++++ • Total Echelle AGROECOLOGIQUE 0,001 • -• Démarche qualité 0,008 • + + • Conservation patrimoine bâti, paysages 0,001 • ++++ • Implication sociale 0,001 -• ++ • QUALITE DES PRODUITS ET TERRITOIRE 0,001 • + + Filières courtes 0,024 • +++ • Autonomie, valorisation des ressources locales 0,004 • • ++ • Services, pluriactivité 0,035 • • • Contribution à l’emploi + 0,001 + EMPLOI ET SERVICES ++++++ 0,001 • Formation + 0,006 -• • Accueil, hygiène et sécurité + 0,001 + • ETHIQUE ET DEVELOPPEMENT HUMAIN ++ 0,001 -• • TOTAL Echelle SOCIOTERRITORIALE + 0,001 • --• Viabilité économique ++++++ 0,007 • • Spécialisation économique ++ 0,001 +++ --+++++++++ • VIABILITE 0,001 • -++ + Autonomie financière 0,001 + + + Sensibilité aux aides 0,001 • ++++ + INDEPENDANCE 0,029 • ++++ • TRANSMISSIBILITE 0,001 • +++++ +• Efficience du processus productif • 0,001 ----++ ++ TOTAL Echelle ECONOMIQUE NOTE DE DURABILITE 92% 57% 30% 48% 0,001 Cette typologie n’est globalement pas très discriminante, ce qui peut être expliqué par la relative faible part de la variabilité expliquée par les deux axes (25,4% seulement). Cependant des tendances apparaissent et discriminent 26 exploitations sur 93. Le groupe B présente un effectif important (67 exploitations) et s’assimile beaucoup à l’effectif total. Aucune tendance en ce qui concerne le système de production, le mode de production, ou encore la zone, n’apparaît. On note malgré tout, quelques différences en termes économiques, où les résultats sont légèrement supérieurs à la moyenne avec 57% de durabilité (52,4% pour l’effectif global). Le groupe A (une seule exploitation) présente des résultats exceptionnels sur l’ensemble des trois dimensions de la durabilité. Cette exploitation est située en Limousin, présente un système très diversifié (maraîchage + production animale diversifiée + activité d’accueil) sur 3,1 ha SAU seulement, avec 3 UTH. Ses résultats sont supérieurs à la moyenne à tous les niveaux et notamment sur la dimension économique. Elle se caractérise par l’absence d’aides publiques, et dégage néanmoins l’équivalent de 2,5 SMIC par actif. Cette exploitation est également très transmissible puisqu’elle nécessite moins de 80 000 € de capital d’exploitation pour permettre le remplacement d’un actif. Enfin, elle fonctionne avec un niveau d’intrants extrêmement faible (moins de 10% des Produits), bien que fonctionnant sous le mode conventionnel, ce qui témoigne d’une gestion très fine des dynamiques agronomiques et d’une complémentarité optimale entre atelier végétal et animal. Enfin, la valorisation des produits en filières courtes ainsi que l’activité d’accueil, typiques de l’implication socio territoriale, semblent influencer largement les résultats économiques. Le groupe C (22 exploitations) est le moins durable de l’effectif enquêté (note de 30 sur 100), et est particulièrement pénalisé par les résultats économiques. Ces systèmes correspondent à des exploitations de relativement grande taille et peu de main d’œuvre, se situant essentiellement en Auvergne et produisant des

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bovins allaitants ou laitiers. Ils sont orientés dans le mode conventionnel et présentent des orientations typiques des systèmes de plaine avec peu de diversité domestique (aussi bien végétale qu’animale), tels que les systèmes intensifiés basés sur le maïs ensilage. Ces systèmes ne valorisent pas leurs produits en filières courtes et alimentent les grandes filières (lait, broutards…) et ne sont pas du tout impliqués dans des démarches territoriales (peu d’autonomie, non valorisation des ressources locales, peu ou pas de contribution à l’emploi, pas de recours à la formation, et grosse intensité de travail). Au niveau économique, ces systèmes présentent des résultats assez préoccupants : le recours aux intrants est plus important que pour les autres (on se situe ici à près de 70% d’intrants dans le chiffre d’affaire), la sensibilité aux aides est importante et représente plus que le revenu qui est faible (moins de 1 SMIC par UTH) ; ce sont également des systèmes qui ont été orientés vers une logique d’investissements avec l’excuse de l’augmentation du chiffre d’affaire, et qui se traduisent par des niveaux d’endettement élevés ; par conséquent la transmissibilité est pénalisée avec la nécessité d’apporter au moins 160 000 € par UTH pour reprendre le capital d’exploitation. Autrement dit, sans reprise familiale, ces exploitations sont généralement destinés à asseoir les avantages comparatifs des grosses exploitations, pénalisant ainsi le maillage du territoire. Enfin, le groupe D (3 exploitations seulement) se distinguent des autres exploitations par des systèmes atypiques. Ce sont des systèmes laitiers (ovins et bovins) aveyronnais et dans la démarche biologique, mais qui appliquent des logiques de plaine. Ils présentent de grandes surfaces à exploiter pour peu d’actifs (1 à 2 UTH), ont des résultats environnementaux inférieurs à la moyenne bien que favorisant une certaine diversité culturale. Ils utilisent également davantage de produits vétérinaires, bien que la différence soit minime. Ces systèmes se caractérisent par le manque total de dynamique et d’implication socio territoriale : les exploitants estiment avoir une intensité de travail très importante, et n’ont jamais recours au travail collectif ; ils ne sollicitent pas non plus la formation, ne contribuent pas à l’emploi et ne valorisent leurs produits que par l’intermédiaire des grandes filières classiques. Malgré l’impression d’une logique individuelle, ces systèmes présentent des niveaux de rémunération intéressants (env. 1,8 SMIC par UTH), malgré une spécialisation économique importante. Cependant, malgré une autonomie financière intéressante qui témoigne de peu d’endettement, et donc d’investissements, ces exploitations sont peu transmissibles puisqu’elles nécessitent près de 220 000 € pour remplacer un actif (bien que cela ne soit pas significatif au plan statistique du fait du faible effectif).

D – Facteurs explicatifs les plus importants •

La surface à gérer par UTH : un résultat surprenant ?

Comme il l’a été évoqué précédemment, dans la partie économique, la gestion d’une surface importante par personne entraîne un niveau de durabilité plus faible que lorsqu’on en a peu à gérer. Il est important de noter que pour ne pas impacter sur son environnement et être efficace au niveau des ressources agronomiques propres à l’exploitation, il est absolument nécessaire de recentrer son système sur l’agronomie. Cela passe alors nécessairement par l’observation des cultures, des animaux, du potentiel agronomique sur pieds en ce qui concerne les surfaces fourragères herbagères… par la mise en place de rotation plus longues, d’un assolement diversifié, d’une bonne gestion des effluents d’élevage… Pour se faire, il convient d’être bon technicien, pointu dans l’observation et fin dans la décision. Aussi, le fait d’avoir des surfaces trop importantes à gérer implique, pour ne pas pénaliser sa qualité de vie notamment familiale, de simplifier son système. C’est le cas dans de nombreuses situations, et c’est encore pire avec le contexte actuel de baisse du nombre d’agriculteurs et d’augmentation des surfaces des exploitations, où l’observation et l’intervention fine sont remplacées par une logique préventive systématique. Par ailleurs, le travail sur une surface trop importante nécessite de rationaliser son travail, et c’est normal, en simplifiant et en homogénéisant son assolement. Les travaux saisonniers sont alors conséquents, d’autant plus que la période végétative est courte, l’observation devient quasiment impossible. On a alors logiquement recours aux intrants pour la fertilisation, le désherbage… on a recours aux entreprises pour le travail du sol, le semis, la récolte… Au final, hormis le fait qu’au niveau de la diversité, du paysage, on ne peut plus être tellement performant, on sacrifie également une partie de la valeur ajoutée produite par son système à l’externalisation systématique. Dans la même logique, et on entre alors dans le domaine politico-économique, on investit pour gagner du temps, ce qui engendre une dilapidation encore plus importante de la valeur ajoutée, sous le prétexte de la modernisation (nécessaire dans certains cas évidemment) et du gain de productivité. On a donc besoin de soutiens publics. Sinon, on sollicite les structures de développement agricole reconnues, ou les filières en place,

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voire les banquiers, pour trouver des solutions, des conseils. Le raisonnement général proposé se fait par le volume de production ! « La seule et unique solution dans ces circonstances est l’augmentation des volumes de production : qui dit plus de volume, dit plus de produit, plus de chiffre d’affaire ! » Logique implacable, difficile de trouver des contre arguments si on suit cette logique comptable. Donc, pour augmenter la productivité, je dois rationaliser mon travail, simplifier mon système et si possible m’agrandir… La boucle est bouclée, avec ses conséquences sociales et environnementales… Le graphique suivant montre sur 93 exploitations de moyenne montagne, représentant diverses productions typiques des territoires de montagne, l’influence de la surface à gérer par Unité de Travail Humain.

n o t e d e

Note de durabilité minimale

d u r a b i l i t

102 95 88 81 74 67 60 53 46 39 32 25 18 11 -30

y=-0,164x + 57,911 r2=0,122 r=-0,35 DW=1,439 n=93 ° ° °° ° ° °° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °° ° ° °° °°°° ° ° ° ° ° ° ° ° °°° ° ° ° ° °° ° ° ° ° ° °°°° ° ° °° ° °° °° ° ° °° ° ° °° ° °° ° ° ° ° ° °° 0

30

60

90

°

°

120 150 180 Variable calculée

210

240

270

300

SAU/UTH

Pour un niveau de durabilité relativement élevé on peut aisément imaginer un système basé sur une production emblématique utilisant l’essentiel de la surface, couplé à des ateliers diversifiés nécessitant beaucoup moins de surface (apiculture, maraîchage, transformation et vente directe, accueil à la ferme…) et de nombreux actifs. Cette approche théorique permettrait un maintien des actifs sur les territoires ainsi que de la Valeur Ajoutée en favorisant les démarches locales de valorisation des produits : une partie de la production pour alimenter les grandes filières (lait, viande en produits typiques de la montagne valorisés sous signe officiel de qualité) et une autre partie tournée vers les filières locales (panier paysan, AMAP…) et les démarches territoriales (agrotourisme, accueil éducatif…). Cette approche n’est bien sûr que théorique, mais on imagine aisément les conséquences qu’un tel système peut avoir sur le territoire en termes de revitalisation rurale et d’emploi, de diversification des activités et des produits fournis... Cependant, on note également que pour atteindre un niveau élevé de durabilité, cette approche à la surface par actif ne suffit pas. Il convient de pousser la réflexion selon une approche globale prenant en compte les trois dimensions du développement durable, les besoins des territoires, le contexte socio-économique et la demande locale et sociétale. La durabilité n’est pas une somme d’approches mono factorielles et il convient de bien construire sa réflexion dans son contexte territorial. •

