Cession Dailly - conflits entre créanciers

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Fiche à jour au 16 octobre 2006

FIICCHHEE PEEDDAAG GO OG GIIQ QU UE E VIIR RTTU UE ELLLLE E Diplôme : Master 1 Matière : Droit du crédit Web-tuteur : Gérald DELABRE

SEEAANNCCEE NN°9 – CEESSSSIIO ON N DA AIILLLLY Y:C CO ON NFFLLIITTS S E EN NTTR RE EC CR RE EA AN NC CIIE ER RS S

SO OM MM MA AIIR RE E AVANT-PROPOS : OPPOSABILITE ET NOTIFICATION....................3 Article L313-27 du Code monétaire et financier .......................................................... 3 Article L313-28 du Code monétaire et financier .......................................................... 3

I.

PRIVILEGE GARANTI PAR L’ANTERIORITE...............................4 A.

CHAMP D'APPLICATION______________________________________________ 4 a) Cessions Dailly successives.................................................................................. 4 Com., 12 janvier 1999................................................................................................... 4 b) Cession Dailly et affacturage................................................................................ 5 Com., 3 janvier 1996..................................................................................................... 5 c) Cession Dailly et effets de commerce .................................................................. 6 Com., 19 décembre 2000 .............................................................................................. 7

Date de création : année universitaire 2004/05


2 Com., 10 mars 1998...................................................................................................... 7 B.

CARACTERE FRAUDULEUX DE LA CESSION _______________________________ 8 Com., 3 janvier 1996 (préc.)......................................................................................... 9

II. A.

PRIVILEGE GARANTI PAR UN DROIT EXCLUSIF ..................9 CESSION DAILLY ET SOUS-TRAITANCE _________________________________ 10

Com., 20 juin 1989...................................................................................................... 10 B.

CESSION DAILLY ET RESERVE DE PROPRIETE ___________________________ 11

Com., 20 juin 1989...................................................................................................... 11


3 Le bénéficiaire d'une cession de créance professionnelle se trouve parfois en conflit avec d'autres titulaires de la même créance. Cette anomalie est en principe résolue par le privilège d'antériorité, sauf dans les cas de concours avec des droits exclusifs. Les textes de référence en la matière sont les articles L. 313-27 et L. 313-28 du Code monétaire et financier.

Avant-propos : opposabilité et notification La date apposée par le cessionnaire sur le bordereau rend la cession opposable à tous, empêchant alors le cédant de disposer à nouveau de la créance.

Article L313-27 du Code monétaire et financier La cession ou le nantissement prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances, sans qu'il soit besoin d'autre formalité, et ce quelle que soit la loi applicable aux créances et la loi du pays de résidence des débiteurs. A compter de cette date, le client de l'établissement de crédit bénéficiaire du bordereau ne peut, sans l'accord de cet établissement, modifier l'étendue des droits attachés aux créances représentées par ce bordereau. La remise du bordereau entraîne de plein droit le transfert des sûretés, des garanties et des accessoires attachés à chaque créance, y compris les sûretés hypothécaires, et son opposabilité aux tiers sans qu'il soit besoin d'autre formalité. En cas de contestation de la date portée sur le bordereau, l'établissement de crédit rapporte, par tous moyens, l'exactitude de celle-ci. Afin de garantir le paiement de sa créance, le cessionnaire peut procéder à la notification de la cession au débiteur cédé. Ce dernier, alors informé, doit respecter les privilèges entre créanciers concurrents.

Article L313-28 du Code monétaire et financier L'établissement de crédit peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée ou nantie de payer entre les mains du signataire du bordereau. A compter de cette notification, dont les formes sont fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 313-35, le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit.


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I.

Privilège garanti par l’antériorité En application du principe « Prior tempore, potior jure », la priorité doit être donnée aux créanciers dont le titre a été obtenu antérieurement à celui de ses concurrents.

