10 du mat ISCPA num. 10 03022016

Page 1

LA LAÏCITÉ :

ET SI ON LA CONNAISSAIT MAL ?

PROMOTION 2015 / 2016

-

ISCPA

-

J3 - Mercredi 3 FEVRIER 2016 N°10

Actualité, analyse et dérision, tout sur les religions à Lyon

Scandale à l'hôpital psychiatrique p.3

Portrait d'un jeune rabbin moderne p.6

@le10duMat

Les Hare Krishna, au pays du dieu bleu p.7

www.10dumat.iscpalyon.com


Le monde des religions

EDITO

Maxime Feuillet

Rédacteur en chef

La Grâce à l’état Sauvage

D

ans la religion chrétienne, la grâce est relative à la faveur divine. Elle correspond aussi au pardon, à l'affection, à l'amour et à la bienveillance de Dieu. L’affection et l’amour, deux sentiments que Jacqueline Sauvage n’a pas vraiment connus dans sa vie. Battue par son mari depuis leur union en 1965, elle a décidé d’y mettre un terme 47 ans plus tard, en lui tirant trois coups de fusil dans le dos. Ce 10 septembre 2012, elle est passée du statut de victime innocente à celui de justiciable. Et la justice n’a pas été clémente. Dix ans de réclusion criminelle pour meurtre sans préméditation, une décision confirmée en appel. Seule la grâce présidentielle pouvait mettre fin à cette peine prononcée par le tribunal. La grâce, dans son acception religieuse, est vue comme une « faveur imméritée » : « La Grâce ne touche pas ceux qui sont dignes de la faveur divine mais atteint ceux qui s’en estiment indignes. » Mais la grâce va au-delà du pardon. Ainsi, même si le communiqué de l’Elysée insiste sur le caractère « exceptionnel » de la situation, François Hollande, en graciant Jacqueline Sauvage, fait plus que pardonner. Il fait de cette sexagénaire un symbole pour toutes les femmes victimes de violences conjugales. Coup de grâce. Pour réagir et approfondir la lecture www.10dumat.iscpalyon.com 10dumat@iscpalyon.net

Directrice de la publication Isabelle Dumas

Directrice de la rédaction Dominique Humbert

Rédacteur en chef Maxime Feuillet

Rédacteurs

David Hernandez, Lilian Gaubert, Laura Turc, Florentin Perrier, Maxime Feuillet, Leo Roynette, Léa Masseguin, Charline Bakowski, Hugo Borrel, Charlène Ravella, Pierre-Antoine Barut, Arnaud Bastion, Johanne-Eva Desvages, Paul Dalas, Stéphane Monier, Morgan Couturier, Axel Poulain.

Jeune Afrique : une caricature qui fait polémique au Sénégal C’est une tempête africano-médiatique qui s’abat sur le journal Jeune Afrique depuis le 28 janvier.

E

n cause  ? La caricature de Cheikh Ahmadou Bamba par le dessinateur Damien Glez sur le site internet du journal. Illustrant un article sur l’homosexualité, le dessin a été vu comme une agression faite à l’encontre de celui qui est considéré comme le fondateur du mouridisme. Décédé en 1927, Bamba était avant tout un homme d’Allah, résistant anticolonial et prônant le dialogue. Face à la vague d’indignation semblable à celle vécue par Charlie Hebdo au moment des caricatures de Mahomet, Jeune Afrique a supprimé l’article et rédigé un message d’excuse. Alors que la confrérie des mourides a appelé au calme, le gouvernement sénégalais a regretté, dans un communiqué, « la maladresse incompréhensible et inadmissible de la part d’un organe de presse qui s’identifie à l’Afrique et censé connaître, défendre et promouvoir la culture et les valeurs africaines ».

What Dafouk ?

L

a semaine dernière, l’apparition de Idris Sihamedi, dans l’émission Le Supplément de Canal+, avait fait vivement réagir sur le web et l’équipe de Dafouk s’est emparé du sujet en fin de semaine dernière avec une vidéo pleine de clin d’œil. Sur le principe des « Premières fois », très à la mode sur Youtube, le groupe d’humoristes a répondu à sa manière aux propos de Sihamedi, président de l’ONG Baraka City, qui « ne serre pas la main aux femmes ». L’occasion pour Dafouk et sa vidéo « des imams et rabbins serrent la main d’une femme pour la première fois » de rejeter la position que peuvent adopter certains hommes musulmans et juifs face à la femme. Alors oui, on tombe dans l’exagération et le ridicule dans cette parodie mais comme le dicton dit « le ridicule ne tue pas » et c’est peut-être par le rire que les choses bougeront. En trois jours, la vidéo a été vue près de 7000 fois.

