Easymag ISCPA Lyon décembre 2014

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Novembre 2014

Confluence laboratoire de la ville intelligente VidĂŠoprotection Ces yeux qui vous observent

Transports

Lyon Sur les voies du futur


ÉDITO EN BONNE INTELLIGENCE DEPUIS L’ANTIQUITÉ, ELLE GARDE UN ŒIL BIENVEILLANT SUR SA VILLE. DES SIÈCLES QU’ELLE LA VOIT ÉVOLUER COMME ELLE REGARDE GLISSER LES EAUX DU RHÔNE ET DE LA SAÔNE EN SON SEIN. NOTRE-DAME DE FOURVIÈRE A CONNU LA SOIERIE, LES CANUTS, ET LA RÉSISTANCE. AUJOURD’HUI, C’EST UNE TABLETTE NUMÉRIQUE QU’EASY MAGAZINE DÉPOSE À SES PIEDS POUR EN FAIRE SA UNE. SYMBOLE D’UNE ÉPOQUE MAIS SURTOUT D’UNE VOLONTÉ POLITIQUE. DEPUIS LE DÉBUT DE SON PREMIER MANDAT, LE SÉNATEUR-MAIRE GÉRARD COLLOMB VEUT FAIRE DE LYON UNE SURDOUÉE. UNE ÉLÈVE PERFORMANTE DANS TOUTES LES MATIÈRES MODERNES. DES TRANSPORTS PLUS ÉCOLOGIQUES, DES RUES PLUS SÛRES, UNE CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE MIEUX MAÎTRISÉE, DES RÉSEAUX ET DES CONNECTIONS TOUJOURS PLUS DÉVELOPPÉS. BREF, UNE « VILLE INTELLIGENTE » AVEC, POUR LA REPRÉSENTER, UN BEL EMBLÈME NOMMÉ CONFLUENCE. QUARTIER FUTURISTE BÂTI SUR LES FONDATIONS D’UN RICHE PASSÉ INDUSTRIEL, IL SYMBOLISE CETTE VOLONTÉ DE SE TOURNER VERS L’AVENIR. CETTE ÉVOLUTION AMBITIEUSE DOIT PERMETTRE À LYON DE VIVRE AVEC SON TEMPS, VOIRE DE LE DEVANCER. MAIS SURTOUT, ELLE DOIT IMPÉRATIVEMENT SE FAIRE AU PROFIT DES LYONNAIS. LORSQU’ELLES SONT RAPIDES LES MUES S’ACCOMPAGNENT SOUVENT DU SENTIMENT TEMPORAIRE D’ÊTRE NU, PRESQUE DÉPOURVU. ALORS EASY MAGAZINE S’EST INTERROGÉ SUR LA PLACE DU CITOYEN DANS CETTE GRANDE TRANSFORMATION. L’IDÉE N’EST PAS D’OPPOSER L’HUMAIN À LA TECHNOLOGIE MAIS DE SE DEMANDER COMMENT ILS PEUVENT COHABITER SAINEMENT. JUSQU’OÙ LE SECOND PEUT SE METTRE AU SERVICE DU PREMIER SANS LE REMPLACER. SANS NOTION DE DÉPENDANCE OU D’OMNIPRÉSENCE. LES NOUVELLES TECHNOLOGIES SONT DE FORMIDABLES OUTILS SI, JUSTEMENT, ELLES DEMEURENT DES OUTILS. CE SONT ELLES QUI DOIVENT S’ADAPTER AUX CITOYENS ET NON L’INVERSE. C’EST ÇA L’INTELLIGENCE AU SERVICE DES LYONNAIS. TOUT METTRE EN ŒUVRE POUR LEUR FACILITER LA VILLE. LA RENDRE EASY. LA RÉDACTION

Romaric Haddou Marion-Ségolène Rédacteur en chef Chemin Perraudin Rédactrice en chef

Mathilde Solages Responsable photos et infographies

Julie Voisin Maquettiste

Lorenzo Calligarot Guillaume Fradin Responsable photos Rédacteur

Arthur Vernassière Secrétaire de rédaction

Baptiste Pierre Rédacteur

Léa Cardinal Secrétaire de rédaction

Jules Savouré Rédacteur

Lizzie Carboni Secrétaire de rédaction

Julien Damboise Rédacteur

Benjamin Logerot Rédacteur


SOMMAIRE

14. Focus

Confluence, le quartier du futur

04.

Qézako

28.

Somewhere

Smart city : Lyon la bonne élève

La ville intelligente existe vraiment

12.

30.

Des innovations à l’épreuve

Un axe LyonMontréalYokohama

Links

Crash test

06.

10.

Network

Move

Penser la mobilité de demain

9.

Best of

Les cinq meilleures applis

Directrice de la publication Isabelle Dumas Directrice de la rédaction Claire Pourprix Contact easy.iscpa@gmail.com

Twitter @EASYiscpa Facebook EASY Magazine Maquette inspirée de The Only

Lieu d’impression UPI René Cassin

24.

Les villes, plus connectées que jamais

Watch out

La ville aux 414 yeux

Remerciements Nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont accepté de nous répondre, ainsi que notre intervenante, Claire Pourprix.

Crédits photos Sauf mention contraire, toutes les photographies ont été réalisées par la rédaction.


QÉZAKO

COMMENT TU L’IMAGINES TA VILLE INTELLIGENTE ? ut plus to re d n e « R le accessib itadin » c le r u o p « Une circulation plus f luide »

« Une ville en phase avec son époque »

« Des transports à l’ urbanisme en passan t par les applications n umériques »

« Tout doit être pensé »

Et si on défInissait ?

sur le sol « Les hologrammes la vie à Part Dieu facilitent des citoyens »

« Se déplacer partout » « Réduire les émissions de gaz »

« Voitures électriques »

Ville intelligente

« Smart home » (ou appartement intelligent)

Adapté du terme anglais « smart city », il s’agit d’un type de développement urbain apte à répondre à l’évolution ou l’émergence des besoins des institutions, des entreprises et des citoyens. La ville intelligente comprend quatre critères : l’environnement, l’économie, le transport et la sécurité. Ce concept vise à améliorer la qualité de vie des citoyens, tout en respectant l’environnement.

C’est un réseau connecté contrôlable à distance. Ce système permet aux habitants de contrôler l’ensemble de leur foyer, sans être contraints de rester chez eux. Des capteurs sont répartis dans la maison ou l’appartement et envoient des signaux à une application mobile (téléchargeable via un smartphone ou une tablette). Le chauffage, le réseau électrique, le garage, la télévision ou la machine à laver sont alors réglables en un seul clic.


04 05

Un classement place Lyon à la 17e place des villes innovantes, au niveau mondial.

LES CLÉS D’UNE VILLE INTELLIGENTE OUBLIEZ LA SCIENCE-FICTION. DÉSORMAIS, LA VILLE INTELLIGENTE OU « SMART CITY » FAIT BIEN PARTIE DU MONDE RÉEL. « UNE MEILLEURE VILLE, UNE MEILLEURE VIE » : VOILÀ LE NOUVEAU DÉFI QUE SE SONT LANCÉS LES POLITIQUES.

E

lles n’ont pas fini d’évoluer. Les villes occupent 2 % de la surface du globe, concentrent 50 % de la population mondiale (2/3 en 2030) et sont responsables de 50 % des émissions de gaz à effet de serre. Il convient de trouver un traitement efficace à ces problèmes d’urbanisation, devenus une priorité mondiale. Alors, qu’est-ce qu’une ville intelligente ? Selon la définition la plus courante, il s’agit d’une agglomération bien pensée, écologique et facilitant la vie des habitants. Pour pouvoir être qualifiées ainsi, les villes doivent respecter plusieurs critères. Les innovations concernent quatre domaines principaux : l’environnement, l’économie, le transport et la sécurité. En juillet 2012, Thales (groupe spécialisé dans les technologies de l’information) réalise une étude sur « la ville du futur » et s’appuie sur deux points essentiels : la mobilité et la sécurité, caractéristiques principales d’une ville intelligente. La mobilité concerne les transports, qui doivent être plus habiles mais aussi un réseau efficace, une fluidité de circulation en ville, une économie d’énergie et enfin, une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Si la mobilité inclut plusieurs facteurs, les solutions de sécurité sont en lien direct avec le citoyen. Ces dernières prennent en compte les systèmes d’information, la lutte contre le terrorisme et les programmes de vidéo surveillance. Le tout est encore de trouver des solutions efficaces mais surtout durables. Un grand défi que s’est lancé Lyon il y a quelques années et dont les premiers effets se font déjà ressentir. Lyon, smart city de référence Rendre sa ville intelligente était un enjeu de taille pour Gérard Collomb, maire de Lyon. Celui qui disait il y a quelque temps vouloir « faire de Lyon une smart city de référence en misant sur l’innovation » peut être rassuré d’avoir relevé ce défi. Au niveau mondial, un organisme australien du nom de « 2thinknow Innovation Cities Global

Par Léa Cardinal

256 Index » classe Lyon à la 17e place des villes les plus innovantes au monde. L’année dernière, c’est au tour de l’opérateur M2ocity de dévoiler son classement des villes les plus intelligentes. Le calcul est fait en fonction de huit critères, dont le cadre de vie, la maîtrise de l’énergie, la gestion de l’eau ou les bâtiments intelligents ; un classement qui donne Lyon vainqueur. Les efforts passent par les transports (imaginer de nouveaux appareils innovants qui fluidifient la circulation), l’urbanisme (en repensant les bâtiments et les endroits publics), l’énergie (avec de nouveaux compteurs électriques), la sécurité (en déployant plus de moyens de vidéosurveillance) et par les nouvelles technologies. Par ce dernier point, comprenez toutes les applications, disponibles sur votre smartphone (à retrouver dans notre best of, page 9) et votre ordinateur. La capitale des Gaules est aujourd’hui bien au point sur ce plan, un des vecteurs importants de la campagne de Gérard Collomb qui souhaitait « aller vers un modèle de ville encore mieux connectée ». Entre les voitures électriques Bluely, le renouvellement du quartier de la Confluence pour l’urbanisme, les compteurs Linky en matière d’énergie (175 000 logements en sont déjà équipés) ou l’application de la ville « Onlymoov », qui prévient du trafic en temps réel, tous les domaines ont dû être examinés et étudiés pour être améliorés. Lyon nous prouve alors que tout est possible et réalisable pour devenir une « smart city », il suffit juste de s’en donner les moyens.

En 2001, Lyon a été la première ville française (hormis Paris) à concevoir un nœud d’échange Internet, aussi appelé Global Internet eXchange (GIX). Elle en possède quatre aujourd’hui. L’intérêt de cette infrastructure est de faciliter l’accès à l’Internet très haut débit, pour tous les citoyens. Pas moins de 2 000 emplois ont été créés dans cette filière entre 2006 et 2011, dont 80 % dans le Grand Lyon.


En avance sur le commun des transports Par Baptiste Pierre

Dès 1991, Lyon était à la pointe de l’innovation, avec sa ligne D, totalement automatisée.