La diversité domestique : un atout non négligeable pour l’autonomie et pour l’Economie

Comme nous l’avons évoqué précédemment, la diversité domestique est fortement liée au résultat global de durabilité environnementale. En effet, le lien statistique est fort entre cette composante et le résultat global de l’échelle agro écologique, mais également avec les résultats économiques globaux. La diversité des cultures annuelles, temporaires et pérennes permettent en effet, par le biais d’associations d’espèces et variétales, de favoriser en partie l’autonomie alimentaire des troupeaux et donc d’optimiser la valeur ajoutée, voire celle de l’exploitation. C’est le cas notamment de l’impact positif sur les économies d’aliments du bétail (moins d’achats de correcteurs azotés ou d’aliments complets) ou d’engrais (influence des légumineuses (fabacées) sur les apports d’azote totaux, et optimisation des effluents d’élevage). Cependant, afin de bénéficier réellement de ces impacts positifs, il convient de réaliser une approche technique complémentaire : raisonner l’assolement dans le cadre de rotations assez longues afin de bénéficier de la complémentarité des espèces pour la fertilisation et/ou pour la lutte sanitaire (voir par exemple les systèmes basés sur des rotations longues ou les méthodes de lutte biologiques et intégrées pour la protection des cultures) ; de même, pour favoriser les économies d’aliments, la technique du pâturage tournant et l’optimisation de la gestion de l’herbe est une condition quasi sine qua non pour réaliser des économies substantielles (en intrants, en énergie).

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D’une autre manière, sur les exploitations de moyenne montagne, la valorisation et la conservation du patrimoine génétique est un atout non négligeable. On entend par là, une valorisation notamment des races animales locales (Salers, Aubrac, Limousine, Lacaune, Causse du Lot…), par le biais de filières de qualité comme les AOC ou autres Label Rouge… Cette orientation permet, en général, une meilleure valorisation des produits, et il s’avère que ce type de race locale est mieux adapté aux contextes pédoclimatiques des territoires de moyenne montagne. Ils permettent également de profiter de l’image positive de la montagne auprès des consommateurs, et d’émarger sur la typicité des produits en concurrence avec les produits courants. En outre, les systèmes de production basés sur l’exploitation de ce type d’animal sont très souvent moins gourmands en intrants du fait de la valorisation des fourrages « de moindre qualité », de la conduite traditionnelle de ces troupeaux, et parfois du fait de certains cahiers des charges exigeants en matière d’alimentation et de lien au sol. Sur l’étude ici présente, on s’aperçoit que certaines logiques de plaine gagnent de l’altitude et viennent coloniser les systèmes de production montagnards. Ces logiques se traduisent par exemple par la culture du maïs jusqu’à 800 mètres d’altitude, ou même sur les zones séchantes du Sud Massif Central en non irrigué, avec les risques que cela engendre sur la « sécurité alimentaire » des troupeaux. Ces systèmes de plaine sont moins performants sur les trois échelles de durabilité : manque de diversité au niveau écologique, aucune logique ni approche territoriale, faible viabilité économique, forte sensibilité aux aides publiques et dépendance accrue aux intrants dans les produits (faible efficience du processus productif). Ces orientations sont en quelque sorte, une négation des atouts des contextes territoriaux, parfois même néfastes à l’image même de la montagne. La difficulté réside ici en une approche globale de la diversité en montagne et de ses ressources propres des territoires. Les systèmes les plus performants qui allient performance environnementale et performance économique ont en parallèle une logique territoriale, ce qui leur permet de s’inscrire totalement dans une démarche de durabilité. Si l’on s’intéresse aux plus performants, on s’aperçoit assez nettement qu’ils sont sortis de la logique de la productivité à tout prix, et qu’ils optimisent leurs propres ressources. Il s’agit ici d’adapter sa production à son potentiel pédoclimatique et non de forcer artificiellement son potentiel à grands renforts d’intrants pour atteindre des objectifs de production parfois excessifs qui fragilisent à la fois le système de production et les ressources territoriales (eau, biodiversité…). •

La valorisation des produits dans une logique territoriale : une plus-value certaine

La valorisation des produits sous Signes Officiels de Qualité et d’Origine (SIQO) est effectivement une tendance lourde des systèmes de production de moyenne montagne. C’est le cas notamment des production de veaux sous la mère en Limousin et généralement sur l’ensemble du Massif, des productions d’agneaux sous labels (fermier, du Limousin, du Quercy, du Pays d’Oc…), des AOC laitières Cantal, Laguiole, Fourme d’Ambert… en bovins ou Roquefort en ovins, de la pomme du Limousin, ou encore les produits issus de l’agriculture biologique etc., qui sont présentes dans la plupart des exploitations enquêtées Cependant, il s’avère que les exploitations ayant entrepris des démarches de valorisation en filières courtes (transformation à la ferme, vente directe…) se démarquent par de meilleurs résultats économiques comparés à la moyenne. Par ailleurs, on a vu que la logique socio territoriale était fortement marquée par l’implication sociale de l’agriculteur au sein de son territoire, par son approche du travail et le recours au travail collectif, ainsi que par la formation. En effet, les résultats de durabilité (environnementale, sociale, économique) sont d’autant plus élevés que l’agriculteur se libère pour avoir accès à la formation. L’approche territoriale n’est pas forcément simple pour les exploitants. En effet, le contexte socioéconomique global, la localisation ou encore les types de produits proposés influencent largement la faisabilité d’une telle approche. Chaque exploitation n’a pas forcément la possibilité de solliciter de la main d’œuvre collective pour les chantiers d’ensilage, les foins… par manque d’agriculteurs dans la même production par exemple. De même, suivant l’éloignement par rapport aux consommateurs, il n’est pas forcément judicieux de mener une réflexion sur de la vente de proximité, s’il est difficile d’accéder à la ferme. Enfin, suivant son système et selon le niveau de travail et de main d’œuvre, qui existent sur l’exploitation, il n’est pas toujours aisé de se libérer pour se former. Par contre, les quelques systèmes qui ont adapté leurs productions à une demande territoriale existante montrent l’intérêt d’une telle démarche en regard des résultats de durabilité. En effet, les systèmes diversifiés basés sur des

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dynamiques d’accueil, de clients, de scolaires, de touristes… présentent des résultats en général supérieurs à la moyenne. Ces systèmes sont en outre très favorables à l’emploi en zone rurale comme en témoigne les « scores » sur les indicateurs de type « contribution à l’emploi », « viabilité économique » ou encore sur la variable SAU/UTH qui est bien plus faible que la moyenne. Ces logiques, même si elles ne sont pas généralisables (puisque fonctionnant grâce à l’effet de niche commerciale), montrent qu’il est possible de conduire en zone de moyenne montagne des systèmes de relative faible surface avec de la main d’œuvre. Ce sont des systèmes associant par exemple des productions emblématiques en association avec du maraîchage, de l’apiculture, de la production de petits fruits avec transformation, de l’accueil… •

Sortir de la logique du chiffre d’affaire pour celle de la Valeur Ajoutée et de la transmission : un changement de paradigme politique ?

Les résultats économiques sont le facteur limitant de la durabilité, et ce sont les éléments les plus déterminants au maintien des exploitations en zone de moyenne montagne, gage d’un tissu rural dense et vivant. Le développement économique de ces territoires devrait être largement influencé par la revitalisation de ces zones rurales où les commerces, les services publics… disparaissent progressivement, faute de densité de population suffisante. En effet, les emplois ruraux sont largement conditionnés par le dynamisme du secteur agricole avant tout. La condition nécessaire (et suffisante ?) est alors la viabilité économique de ces systèmes de production et la transmissibilité des exploitations dans un contexte où l’installation hors cadre familial doit être encouragée, faute de reprise familiale (célibat des exploitants agricoles, volonté des jeunes de travailler dans des zones et/ou secteurs plus « dynamiques », de travailler en zone urbaine…). Pourtant, chez bon nombre d’agriculteurs et souvent chez les conseillers agricoles ou de gestion, on raisonne systématiquement en termes de chiffre d’affaire. Celui-ci intégrant, qui plus est, les subventions agricoles, oriente les agriculteurs vers l’agrandissement systématique. L’obstacle réside donc pour une bonne part dans l’offre de conseil technique et de gestion présent proposé sur le terrain. En effet, bon nombre de techniciens sont enfermés dans un modèle technique professionnel (en partie issu de l’enseignement, en partie issu de l’encadrement politique professionnel) qui consiste généralement à intensifier le système de production afin de maximiser le chiffre d’affaire, et avec lequel, il faut savoir prendre de la distance. Nombreux sont les experts économistes dénonçant cette approche, et qui expliquent que les économies d’échelle en agriculture ne sont qu’une illusion. En effet, plusieurs études montrent qu’il n’y a pas d’économies d’échelle substantielles en agriculture et que bon nombre de petites exploitations sont plus efficaces que les grandes. C’est notamment le cas de l’étude de la FAO pour la Conférence Internationale sur la Réforme Agraire et le Développement Rural de 2006 (cf. www.icarrd.org) qui explique que l’orientation politique vers les grandes structures n’est justifiée que par la réduction des coûts de collecte des industriels. Si l’on prenait en compte les externalités négatives des exploitations de grande taille – on a vu précédemment que la surface par actif avait un impact négatif sur les résultats de durabilité – l’efficacité économique réelle serait au profit des petites exploitations. En effet, si l’on considérait l’internalisation des coûts externes de la production des grosses structures agricoles (impacts essentiellement environnementaux, mais aussi sociaux, éthique et culturels), les avantages comparatifs seraient sans ambiguïté au profit des structures modestes. Ici, l’orientation des modèles de production agricole relève surtout de choix politiques, et non économiques. En termes de durabilité économique, la logique est inverse. Il convient en effet, pour améliorer la viabilité économique et donc vivre convenablement de son activité, de raisonner dans un premier temps au niveau de l’efficience du processus productif. Pour cela, une approche simple de la marge brute reste très parlante pour les agriculteurs et le rapport des charges opérationnelles ramenées aux produits permet un niveau de compréhension élevé et une sensibilisation efficace. Il ne suffit pas d’augmenter son volume de production si son potentiel agronomique ne permet pas de la faire. C’est une des conditions de l’économie d’intrants, de même que certaines techniques (gestion des effluents, pâturage…) qui, une fois maîtrisées, permettent de valoriser au mieux le potentiel des sols, changent parfois le travail même de l’agriculteur qui passe alors moins de temps dans son tracteur et davantage à observer ses animaux et ses parcelles. L’approche par le potentiel du territoire en termes de demande de produits, d’enjeux environnementaux, et plus globalement de demande sociétale vient alors compléter la logique de fonctionnement possible dans une démarche dynamique et continuelle de la durabilité.