A. Champ d'application a) Cessions Dailly successives Le principe d’antériorité s'applique ici dans deux hypothèses. Le débiteur paye valablement, la créance étant parvenue à terme, le créancier qui lui notifie la cession, quand bien même ce dernier serait second cessionnaire. En revanche, en cas de pluralité de notifications, le débiteur doit donner la priorité au premier cessionnaire.

Com., 12 janvier 1999 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Merlin Gerin, aux droits de laquelle se trouve la société Schneider electric, a conclu avec la société Asal un marché de travaux immobiliers, au terme duquel le règlement des factures était subordonné à un contrôle de réalisations par la société Baudouin engineering ; qu'en cours d'exécution, la société Asal a cédé, en la forme prévue par la loi du 2 janvier 1981, plusieurs des créances futures se rapportant à ce marché à la fois à la société Lyonnaise de banque et à la Banque populaire provençale et corse, lesquelles ont notifié les cessions à la société Merlin Gerin ; que l'exécution du marché a été interrompue avant la réalisation de l'ensemble des travaux prévus et la société Asal mise en liquidation judiciaire ; que les banques cessionnaires ont réclamé paiement de leurs créances à la société Schneider, qui ne s'est reconnue débitrice que d'une somme très inférieure à leurs réclamations ; que l'arrêt a rejeté l'ensemble des prétentions des banques ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ; Attendu que pour rejeter les demandes en paiement de la société Lyonnaise de banque, l'arrêt relève qu'aucune des 4 factures cédées ne comporte le visa du cabinet Baudouin et retient que la société Schneider pouvait donc en refuser le paiement à la banque comme elle pouvait le faire à l'encontre de la société Asal ; Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, tout en relevant que la société Schneider se reconnaissait, dans ses écritures judiciaires, encore débitrice du prix de travaux exécutés par la société Asal, et compris dans l'ensemble des créances cédées aux banques par cette dernière, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 ; Attendu que pour rejeter la prétention de la société Lyonnaise de banque, selon laquelle la société Schneider l'avait indûment défavorisée dans ses paiements au profit de la Banque populaire provençale et corse, en versant à celle-ci le montant de créances cédées frauduleusement aux deux banques, sans respecter la priorité de la banque lyonnaise, l'arrêt retient que le conflit


5 entre les cessionnaires ne peut être réglé par le débiteur cédé et que l'action en répétition doit être exercée non contre lui mais contre le cessionnaire qui a reçu un paiement indu ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le débiteur, ayant reçu notification d'une cession de créance de la part d'une banque doit lui en payer le montant, sans avoir à rechercher si un autre établissement n'a pas bénéficié d'une cession de créance antérieure, mais que si avant d'exécuter le paiement, il a reçu, pour une même dette notifications de deux cessions de créances concurrentes de la part de deux banques, il ne peut, ensuite, en payer le montant qu'à l'établissement dont le titre est le plus ancien, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE,

b) Cession Dailly et affacturage

En cas de conflit entre un factor et un cessionnaire Dailly, la priorité doit être donnée à la créance ayant pris naissance la première. Rappelons que la créance nouvelle apparaît, pour la cession Dailly, à la date du bordereau, et pour l'affacturage, à la date d'exécution de la prestation.

Com., 3 janvier 1996 Joints les pourvois n°s 93-21.675 et 94-10.513, qui sont connexes en ce qu'ils attaquent le même arrêt ; Attendu, selon l'arrêt critiqué, qu'avant d'être mise en redressement judiciaire, le 1er août 1989, la société TRAM a cédé, à deux reprises, trois créances qu'elle avait sur la société Sotra, d'une part, à la Banque de l'Aquitaine, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981 et, d'autre part, à la Société française de factoring (SFF), en application d'une convention d'affacturage ; que les deux cessionnaires ont réclamé le paiement des créances à la société Sotra ; que celle-ci a opposé, pour un certain montant,