ET SI LYON DEVENAIT LA RÉFÉRENCE MONDIALE DU TRANSPORT EN COMMUN ? LES TCL FONT FIGURE D’EXEMPLE, ET SE POSITIONNENT À LA POINTE DE L’INNOVATION. MAIS TOUT N’EST PAS SI ROSE.

D

es bus sans conducteur, des métros volants et des tramways suspendus ? Non, Lyon n’en est pas encore à ce stade. Néanmoins, les innovations en matière de transports fleurissent. Depuis 2011, des panneaux d’affichage indiquent sur les quais des stations de métro le temps d’attente des rames. Jusque-là, rien de bien révolutionnaire. Sauf qu’ils informent aussi en temps réel des perturbations sur le réseau, avec un affichage intelligent concentré uniquement sur les stations affectées. Le délai de reprise du trafic et le temps d’arrivée sur la zone de perturbation sont comptabilisés. Par exemple, un voyageur sur la ligne D est informé des perturbations sur les lignes A et B dès lors qu’une correspondance est possible. Les voitures bannies ? Plus que d’informer sur le temps d’attente, le véritable enjeu actuel réside dans le développement durable des transports en commun. La Ville de Lyon incite énormément les citoyens à utiliser les métros, trams et bus. À tel point que certaines voix s’élèvent, soulignant que Gérard Collomb, le maire, cherche à « bannir » les voitures du centre-ville. La capitale des Gaules met effectivement tout en œuvre pour donner envie d’utiliser les TCL. Exemple récent : la construction du pont Raymond Barre, entièrement dédié aux modes doux, et emprunté par la ligne de tram T1. Un édifice qui permet de relier le quartier de la Confluence à celui de Gerland, autrefois accessible seulement en voiture par un axe saturé aux heures de pointe. Mais si l’on veut développer les transports dans un souci écologique, il faut inventer ceux de demain. C’est la mission d’Irisbus, qui met au point les bus utilisés à Lyon. Le principal axe de travail se situe bien entendu au niveau des émissions de gaz à effet de serre, que la firme espère diviser par quatre. Notamment grâce à la technologie Ellisup, comprenez un bus 100 % électrique et rechargeable rapidement via une borne à chaque terminus. Un car qui, en plus d’être écologique, serait ultraDites camion… Si Lyon développe ses bus, les camions ne connecté. Par le biais de la toute dernière technologie Led, de larges sont pas en reste. Pour Renault Trucks, l’idée écrans informent en temps réel les usagers. Plus cher que Paris ou Barcelone Seulement, Lyon a peut-être oublié une chose essentielle pour rendre attractif ses transports : le prix. Aujourd’hui, les tarifs sont plus élevés qu’à Paris, Barcelone ou Milan. Un constat que Bernard Rivalta, président du Sytral, assume. Les constructions de nouvelles lignes, ou le prolongement d’anciennes, se sont avérés très coûteux. Malgré tout, pour une ville dite connectée, il n’y a pas de réseau dans les rames de métro, alors que des bornes 3G s’installent dans la majorité des réseaux souterrains des grandes villes européennes. C’est le cas à Barcelone, qui en plus de pouvoir surfer sur internet sous terre, offre des tarifs inférieurs à ceux de Lyon (52€ par mois contre 57€). Peutêtre que, finalement, les transports lyonnais sont… déconnectés de la réalité !

est de connecter le poids lourd et le chauffeur, pour faciliter son travail. Grâce notamment à l’application NavTruck, premier GPS 100 % dédié aux camions et imaginé par la firme. Il calcule le meilleur itinéraire en fonction de la taille, du poids ou encore de la marchandise transportée et évite les routes non accessibles aux poids lourds. Au final, la livraison se fait dans de meilleures conditions pour le chauffeur comme pour les autres usagers de la route qui ne risquent plus, par exemple, d’être bloqués par un camion faisant demi-tour. Car l’enjeu majeur reste bien de permettre la livraison de marchandises en centre-ville, en bonne intelligence avec les citadins.


06 07

Un automobiliste lyonnais perd en moyenne 32 minutes chaque jour dans les embouteillages.

Embouteillages : comment y remédier ? UNE VILLE INTELLIGENTE, C’EST AVANT TOUT UNE VILLE QUI A LE CONTRÔLE SUR SON TRAFIC. COMMENT GARANTIR L’EFFICIENCE D’UNE CITÉ SI LA MOBILITÉ DES CITADINS ET DES MARCHANDISES N’EST PAS ASSURÉE ? Par Guillaume Fradin

La Norvège comme exemple ? Un peu plus au nord, la Norvège, dans sa politique ultra-écologiste, a poussé ses citoyens à s’équiper de voitures électriques. Pour cela, l’État a permis à ceux qui sautaient le pas d’utiliser gratuitement les parkings publics, de recharger leurs voitures tout aussi gratuitement et de passer librement les péages urbains. Le propriétaire ne payera pas non plus les taxes à l’achat d’un véhicule électrique. Ceux-ci peuvent aussi emprunter les voies de bus. Mais pas sûr que la sauce prenne à Lyon. Pour Stéphanie Bardon, « Lyon doit d’abord penser à faire arriver le bus avant la voiture, en faisant exister la voie de bus en tant que telle, avant de la partager ». En effet, le bilan en Norvège n’est pas des plus satisfaisants, les voies du bus ayant fini par être aussi victimes d’embouteillages.

«P

our arriver à des résultats, on doit utiliser des moyens dissuasifs. » C’est l’avis de Stéphanie Bardon, chargée d’études sur les transports lyonnais à MTI Conseil. Pour elle, Lyon « devra, dans le futur, se munir d’un péage urbain et rehausser ses tarifs de stationnement pour sortir la voiture de la ville ». Moins de voitures, plus de sites propres et dédiés aux bus, c’est la voie que Lyon souhaite prendre, à coups de solutions et d’idées plus ou moins réalistes. Récemment, on a vu arriver le prolongement de la ligne B du métro jusqu’à la gare d’Oullins, qui aurait, selon le Sytral, diminué le trafic routier de 15 000 véhicules par jour. D’autres projets semblent un peu plus incongrus comme le téléphérique passant par Perrache, Fourvière, Croix-Rousse et Tête d’Or, défendu par Georges Fenech (UMP) mais proposé par Eric Lafond (Modem) lors de la campagne municipale. Et puis restent des projets, sortes de serpents de mer qui viennent hanter les politiques tant leur ampleur et les enjeux sont immenses. On pense bien sûr à l’anneau des sciences, plus connu sous le nom de « contournement ouest lyonnais ». Le bouclage du périphérique devrait, s’il voit le jour, faire chuter de 50 000 à 40 000 le nombre de véhicules qui circulent quotidiennement sur l’A6-A7. Un sujet trop politique La mobilité, c’est aussi un enjeu politique immense puisque les automobilistes sont aussi des électeurs. « Les élus peinent à prendre les choses en main de peur de froisser l’opinion », souligne Stéphanie Bardon. En effet, quand on regarde les programmes électoraux des municipales, ils sont remplis de lignes de métros, de trams, de ponts. La mobilité attire les foules, chacun souhaitant arriver chez lui au plus vite. « Mais au final on n’a que des semi-solutions car personne ne veut trop se mouiller », conclut-elle. Finalement, en matière de trafic, c’est comme pour tout, la recette magique n’existe pas.


22 500 personnes ont emprunté le Rhône Express chaque semaine, en 2013.

ACCèS à SAINT-EXUPéRY : DU PLUS éCONOMIQUE AU PLUS PRATIQUE SYNONYME D’UNE VÉRITABLE OUVERTURE SUR LE MONDE, L’AÉROPORT DE LYON SAINT-EXUPÉRY EST SITUÉ À ENVIRON 25 KM DU CENTRE-VILLE. RELATIVEMENT LOIN DU CENTRE, SON ACCÈS EST PARFOIS COMPLIQUÉ ET SOUVENT CHER. TOUR D’HORIZON DES SOLUTIONS. Par Julien Damboise

Le prix pour la rapidité Entre 13 et 15,70€. C’est le prix de la navette « Rhône Express » qui relie la gare de la Part-Dieu à l’aéroport. Une fortune pour de nombreux voyageurs, qui parfois, ont payé le même prix pour leur train ou leur avion. Son avantage : le tramway. Inauguré en 2010, la navette se rend à Saint-Exupéry en moins de 30 minutes, via les lignes de tramways existantes. En voiture, le trajet est un peu plus long, environ 40 minutes depuis le centre de Lyon. L’autoroute est rapidement joignable, l’aéroport est donc normalement accessible, mais l’itinéraire est régulièrement embouteillé aux heures de pointe. Le vrai hic, encore une fois, c’est le prix... des parkings de l’aéroport ! Comptez 35 à 44€, pour 2 jours en semaine. Un marché s’est donc ouvert aux sociétés privées. Certaines proposent des trajets plus économiques que le « Rhône Express ». Par exemple, « Go airport » offre des trajets entre Saint-Exupéry et Meyzieu ZI entre 6 et 7,50€. Il est toutefois nécessaire de réserver sa course. C’est le cas de Naveco, qui pour cette prestation vous demandera 45€. L’avantage est que le prix est forfaitaire. Il reste le même jusqu’à 8 personnes, soit moins de 6€ par tête. Plus économique mais moins pratique Justement, à partir de Meyzieu ZI, on trouve la solution la plus économique : les cars du Rhône. Et plus précisément la ligne 46. Elle conduit les voyageurs en 20 minutes à l’aéroport, bien qu’il faille déjà 30 minutes pour aller de la gare de la Part-Dieu à Meyzieu... Par ce système, le voyage coûtera en totalité 3,70€. Voire même 2€ si vous avez un abonnement TCL pour prendre le tram. Attention toutefois, il ne circule qu’un à deux bus par heure. Compliqué donc, selon les budgets, de choisir son moyen de locomotion vers l’aéroport de Lyon. Dernièrement, l’annonce de la privatisation de l’aérogare a été faite. De nouvelles solutions pour s’y rendre pourraient subséquemment être mises en œuvre.

Patrick

voyageur d’affaires

Je prend l’avion trois fois par mois en moyenne. Je me rend toujours à l’aéroport en coiture, et je la laisse au parking. Cette solution me soûte 1 300€ par an environ. Comparé à d’autres aéroports, l’aéroport Saint-Exupéry est bien fait. La seule chose qui manquait était la

signalisation inscrite dans d’autres langues étrangères. Mais ces dernières années, un effort a était fait. Les collaborateurs étrangers que je reçois sont moins perdus qu’avant à leur arrivée à Saint-Exupéry.

Manon

usagère du Rhône Express

J’ai travaillé pendant 2 ans dans un restaurant de l’aéroport et je prenais le Rhône-Express tous les jours pour m’y rendre. C’est un moyen de transport pratique mais pas toujours fiable. Vers 6h20, certains conducteurs ne respectaient pas les horaires imposés. Sur le panneau d’affichage je voyais souvent le temps d’attente passer de 2 à 40 minutes, du coup j’étais en retard. Il y avait beaucoup moins de soucis l’après-midi et le soir. Le Rhône-Express est quand même très cher pour les touristes. Mais j’avais la chance d’avoir des tarif spéciaux, je payais 60€ les 12 tickets.


