Entreprise et Santé - numéro 21

Page 1

BTP I SERVICE I COMMERCE & ARTISANAT I INDUSTRIE I INTERIM

Risque Routier Professionnel

PARTIR, C’EST BIEN… ARRIVER, C’EST MIEUX ! Interview de Daniel Lejeune p8

Zoom sur le soudage à l’arc p26

p11

N°21

1er Trimestre 2013 r www.entrepriseetsante.fr


SOMMAIRE

N°21 • 1er Trimestre 2013

VRAI OU FAUX ?

p4

BRÈVES

EN DIRECT :

p5

Mobiliser l’ensemble des acteurs dans une démarche d’amélioration continue Le code du travail, c’est bien… La vie au travail, c’est mieux ! Quand borates et psychologie font bon ménage ! INTERVIEW :

p8

Daniel Lejeune

Fiche détachable

DOSSIER p.11 à 22

Risque Routier Professionnel •Interview de Laurent HUGLO •Du volontariat à l’obligation ! •Une action : de nettes améliorations •De l’équipement du véhicule aux compétences des conducteurs…

p23

p24

p25

p26

p28

p29

p30

•En maison de retraite aussi : « conduire est un acte de travail » ! •Plusieurs causes, une conséquence… •Vous avez dit « Accident de mission » ? •Vous avez dit « Accident de trajet » ?

Principes de prévention en entreprise Conduite automobile et aptitude médicale

INVESTIR :

Vous allez investir, vous avez raison ! VOS DROITS, VOS DEVOIRS :

Accident de circulation et contrat de travail VOTRE SANTÉ, VOTRE EMPLOI :

De la vie de chantier … au travail en atelier. ZOOM SUR :

Soudage à l’arc : l’attention est de mise ! ENVIRONNEMENT & TECHNIQUE :

Une volonté d’entreprise, une évaluation suivie des risques : des résultats ! ERGONOMIE & ORGANISATION :

L’ergonomie au service de la préparation de commande AUX ALENTOURS :

La prévention précède et accompagne le chantier ! ACTU

p31

02

Création du site internet : le CEDEST poursuit sa mue… Mars 2013 : l’ASTAV emménage dans de nouveaux locaux !

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


ÉDITO

Aujourd’hui en retraite, il a été l’auteur en 2008 d’un rapport sur la traçabilité des risques professionnels, pour l’Inspection Générale des Affaires Sociales. Ce rapport a fait date et n’a rien perdu de son acuité.

Avec ce numéro 21 d’Entreprise et Santé, nous franchissons le cap des 500 témoignages d’entreprises du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie. Ces actions de prévention sont menées avec l’expertise et l’accompagnement de leurs services de santé au travail. La rubrique « En direct » présente trois exemples bien différents : une entreprise ferroviaire, un Institut Médico-Educatif et une entreprise chimique. La traçabilité des risques est une question d’actualité. Daniel Lejeune a accepté de répondre à nos questions.

Un accident du travail mortel sur deux est dû au risque routier. Le dossier central, avec les témoignages de 4 entreprises, apporte des repères pour développer la prévention au sein de nos déplacements. Merci à Laurent Huglo, ingénieur conseil régional adjoint à la CARSAT Nord Picardie d’avoir bien voulu répondre à nos questions. La rubrique « Vos droits, vos devoirs » rappelle les différences entre l’accident de trajet et l’accident du travail. La rubrique « Investir » rappelle qu’un investissement en prévention peut rapporter gros… Maintenir dans l’emploi un salarié, victime d’un grave accident du travail, est une réussite humaine et sociale pour une entreprise. Un exemple éloquent est présenté dans la rubrique « Votre santé, Votre emploi ». La rubrique « Zoom sur » apporte un éclairage sur l’importance de la prévention pour le soudage à l’arc. Il s’agit d’une étude menée auprès de

3 entreprises de moins de 10 salariés et 3 entreprises de plus de 50 salariés. Dans l’industrie lourde, la prévention est un effort permanent qui s’accompagne de résultats tangibles. Voir la rubrique « Environnement & Technique ». L’efficacité de l’ergonomie est rapportée dans la rubrique « Ergonomie & Organisation ». « La prévention démarre avant le chantier ». C’est le sens de la démarche expliquée dans la rubrique « Aux alentours ». Entreprise et Santé se veut le témoin des TPE et PME. A partir du prochain numéro Régis Lamoril sera le directeur de publication. L’équipe rédactionnelle ne change pas. Merci à tous, au sein des services de santé au travail du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie, de poursuivre la route. Bonne lecture ! Raphaël Mulliez Directeur de publication pour les Services de Santé au Travail

Avec le soutien de :

vous proposent le magazine :

N°21 • 1er trimestre 2013 Numéro diffusé gracieusement aux entreprises des services adhérents Contact : entrepriseetsante@nordnet.fr Les éditions de l’encre vive Tél. 03.20.14.07.77 Fax : 03.20.14.06.16 Directeur de publication : Raphaël Mulliez Comité de rédaction : Alain Cuisse, Dr Didier Debarge, Bruno Decherf, Louis-Marie Hardy, François Désérable, Dr Alain Moniez Conception et Responsable de rédaction : Dr Matthieu Méreau Méthodes et Médiation - Lille

Rédaction : Matthieu Méreau Secrétariat de rédaction : Nathanaëlle Debaene Création et mise en page : Graphic Design Solutions www.gdsgroup.fr Crédit photos : p5 : BOMBARDIER, p6 : IME Le Moulin Vert, p7 : BORAX, p8 : DANIEL LEJEUNE, p12 : CARSAT Nord Picarie, p15 : ARBATI, p16 : TLV Transport, p17 : HIPPOLYTE NOIRET, p25 : EIFFAGE ENERGIE, p28 : CHAUX et DOLOMIES, p29 : NORD SÉCURITÉ, p30 : Dunkerque LNG – Happy Day, GRT Gaz, p31 : ASTAV, Fotolia.

ASMIS - Association Santé et Médecine Interentreprises du département de la Somme 77, rue Debaussaux CS 60132 80001 Amiens Cedex 1 Tél. 03.22.54.58.00 www.asmis.net AST 62/59 - Association de Santé au Travail 6, rue de la Symphorine Parc des Bonnettes - 62008 Arras Tél. 03.21.15.12.32 www.ast6259.fr ASTAV - Association de Santé au Travail de l’Arrondissement de Valenciennes 62, rue Milhomme 59300 Valenciennes Tél. 03.27.46.19.24 www.astav.fr ASTIL 62 - Association Santé Travail Interentreprises du Littoral

430 boulevard du Parc BP 94 62903 Coquelles Cedex Tél. 03.21.85.51.85 CEDEST - Centre pour le Développement Santé au Travail 4/10, rue Albert Thomas 59210 Coudekerque-Branche Tél. 03.28.24.98.98 www.cedest.net MTA - Médecine du Travail de l’Aisne rue Théodore Monod - Z.A. Bois de la Chocque - 02100 Saint-Quentin Tél. 03.23.62.52.48 www.mt02.org PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord 118, rue Solférino - Lille BP 1365 59015 Lille Cedex Tél. 03.20.12.83.00 www.polesantetravail.fr

Coordination, Fabrication, Diffusion : Les éditions de l’encre vive 71 boulevard Montebello - 59000 Lille Tél. 03.20.14.07.77 Fax : 03.20.14.06.16

Tirage : 90 000 exemplaires

Régie publicitaire : Entreprise et Santé - Matthieu Méreau Tél. 03.20.14.07.77 Fax : 03.20.14.06.16 Impression : Imprimerie Léonce Deprez - Ruitz Dépôt légal à parution N°ISSN en cours

Édité par :

Groupement Inter Services Santé Et Travail 40 bis allée du Bénélux Zone Artoipole 62060 Arras Cedex 9 Tél. 03.21.22.28.21 www.gisset.org

03


BRÈVES

?

VRAI OU FAUX

Pressing et Perchloréthylène 1er MARS 2013 : L’INTERDICTION S’APPLIQUE !

P

a r arrêté signé en date du 5 décembre 2012, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Delphine Batho, confirme le calendrier de l’interdiction progressive du perchloréthylène dans les pressings. Rappelons que le perchloréthylène est classé cancérogène probable pour l’homme par le Centre International de Recherche contre le Cancer (Groupe 2A) et cancérogène possible (catégorie 2) par l’Union européenne. A partir du 1er mars 2013, il sera interdit d’installer toute nouvelle machine de nettoyage à sec fonctionnant au perchloréthylène dans des locaux contigus à des locaux occupés par des tiers. Autres dates-clés : le 1er septembre 2014, les machines ayant atteint 15 ans d’âge devront être remplacées par des machines utilisant un substitut et le 1er janvier 2022 au plus tard, aucune machine située dans des locaux contigus à des locaux occupés par des tiers ne pourra continuer à utiliser du perchloréthylène. Plan Cancer 2014-2018 PRIORITE A LA PREVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS

L

e 4 décembre 2012, s’est tenue la 4ème édition des rencontres annuelles de l’INCa, présidé par le Professeur Agnès Buzyn (Institut National contre le Cancer). En clôture de cet évènement national, le Président de la République, François Holllande, a annoncé la mise en place d’un nouveau Plan Cancer pour la période 2014-2018. 5 orientations sont définies : la prévention, la recherche, la prise en charge, la formation, la vie pendant et après le cancer. S’agissant de la prévention, une attention sera portée sur les risques professionnels, notamment en matière de maîtrise des expositions. La préparation de ce 3ème Plan Cancer a été confiée au professeur Jean-Paul Vernant, professeur d’hématologie à l’université Pierre et Marie Curie. Ce plan sera piloté par les ministères de la santé et de la recherche. Sa mise en œuvre sera assurée par l’INCa.

En cas d’accident comportant une infraction au code de la route, commis par un salarié au volant d’un véhicule de société, la responsabilité de l’employeur peut être mise en cause. Réponse « Dossier Central » pages 11 à 22 et « Vos droits, vos devoirs » page 24.

?

VRAI OU FAUX

Publié en 2008, un rapport de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) a porté sur la Traçabilité des expositions Professionnelles. Il reste d’actualité. Les TPE et PME sont autant concernées que les grandes entreprises. Réponse rubrique « Interview » pages 8,9 et 10.

?

VRAI OU FAUX

Prévention POILS DE BARBE ET FIBRES D’AMIANTE

L

e docteur Bernard Fontaine, toxicologue et médecin du travail à PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord, attire notre attention sur un détail d’importance. Dans le désamiantage, le port de masque de protection respiratoire est impératif. Cependant, il est prouvé que le port de barbe ou le seul fait d’être mal rasé rend inefficace le port de masque de protection respiratoire. Au-delà du sourire que peut susciter une telle observation, la question est très sérieuse. Le médecin du travail se doit d’en avertir les salariés du désamiantage et le chef d’entreprise doit exiger une peau glabre pour ses salariés.

04

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

Dans le cas du soudage à l’arc, la mesure de la qualité de l’air, alliée à des dosages urinaires sur des salariés volontaires, permet une évaluation précise de l’exposition aux risques. Réponse rubrique « Zoom Sur » pages 26 et 27.


EN DIRECT I

nd

ustrie

In d

ustrie

BOMBARDIER 2000 salariés, Pierre Bonnart, Animateur Santé Sécurité Environnement CRESPIN

… Mobiliser l’ensemble des acteurs dans une démarche d’amélioration continue. Pierre Bonnart, animateur Santé Sécurité Environnement de BOMBARDIER

En effet, sur la base d’une convention de partenariat, l’ASTAV et la CARSAT NordPicardie se sont associés pour mener une étude sur 6 entreprises du Valenciennois (Voir rubrique « Zoom sur… », pages 2627). L’objectif était d’évaluer l’exposition potentielle des salariés aux métaux CMR (Cancérigènes, Mutagènes et Reprotoxiques) et l’aluminium présents dans les fumées de soudage à l’arc. Cette démarche s’est naturellement inscrite dans le cadre de l’amélioration des conditions de travail de BOMBARDIER Transport. Le soudage à l’arc s’effectue principalement avec la technique MIG, soudage semi-automatique au sein duquel le gaz est neutre vis-à-vis du métal soudé (MIG comme Metal-Inert-Gas). Le métal soudé est principalement de l’acier.