6 une exception de compensation avec des créances qu'elle prétendait détenir sur la société TRAM, en raison de livraisons incomplètes ou défectueuses ; Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches, du pourvoi n° 94-10.513 : (sans intérêt) ; […] Et sur la première branche du moyen du pourvoi n° 93-21.675 : Vu l'article 4, alinéa 1er, de la loi du 2 janvier 1981 ; Attendu qu'aux termes de ce texte la cession de créance prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date portée sur le bordereau ; Attendu qu'en statuant comme elle a fait, pour rejeter la demande de la Banque de l'Aquitaine, sans rechercher si, pour chacune des trois créances litigieuses, la date du bordereau de cession à la Banque de l'Aquitaine était antérieure à la date de la cession à la SFF, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE

c) Cession Dailly et effets de commerce

Le débiteur ayant accepté un effet de commerce peut valablement payer le porteur de celui-ci, même en cas de cession antérieure de la même créance. En revanche, la notification de la cession empêche toute acceptation de l'effet de commerce et permet au cessionnaire de conserver son privilège.


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Com., 19 décembre 2000 Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article 128 devenu l'article L. 511-19 du Code de commerce ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société A Plus M a émis, le 29 janvier 1993, une lettre de change à échéance du 10 mars 1993 acceptée par le tiré, la société Relais SA (Fnac), et l'a présentée à l'escompte à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Yonne (CRCAM) le 1er février suivant ; que, préalablement, le 26 janvier 1993, la société A Plus M avait cédé au Crédit lyonnais, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, la même créance qu'elle détenait sur la Fnac ; que cette cession a été notifiée le 16 mars 1993 à la Fnac, qui avait versé le montant de sa dette à la CRCAM le 10 mars 1993, jour de l'échéance ; que la société A Plus M ayant été mise en redressement judiciaire le 11 mars 1993, le Crédit lyonnais a déclaré sa créance entre les mains du représentant des créanciers du redressement judiciaire de la société A Plus M ; Attendu que, pour condamner la CRCAM à payer au Crédit lyonnais le montant de la créance, l'arrêt retient que la CRCAM est un banquier escompteur et non un banquier réceptionnaire au nom de son client, cédant, des fonds versés par le débiteur cédé, que l'acceptation de la lettre de change par le tiré ne modifie pas cette situation et qu'il s'ensuit que le conflit qui oppose un banquier escompteur et un banquier cessionnaire a été justement tranché, en tenant compte de l'antériorité de l'acquisition de la créance et de son opposabilité aux tiers ; Mais attendu qu'en sa qualité de tiers porteur de bonne foi d'une lettre de change acceptée, la CRCAM était en droit d'en percevoir le montant ; que c'est donc à tort que la cour d'appel l'a condamnée envers le Crédit lyonnais ; Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief : CASSE ET ANNULE

Com., 10 mars 1998 Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier 30 novembre 1993), que le Crédit lyonnais (la banque) a poursuivi la société France construction Méditerranée construction (société France construction) en paiement de trois créances dont elle lui avait notifié la cession à son profit; que la société France construction lui a opposé qu'elle avait, antérieurement aux notifications, souscrit des billets à ordre pour le règlement de ses dettes ; Attendu que la société France construction fait grief à l'arrêt de sa condamnation, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le souscripteur d'un billet à ordre est obligé de la même manière que l'accepteur d'une lettre de change que dès lors, après avoir constaté que des mêmes créances avaient donné lieu à la souscription de billets à ordre avant la notification de créances professionnelles cédées en application de la loi du 2 janvier 1981, la cour d'appel devait en déduire que la souscription de ces billets à ordre était libératoire vis-à-vis de la banque;