08 09

Les applis testées par la rédac Le Best of !

CE MOIS-CI, ON VOUS PROPOSE UN BEST OF DES APPLICATIONS GRATUITES QUE NOUS AVONS JUGÉES UTILES AUX LYONNAIS ET EFFICACES À UTILISER. Par Benjamin Logerot

Le Grand Lyon L’application du Grand Lyon. Un immanquable pour qui vient d’arriver en ville. Numéros utiles, dernières actualités de la ville, toutes les démarches administratives importantes, une liste plutôt exhaustive des principaux endroits où venir se détendre. Musées, théâtres et autres parcs rendent riche cette application. La carte de Lyon fonctionne grâce à la géolocalisation. Une aide est apportée pour ceux qui souhaitent effectuer un déplacement en voiture ou à vélo. Enfin, la rubrique « le saviez-vous ? » est très plaisante avec plein d’anecdotes sur la ville et ses personnalités. Un point noir cependant, l’application a la fâcheuse tendance de planter lorsque l’on essaie d’aller sur la map avec peu de réseau.

Géovélo Outre les stations de Vélo’V à proximité, l’application Géovélo Lyon propose une fonctionnalité intéressante : celle de calculer un itinéraire en fonction de plusieurs paramètres ; comme le fait que l’on soit un débutant en vélo ou un usager quotidien et expérimenté. Un point de départ, un point d’arrivée. Puis deux choix, l’itinéraire le plus court ou l’itinéraire avec le plus de voies réservées aux vélos. Une estimation du temps et de la distance est calculée. En même temps, la météo est mise à jour en temps réel et est disponible sur trois heures. Idéal pour les cyclistes. Petite réserve cependant, il est difficile de consulter la carte sur son vélo…

Grand Lyon nature La nouvelle application Grand Lyon nature, lancée en juin dernier, recense et localise les parcs, sentiers et balades au sein de l’agglomération lyonnaise. La section « autour de moi » vous informe des promenades à proximité. Le filtre permet de trouver son périple personnalisé. À venir, les puces NFC, qui vous permettront de faire des balades interactives. En passant votre portable devant celles-ci, vous obtiendrez diverses informations sur le lieu où vous vous trouvez. Le calcul d’itinéraire prédictif, lui, calculera un itinéraire en fonction du trafic, de la durée du trajet et du moyen de transport utilisé. Il devrait aussi bientôt voir le jour. Fiable, précise et très bien construite, l’application conviendra aux amoureux de la nature.

OnlyMoov’ Application simple et complète, OnlyMoov’ est utile aux stressés de la circulation. La mise à jour de la situation du trafic en temps réel fonctionne très bien et assez rapidement. Encore fautil capter suffisamment de réseau... Les chantiers sont indiqués sur une liste ou sur la carte de la ville. Les événements importants, qui peuvent ralentir la circulation comme une manifestation ou une route coupée, sont aussi mis à jour toute la journée. Les bornes de Vélo’V les plus proches et le nombre de vélos encore disponibles s’affichent sans problème. Seul bémol, les parkings, qui peuvent afficher le nombre de places restantes, sont encore trop peu nombreux.

Le Petit Paumé Lyon, cité de la gastronomie, méritait une application pour recenser tous ses restaurants. Tout le contenu du Petit Paumé est disponible du bout du doigt. Les restaurants, les bars, les boîtes de nuit ou encore la fameuse section « Fripon » sont consultables et géolocalisés. Même les magasins, coiffeurs et autres commerçants sont affichés sur la carte de la ville. Une petite nouveauté par rapport à l’édition écrite, la possibilité de « montrer » avec son téléphone où l’on se trouve afin que l’application détecte les restaurants les plus proches en reconnaissant les environs. Application stable, facile à prendre en main, parfaite pour les soirées improvisées ou programmées.


NETWORK

« IL Y A UNE VÉRITABLE TRANSFORMATION DIGITALE DES VILLES ET DES TERRITOIRES » NATHALIE LEBOUCHER EST DIRECTRICE SMART CITIES ET TERRITOIRES CHEZ ORANGE BUSINESS SERVICES. ELLE NOUS A ACCORDÉ UN ENTRETIEN. Propos recueillis par Benjamin Logerot

On commence à beaucoup entendre le terme de « smart grids », pouvezvous nous en dire plus sur cette expression qui peut paraître vague ? La connectivité est un des piliers de la smart city. S’il n’y a pas de connectivité, le reste des mécanismes qui créent la smart city, ne peut pas fonctionner, car il faut, bien sûr, que les données puissent être traitées et analysées. On voit les smart grids plutôt dans le sens de la grille électrique en général. C’est surtout l’optimisation des réseaux de distribution d’électricité au niveau notamment d’ErDF mais aussi de la distribution d’eau. Aujourd’hui, il y a un besoin de développer cela, car ErDF est assez handicapée par l’absence de capteurs. Par exemple, lorsqu’il y a une tempête et des dégâts, il est compliqué de repérer où est-ce que la ligne a lâché. Comment mettre en place ces smart grids à Lyon ? L’objectif global est déjà de commencer par mettre en place Linky, un compteur intelligent. Il permet, en bout de chaîne, d’avoir les informations de son détenteur, comme sa consommation. Puis, il s’agit de mettre des capteurs le long des réseaux de distribution, dans différents endroits, comme dans les postes de distribution par exemple. L’objectif : avoir en temps réel le plus grand nombre d’informations possibles. Le temps réel est vraiment un enjeu de la smart city, notamment avec la 4G, ou la fibre. En ce qui concerne Lyon, nous avons développé un partenariat avec Veolia pour la « télérelève » des compteurs d’eau. C’est Veolia qui s’occupe de la distribution de l’eau et des compteurs sur le Grand Lyon. Veolia a gagné le renouvellement de la distribution, il y a quelques mois. La « télérelève » est prévue dans les nouveaux objectifs de l’entreprise. Cela concerne plusieurs centaines de milliers de compteurs (Ndlr : le chiffre exact n’a pas pu nous être communiqué). L’objectif pour Orange est de déployer 5 millions de compteurs intelligents en France avec Veolia. Il y en a actuellement 1,2 million. Lyon va être une ville phare dans le déploiement massif de compteurs intelligents. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est l’internet des objets ? Y a-t-il un lien avec les smart grids ? Smart grids et objets connectés sont différents mais liés. L’internet des objets est un terme large. On l’explique par le fait qu’aujourd’hui les hommes sont connectés, notamment avec leurs portables. Mais, demain, les machines seront connectées entre elles. On schématise l’internet des objets en trois

Google va lancer son projet « Loon » en Australie Après la Nouvelle-Zélande, le Brésil et les États-Unis, Google va lancer un grand nombre de ballons dans l’État du Queensland en Australie, dès décembre. Ces ballons seront en vol constant pendant plus de 100 jours à 18 000 mètres d’altitude. Le but est de fournir un accès internet à des régions qui n’y ont pas encore accès. Le dispositif final devrait être opérationnel dès 2015, après que la problématique de sa sécurisation sera résolue.


© DR

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Pour Nathalie Leboucher, les seules limites de la connectivité de la ville sont celles de l’imagination.

parties : les objets que l’on a sur soi (portables, montres, bracelets connectés…), les objets qu’il y a chez soi et les objets qu’il y a dans la ville (dans ce cas-là on compte aussi les compteurs électriques). Le but de la smart city c’est de connecter les objets de la ville avec des capteurs, qui vont pouvoir remonter les informations en temps réel et ajouter une couche intelligente pour analyser toutes ces données. Cela a déjà débuté d’ailleurs, avec les capteurs que l’on peut placer dans les feux, les abribus connectés, les voitures… Les seules limites sont celles de l’imagination. Par exemple, pour donner un accès internet à des régions isolées, Google a lancé son projet « Loon » (voir encadré).

révolution numérique se caractérise surtout par l’explosion importante des smartphones. Aujourd’hui, en France, plus de 70 % des habitants possèdent un Smartphone. Donc on peut toucher 70 % de la population rien qu’avec cet objet. Le smartphone devient un peu la télécommande de la ville. Finalement aujourd’hui, je suis un peu perdue sans mon portable. Chercher l’info depuis son smartphone est devenu un réflexe. Bientôt, il sera possible d’avoir toutes les informations relatives à une ville dans une seule application plutôt qu’issues de plusieurs sources éparpillées entre l’Apple Store et le magasin Android (projet « La ville dans ma poche » d’Orange à Perpignan).

Avez-vous une estimation du nombre d’objets connectés aujourd’hui et dans le futur ? Aujourd’hui, il y aurait environ 10 milliards d’objets connectés dans le monde. Selon les différentes études qui ont été menées, d’ici à 2020-2025, il pourrait y avoir entre 30 et 150, voire 200 milliards d’objets connectés. C’est une grande fourchette. Ce qui n’est pas clair, c’est le rythme de déploiement de ces objets. Pour l’instant, il n’y a pas de problème de connectivité, on en reparlera quand il y aura plusieurs dizaines de milliards d’objets connectés. La 5G devrait arriver à l’horizon 2020, elle sera donc encore plus performante et permettra d’améliorer les débits et donc de réduire les problèmes de connectivité. Pour que cela marche, il faut que les opérateurs télécoms investissent dans les infrastructures. Donc le rythme reste inconnu, mais nous savons qu’une formidable révolution numérique est là. Il y a une transformation digitale des villes et des territoires. Cette

À Lyon, qu’est-ce qui est le plus recherché dans le développement de la smart city ? La Ville de Lyon met l’accent sur des projets de transports. On constate que dans les grandes villes, la congestion urbaine arrive dans les trois premiers problèmes auxquels elles doivent faire face (les deux autres, selon des études menées auprès des citoyens, sont le logement et la sécurité). Beaucoup de solutions sont donc recherchées de ce côtélà. Par exemple, nous pouvons citer le projet « Optimod’ Lyon » qui vise à collecter, centraliser et traiter l’ensemble des données de la mobilité urbaine sur une plate-forme unique, et à créer des services innovants qui facilitent les déplacements et la vie des usagers. Les smart cities touchent des domaines si vastes qu’il est nécessaire que les projets soient menés en partenariat ou en collaboration avec de nombreux acteurs (entreprises, collectivités…). Il est impossible pour une entreprise de tout faire seule.


CRASH TEST

LA RÉDACTION A TESTÉ POUR VOUS CE QUI FAIT DE LYON UNE VILLE INTELLIGENTE. VERDICT.

Alors, ça donne quoi ?

Par la rédaction

Le Segway

La Wifi pocket

Les avantages Le Segway n’est pas un fast­ food mais bien un véhicule électrique à deux roues, sur lequel on peut avancer en se penchant légèrement. À la manière d’une trottinette, il est simple et facile à utiliser. On apprend rapidement comment tenir en équilibre et diriger la machine sans risquer de se blesser. Les chutes sont possibles, mais rien de bien dangereux si on ne s’amuse pas à aller trop vite. Avec le Segway, on se faufile dans les différents coins de rue sans se fatiguer. C’est utile si l’on souhaite découvrir rapidement quelques quartiers de la ville !