Dosages atmosphériques et dosages biologiques Pour le docteur Sébastien Crucq, médecin

Protection maximale sur le site de Bombardier, où tous les soudeurs sont équipés d’une cagoule de soudage ventilée complétée, sur certains postes de travail, par un système d’aspiration pour réduire l’inhalation de fumées de soudage

SANTÉ AU TRAVAIL DE VALENCIENNES (ASTAV)

Fumées de soudage Depuis plusieurs années, le site de BOMBARDIER Transport à Crespin s’est mobilisé pour améliorer les conditions de travail et de sécurité de ses employés. Cela s’est traduit de manière significative dans les résultats sécurité : le taux de fréquence des accidents a été divisé par 4 en l’espace de 4 ans. Le secteur chaudronnerie a fait l’objet de nombreuses actions d’amélioration dont la santé au travail. L’activité de chaudronnerie est « historique », et le savoir-faire, mondialement reconnu ! Chaque jour, des métros et des trains sortent de l’usine de BOMBARDIER Transport qui emploie environ 2000 personnes dont 120 chaudronniers. Ceux-ci travaillent dans deux secteurs : principalement dans le secteur « chaudronnerie caisses », où sont assemblés les châssis, les faces et les pavillons (toiture des véhicules), et le secteur «chaudronnerie Bogies » (les bogies sont les pièces de liaison entre la caisse et le rail). Pour Pierre Bonnart, animateur Santé Sécurité Environnement de BOMBARDIER : « Quand l’ASTAV et la CARSAT nous ont proposé de participer à une étude santé sur l’exposition aux fumées de soudure, la direction nous a donné son accord sans hésitation car cette étude complétait les nombreuses initiatives engagées en matière de sécurité ». du travail à l’ASTAV, « un des intérêts de l’étude réalisée en situation réelle de travail était de corréler des prélèvements atmosphériques de l’air au poste de travail avec des dosages biologiques urinaires de salariés volontaires. Elle a permis d’évaluer le risque en fonction de diverses situations de travail, de préconiser les moyens de protection collective et individuelles nécessaires à la réduction de ce risque et de sensibiliser les salariés et l’employeur au risque des fumées de soudage». Au sein de l’entreprise, les résultats étaient anonymes. Seul le médecin du travail était habilité à présenter aux salariés leur résultat des dosages biologiques.

Une vue d’ensemble, une dynamique de fond Les salariés de Bombardier concernés par l’étude sont monteurs-soudeurs ; ils travaillent dans un hall à ventilation naturelle et le soudage s’effectue en portant une cagoule ventilée avec adduction d’air.

Sur certains postes, une captation d’air à la source est ajoutée, notamment pour les tâches en espace confiné. 25 salariés se sont portés volontaires. Les résultats atmosphériques et biologiques étaient en grande majorité inférieurs aux normes ; en parallèle, des actions d’amélioration ont été engagées et une action d’information et de sensibilisation sur le risque des fumées de soudage est en cours dans l’entreprise. Pour Pierre Bonnart, « Cette action proposée par l’ASTAV et la CARSAT a été très bénéfique. Les salariés ont adhéré à cette démarche de santé. Elle a mobilisé l’ensemble des acteurs : salariés, superviseurs, chefs de service, direction générale et le CHSCT. Elle a permis de maintenir la dynamique générale de prévention en rappelant l’importance des basiques, tels que l’utilisation des équipements de protection individuels et collectifs, tout en donnant une vision exhaustive et transparente de l’exposition ».

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

05 03


EN DIRECT v Ser ice

Ser

vice

Institut Médico-Éducatif LE MOULIN VERT 30 salariés Gérard Macoine, directeur Stefan Prelat, délégué du personnel BLÉRANCOURT SANTÉ AU TRAVAIL DE L’AISNE (MTA) Document Unique d’Évaluation des Risques

Le code du travail, c’est bien… La vie au travail, c’est mieux ! 45 enfants de 6 à 17 ans, atteints de déficiences intellectuelles moyennes, sont suivis au « Moulin Vert », Institut Médico-Educatif situé à Blérancourt dans l’Aisne. 40 enfants sont en internat à la semaine ; 5 sont demi-pensionnaires. Ils requièrent une attention personnalisée et permanente de la part du personnel. Au total, 30 salariés (éducateurs d’internat, éducateurs de journée, paramédicaux, cuisiniers et administratifs) concourent à leur prise en charge. L’élaboration du Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER) a été l’occasion d’un précieux travail collectif. « Initiée par M. Dominique Leblond, directeur, l’action a démarré en octobre 2010 pour se terminer en juillet 2012. Associer progressivement tout le personnel a permis une Dynamique Unique d’Evaluation des Risques et non pas un Document Unique qui dort dans un classeur ou un ordinateur ! MTA, notre service de santé au travail, nous a apporté l’expertise et le regard extérieur, dans une approche adaptée à notre travail avec les enfants. C’est la clé de notre réussite » nous dit Gérard Macoine, qui est aujourd’hui le directeur de l’IME « Le Moulin Vert ». Médecin, Ingénieure et psychologue du travail… Médecin du travail à MTA, le docteur Eric Dehaut est direct : « J’ai fait totalement confiance à mes collègues, Stéphanie Buisine, ingénieure de prévention et Magali Roger, psychologue du travail ». Stéphanie Buisine témoigne : « Pour impliquer les salariés, nous avons réalisé une formation action. Cette démarche est intéressante en terme de

06

prévention, car on intervient en amont de problèmes de santé». Un groupe de travail de 7 personnes, représentatives des différents métiers, a été constitué. Un comité de pilotage, composé du directeur, du chef de service et du délégué du personnel, en validait les propositions. Tous les risques (physiques, biologiques, psycho-sociaux,…) ont été identifiés, évalués et ont fait l’objet de moyens de prévention. Magali Roger précise : « Avec cette réflexion collective, chacun a pu mieux connaître le travail des autres et s’interpeller sur les risques auxquels le collègue en activité n’a pas forcément conscience. Les échanges concourent à « l’intelligence » de l’entreprise ». Le personnel : premier expert des risques ! Stefan Prelat est délégué du personnel : « Un groupe de travail, au sein duquel chaque catégorie de professionnel est représenté, a listé les unités de travail. Ensuite, nous sommes partis de l’activité,

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

Avec cette réflexion collective, chacun a pu mieux connaître le travail des autres Magali Roger

psychologue du travail, MTA

pour identifier les dangers, les risques, les fréquences et les circonstances d’exposition, ainsi que les moyens de prévention existants ou à développer. Nous faisions régulièrement le point avec Mesdames Stéphanie Buisine et Magali Roger. ». Chemin faisant, des « zooms » ont été réalisés : risques biologiques, niveau de bruit au réfectoire, manutentions en cuisine, risques chimiques liés au nettoyage du réfectoire… Gérard Macoine précise : « Afin de faciliter la prise de parole de chacun, la direction n’a été présente qu’au début et à la fin du travail. Aujourd’hui, je fais le point une fois par trimestre avec le Délégué du Personnel pour le suivi des améliorations. Savoir parler santé et sécurité au sein des équipes et avec la direction favorise le bien-être au travail, la santé du personnel, et celle des enfants. C’est primordial ».


EN DIRECT I

ustrie nd

In d

ustrie

BORAX 40 salariés Mélyne Blondeel, Directrice générale COUDEKERQUE

Les résultats sont là ! Mélyne Blondeel, Directrice générale, BORAX

SANTÉ AU TRAVAIL DE DUNKERQUE (CEDEST) Risque Psychosocial

Quand borates et psychologie font bon ménage ! 10 000 tonnes de borates sortent, chaque année, de l’usine BORAX, à Coudekerque, près de Dunkerque. Sous forme liquide ou sous une granulométrie de haute qualité. Car les 42 salariés du site fabriquent du « haut de gamme » pour des centaines d’applications très spécifique : pharmacie, nucléaire, agriculture, laboratoires… jusqu’aux fabricants de colle amidonnée pour carton. Au sein du groupe minéralier international Rio Tinto, les borates les plus purs sont produits à Coudekerque. Un avenir garanti pour le site. Pourtant, stress, inquiétudes et mal-être avaient gagné l’ensemble du personnel… Nommée directrice générale en septembre 2011, madame Mélyne Blondeel, décide de tout mettre à plat. Elle en parle au docteur Blandine Descamps, médecin du travail au Service de Santé au Travail de Dunkerque (CEDEST). Elle suit l’entreprise depuis début 2011. Elle était arrivée aux mêmes conclusions. Sur sa proposition, Il est alors décidé de faire appel à monsieur Fabrice Louchart, psychologue du travail de la Société d’Ingénierie Sociale d’Entreprises (S.I.S.E.1). A problème évident, solution adaptée Pour le docteur Blandine Descamps : « L’usine bénéficie d’un personnel d’atelier dont le savoir faire, acquis sur 20 à 30 ans, est unique. Différentes restructurations, antérieures à 2011 et incomprises par le personnel, ont généré un stress permanent et un absentéisme croissant. Le CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) en avait parfaitement conscience ». Son secrétaire, qui est aujourd’hui monsieur

Franck Lahaeye, et le responsable Sécurité, monsieur Stéphane Wojcik ont été associés à la démarche. Chaque salarié parle au psychologue du travail De juin à septembre 2012, Fabrice Louchart, psychologue du travail, a réalisé des entretiens d’une heure en moyenne avec chaque salarié. Ceci donne une vision globale, au sein de laquelle chacun a apporté sa contribution. La restitution, en Comité de Pilotage, est anonyme. Elle débouche sur un plan d’action. Pour Fabrice Louchart : « Ce plan d’action est axé sur le futur et la prévention du risque psychosocial. Il a inclus une formation des cadres. En effet, les managers, relais de compétences à long terme, vivent un stress lié à leur fonction. Ils doivent avoir un vocabulaire commun et ne pas générer plus de stress que la fonction ne l’exige ! Pour les opérateurs, le devenir de l’entreprise était synonyme d’inquiétude, majorée par une

incompréhension des messages de la direction et la proximité du départ en retraite des anciens ». Des investissements sur les machines, l’amélioration de la fonctionnalité du bâtiment, la mise en place d’une étude ergonomique, la gestion prévisionnelle des emplois et des carrières ont fait l’objet d’explication simple et concrète. La direction peut apprendre à parler aux opérateurs « Les résultats sont là ! », témoigne Mélyne Blondeel. « L’approche de la santé au travail nous a permis de voir ce que nous ne voyions plus. Ce qui parle aux dirigeants (par exemple les courbes et les chiffres), ne parle pas aux opérateurs. Cet accompagnement s’est révélé très efficace. Et en plus, personnellement, je ne fais pas plus de choses qu’avant… Je le fais différemment. »

1. S.I.S.E. : Quai des entreprises, Parc d’Affaires, 430 Bd du Parc, 62903, Coquelles – Tél. : 03 21 85 51 76 ; Fax : 03 21 85 51 80

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

07 03


INTERVIEW

Daniel Lejeune Traçabilité des risques CMR (Cancérogènes Mutagènes et Reprotoxiques) et neurotoxiques

« Les petites entreprises et leurs salariés doivent être aidés dans leurs stratégies de prévention. Celle-ci est possible et nécessaire ». Aujourd’hui, quand on achète un

DL : Si on pense traçabilité, on pense sou-

et dépend de nombreux autres facteurs ; le

fromage ou une automobile : tout

vent aux risques liés aux rayonnements ioni-

domaine recouvre des milliers de produits

est « tracé » : date de fabrication,

sants. C’est historique : un dispositif élaboré

très différents, aux risques toxiques très dif-

ligne de fabrication, composants,

et très spécifique a été mis en place face à ces

férents, si tant est que nous les connaissions

etc. Est-ce la même chose pour la tra-

risques. Les propositions du rapport n’ont

avec précision.

çabilité des risques professionnels ?

rien à voir avec cela. Nous ne sommes pas

DL : Non. On n’est pas dans la même ap-

dans le même système. Pourquoi ? Parce

proche. Dans l’esprit du rapport, c’est la définition et la mise en œuvre d’une stratégie de prévention des risques CancérogènesMutagènes-toxiques pour la Reproduction (CMR), et neurotoxiques, qui sont en jeu. Sans parler de réparation et de compensation. Avec les partenaires sociaux, c’est la définition d’objectifs atteignables qui est apparue primordiale. Comment définir la traçabilité des risques professionnels CMR et neurotoxiques ? 08

La destinée de nombreux rapports officiels est de s’endormir dans un tiroir. Celui écrit par Daniel Lejeune, au titre de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) n’a pas eu cette destinée. Son titre explique peut-être cela : « La traçabilité des expositions professionnelles »1. Le sujet est d’actualité. Mais la qualité de ce rapport découle aussi des qualités de son auteur : expérience, sens du dialogue, rigueur et pragmatisme. Le nombre de personnalités et d’organismes consultés est impressionnant. Les partenaires sociaux y font régulièrement référence. Entreprise et Santé remercie Daniel Lejeune, aujourd’hui en retraite, d’avoir bien voulu répondre à nos questions.

qu’il s’agit de deux domaines bien différents. Pour les rayonnements ionisants, nous avons cent ans de recul et le risque est bien connu. Une grandeur mesurable incarne toute forme d’exposition ; une règlementation spécifique, une organisation dédiée et un outil centralisant les données sont en place. Pour les CMR et les neurotoxiques, nous n’avons pas cent ans de recul et le risque est de nature stochastique (aléatoire). Il n’y a pas de seuil d’innocuité ; des délais de latence existent entre l’exposition et les effets; la gravité est indépendante de la dose

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

Qu’entend-on par traçabilité collective et individuelle ? DL : L’objectif de la traçabilité collective, c’est la prévention. Même si elle peut contribuer à la prévention, la traçabilité individuelle a pour but la réparation et/ou la compensation. Il s’agit donc de deux outils bien différents. Parlons de la traçabilité collective… DL : Elle s’inscrit dans la perspective d’une connaissance opérationnelle pour la prévention : où en est-on au niveau national


et régional ? Par branche professionnelle et

faciliter les relations entre le salarié et son

des enjeux de ces données. La traçabilité effi-

au niveau de son entreprise ? Avec un sys-

médecin traitant. Le médecin traitant peut

cace relève de connaissances pragmatiques.