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VI – Identification des actions à mener

A – Pour plus de durabilité des systèmes de production Dans l’absolu, pour une recherche de davantage de durabilité des systèmes de productions agricoles en territoires de moyenne montagne, il est nécessaire d’avoir une approche globale de chaque système de production dans son contexte environnemental, social et économique, mais aussi en tenant compte des aspects socio-économique et des enjeux du territoire. En effet, toute structure ne peut s’inscrire par exemple dans une logique de valorisation locale des produits, au risque de contribuer à une saturation du marché. Il convient donc d’analyser la situation de départ en identifiant bien les points forts et les points faibles du territoire afin de répondre aux attentes du territoire et des consommateurs. Sur le plan environnemental, la montagne est riche encore d’un contexte particulièrement favorable et porteur, tant sur le plan de son image que de l’état de ses ressources propres. L’eau par exemple, est d’une très bonne qualité et mérite qu’on s’y intéresse. Les montagnes constituent en effet les points de départ des bassins versants ; aussi il est impératif d’en préserver une qualité irréprochable si l’on veut imaginer une amélioration en aval. On l’a exposé précédemment, les modèles agricoles de plaine ont tendance à grignoter progressivement les pentes des montagnes. Or, dès qu’un imprévu climatique ou qu’un aléa économique se manifeste, on se rend à l’évidence que ces systèmes sont particulièrement fragiles dans ces zones géographiques. Afin de sécuriser les systèmes de moyenne montagne, il convient d’en garder les particularités et d’optimiser leurs relations avec la plaine. Depuis longtemps (toujours ?) la montagne a su tisser des liens avec les zones d’aval en valorisant ses potentialités et ses ressources. Il fut un temps par exemple où le Massif Central se nommait « la montagne à graisse », les systèmes généralisés en polyculture élevage l’utilisant en systèmes transhumants pour y engraisser les animaux destinés à être abattus à la descente d’estives. Aujourd’hui, dans la logique des modèles de plaine, les agriculteurs sont convaincus (rôle des structures de développement ?) et ils l’affirment, qu’il est parfaitement impossible d’engraisser un animal sans l’apport de céréales ! Ceci est d’autant plus regrettable que les zones de moyenne montagne ne sont pas forcément propices à la culture de céréales. Par ailleurs, les moyennes montagnes bénéficient d’un potentiel de maintien de la biodiversité évident, de part son paysage préservé de type bocager, mais aussi et surtout du caractère peu artificialisé des habitats. L’agriculture a ainsi un rôle primordial dans ce maintien par ses aspects d’aménagement du territoire. Le maintien de parcelles nombreuses, de taille modeste, des haies et autres infrastructures agroécologiques, des prairies humides, des landes et parcours entretenus… est indispensable à la conservation d’une biodiversité importante. Il ne s’agit en aucun cas de « mettre sous cloche » ces zones, mais d’en maintenir le potentiel et d’en permettre l’expression dans les contextes économiques successifs. L’étude de la durabilité des systèmes de production a montré l’importance de la diversité domestique sur les résultats économiques. Les associations d’espèces et variétales sont un des éléments majeurs de cette diversité et permettent des économies d’intrants non négligeables. Il est en effet largement reconnu que ces associations agronomiques limitent la fragilisation aux aléas climatiques et qu’ils permettent en outre de stabiliser d’éventuelles attaques parasitaires par la non spécialisation. Les intérêts en termes de fertilisation des légumineuses (fabacées), de même que pour l’autonomie alimentaire et protéique des troupeaux, ne sont également plus à démontrer. Ces éléments contribuent largement à la préservation de l’image de la montagne. La diversité domestique est parallèlement impactée par le maintien de races et variétés locales, adaptées aux conditions pédoclimatiques et donc performantes dans ces contextes ? Celle-ci contribue par ailleurs largement à la valorisation socio territoriale des produits et aménités de la montagne. En effet, sur le plan socio territorial, les systèmes de moyenne montagne ont tout intérêt à tirer au maximum profit de leur image positive et de leur typicité. Les produits peuvent aisément être valorisés localement ou même en aval dans les villes moyennes par circuit court, et la diversification des productions, peut aussi bénéficier à l’exploitant qui se trouve seul à proposer des produits nouveaux. C’est le cas par exemple des productions de plantes aromatiques, médicinales et à parfum, des petits fruits « sauvages », ou encore du chanvre pour l’éco construction… L’approche territoriale sociale est également un atout de poids dans la diversification des activités, et dans la charge de travail des exploitants. L’accueil éducatif et social en est un : cette activité peut couvrir jusqu’à un quart de temps plein grâce aux services rendus aux personnes âgées souvent dans les communes voisines, à l’accueil de scolaires, de personnes en difficulté… D’une autre manière, le recours plus systématiques aux groupements d’employeurs, aux CUMA, à l’entraide… doit permettre d’alléger la charge de travail des exploitants lors des travaux saisonniers. Le recours aux stagiaires

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est souvent trop rare, et pourtant, bon nombre d’entre eux peinent à trouver des stages. De simples sollicitations des lycées agricoles du département ou des départements voisins suffisent souvent à trouver des candidats. Enfin, l’inscription des productions dans des démarches de qualité semble être également une possibilité intéressante sur ces territoires où les filières sous signe officiel de qualité et d’origine sont nombreuses. La possibilité de convertir l’exploitation à l’agriculture biologique en est une autre, d’autant plus que cette production est désormais relativement encouragée et bien soutenue par les pouvoirs publics. Cette conversion est souvent d’autant plus facile, qu’à très peu de détails, les modes de production typique de montagne sont proches du cahier des charges de l’agriculture biologique. Enfin, les services rendus au territoire sont une possibilité d’implication territoriale non négligeable, comme l’entretien des haies de la commune ou encore le déneigement…et c’est une façon assez simple de se faire connaître de consommateurs potentiels. Sur le plan économique, là aussi, il convient de préserver son indépendance et son identité montagnarde, et ne pas rentrer dans la logique des modèles techniques de plaine au risque de fragiliser son système à la moindre alerte climatique. En effet, ces modèles intensifs pour la plupart, outre leurs conséquences environnementales, ne sont pas transposables en conditions de moyenne montagne, à la fois pour des raisons techniques et pédoclimatiques (fertilité réduite, période de végétation plus courtes…), mais surtout en raison du différentiel de compétitivité par rapport aux territoires de plaine (surcoûts des intrants, du transport, éloignement des zones de chalandises et donc coûts de collecte augmentés…). Les résultats de la présente étude ont bien montré que la limite en termes de durabilité concernait la dimension économique et notamment la viabilité, même si les revenus moyens peuvent être estimés corrects. En outre, il apparaît nettement que les systèmes ayant conservés la typicité des systèmes de production de montagne présentent une fragilité moindre au niveau économique. Sur un plan global par exemple, les systèmes axés sur les logiques de grandes filières comme les productions laitières bovines ou les systèmes broutards – dépendants d’un marché international où la grande volatilité des prix fragilisent même les systèmes les plus intensifs de plaine, réputés compétitifs, dépendants également d’un contexte énergétique peu favorable – montrent des signes de fragilité économique préoccupants sur ces territoires de moyenne montagne. Au contraire les systèmes axés sur des logiques de typicité et dans une démarche de valorisation locale partielle, présentent une moindre sensibilité à ces aléas de prix, et s’assurent par conséquent une adaptabilité supérieure. Ils favorisent également l’emploi dans ces zones où l’exode rural continue. La corrélation importante entre durabilité économique et efficience du processus productif, témoignant d’une faible dépendance aux intrants, justifie également le travail réalisé par une partie des agriculteurs enquêtés. Le lien entre la viabilité économique et la valorisation des ressources locales montre également la pertinence d’une approche des systèmes économes et autonomes, et la logique territoriale apporte une plus-value non négligeable. Enfin, la transmissibilité importante des exploitations enquêtées permet d’envisager une certaine pérennité de ces systèmes de moyenne montagne, et ce d’autant plus que le contexte environnemental préservé peut représenter une plus-value d’appel pour les décennies à venir, où l’installation de jeunes porteurs de projet en hors-cadre familial apparaît comme une nécessité.

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B – Pour des réponses adaptées aux territoires Si l’on reprend les enjeux identifiés précédemment, on s’aperçoit qu’une partie des réponses engagées par les groupes CIVAM impliqués est déjà pertinente. Reprenons pour mémoire les enjeux du massif du Massif Central sur lequel a été réalisée cette enquête : Enjeux des territoires Favoriser la création et la transmission des entreprises. (aide à la transmission et à la mise en œuvre de projets d'exploitation)

Prendre en compte le vieillissement de la population comme facteur de développement (activités d'aides à la personne notamment des plus âgées)

Améliorer la compétitivité et la valeur ajoutée du secteur agricole (appuyer les filières locales, promouvoir les produits de terroir identitaires)

Développer une économie des agro ressources liée à l'environnement et aux produits de qualité

Valoriser les offres touristiques comme levier économique (agrotourisme, encourager les démarches territoriales de valorisation et de promotion du patrimoine)

L'Agriculture doit contribuer à la préservation des ressources naturelles (gestion globale et valorisée de l'eau, attractivité du territoire, préservation de la biodiversité, protection contre les risques naturels)

Tendances des résultats obtenus Le potentiel de transmission des exploitations enquêtées est important. La logique d’emplois par la diversification et la reprise progressive des activités par le remplacement progressif des membres des exploitations est une piste intéressante pour les territoires. Les activités d’accueil social de certains groupes répondent directement à cet enjeu. Un programme de création d’un référentiel métier et de reconnaissance du statut d’agriculteur accueillant est, par ailleurs, en route sur le massif. Le transfert des expériences et initiatives des agriculteurs les plus avancés dans la logique d’économies d’intrants et de valorisation des ressources locales, doit permettre d’améliorer de façon assez globale la compétitivité des exploitations de moyenne montagne. Il reste cependant à concevoir et organiser ces transferts sur une échelle suffisamment large. La diversification permet une moindre dépendance aux aléas des marchés et les activités de certains groupes sur l’éco construction territoriale par exemple, est une possibilité de valorisation accrue des agro ressources territoriale. Certaines exploitations ont axé leur approche sur cette logique d’accueil touristique ou encore d’accueilvente directe de leurs produits et présentent des résultats parfois excellents en termes de durabilité. Cette démarche doit être réalisée selon une approche territoriale et après évaluation des potentialités Les résultats de durabilité environnementale (agriculteurs bio ou plus conventionnels, confondus) montrent la pertinence des systèmes CIVAM enquêtés. La réflexion environnementale est déjà ancienne au sein du réseau et ne demande qu’à être partagée. La logique de réduction des intrants, couplée à une productivité satisfaisante, permet de maintenir les ressources naturelles de limiter l’impact des activités agricoles sur le territoire. Par ailleurs un travail réalisé en 2002 sur le lien entre agriculture et biodiversité ne demande qu’à être approfondi. La démarche HVN devra probablement prendre en compte ces acquis sur ces territoires. Les agriculteurs CIVAM sont depuis longtemps pionniers sur ces aspects, et la mutualisation des initiatives serait certainement source d’effet multiplicateur.