Les avantages La Wifi Pocket est distribuée avec un petit guide explicatif et un chargeur, l’autonomie de l’appareil étant de six heures. Il coûte 8€ par jour et s’utilise facilement. Une fois le boîtier allumé, on se connecte à son smartphone, sa tablette ou son ordinateur, grâce au code inscrit au dos de la Wifi Pocket. Après cela, on peut se balader partout avec un accès internet et une connexion 4G performante et efficace. Chercher un restaurant, une station de métro, une boutique, tout devient simple et rapide grâce à ce réseau privé. Les étrangers qui viennent à Lyon y trouvent leur compte car l’outil leur revient bien moins cher que le hors forfait qu’ils devraient payer en utilisant internet.

Les inconvénients Au prix de 30€, la promenade reste assez coûteuse. En réalité, le Segway se voit comme étant un loisir de détente, plutôt qu’un moyen de déplacement. Lorsqu’on utilise le Segway, il s’agit de rester « concentré » pour ne pas tomber, il n’est pas si facile de pouvoir observer les monuments et paysages de la ville, comme c’est prévu au départ de la promenade. Un moyen de déplacement original donc mais qui reste dans le domaine du loisir plus que de l’innovation utile et « intelligente ».

Les inconvénients Pour les Lyonnais ou touristes français, le prix de 8€ peut sembler élevé pour une journée d’emprunt. La Wifi Pocket peut ne pas être chargée au maximum et les citoyens doivent alors trouver un lieu public avec une prise, pour recharger et continuer d’utiliser l’appareil dans la ville. Un outil bien pensé par la Ville de Lyon, utile et adapté à tous les citoyens.


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La Bluely

Welcome

WeBike

Les avantages Cette voiture est 100% écologique, électrique et silencieuse. Pour la louer : une inscription sur internet en quelques minutes et une finalisation en vidéo conférence avec une conseillère. Après le scan des documents d’identité à la borne, on me délivre un badge pour la location. La boîte automatique et la souplesse de la direction assistée permettent une conduite très agréable pour la ville. Les voitures sont totalement connectées partout où vous allez : vidéos explicatives et bouton d’appel dans la voiture. Pour être sûr de trouver une place à destination, le GPS vous indique la station Bluely la plus proche et peut réserver votre place à l’avance.

Les avantages « Welcome » est une plate-forme interactive dédiée aux touristes qui atterrissent à l’aéroport St-Exupéry, près de Lyon. 8 tablettes sont à la disposition des voyageurs, pour leur fournir des informations sur Lyon et sa région, afin de préparer leur séjour. L’écran d’accueil est très propre, fluide, et invite directement à faire un tour sur Lyon Tourisme ou sur le site de la région Rhône-­Alpes. On retrouve aussi les applis de la SNCF ou du Rhône Express, très pratiques pour prévoir ses déplacements dans la région. Les navettes à destination des pistes de ski sont aussi recensées.

Les avantages En débarquant de l’avion, vous n’avez plus de batterie sur vos appareils électroniques. Et comme le sort s’acharne, vous devez prévenir d’un retard. À l’aéroport Saint-Exupéry, on aperçoit quelques personnes qui pédalent sur des vélos d’appartement, téléphone et tablette en main, reliés à une prise. En commençant à pédaler, nos téléphones se rechargent.

Les inconvénients Cette technologie coûte une petite fortune. Pour 30 minutes de trajet, le coût s’élève à presque 10€ en abonnement d’une semaine (le prix est dégressif suivant le type d’abonnement) soit pas vraiment avantageux au quotidien. L’usage reste donc confiné à des trajets ponctuels qui nécessitent un véhicule. La Bluely a son utilité mais n’est pas une alternative aux transports en commun.

Les inconvénients Peu d’applications sont dédiées au tourisme, pour orienter sur les choses qui vous plairaient. Vous trouverez des infos sur des compagnies aériennes ou des tours opérateurs. Pas forcément très ingénieux alors que vous venez de descendre de l’avion... Certaines applis comme le Rhône Express ne fonctionnent pas, ou très mal. Et puis l’espace est situé juste à la jonction entre l’aéroport et la gare TGV. Pour préparer votre séjour dans le calme, il faudra repasser...

Les inconvénients Le chargement commence seulement au bout de 10-15 minutes. Ce sont les voyageurs déjà installés qui nous informent que cela prend du temps, alors que nous commençons à désespérer. Le WeBike est donc une solution de dépannage, qui aide bien, mais il faut tout de même avoir du temps devant soi pour recharger un minimum son appareil. De plus, il y a de nombreuses personnes autour de nous qui attendent pour prendre nos places. Nous nous sentons obligés d’arrêter notre sport digital. Nos batteries sont épuisées, mais celles de nos téléphones ne sont, au final, que très peu rechargées.


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Une zone totalement repensée QUARTIER EN PLEINE MUTATION, CONFLUENCE DÉVOILE PEU À PEU SON VISAGE. L’ANCIENNE ZONE INDUSTRIELLE AFFICHE DÉSORMAIS SON IMAGE DE QUARTIER À L’AVANT-GARDE. Par Julie Voisin

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Lyon, depuis la place Carnot, il suffit de passer la gare de Perrache et descendre le cours Charlemagne pour découvrir le nouveau visage de Confluence. Prisons, industries et friches ont laissé place à une architecture innovante… mais pas seulement. La pointe de la presqu’île est devenue un laboratoire à ciel ouvert pour de nombreuses entreprises, françaises mais aussi étrangères, à l’image du groupe nippon Hikari. Après la vue des bâtiments auto-suffisants en construction, le Lyonnais venu apprécier la réhabilitation des quelque 150 hectares du quartier peut, à loisir, contempler ce lieu, réaménagé en une dizaine d’années. L’ancien quartier du marché-gare est devenu une vitrine de Lyon à l’étranger. Les Lyonnais devront, toutefois, s’armer de patience pour pouvoir se réapproprier à nouveau ce quartier du 2e arrondissement. La réhabilitation complète de la Confluence sera achevée en 2017 voire 2018, avec la livraison de l’îlot A3, face à la patinoire, le long du cours Charlemagne. Autrement moins bigarré et résolument plus sage que ses prédécesseurs côté Saône, l’ensemble de huit bâtiments, construit par le promoteur Icare, se veut fonctionnel. Deux immeubles de bureaux et 232 logements sortiront de terre. Gérard Collomb a annoncé, lors de la présentation de cette deuxième phase, en janvier dernier, que le nombre de stationnements prévu pour cet îlot serait volontairement inférieur aux besoins, notamment par rapport au nombre de logements, limitant ainsi la pénétration de véhicules au sein du quartier. Une démarche assurément verte, dans la


© Archives municipales de Lyon

FOCUS

Quelque 150 hectares, sur une étendue de 2,5 kilomètres, sont concernés. Ici, Confluence au XXe siècle.

continuité du projet de réhabilitation du confluent. Depuis l’agrandissement de la Presqu’île, au XVIIIe siècle, et encore aujourd’hui, passer les voûtes de Perrache, au niveau de la gare, provoque chez les Lyonnais le sentiment de quitter la capitale des Gaules. Une réhabilitation pour réunir le centre-ville C’est dans les années 1990, alors que Raymond Barre était maire de Lyon, que la reconversion de cette ZAC (zone d’aménagement concerté) fut amorcée. Des réflexions ont été menées, en vue d’urbaniser les 150 hectares, et de les rattacher au centre-ville, atténuant la rupture entre les quartiers d’Ainay et de Sainte-Blandine. Car, comme le souligne Marcel Brévi, président du Comité d’intérêt local du Sud Presqu’île, « c’est un quartier qui représente quand même 50 % du centre-ville de Lyon. La distance entre Perrache et Confluence est aussi grande que celle entre

Perrache et Hôtel de Ville ». Au niveau architectural, et cela pour « marier innovation et tradition », comme l’a souligné Gérard Collomb en octobre 2013, une partie du marchégare est conservée dans les plans de l’îlot A3, laissant ainsi au quartier son patrimoine industriel. La Ville de Lyon souhaite aussi intégrer toutes les populations dans le quartier. Ainsi, 25 % des logements construits sont des logements sociaux, disséminés dans différents bâtiments - un paradoxe, face au centre commercial haut-de-gamme dont tous peuvent bénéficier de la vue. Depuis les années 2010, Lyon est devenue, grâce à Confluence, la ville où promoteurs et architectes se bousculent pour créer de nouveaux espaces. Dans cette zone devenue un laboratoire à ciel ouvert, le promoteur japonais Hikari côtoie désormais Toshiba ou les architectes Dominique Jakob et Brendan MacFarlane.

33 % 25 000 C’est le nombre d’emplois à terme

6,9 millions

Pourcentage de propriétaires de moins de 35 ans sur la ZAC 1

de visiteurs en 2013

16 000 C’est le nombre d’habitants à terme


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Le futur à l’épreuve du présent

Par Romaric Haddou

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onfluence est une terre fertile. Avant de s’unir en un même lit, Rhône et Saône prennent la peine d’irriguer les ultimes hectares de la presqu’île lyonnaise, pour faire pousser la ville de demain. Bordé par les deux fleuves, le quartier est également fermé par l’Autoroute du Soleil, côté Rhône. Mais l’obstacle majeur se dresse au nord. L’échangeur et la gare de Perrache scindent la Presqu’île en deux, à tel point que la Confluence demeure une véritable enclave, un territoire « au-delà des voûtes », encore bien lointain dans l’imaginaire collectif. Une situation qui s’explique avant tout par une desserte insuffisante au plan des transports en commun. Le récent prolongement du tramway T1 permettant la jonction avec le 7e arrondissement au niveau de la station Debourg, constitue néanmoins une première avancée. Pas suffisante tout de même pour balayer les regrets qui accompagnent le non-prolongement du métro A derrière Perrache. Prévu dès le départ, il a finalement été abandonné, la SNCF refusant que ce dernier passe sous les fondations du centre d’échange. Outre l’accessibilité, c’est parfois la circulation au cœur du quartier qui pose problème. La fréquentation importante, concentrée sur certains grands axes et couplée aux zones de travaux, a tendance à créer de gros ralentissements. Évoqué pendant les dernières municipales, le déclassement de l’autoroute A7 en boulevard urbain est plébiscité par bon nombre de riverains pour décongestionner et désenclaver le secteur.

IMMEUBLES, MUSÉE, CENTRE COMMERCIAL… AUTANT DE BÂTIMENTS QUI, DEPUIS LE DÉBUT DU PROJET, SORTENT DE TERRE À UNE VITESSE FOLLE. UNE TRANSFORMATION AMBITIEUSE QUI SOULÈVE FORCÉMENT QUELQUES QUESTIONS. À TEL POINT QU’AUJOURD’HUI, CERTAINS DOUTENT. ET SI CONFLUENCE AVAIT GRANDI TROP VITE ?