C

Pitch my Church

’est à l’initiative de l’association « Église et innovation numérique », que quatre startups se sont réunies à la paroisse Saint Honoré d’Eylau, dans le 16e arrondissement de Paris. Au « menu » pour les 500 convives présents, vivre sa foi avec son temps. Sur le modèle de location d’appartements tel Airbnb, les catholiques pourront parcourir l’Europe et dormir chez d’autres catholiques. Ils pourront aussi participer à la quête depuis leur smartphone. Autant d’innovations qui risquent de plaire au pape François qui disait « n’ayez pas peur d’être les citoyens du territoire numérique ».

160

Sur 900 mariages juifs à Paris, 160 couples décident de célébrer leur union en Israël. C’est le chiffre annoncé lundi par Times of Israël. Une augmentation de 20 mariages par rapport à 2014 qui s’explique par la montée de la peur chez les juifs de France depuis les attentats de janvier 2015. Mais aussi du coût d’un mariage largement plus rentable en Israël.

2


Actualité

Quand l'infirmier psychiatrique maltraite son patient ©DR

Des injures à caractère raciste et des sévices physiques infligés à l’aide d’une pince. C’est ce qu’a subi pendant près de deux ans un patient de l’hôpital psychiatrique Charles-Perrens de Bordeaux. Une attitude que condamne l'association Le Pas à Lyon.

D

énonçant l’attitude du soignant dans un communiqué du 29 janvier dernier, la Commission des citoyens pour les droits de l’Homme indiquait « Les droits humains les plus fondamentaux sont bafoués sous couvert de "santé mentale". Le suspect est un infirmier de 46 ans, accusé d’avoir fait subir des sévices physiques à l’un de ses patients, âgé de 35 ans, à l’hôpital psychiatrique CharlesPerrens de Bordeaux. Depuis juillet 2013, le déficient mental était régulièrement injurié et maltraité à l’aide d’une pince à viennoiseries. C’est une infirmière qui avait prévenu sa hiérarchie en découvrant des marques sur son bras. Le mis en cause s’est justifié en déclarant qu’il ne « l’aimait pas ». Il aurait également tenu des propos à caractère raciste, traitant notamment son patient de « sale nègre », indique le journal Sud Ouest. Un fait divers qui fait réagir la CCDH : « Nous sommes contactés chaque semaine par des familles et des victimes d'abus. », explique-t-elle dans son communiqué. Michel Younès, docteur en théologie, explique : « Pour la religion chrétienne, la protection des faibles est très importante. » « Il arrive parfois que les médecins psychiatres profitent de leur autorité »

3

D’autres personnes préfèrent raconter leur hospitalisation sur internet (forumpsy), comme Elodie, internée en décembre 2011 dans ce même hôpital. La jeune fille, alors âgée de 16 ans, en garde un très douloureux souvenir : « ce fut un mois et demi d'enfer (…) une déshumanisation, la sensation de n'être rien, personne, pire qu'un animal (…) j'en suis ressortie anorexique ». L’aumônerie Le Pas rencontre des personnes qui sortent d’hôpitaux psychiatriques, avec des troubles psychiques mais « aucun cas de sévices » n’a été constaté parmi les patients accueillis. « Il arrive parfois que les médecins psychiatres profitent de leur autorité sur elles. Ce qui me désole, c’est quand ils ne considèrent pas leur patient comme une personne à part entière », regrette Patricia Mugnier, responsable de l'aumônerie.

ou brûlées sur le bûcher. « Aujourd’hui cette vision du trouble comme étant lié à une punition divine est dépassée », indique Michel Younès. D’après Pierre Durieu, directeur de cabinet du cardinal Barbarin à Lyon, ce changement se retrouve dans les livres saints. « Dans l’ancien testament le handicap et la maladie sont marqués par une forme de rejet. Le tournant est à observer dans la Bible avec Jésus » annonçant qu’eux aussi sont aimés de Dieu. Un amour qui semble réciproque puisque ces personnes sont « souvent très spirituelles », indique Pierre Durieu. L’aumônerie Le Pas a même créé un « atelier de partage sur les textes de la Bible », indique la responsable, à la demande d’une habituée souhaitant « mieux connaître la foi chrétienne ». Johanne-Eva Desvages