Au regard des enjeux des territoires identifiés, les résultats de durabilité témoignent partiellement des réponses des agriculteurs. Il s’avère que pour bon nombre d’exploitants impliqués dans cette action de diagnostics, ces enjeux font déjà partie de leurs préoccupations, et sont également une part importante des valeurs véhiculées par les CIVAM.

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C’est le cas notamment de la transmission des exploitations sur des systèmes aussi bien très classiques qu’atypiques, mais avec la volonté d’un réel partage des facteurs de production. Ceci passe notamment par la limitation des investissements systématiques pour raisons fiscales. La mise aux normes exclue, indispensable en vue de la préservation de la qualité environnementale, les investissements à outrance pour diminuer l’imposition, pénalisent directement la reprise des structures à moyen et long terme. La transmissibilité des exploitations passe par exemple par la mise en place de systèmes diversifiés (qui est également une forme d’investisement) : aussi bien en termes de diversification des productions par la réintroduction de nouvelles cultures valorisables pour davantage d’autonomie alimentaire des troupeaux ou pour d’autres secteurs d’activité comme les éco matériaux par exemple, qu’en termes de diversification des activités pour maintenir davantage de valeur ajoutée sur les exploitations, ou pour favoriser l’emploi. Par ailleurs, les territoires de moyenne montagne présentent une certaine homogénéité par l’omniprésence de systèmes d’élevage. Il conviendrait donc de diversifier quelque peu les systèmes de productions en vue de dynamiser et/ou développer une économie des agro ressources locales : cela passe par exemple par l’économie des éco matériaux, la relance de la filière bois énergie ou la restructuration de la filière bois construction…, la diversification sur les particularités de la moyenne montagne comme les plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) présentes sur différents territoires, la transformation à la ferme et les circuits courts. La demande existe, notamment dans les villes périphériques du massif ; il s’agit alors de structurer davantage l’offre et pourquoi pas d’y ajouter une logique d’emplois territoriaux ou d’emploi en groupements d’employeurs. Pour ce qui est du lien social, les systèmes de moyenne montagne ont tout intérêt à valoriser leurs modes de production. L’accueil éducatif sur ces structures permet de montrer le lien fort qui existe entre agriculture, aménagement du territoire et maintien des ressources naturelles et de la biodiversité. Les éléments structurels des systèmes montagnards favorisent en effet une certaine communication, favorable à l’image de l’agriculture. En outre, l’orientation vers l’accueil social permet de retisser le lien inter générationnel ou de rendre des services qui ont tendance à disparaître de ces territoires (service à la personne, services publics…). Sur le plan environnemental, les territoires de moyenne montagne sont étroitement corrélés au zonage HVN (Haute Valeur Naturelle) proposé par l’Union Européenne à Kiev en 2003 par les ministres de l’environnement, et il convient d’anticiper les actions pilote qui doivent être mises en place dans les années à venir. Les actions CIVAM sont d’ores et déjà ciblées au niveau d’une association comme SOLAGRO qui suit cette thématique comme prestataire des institutionnels. En effet, les qualités de préservation environnementale des systèmes identifiés ici, témoignent du potentiel de maintien des ressources naturelles, de leur valorisation et du maintien de la biodiversité. Les zones d’altitude constituent également l’origine de l’eau qui s’écoule en aval. Il convient donc d’en préserver l’intégrité dès l’amont. Les systèmes agricoles ont ici l’entière responsabilité du maintien de la qualité de l’eau avant d’atteindre les secteurs d’aval, urbains et industrialisés. Il s’agit donc de favoriser l’émergence et le maintien de systèmes respectueux de l’environnement (eau, biodiversité, paysages…) garant de l’image positive de la montagne et source de dynamisme sur le plan touristique. Les aspects économiques ne sont pas à négliger, bien au contraire. La montagne a toujours vécu grâce aux liens tissés avec la plaine. Les produits sont notamment destinés à être écoulés « vers l’aval ». Cependant, il reste à reconstruire l’identité des systèmes de montagne. Alors qu’autrefois on nommait le Massif Central « la montagne à graisse », où les animaux venaient des plaines par transhumance se faire engraisser dans les estives, aujourd’hui, nombreux sont les agriculteurs obnubilés par les modèles de plaine, qui affirment l’impossibilité d’engraisser des animaux à l’herbe… Dans ce cas, il faut dans un premier temps démolir les représentations avant de reconstruire une certaine indépendance décisionnelle des agriculteurs. Ces notions sont très importantes si l’on souhaite réorienter les systèmes de moyenne montagne sur leurs typicités. La gestion optimisée de l’herbe permet de finir des animaux avec une faible quantité de céréales autoproduite, tout en permettant de limiter fortement l’utilisation d’engrais minéraux ; cette technique appliquée à grande échelle pourrait permettre la mise en place de filières locales de finition d’animaux et limiterait la dépendance vis-à-vis des engraisseurs italiens pour les broutards, ou favoriserait une démarche d’autonomie des systèmes laitiers, les rendant moins dépendants des cours du pétrole via le tourteau de soja. Ces aspects peuvent être alors déclinés à l’échelle territoriale par des liens avec la plaine par le développement de filières biologiques par exemple qui demandent à être structurées, ou de filières locales optimisant l’image positive de la montagne, comme c’est déjà en partie le cas. La montagne doit pouvoir asseoir une certaine indépendance par rapport à une agriculture mondialisée basée sur des mouvements intercontinentaux de matières premières, par l’optimisation de ses ressources propres, diminuant ainsi son impact, son empreinte écologique. Les systèmes économes et autonomes, aussi productifs que les systèmes semi extensifs de référence, présentent des résultats économiques largement compétitifs par

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rapport à ces mêmes systèmes de référence. C’est également le cas en plaine sur les systèmes laitiers (voir document FNCIVAM : « Produire économe et autonome : un enjeu décisif en production laitière » - 2009), et il s’agirait de faire l’étude sur les systèmes de moyenne montagne pour montrer leur pertinence, le cas échéant. Au niveau énergétique et environnemental, les systèmes économes démontrent leur pertinence à bien des égards (énergies directes et indirectes, biodiversité, qualité de l’eau…), et ceci se traduit nettement sur le plan économique à travers de la valeur ajoutée qui reste sur l’exploitation, et par voie de conséquence sur les territoires. Il faut pour évaluer correctement les systèmes entre eux, sortir la très généralisée logique de l’EBE (Excédent Brut d’Exploitation) et du Chiffre d’Affaires, qui intègrent toutes les aides publiques et qui masquent complètement les ratios d’efficacité du travail et du capital, ainsi que les logiques d’investissement et de fiscalité. L’approche de la valeur ajoutée hors primes témoigne réellement de la plus-value inhérente au système et la comparaison devient alors beaucoup plus pertinente à l’échelle territoriale. En effet, les intrants venant quasi exclusivement des territoires de plaine, de même que bon nombre des charges de structures (mécanisation, matériaux des bâtiments, voire les assurances…), on s’aperçoit que pour de nombreux systèmes des territoires de moyenne montagne, l’essentiel de la valeur ajoutée se disperse dans la plaine, et ce au détriment de la vitalité économique des territoires montagnards. Il est même fréquent que le revenu des agriculteurs ne soit constitué exclusivement que des aides publiques, où celles-ci servent à financer les intrants. La pertinence des systèmes économes, toute chose égale par ailleurs, s’exprime alors pleinement. Enfin, à un niveau plus global, la Politique Agricole Commune (PAC) doit pouvoir se territorialiser davantage et permettre aux systèmes de production de moyenne montagne d’exprimer leurs aménités positives en termes environnementaux mais aussi en termes de typicité des produits. La réforme de la PAC de 2013 constitue alors un enjeu primordial pour les agricultures de montagne et il s’agit d’être force de proposition dès 2010, au moment où les débats sur les aspects budgétaires de cette politique commune vont s’engager. Les collectivités territoriales, de même que les diverses institutions nationales devront alors s’impliquer, mais sera-ce en faveur de la montagne et de ses aménités ?

VII – Les réponses déjà engagées au sein des territoires •

La Grille IDEA : de manière générale, la mesure de la durabilité des systèmes de production agricole sur l’ensemble de ces exploitations est faite ou reste à faire en mobilisant la grille IDEA. L’objectif est de pouvoir comparer les exploitations entre elles, par territoire, par production… afin de comparer également les territoires entre eux, ainsi que les différents systèmes de production entre eux. Ce travail a le mérite de déterminer les marges de manœuvre et de progrès pour consolider la durabilité de ces systèmes. Cet outil a également le mérite d’avoir une approche globale de l’exploitation et de ne pas se restreindre à l’une ou l’autre des dimensions du développement durable ; rappelons que la démarche d’agriculture durable est dynamique et qu’elle s’inscrit dans un progrès continuel en adéquation permanente avec le contexte global du moment.

Le classeur « Approche globale en élevage en pays basque » en est un bon exemple : il regroupe l’expérience de plusieurs années de travail sur l’approche globale de l’exploitation en passant par la qualité, du sol au produit final. Il rassemble une démarche de recherche fondamentale appliquée et validée par des groupes d’agriculteurs. Cet outil pédagogique pourra servir de base à la production commune d’outils spécifiques à la moyenne montagne.

