Jésus, si grand si humble - Anne-Vanessa Bonnefont

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Anne-Vanessa Bonnefont Jésus, si grand, si humble

© 2024, éditions CLC France

BP 9 – F-26216 Montélimar Cedex editions@clcfrance.com – www.clcfrance.com

ISBN : 978-2-7222-0462-1 (papier) / 978-2-7222-0463-8 (epub)

Diffusé en Belgique par la Centrale Biblique

Diffusé au Canada par CLC Canada

Diffusé aux États-Unis par CLC USA

Diffusé en Suisse par les éditions Emmaüs

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés. Sauf mention contraire, les passages bibliques cités proviennent de La Nouvelle Bible

Segond.

Couverture : Nathan Philips

Dépôt légal : mai 2024

Impression n°xxxxxxxxx (avril 2024) • IMEAF • France

Mots clefs : humilité, orgueil, renoncement, sanctification

Anne-Vanessa Bonnefont Jésus,

grand,

humble

si
si

« Ce livre est un beau travail qui célèbre et met en avant l’humilité de Jésus, ainsi que le défi que nous avons de le laisser nous façonner au quotidien. C’est un manifeste à dépendre de Jésus, sans moralisme ni laxisme. »

Raymond-Pierre Faniart (pasteur à l’EPIS, Strasbourg)

« Un livre profond, riche, équilibré. Son auteur nous entraîne sur un sentier de découverte, et même d’apprentissage. L’alternance entre théologie et vie pratique attire la curiosité du lecteur qui ne peut s’empêcher de marquer des pauses pour reprendre son souffle. Un livre pertinent, plaisant, édifiant, bien écrit, qui place Jésus au cœur de l’expérience chrétienne. »

Michel Schneider (pasteur principal de l’EPIS, Strasbourg)

« Vanessa nous livre dans ces pages une merveilleuse analyse de l’humilité de Christ, avec beaucoup de sensibilité, de vérité, et aussi de riches illustrations et des applications concrètes pour la vie de tous les jours. Elle nous démontre avec brio combien l’humilité, associée à l’amour bien entendu, est le plus beau fruit que notre vie peut porter : après avoir lu ce livre, vous ne serez plus le même, pourvu que vous désiriez, de tout votre cœur, laisser l’Esprit de Dieu démasquer l’orgueil et vous transformer à la ressemblance de Jésus dans son humilité parfaite ! »

Jonathan Bol (pasteur de l’Église évangélique de Sarre-Union)

Dédicace

ÀJésus, mon Ami, mon précieux Sauveur et mon Seigneur bien-aimé, j’espère par cet ouvrage révéler un tout petit aperçu de ton infinie grandeur. Je t’aime.

Dédicace 7

3.

4.

Table des matières

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Préface de Timothée Paton ........................................................11 Avant-propos .............................................................................15 Introduction ..............................................................................17 Première partie : L’humilité dans la Bible ...............................29
Un homme à terre ...............................................................31
Une loi immuable ...............................................................53
1.
2.
L’homme selon le cœur de Dieu ..........................................77
Celui qui a tout compris ....................................................107 Deuxième partie : L’humilité de Jésus ...................................123 5. Le grand dépouillement .....................................................125 6. Tout petit ..........................................................................137 7. Sans bruit ..........................................................................159 8. Le secret ............................................................................183 9. Après vous .........................................................................201 10. Le trio ...............................................................................229 11. Pagaille en enfer ................................................................249 Troisième partie : L’humilité à tous les étages .......................... 271 12. Le chemin obligatoire .......................................................273 Conclusion ..............................................................................297 Remerciements ........................................................................301 Quelques mots sur l’auteur ......................................................304

Préface

Àlaquestion : « Quels sont ceux, Timothée, qui ont marqué ta vie de façon positive ? », je répondrais sans hésiter : « Ce sont des hommes et des femmes qui reflétaient l’humilité. Plutôt que de se mettre en avant, ils se faisaient petits pour laisser toute la place à Jésus. »

Ces frères et sœurs dans la foi ne sont pas connus du grand public. Ils n’ont jamais fait la une des revues chrétiennes. Ils n’ont pas de followers sur les réseaux sociaux. Et pourtant, ce sont eux qui m’ont le plus influencé. Je pense à Noël et Danielle Magne, mes chefs scouts quand j’étais petit, à la Major Boyadjian de l’Armée du Salut, au Pasteur Maurice Boinet avec qui j’ai servi le Seigneur en Picardie, aux missionnaires Gordon et Jan Meehan, Oscar et Odette Calgagni, à mes parents, et tant d’autres.