tème de connaissance des expositions col-

avoir une meilleure compréhension des

On peut rester dans un système « Rouge-

lectives, on peut définir des priorités, situer

expositions professionnelles de son patient,

Orange-Vert » qui suffit à développer

une entreprise, voir comment elle évolue en

l’aider à l’acquisition de comportements

connaissance et prévention.

fonction de ses procédés, des produits utili-

favorables, comme par exemple l’abstinence

sés et générés, des produits de substitution.

tabagique. Il peut aussi mieux diagnostiquer une dégradation de l’état de santé de son

Et pour la traçabilité individuelle ? DL : Il s’agit de l’historique d’exposition d’un salarié, et des mesures de prévention dont il a bénéficié. Elle lui permet d’obtenir, le cas échéant, une reconnaissance de Maladie Professionnelle ou une compensation, tel un départ anticipé en retraite du fait d’une baisse de son espérance de vie, dans une logique qui a sa parfaite légitimité. Du côté de l’employeur, cela peut être vécu comme un « aveu »… Mais il faut aussi savoir tracer les mesures de prévention, et dans ce cas, la traçabilité peut aider le chef d’entreprise à prouver qu’il a pris, à l’époque, les mesures de prévention conformes à l’état des connaissances et de la technique. Si, en 2013, un employeur applique les mesures de prévention selon les techniques actuellement disponibles, un salarié - ou ses ayants droits - peut certes demander réparation en 2025. Mais, on ne peut pas juger au pénal ou au civil avec les yeux d’aujourd’hui, ce qui s’est passé il y a 10 ou 20 ans. C’est s’il n’y a pas application des mesures de prévention correspondant aux connaissances et techniques du moment considéré, qu’il y a faute d’exploitation. En quoi la traçabilité individuelle contribue-t-elle à la prévention ? DL : D’abord, elle donne une vision de la réalité. Et on ne prévient correctement que ce que l’on connaît bien. Ensuite, c’est un outil de dialogue entre encadrement, salarié et médecin du travail. Savoir permet d’expliquer. Expliquer permet de dialoguer. Donc de convaincre que le respect des procédures de production, et de certaines mesures d’hygiène en complément des autres mesures de prévention, est impératif, même si les mesures techniques de prévention et l’emploi des produits de substitution restent les priorités. La traçabilité individuelle peut aussi

patient.

Quelle est, pour vous « la » priorité en matière de recherche ? DL : Il faut impérativement développer les

La traçabilité individuelle peut-elle aider à la traçabilité collective ?

stratégies de prévention vis-à-vis du risque CMR et neurotoxique, au sein de chaque entreprise concernée. Au niveau national,

DL : Oui. Plusieurs services de santé au

il faut donc renforcer la connaissance et

travail ont développé des outils d’analyses

l’évaluation du risque par la bio-métrolo-

collectifs qui respectent l’anonymat des sala-

gie ou mesure de l’imprégnation du salarié.

riés, sur la base des fiches d’entreprise, de la

La mesure de l’exposition, ou métrologie

connaissance des postes de travail et de la

d’ambiance, coûte cher et a ses limites : les

santé des salariés exposés. Depuis la loi por-

résultats sont variables en fonction de mul-

tant réforme des retraites en 2010, le salarié

tiples facteurs (ex. : ouverture ou fermeture

a un Dossier Médical de Santé au Travail

des portes de l’atelier, régime de fonctionne-

(DMST) qui collige les informations rela-

ment du processus, distance à la source, etc.).

tives à la pénibilité ; des fiches de données de

La bio-métrologie, ou dosages biologiques,

prévention de la pénibilité doivent être réa-

permet de connaître le niveau d’imprégna-

lisées en entreprise et communiquées au ser-

tion du salarié. Sur une longue période, elle

vice de santé au travail, pour être jointes à ce

mesure les conséquences réelles des expo-

DMST. Autre exemple : dans le Nord-Pas-de-

sitions, et leurs évolutions. Les méthodes

Calais et la Picardie, un centre interservices

existent, mais on n’a pas à disposition l’en-

de santé au travail réalise l’archivage des dos-

semble des traceurs. Il faut développer les

siers médicaux. Au niveau du CISME2 se dé-

recherches en bio-métrologie.

veloppent des fiches métiers, et un thésaurus qui concoure à la compatibilité des systèmes d’information des différents services de santé au travail. Toutes ces initiatives peuvent donc concourir à l’élaboration de matrices emploi-exposition, avec identification des dangers liés aux procédés, et des mesures de prévention. Le médecin du travail peut ainsi bénéficier d’une connaissance opérationnelle très précieuse dans son rôle de conseil en prévention auprès des entreprises. Vous parlez de connaissance opérationnelle…

Et au niveau des secteurs d’activité ? Des entreprises ? DL : Cela tient en un sigle simple : « STOP », comme

Substitution-Technologie-Organi-

sation-Protection individuelle. Cela relève d’une recherche appliquée permanente au sein de laquelle de nombreux acteurs doivent se mobiliser, au premier rang desquels les CTI, ou Centres Techniques Industriels. Il faut aussi diffuser les connaissances relatives aux conditions d’utilisation d’un produit. Une entreprise connaît le produit employé. Elle sait comment elle l’utilise.

DL : Oui. Ces connaissances recouvrent un

Elle ne connaît pas bien les risques liés à

champ très large. Pour ce faire, le partage

cette utilisation ; elle ignore les produits de

des tâches entre le médecin du travail et

substitution, moins ou non dangereux, qui

des collaborateurs (hygiénistes, techniciens,

pourraient préserver la qualité de fabrica-

ergonomes, infirmiers, etc.) est essentiel. Le

tion. Pour cela, la première étape est d’avoir

médecin du travail est un « ensemblier »

les Fiches de Données de Sécurité, que doit

dans la collecte de données individuelles et

lui donner le fournisseur de produits ou de

collectives. Il porte la connaissance médicale

substances. La deuxième étape est de s’assu-

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

09


INTERVIEW : Daniel Lejeune

rer que les scénarios d’exposition décrits

travail : le risque chimique n’est pas visuel

dans ces fiches correspondent aux conditions

(contrairement aux machines) et l’odeur ne

réelles d’utilisation. Il ne faut pas hésiter à

veut rien dire ; et les effets sont souvent com-

interroger son fournisseur et son médecin

plexes au regard des conditions d’utilisation.

du travail.

BIOGRAPHIE express

Tout cela est-il faisable Peut-on parler du risque le plus bas raisonnablement possible ?

à court terme ? DL : Il faut s’y mettre dès maintenant, mais

DL : Il ne peut se développer que dans une

l’objectif de la loi du Grenelle de l’Envi-

approche collective. C’est la logique de la

ronnement du 9 août 2009, d’avoir un dis-

démarche « STOP ». Avec l’accord des par-

positif opérationnel pour la traçabilité des

tenaires sociaux, le rapport propose une

expositions professionnelles au 1er janvier

logique de prévention « gagnant-gagnant ».

2012, n’est pas réaliste. Tout ce dont nous

Il s’agirait de lister au sein d’une entreprise

venons de parler relève d’une action de

les produits ou substances à risques CMR ou

longue haleine, comme ce fut le cas pour la

neurotoxiques, d’en informer la CARSAT

mise en conformité des « machines »… Au

(Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au

moins 10 ans de coopération entre l’Etat et

Travail), afin de faire progresser les connais-

les partenaires sociaux, l’Assurance Maladie

sances relatives aux produits, aux priorités

avec les CARSAT, les organismes tels que

d’action, et de concourir à la définition de

l’INRS, l’INSERM, l’ANSES, les industriels

recommandations. Il s’agit de rendre service

et les CTI, les professionnels de la santé au

à l’entreprise et de lui permettre de se situer

travail, etc. Aucun système complet n’existe

au sein de sa branche professionnelle. Un

aujourd’hui, même si des expériences inté-

outil opérationnel a été mis en place : le site

ressantes sont identifiables en Europe. Il

www.stop-cmr.fr. Ce site a pour vocation de

faut s’approprier l’ensemble de ces outils

développer la traçabilité collective au ser-

et de ces expériences, dans le cadre d’une

vice des entreprises, tout en proposant des

approche globale de la santé au travail et de

réponses concrètes pour une stratégie de

l’amélioration des conditions de travail.

prévention (substitution et techniques de prévention collective et/ou individuelle).

En conclusion, que conseillez-vous pour une petite et moyenne entreprise ?

Ne peut-on pas mieux contrôler la mise sur le marché des produits et substances ?

DL : Une organisation simple peut être mise en place : mettre à jour la liste des substances et produits utilisés, détenir et utiliser

DL : Oui. Cela est déjà en place dans le cadre

les fiches de données de sécurité, étudier si

du dispositif européen REACH. Il s’agit

les scénarios d’exposition des fiches corres-

d’un contrôle administratif de mise sur le

pondent aux conditions réelles d’utilisation

marché. Mais les moyens de mobilisation

et interroger son fournisseur, consulter le

des administrations (douanes, concurrence

site stop-cmr.fr et son médecin du travail.

et consommation, inspection du travail) de-

Tout ceci peut se faire au sein de chaque en-

vraient être, pour les produits et substances

treprise. Il s’agit même du travail normal du

chimiques, au moins équivalents à ceux

chef d’entreprise : la qualité relève de pres-

dévolus au contrôle des machines. Il en va

criptions précises, la prévention aussi et les

de l’intérêt de chacun. Ceci présuppose aussi

deux se rejoignent.

une formation spécifique des inspecteurs du 1. La traçabilité des expositions professionnelles, rapport IGAS RM2008-108P établi par Daniel Lejeune et remis à Monsieur Franck Gambelli, président de la Commission des Accidents du Travail et des Maladies Professionnelles, en appui à cette commission, à la demande de Monsieur Xavier Bertrand, ministre du travail, de la Famille et de la Solidarité. 2. Centre Interservices de Santé et de Médecine du travail en Entreprise

10

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

Né en 1947 à Saint Malo, Daniel Lejeune a fait connaissance du Nord-Pas-de-Calais au cours de sa carrière professionnelle. Il est resté attaché à cette région, « sa population et ses paysages », nous dit-il. Aujourd’hui en retraite, Daniel Lejeune se consacre notamment à son travail de photographe d’art. D’abord inspecteur du travail, il a fini sa carrière comme haut fonctionnaire à l’Inspection Générale des Affaires Sociales. Parmi les nombreux rapports qu’il a écrit, deux font date : un rapport sur l’amiante dans les bâtiments, fruit d’une mission collective et pluriinspections, et celui sur la traçabilité des expositions professionnelles. 66/67 : Enseignant de Français Histoire Géographie et Législation du Travail dans l’enseignement technique. 74/80 : Inspecteur du travail à Cambrai puis Valenciennes (textile, métallurgie, sidérurgie,…). 80/83 : Directeur adjoint à la Direction Régionale du Travail et de l’Emploi du Nord-Pas-de-Calais. 83/87 : Directeur départemental du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle de Haute Corse. 87/95 : Chef de Bureau à la direction des relations du travail au Ministère du travail (sécurité des machines, équipements de protection individuelle, énergies), membre du conseil d’administration du Laboratoire National d’Essai (LNE). 95/97 : Directeur régional délégué, directeur du travail et des entreprises à la DRTEFP d’Ile de France. 97/99 : Conseiller technique au cabinet de madame Michelle Demessine, secrétaire d’état au tourisme. 99/2011 : Inspecteur, puis inspecteur général à l’IGAS Daniel Lejeune a été d’avril 2009 au 31 décembre 2011, secrétaire général du Conseil d’Orientation sur les Conditions de Travail, et responsable de la Mission permanente d’Inspection Santé Sécurité au Travail des ministères sociaux.


Risque Routier Professionnel

PARTIR, C’EST BIEN… ARRIVER, C’EST MIEUX ! Un seul chiffre en dit long. Une mort sur deux reconnue en accident du travail, pour le régime général de la Sécurité Sociale, est liée à un déplacement : automobile, cycle, motocycle, marche à pied, etc. Dans 7 cas sur 10, ce déplacement est lié au trajet entre le domicile et le lieu de travail :

on parle d’accident de trajet. Dans 3 cas sur 10, il est lié au travail luimême : on parle alors d’accident de mission. Dans chaque cas, une question cruciale et douloureuse se pose : qu’est-ce qu’on aurait pu faire pour éviter ce décès ? La réflexion concerne chacun d’entre nous.

DOSSIER

Risque Routier Professionnel


Laurent HUGLO

Ingénieur Conseil Régional Adjoint, CARSAT Nord-Picardie (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail).

En France, les accidents du travail font l’objet d’une assurance obligatoire. Pour une entreprise privée, c’est le régime général de la Sécurité Sociale qui gère cette assurance « Accident du Travail- Maladie Professionnelle ». Chaque entreprise paie une cotisation spécifique « AT-MP », dont le taux est notifié par la CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail). La CARSAT a aussi une mission de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles auprès de ces entreprises du secteur privé, quelles que soient leur taille ou leur activité.