La gestion optimisée de l’herbe : cette méthode portée par la FRCIVAM Limousin permet de s’affranchir de la variable altitude pour conseiller l’agriculteur dans la conduite de ses pâturages. Les « degrés-jours » nécessaires à la pousse de l’herbe, et appliqués à la méthode de gestion de l’herbe dite méthode « Voisin », permettent d’aboutir à un outil pratique pour l’agriculteur. Cette méthode devra être étendue et partagée à travers les territoires de moyenne montagne afin de diminuer globalement la dépendance aux intrants (cf. Annexe 4).

L’approche de la diversification des activités et des productions : actions menées par différents groupes à l’échelle des massifs de montagne, les aspects de valorisation des produits en circuits courts via parfois la transformation à la ferme, ou les démarches de production de biomatériaux pour l’éco construction, les nouvelles têtes de rotation des cultures et les assolements diversifiés permettant des économies d’intrants, une lutte intégrée voire biologiques contre les ravageurs des cultures, l’amélioration de la structure du sol et donc de la fertilité… sont autant de thèmes qui favorisent

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globalement la durabilité des systèmes de production, par la voie économique et/ou par la voie socio territoriale. •

La traction animale en systèmes maraîchers ou notion de cheval territorial : approche typique de certains groupes de Rhône-Alpes autour des aspects énergétiques, mais aussi sur le redéploiement du line social au sein des communes. Collecte des déchets, services divers rendus comme l’entretien de l’espace grâce à la traction animale sont autant d’activités particulièrement bien perçue par les habitants des communes qui en bénéficient. Le débardage en zone de montagne à l’aide de chevaux de trait constitue également un atout non négligeable pour un entretien respectueux des milieux en fermeture, et pour une gestion durable de la forêt.

L’approche sociale de la production agricole : l’accueil de personnes âgées ou dépendantes par des groupes d’Auvergne ou de Midi-Pyrénées constitue une approche socio territoriale intéressante dans le but de redéployer du service à la personne en milieu rural ou de recréer du lien inter générationnel. L’accueil éducatif autour de la démarche d’agriculture durable est également un service rendu aux scolaires prometteur qui demande à être un peu plus cadré et développé en lien avec les référentiels de formation notamment.

Enfin, les actions en faveur de l’approvisionnement des restaurations collectives : particulièrement initiées en Midi-Pyrénées, ces actions développées avant même le Grenelle de l’Environnement, sont aujourd’hui très favorablement accueillies.

VIII – Les suites à donner au projet Suite à cette étude, les groupes impliqués dès le départ, de même que d’autres ayant hésité au départ et suivi malgré tout le développement du projet, se sont réunis afin d’évaluer la possibilité de développer un programme pluriannuel d’actions en faveur de la durabilité des exploitations et des territoires de moyenne montagne. Ce programme a été décliné selon les éléments de contexte suivants :

1 – Eléments de contexte interne : La moyenne montagne se décline au niveau du Massif Central par une diversité importante de territoires. L’agriculture de ces territoires, même si elle est essentiellement tournée vers les systèmes d’élevage, se décline également de façon diversifiée en ce qui concerne les systèmes de production. Aussi, les réponses apportées par les agriculteurs CIVAM au sein de ces territoires s’avèrent à la fois pertinentes et innovantes. Les résultats aux diagnostics de durabilité effectués sur les territoires de moyenne montagne (93 exploitations soumises à analyse statistique en 2008-2009) montrent que leur implication en faveur du respect de l’environnement est particulièrement pertinente avec des résultats supérieurs à 90 sur 100 points possibles. Au niveau socio territorial, les résultats sont beaucoup plus hétérogènes et incitent à mutualiser davantage d’actions innovantes entre les différents groupes concernés. Enfin en termes économiques, les niveaux de durabilité des groupes ou des agriculteurs impliqués dans le programme ADMM présentent une extrême variabilité qu’il convient de comprendre en vue de les améliorer. C’est pourquoi, le réseau CIVAM se propose de lancer un programme interrégional à l’échelle du massif du Massif Central, d’actions pertinentes et innovantes eu égard aux enjeux de durabilité des territoires du massif, tout en favorisant une amélioration de la durabilité des systèmes de production agricole. Aux différentes échelles agro écologique, socio territoriale et/ou économique, les réponses apportées sont toujours très différentes et adaptées aux contextes territoriaux. C’est pourquoi il convient de mutualiser les approches, les ressources et les expériences par la capitalisation en vue de faire évoluer les systèmes de production vers davantage de durabilité, en adaptant les pratiques aux contextes socio territoriaux. Par ailleurs, est apparue la nécessité d’approfondir la réflexion au niveau environnemental par la mise en place d’expérimentations s’articulant autour de l’optimisation de l’utilisation des agro ressources territoriales (cas des prairies humides, de la valorisation des landes et pelouses sèches, du bois énergie…). Enfin, et c’est probablement l’enjeu majeur pour les agriculteurs investis, ainsi que pour le maintien d’un tissu rural dense (garant d’une bonne transmission des exploitations et favorisant l’installation de jeunes dans l’activité agricole des territoires de moyenne montagne), l’entrée économique se fera par la Valeur Ajoutée qui reste sur les exploitations et sur les territoires, et par l’optimisation des ressources socio territoriales.

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Ces approches devront être interprétées au travers des résultats économiques qui feront le lien entre pratiques agricoles, implications sociales, respect de l’environnement, valorisation des ressources des territoires, impacts énergétiques… D’un tout autre aspect, les CIVAM sont des structures fonctionnant en totale indépendance les unes des autres. La tête de réseau qu’est la FNCIVAM a pour rôle de fédérer les différentes approches sous une approche plus globale mettant en évidence la pertinence des actions menées sur le terrain. Dans ce cadre, il a été identifié un potentiel de développement très intéressant sur ces mêmes territoires. En effet, les initiatives des différents groupes peuvent être partagées et développées sous des angles et des contextes différents; ce, dans l’optique de valoriser ces initiatives à une plus grande échelle géographique et socio professionnelle. Il apparaît donc nécessaire de mutualiser les expérimentations pour initier une mise en réseau des groupes et des partenaires, afin de faire profiter des acquis territoriaux au plus grand nombre d’agriculteurs pour améliorer la durabilité de leurs systèmes. L’objectif du programme « Agriculture Durable de Moyenne Montagne » de la FNCIVAM est donc de favoriser l’émergence d’un fonctionnement en réseau des groupes de moyenne montagne en vue d’améliorer leur efficacité sur le terrain au bénéfice de la durabilité des exploitations. Enfin, il est également nécessaire de produire des références sur ces systèmes de production pour fournir des documents pertinents aux différents acteurs du développement agricole et rural, pour permettre un développement durable des territoires de moyenne montagne en lien avec leurs enjeux propres.

2 – Eléments de contexte externe (dépassant le cadre des territoires) : Grenelle de l’Environnement (Déploiement d’une agriculture plus durable, réduction de l’usage des pesticides de moitié, développement d’une économie de proximité via une alimentation plus saine (en partie issue de l’agriculture biologique), saisonnée et locale, augmentation des surfaces en AB, trames verte et bleue, plan de performances énergétiques des exploitations, certification HVE…) Le déploiement d’une agriculture plus durable à l’échéance 2020 passe parle rappel de la définition de celle-ci en regard des 27 principes de la Déclaration de Rio de Janeiro en 1992. Celle-ci doit être économiquement viable, socialement équitable et écologiquement acceptable. Cela passe donc nécessairement, et entre autres, par une réduction massive de l’usage de pesticides en rapport avec une alimentation plus saine, de qualité, plus saisonnée et en partie issue de l’Agriculture Biologique. Cette agriculture doit également anticiper les changements nécessaires de modèles agricoles basés sur la dépendance aux intrants, et s’appuyer sur les ressources propres des territoires en focalisant sur la complémentarité des systèmes et l’optimisation des ressources. C’est également à ce titre (d’une approche territoriale de l’agriculture) qu’il sera possible d’établir les trames verte et bleue, en lien avec la certification « HVE » des exploitations agricoles. Contexte énergétique mondial et ses conséquences économiques notamment sur les intrants agricoles et les consommations énergétiques ; l’entrée GES… L’épuisement des ressources fossiles va, de fait, engendrer cette remise en cause des modèles de production agricole et même de développement. Le cas du pétrole est ses conséquences sur les prix des engrais azotés, des aliments du bétail, des surfaces à cultiver par actif…en est un exemple frappant. Le cas de l’épuisement des ressources en phosphore, moins médiatisé, en est un autre qui risque également d’avoir des conséquences importantes sur nos modèles. Il convient donc de favoriser la transition vers des modèles plus autonomes et centrés sur les potentialités agronomiques territoriales. Dans un autre ordre d’idées, et du fait du contexte réduction des émissions de GES à l’échelle mondiale, européenne, française, il est indispensable de valoriser les systèmes de production faiblement émetteurs (systèmes économes, autonomes, pâturants… en moyenne montagne : stockage de carbone dans les prairies permanentes et/ou de longue durée, réduction des apports d’engrais minéraux et des pesticides, réduction des achats d’aliments du bétail, réduction des consommations de carburants…) et d’en produire les références pertinentes nécessaires à leur développement, à leur soutien. Relocalisation de l’économie et contribution à l’équilibre alimentaire mondial (dépendance énergétique et protéique de l’UE, relocalisation des consommations, le rejet citoyen des OGM…) Dans le même ordre d’idées, afin de réduire les dépendances énergétique et protéique, il apparaît nécessaire de relocaliser une grande partie des consommations intermédiaires (intrants) des systèmes de production agricole. C’est le cas par exemple des aliments du bétail (env. ¼ des consommations énergétiques en productions