« On les accueille de façon chrétienne » À l’aumônerie Le Pas, on accueille 45 à 50 patients par semaine « de façon chrétienne, pas en faisant des prières mais en étant convivial et sans les juger », indique Patricia. Pourtant, au Moyen-Âge, la folie était considérée comme une punition divine pour les pêchés commis. La plupart des personnes aliénées ou atteintes de troubles psychiques étaient exorcisées, fouettées

©DR


e s

Le dossier

Laïcité : souvent imitée, jamais égalée Depuis 1905 et l’entrée en vigueur de la loi séparant l’Église de l’État, la France est devenue un pays laïc. Mais en un siècle, des religions ont été importées, et le principe de laïcité remis en cause. Léo Roynette

Lilian Gaubert

C

’était au départ un idéal. Votée puis adoptée en 1905, la loi portée par le député Aristide Briand rendait à l'Etat son indépendance vis-à-vis de l'Eglise (voir encadré). Désormais, nul jeu de pouvoir entre ces deux acteurs de la société si étroitement liés auparavant, nul moyen de pression, nul besoin de justifier une décision présidentielle par le moyen d’accomplir le dessein de Dieu. La messe était dite. Par conséquent, l’État se devait d’être neutre, de n’allouer à aucun culte quelque subvention, mais de respecter les religions et de leur donner liberté de conscience en ne les plaçant pas en concurrence, en vertu de l’égalité républicaine. Héritage religieux

Cependant, il en a coulé de l’eau sous les ponts, en cent ans. Les Juifs de France ont connu la Shoah en 39-45, les Musulmans en grande partie d’origine maghrébine sont arrivés par milliers dans les années 50 suite au recrutement massif des indus-tries françaises, et les Chrétiens de France se sont pour beaucoup éloignés de leur religion, de moins en moins présente dans les mœurs. En revanche, les lieux de culte chrétiens, eux, sont restés et témoignent des racines chrétiennes de notre pays. En tout cas, l’Église aura su se rendre inévitable, puisqu’il est rare de ne pas trouver une chapelle chrétienne dans une de nos 36.000 communes. L’islam et le judaïsme ont quant à eux été moins gâtés. Point d’appui financier de la part de l’État. Face à la vitalité du culte musulman, de nombreux

La laïcité, plus facile à dire qu'à appliquer ©DR

élus locaux ont alors tenté de contourner la loi de 1905, qu’ils voient comme une source d’inégalités entre cultes « traditionnels » et « nouveaux ». Une injustice qu’ils dénoncent en vue de séduire un nouvel électorat, notamment dans les communes où la population musulmane est significative. Une promesse d'une liberté de culte renforcée attire forcément des intentions de votes. Par le biais de dérogations, les mairies peuvent prêter leur concours à l’édification de nouveaux lieux de culte. La religion de retour Avec l’importation de nouvelles religions, mais aussi par un phénomène de déracinement qu’auraient subi les populations durant le 20e siècle les menant vers une disparition de leur mémoire, la religion fait son retour. C’est la sociologue de la religion Danièle Hervieu-Léger qui l’affirme dans son livre La Religion pour Mémoire : « privé de la sécurité de communautés stables qui offraient à chacun l’évidence d’un code de sens fixé, mais privé aussi des grandes visions universalistes portées par les idéologies modernistes, cet individu « flotte », dans un univers sans point fixe... ». Ce serait donc le monde moderne et sécularisé qui, paradoxalement, après avoir détruit l'autorité traditionnelle, crée un nouveau besoin de sens collectif. C'est donc, d'après Hervieu-Léger, ici, dans cette « reconstruction de sens » qu'il faut chercher les manifestations modernes de la religion. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, laïcité n’est pas incom-