Un manque d’attractivité Si tout le monde, ou presque, s’accorde à dire qu’elle est séduisante, Confluence peine encore à imposer son caractère. Certains y voient un quartier sans vie, un corps plaisant avec un cœur au point mort. Il faut certes lui laisser du temps. Mais avec la conjoncture actuelle et les exigences des bailleurs, le temps, c’est beaucoup d’argent. Difficile donc de favoriser le commerce de proximité et la vie de quartier. Même les grandes enseignes, notamment le centre commercial, ont connu des périodes difficiles liées au déficit d’attractivité. Une situation qui devrait néanmoins évoluer positivement avec l’avancement de la phase 2. Une phase qui devrait permettre au quartier de gagner en harmonie. Actuellement, la pointe de la presqu’île demeure assez peu accueillante. Autour des terrains vagues, plusieurs prostituées résistent, malgré « la chasse » menée par la mairie. Une situation marginale que la proximité du musée des Confluences (dont l’ouverture est prévue pour la fin de l’année) pourrait atténuer. Vitrine de la ville, Confluence a donc besoin de temps pour grandir. La transition entre son riche passé industriel et le statut de « quartier du futur » passe nécessairement par un présent imparfait.

Trois questions à Marcel Brévi,

président du comité d’intérêt local (CIL) Sud Presqu’île

Quels retours avez-vous de la part de ceux qui emménagent ? Celui qui a acheté, même si ce n’est pas bien, il ne veut pas se contredire. Certains trouvent que les constructions manquent de fiabilité mais sincèrement c’est anecdotique. L’ensemble du quartier est neuf, il faut que tout se rode. Pour ce qui est des travaux, ce sont des problèmes passagers. Et il ne manque pas de parkings, certains sont presque vides. Moi qui défends les intérêts du quartier, je ne demanderai pas de parkings en tout cas ! Donc vous soutenez la politique ambitieuse de la mairie ? C’est le quartier du futur, c’est certain que le centre-ville de Lyon se développera ici. Quand vous regardez les nombreux sièges sociaux qui viennent de s’implanter, l’Hôtel de Région… Il y a un vrai potentiel d’affaires. Et puis, il y a des gens qui se plaignent parce qu’on modifie leurs habitudes mais ceux-là ont fait une plus-value de 100 % sur leur appartement ! Certaines voix affirment que le projet est mal conduit, notamment au plan de la mixité sociale… C’est simple, du côté nord de la gare, il n’y a plus de place pour construire. Or, un arrondissement a le droit à 20 % de logements sociaux donc forcément ils seront tous dans notre quartier. C’est à nous, associations, de veiller à ce que tout se passe bien. Il faut simplement le temps que tout s’organise et que la gestion des constructions se fasse de manière intelligente !


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« L’impression que c’est fIni un peu à l’arrache » ARNAUD MALNUIT VIT ET TRAVAILLE À CONFLUENCE. MEMBRE DU COMITÉ D’INTÉRÊT LOCAL (CIL) SUD PRESQU’ÎLE, IL SUIT L’ÉVOLUTION DU QUARTIER AU QUOTIDIEN. AUJOURD’HUI, IL S’INQUIÈTE DE L’ÉCART ENTRE LE PROJET ET LA RÉALITÉ. ENTRETIEN. Propos recueillis par Romaric Haddou

Quel regard portezvous sur l’évolution du quartier ? On a une vue d’ensemble qui, pour l’instant, n’est pas vraiment claire, car la deuxième phase n’est pas encore bien définie, mais ça commence à prendre Pour Arnaud Malnuit la réalité s’éloigne trop du projet. forme. Ce qui se dégage et qui fait peur à tout le monde c’est qu’on veut faire du haut de gamme mais que l’on n’est pas à la hauteur.

avec la conjoncture actuelle… Tous les rez-de-chaussée d’immeubles, les locaux sont vides… Le loyer sera justifié quand tout sera mis en place mais pour l’instant ce n’est pas le cas. Parfois il vaut mieux louer un peu moins cher et réévaluer les loyers par la suite que d’étrangler les gens qui s’installent. Enfin, ça reste mon point de vue. Est-ce que pour vous, malgré les discours, Confluence reste une enclave ? Bien sûr et ce n’est pas près de s’arrêter vu les travaux qui sont prévus. Le problème c’est qu’on fait tous les travaux en même temps : les prisons, la fin de la phase 1, les quais… Pour moi qui suis amené à beaucoup conduire, même pour des petits déplacements je traîne dans des bouchons, il faut parfois 20 minutes pour faire trois rues.

« Les logements sociaux sont mal gérés »

C’est-à-dire ? Qu’entendez-vous par cela ? Disons que la population qui était visée n’est pas forcément au rendez-vous alors à l’arrivée d’une clientèle « pas vraiment clean ». C’est comme à La Duchère où il y avait des appartements d’architectes, plutôt voués à une clientèle un peu hype et finalement ça s’est paupérisé. J’ai peur que, si la gestion est mauvaise, ça fasse un peu pareil à la Confluence. Moi j’ai beaucoup de clients qui avaient emménagé dans les tout premiers appartements du quartier et c’est en train de se revendre à vitesse grand V. Pour quelles raisons ? À cause des logements sociaux qui sont mal gérés. On met, dans un même immeuble, plusieurs familles qui se connaissent déjà donc au final il n’y a pas vraiment de mixité sociale. Et autour de ça il y a tous les locaux commerciaux qui ne se louent pas car ils sont hors de prix. Vu les loyers c’est impossible de garder des commerces viables, surtout

Pour vous, le quartier pousse donc trop vite ? Disons que les travaux pourraient être mieux coordonnés. On est censé être dirigés par des gens plus intelligents que nous mais quand on voit certaines boulettes… Au vu de l’engagement financier il y a quand même de grosses erreurs, on a l’impression que c’est fini un peu à l’arrache. Beaucoup de choses sont déjà avancées donc c’est difficile de se faire entendre mais s’ils ne veulent pas que ça parte en vrille, il va falloir qu’ils écoutent un jour ou l’autre. Essayer de garder des commerçants, de retrouver des commerces de proximité c’est le but du CIL. Et puis il faut absolument trouver un moyen de dériver l’autoroute. Si on pouvait la déclasser il y aurait beaucoup moins de problèmes de circulation. Tout le monde commence à abandonner le projet alors que ça a coûté des millions d’euros en concertation. Depuis les élections municipales on ne voit plus rien, pourtant c’est l’une des principales solutions pour désenclaver le quartier.


Georges«Verney-Carron, le galeriste qui a repensé Lyon

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LE DESTIN DE CERTAINS 19 PROJETS, DE NOMBREUX ÉDIFICES, EST INHÉRENT À CEUX D’HOMMES ET DE FEMMES. C’EST LE CAS DE LA CONFLUENCE ET DE GEORGES VERNEYCARRON, Par Lorenzo Calligarot À LA TÊTE DE L’AGENCE DE COMMUNICATION GROUPE 45. APRÈS est un homme de l’ombre qui apporte un rayonnement à la ville AVOIR IMAGINÉ, AVEC des Lumières. Un personnage atypique, inconnu du grand public LA COMPLICITÉ mais qui marque de son empreinte le quartier le plus médiatique de la ville. Issu d’une célèbre famille de fabricants d’armes stéphanoise, DE PLUSIEURS ARTISTES Georges Verney-Carron s’est lui distingué dans le domaine de l’art. Mais, ET ARCHITECTES, bien qu’il possède une des galeries d’art contemporain les plus « select » du LES PARKINGS département, qui porte son nom, c’est bien pour ses projets urbanistes qu’il LYONNAIS, LA PLACE marquera l’image de la métropole. DES TERREAUX Le galeriste arrive en 2007 sur le quai Rambaud, mais à l’époque « il n’y a OU ENCORE LA FAÇADE que des ruines et des putes, elles aussi souvent en ruine ». Le quai appartient DE L’HÔPITAL SAINT-LUCalors aux Voies Navigables de France, plus communément appelées VNF. SAINT-JOSEPH, La Ville tente de racheter ce bord de fleuve pour une bouchée de pain mais LE GALERISTE A CONÇU le président de VNF de l’époque, François Bordry, s’y oppose. Connaisseur LA VITRINE DE LA VILLE d’art pour avoir dirigé un fonds régional d’art contemporain, il s’associe avec DE LYON : CONFLUENCE. Georges Verney-Carron pour rénover entièrement le quai qui symbolise

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aujourd’hui la ville, au même titre que la basilique et la célèbre tour du « crayon ». Un projet fou qu’accepte néanmoins Gérard Collomb, lorsqu’il apprend que le Grand Lyon ne devra pas débourser un centime dans cette construction. Usant de son carnet d’adresses, celui qui se considère comme « un scénographe de la création et de l’enrichissement du territoire », lance un appel à différents architectes et artistes pour rénover le quai. Le résultat ? Des pointures comme Jean Nouvel, Rudy Ricciotti, JeanMichel Wilmotte ou encore Odile Decq se lancent dans l’imagination de ce quai avec des bâtiments hors du commun, comme ceux du groupe Cardinal et d’Euronews. Et même si quelques critiques se font entendre par certains puristes, ce projet est pour monsieur Verney-Carron une vraie réussite : « Une œuvre qui laisse les gens indifférents, c’est une œuvre ratée. Toute ma vie, j’ai essayé de rendre l’art accessible, de le sortir des musées, je pense que c’est ce qu’on a réussi à faire à la Confluence ».

Georges Verney-Carron a influencé le quartier comme personne.

© DR

« Confluence est loin d’avoir une âme de quartier » Pourtant, malgré toutes les innovations architecturales et technologiques le quartier compte quelques habitants réticents au projet. Une âme de quartier qui se perd, la proximité avec les commerçants inexistante, les critiques sont nombreuses et beaucoup ne se sentent pas soudés dans un secteur qui se revendique connecté. « Une âme de quartier ne se construit pas comme des immeubles. Cela prend du temps, 25, 30 ans, Confluence en est encore loin ! Il faut arriver à aménager correctement l’ancien marché-gare et à baisser le prix des logements qui est pour l’heure exorbitant. Il faut une concentration de jeunesse, de créativité, de savoir et de culture. Et puis, il faut un cimetière. Tant que personne ne se sentira issu de Confluence pour s’y faire enterrer, ce quartier n’aura pas d’âme. » Celui qui a toujours cherché à allier architecture, art et design devrait bientôt s’attaquer à un autre chantier de poids : la PartDieu. Et une chose ne fait aucun doute, personne ne restera insensible à son futur projet.