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animales). En effet, depuis les accords de Bretton Woods, puis du Dillon Round du GATT et enfin de Blair House en 1992, l’Union Européenne est très dépendante des importations de protéines à destination de l’alimentation animale (77% de déficit depuis la réforme de la PAC de 2003). Cela se traduit par l’importation massive de tourteaux de soja (20 à 25 millions de tonnes/an) en échange d’une spécialisation de l’UE vers l’exportation de céréales qui viennent concurrencer les agricultures familiales mondiales par du dumping (relance récente des soutiens à l’exportation pour les céréales, les produits laitiers). La monoculture de soja ainsi induite (+500% en 35 ans) dans les pays du continent américain a ainsi des conséquences humaines, environnementales et sanitaires graves. Il convient donc dans un esprit de citoyenneté de s’affranchir de ces modèles énergivores de migration mondiale des matières premières et de permettre un développement plus cohérent des territoires. C’est en partie par le déploiement d’une agriculture plus autonome et centrée sur ses potentialités propres qu’on peut contribuer à limiter ces impacts. Par ailleurs, l’emploi local rural est largement déterminé par la valorisation des ressources propres des territoires en favorisant le maintien de la Valeur Ajoutée sur les exploitations et sur les territoires. Il convient alors de favoriser l’émergence de filières et micro filières locales basées, entre autres, sur les agro ressources locales comme le « bois énergie », les « biomatériaux », ou encore les filières alimentaires locales. Perte généralisée de biodiversité (en lien avec la trame verte et maintien sur les zones dites remarquables HVN) Les systèmes de production agricole de moyenne montagne se caractérisent par des niveaux de maintien de la biodiversité intéressants. Le cas des systèmes herbagers en est un exemple frappant : les prairies permanentes, en plus de leur potentiel de stockage de carbone, sont sources de biodiversité ; les prairies humides, dans la mesure ou elles ne sont pas drainées, sont également un réservoir non négligeable ; le paysage bocager qui va de pair constitue, quant à lui, un entrelacement d’infrastructures agro écologiques. Les territoires de moyenne montagne sont également corrélés de manière étroite avec les zones HVN (à Haute Valeur Naturelle) définies par l’Union Européenne, et il est important de préserver au maximum des pratiques respectueuses et des systèmes de production peu intensifiés sur ces zones. Les systèmes trop artificialisés à base de stocks sont en effet très impactant sur la biodiversité (apports d’engrais minéraux importants, fauches en période de couvaison, simplification des assolements, usage de pesticides…), alors que les systèmes basés sur le pâturage favorisent le maintien, voire, dans certains cas, le redéploiement de la biodiversité. Bilan de santé de la PAC et révision en 2013 (réduire la dépendance aux aides publiques des agriculteurs dans une anticipation de la réduction de l’enveloppe française et indépendance vis-à-vis des lobbies en place) La plupart des structures d’exploitation des zones de montagne sont moins aidées par les aides publiques (1er pilier) de la PAC. Aussi, il est nécessaire d’anticiper dès maintenant la baisse prévue des soutiens en 2013. Les petites et moyennes exploitations trouvent souvent leur salut dans la diversification des activités et des productions, et par leur implication territoriale. Il convient donc de favoriser l’émergence de tels systèmes, diversifiés donc moins fragiles économiquement et potentiellement pourvoyeurs d’emplois, et ancrés sur leurs territoires et donc potentiels acteurs du développement.

3 – Présentation des objectifs et du travail proposé Le programme d’actions prévu sur la période 2010-2012 répond à la thématique générale suivante, et propose donc le titre du projet :

Optimisation de l’utilisation des agro ressources des territoires et amélioration de la Valeur Ajoutée des systèmes agricoles de moyenne montagne Sous cette thématique générale, se déclinent deux finalités : • Faire évoluer les exploitations agricoles vers plus de durabilité : en favorisant l’adaptation des systèmes de production agricole aux contextes socio territoriaux et environnementaux ; • Sensibiliser les élus agents de développement et apprenants du Massif Central sur l’agriculture durable de moyenne montagne : par la production de documents adaptés aux différents publics cibles après évaluations (documents de vulgarisation, documents techniques, site Internet dédié…)…), par la mise en place de formations, par la production de références, par des interventions ciblées….

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Afin de répondre à ces deux finalités, trois axes de travail principaux ont été identifiés lors du comité de pilotage, et chacun d’eux est décliné en objectifs opérationnels :

1 - Mise en réseau des groupes AD de moyenne montagne : mutualisation des ressources et expériences par la capitalisation (pertinentes pour la durabilité des fermes et/ou pour le développement du territoire). Chaque groupe d’agriculteurs fonctionne de manière autonome sur son territoire et sur les thématiques qui lui semblent pertinentes en lien avec leurs objectifs. Aujourd’hui, chacun des groupes et animateurs doit pouvoir bénéficier des avancées des autres, de s’en saisir et éventuellement de l’appliquer sur son territoire, voire de l’adapter. Aussi, il convient de permettre une mise en relation de ces structures afin de capitaliser leurs expériences. Celles-ci seront déchiffrées au regard des enjeux des territoires de moyenne montagne et devront être soumises à une évaluation rigoureuse en termes de durabilité. Il s’agira ensuite à partir des données recueillies de caractériser par couple Territoire / Systèmes de production, des systèmes durables sur lesquels se baser pour organiser le transfert de pratiques. Le tout devant, à terme, fonctionner de façon vertueuse : Innovation – Evaluation/pertinence – Transfert/Territoires – Evaluation…

Objectif Opérationnel 1 : Rendre plus efficaces les actions de développement Création et mutualisation de documents ressources : méthodes d’accompagnement, protocoles expérimentaux, programmes de formation, outils pédagogiques… Objectif opérationnel 2 : Evaluation des pratiques pour amélioration à partir d'outils d'évaluation existants (diagnostics IDEA, PLANETE, DIALECTE, indicateurs HVE…) et création de nouveaux outils (indicateurs de liens économiques, indicateurs territoriaux…) Objectif opérationnel 3 : Caractérisation de l’agriculture et de sa durabilité sur les différents territoires. Echanges sur les diagnostics de durabilité, mais aussi énergétiques, environnementaux. Validation et typologies des systèmes concernés. Appui au programme « Indicateurs » de la FNCIVAM… Objectif opérationnel 4 : Adaptation de pratiques innovantes. Appropriation des pratiques innovantes par chaque territoire (Transfert). Création et mutualisation de fiches ressources par la capitalisation des différentes initiatives. Formations collectives, individuelles, visites d’échange…

2 – Optimisation des initiatives des groupes La recherche constante d’innovation en lien avec les enjeux territoriaux, ainsi que la prise d’initiative par les agriculteurs, doivent être encouragées. En parallèle, ces derniers doivent être accompagnés en vue d’évaluer la pertinence de leurs actions. Ceci implique alors un minimum de suivi par les animateurs sur le terrain, ou par des partenaires ou prestataires extérieurs ayant le niveau de compétences requis. Il est également nécessaire de disposer de méthodologie(s) commune(s) en vue d’améliorer l’efficacité des initiatives sur l’ensemble des territoires. Il est également indispensable de s’appuyer sur la recherche (INRA, CEMAGREF…) et autres structures institutionnelles ou associatives (ADEME, SOLAGRO…) afin de mettre en place des protocoles expérimentaux qu’il conviendra de mutualiser.

Objectif opérationnel 5 : Accompagner les expérimentations (propres aux groupes ou issus du transfert). Objectif opérationnel 6 : Poursuivre et accompagner les recherches d'innovations des groupes par de la méthodologie et du protocole Objectif opérationnel 7 : Créer de nouvelles références locales pour alimenter la dynamique de mise en réseau à partir des expérimentations

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3 – Production de références et sensibilisation : Valorisation des démarches d’AD en moyenne montagne en direction des agriculteurs, des élus, des apprenants de l’enseignement agricole, et des organismes de recherche La valorisation des initiatives pertinentes eu égard aux enjeux des territoires, évaluées avec un regard pertinent aux yeux des professionnels du développement agricole, des élus…est déterminante. Il s’agit en effet, de permettre une réelle diffusion du savoir CIVAM au sein des territoires de moyenne montagne pour une réelle évolution des systèmes de production vers davantage de durabilité. L’enjeu est ici de taille : • Rendre lisible les actions du réseau ADMM pour les agents de développement ; • Fournir des documents techniques en lien avec des pratiques « durables » aux enseignants techniques ; • Mettre en place des formations à destination des agents de développement et enseignants • Sensibiliser le grand public aux systèmes de production et donc aux produits issus de systèmes « durables » ; • Montrer la pertinence des pratiques par rapport aux enjeux territoriaux, à destination des élus • Produire des références technico-économiques, environnementales… en vue d’alimenter le fond des systèmes reconnus de référence et permettre les comparaisons • Sensibiliser les agriculteurs à l’adaptation des pratiques • Permettre aux animateurs d’accompagner le changement de pratiques… Il est par ailleurs important de pouvoir apporter ce genre de références à la recherche pour alimenter leurs questionnements sur l’agriculture agro écologiquement performante, l’agriculture en contexte de Haute Valeur Naturelle… de mettre à contribution ces mêmes exploitations sur les thématiques HVE, PPE… Aussi, il convient d’aider la mise en relation entre les innovateurs/précurseurs et la recherche en favorisant le développement de protocoles expérimentaux. Enfin, la création d’un site Internet dédié à l’Agriculture Durable de Moyenne Montagne permettant la diffusion du savoir, les échanges thématiques internes et externes, les échanges techniques entre agriculteurs…viendra apporter sa pierre à l’édifice.

Objectif Opérationnel 8 : Valorisation des démarches d’AD en moyenne montagne à destination du grand public Objectif opérationnel 9 : Sensibilisation agri/apprenants Création et diffusion de documents techniques, organisation de journées portes ouvertes « professionnels » et apprenants de l’enseignement agricole sur des fermes identifiées « durables », formations pour les agents de développement, et action spécifique à destination des enseignants techniques de l’enseignement agricole (proposition de documents techniques et formations continues d’enseignants). Objectif opérationnel 10 : Sensibilisation élus Concevoir des documents de synthèse et de sensibilisation à la durabilité des exploitations agricoles et des territoires. Organiser la stratégie de communication en direction des élus locaux (par la pertinence des actions eu égard aux enjeux des territoires, et éventuellement par des visites de terrain témoignant de la plus-value territoriale) Objectif opérationnel 11 : Tisser des liens avec la recherche Développer des partenariats avec la recherche en vue, à termes, de concevoir des méthodologies d’expérimentations (accompagnement scientifique des expérimentations). Transfert d’informations aux organismes de recherche