patible avec religion, bien au contraire. C’est en sa vertu que les mosquées et tout autres lieux de culte devraient pouvoir être édifiés sans que leur communauté respective subisse la xénophobie de certains, peureux que leur pays « judéo-chrétien » ne devienne une « terre d’islam », comme l’avait déclaré en 2009 Christine Boutin, la présidente du parti chrétien démocrate. D’ailleurs, personne ne semble choqué de l’existence de son parti, et pourtant l’entrée en lice du parti de l’Union des Démocrates Musulmans Français pour les élections départementales avait créé un véritable tollé. Pourtant, la charia n’est mentionnée nulle part. Inconscients, les Français qui prônent la laïcité quand il s’agit de dénoncer la multiplication des mosquées ne savent pas qu’ils coupent eux-mêmes la branche sur laquelle ils sont assis. La sécularisation, c’est quoi ? Selon le dictionnaire Larousse, la sécularisation est le transfert à l'État des biens ecclésiastiques ou exercice par l'État de fonctions précédemment réservées au clergé (état civil, assistance publique, enseignement). Cette dernière a eu lieu en France en 1905 avec la loi pacificatrice dite de « séparation des Églises et de l’État ». Elle explique que « la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées (…) dans l'intérêt de l'ordre public » (Article 1). Ainsi depuis cette loi « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ».

4


« L’objectif était de réduire l’influence de l’Eglise sur la société » Alors que le thème des religions revient sans cesse dans les débats politiques, Daniel Moulinet, professeur en histoire religieuse à l’Université catholique de Lyon, raconte l’origine de la sécularisation en France, suite à la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat. Il aborde également les conséquences de cette mesure sur la société actuelle. Pouvez-vous nous rappeler le contexte Pourquoi ont-ils finalement franchi le et le but de la loi de 1905 concernant pas ? la séparation des Églises et de l'Etat ? Le concordat s’avérait de plus en plus inaLa période de 1870 a été très dure pour dapté à la situation. Il y avait un différend la France, mais aussi charnière. Car pen- profond entre les hommes du gouvernedant le Second Empire, on avait le sen- ment et les évêques. La politique gouvertiment d’une alliance entre le régime nementale était dirigée contre l’influence de Napoléon III et l’Église. Comme les de l’Église et paradoxalement, les clercs catholiques militants sont monarchistes étaient payés. Il y a eu plusieurs prétextes l’Église semble appartenir au passé. Par utilisés pour dénoncer le concordat. Mais conséquent quand les Républicains ar- la vraie raison c’était, comme le dit ma rivent au pouvoir (majorité à la chambre collègue Jacqueline Lalouette, qu’on était en 1873 puis au sénat en 1879), ils vont passé du concordat au "discordat". faire une politique qui visera à réduire l’influence de l’Église catholique sur la Quelles ont été les répercussions de société française. Cette politique se tour- cette séparation ? nera d’abord vers l’éducation pour diminuer leur influence sur la jeunesse. Parce Tout d’abord, économiques pour l’Église que les Républicains ont la sensation qu’il catholique car les clercs n’ont plus été y a deux jeunesses : une jeunesse élevée payés. Mais les évêques ont retrouvé leur dans les écoles de la République qui a liberté de parole par rapport au gouvercomme valeurs le progrès, la philosophie nement. Ça a tout de même provoqué un des lumières, la science… Et puis une jeu- gros traumatisme dans le clergé jusqu’à la nesse élevée dans les écoles catholiques, guerre de 1940. notamment celles tenues par les Jésuites, avec l’idée que la société doit obéir à L’article 2 dit que « la République ne l’Église, que la foi est supérieure à la rai- reconnait, ne salarie, ni ne subvenson et qui aspire au retour d’un roi. Puis tionne aucun culte ». Mais certains en 1901 il y a la loi sur les associations qui contournent la loi pour avoir des subcherche à surveiller les congrégations re- ventions ? ligieuses. Puis celle de 1904 qui interdit tout enseignement religieux que ce soit On peut penser à la cathédrale d’Evry dans le public ou dans le privé. Et ensuite pour le culte catholique ou à certaines est arrivée la loi de 1905. Elle était dans mosquées. Ils contournent un peu la loi le programme électoral de Jules Ferry dès en inscrivant dans l’édifice religieux une les années 1880 mais quand il est arrivé partie qui aura une vocation culturelle. au pouvoir il ne l’a pas mise en place car Est-ce vraiment détourner la loi ? Peutfaire cette séparation c’était aussi donner être dans les textes mais je ne suis pas de la liberté à l’Église catholique. Donc sûr dans l’esprit. Les mœurs évoluent et les gouvernements ont hésité pendant 25 en 1905 il n’y avait pratiquement pas de tourisme. Il faut sentir quel est l’esprit de ans avant de donner cette liberté.