8 qu'en condamnant la société France construction à payer au Crédit lyonnais la somme de 365 691 francs, la cour d'appel a violé l'article 188 du Code du commerce; alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en déclarant tout à la fois que la somme de 159 181 francs correspondait à une "facture" et à une "situation", la cour d'appel s'est contredite, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; alors, en outre, que l'établissement de crédit peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée de payer entre les mains du signataire du bordereau; qu'à compter de cette notification, le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit; qu'en condamnant la société France construction, après s'être bornée à relever que le bordereau avait fait l'objet d'une lettre du 18 mai 1990, sans constater la date de la notification prévue par la loi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981, et alors, enfin, que le billet à ordre énonce aussi bien l'indication de l'échéance que l'indication de la date où le billet est souscrit; que, par ailleurs, le souscripteur d'un billet à ordre est obligé dès sa signature, de la même manière que l'accepteur d'une lettre de change; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le billet à ordre émis le "30 mars 1990" à échéance du 10 août 1990, était postérieur à la notification du bordereau; qu'en fondant ainsi sa condamnation sur la date de l'échéance du billet à ordre et non sur la date de sa souscription, laquelle était antérieure à la notification du bordereau, la cour d'appel a violé les articles 183 et 188 du Code du commerce ; Mais attendu que dès lors qu'il n'avait pas encore payé les montants des billets à ordre, avant d'avoir reçu notification de cessions de créances pour les mêmes contreparties, leur souscripteur doit opposer au bénéficiaire des billets, qui en est resté porteur, l'exception tenant à cette notification et l'obligeant à payer le cessionnaire; que, dès lors, la cour d'appel n'avait pas à tenir pour libératoire vis-à-vis de la banque, qu'elle a, par motifs propres et adoptés, reconnu être l'auteur de notifications datées, la souscription antérieure des billets à ordre; que, se prononçant sans contradiction, elle a légalement justifié sa décision; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

B. Caractère frauduleux de la cession La cession d'une même créance à plusieurs créanciers ou selon des modalités différentes, peut être considérée, en cas d’intention frauduleuse, comme une escroquerie.


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Com., 3 janvier 1996 (préc.) Le cessionnaire, informé de l’existence d’autres créanciers titulaires de la même créance, n'est pas tenu de refuser la cession dont il bénéficie. […] Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° 9321.675 : Vu l'article 1382 du Code civil ; Attendu que, pour rejeter la demande de la Banque de l'Aquitaine tendant au paiement, par la société Sotra, des créances qui lui avaient été cédées par la société TRAM, l'arrêt retient que " la Banque de l'Aquitaine invoque la priorité des bordereaux de cession de créance loi Dailly par rapport aux quittances subrogatoires d'affacturage, en vertu des dispositions des articles 4 et 5 de la loi du 2 janvier 1981, mais que la SFF fait, en réplique, valoir que la Banque de l'Aquitaine a commis, à son égard, une faute engageant sa responsabilité civile en vertu des dispositions de l'article 1382 du Code civil ; qu'en effet la société TRAM avait conclu le 16 septembre 1988 avec la SFF une convention d'affacturage ; que la Banque de l'Aquitaine ne pouvait ignorer cette convention, dont l'existence se manifestait, pour un professionnel, à la simple lecture des mouvements de fonds du compte courant de la société TRAM ouvert dans les livres de la banque ; qu'au surplus cette connaissance résulte d'échanges de télex entre les deux organismes de crédit ; qu'en acceptant ponctuellement une cession de créance pour trois factures de sa cliente, alors qu'elle n'ignorait pas que celle-ci était liée à la SFF par une convention générale d'affacturage comportant une clause d'exclusivité, la Banque de l'Aquitaine a pris sciemment le risque de causer un préjudice financier au factor ; qu'elle a donc commis une faute engageant sa responsabilité civile ; qu'elle en doit réparation à la SFF car elle n'a pas agi de bonne foi ; que la cour d'appel trouve ainsi en la cause les éléments d'appréciation suffisants pour dire que c'est à la SFF et non à la Banque de l'Aquitaine que la société Sotra devra payer l'intégralité des créances affacturées " ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de fraude, non constatée en l'espèce, il ne pouvait être reproché à la Banque de l'Aquitaine de ne pas avoir refusé d'acquérir les créances litigieuses au motif qu'elle connaissait l'existence d'une convention générale d'affacturage, comportant une clause d'exclusivité, conclue entre le cédant et un tiers, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; […]

II. Privilège garanti par un droit exclusif Le principe d'antériorité est parfois dépassé par les droits réservés à certains créanciers.