Quel est votre rôle au sein de la CARSAT Nord-Picardie ? LH : Il est opérationnel. J’ai sous ma responsabilité le management de 45 ingénieurs et contrôleurs intervenant en entreprise pour aider à améliorer la prévention des risques professionnels. Je porte un soin particulier à la collaboration avec les autres « préventeurs », aux premiers rangs desquels figurent les médecins du travail et leurs équipes de santé au travail. Méconnue mais active une cellule d’action transversale réalise une véritable ingénierie de prévention, avec, par exemple, la création d’outil d’appui et de support d’intervention. Enfin, s’ajoute à l’organigramme un service incitations financières, qui instruit les dossiers de majoration-minoration de taux de cotisation, ainsi que les Contrats de Prévention et Aides Financières Simplifiées. Comment définir le Risque Routier Professionnel ? LH : C’est une notion très large. Sur le plan assuranciel, au niveau du régime général, on prend en charge les conséquences humaines liées aux accidents de mission et aux accidents de trajet , essentiellement les soins médicaux

12

et chirurgicaux, les arrêts de travail, l’ incapacité le cas échéant. L’accident de trajet concerne l’accident survenu entre le domicile habituel et le lieu de travail. Le coût de cette sinistralité est mutualisé entre toutes les entreprises quel que soit leur domaine d’activité. L’accident de mission concerne les déplacements liés à l’activité de travail, selon la définition légale de l’accident de travail. Son coût est directement ou indirectement intégré dans le taux de cotisation spécifique de l’entreprise. Autre notion : l’indemnisation porte sur un tiers responsable mais aussi sur leurs victimes qui peuvent être elles-mêmes en trajet ou en mission. Dans 30 % des accidents de trajet ou de missions, nous indemnisons des victimes d’accident causé par un tiers. Et sur le plan pratique ? LH : Gardons nous de réduire le risque aux « engins motorisés ». Nous couvrons les risques liés à toute modalités de déplacement : piéton, cycle, cycle motorisé, véhicule personnel, véhicule utilitaire léger, poids lourds, transport en commun, train, etc. En parallèle, quasiment tous les métiers impliquent des déplacements. Enfin, la prévention des risques routiers professionnels se traite en synergie avec les enjeux de sécurité routière relevant des

politiques publiques. La prévention des risques routiers professionnels va au delà du périmètre de l’entreprise et est un des leviers pour une politique globale des déplacements et de sécurité routière. Que disent les statistiques ? LH : Quelques chiffres suffisent pour comprendre les enjeux. (Voir encadré). Les chiffres et tendances sont influencés par de nombreux paramètres. Les modalités de déplacement influent favorablement ou défavorablement sur la gravité de la sinistralité. Les politiques de développement durable font évoluer les modalités de déplacement : covoiturage, transport en commun, vélo… Au niveau de la gravité d’un sinistre, certaines modalités sont plus sûres, d’autres sont moins sûres. La voiture aura un rôle de « bouclier » : il y aura des dégâts matériels en cas d’accident, avant en général de relever des lésions corporelles. Il n’en est pas de même avec le vélo : c’est hélas l’inverse. Toute forme de transports en commun est plus sécurisante, le vélo, moins. Tous les deux concourent pourtant à une politique raisonnée des déplacements. Les pratiques sont aussi très importantes : le développement de l’éco-conduite s’accompagne d’un comportement plus calme au volant

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

avec anticipation des réactions face aux aléas. Peut-on parler de facteurs de gravité ? LH : Oui, bien sûr. Au niveau du conducteur, du véhicule et des conditions de circulation. L’âge influe sur les statistiques de gravité : les jeunes conducteurs et les séniors tendent à avoir des accidents plus graves comme victimes ou auteurs. D’autres facteurs sont plus difficiles à cerner comme l’incidence de la précarisation des contrats de travail en lien avec une population fragilisée vis-à-vis du risque routier professionnel : allongement des temps de parcours, utilisation de moyens moins protégés...etc. Pour les accidents de mission, quelles sont les activités les plus concernées ? LH : Il y a les « secteurs classiques » qui correspondent à des réalités bien spécifiques : livreurs de pizza et motocycle, messagerie ou transports express et véhicules utilitaires légers, transports de salariés, transports routiers de marchandise ou de matière dangereuse, etc. Pour ces secteurs, trois axes de travail de base sont intégrés : compétences du conducteur, sûreté et


On parle plutôt de politique de déplacements, à présent… LH : Tout à fait. Et plusieurs facteurs interviennent. La distance entre le domicile et le lieu de travail augmente : environ un kilomètre supplémentaire en moyenne chaque année. Les trajets sont globalement plus longs avec la fatigue générée dans des conditions de circulation de plus en plus difficiles. Au niveau d’une entreprise, raisonner politique de déplacements pour les trajets « domicile-travail », c’est par exemple prendre en compte l’offre de transport collectif et de transport alternatif au véhicule personnel, inciter aux covoiturages, adapter les horaires et les rythmes de travail …Tout converge vers une approche globale et citoyenne qui va dans l’intérêt du salarié, de son entreprise et des conditions de circulation. En exemple, cela s’illustre par l’incompatibilité d’horaires de travail de type 5 heures-13 heures avec l’offre de transport collectif…

Existe-t-il des spécificités régionales ? LH : Quatre paramètres concernent notre région. La densité de population s’accompagne d’une densité de déplacements sur un réseau routier et autoroutier dense. La région est comme beaucoup d’autres … au centre de l’Europe, c’est une zone de passage de poids lourds. Enfin l’état sanitaire des populations de certains territoires se retrouve dans la sinistralité face au risque routier. L’incidence de cet état sur les addictions est un élément admis aujourd’hui. Que peut faire une entreprise ? LH : Beaucoup de choses et plus qu’elle ne l’imagine. A commencer par des actions à sa portée, simples et peu coûteuses, par exemple réaliser une cartographie du trajet de ces salariés. Afin d’ouvrir à tout ce qui est possible, au niveau de la CARSAT, nous allons développer dans les prochaines semaines, une politique de contractualisation sur le champ du risque routier professionnel. Elle sera proposée à toute entreprise, sur la base d’environ 40 domaines. L’entreprise détermine ce qu’elle veut faire et dans quelle ampleur dans son périmètre d’activité : nommer un référent risque routier, veiller à l’aptitude à la conduite, lutter contre certaines addictions, développer l’écoconduite, analyse des déplacements, stage pour révision du code de la route, charte du téléphone portable jusqu’à l’action concrête de salage de ces voies

Le risque routier au quotidien Chaque jour, en France, sur la route Tués Blessés Déclarations de sinistres

privées extérieures, … Comme vous le voyez, cela couvre un ensemble de dispositions très diversifiées… Le plus loin est encore possible : sans verser dans une délation malsaine, comportement en responsabilité d’un auteur d’infraction relevée par dispositif automatique communiquant spontanément son identité aux forces de l’ordre. Chacun doit pouvoir prendre ses responsabilités. L’usage dévoyée de téléphone mobile est pratique courante malgré les interdits du code de la route sans une politique claire, affirmée et surtout partagée de la part de l’entreprise et de tous ces salariés. S’agissant du comportement au volant, le salarié doit tout autant s’impliquer vis-à-vis de son entreprise. Les actions de prévention à développer doivent se faire en partenariat avec les spécialistes concernés selon les items retenus : autoécole, Prévention Routière, service de santé au travail, etc. Dans la logique de cette contractualisation, la ristourne de cotisation « trajet » et « travail » pourrait s’envisager naturellement en fonction de la réalité des résultats obtenus. De même un label pourrait être affiché au dos des véhicules des entreprises adhérentes à cette contractualisation pour affirmer l’image responsable de l’entreprise sur ce sujet de sécurité collective.. Que diriez-vous en conclusion ? LH : L’entreprise est déjà fortement chargée de problématique sociale mais elle peut être « un carrefour de prévention des risques liés aux

DOSSIER

entretien du véhicule, organisation des déplacements. Des secteurs sont en émergence, au sein desquels apparaît par exemple, la restauration collective qui, avec la mise en œuvre croissante de cuisine centralisée, génère des déplacements sous contrainte de temps pour livrer les repas. Le maintien à domicile des personnes âgées et le développement de l’aide à domicile entraînent pour les salariés rattachés à ces activités, l’usage de véhicules pour des déplacements sous contrainte de temps, souvent en circulation urbaine dense, quelle que soit la météo…

déplacements ». Toutes les actions sont importantes. Même les plus modestes. L’important reste l’endurance, et la pérennité sur ce sujet. Car nos mauvaises habitudes reviennent vite. La prévention du risque routier professionnel relève d’un effort permanent. Mais elle concourt à une « culture de sécurité » qui impacte autant la vie professionnelle sur tous ces risques que la vie personnelle.

Les accidents professionnels

Autre activité

En conduisant un véhicule

Trajets

Missions

1 toutes les

13 1h43 mm 304

6137

1 toutes les

5 mm

45%

55%

70%

30%

1 toutes les

14 sec

Les accidents du travail mortels

Répartition par motifs de déplacement Chiffres 2005 : source CNAMTS

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

13 03


Risque Routier Professionnel

Du volontariat à l’obligation ! Laboratoire d’Analyses Médicales implanté à Dunkerque depuis une soixantaine d’années, BIOCERF est réparti sur 5 sites et comprend 60 salariés. 8 véhicules sont utilisés en permanence par la moitié de ces salariés. En effet, du prélèvement aux laboratoires, les déplacements sont quotidiens. BIOCERF répond aux assurances obligatoires qualité, sous la démarche COFRAC (Comité Français d’Accréditation). Un processus de contrôle rigoureux qui concerne les modalités de prélèvements et de réception, les processus d’analyse et de délivrance des résultats. Les transports en font partie. Le docteur Sophie Deroubaix est le médecin du travail du CEDEST (Santé au travail de Dunkerque) qui suit BIOCERF : « Le thème du risque routier a été soulevé en CHSCT, Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail. Après les risques biologiques, les risques d’accident de la route sont apparus prioritaires. Il est vrai que la mobilité fait partie du fonctionnement du laboratoire. On n’y pense pas forcément de prime abord. En tant que médecin du travail, mon rôle est de conseiller et valider. Le laboratoire s’est engagé dans un plan d’action ». Du volontariat… Pour le docteur Jean Ficheux, directeur du laboratoire 14

BIOCERF, la démarche a démarré avec l’élaboration du Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER) : « Avec le CHSCT, nous avons répertorié l’ensemble des risques. Vis-à-vis du risque chimique et du risque biologique, les mesures de prévention étaient déjà effectives. Même s’il faut toujours être vigilant et s’améliorer en s’adaptant à l’évolution des connaissances et des technologies… Par contre, nous avons convenu que le risque routier méritait une attention particulière. Et un plan d’action a été élaboré ». Ce plan prévoit la prise en charge par le laboratoire de stages en auto-école : trois heures de formation théorique et une heure de conduite accompagnée. Ceci a été mis en place

sur le principe du volontariat, avec une grande souplesse dans le choix du moment de stage pour le salarié. ... à l’obligation ! « Les formations sont organisées par un des membres du CHSCT » nous précise le docteur Jean Ficheux. « Devant le fait que peu de salariés s’inscrivaient, il a été convenu, en CHSCT, que le stage serait obligatoire et faisait partie intégrante du travail. Il est d’ailleurs réalisé sur les horaires de travail ». Dans le cadre de la procédure COFRAC, il faut noter que les véhicules sont soumis à un contrôle régulier qui fait l’objet d’une traçabilité. Chaque véhicule a une fiche sur laquelle doivent être consignées

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

les observations des utilisateurs. Ces fiches sont consignées dans un dossier, qui assure un suivi informatisé de l’entretien de chaque véhicule. « J’ai été surpris que ces procédures aient demandé du temps pour être adoptées. Je me suis souvent demandé comment font les gens avec leur propre véhicule. S’il y a une différence d’attitude avec celle de l’entreprise… Pourquoi ? Je n’ai pas de réponse ».

BIOCERF Docteur Jean Ficheux, directeur 60 salariés DUNKERQUE SANTÉ AU TRAVAIL DE DUNKERQUE (CEDEST)


DOSSIER ARBATI 20 salariés Céline Mazingue, assistante CALAIS – Les Attaques SANTÉ AU TRAVAIL DE CALAISBOULOGNE-LE TOUQUET (ASTIL 62)

Risque Routier Professionnel

Une action : de nettes améliorations Implantée aux Attaques, près de Calais, la société ARBATI fabrique et pose, depuis 34 ans, portes et portails, fenêtres, portes-fenêtres et baies vitrées, volets et fermetures, verrières et vérandas, portes coupe-feu et escaliers … Elle travaille l’acier autant que l’aluminium. Elle maîtrise les techniques de traitements des métaux. Ses clients sont des particuliers, des entreprises ou des magasins. Sur ses 20 salariés, 4 sont en bureau d’étude, 6 en ateliers. Une équipe de poseurs sillonne les routes… Avec la Santé au Travail de Calais-Boulogne-Le Touquet (ASTIL 62), tout le personnel a bénéficié d’une sensibilisation au risque routier. « L’entreprise est certifiée MASE et elle réalise régulièrement des quarts d’heure sécurité avec l’ensemble du personnel. La sécurité et la santé au travail font l’objet d’une attention soutenue » nous dit le docteur Laure De Pauw, actuelle médecin du travail de l’ASTIL 62 qui suit ARBATI. « Nous avons un bon dialogue avec cette entreprise, avec des interventions régulières que je confie à Jeanne-Marie Anot, assistante en santé au travail à l’ASTIL 62 » La prévention : un objectif permanent Mme Valérie Massemin, M. Jacques Decriem et Grégory Picotin sont les trois associés d’ARBATI. « La certification

MASE génère incontestablement une démarche permanente d’amélioration des performances en matière de Sécurité, Santé, Hygiène et Environnement. C’est important pour le personnel et nos clients » nous dit Céline Mazingue, assistante. « Dans ce contexte, le risque routier s’est révélé comme important. Nous avons quatre équipes de poseurs. Mais ce risque concerne l’ensemble du personnel. C’est le docteur Pascal Varoux, notre médecin du travail de l’époque qui nous avait proposé un module de sensibilisation, dès 2009. La qualité des échanges, sous la forme de causerie, a permis un dialogue constructif au sein de l’entreprise sur ce sujet somme toute délicat ».