Ce qui les caractérise, c’est leur humilité. Une humilité qui ne vous laisse pas indifférent.

Leur force, c’est leur humilité. Les côtoyer m’a rapproché de Jésus.

Parmi les centaines de pépites que j’ai trouvées dans le livre d’Anne-Vanessa Bonnefont, j’aime particulièrement celle-ci : « Jésus est le seul chemin qui mène au Père et au salut, mais… l’humilité est le seul chemin qui mène à Jésus ».

Préface 11

Jésus, si grand, si humble

L’histoire de Zachée est l’une de mes préférées.

Zachée était riche et chef des publicains, les collecteurs d’impôts. Pour mieux voir Jésus qui passait par là, il grimpe dans un arbre.

Jésus l’aperçoit et l’invite à descendre. Sa position dans l’administration romaine, ses richesses ou l’hostilité de la foule auraient pu retenir Zachée dans l’arbre. Mais il a décidé de descendre, de s’humilier. Choisir le chemin de l’humilité au lieu de l’orgueil lui a permis de rencontrer Jésus. Sa vie en a été transformée. Le secret d’une vie changée, c’est justement de descendre de nos arbres et d’accueillir chez nous le Seigneur Jésus.

Celles et ceux qui s’obstinent à rester dans l’arbre, au-dessus des autres, ne goûteront jamais au vrai bonheur.

Sundar Singh faisait partie de ceux qui ont un jour quitté leur arbre pour rencontrer Jésus. Cet humble serviteur de Christ a consacré sa vie à partager l’Évangile en Inde. Il se trouvait un jour en Angleterre, à l’Université de Cambridge. Un professeur d’Étude comparée des religions lui demanda :

Monsieur Sundar Singh, pouvez-vous m’expliquer ce que vous avez trouvé dans le christianisme que vous n’aviez pas dans votre ancienne religion ?

Monsieur le professeur, j’ai trouvé mon cher Seigneur Jésus. Oh ! oui, je comprends, poursuivit le professeur, mais quel principe, quelle nouvelle philosophie avez-vous découverts dans le christianisme ?

Ce que j’ai trouvé, répéta l’humble serviteur de Dieu, c’est mon cher Seigneur Jésus.

Le jour où Sundar Singh a quitté l’arbre de la religiosité, il a rencontré ce qu’il existe de plus précieux au monde : le cher Seigneur Jésus.

Seuls ceux qui s’abaissent peuvent expérimenter une vie nouvelle.

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Le livre que vous tenez dans les mains est une invitation à descendre de votre arbre et à connaître personnellement Jésus.

J’ai toujours été un grand lecteur. (L’avantage de n’avoir jamais eu de télévision !) Certaines de mes lectures m’ont tellement marqué qu’elles ont été déterminantes pour ma foi et mon ministère.

Jésus. Si grand, si humble fait partie de ces livres qui laisseront une marque indélébile sur ma vie.

Alors qu’un nombre croissant de livres chrétiens se focalisent sur « moi et mon bien-être », celui-là est centré sur Jésus.

Son message va à contre-courant d’une génération qui ne cesse de proclamer : « Regarde-moi ! Regarde ce que je fais ! »

Dans un langage direct, franc (agrémenté d’humour), l’auteur nous secoue, nous dérange et frappe fort là où ça fait mal.

L’acteur français Henri Tisot disait : « Le Christ vient déranger le désordre établi ».

Anne-Vanessa nous ouvre les yeux sur des facettes de Jésus que nous n’avions probablement encore jamais perçues. Jésus ne cessera jamais de nous surprendre. Son humilité et son exemple nous bousculent.

John Oswald Sanders a écrit : « Il est important de souligner qu’il n’y a eu qu’une seule fois où Jésus a dit qu’il laissait à ses disciples un exemple, et ce fut quand il lava leurs pieds ».

Jésus. Si grand, si humble devrait être remis entre les mains de tous ceux qui veulent s’engager ou qui sont déjà engagés dans un service pour Dieu.

Son contenu ressemble à ces bandes blanches et rugueuses le long de la route qui nous évitent de finir dans le bas-côté. Le texte fait parfois mal, mais nous ferions bien d’y prendre garde. Notre avenir en dépend.

Préface 13

Jésus, si grand, si humble

Ce livre est aussi un véritable message prophétique pour l’Église occidentale.

Il arrive au bon moment.

Il pourrait éviter à de nombreuses églises de chavirer et à de nombreux pasteurs de faire naufrage.