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A. Cession Dailly et sous-traitance

Com., 20 juin 1989 Joints les pourvois n°s 87-15.679, 87-15.057, 87-16.409 et 87-14.974 formés respectivement par la Banque nationale de Paris, la Banque Scalbert Dupont, la Société générale, le Crédit commercial de France et le pourvoi provoqué formé par le Crédit du Nord, qui attaquent le même arrêt ; Attendu qu'il résulte des énonciations de cet arrêt (Versailles, 29 avril 1987) que la société Usinor, entreprise publique, a, pour la réalisation d'un réseau de transport de gaz, conclu un marché avec les sociétés Belliard Crighton et Flandres industries (les entrepreneurs principaux) qui, à leur tour, ont contracté avec plusieurs entreprises, dont la société Profilés et tubes de l'Est (société PTE) ; que les entrepreneurs principaux ont cédé leurs créances sur le maître de l'ouvrage à la Banque nationale de Paris, au Crédit du Nord, à la Société générale, au Crédit commercial de France et à la Banque Scalbert Dupont ; qu'ils ont été mis en règlement judiciaire puis en liquidation des biens ; que le maître de l'ouvrage, confronté aux demandes concurrentes des banques, cessionnaires de créances, et des entreprises se prétendant soustraitantes et lui réclamant le paiement de leurs créances, a été autorisé à consigner entre les mains d'un séquestre les sommes qu'il reconnaissait devoir aux entrepreneurs principaux ; que la société PTE a assigné en paiement la société Usinor ; que celle-ci a appelé en cause les banques intéressées qui ont présenté des demandes reconventionnelles ; Sur les moyens des pourvois, pris en leurs diverses branches, et réunis : Attendu qu'en articulant les différents moyens reproduits en annexe, la Banque nationale de Paris, la Société générale et le Crédit du Nord font grief à l'arrêt d'avoir retenu que le contrat liant la société PTE aux entrepreneurs principaux était un contrat de sous-traitance et que ces mêmes banques, le Crédit commercial de France et la Banque Scalbert Dupont lui reprochent d'avoir, en admettant la recevabilité de l'action en paiement direct formée par la société PTE, condamné la société Usinor à payer à celle-ci diverses sommes et débouté les banques de leurs demandes ;


11 Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a relevé que la société PTE avait été chargée de fabriquer les tubes nécessaires mais aussi de les transformer afin de les adapter à la nature particulière du gaz transporté ainsi qu'à la configuration et au relief du site sur lequel ils devaient être mis en place, ce qui impliquait non pas une production standardisée mais, à côté d'éléments classiques, des accessoires obéissant à des spécifications et à des normes précises, les études d'exécution étant faites par le fournisseur qui devait le parachèvement sur le site, et que les éléments ainsi commandés, destinés à un ouvrage " sophistiqué " n'étaient pas compatibles avec une production de série ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a pu retenir la qualité de sous-traitant de la société PTE ; Attendu, en second lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles 3, 5, 6, 9 et 13-1 de la loi du 31 décembre 1975, que le maître de l'ouvrage soit ou non une entreprise publique, que les établissements de crédit, porteurs des créances cédées par les entreprises principales, que leur antériorité ait été établie ou non, ne disposent pas du fait de cette subrogation de plus de droits que leurs cédants et ne peuvent donc pas s'opposer au paiement du soustraitant agissant pour obtenir le paiement direct du maître de l'ouvrage qui ne s'y oppose pas ; que, par ces seuls motifs, la décision se trouve légalement justifiée ; D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis en aucune de leurs branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

B. Cession Dailly et réserve de propriété

Com., 20 juin 1989 Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : Vu l'article 544 du Code civil, ensemble les articles 65 et 66 de la loi du 13 juillet 1967 ;