Dialogues et propositions concrètes Jeanne-Marie Anot est assistante en santé au travail à l’ASTIL 62 : « En liaison avec le médecin du travail, j’ai réalisé un diaporama qui a permis aux salariés de l’entreprise d’échanger sur de multiples points : statistiques des accidents et des infractions, identification des risques, entretien des véhicules, gestion des temps de déplacements, usage du téléphone mobile, chargement du véhicule, prise en compte des incidents, perte de permis de conduire, etc ». Céline Mazingue parle des résultats obtenus : « Nous avons eu en deux ans une nette amélioration en matière du nombre d’infractions

relevées avec les véhicules de la société ; les véhicules ont été équipés de dispositifs de géo-localisation afin d’éviter les zones de circulation difficile et nous investissons dans des véhicules à régulateur de vitesse ; l’usage du téléphone mobile est maîtrisé et les itinéraires mieux préparés. C’est un état d’esprit autant qu’une organisation adaptée et permanente ».

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

15


Sur le territoire de la métropole lilloise, TLV Transport assure le transport de personnes à mobilité réduite, ayant une carte d’invalidé à 80 % et ne pouvant pas bénéficier des transports en commun, dans le cadre de l’exploitation du service Handipôle pour le compte de Transpole. Sous convention avec le Conseil Général du Nord, TLV Transport assure également les déplacements d’élèves et d’étudiants à mobilité réduite. Au total, ce sont plus de 200 000 trajets effectués par an, en milieu urbain, assurés par 95 conducteurs et une flotte de 53 véhicules aménagés pour un total de 84 véhicules.

Risque Routier Professionnel

De l’équipement du véhicule aux compétences des conducteurs…

16

« Nous avons eu un jour un grave accident matériel, sans blessé. Il y avait un élève dans le véhicule. Notre médecin du travail a reçu le conducteur, qui était choqué. Et nous avons décidé d’engager une action de prévention routière » nous dit Alain Mathé, responsable clientèle et secrétaire du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT). Dirigé par monsieur Jean-Christophe Lampe, TLV Transport a inscrit le risque routier dans son Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER), qui fait l’objet d’une actualisation et d’un suivi régulier.

et les mentalités évoluent petit à petit. En outre, c’est une réflexion permanente. Elle concerne les équipements de sécurité des véhicules et les compétences des conducteurs. Elle concerne aussi notre organisation : des ordres de mission étaient souvent donnés en temps réel au conducteur par téléphone portable. Nous avons adopté une charte routière, inspirée du modèle élaboré par la CARSAT, Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail. Nous avons surtout pu bénéficier du regard et de l’expertise extérieure du Docteur François Devos, médecin du travail, et de Jacques Lerouge, chauffeur assistant à PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord ».

Une action globale et permanente Pour Alain Mathé : « On est parti sur plusieurs années, car le matériel est renouvelé tous les 7 à 10 ans

L’appui de l’équipe santé travail Jacques Lerouge sait de quoi il parle. Il a été ambulancier pendant 6 ans, en parcourant

plus de 100 000 km par an. Conducteur de poids lourd, il a été moniteur d’auto-école pendant son service militaire. « Le milieu du transport et la route, il connaît ! », nous dit le docteur François Devos, médecin du travail de PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord, qui suit Transpole. « Il parle le même langage que les conducteurs. Ceci permet de mieux accompagner l’entreprise. Notre rôle est de faciliter ce que l’entreprise peut faire elle-même ». Personne ressource risque routier au sein de PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord, Jacques Lerouge a suivi régulièrement les travaux du CHSCT de TLV Transport. Il a aussi accompagné un conducteur de TLV Transport, dès 6 heures 30 du matin, durant sa journée de travail : « Nous avons quatre axes de travail : le

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

management des déplacements, le management des véhicules et leurs équipements de sécurité, le management des communications mobiles, le management des compétences ». En outre, Jacques Lerouge est formateur risque routier et sauveteur secouriste du travail pour PST Formation.

TLV HANDICAP 109 salariés Alain Mathé, responsable clientèle, secrétaire du CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) LILLE PÔLE SANTÉ TRAVAIL MÉTROPOLE NORD


MAISON DE RETRAITE HIPPOLYTE NOIRET 120 salariés Madame Corinne Madurel, directrice FOUILLOY SANTÉ AU TRAVAIL DE LA SOMME (ASMIS)

Risque Routier Professionnel

En maison de retraite aussi : « conduire est un acte de travail » ! On n’y penserait pas de prime à bord. Et pourtant, le personnel des Etablissements d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) est concerné par la prévention du risque routier. 137 personnes âgées sont prises en charge à la Résidence Hippolyte Noiret, à Fouilloy, près d’Amiens. Au sein de l’établissement, deux unités « Alzheimer » de 12 lits chacune, existent depuis deux ans. Parmi les 120 salariés, plusieurs effectuent des déplacements à titre professionnel. Et la sécurité routière est apparue être un risque non négligeable… Pour Madame Corinne Madurel, la question de la prévention du risque routier professionnel s’est naturellement posée en dirigeant un autre établissement : la résidence Louise Marais d’Arc à Bray sur Somme. Cet établissement comprend 85 chambres et un Service de Soins Infirmiers à Domicile (SSIAD) qui couvre le canton ; 8 aides-soignantes et infirmières sont en permanence sur les routes. « C’est en lisant le catalogue de formation de mon service de santé au travail, l’ASMIS, que j’ai découvert un module intitulé : conduire est un acte de travail. J’ai tout de suite adhéré à l’idée de proposer ce module de formation à mon personnel. Tout d’abord, les aides-soignantes et les infirmières… puis l’animatrice, le responsable

technique, les cadres de santé et… moi-même ! ». Des facteurs de risques aux conduites à tenir Joël Delrue est à l’initiative de cette formation dont le module a été créé en collaboration avec 2 médecins du travail : « Je suis formateur Sauveteur Secouriste du Travail et chauffeur de centre médical mobile à l’ASMIS. C’est lors des Journées Portes Ouvertes que l’idée de compléter ce module est venue devant le nombre de questions posées par les visiteurs. Le programme final est parti de ces attentes ». Avec ce module, en une journée, Joël Delrue sensibilise 6 à 10 auditeurs sur les facteurs mécaniques (entretien du véhicule, fiche de suivi), humains (permis et conduite,

somnolence et troubles de la vigilance au volant, toxicomanie) ou organisationnels (ergonomie au poste de conduite, téléphone, gestion des déplacements) qui peuvent favoriser un accident. Il aborde aussi la question des conduites à tenir devant un accident matériel et/ou corporel. Il répond aux questions spécifiques de l’entreprise. « Nous ne nous rendons pas assez compte que la conduite d’un véhicule engage notre responsabilité et celle de l’entreprise, c’est souvent un acte quotidien avec un risque de relâchement de la vigilance », nous précise-t-il. D’un établissement à l’autre Madame Corinne Madurel poursuit : « Devant le succès au sein de l’établissement de Bray sur

Somme, j’ai décidé de l’étendre à celui de Fouilloy. Au fond, tout le personnel est concerné : cuisine, lingerie, atelier, entretien, vie sociale, hébergement, administration et personnel soignant. Que ce soit dans l’utilisation d’un véhicule de l’établissement ou de son véhicule personnel ». Médecin du travail assurant le suivi de la Résidence Hippolyte Noiret, le Docteur Anne Larnier conclut : « ce type d’intervention complète notre suivi médical des salariés. Ce module sensibilise les salariés tout en leur permettant des échanges concrets. Quand on voit le nombre et la gravité des accidents de circulation qui surviennent, on ne peut rester sans rien faire… ».

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

17


Risque Routier Professionnel

Plusieurs causes, une conséquence… Il est 8 h30. Le temps est légèrement brumeux. Madame B. vient de déposer son fils à l’école maternelle. Elle est à pied. Au moment de traverser, elle oublie de regarder à droite et à gauche. Elle pense à son mari hospitalisé. Elle est en dehors du passage clouté. Elle se rend à son travail sur le trajet habituel. Elle est à l’heure. La camionnette respecte la vitesse autorisée… mais ne s’arrête pas. Le conducteur de la camionnette se rend en livraison. Il est au travail depuis 6 heures du matin. Son portable, déposé sur la banquette avant, s’était mis à sonner. Un coup d’œil pour regarder qui appelait… Et le choc fut inévitable. Comme toujours, plusieurs causes convergent vers un accident. Pour Madame B., c’est « un accident de trajet » (voir page 20). Pour lui, c’est « un accident de mission » (voir page 19). Pour tous les deux, c’est un accident de la te circulation. Les chiffres ci-dessous sont consultables sur le site

www.securite-routiere.gouv.fr

1 ACCIDENT MORTEL SUR 3 EST LIÉ À L’ALCOOL : • En 2011, l’alcool a causé la mort de 1150 personnes par accident de la circulation. • 92% des conducteurs impliqués dans un accident mortel avec un taux d’alcoolémie positif sont des hommes. • Les 18-24 ans représentent 26% des morts dus à l’alcool ; ils constituent 9% de la population générale. • 71% de ces accidents ont lieu la nuit sur des routes départementales.

1 ACCIDENT MORTEL SUR 5 EST DÛ À UNE INFRACTION LIÉE À LA VITESSE

TÉLÉPHONER AU VOLANT MULTIPLIE PAR TROIS LE RISQUE D’ACCIDENT • 1 personne sur 2 déclare qu’il lui arrive d’utiliser son téléphone en conduisant • Près d’un accident corporel sur 10 est lié à l’utilisation du téléphone au volant.

1 ACCIDENT MORTEL SUR 3 SUR AUTOROUTE EST DÛ À L’ENDORMISSEMENT AU VOLANT • 17 heures de veille active (ex. : conduite automobile) ont le même effet que 0,50 grammes d’alcool par litres de sang.

18

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


Vous avez dit « Accident de mission » ? L’accident de circulation peut survenir lors d’un déplacement lié à l’exécution du travail. Il est dénommé par la jurisprudence « accident de mission ». En effet, il est directement lié à l’exécution d’un ordre de mission de la part de l’employeur. Que le salarié soit « conducteur professionnel », « conducteur habituel » ou « conducteur occasionnel » pour le compte de l’entreprise. Pour l’Assurance Maladie (régime général), il s’agit donc d’un accident du travail (« accident survenu en temps et lieu du travail »). Pour le salarié, cette reconnaissance en accident du travail permet la prise en charge à 100% des soins nécessités par les dommages corporels (lésions physiques ou psychiques) et ouvre droit à l’obtention d’indemnités liées à l’arrêt de travail et de rentes ou capitaux liés, le cas échéant, au décès ou aux incapacités permanentes. Pour l’employeur d’une entreprise privée, cet accident va influer, en fonction du barème qui s’applique à son entreprise, sur le taux de cotisation « AT-MP » (Accident du Travail-Maladie Professionnelle) notifié par la CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail).

DOSSIER

Risque Routier Professionnel

Chaque année en France, en moyenne, pour les 16 000 000 de salariés assurés par le régime général de la Sécurité Sociale : • 20 000 accidents de mission liés à la circulation (soit près de 60 par jour) • 100 morts (soit deux personnes par semaine) • 2 000 nouvelles indemnisations pour incapacité permanente par an (capital ou rente) • Environ 1, 5 millions de journées de travail perdues

Le salarié engage sa responsabilité civile et pénale vis-à-vis des tiers, en cas d’infraction au Code de la route et aux règles de sécurité, comme tout un chacun sur la voie publique ; il doit informer son employeur en cas de perte de validité du permis de conduire (ex. suppression totale des points). S’agissant d’accident survenu sur la voie publique, le droit commun et les obligations d’assurances de responsabilité civile s’appliquent (ex : assurance du véhicule) ; à ce propos, la Sécurité Sociale n’intervient pas quand il n’y a que des dégâts matériels (pas de soins et/ou d’arrêt de travail). Le chef d’entreprise engage sa responsabilité civile et pénale pour chaque risque auquel est exposé un de ses salariés, lors de l’exécution de son travail. Rappelons que l’employeur a une obligation de résultat en matière de sécurité au travail. Pour le risque lié au déplacement professionnel : • Obligation de l’évaluation du risque • Mise en place d’actions de prévention (ex. : Organisation du déplacement notamment sur la durée et les pauses, état et entretien du véhicule de société, chargement du véhicule, respect des équipements et règles de sécurité, compétences du conducteur, …). • Clarté et précision de l’ordre de mission.