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BIEN QUE LA PHASE 2 DU PROJET DE RÉHABILITATION NE SOIT PAS ENCORE ACHEVÉE (4), LE QUARTIER DE CONFLUENCE EST DÉJÀ MULTI-FACETTES. ALORS QUE CERTAINES FRICHES INDUSTRIELLES (3) DEMEURENT COMME L’ANCIEN MARCHÉ-GARE (6), DES BATÎMENTS ULTRA-MODERNES ONT VU LE JOUR TEL QUE LE CUBE VERT D’EURONEWS (2) OU LES IMMEUBLES DE LA PLACE NAUTIQUE (1). UN QUARTIER FUTURISTE SYMBOLISÉ PAR L’ÉTONNANT MUSÉE DES CONFLUENCES (5) DONT L’OUVERTURE EST PRÉVUE POUR LE MOIS DE DÉCEMBRE.


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Š Philippe Jawor

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L’APPARTEMENT À ÉNERGIE POSITIVE, UNE RÉVOLUTION ?

Chaque appartement devrait obtenir une économie d’énergie, à hauteur de 12 %.

LES APPARTEMENTS À ÉNERGIE POSITIVE S’INSCRIVENT DANS LA LOGIQUE DU QUARTIER : ILS SE VEULENT ÉCOLOGIQUES ET ÉCONOMIQUES. LE PREMIER ÎLOT DE LA PHASE 1 SERA TERMINÉ AU PRINTEMPS 2015. MAIS QU’EN EST-IL VRAIMENT ? REPORTAGE. Par Marion-Ségolène Chemin Perraudin

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e prime abord, leur design en impose. Chaque bâtiment semble s’imbriquer parfaitement avec l’autre, à tel point qu’on a l’impression qu’ils communiquent entre eux. Nés d’un concours organisé par la Ville, l’îlot d’immeubles, face au centre commercial de Confluence, est prometteur : il est présenté comme une prouesse à la pointe de l’innovation. Mixité d’immeubles avec logements et bureaux, lumineux et ouverts sur la nature mais, surtout, économiques. Pour en avoir le cœur net, je me suis rendue dans l’un des derniers bâtiments en construction, appelé « Minami Sud », et situé entre deux immeubles accueillant des bureaux. L’agent immobilier m’accueille. J’ai décidé de visiter un 110 m2 situé au premier étage de l’immeuble. Je suis surprise par la luminosité. Cinq baies vitrées donnent sur la marina et le centre commercial. Mais déjà, quelque chose m’interpelle. Sur le balcon, de grandes plaques en PVC sont équipées de petits carrés : ce sont des panneaux photovoltaïques. Le principe est simple, l’énergie qu’engrangeront ces panneaux servira à 50 % aux parties communes (ascenseurs, électricité des couloirs, etc). Les 50 % restants seront revendus à ErDF. En tant qu’habitant, je ne gagne donc rien ou pas grand-chose. Je poursuis la visite. Triple vitrage aux fenêtres pour plus d’isolation, mais aussi pour plus de tranquillité. N’oublions pas qu’une ligne de chemin de fer traverse l’îlot d’immeubles. Je remarque également des capteurs aux plafonds. Une dizaine dans l’appartement. Ce sont des capteurs d’humidité et de CO2. Quant à la chaudière, elle est double, elle fonctionne à l’huile de colza et au gaz. Pour 110 m2, en chauffant environ à 21 degrés, le prix s’élève à 500€ par an ; le prix pour un T2 actuel. Les charges, elles, s’élèvent à 135€ par mois. À la pointe de l’innovation, tout est fait de domotique. Et là, c’est la cerise sur le gâteau : l’agent immoibilier m’apprend qu’à l’achat de l’appartement, une tablette tactile est livrée à chaque propriétaire. L’habitant pourra, depuis son travail ou même installé chez lui, baisser la température, ses volets, les lumières. Et si tout plante ? Pas de panique, nos chers interrupteurs restent présents. Aucune chance de se retrouver dans le noir et avec un chauffage


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L’APPARTEMENT INTELLIGENT TENTE-T-IL LES JEUNES ? Sabrina, 20 ans

Je suis locataire pour le moment mais c’est vrai que l’idée m’attire. Je trouve que ça va dans la dynamique d’aujourd’hui. Après, il faut avouer que tout ce qui est domotique et écologique coûte encore très cher. Ce qui est sûr, c’est que le jour où je ferai construire ma maison, je l’équiperai à la pointe de la technologie. Au vu des prix, je préfère investir au départ et économiser au bout de quelques années. Après, je reste toujours un peu sceptique. Nous sommes au début de tout cela, alors, pour moi, il y a toujours un risque que tout plante et que tu te retrouves tout seul, sans aucune solution. Ce premier îlot sera totalement livré au printemps 2015.

défaillant. Pour y vivre ? 620 000€, sans compter les frais annexes, l’équipement de la cuisine et les peintures. L’envers du décor En sortant de là, inutile de se mentir, je suis conquise, mais pas dupe. Je décide d’aller rendre visite à un habitant. L’immeuble fait partie de l’îlot avec les logements à énergie positive. Il se situe au-dessus d’un parc. Avec les matériaux utilisés, comme le bois, le bâtiment s’inscrit parfaitement dans le paysage. Il est également équipé de panneaux solaires, d’une pompe à chaleur, d’une chaudière à l’huile de colza et au gaz. Tout est centralisé et c’est là que le bât blesse. Cette centralisation engendre certains imprévus. « Il n’est pas rare de ne plus avoir d’eau chaude. Ça arrive une à deux fois par mois », explique mon hôte du jour, Lioris Andorola, habitant à La Confluence. Les charges, toutes comprises, s’élèvent ici à 80€ pour 55 m2. « C’est gênant, mais on s’y fait » poursuit-il. Dans cet appartement, pas de capteurs ni de triple vitrage. Alors, quel avantage y a-t-il à vivre dans un logement à énergie positive ? « Je l’avoue, tout cela ne change pas ma vie. Au final, ça revient un peu au même que dans mon ancien appartement », confie l’occupant. Deux discours bien différents au sein d’un quartier qui poursuit une même logique. Même si Confluence se veut à la pointe de la technologie et de l’innovation, pas sûr que cela change la vie de ses habitants.

Maxime, 19 ans

Moi je serais totalement pour vivre dans un appartement comme celuici. Je trouve le concept hyper sympa. Le principal pour moi c’est surtout qu’il est dans une optique écologique. Et ça me tient beaucoup à cœur. Ce qui m’impressionne dans ces nouveaux appartements, c’est leur modernité. Je sais que l’on n’arrête jamais le progrès, mais je me demande vraiment jusqu’où on est capable d’aller.

Axel, 23 ans

J’aime les progrès d’aujourd’hui concernant les objets connectés. J’adorerais vivre dans une maison intelligente où toute la maison réagit aux besoins de l’habitant. Grâce à la technologie actuelle, on peut simplifier le quotidien. J’aimerais contrôler toute ma maison en étant juste assis sur mon canapé à l’aide d’une simple tablette (contrôler la température, le robot ménage, les stores et même la machine à café). Aujourd’hui on en est capable et j’adore cette idée. Cependant, c’est important de connaître les risques de tout cela. Il faut faire attention à la sécurité et certaines données peuvent être piratées et utilisées par n’importe qui.


WATCH OUT

En France, il y a plus de 935 000 caméras (secteurs public et privé confondus). À Lyon, la mairie en revendique 414.

LA VIDÉOPROTECTION VOUS MET SOUS SURVEILLANCE 414 CAMÉRAS VOUS OBSERVENT CHAQUE JOUR DANS LES RUES DE LYON. LA VIDÉOPROTECTION DE LA VILLE PERMET À LA MUNICIPALITÉ DE SURVEILLER ET DE PRÉVOIR TOUT TYPE D’INCIDENT. DEPUIS 1998, LYON S’EST DOTÉE D’APPAREILS DE POINTE POUR TRAQUER VOS MOINDRES FAITS ET GESTES. UN ENVIRONNEMENT ULTRA-SURVEILLÉ QUI SOULÈVE FORCÉMENT QUELQUES RÉTICENCES. Par Mathilde Solages et Lizzie Carboni

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ue Saint-Jean, dans le Vieux Lyon. Je lève les yeux, une caméra, un petit dôme m’observe de son œil noir. Un mètre plus loin, un deuxième puis un troisième et ça n’en finit plus. En 500 mètres, de la cathédrale SaintJean jusqu’au musée Gadagne, mes faits et gestes ont été filmés par pas moins de huit caméras. 47 appareils enregistrent le quotidien des habitants du quartier. « Depuis quelques années déjà on observe une augmentation de la pose du dispositif », confie l’adjudant-chef Brayer, de la cellule prévention technique de la malveillance à Sathonay, près de Lyon. En 2011, 238 caméras étaient installées sur le territoire lyonnais. Trois ans après, il y en a 414 selon la ville de Lyon. Les zones ciblées sont des zones à fortes activités commerciales, ainsi que les zones touristiques et sensibles. « La vidéosurveillance a fait baisser les chiffres de la délinquance. Mais on se rend compte qu’il y a deux effets : si la qualité de la vidéo n’est pas très bonne, la caméra est juste là pour dissuader les malfrats. Mais quand ils comprennent l’effet voulu, la vidéo devient obsolète. A contrario, si la qualité est bonne, la vidéo servira à faire avancer des enquêtes », explique l’adjudant-chef Brayer. Une désinformation massive Vidéoprotection ou vidéosurveillance : la frontière est mince entre ces deux mots et pourtant, le sens n’est pas du tout le même. Depuis 2008, le terme de vidéoprotection est officiellement employé. « On change de mot pour changer la réaction des gens. Mais beaucoup de personnes se posent encore la question aujourd’hui de l’emploi de ces termes », explique Marianne Deygout, rédactrice en chef du site d’information Les Détrackeurs. Depuis quelques mois, des étudiants souhaitent mieux informer les Lyonnais. Si le terme « vidéoprotection » est préféré à celui de vidéosurveillance, c’est pourtant bien ce dernier qui figure sur les panneaux indiquant l’emplacement d’une caméra dans la rue. Mais les Lyonnais sont-ils bien conscients de la présence des caméras ? Seuls deux sites internet cartographient les caméras et leurs positions sur le grand Lyon. Difficile pourtant de s’y fier. Sur les neuf arrondissements, alors que les chiffres officiels annoncent 414 caméras, le site collaboratif Rebellyon en dénombre environ 600. Les Détrackeurs quant à eux explosent


© DR

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Des caméras dévoilées Le 13 novembre dernier, le site insecam.com révélait les failles des systèmes de sécurité. Des personnes non identifiées ont piraté de nombreuses caméras de surveillance. Depuis, le contenu de près de 70 000 caméras mal protégées a été diffusé. D’une bijouterie à Manhattan en passant par une entreprise au Bangladesh, rien n’a été épargné. C’est ainsi que Lyon a été rendu visible sous 42 angles différents, dévoilant l’intimité de particuliers à leur insu. Tout s’est retrouvé en ligne, avec les coordonnées du lieu en prime.