12 Attendu que, les marchandises vendues sous réserve de propriété étant affectées à la garantie de la créance du vendeur, celui-ci exerce sa revendication sur les marchandises elles-mêmes aussi longtemps qu'elles existent en nature entre les mains du débiteur, et, qu'après leur revente en l'état initial par ce dernier, le prix se trouvant par là-même subrogé aux marchandises, le vendeur exerce sa revendication sur le prix ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 février 1988), que la société Microfrance a été mise en règlement judiciaire converti en liquidation des biens sans avoir payé différents matériels livrés par la Société microinformatique et de télécommunications (la SMT) ; qu'avant l'ouverture de la procédure collective, la société Microfrance avait revendu une partie de ces matériels et cédé sa créance à la Banque nationale de Paris (la BNP), selon bordereau établi conformément aux dispositions de la loi du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises ; que, se prévalant d'une clause de réserve de propriété, la SMT a revendiqué le prix encore dû à la société Microfrance par le sous-acquéreur tandis que, de son côté, la BNP en a réclamé le paiement en sa qualité de cessionnaire de la créance de la société Microfrance ; Attendu que la BNP reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la revendication de la SMT alors, selon le pourvoi, d'une part, que peut être revendiqué par le vendeur, à l'ouverture de la procédure collective, le prix ou la partie du prix des marchandises vendues avec une clause suspendant le transfert de propriété au paiement intégral du prix qui n'a pas été payé ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant entre le débiteur et l'acheteur ; qu'il s'ensuit que l'action en revendication sur le prix ne peut s'exercer que si la créance du prix de revente se trouve encore dans le patrimoine du revendeur à l'ouverture de la procédure collective ; que ladite action ne peut dès lors trouver à s'exercer lorsque l'acquéreur-revendeur a cédé antérieurement sa créance par voie de bordereau conforme à la loi, à un établissement de crédit, une telle cession constituant un mode normal de paiement ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 65 et 66 de la loi du 13 juillet 1967 et l'article 294° de la même loi modifié par l'article 64 de la loi du 24 janvier 1984, ensemble l'article 4 de la loi du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises ; alors, d'autre part, que l'arrêt attaqué énonce lui-même que la société revenderesse, antérieurement à sa mise en règlement judiciaire, a cédé à ses banques " les créances dont elle était titulaire sur ses sousacquéreurs et dont " l'existence même était menacée par la revendication " du vendeur initial liée à l'éventualité de l'ouverture d'une procédure collective " contre ladite société ; qu'il résulte de ces constatations qu'à la date où elle les a cédées aux banques, la société revenderesse était bien " titulaire " des créances litigieuses et que si leur " existence " était " menacée " par une revendication " potentielle ", lesdites créances n'en " existaient " pas moins dans son patrimoine à la date de la cession ; qu'ainsi, lorsqu'à l'ouverture de la procédure collective, le vendeur initial a pu exercer son droit de revendication, les créances étaient sorties du patrimoine de son acquéreur, lequel n'était plus titulaire d'aucun droit à l'encontre du sous-acquéreur ; que, par suite, en relevant que le vendeur initial était " propriétaire de la créance du prix de revente depuis le jour de l'aliénation des marchandises ", la cour d'appel a méconnu ses propres énonciations et a ainsi derechef violé les textes susvisés et alors, enfin, que la revendication du prix des marchandises " visées à l'article 65 " et grevées d'une clause de réserve de propriété ne peut être accueillie - indépendamment de l'exigence particulière propre à l'article 66 - qu'aux mêmes conditions que la revendication des marchandises ellesmêmes avant leur revente et, notamment, dans la mesure où ces marchandises existaient encore en nature dans le patrimoine du débiteur lors de l'ouverture de la procédure collective ; qu'en l'espèce, il est constant et il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que les marchandises avaient été revendues antérieurement à l'ouverture de la procédure collective et n'existaient plus en nature dans le patrimoine du débiteur lors de


13 l'ouverture de ladite procédure ; que, par suite, en faisant droit à la revendication du vendeur, la cour d'appel a derechef violé les textes susvisés ; Mais attendu qu'ayant retenu que la SMT était fondée à se prévaloir de sa réserve de propriété à l'égard des matériels litigieux et que ceux-ci avaient été revendus en l'état par la société Microfrance, de sorte que le prix dû à celle-ci se trouvait par là-même subrogé aux marchandises dont la SMT était demeurée propriétaire, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que la cession de créance invoquée par la BNP ne pouvait faire échec à la revendication de la SMT ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi


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