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Conclusion Les diagnostics de durabilité appliqués à ces 93 systèmes de production de différents territoires de moyenne montagne sur le Massif Central ont permis de jeter les bases de travail sur la thématique de l’Agriculture Durable. La mise en place d’un réseau d’animateurs et de leurs groupes d’agriculteurs permet d’envisager l’avenir relativement sereinement. En effet, la découverte pour certains d’entre eux, des expériences et initiatives de chacun des groupes concernés a permis de mettre en place une réflexion à une échelle inter régionale et de solliciter l’envie de progresser ensemble sur le terrain de la durabilité. Les résultats IDEA obtenus identifient les pistes de progrès et les points forts et faibles des systèmes CIVAM enquêtés. La dimension environnementale est, sans nul doute, le point d’ancrage sur lequel se reposer pour progresser. Que les exploitations soient engagées dans une démarche d’agriculture biologique ou non, l’approche ancienne du respect de l’environnement des agriculteurs CIVAM doit rester un des fondements de la dynamique de durabilité des systèmes agricoles. Cet aspect est d’autant plus important en territoires de moyenne montagne que ceux-ci présentent une forte préservation des ressources naturelles. Le facteur limitant de la durabilité est sans conteste la dimension économique, à l’instar de nombreuses exploitations de taille moyenne en zones de montagne. Cependant, les formes d’agricultures diverses identifiées montrent les progrès possibles des uns et des autres en organisant la mutualisation des acquis réciproques. La démarche d’économie d’intrants semble être une piste reconnue par tous et pertinente eu égard aux contextes et aux enjeux des moyennes montagnes. De plus, les interdépendances entre diversité domestique, résultats économiques, valorisation des ressources locales… montrent qu’il est vraiment pertinent d’associer cette réflexion d’économie d’intrants dans une approche plus globale combinant également les aspects socio territoriaux. La mutualisation des expériences, par la capitalisation, la formation et le transfert d’initiatives, doit permettre d’envisager une progression collective des groupes CIVAM de moyenne montagne. L’approche territoriale doit par ailleurs être approfondie via un partenariat avec la recherche et des universitaires en vue d’évaluer les impacts de ces activités agricoles sur les territoires et leur développement. Ces aspects doivent aussi faire l’objet d’une politique de communication à destination de divers publics et notamment ceux de l’enseignement agricole et ceux du développement agricole et rural. Dans l’ensemble, le niveau de durabilité des exploitations CIVAM de moyenne montagne est tout à fait satisfaisant. Les plus fragiles sont incontestablement celles qui se sont orientées vers les modèles de plaine qui gagnent de l’altitude et se diffusent sur les pentes des montagnes. Il semble que l’identité des systèmes de production de moyenne montagne soit très influente sur les résultats. L’adéquation entre logique de typicité montagnarde et lien fort avec la plaine pour la valorisation des produits est un atout non négligeable, en favorisant le maintien de la valeur ajoutée sur les exploitations et les territoires. La valorisation des ressources locales est alors un élément majeur dans les systèmes durables, et ce aussi bien au niveau économique que socio territorial. La montagne regorge de ressources et de potentialités qui lui sont propres. La durabilité de ses territoires passera par l’optimisation de leur utilisation et non par l’adaptation maladive et forcée de « modèles » de plaine eux-mêmes fragilisés dans un contexte global peu favorable. L’orientation devrait être celle de l’affirmation de la typicité des moyennes montagnes, dans une logique de maximisation de la valeur ajoutée par le biais de diversifications, de l’économie et de l’autonomie avec un regard constamment tourné vers la plaine. L’évolution de la Politique Agricole Commune aura sans nul doute une influence sur l’évolution même des systèmes de production de moyenne montagne, et cette typicité aura-t-elle droit de regard auprès des décideurs ? Rien n’est moins sûr. Il faut aujourd’hui proposer une réelle approche territoriale de l’agriculture, au risque de la voir progressivement décliner en zones de montagne si on veut la plier et la contraindre aux modèles de production inféodés à la productivité maximale. Les territoires de moyenne montagne sont encore préservés et l’agriculture y est largement contributrice, elle doit s’affirmer dans une logique propre en lien avec les potentialités réelles des sols, des climats et des hommes présents. La pugnacité montagnarde devrait alors être un facteur favorable à l’expression d’une agriculture durable de moyenne montagne.

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ANNEXES Liste des annexes

1. Présentation de la grille IDEA et du document d’enquête IDEA 2. Présentation du diagnostic de durabilité du Réseau Agriculture Durable (RAD, Civam national) 3. Présentation du diagnostic de l’Agriculture Paysanne (d’après FADEAR) 4. Fiche « PACAUD » : « Produire autant sans engrais : c’est possible »

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ANNEXE 1 : Description de la grille IDEA D’après www.idea.portea.fr

Les objectifs de durabilité

La méthode IDEA est construite autour d’indicateurs censés favoriser un ou plusieurs objectifs de l’agriculture durable. Ces objectifs concernent soit la gestion ou la protection d’une ressource naturelle (eau, air, sol, biodiversité, paysage et gisements miniers), soit des valeurs sociales caractéristiques d’un certain niveau de civilisation et qui sont implicites dans l’agriculture durable (l’éthique, la qualité, la citoyenneté…). À cet effet, une colonne «objectifs » désigne, pour chaque indicateur, les principaux objectifs indirectement poursuivis. Ils servent de guides pour comprendre et interpréter l’indicateur.

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Les objectifs de l’échelle de durabilité agroécologique se réfèrent aux principes agronomiques de l’agriculture intégrée (ou agroécologie). Ils doivent permettre une bonne efficacité économique pour un coût écologique aussi faible que possible. Les objectifs de l’échelle de durabilité socioterritoriale se réfèrent davantage à l’éthique et au développement humain qui sont des caractéristiques essentielles des systèmes agricoles durables. Quant aux objectifs de l’échelle de durabilité économique, ils précisent des notions essentielles en lien avec la fonction entrepreneuriale de l’exploitation. Un même objectif peut participer à l’amélioration de plusieurs composantes de la durabilité.

Echelles, composantes et indicateurs

La grille IDEA comporte trois échelles de durabilité, de même poids et variant de 0 à 100 points: l'échelle de durabilité agroécologique, l'échelle de durabilité socio-territoriale et l'échelle de durabilité économique.

Chaque échelle de durabilité est subdivisée en trois ou quatre composantes (soit 10 composantes au total) qui synthétisent les grandes caractéristiques du diagnostic de durabilité.

Chaque composante regroupe plusieurs indicateurs qui sont eux-mêmes constitués d'un ou plusieurs items élémentaires caractérisant une pratique (ou une caractéristique) et contribuant à la valeur finale de l'indicateur. On compte ainsi, dans la Grille IDEA (version 3), un total de 42 indicateurs répartis dans 10 composantes et agrégés sous 3 échelles de durabilité.

Note de durabilité La note globale de durabilité obtenue représente la note minimale obtenue sur les trois dimensions. Celle-ci correspond en effet au facteur limitant de la durabilité, c’est-à-dire à l’échelle la plus faible des trois.

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Diagnostic de Durabilité Mars 2001 Nom : Prénom : Période comptable :

Date du diagnostic : Commune : Tel :

DURABILITE ECONOMIQUE

N° CRITERES

1

2

3

4

Efficacité économique

Autonomie

Efficacité technique

Taux de spécialisation

MBG/PB

coût ali.*/produit

PB /PB total

cg struc/PB

primes/EBE

sup à 80% 75 à 80% 70 à 75% 65 à 70% 60 à 65% inf à 60%

sup à 50% 45 à 50% 40 à 45% 35 à 40% 30 à 35% inf à 30%

sup à 45% 35 à 45% 25 à 35% 15 à 25% 5 à 15% inf 5%

indicateurs EBE/PB Valeur** 0 inf à 20% 1 20 à 30% 2 30 à 40% 3 40 à 50% 4 50 à 60% 5 sup à 60% NOTE

inf à 25% 25 à 40% 40 à 55% 55 à 70% 70 à 85% sup à 85%

5

6

Contraintes Sensibilité aux aides structurelles

7

8

Autonomie financière

Efficacité du capital

annuités/EBE

EBE/ capital

sup à 60% 50 à 60% 40 à 50% 30 à 40% 20 à 30% inf à 20 %

Efficacité économique 5 Efficacité du capital

4

Autonomie

3 2 1 Autonomie financière

0

Sensibilité aux aides

Efficacité technique

Taux de spécialisation

Contraintes structurelles

*ou indice de consommation ou charges opérationnelles

**inscrire les résultats de l'exploitation diagnostiquée.

Diagnostic de durabilité du Réseau Agriculture Durable

inf à 15% 15 à 20% 20 à 25% 25 à 30% 30 à 35% sup à 35%


DURABILITE SOCIALE EBE/PB

1

2

3

4

5

N° CRITERES

Occupation du territoire

Qualité de vie

Viabilité socioéconomique

Vivabilité

Transmissibilité

Indicateurs

SAU/Actif

qualité de vie

Valeur 0 1 2 3 4 5 NOTE

sup à 40 35 à 40 30 à 35 25 à 30 20 à 25 inf à 20

0 1 2 3 4 5

R disponible/ sur et autour de la capital (en euros)/ actif/h de travail ferme actif en % du SMIC

inf à 0,4 SMIC 0,4 à 0,8 SMIC 0,8 à 1,2 SMIC 1,2 à 1,6 SMIC 1,6 à 2 SMIC sup à 2 SMIC

0 1 2 3 4 5

> à 190 K 160 à 190 K 130 à 160 K 100 à 130 K 70 à 100 K < à 70 K

6

7

Multifonctionnal Contribution à ité l'emploi

analyse des pratiques

moyens de production sur équivalent PAD

0 1 2 3 4 5

>1 0,95 à 1 0,90 à 0,95 0,85 à 0,90 0,80 à 0,85 < à 0,80

Occupation du territoire 5 4

Contribution à l'emploi

3

Qualité de vie

2 1 0

Multifonctionnalité

Transmissibilité

Viabilité socio-économique

Vivabilité

- Qualité de vie (mots clés) : - Multifonctionalité : - Dynamique agricole locale : - Diversification, valorisation des produits (Cahier des charges, Agriculture Biologique, Vente directe...) :

Diagnostic de durabilité du Réseau Agriculture Durable


DURABILITE ENVIRONNEMENTALE 1

2

3

4

5

N° CRITERES

Bilan des minéraux

Pesticides

Linéaire de haies

Gestion du paysage

Diversité culturale

Indicateurs

N/Ha de SAU

pression polluante

linéaire haies m/Ha/SAU

analyse des pratiques

surfaces assolées

% sol nu en hiver/SAU

présence d'écoulements

Valeur 0 1 2 3 4 5 NOTE

> 100 80 à 100 60 à 80 40 à 60 20 à 40 < 20

0 1 2 3 4 5

0 1 2 3 4 5

sup à 25% 20 à 25% 15 à 20% 10 à 15% 5 à 10% 0 à 5%

0 1 2 3 4 5

>1 inf à 20m 0,75 à 1 20 à 40m 0,5 à 0,75 40 à 60m 0,25 à 0,5 60 à 80m 0 à 0,25 80 à 100m 0 sup à 100 m