Big Brother, toujours à la conquête de Londres Il existe un endroit en Europe où le terme « Big Brother » prend tout son sens. Dans les années 1990, Londres renforce son système de vidéosurveillance et 500 000 caméras scrutent désormais les faits et gestes des passants. Dans tout le Royaume-Uni, les chiffres sont pharaoniques : 4,2 millions de caméras sont installées, soit une pour quatorze habitants. Pourtant, les experts pointent aujourd’hui du doigt l’inefficacité de ce système contre la délinquance.

les statistiques avec 1 200 caméras recensées. Au regard de la loi du 21 janvier 1995 relative à la vidéoprotection, « le public est informé de manière claire et permanente de l’existence du système de la vidéoprotection ». Victor Hugo disait : « La liberté commence où l’ignorance finit ». Mais le décompte des caméras brouille les pistes et laisse les Lyonnais dans l’ignorance. En dépit de cette désinformation, impossible de s’adresser à des responsables. La mairie de Lyon a ordre de ne pas divulguer le contact de la direction qui sup er vis e le dispositif. Seule information qui filtre sur la toile : 30 agents municipaux scruteraient les écrans. Mais impossible de joindre le PC de surveillance ni de savoir où il se situe. « Ils ne peuvent pas répondre au téléphone parce qu’ils doivent être concentrés », confiera une standardiste de la mairie du 1er arrondissement. Une tour d’ivoire active 24h/24 pour renforcer l’action de la police, mais derrière ses portes, personne ne sait réellement ce qu’il s’y passe. Et les libertés individuelles dans tout ça ? « La vidéoprotection entame toutes nos libertés individuelles, qui sont défendues par la loi mais cette dernière est souvent très en retard face aux nouvelles technologies », indique Marianne Deygout. C’est surtout le sentiment d’insécurité qui est guéri. « On sait tous au fond qu’on est tracé mais on ne sait pas où vont nos images », explique Marianne Deygout. Normalement, tout est fait pour que leur usage soit transparent. Il existe une « charte éthique » et même un « collège d’éthique » chargé de vérifier que rien n’est attentatoire aux libertés. Peu d’informations filtrent sur ce fameux « collège ». Les Lyonnais doivent donc avoir une confiance suprême en ces petits dômes qui surveillent leur quotidien. Une confiance difficile à donner quand on ne sait pas à qui on l’accorde.


WATCH OUT

« L’INSÉCURITÉ PERÇUE PAR LES GENS N’EST PAS UN CRITÈRE POUR INSTALLER UNE CAMÉRA » BEAUCOUP D’INFORMATIONS CIRCULENT SUR LA TOILE À PROPOS DE LA VIDÉOPROTECTION. EMMANUEL MAGNE, DIRECTEUR DU CENTRE DE SUPERVISION URBAIN DE LA VILLE Propos recueillis DE LYON (CSU), A ACCEPTÉ DE RECEVOIR EASY par Mathilde Solages MAGAZINE. IL DÉTAILLE, POUR NOUS, CERTAINS et Lizzie Carboni ASPECTS DE LA VIDÉOSURVEILLANCE. l’intervention de forces humaines sur le terrain. Emmanuel Magne, directeur du Centre de supervision urbain.

Comment justifier la pose de caméras dans certains quartiers ? L’augmentation de la pose des caméras est avant tout un souhait politique. Chaque caméra doit être justifiée dans le temps et dans l’espace. Il y a deux principes à respecter : finalité et proportionnalité. Avant d’installer une caméra, on demande l’autorisation de la préfecture et la pose d’une caméra est valable pour une durée de cinq ans, renouvelable. Par exemple, sur le quartier de Perrache, entre le nord et le sud de la gare, on a une dizaine de caméras installées. D’un point de vue réglementaire, ce qui nous intéresse, c’est l’insécurité réelle, basée sur des faits avérés. On tient aussi compte de l’insécurité perçue par les gens mais ce n’est pas un élément qui justifie la pose de caméras auprès des services de la préfecture. Il faut aussi savoir que la vidéoprotection est un outil de gestion de la Ville et participe à son bon fonctionnement. Par exemple, lorsque les agents aperçoivent un SDF dans la rue, ils font un signalement au Samu Social, pour lui proposer un logement pour la nuit. De même, on peut agir sur le niveau de la Saône, un malaise sur la voie publique, ou encore un départ d’incendie. La vidéo est complémentaire et peut faciliter

Comment parvenez-vous à mesurer l’impact de la vidéoprotection sur la délinquance ? J’entends souvent qu’il n y a pas d’études sérieuses. Mais pour m’intéresser à ce domaine, je sais qu’il y a une littérature gigantesque pour mesurer et quantifier l’impact de la vidéo. La Ville de Lyon a été la première ville de France à faire évaluer son dispositif de vidéoprotection par un bureau d’études en 2003‐2004, avec des enquêtes sur le terrain et des périodes d’observation. Il y a aussi un bilan qui est fait chaque année, s’appuyant sur les statistiques des services de police. Pour que l’étude soit sérieuse, elle doit s’inspirer d’indicateurs précis, qui ne sont pas communicables car ils relèvent du domaine du secret professionnel. Que pensez-vous des cartographies diffusées par les deux sites collaboratifs « Rebellyon » et « les Détrackeurs » ? Il faut savoir faire la distinction entre les caméras de l’espace public et celles de l’espace privé, qui ont des finalités différentes. C’est la mairie qui détient les compétences en termes de sécurité et de tranquillité publiques, pour les installer. Les caméras répondent à des logiques et des législations différentes. Il ne faut pas mélanger la vidéosurveillance du trafic routier

avec celle des commerçants, par exemple. La Ville de Lyon en gère 414. Concernant les sites web, je n’ai pas de commentaires à faire sur ce genre d’éléments. De la part de la Ville de Lyon, ne pas diffuser de cartes est un choix des décideurs qu’il ne m’appartient pas de commenter. En plus de cela, les caméras peuvent être amenées à se déplacer. Sur internet, on peut parfois lire qu’une caméra coûte entre 8 000 et 40 000€. Que pouvez-vous nous dire sur le prix réel ? Je ne peux ni vous donner un prix, ni même une fourchette. Je pourrais vous annoncer un tarif, mais il serait faux puisqu’il est variable selon le temps et l’espace. Il y a dix ans, une caméra coûtait beaucoup plus cher qu’aujourd’hui. Le marché de la vidéoprotection est devenu un marché de masse, et les prix ont chuté au fil du temps. Ensuite une caméra que l’on va installer dans le Vieux Lyon, un site protégé, nous reviendra forcément plus cher en terme de génie civil. Il faut aussi savoir que toutes les caméras sont différentes, elles s’adaptent à leurs emplacements. Par exemple, le prix d’une caméra dotée de capteurs de lumière pour les endroits sombres, aura un coût plus élevé qu’une caméra classique. Il faut aussi prendre en compte le câblage, la fibre optique et tout ce qui va avec la pose. Le dispositif a permis de sauver plusieurs vies, alors je pense que le coût en vaut la peine.


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« AVOIR UNE PLEINE CONFIANCE ENVERS LES AGENTS DE VIDÉOPROTECTION » POUR UN CONSENSUS ENTRE MAINTIEN DE L’ORDRE ET RESPECT DE LA VIE PRIVÉE, LA VILLE DE LYON A FORMÉ, EN 2004, UN COLLÈGE D’ÉTHIQUE. RÉPONDANT AUX ATTENTES LÉGITIMES DES CITOYENS, IL TENTE DE MAINTENIR, DANS SON CADRE, LE TRAVAIL DE SURVEILLANCE, CAR LES RISQUES SONT MULTIPLES.

L’

équipe municipale de Lyon est consciente de la volonté de l’électorat d’installer plus de caméras de vidéoprotection. Mais l’équipe de Gérard Collomb souhaite parallèlement garantir une éthique, quant à l’utilisation de ce procédé. Ainsi, le collège de la vidéoprotection des espaces publics est composé de 18 membres. Des élus de tous bords, des personnalités du monde du droit, de l’économie et de l’éducation, ainsi que des représentants des associations de défense des droits de l’Homme. Ils se réunissent tous les 2 à 3 mois. Dans l’absolu, le collège d’éthique n’a pas de pouvoir décisionnaire. Il émet seulement des avis afin de limiter les risques de dérives. C’est dans ce sens qu’une charte a été créée, même si la Ville de Lyon est déjà allée, de son plein gré, plus loin dans la protection de l’anonymat. En effet, la loi française prévoit une suppression des enregistrements un mois après la prise de la vidéo. À Lyon, les vidéos sont conservées 15 jours, avant d’être supprimées. Et ce, de façon automatique. Sauf si la police judiciaire les demande entre-temps. Des craintes légitimes Toutefois, plusieurs problématiques restent à définir. Et une, en particulier : qui surveille les agents de vidéoprotection ? Pour Daniel Chabanol, président du collège d’éthique de la vidéoprotection de la Ville de Lyon depuis cinq ans, « il ne faut pas déresponsabiliser les

fonctionnaires en se méfiant d’eux, mais au contraire avoir une pleine confiance dans leur respect de la charte et leur professionnalisme, tout en assurant un encadrement ». De plus, sur le plan technologique, il est déjà impossible de réaliser certaines opérations, comme observer un lieu privé, par exemple. Daniel Chabanol reconnaît néanmoins que « lorsqu’il y a un dérapage, par exemple un agent qui regarderait ce qu’il ne devrait pas regarder, on ne peut pas le savoir...». « L’effet plumeau » Enfin, se pose le souci de l’efficacité de la vidéoprotection. Sur ce point, le collège d’éthique n’hésite pas à différencier sa productivité en fonction du type de criminalité. Selon eux, la plupart des caméras ne lutte pas

Par Julien Damboise

directement contre la délinquance. Lors de « petites affaires », les caméras permettent aux équipes de police d’arriver plus rapidement sur place et d’éviter un drame. « Mais le malfrat de haut vol, il met un masque », explique Daniel Chabanol. Cet expert ne croit pas vraiment que la vidéoprotection empêche les délits, mais plutôt qu’elle les élucide. Pour tenter de répondre à ces questions émises depuis le début de l’installation des caméras, une thèse sur les effets de la vidéoprotection est en cours de réalisation. Les résultats sont attendus d’ici à la fin de l’année 2015. Avec les avancées technologiques, comme la reconnaissance faciale ou l’analyse de plaques minéralogiques, d’ici quelques années, il est évident que d’autres enquêtes seront nécessaires.