5

la loi et ne pas rester dans une lecture trop littérale. Cette loi a-t-elle d’ailleurs évolué depuis 1905 ? Oui il y a eu beaucoup d’ajustements. Je crois que, dans son livre, Emile Poulat a totalisé 50 aménagements à cette loi. Mais ce qu’il faut en plus regarder c’est la jurisprudence. C’est évidemment très important, surtout pour une loi ayant plus de 100 ans. Il y a des partis politiques (Parti Chrétien-Démocrate et Union des Démocrates Musulmans Français) qui se revendiquent d’une confession. N’estce pas paradoxal? Tout d’abord ce ne sont pas des partis qui ont des gros impacts, mais tout dépend ce que l’on met derrière. Il y a déjà eu des partis catholiques en France. On l’a un peu oublié mais en 1944 c’est un parti catholique qui est au pouvoir : le MRP, Mouvement républicain populaire. Mais ce dernier a une liberté par rapport à la hiérarchie catholique. Ce n’est donc pas incompatible mais la question est quel est le degré de liberté par rapport aux organes de gouvernement de la religion ?

Daniel Moulinet


Portrait NISSIM MALKA : UNE BOUFFÉE D’AIR FRAIS À LA SYNAGOGUE

Nissim Malka porte toujours un grand chapeau juif © Charline Bakowski

Nissim Malka, 28 ans, est l’un des plus jeunes rabbins de la région. Il s’est installé à la grande synagogue de Lyon il y a un an. Plein d’ambitions, il souhaite avant tout mêler la religion à la société actuelle. Portrait. chapeau laissant apparaître la kippa qu’il n’a jamais quittée depuis son enfance. Un signe de rébellion suite à l’appel du président du consistoire de Marseille à ne plus porter ce symbole de la tradition juive ? Peut-être bien. Lui, préfère parler de fausse polémique. « De toute façon, les juifs font toujours l’inverse de ce qu’on leur dit (rires). Il y a vingt ans, ma mère conseillait déjà à ma sœur de cacher son collier juif. C’est un problème de fond », affirme-t-il.

Un métier exigeant

C

’est un jeune homme à la bonne humeur communicative que vous rencontrerez si vous vous rendez à la grande synagogue du quai Tilsitt, dans le 2e arrondissement. Lyonnais d’adoption depuis maintenant un an, Nissim Malka n’a qu’une idée en tête : donner un petit coup de jeune à l’édifice religieux âgé de plus de 150 ans. Après avoir garé son vélo, Nissim rejoint le 4e étage de la synagogue, dans lequel il s’est improvisé un bureau de fortune (le bâtiment est en travaux depuis plusieurs mois, ndlr). Il quitte sa veste de costume et ôte son grand

La religion, Nissim a toujours baigné dedans. Il a d’ailleurs suivi les traces de son père, lui-même rabbin. Une fonction qui ne lui était toutefois pas prédestinée. À l’époque, le petit garçon s’imaginait plutôt informaticien ou psychologue. « Au début, je ne voyais que les aspects négatifs de ce métier et je ne voulais pas renouveler l’expérience de mon père. Il n’avait pas beaucoup de temps pour nous, n’avait ni de week-end ni de vacances ». Par un concours de circonstances, Nissim a finalement intégré l’école rabbinique de Paris et… « ça m’a plu », confie-t-il devant son clavier d’ordinateur hébraïque, plongé dans ses souvenirs. Aujourd’hui, il ne regrette rien. Le contact humain et le partage qu’offre sa profession lui permettent d’être parfaitement épanoui. « Même s’il y a tout de même certains inconvénients ; ça fait partie du jeu ! »

Vue intérieure de la grande synagogue de Lyon © DR

Sa mission : « moderniser et renouveler les idées » Après s’être chargé de la communauté juive de Tours durant quatre mois, Nissim a finalement emménagé à Lyon : « Mon épouse a accouché et j’avais besoin de vivre dans une grande ville dans laquelle je pouvais trouver une école juive et des magasins cacher. Je voulais assurer un avenir à ma famille ». Même s’il a été pris à partie et victime d’insultes antisémites dès son arrivée dans la capitale des Gaules, le nouveau rabbin de la synagogue se réjouit de sa communauté juive lyonnaise « vivante et qui bouge ». Aujourd’hui, Nissim souhaite avant tout être au plus proche de ses croyants. De par son jeune âge, il souhaite « moderniser et renouveler les idées ». C’est d’ailleurs la mission que lui avait confié le consistoire de Lyon à ses débuts. Dernier exemple en date, une fête juive qui s’est déroulée sur une péniche lyonnaise. En organisant des voyages et des sorties au ski, le rabbin espère attirer des jeunes de la ville et d’ailleurs…