6

Protection des Gestion des sols écoulements

Bilan des minéraux 5 4

Gestion des écoulements

3

Pesticides

2 1 0

Protection des sols

Diversité culturale

7

Linéaire de haies

Gestion du paysage

- Fertilisation azotée et bilan des minéraux : - Irrigation, plasticulture : - Dépendance énergétique :

Diagnostic de durabilité du Réseau Agriculture Durable


COMMENTAIRES Atouts :

Contraintes :

Autres remarques :

Objectifs de l'agriculteur : A court terme :

A long terme :

Diagnostic de Durabilité fait par : Diagnostic de durabilité du Réseau Agriculture Durable


Annexe : Exemple de grille de l’agriculture paysanne Source : www.fadear.org

Plafonds

Vous

C1 Autonomie

60 pts

45 pts

75% 1

C2 Transmissibilité

40 pts

23 pts

57% 1

C3 Répartition

60 pts

45 pts

75% 1

40 pts

23 pts

56% 1

C5 Qualité des produits

40 pts

23 pts

57% 1

C6 Travail avec la nature

60 pts

37 pts

61% 1

C4 Développement local, dynamique territoriale

TOTAL

C1 Autonomie

C2 Transmissibilité

65% 1


C4 DĂŠveloppement local, dynamique territorial

C5 QualitĂŠ des produits

C6 Travail avec la nature


CORREZE, Brignac La plaine, 100 m d’altitude.

Produire autant sans engrais : c’est possible L’EXPLOITATION : Patrice s’installe en 1999 avec un atelier horticole et avec 40 brebis sur 15 ha. En 2003, il décide d’arrêter l’horticulture pour développer l’atelier ovin, il reconvertit ainsi ses serres en bergerie. Il souhaite alors s’améliorer techniquement afin d’intensifier sa production sans augmenter sa SAU et en limitant sa consommation d’intrants. Il met la gestion de l’herbe en place dès 2003 car son atelier ovin ne cesse de grossir. En 2005, le chargement est de 1,92 UGB par hectare de SFP. Patrice arrive avec une gestion pointue de l’herbe à se dégager une surface suffisante pour constituer ses stocks sans employer d’engrais chimique. En 2006, il augmente son troupeau et sa surface (+13 ha) et décide de cultiver des céréales/protéagineux pour devenir autonome en aliment. La céréale est récoltée en entraide, Patrice n’a donc pas de charge supplémentaire de matériel .

Patrice PACAUD, exploitation individuelle, en ovin viande, agneaux de bergerie.

Finalités : Garantir le revenu en minimisant les charges Avoir du temps libre

EVOLUTION DU SYSTEME SAU Prairies Céréales Culture de vente Brebis mères Agnelles Agneaux vendus Réformes Chargement approximatif /ha SFP

2003 15 15 0 0 105 25 135 10 1,44

2004 15 15 0 0 120 30 158 15 1,66

2005 15 15 0 0 135 35 175 10 1,92

2006 28 26 2 0 160 50 205 10 1,32

2007 30 26 4 0 200 50 265 50 1,59

Dés 2003, Patrice augmente son troupeau : il réforme moins et conserve plus d’agnelles ; le système est en constante évolution. Le chargement augmente jusqu’en 2006, et dès l’augmentation de sa surface, Patrice retrouve un chargement environ équivalent à 2003.

MODIFIER SON SYSTEME POUR AMELIORER SES RESULTATS Efficacité technique Efficacité de la surface

149 90 58 56 17

355 423 453 281 386

Litre de fioul/ha 41 40 39 40 40

Aucune modification de la consommation de fioul.

Réduire ses intrants sans réduire sa production

2003-2005 : augmentation du troupeau en vue de l’augmentation de surface. 2007 : l’exploitation arrive en rythme de croisière.

60

500

50

400

40 300 30 200 20 100

10 0

0 2003

2004

2005

Unité d'azote achetée/ha

En 2003, Patrice consomme 149 KG d’azote pour vendre 1 T de viande, et en 2007, il ne lui faut plus que 17 KG d’azote. Cela signifie qu’il produit 1 T de viande avec 8 fois moins d’azote acheté : il est plus efficace.

Kg vif vendu/ha

2003 2004 2005 2006 2007

Kg vif de viande vendu/ha

Unité d'azote achetée/ha

Kg d’azote entré/ T vive de viande vendue

2006

2007

kg vif de viande vendu/ha

En 2003, Patrice produit 355 kg/ha et en 2007, il produit 386 kg/ha. Pourtant, en 5 ans, Patrice diminue sa consommation de 45 U d’azote/ha.

Efficacité technique par poste En kg de N / T de viande vive vendue Engrais Aliments concentrés Foin Paille

TOTAL

2003

2004

2005

2006

2007

81 66 0 2 149

32 56 0 2 90

0 56 0 2 58

0 54 0 2 56

0 15 0 2 17

Patrice mène une réflexion sur l’ensemble de son exploitation. Il transforme progressivement son système et le rend plus économe et autonome.

2004 2005 : Diminution puis suppression des engrais chimiques sur la surface en herbe… … grâce à la mise en place du pâturage tournant. La gestion du pâturage est plus serrée ; tout le potentiel de l’herbe est valorisé : les animaux ne restent que 2-3 jours dans une parcelle avec un chargement de 30 UGB/ha, l’herbe est consommée rapidement, la repousse n’est pas pénalisée. Moins de gaspillage, moins de refus : Patrice libère de la surface, il augmente son chargement et supprime les engrais tout en conservant son autonomie fourragère.

… grâce à la valorisation du fumier : Sur l’herbe, Patrice emploie et valorise uniquement son fumier (8-10 T /ha). RAD Limousin. Références technicotechnico-économiques


2003

2007 : Diminution de 73 % des unités d’azote achetées pour les aliments…

… grâce à l’implantation puis autoconsommation d’un mélange céréales/protéagineux : Avec l’augmentation de sa surface, Patrice implante un mélange céréales/protéagineux pour être plus autonome en aliment : l’achat de concentrés pour les brebis est supprimé. (Patrice plante du pois afin de capter l’azote de l’air.) …. grâce au décalage de la période d’agnelage : Patrice va également, pour diminuer l’achat d’aliment, engraisser une partie de ses agneaux à l’herbe, il va donc corréler 1/3 de ses agnelages avec la pousse de l’herbe.

DES CONSEQUENCES ENVIRONNEMENTALES SIGNIFICATIVES : 2003

2004

2005

2006

2007

7 1 ,4

5 8 ,1

44,6

36,5

2 2 ,6

Une efficacité énergétique passant du simple au double 350

Le risque de pollution azotée des eaux diminue considérablement. PLANETE

2003

2004

2005

2006

2007

Efficacité énergétique

0 ,4 6

0 ,6 2

0,71

0 ,6 0

0 ,9 0

1,00

300

0,80

250 EQF/ha

Pâturage tournant, cultures pérennes, légumineuses, autonomie en protéine, permettent d’améliorer son bilan azoté et d’être moins excédentaire en azote.

200

0,60

150

0,40

100 0,20

50 0

Efficacité énergétique

BILAN AZOTE En unité d’azote par ha

0,00 2003

2004

Entrées en EQF/ha

2005 Sorties en EQF/ha

2006

2007

Efficacité énergétique

Chaque année, Patrice augmente son efficacité énergétique : moins d’engrais, moins d’aliments font que l’exploitation utilise moins d’énergie indirecte. Malgré une petite baisse en 2006 (qui s’explique par l’augmentation de la surface et du cheptel souche), l’efficacité énergétique est de 0,90 en 2007.

L’émission de gaz à effet de serre sur l’exploitation a donc fortement diminué depuis 2003.

TEMOIGNAGE de Patrice PACAUD « Le plus important sur mon exploitation est de gérer mon pâturage afin de faire des stocks de qualité, dans le but de limiter mes consommations d’aliments. Mes brebis commencent à pâturer fin février. J’ai un parcellaire très groupé (2 îlots), mais j’ai constitué des parcelles de 0,5 à 0,8 ha. En faisant tourner mes troupeaux rapidement sur ma surface (3-4 jours par parcelle), brebis et agneaux mangent toujours de l’herbe de qualité. J’améliore ensuite, la qualité de mon foin, en déprimant, ou en enrubannant. Un déprimage précoce ne fais pas chuter mon rendement et l’enrubannage me permet d’avoir une meilleure repousse estivale. Depuis 2006, je clôture mes parcelles à l’électrique, en fixe je mets 4 fils, et en mobile, j’utilise le Spider pour mettre 3 fils à la fois. Avant, les clôtures étaient en grillage barbelé, j’obtenais les mêmes résultats techniques, mais cette clôture (fixe) engendrait de grandes difficultés pour la fauche car toutes mes parcelles étaient de petite taille. J’ai la chance d’avoir une source d’eau en point haut, ainsi, par gravité et avec des abreuvoirs à niveau constant, je n’emmène pas d’eau sur mon premier ilot. Pour les pâtures du second ilot, j’ai dû aménager et disposer des points d’eau pouvant être utilisés pour plusieurs parcelles. J’utilise donc peu ma tonne à eau. Pour finir, je limite mes investissements, seul le matériel de fauche est en propriété, tous les autres travaux (labour, semis, fumure, moisson...) sont réalisés avec un voisin qui a le matériel. En contrepartie, je l’aide régulièrement, notamment pour la récolte de tabac et pour manipuler ses bovins. D’ailleurs, j’utilise 1 ou 2 chiens (border collie) pour déplacer les animaux. J’adhère à l’association ACUCT 19, Association Corrézienne des Utilisateurs de Chien de Troupeau. En conjuguant tous ses éléments, je limite mes charges et je facilite mon travail. »

L’AVENIR : Patrice envisage de faire de la vente directe pour éviter d’être totalement dépendant des marchés.

Il cherche à être le plus autonome possible, c’est pourquoi, en 2007, il implante 4 hectares de céréales/protéagineux et 0,5 ha de pois. Les achats de complémentaire (soja, orge, pois) seront ainsi minimisés voir supprimés en 2008.

Depuis 2003, Patrice entre dans la démarche agriculture durable, le système est de plus en plus économe en intrants et devient complètement autonome.

RAD Limousin. Références technicotechnico-économiques


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