SOMEWHERE

DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES, LYON SE MODERNISE ET DEVIENT UNE VILLE CONNECTÉE DITE « INTELLIGENTE ». AVEC DES PROJETS AMBITIEUX COMME CONFLUENCE, LA CAPITALE DES GAULES ACCROIT SA QUALITÉ DE VIE ET SE MET À L’HEURE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES. SES EFFORTS EN ONT FAIT LA 1ÈRE VILLE CONNECTÉE DE FRANCE, SELON UNE RÉCENTE ÉTUDE. OBJECTIF DÉSORMAIS : LA PÔLE POSITION EUROPÉENNE. Par Arthur Vernassière

LYON, LA VILLE LA PLUS « INTELLIGENTE DE FRANCE

L

yon se veut intelligente. Une volonté soutenue par l’étude de plusieurs classements des villes dites « intelligentes ». Ces classements prennent en compte la modernité, la connectivité, les infrastructures innovantes ou encore le développement durable mis en place par la ville. Les critères diffèrent parfois, selon les études réalisées. Cela n’empêche pas Lyon de figurer en bonne position à chaque reprise. Première en France – sauf pour un classement du Parlement européen, qui donne Montpellier en tête –, parmi les meilleures d’Europe… L’ambition lyonnaise en matière d’innovation technologique grandit. Électricité et innovations, les points forts de Lyon Développer Lyon comme étant une « smart city » différencie la ville des autres métropoles françaises. En construisant une ville intelligente, Lyon a clairement choisi le virage numérique pour s’engager sur la grande ligne droite de la modernité. Le chemin parcouru est encourageant. Plus de 4 000 entreprises sont centrées sur le numérique pour un total de 34 000 emplois. Ces chiffres font de Lyon le 2e pôle numérique de France. Les services innovants de la ville sont en avance sur Lille et Nantes, respectivement 2e et 3e du classement des villes les plus « intelligentes » du pays. « En général, on parle peu de Lyon dans les smart grids, alors que l’on détient les plus grosses innovations à l’échelle européenne », explique Isabelle Faivre, chargée de mission marketing au Grand Lyon. Les smart grids sont une forme de réseau électrique intelligent. « Des projets sont nés comme Smart Electric Lyon et Linky. Lyon est devenue un territoire majeur de l’implantation des smart grids en Europe ». C’est seulement sur les énergies renouvelables et les éco-quartiers que Lyon se trouve en retard sur ses concurrents français.

Lyon

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Lille

Nantes

Quelle est la ville française la plus intelligente ?

Source : M2Ocity

Des projets fondateurs et d’autres à venir Ce sont les projets de grande envergure qui ont permis à Lyon d’arriver à ce stade de développement. « C’est grâce à des partenariats innovants, comme avec Nedo, une entreprise japonaise qui a investi 50 millions d’euros pour lancer son concept, que Lyon a évolué dans le bon sens » avance Isabelle Faivre.

Les critères retenus sont les suivants : la ville doit être durable, avoir un bon cadre de vie, des réseaux téléphoniques et internet de qualité, une bonne gestion de l’eau et des déchets, des bâtiments intelligents et des transports écologiques.


© Gale International

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La ville de Songdo, en Corée du Sud, est considérée comme la plus « intelligente » du monde.

Des projets sont en cours d’expérimentation, d’autres sont à l’étude. Lyon a compris que pour faire face à la concurrence mondiale, dans le domaine novateur des villes intelligentes, il faut sans discontinuer, lancer des projets (se voulant) inventifs.

Copenhague Les critères retenus sont les suivants : les transports, l’économie numérique, la formation, l’écologie et l’innovation. Paris représente la France à la 5e place.

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Amsterdam

Vienne

Source : Fastco Exist

Les exemples danois et sud-coréen Si Lyon domine l’Hexagone, elle doit encore progresser pour atteindre les sommets européens et mondiaux. Sa politique environnementale est moins importante que certains de ses homologues européens comme Copenhague, ville la plus « intelligente » d’Europe. La capitale du Danemark a opté pour une politique verte et durable. C’est sur ce point qu’elle prend l’ascendant sur les autres villes d’Europe. Dans le monde, c’est l’Asie qui voit le futur avec un bel horizon. Selon le magazine de voyage CN Traveler, la ville sudcoréenne de Songdo est la plus « intelligente » du monde. Elle a vu le jour via un projet pharaonique estimé à 35 milliards de dollars. Construite depuis le début des années 2000, Songdo est un véritable laboratoire où de très nombreuses créations élaborées par de puissantes entreprises high-tech sont testées. Les villes du futur doivent donc être à l’affut des nouvelles innovations et en permanence dans la volonté de mettre en place de nouveaux projets pour s’adapter aux avancées technologiques. Est-ce que Lyon ressemblera bientôt à Coruscant, capitale de la république galactique de Star Wars ? Cela reste évidemment de la science-fiction. Mais l’objectif rêvé, toujours ancré dans l’imaginaire humain, c’est bien celui-ci.

Quelle est la ville européenne la plus intelligente ?


© DR

LINKS

Gérard Collomb au salon Pollutec, dédié aux nouvelles technologies, à Lyon-Eurexpo, le 27 novembre 2012.

Dans Montréal, Lyon et Japon, il y a « ON » DANS SA QUÊTE D’INTELLIGENCE, LYON JOUE DE SES RELATIONS INTERNATIONALES POUR FAIRE RAYONNER SES DÉVELOPPEMENTS ET RÉALISER DU « SOURCING » D’INNOVATIONS QUI POURRAIENT ÊTRE DÉPLOYÉES LOCALEMENT. AVEC LE JAPON ET LE QUÉBEC, ELLE S’EST TROUVÉ DEUX PRÉCIEUX ALLIÉS. Par Jules Savouré

L’ouverture de Lyon sur le monde ne date pas d’hier. La capitale de la soie française a en effet noué de forts liens et partenariats avec l’étranger lors de l’apogée industrielle du précieux tissu. Avec le Japon, notamment Yokohama, 2e ville du pays et son premier port exportateur de soie. Tout comme Montréal, 4e ville francophone au monde, tissant son cocon urbain. Ou serait-ce sa toile ? Ces dernières années, les manifestations, actions, réflexions et projets se multiplient avec Montréal au Canada et Yokohama au Japon. Ces deux villes n’hésitent pas à exporter leurs idées et leurs savoir-faire pour aider la capitale des Gaules à mieux s’adapter aux enjeux futurs. Au plan financier, cet engagement prend plusieurs formes. D’un côté, un puissant « pôle investissements privés » se dégage du côté du Japon alors que de l’autre, un « pôle pouvoirs publics » se dessine du côté de nos cousins québécois, classés au 24e rang des villes intelligentes et numériques, selon l’Intelligent Community Forum. De son côté, Lyon a pris le parti d’un modèle mixte, où les organismes publics pilotent les projets et soutiennent les ententes entrepreneuriales dans un objectif commun. Des paroles et des actes En juillet 2013, une importante délégation lyonnaise d’une cinquantaine d’individus et emmenée par Gérard Collomb, s’est rendue à Tokyo, Yokohama, Nagoya et Osaka. Objectif : souffler sur les braises des partenariats existants avec des entreprises japonaises implantées sur le territoire lyonnais. Parmi elles, JTEKT, Daikin, Toshiba, Toray ou encore Olympus. Le président Hideo Hato et les représentants de la NEDO, agence publique nippone, étaient également présents. Équivalente de l’ADEME en France, cette dernière a d’ores et déjà investi 50 millions d’euros sur le projet Lyon Confluence (voir encadré), premier démonstrateur « smart community » en Europe. Une visite qui symbolise bien les liens existants entre Lyon et le Japon, notamment au plan des nouvelles technologies. Yokohama est d’ailleurs jumelée avec la capitale des Gaules depuis 1959. C’est là-bas que s’était tenu, en septembre 2012, un colloque organisé conjointement par les Universités de Lyon et Tokyo à propos des vulnérabilités urbaines. Le Japon est souvent en pointe sur les outils futurs et, dans l’optique de construire une ville intelligente, il devient un grand fournisseur d’idées novatrices en matière de technologies. Celles-ci sont adressées aussi bien aux particuliers qu’aux entités administratives.


Agir seul pour la communauté urbaine et ensemble pour l’individu Si Lyon collabore depuis toujours avec le pays du Soleil Levant, elle s’inspire aussi Outre-Atlantique, notamment du côté de Montréal. En 2012, les deux villes s’étaient réunies lors d’un colloque pour mener une réflexion commune sur « les nouveaux outils de l’aménagement et du développement des grandes régions urbaines ». Preuve que les problématiques sont à rapprocher et que des réflexions sont menées conjointement. En 2011, une collaboration avait d’ailleurs été lancée avec Montréal sur la question de la consultation publique à l’égard des grands projets urbains. Depuis, un accord de partenariat réunissant le pôle de compétitivité Lyonbiopôle et son homologue montréalais, a même été signé. Une trentaine d’entreprises montréalaises était d’ailleurs présente pour l’occasion. Logiquement, les interactions entre les deux villes devraient donc être amenées à se densifier. Des interactions qui devraient être fructueuses, Montréal positionnant clairement le citoyen au cœur des enjeux de la ville intelligente. En effet, pour Stéphane Goyette, directeur du tout nouveau Bureau de la Ville Intelligente de Montréal, il est indispensable que « les modèles d’affaires à vision numérique et technologique soient au service de la société ». Mais cela « ne peut pas se faire sans retour d’ascenseur », poursuit-il. Il attend donc des citoyens de sa ville qu’ils rendent la pareille. Car si c’est aux pouvoirs publics de prendre les choses en main, la transformation de la ville reste l’affaire de tous. La ville intelligente est en quelque sorte un écosystème, dont le moteur est le citoyen. Et qui a d’autant plus de chance de progresser qu’elle est connectée au monde.

Le Grand Lyon et NEDO à Confluence Rattachée au ministère de l’Environnement nippon, la New Energy and Industrial Technology Development Organization (NEDO) met un pied à terre sur le Vieux Continent. Unique en Europe, le démonstrateur « Smart community » de Confluence conduit par le Grand Lyon et NEDO, se veut être « le » quartier exemplaire en matière d’efficience énergétique. Il se base sur l’ambition du progrès humain constant et sa capacité à s’adapter à un environnement évolutif, à l’urbanisme, à l’architecture, à la technologie et à l’écologie. Plus de 30 partenaires internationaux, nationaux et régionaux se regroupent autour. C’est un modèle économique rare développé par le Grand Lyon : aucun financement direct de la communauté d’agglomération, un allié étranger puissant dans l’innovation et l’investissement et la possibilité pour ces firmes privées de stabiliser leurs modèles en les confrontant à la réalité. Le Grand Lyon orchestre ou coordonne aujourd’hui une quarantaine de projets dans l’énergie, les services, la mobilité ou la santé, quasiment tous portés par le privé.

En mai dernier, le maire de Montréal Denis Coderre était en mission en France, où il a rencontré Gérard Collomb.

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C’est notamment le cas en matière de transport, dont l’optimisation est une composante essentielle de la « smart city », visant une clientèle plus globale ou « masse citadine ». Coûts réduits, confort amélioré pour les usagers, productivité et échanges décuplés... De ce côté-là, le Japon ne manque pas d’idées. À titre d’exemple, sur l’île étriquée, la compagnie Central Japan Railway Compagny a annoncé vouloir, d’ici à 2027, terminer et mettre en fonction une ligne ferroviaire Tokyo-Nagoya sur laquelle léviteraient les trains grâce à des aimants. Elle permettrait de rallier les deux villes en 40 minutes, à une vitesse de 500 km/h. Un modèle de transport que nos amis japonais ne manqueront pas d’exporter par la suite. À noter que dans ce même domaine, Montréal n’a pas à rougir puisque ses transports en commun (gérés par la Société de Transport de Montréal) sont considérés comme les plus efficaces, rapides et ponctuels d’Amérique du Nord.

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