Léa Masseguin Mini bio : - Enfant d’une famille de rabbins, Nissim Milka est né en 1987 à Caen (Basse-Normandie). - En 1990, sa famille quitte sa ville natale pour s’installer à Paris. - En 2007, il intègre l’Ecole rabbinique française dans le 5e arrondissement de Paris. - En 2010, Nissim devient rabbin de Tours. - En janvier 2015, il s’installe à Lyon et devient rabbin de la grande synagogue de Lyon (quai Tilsitt, 2e arrondissement).

6


Mathuresh Sandi en compagnie de sa famille et de Kirtanananda Swami ©Paul Dalas

Il était une foi...

Les Hare Krishna

Très peu connue en France, la secte venue d’Inde, Hare Krishna rassemble des centaines de milliers de fidèles dans le monde. En Inde bien sûr mais aussi beaucoup en Afrique et en Amérique du Sud. Il est très difficile de les rencontrer mais notre journaliste a réussi en 2012 a intégré un de leur ashram durant deux semaines dans la banlieu de Lima, au Pérou.

3

h 30, le réveil se fait à coups de pieds dans les hanches. Il ne faut pas trainer pour se rendre au temple. L’ashram dans lequel vivent les disciples de Krishna (Krsna en hindou) est en ébullition. C’est un jour important pour eux, leur chef spirituel Kirtanananda Swami vient spécialement d’Inde pour assister à leur festival. Les « dévots », sont impatients de débuter les festivités qui dureront deux semaines et s'achèveront avec l’admission de nouveaux disciples. L’heure de la première prière approche et il s’agit d’être présentable pour la cérémonie. Le corps doit être parfaitement propre et chacun, tout en récitant des mantras, doit réaliser neuf dessins sur le corps avec de la boue, spécialement importée du Gange. Ces formes abstraites représentent le pied du dieu indien, symbole de la soumission de chaque chose vivante à Krishna. Le temps presse, plus que quelques minutes avant de quitter l’ashram et d’entamer la procession de deux kilomètres qui sépare le « monastère » du temple. Grâce à l’argent des fidèles, un immense temple indien a vu le jour dans le sable de la banlieue la plus éloignée de Lima, entre la ville et le désert. La cérémonie commence, les hommes sont séparés des « mères », les femmes. Pendant que deux fidèles reçoivent l’honneur de vêtir les statuts bleues foncées à l’effigie de leur divinité, l’un des brahmanes, les fidèles les plus dévoués à Krishna, circule entre la foule en portant un flambeau. Cha-

7

cun passe rapidement sa main dans la flamme pendant qu’un autre brahmane les asperge d’eau, « un rituel qui nous permet de nous purifier » glisse à voix basse l’un d’entre eux. Une fois la purification terminée, les dévots chantent différentes mantras en répétant les paroles que vocifèrent un des brahmanes au micro. Tout le monde chante et danse sur le rythme des instruments sacrés, essentiellement des percussions. Harangués par les brahmanes, les fidèles sautent le plus haut possible et se cassent la voix en vociférant les mantras. Certains donnent l’impression d’entrer en transe. Deux heures plus tard, exténués, les dévots se recueillent en silence accroupis sur le sol. Ils entament à voix basse le chant de la mantra « Hare Krisna » qu’ils devront répétés 1696 fois. Ils répéteront ce rituel harassant trois fois par jours. Un grand guru tétraplégique Dans l’après-midi, Kirtanananda Swami, véritable icône pour les fidèles fait enfin son apparition dans une cour fermée derrière le temple. Les fidèles ne peuvent l’apercevoir que par une petite grille, tout le monde se presse et se pousse pour voir celui qui passerait facilement pour un dieu vivant. Attablé, le guru a le visage déformé et ne peut se nourrir seul, il est atteint de tétraplégie. « Quelques mois auparavant il a reçu la visite de Krishna durant sa méditation, ce qui a marqué son corps » m’explique une dévote. Il s’agit en réalité d’un accident cardio-