Jésus nous invite à rejoindre les pauvres en esprit, les doux, les humbles et les purs, cités dans le Sermon sur la montagne. C’est à eux qu’il est donné d’hériter la terre et de voir Dieu.

Gandhi a dit un jour : « Quand votre pays et le mien parviendront à une entente sur les enseignements du Christ consignés dans le Sermon sur la montagne, alors nous aurons résolu non seulement les problèmes de nos deux pays, mais ceux du monde entier ».

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Avant-propos

Il y a des mots difficiles à prononcer, et il y a des livres difficiles à écrire. Celui que vous tenez entre les mains appartient à cette catégorie. S’intéresser de près (et avec honnêteté) à l’humilité vous entraîne dans un long et redoutable combat, car à force de traquer l’orgueil dans votre propre vie, vous finissez par vous sentir inévitablement mal à l’aise dès lors que vous écrivez le mot « je ». Vous retouchez vos phrases, encore et encore, en vous demandant : « Cette phrase glorifie-t-elle le Seigneur ou suis-je en train de me mettre moi-même en valeur ? » Si l’on souhaite cultiver un minimum de cohérence entre ses écrits et sa vie, écrire un livre sur l’humilité est un défi colossal.

Je ressentais cette impulsion intérieure, je devais écrire un livre. J’ai prié. Il m’a semblé entendre une réponse positive de la part du Ciel.

« Seigneur, quel sera le thème de mon livre ? » ai-je demandé. Et voici la pensée qui est montée dans mon cœur : « Parle de l’humilité de Jésus ».

Il m’a fallu plusieurs années pour écrire ce livre. Sept ans, pour être précise. Les premières idées sont venues rapidement, et de nouvelles portes semblaient s’ouvrir à chaque fois que j’ouvrais la Bible. Mais plus je creusais cette question de l’humilité, plus j’avais l’impression d’être moi-même totalement dépourvue de cette qualité. Et… cela m’a fait mal. Je sentais qu’il me fallait laisser mes découvertes me bouleverser moi-même avant de pouvoir les partager.

Avant-propos 15

Jésus, si grand, si humble

Tandis que je parcourais les Évangiles, l’humilité de Jésus devenait de plus en plus criante, elle vibrait à chaque chapitre et emplissait chaque passage. Ce thème a commencé à me poursuivre. Il est devenu pour moi une sorte de miroir de lumière qui m’a poussée à regarder ma propre vie avec une lucidité toute nouvelle. Dans le même temps, un nouvel espoir émergeait. Comme si j’avais trouvé une clef très précieuse pour avancer. Une clef susceptible de placer la Parole de Dieu sous un nouvel éclairage. Une clef de liberté et de victoire pour les êtres humains, pour les couples, pour les familles, pour les églises. Et surtout, une clef pour mieux saisir qui est Jésus.

Après avoir posé les bases de mon travail, j’ai eu l’occasion de présenter mes premières découvertes à un groupe de chrétiens dans une petite église évangélique alsacienne. Leur pasteur avait accepté que sa communauté serve de « laboratoire » d’exposition de mes premiers chapitres. Les encouragements de ces frères et sœurs ont été inestimables et je souhaite ici leur rendre hommage.

Parce qu’il est biblique d’éprouver toutes choses, j’ai également soumis mon travail au regard de quelques amis pasteurs et missionnaires, pour m’assurer de la cohérence théologique et de la justesse doctrinale de mes propos. Je les remercie tous pour leur précieux soutien.

C’est donc avec confiance que je vous laisse à la lecture de ces pages qui ont été portées par les prières des croyants et soutenues par les encouragements de beaucoup d’anonymes. L’humilité véritable n’a pas de spectateur. Mais dans le cadre de ce livre, elle a eu quelques formidables lecteurs et correcteurs…

Je prie pour que ce livre vous permette de découvrir de nouvelles facettes du caractère extraordinaire de Jésus, et pour que votre cœur puisse être béni comme le mien l’a été.

Avec toute mon affection,

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Introduction

Laissez-moi commencer par vous poser la question qui dérange : « Êtes-vous humble, cher lecteur, chère lectrice ? »

Vous ne pouvez évidemment pas me répondre que oui, car ce serait perçu comme de l’orgueil ! Mais vous ne pouvez pas non plus me répondre que non, car affirmer que vous vous connaissez suffisamment pour certifier qu’il n’y a pas la moindre once d’humilité en vous-même serait également très prétentieux, puisque nul ne se connaît totalement soi-même. Et qui sait ? Vous êtes peut-être humble sans le savoir…

En réalité, la seule réponse véritablement humble que vous pourriez apporter à cette question est : « Je ne sais pas. » (Sauf si l’un de vos proches se trouve près de vous en cet instant et vous souffle la bonne réponse. Les proches sont plutôt bien placés pour nous servir de miroir en matière d’humilité !)