S’agissant d’un accident du travail, l’article L. 411-1 du Code de la Sécurité Sociale donne une définition légale : « est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail, à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise » (article) ; ceci implique la conjonction de deux éléments fondamentaux : • Evènement soudain et datable avec précision survenu en temps et lieu du travail ; • Lien de subordination vis-à-vis d’un employeur lors de la survenue de cet accident. La notion d’accident de mission s’applique à tout déplacement lié à l’exécution du travail, que le déplacement soit habituel (ex. : livreur, ambulancier, routier, services et maintien à domicile, représentant, etc.) ou occasionnel. Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

19


Risque Routier Professionnel

Vous avez dit « Accident de trajet » ? L’accident de circulation qui survient entre le domicile ou le lieu de restauration habituel et le lieu de travail, à l’aller ou au retour et quel que soit le mode de transport, s’appelle en application du Code de la Sécurité Sociale un « accident de trajet ». Le trajet est lié au travail, mais s’effectue sans lien de subordination avec l’employeur. L’accident de trajet survient sur la voie publique, en dehors du temps et du lieu de travail. En cas de dommage corporel, il est pris en charge, pour le salarié, comme un accident de travail (prise en charge des soins à 100 %, indemnités en cas d’arrêt de travail, rente ou capital le cas échéant pour incapacité permanente ou décès). Pour l’employeur d’une entreprise privée, ces dépenses sont imputées sur un compte collectif, commun à l’ensemble des entreprises : c’est la partie « trajet » du taux de cotisation AT-MP (Accident du Travail – Maladie Professionnelle) notifié par la CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail). Les dépenses, liées aux accidents de trajet, sont donc prises en charge collectivement par toutes les entreprises privées de l’hexagone, indépendamment de la sinistralité dûe aux risques spécifiques d’une entreprise donnée.

Chaque année en France, en moyenne, pour les 16 000 000 de salariés assurés par le régime général de la Sécurité Sociale : • 60 000 accidents de trajet (soit près de 165 en moyenne par jour) • 300 morts (soit près de 1 personne par jour) • 6 000 nouvelles indemnisations pour incapacité permanente par an (capital ou rente) • Environ 4 millions de journées de travail perdues

Le salarié engage sa responsabilité civile et pénale vis-à-vis des tiers, en cas d’infraction au Code de la route et aux règles de sécurité, comme tout un chacun sur la voie publique. S’agissant d’accident survenu sur la voie publique, le droit commun et les obligations d’assurances de responsabilité civile s’appliquent (ex : assurance du véhicule) ; à ce propos, la Sécurité Sociale n’intervient pas quand il n’y a que des dégâts matériels (pas de soins et/ou d’arrêt de travail). Le chef d’entreprise n’engage pas sa responsabilité civile et pénale dès lors que le salarié n’est pas soumis à ses instructions durant le trajet ; le salarié n’est pas sous la subordination de l’employeur. S’agissant d’un accident de trajet, l’article L. 411-2 du Code de la Sécurité Sociale donne une définition légale : « l’accident survenu sur le trajet d’aller et de retour entre : • la résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial et le lieu de travail, • le lieu de travail et le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas (cantine, restaurant…), • et, dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante et indépendant de l’emploi ».

Le trajet peut ne pas être le plus direct en cas de covoiturage régulier selon la jurisprudence. La notion d’accident de trajet s’applique hors du lieu de travail ; à ce propos un accident survenu entre le bureau ou l’atelier et la cantine ou un lieu de restauration situé dans le site de l’entreprise est un accident de travail.

20

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


Principes de prévention en entreprise Le risque routier professionnel se résume en deux chiffes : près de 80 000 accidents par an pris en charge par le Régime Général de la Sécurité Sociale, près de 400 morts soit 50 % des accidents du travail mortels. Survenant sur la voie publique, la prévention passe par une politique coordonnée. Depuis 2001, un comité de pilotage national réunit les services de l’Etat concernés et les différents régimes d’assurance maladie. Un site est dédié aux orientations et conseils de ce comité national : www.risque-routier-professionnel.fr. Au niveau de chaque entreprise, plusieurs actions sont possibles. Votre service de santé au travail est là pour vous conseiller et vous orienter.

DOSSIER

Risque Routier Professionnel

Fiche détachable

N°21

1er Trimestre 2013 www.entrepriseetsante.fr

• Le risque lié aux déplacements doit être intégré dans le Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER) qui s’impose à chaque entreprise, quelles que soient sa taille et son activité. • A partir de cette évaluation, des mesures de prévention adaptées peuvent alors être définies : • Management des déplacements

Cette démarche examine : - Les horaires prévus - Les durées envisagées - Les pauses programmées - Les trajets empruntés, les conditions de circulation - La prévention de la fatigue au volant

• Sécurité des véhicules

Comme pour son véhicule personnel : - Importance de l’entretien - Réalisation des réparations - Choix d’options de sécurité (ex. : régulateur de vitesse) - Chargement

• Sécurité de la conduite

Une priorité compte tenu des statistiques : - Gestion des communications embarquées (ex. : utilisation des messageries à l’arrêt du véhicule)

• Compétences des conducteurs

Celle-ci peut faire l’objet d’aménagements spécifiques : - Sensibilisation - Information - Formation (ex. : stage de conduite).

• Comportement des conducteurs

Celle-ci peut faire l’objet d’une réflexion collective et partagée : - Pratiques de conduite sûre - Respect du code de la route - Addictions (tabac, alcool, drogues)

• La gestion du risque routier professionnel rejoint les préoccupations de performance de l’entreprise et les politiques de développement durable (ex. : transport collectif plutôt que voiture individuelle, covoiturage) et de performance de l’entreprise. ATTENTION ! L’obligation du respect du code de la route s’impose à tous. Dès lors que l’on est sur la voie publique, chacun d’entre nous engage sa responsabilité pénale, en cas d’infraction.

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


Conduite automobile et aptitude médicale

Le médecin du travail établit l’aptitude médicale au poste de travail, dans le cadre de la législation relative à la santé et la sécurité au travail. L’aptitude médicale à la conduite automobile relève d’un autre dispositif, indépendant de la santé au travail.

DOSSIER

Risque Routier Professionnel

Fiche détachable

N°21

1er Trimestre 2013 www.entrepriseetsante.fr

• Principe général :

En France, en l’état actuel des textes, c’est à chacun d’entre nous d’être sûr de son aptitude médicale personnelle à la conduite automobile, dès lors que l’on est candidat au permis de conduire ou déjà conducteur. Il nous appartient d’entreprendre les démarches nécessaires. Le médecin généraliste et le médecin du travail peuvent nous conseiller sur la marche à suivre.

• Qui prononce l’aptitude médicale à la conduite automobile ?

Ce sont des médecins agréés par l’Etat qui prononcent les avis d’aptitude médicale à la conduite automobile. Pour cela, il faut s’adresser à la préfecture de son département pour consulter un médecin de ville agréé ou passer devant une commission, composée de deux médecins. Ces médecins se prononcent sur l’aptitude (aptitude, aptitude temporaire, aptitude avec restriction, inaptitude) à la conduite automobile et/ou les éventuels aménagements nécessaires du véhicule. Ils peuvent s’entourer de l’avis de médecins spécialistes (ex. : cardiologue, neurologue, etc.). Les frais de consultation ne sont pas pris en charge par l’assurance maladie ; ils sont payés à titre personnel.

• Depuis le 1er septembre 2012, les personnes entrant dans les catégories suivantes doivent passer une visite médicale d’aptitude à la conduite (Décret 2012-886 du 17 juillet 2012 et arrêté du 31 juillet 2012) :

• les usagers ayant perdu la totalité de leurs points suite à une annulation ou à une invalidation de leur permis de conduire ; • les conducteurs ayant commis une infraction grave comme la conduite en état d’ivresse, par exemple ; • les personnes atteintes d’une affection médicale incompatible avec l’obtention ou le maintien du permis ; • les chauffeurs de taxis, d’ambulances ou de véhicules affectés au ramassage scolaire ou au transport public des personnes ou autres conducteurs soumis à un contrôle médical périodique ou occasionnel ; • les personnes handicapées candidates aux catégories A et B du permis de conduire délivrées pour la conduite des véhicules spécialement aménagés ; • les postulants aux catégories C, D, E et à compter du 19 janvier 2013, C1, C1E, D1 et D1E du permis de conduire ; • les titulaires de la catégorie A du permis conduisant des motos-taxis ; • les candidats au permis de conduire les véhicules des catégories A1, A, B, B1 et, à compter du 19 janvier 2013, de la catégorie A2, qui ont fait l’objet d’une décision de réforme ou d’exemption temporaire ou définitive ou sont titulaires d’une pension d’invalidité à titre civil ou militaire ; • les candidats qui ont fait l’objet d’une demande de contrôle médical d’aptitude à la conduite par l’examinateur à la suite de constatations faites lors de l’examen du permis de conduire ; • les enseignants de la conduite (auto-école) ; • les personnes qui souhaitent être exemptées du port obligatoire de la ceinture de sécurité ; • les candidats ou les titulaires au permis de conduire sollicitant la prorogation de leur titre, atteints d’une affection compatible avec l’obtention du permis de conduire mais susceptible de s’aggraver.

La liste actuelle des affections médicales qui influencent sur l’aptitude médicale à la conduite automobile est définie par l’arrêté du 31 août 2010 qui transpose en droit français la directive européenne du 25 août 2009 (pathologies cardiovasculaires, altérations visuelles, affections ORL et pulmonaires, pratiques addictives, affections neurologiques et psychiatrique, affections de l’appareil locomoteur, patlogies métaboliques, transplantations).

CHAQUE ENTREPRISE bénéficie d’une expertise médicale spécialisée et indépendante grâce à son médecin du travail :

Prénom et nom : .................................................................................................................................................................. Adresse :........................................................................................................................................................................................ ................................................................................................................................................................................................................

Mail : ................................................................................................................................................................................................ Téléphone : ...............................................................................................................................................................................

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


INVESTIR

Santé au travail

Vous allez investir, vous avez raison ! Une entreprise est confrontée chaque jour à des choix financiers. Les investissements conditionnent son développement. Ils doivent être réfléchis… car on ne peut pas investir à perte ! D’ailleurs, en cas de recherche d’emprunt et au devant des garanties à apporter, cela peut être un vrai « casse-tête » pour de nombreux chefs d’entreprise… Peut-on raisonner « investissement en santé au travail » ? En matière de santé au travail, les investissements sont de deux ordres : matériels ou immatériels. Les investissements immatériels concernent par exemple des changements d’attitudes et/ou de modes relationnels qui améliorent le bien-être au travail. Les investissements matériels sont très larges : des équipements de protection individuels au choix du procédé ou des installations. Investissements immatériels Ces investissements ont une particularité, ils sont peu coûteux. Faire attention à l’humain dans une entreprise, au sens du respect de la personne et de l’écoute, demande des efforts personnels. Et cela permet à l’entreprise de gagner en performance. De nombreuses TPE et PME le savent et le pratiquent intuitivement !

Investissements matériels Dès lors qu’il s’agit d’investir sur un nouveau procédé, une nouvelle machine, une nouvelle installation, de nouveaux locaux et des moyens de protection collective ou individuelle, la calculette est de mise. On peut entrer dans des plans ou programme d’investissements conséquents. Intégrer les conséquences sur le plan humain est gage d’efficacité dans la performance de cet investissement. Prendre conseil auprès de son service de santé au travail permet de bénéficier d’une aide dans le choix de cet investissement !

SANTÉ AU TRAVAIL SÉCURITÉ DES ENTREPRISES 120 CONFÉRENCES • 380 EXPOSANTS

ent L’événem e nc de référe e n en Fra c

S o u s l e H a u t - P a t r o n a g e d u M i n i s t è r e d u Tr a v a i l , d e l ’ E m p l o i , d e l a F o r m a t i o n P r o f e s s i o n n e l l e e t d u D i a l o g u e S o c i a l

Exposer

Devenir partenaire

Visiter

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

23


VOS DROITS VOS DEVOIRS

Accident de circulation et contrat de travail Chacun d’entre nous engage sa responsabilité personelle, civile et pénale, dans un accident de la circulation. Les assurances personnelles couvrent ce risque (ex. : assurance du véhicule). Un accident de circulation peut également être pris en charge au titre de la sécurité sociale, comme accident de trajet ou accident de travail (voir dossier central de ce numéro, pages 19 et 20). La Sécurité Sociale prend alors en charge les soins, les éventuelles indemnités liées à l’arrêt de travail ainsi que, le cas échéant, des rentes ou capitaux pour incapacité permanente, voire décès. Attention : les conséquences sur le contrat de travail sont différentes si l’accident est reconnu comme accident du travail ou accident de trajet. Un arrêt de travail pour accident ou maladie entraîne une suspension du contrat de travail. Cette suspension du contrat de travail n’ouvre pas les mêmes droits, selon que l’accident est pris en charge par la Sécurité Sociale en accident du travail ou en accident de trajet. L’accident de trajet j j

relève du régime applicable à la maladie non professionnelle ou l’accident de vie privée ; alors que l’accident du travail relève d’un régime spécifique, car il survient sous le lien de subordination à l’employeur créé par le contrat de travail. De même, le Code du travail, en son article L. 1226-9, protège 9 p g

contre le licenciement un salarié victime d’un accident du travail ou atteint d’une maladie professionnelle reconnue. Cet article ne s’applique pas aux accidents de trajet.