vasculaire. Kirtanananda Swami est entouré de quelques personnes privilégiées dans la hiérarchie Krishna. Parmi elles, Mathuresh Sandi. En dehors de son rôle important dans l’Association internationale pour la conscience de Krishna (l’association qui fédère toutes les communautés Hare Krishna) le Bolivien d’une cinquantaine d’années est également directeur du nord du continent pour la société UPS. Un métier en total désaccord avec les principes très strictes de la secte. Bien qu’il accepte de nous recevoir dans sa maison très luxueuse pour un entretien sur la pensée Krishna, il refuse de nous parler de sa double vie. On le retrouve pourtant sur une photo affichée dans son salon en train de disputer un 18 trous avec George Bush.

Paul Dalas Une organisation trouble En 1995, le groupe religieux est officiellement déclaré « secte » par la commission d’enquête sur les sectes française. Le rapport stipule que le groupe : « a réalisé de substantiels bénéfices commerciaux par le biais d'associations à but soi-disant désintéressé » et que, d’après des témoignages d’anciens fidèles, certaines pratiques des dirigeants du groupe pouvaient entraîner « une cécité de l’esprit critique ».


REPONSE 4 : C- La paresse, l’orgueil, la gourmandise, la luxure, l’avarice, la colère et l’envie : ces 7 péchés capitaux ne sont plus un secret pour vous. Ils sont à l’origine les « 7 idoles de l’âme » de Saint Thomas d’Aquin. Le religieux de l’ordre dominicain, mais également philosophe et théologien a établi ces 7 péchés au 13e siècle, qu’il considérait d’ailleurs plus comme des vices à commettre des péchés. Mais d’autres avant lui y avaient dores et déjà pensé, comme Evagre le Pontique au 4e siècle ou encore Grégoire le Grand au 6e siècle.

REPONSE 3 : B- « Si la femme ne porte pas de voile, qu’elle se fasse tondre », voilà le genre de propos que l’on peut trouver dans la Bible. Cette pratique remonte à l’ère chrétienne, à l’époque de l’apôtre Paul, fondateur de l’Église. C’est une tradition chrétienne, à l’époque, on ne pouvait pas imaginer une femme sortir sans s’être couvert la tête. Même si une des raisons était de cacher un attrait de séduction, le port du voile était surtout une question de dignité et de respect. Aujourd’hui, le voile chrétien est porté de façons exceptionnelles par les religieuses et les communautés traditionnelles.

REPONSE 2 : A- LLes femmes protestantes sont les religieuses qui ont mis le plus de temps à obtenir ces responsabilités. Mais depuis les années 20, elles ont le droit de devenir Pasteur. Et plus précisément depuis 1929 lorsque Madeleine Blocher-Saillens a été nommée première femme pasteur de France. Après une montée en puissance entre les années 60 et les années 2000, la part de femmes et d’hommes au titre de pasteur aujourd’hui est quasiment égale. Ce qui est encore loin d’être le cas pour l’Église Catholique et Orthodoxe.

REPONSE 1 B- Nulle part dans les textes bibliques, il est dit que la femme est, ou doit être inférieure à l’homme. Cependant, certains textes nous font comprendre que la place de la femme n’est pas dans l’espace public. On la complimente pour ses capacités de vie de famille, d’être une femme responsable et élégante, mais il est préférable d’avoir une femme active au foyer et silencieuse en public. En effet sa parole est crainte, et ce, notamment en référence à Eve qui aurait menti à Adam à propos du fruit défendu.

A- Jésus B- Saint Paul C-JeanPaulII Qui est à l’origine du port du voile pour les femmes ? QUESTION 3

A - Saint Alexandre de Lyon B- Saint Albert le Grand C- Saint Thomas d’Aquin QUESTION 4 Qui a définit les célèbres « 7 pêchés capitaux » ?

Au 7ème siècle avant JC, pourquoi craignait-on la femme ?

Depuis quelle année les femmes ont le droit d’être Pasteur ?

A- Pour son attirance sexuelle B- Pour sa parole en public C- Pour sa vitesse à agir

A- Depuis les années 1920 B- Depuis les années 1990 C- Elles n’ont toujours pas le droit

QUESTION 1

QUESTION 2

4 questions à la bibliste théologienne Régine Maire

Le quiz de la rédaction


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.