Si vous êtes un peu philosophe, vous pourriez répondre : « Je suis peut-être un peu humble quelque part… mais cela reste à vérifier. »

Non, non, non, j’entends déjà la réponse que feront les chrétiens bien élevés. Vous allez me dire : « Dieu seul le sait ! » et, je vous préviens, je refuse catégoriquement cette réponse. Évidemment que Dieu seul le sait. Il est aussi le seul à savoir comment il a créé l’univers et à quel moment Jésus reviendra. Mais c’est à vous que j’ai posé la question. Ne vous cachez pas derrière Dieu. Assumez.

Alors, verdict ?

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Jésus, si grand, si humble

Si la question dérange, c’est parce que nous avons peur de ce que notre réponse pourrait révéler. Bien des gens ont peur d’être (ou de passer pour) des orgueilleux. Le problème, c’est que le désir de ne pas être orgueilleux peut, lui aussi, provenir de notre orgueil. La peur de notre propre orgueil peut être elle-même motivée par l’orgueil. Si je ne veux pas passer pour un orgueilleux, c’est que j’ai l’orgueil de mon image. Si je ne veux pas être orgueilleux, c’est que j’ai l’orgueil de ce que je suis. Vous me suivez ? On ne s’en sort jamais. Si vous êtes comme moi et que vous avez engagé une lutte de longue haleine contre votre propre orgueil, vous avez sans doute remarqué qu’il nous colle à la peau et qu’on ne s’en débarrasse jamais totalement. Même nos plus pieuses actions sont souvent motivées par de sinistres intentions, quand on se donne la peine de les examiner à la loupe. Tantôt visible, tantôt caché, tantôt criant, tantôt subtil, notre orgueil est là, dans notre cœur tortueux1, comme une mauvaise odeur qui ne vous quitte jamais.

Heureusement, il y a de l’espoir. La vérité libère2, et la vérité, si vous me permettez de la formuler ainsi, c’est que nous sommes tous des orgueilleux. Certains l’admettent, d’autres pas. Certains luttent contre leur orgueil, d’autres luttent pour le dissimuler. Mais nous sommes tous fondamentalement les mêmes. L’apôtre Paul remet les points sur les « i » à ce sujet. Voici ce qu’il écrit : il n’y a pas de juste, pas même un seul […] car il n’y a pas de distinction : tous, en effet, ont péché et sont privés de la gloire de Dieu (Romains 3.10, 22-23). Et, au cas où nous le soupçonnions d’avoir l’orgueil de s’exclure de la liste, il précise dans l’une de ses lettres : C’est une parole certaine et digne d’être pleinement accueillie : Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ; je suis, moi, le premier

1.  Le cœur est tortueux par-dessus tout et il est incurable : qui peut le connaître ? (Jérémie 17.9)

2.  Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples ; vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres (paroles prononcées par Jésus, Jean 8.31-32).

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d’entre eux (1 Timothée 1.15). En gros, à la question « êtes-vous humble ? », l’apôtre Paul semble répondre : « Nous sommes tous orgueilleux, et le pire de tous, c’est moi ! » Il assume, Monsieur Paul. Il a compris que le premier pas vers la solution consiste à reconnaître le problème.

J’aime la façon dont il décrit sa lutte contre le péché.

[…] mais moi, je suis un être de chair, vendu au péché. […] Ce que je veux, je ne le pratique pas, mais ce que je fais, c’est ce que je déteste. […] Je le sais, rien de bon n’habite en moi, c’est-à-dire dans ma chair. Car il est à ma portée de vouloir, mais non pas de produire le bien. Je ne fais pas le bien que je veux, mais je pratique le mal que je ne veux pas. […] Misérable que je suis ! (Romains 7.14-24).

Nous pouvons lui donner la main, n’est-ce pas ? Nous avons le désir d’être humbles, mais nous constatons bien que nous n’en avons pas la capacité. Reconnaître cela est un premier pas. Car on commence à devenir humble lorsqu’on commence à comprendre… qu’on ne l’est pas !

Le problème, c’est que « je ne suis pas humble » n’est pas une phrase que notre monde aime entendre. Notre société nous demande d’être ambitieux, remplis d’assurance, d’affirmation de soi, de conviction et de force. C’est pourquoi tendre vers l’humilité, c’est nager à contre-courant. C’est marcher vers une destination que notre monde évite à tout prix. C’est pénétrer dans un autre Royaume. C’est lutter contre nous-même, mais aussi marcher à l’encontre de la planète tout entière. Le défi est immense.