Accident de trajet

Accident du travail

Prise en charge de la journée de travail le jour de l’accident par l’employeur Indemnisation par la Sécurité Sociale en cas d’arrêt de travail Indemnisation complémentaire versée par l’employeur

Identique

Identique Pas de délai de carence, 60% du salaire journalier de référence pendant les 28 premiers jours et 80 % de ce salaire par la suite A partir du 8ème jour d’absence (si le salarié a un an d’ancienneté)

Indemnité pour incapacité permanente partielle (rente ou capital) Recours en faute inexcusable contre l’employeur devant les juridictions de la Sécurité Sociale

Barème identique 1

Impossible

Possible

Licenciement durant la période de suspension du Contrat de Travail (Arrêt de travail)

Licenciement possible pour cause réelle et sérieuse (ex : nécessité de remplacement pour absence prolongée)

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou la maladie. Art. L 1226-9 Code du Travail

Calcul de l’ancienneté

Durée d’arrêt de travail non prise en compte

Durée d’arrêt de travail prise en compte

Calcul des Congés Payés

Durée d’arrêt de travail non prise en compte

Durée d’arrêt de travail prise en compte

1 Différent de celui applicable à la maladie non professionnelle et/ou l’accident de vie privée

24

Dès le 1er jour d’absence

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


VOTRE SANTÉ VOTRE EMPLOI

> Bâtiment et travaux publics

De la vie de chantier … au travail en atelier.

850 salariés travaillent pour Eiffage Energie à Verquin (Pas-de-Calais). Sur ce site, où est également implanté Eiffage Energie Transport & Distribution (150 salariés à Verquin), sont conçus et réalisés des armoires électriques, des supports et diverses charpentes métalliques (en atelier de serrurerie) pour la France et l’étranger. Ces éléments sont ensuite installés dans des postes de transformation haute tension. L’activité classique d’Eiffage Energie restant l’électricité industrielle, la climatisation, l’éclairage public…

La visite de pré-reprise, élément essentiel.

Le docteur Annie Desry, médecin du travail, a succédé au docteur Chantal Verague, qui a reçu à l’époque Dominique T. en visite de pré-reprise : « C’est à partir de là que tout se joue. La visite de pré-reprise a permis d’anticiper sur le retour au travail de Dominique T. Dans le respect du secret médical, un travail d’équipe s’est mis en place, en liaison avec le salarié et la direction ». A propos de ce travail d’équipe,

Depuis près de 30 ans, Dominique T1. vit de chantier en chantier, en France et à l’étranger. Dominique est électricien-monteur sur lignes à très haute tension, à savoir de 63 000 à 400 000 volts ! Déplacements, vie de chantier, solidarités d’équipe et travaux en hauteur rythment sa vie. Jusqu’à ce jour, en Belgique, où il s’est retrouvé coincé sous une caisse de près d’une tonne, suite au déséquilibre d’un transpalette… L’accident est sérieux : fracture grave de l’épaule, avec intervention chirurgicale suivie d’une longue période de convalescence et de rééducation. Au total : un an d’arrêt de travail. Le docteur Annie Desry, médecin du travail à l’AST 62-59, Éric Walle, Préventeur Régional à Eiffage Energie Exports et Spécialités, branche Transport et Distribution, et Séverine Dissaux, infirmière du site EIFFAGE ENERGIE VERQUIN n’ont pas perdu de vue Dominique… Résultat : un maintien dans l’emploi réussi. Éric Walle, précise « qu’il a une mission de facilitateur au sein du groupe, en tant que Préventeur Régional».

Etudes et dossiers, éléments incontournables

« La direction a proposé un reclassement à un poste de serrurier en atelier de fabrication des charpentes métalliques ; nous avons commencé par étudier les contraintes gestuelles et posturales de ce poste » précise Séverine Dissaux, infirmière sur le site de Verquin. « Puis nous avons sollicité le SAMETH2 pour une étude ergonomique de ce poste et nous avons instruit les dossiers d’aides auprès de l’AGEFIPH3. Cela a représenté un an de travail, mené entre le médecin du travail, le chef d’équipe dans l’atelier, le Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail, le responsable du site, la Direction Générale, le Préventeur Régional, le SAMETH ».

« L’humanité », au cœur de la réussite.

« Pendant l’aménagement du nouveau poste, Dominique T. a pu bénéficier, durant 6 mois,

d’un mi-temps thérapeutique, avec travail à hauteur et restriction pour le port de charge lourde et l’élévation des bras» nous précise Annie Desry. Éric Walle résume : « Sur ce poste, une perceuse automatique à colonne, ainsi qu’un pont roulant pour éviter la manutention des pièces ont été installés ; le bouton de commande d’une machine a été déplacé. Mais ce qui compte le plus, c’est l’aspect humain ». Dominique T. a pu garder un emploi. Il a réussi à s’adapter à sa nouvelle vie.

EIFFAGE ENERGIE EXPORTS ET SPÉCIALITÉS EIFFAGE ENERGIE TRANSPORT & DISTRIBUTION 850 salariés – 150 salariés Éric Walle, Animateur Préventeur Régional VERQUIN SANTÉ AU TRAVAIL ARRAS-BÉTHUNEHÉNIN-LENS (AST 59-62)

1 - Le nom a été changé pour préservé la confidentialité (NDLR). 2 - SAMETH : Service D’Aide au Maintien dans l’Emploi des Travailleurs Handicapés. Il s’agit d’ACTIPHE sur le secteur concerné. 3 - AGEFIPH : Association de GEstion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des personnes Handicapées.

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

25


ZOOM SUR

Santé au Travail de Valenciennes (ASTAV)

Soudage à l’arc : l’attention est de mise ! Le soudage à l’arc requiert une attention permanente. Pour le soudeur d’une part, et de l’entreprise d’autre part. De la part du soudeur, car le geste demande une vigilance soutenue, une précision importante et une régularité parfaite. De la part de l’entreprise, car le soudage à l’arc émet un panache de gaz et fumées, dont il faut se protéger. Afin de toujours mieux conseiller les entreprises, l’Association de Santé au Travail de Valenciennes (ASTAV) et la Caisse d’Assurance Retraite et de Santé Au Travail Nord-Picardie (CARSAT) ont réalisé une étude auprès de 137 soudeurs volontaires. Ces soudeurs à l’arc travaillent dans 6 entreprises différentes, dont 3 d’entre elles ont plus de 50 salariés, les 3 autres moins de 10. Cinq conditions fondamentales sont nécessaires pour réaliser une telle étude : avoir un protocole rigoureux, avoir l’accord des entreprises, respecter le volontariat des salariés, avoir des moyens de prélèvement et d’analyses fiables et… être une équipe pluridisciplinaire ! Seule une telle équipe peut mener à bien ce type d’étude, car il faut raisonner d’une part sur l’environnement de travail, avec des compétences techniques, organisationnelles et médicales. Le groupe de travail mis en place par l’ASTAV et la CARSAT Nord Picardie en est la parfaite illustration (voir encadré). L’intérêt de l’étude est qu’elle porte pour un bassin d’emploi, sur des situations réelles de travail en mutualisant les connaissances provenant de plusieurs entreprises. Ceci permet d’orienter pragmatiquement les améliorations à entreprendre en matière de maîtrise des risques.

L’évaluation des risques CMR et Aluminium

L’étude commune ASTAV-CARSAT a pour objectif d’évaluer les risques Cancérogènes, Mutagènes et toxiques pour la Reproduction (CMR) et le risque lié à l’aluminium, rencontrés chez les soudeurs à l’arc du Valenciennois. Il s’agit d’opérateurs volontaires, effectuant une tâche de soudage à l’arc pendant au moins 1 heure par jour, depuis plus d’une semaine. Le Valenciennois comporte une importante activité sidérurgique et ferroviaire, réservoir qui a fourni les soudeurs volontaires inclus dans l’étude.

26

Un raisonnement « Exposition-Imprégnation »

Le protocole scientifique de l’étude est basé sur deux types de dosages : dosages dans l’air respiré et dosages urinaires. Dans l’atmosphère, les dosages des fumées de soudage, du fer, du chrome total et du chrome héxavalent, de l’aluminium, du manganèse, du nickel, du cuivre, du zinc, de l’arsenic, du béryllium et du cobalt ont été effectués. Les dosages urinaires ont cherché à mettre en évidence l’imprégnation potentielle des salariés à l’aluminium, au nickel, au chrome et/ ou au manganèse. On raisonne donc à la fois sur les concentrations atmosphériques des métaux dans l’air ambiant et sur ce que les salariés ont réellement absorbé par les voies respiratoire, digestive et/ ou cutanée. Le résultat des différents dosages est comparé aux valeurs limites disponibles, sur le plan règlementaire et/ou au niveau des publications scientifiques.

La participation volontaire de 6 entreprises et de 137 soudeurs

Une telle démarche demande une déontologie partagée entre les entreprises, leurs salariés et les intervenants extérieurs. Respect du secret professionnel et de fabrication, volontariat des entreprises et de leurs salariés, respect de la confidentialité des données médicales sont les principes directeurs de cette déontologie. Les restitutions individuelles se font au sein du colloque singulier « salarié-médecin du travail ». Les restitutions collectives se font dans le respect de l’anonymat.

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

Le groupe de travail ASTAV/CARSAT S. Crucq, médecin du travail, ASTAV A. Delagrange, médecin du travail, ASTAV C. Dollé, ingénieur de prévention, CARSAT Nord-Picardie M. Gillet, contrôleur de sécurité, CARSAT Nord Picardie S. Klonaris, médecin du travail, ASTAV D. Leroy, médecin du travail, ASTAV M.B. Leleu, assistante en santé au travail, ASTAV S. Pecqueur, médecin du travail, ASTAV L. Pereira, toxicologue industriel, ASTAV P. Pusch, contrôleur de sécurité, CARSAT Nord-Picardie A. Soyez, ingénieur de prévention, responsable du Laboratoire Interrégional de Chimie Toxicologique, CARSAT Nord-Picardie


ZOOM SUR

Les rés

s t n i o p 5 ultats en

travail, de l’air au té li a u q la r assement, pou t d es d ép • Globale présenten 3 e g a s d és ge. té u ét ré d so u de s de so a t interp 13 postes des fumée iques son P ér E h L V sp n o o la m ti rés de t un dépas’Exposi osages at ments avé Limites d nt égalemen te rs n 1 • Les d se eu al ré p V es d s postes rt aux manganèse. ant compte Deux de ce par rappo r le fer et le P), en ten u E o L é, p is (V P E an L le lv V el n r ga ésement des Profession r/inox, acie s taux sup (acier, acie mme naires, de ri co és u d s u IG e so g (M x sa e é o métau es ont té e soudag u des d s Français procédés d • Au nivea e Gas), es id d iv 4 u ), ct G A m rs iu al Met Valeu alumin nickel. G comme rieurs aux t Gas, MA x. : espace minium, le (e lu l a ai l’ av r u tr o Metal Iner e p e itions d retrouvés pas de paraît un ns et cond présents ou tude, il ap é fs des positio e ti si tt o ce p e is e re d tilagrand s non), des d ans le cad PE et les le et/ou ven D T ca • s lo le confiné ou n 5 e io tr at n ir ites ce rence e fumées (asp Valeurs Lim ues (présen nette diffé captage des ement des ns climatiq ss io a it lus d ép p n d e t e d co L s. e), des ettemen ir, tests entreprise nelle est n vitesse d’a tion général n t, io en ss v efe e tr d ro 4 en on P tal, 5 ndes d’air ou d’Expositi dans les gra nte). Au to e ia de courants u b q E am P T re d s u gique es ans le e 500 , températ fréquent d nt près d ation biolo ta n g n fumigènes ré se p ré p im re que l’ e pour nts d’air, t plus bass rises. Alors n p e m prélèveme le a b s. ctué Cette paraît glo nt été effe treprises. salariés ap dosages, o randes en ar le médeg p s s le té du r ré u o rp ep nt inte était atten les TPE qu rence logiques so se à ce qui fé io er ré b v s e d in ge rs ri sa o o io eu d a pri es val condit ns 2 • Les conclusion rapport à d ce avec les mme ar an co p d l n F ai o G p av V es tr : fet, dans cin du es (ex. e en corr pe dage. En ef est à mettr u u ternational ro so in G e u d o le és ar es de ises p national et d’activit s moyens ises ou ém de travail bien que le ides França sphères de s, u o se G s ri tm lu rs A p ep eu es tr t d al n en V le soie eillance les grandes ravail) individuel our la Surv T p u e et d u q e re u v fi ti tè ti so is ec Scien coll rise, le du Min protection divietite entrep patronage in p le e es s n u al u ic s e so u l éd an uten Travai que d données m dage plus so r: importants compte des vité de sou rmation su ti fo ac in e e ermet n n p u en tenant u a t e r à l’arc d’étud s s donnen eu e an d p ge d ty s sa o ci e d ré C p es ent cis duelles. C quotidien). nseils pré és à un mom (soudage n des salari rises des co Au total, io p e s. at ie tr n gn n n ré e ti éfi p x n d l’im r au préve o n bien d’apporte d’expositio t plus relatifs à la s n ts n ta n io n e it se d m n ré se des co vestis naires, rep pour les in nels. ements uri s. é u profession 134 prélèv ct s e e ff u e sq té ri é s t e n d ges, o de 500 dosa

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

27


ENVIRONNEMENT & TECHNIQUE

> FOURS À CHAUX, BROYAGE, ENSACHAGE…

Une volonté d’entreprise, une évaluation suivie des risques : des résultats !

« Nous sommes dans l’industrie lourde et la chimie », nous dit d’entrée de jeu, M. Louis-Florent Sion, directeur. « Un peu de chaux dans les yeux… et il faut s’arrêter obligatoirement quelques jours pour les soins. En 2012, nous n’avons eu aucun accident du travail et nous sommes parvenus aujourd’hui à 533 jours sans accident, alors que le précédent record (de 2004) était de 242 jours. Ceci s’obtient grâce à une démarche continue et un engagement très fort de chacun dans l’entreprise : de la direction à l’ouvrier ». Le management intégré de la prévention / sécurité Serge Varenne est animateur en prévention. Ancien contremaître de production, il connaît l’usine et ses procédés. Il dépend directement du directeur. « Nous assurons avec notre Service de Santé au Travail, l’ASTIL62, un suivi de mesures. En 2003, nous avons réalisé une cartographie de l’exposition au bruit. Nous l’avons refaite en 2011, aux mêmes endroits. Nous avons ainsi un historique

25 % de la production française de chaux est réalisée par les 78 salariés de l’usine « Chaux et Dolomies du Boulonnais », implantée à Réty. Chaque année, 1 100 000 tonnes de calcaire sont transformées en 630 000 tonnes de chaux. Une chaux de haute qualité, dont environ 40 % est exportée en Scandinavie pour l’industrie papetière et environ 40 % est utilisée par la sidérurgie. L’utilisation de la chaux pour le traitement des sols, la dépollution des eaux usées et des effluents gazeux sont des marchés en développement. Certifiée ISO 9001 depuis 1996, l’usine de Réty comporte neuf fours qui tournent en continu, sept jours sur sept, 365 jours par an… et une mise à jour. En 2012, nous avons réalisé des mesures de vibrations sur tous les véhicules : chariots élévateurs, télescopique, chargeuse, camion... Nous avons remplacé plusieurs sièges par des modèles haut de gamme, afin de réduire significativement les vibrations et améliorer les conditions de travail. Nous vérifions ensuite les résultats obtenus ». Un accompagnement « sur mesure » Le docteur Françoise Evrard, médecin du travail à l’ASTIL 62, suit l’entreprise depuis 2006 : « Les risques sont conséquents : fours de calcination, broyage, ensachage… IL y a une volonté de sécurité dans l’entreprise. Chaque mois, je réalise une visite de secteur avec le CHSCT.1 Et je travaille avec les assistantes en santé au travail de mon service ». Assistante en santé au travail à l’ASTIL 62, Nathalie Defachelles témoigne : « J’ai réalisé les mesures de vibrations sur les engins de chantier et la salle de contrôle. Pour le bruit, j’ai réalisé des mesures dans l’ensemble des locaux et j’en ai fait un diaporama. Nous recevons tous les salariés de

1 Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail.

28

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

l’entreprise par groupe de 10, afin de sensibiliser l’ensemble du personnel à l’importance de la prévention sur leurs différents lieux de travail ». Louis-Florent Sion conclut : « En évaluant les risques, on peut prévenir l’apparition de maladies professionnelles et préserver ainsi la santé de nos collaborateurs ; car cette évaluation, faite avec notre service de santé au travail, permet d’orienter à bon escient les investissements de prévention. Et notre service de santé est toujours à nos côtés pour nous aider dans cette démarche.»

CHAUX et DOLOMIES du BOULONNAIS 78 salariés Louis-Florent Sion, directeur, Serge Varenne, animateur en prévention RÉTY SANTÉ AU TRAVAIL DE CALAISBOULOGNE-LE TOUQUET (ASTIL 62)


ERGONOMIE & ORGANISATION

> De la réception à l’expédition

L’ergonomie au service de la préparation de commande Fondée en 1962, Nord Sécurité a une position de leader pour la vente d’équipement de sécurité, de vêtements de travail, d’équipements de protection individuelle… Son rayonnement est national. Le site d’Hem, près de Lille, est un entrepôt logistique qui gère la réception, la préparation de commande et l’expédition de plusieurs milliers de références d’articles différents.

NORD SECURITE 40 salariés HEM PÔLE SANTÉ TRAVAIL MÉTROPOLE NORD

En 2010, avec l’appui de PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord, une étude sur l’ergonomie est lancée. Deux ans après, retour sur une intervention à caractère exemplaire… Le docteur Marie-Thérèse Roussel, médecin du travail à PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord, suit Nord Sécurité. « Je constate, lors des visites médicales systématiques en 2008 et 2009, que les manifestations articulaires et/ou tendineuses ont tendance à croître; ceci démontre l’importance du suivi médical régulier. Il y a un eu cas de déclaration de maladie professionnelle de type TMS. J’en ai parlé au directeur de site, qui a pris en compte mes observations. J’ai proposé l’intervention de Christophe Leviel, ergonome pour PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord. » Après un temps de rencontre avec la direction et les représentants du personnel, puis de mise en place de l’étude, l’ergonomie a fait son entrée sur le site… L’importance de l’accueil « Réaliser une étude ergonomique présuppose que l’entreprise souhaite agir, que les représentations sur le travail soient partagées. Ce fut le cas à Nord Sécurité, grâce notamment au travail sur le terrain de Monsieur Franck Moity, responsable de l’approvisionnement et de la logistique. Il a pu expliquer à chaque salarié l’intérêt de la démarche » nous dit Christophe Leviel. La démarche demande la participation et la confiance des salariés. « J’ai passé trois jours en immersion dans l’entreprise »

précise Christophe Leviel, « car il faut prendre le temps d’observer le travail réellement effectué aux différents postes (réception, stockage, préparation de commande et d’expédition), comprendre les logiques des opérateurs mais aussi les contraintes auxquelles ils font face, comment ils régulent. Puis, il y a un temps de réflexion et d’analyse, avec une restitution à l’équipe de direction et aux délégués du personnel ». L’étude a abouti à un rapport écrit visant à un échange constructif pour valider les problématiques « expliquées », travailler ensemble sur les axes de prévention proposés. « C’est possible dans une PME » « Six mois après, je suis revenu pour un bilan » poursuit Christophe Leviel. « L’entreprise s’était engagée dans des améliorations notables : aménagement des postes de réception et d’expédition avec révision des hauteurs de pose et dépose, création d’un espace tampon pour libérer la préparation de commande sans engorger l’expédition, révision à la baisse du nombre de références, dissociation des circuits pour les gerbeurs électriques et les piétons, aménagement des horaires de réception et d’expédition… Autant de pistes concrètes qui montrent que l’ergonomie est adaptée à tous types d’entreprise, les PME sans exception ». Depuis, Nord Sécurité a intégré la Société NOYER SAFIA dont le siège se trouve à ZA du bois Rigault Nord à Vendin Le Veil. Nord Sécurité est dorénavant le département EPI de NOYER SAFIA.

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr

29


Dunkerque LNG- Happy Day

AUX ALENTOURS

> Port Ouest de Dunkerque

La prévention précède et accompagne le chantier ! Le site du Clipon, à LoonPlage accueille le deuxième plus gros chantier industriel de France : le terminal méthanier de Dunkerque. Dès 2016, 13 milliards de mètres cube de gaz naturel y arriveront, chaque année, par la mer à bord de méthaniers géants et en repartiront sous terre par gazoduc vers la France et la Belgique. Le 11 octobre 2012 a eu lieu une réunion plénière, à la Chambre de Commerce et d’Industrie Côte d’Opale, sur la sécurité et la santé des personnels du chantier. Une centaine d’entreprises était représentée. 1200 salariés vont à présent travailler sur le chantier en période de pointe…

Sur un tel chantier, la prévention se prépare et se réfléchit longtemps à l’avance. De multiples corps de métiers co-interviennent. Trois maîtres d’ouvrage sont concernés : Dunkerque Port (Grand port maritime de Dunkerque) pour les ouvrages maritimes et la plate-forme, Dunkerque LNG (Groupe EDF) pour le terminal méthanier, GRT Gaz pour les ouvrages de raccordement au réseau de transport de gaz naturel. L’investissement s’élève à 1 milliard d’euros pour le seul terminal méthanier, 150 millions d’euros pour le chantier portuaire et 80 millions d’euros pour le raccordement du terminal à la station de compression de Pitgam. Dialogue et coordination entre les entreprises Placée sous la présidence de M. Patrick Markey, directeur de l’unité territoriale NordLille de la DIRECCTE1 Nord-Pas-de-Calais, la journée a permis d’ouvrir un dialogue et des échanges sur les bonnes pratiques de santé et de sécurité entre les entreprises et les trois maîtres d’ouvrage. La coordination et le dialogue vont jouer des rôles essentiels. Dialogue avec les professionnels de prévention Trois thèmes ont été abordés lors de la journée du 11 octobre 2012 : • prévenir les risques liés aux travaux en hauteur, avec Philippe Régnier pour le compte de Dunkerque LNG, Frédéric Delaplace et Bérangère Witdouck de l’OPPBTP2 ; • prévenir les risques liés à la circulation et au trafic pour ce type de chantier, avec Fréderic Caron de Dunkerque Port (Grand Port Maritime de Dunkerque), Loïc Le-Guennan de la CARSAT3 Nord Picardie;

• rappeler les obligations des employeurs en matière d’emploi des intérimaires (agences de travail temporaire, entreprises utilisatrices) avec Serge Cazanave représentant GRT Gaz, Florent Framery pour le compte de la DIRECCTE et Véronique Alexandre du CEDEST4. Chaque exposé était très concret : statistiques, illustrations de situations spécifiques au chantier du terminal méthanier, rappel des responsabilités réciproques. Au niveau de la santé au travail, Véronique Alexandre, directrice du CEDEST, précise : « Le chantier n’est pas classé « Grand Chantier ». Il n’y a pas de médecin du travail sur place en permanence. Au niveau du CEDEST, nous avons donc désigné un médecin référent. C’est le travail en réseau qui peut permettre d’atteindre un objectif ambitieux : zéro accident ».

GRT Gaz

1 - DIrection Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi 2 - Office Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics 3 - Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail 4 -CEntre pour le DÉveloppement de la Santé au Travail (Santé au travail de Dunkerque).

30

Entreprise & Santé • 1er Trimestre 2013 • N°21 • www.entrepriseetsante.fr


ACTU Santé au Travail de Dunkerque Sant

Cr Création du site internet : le CEDEST poursuit sa mue… Asso Association présidée par Daniel Garreau, le CEDEST (CEntre pour le DEveloppement de la Santé au Travail) réunit 4500 entreprises du littoral. Son DEv conseil d’administration paritaire s’est engagé dans une évolution en profondeur cons du CEDEST, C afin d’assurer un meilleur service pour les 60 000 salariés des entreprises adhérentes. Placé sous la direction de Véronique Alexandre depuis 2010, pris vient de mettre en ligne son nouveau site internet www.cedest.net. le CEDEST C Les adhérents ont désormais la possibilité de s’inscrire aux petits déjeuners, aux journées de formations ou aux évènements de sensibilisations en format interjour entreprises, ou encore à la journée « porte ouverte » programmée le vendredi entr 21 jjuin… Ils ont à leur disposition un formulaire de contact leur permettant de joindre tout de suite les bons interlocuteurs concernant leur problématique. Ils join disposent d’informations générales ou spécifiques. Par exemple, le développedisp ment d’actions pluridisciplinaires qui étaient peu visibles jusqu’à maintenant. men Devise du CEDEST : « Conseiller l’humain, prévenir pour demain ». Dev

Santé au Travail de Valenciennes

Mars 2013 : l’ASTAV emménage dans de nouveaux locaux ! Après une longue gestation, le conseil d’administration de l’ASTAV, (Association de Santé au Travail de l’Arrondissement de Valenciennes), présidé par le Docteur Philippe Mine a donné son feu vert pour une restructuration de son immobilier. En effet, les anciens locaux de l’ASTAV ne permettaient plus à l’association de servir les prestations de qualité qu’elle se doit de fournir aux 5500 entreprises adhérentes et à leurs 72 000 salariés. Par ailleurs, des nouveaux locaux permettraient, comme le Président le souhaitait la revalorisation de l’image de marque de la médecine du Travail. De plus les conditions de travail étaient difficiles pour les salariés de l’ASTAV… Un comble pour un service de santé au travail ! Luminosité, fonctionnalité, qualité des espaces d’accueil et de travail caractérisent le nouveau bâtiment de 2500 m². Implanté sur deux niveaux à Saint-Saulve, à 5 minutes du Centre Ville de Valenciennes, le site est desservi par deux arrêts de bus et comporte 65 places de

parking. Au rez-de-chaussée : 13 cabinets médicaux avec secrétariat, salle de formation, bureau d’accueil pour le maintien dans l’emploi des personnes handicapés… A l’étage : le « plateau technique » avec ergonome, toxicologue, assistante sociale, psychologue, AST (Assistante Santé Travail), QHSE (Qualité Hygiène Sécurité Environnement), personnel du SAMETH (Service d’Aide au Maintien dans l’Emploi de Travailleurs Handicapés) et l’administration. Pour Paule Lebecq, directrice de l’ASTAV depuis 2010 : « Ces nouveaux locaux signifient une nouvelle organisation et un renouveau des services apportés aux entreprises adhérentes ».

31



Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.