Les Écritures nous invitent de manière explicite et à maintes reprises à chérir l’humilité et à la pratiquer. Voici quelques exemples : Cherchez le Seigneur, vous tous, gens humbles du pays, vous qui agissez selon son équité ! Cherchez la justice, cherchez l’humilité ! (Sophonie 2.3)

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Je vous encourage donc, moi, le prisonnier dans le Seigneur, à vous comporter d’une manière digne de l’appel que vous avez reçu, en toute humilité et douceur, avec patience (Éphésiens 4.1-2).

[…] ne faites rien par ambition personnelle ni par vanité ; avec humilité, au contraire, estimez les autres supérieurs à vous-mêmes (Philippiens 2.3).

Enfin, soyez tous en parfait accord, sensibles aux autres, pleins d’affection fraternelle, d’une tendre bienveillance, d’humilité (1 Pierre 3.8).

La Bible nous invite même à revêtir l’humilité1, comme s’il s’agissait d’un vêtement. Avez-vous l’humilité dans votre garderobe, les amis ?

Que faut-il comprendre au juste ? L’orgueil nous colle à la peau, mais tout ira bien puisque nous venons d’enfiler notre manteau Chanel-Humilité pour cacher cette vilaine peau que l’on ne saurait voir ? C’est complètement contradictoire, non ? La Bible nous enseigne que nous sommes incapables d’être humbles, mais elle nous demande de l’être quand même ! On est censés faire comment, au juste, et user de quelles sortes d’artifices ? Comment « pratiquer » l’humilité si toutes nos pratiques humaines sont, par essence, imbibées d’orgueil ?

Autant vous le dire tout de suite, c’est dans la nature de Dieu de nous demander de faire des choses infaisables. Il aime que nous ayons besoin de lui alors il nous place intentionnellement dans des situations qui nous dépassent. C’est d’ailleurs à cela que nous pouvons reconnaître les projets qui viennent de Dieu : ils sont irréalisables sans lui ! Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Dieu attende de nous que nous manifestions un caractère qui se retrouve aux antipodes de notre nature profonde. Il nous demande l’impossible parce qu’il a déjà prévu un moyen de le rendre possible !

1.  Ainsi donc, vous qui êtes choisis par Dieu, saints et bien-aimés, revêtez-vous d’une tendresse magnanime, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience (Colossiens 3.12).

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J’ai pu parcourir un certain nombre d’ouvrages chrétiens sur l’humilité, et j’ai constaté que, malheureusement, plusieurs d’entre eux semblaient se perdre sur ce chemin contradictoire. Leurs auteurs nous encourageaient à devenir humbles en nous donnant simplement des méthodes ou des pistes de réflexion pour le devenir. (Non, je n’ai pas encore trouvé d’ouvrage intitulé L’humilité pour les Nuls, mais si un tel ouvrage devait paraître un jour, j’avoue que je n’en serais pas vraiment surprise…)

Je suis aussi tombée sur un test de personnalité permettant aux lecteurs de déterminer leur degré d’humilité et de cibler les domaines dans lesquels ils doivent progresser. Et… j’imagine que si les lecteurs réussissent le test, ils peuvent s’applaudir, s’auto-féliciter et bomber le torse ! Bravo, vous avez gagné la médaille de l’humilité ! (Mais non, zut ! Vous êtes obligés de la rendre maintenant que vous vous en êtes vantés !)

J’ai également entendu de nombreux prédicateurs inciter vivement les chrétiens à marcher dans l’humilité… mais sans donner d’autre clef pour y parvenir que celles de l’introspection personnelle, de la prière et de la lecture des passages des Écritures qui mentionnent l’humilité. En gros, ils expliquaient à quoi devrait ressembler notre fameux manteau de l’humilité (comment il faut le porter, comment il faut marcher, comment défiler pour le mettre en valeur, comment tourner sous l’œil des photographes et prendre la pause…) mais personne ne disait vraiment où et comment nous pouvions nous procurer ce précieux vêtement.

Je suis convaincue que toutes ces démarches sont vraiment sincères et parfaitement louables car elles ont pour seul but d’aider les croyants. Mais elles ont aussi, malheureusement, plongé de nombreux chrétiens dans la frustration et la culpabilité. Car les croyants sentent bien leur incapacité à produire cette humilité par eux-mêmes, et cela les décourage.

Et ils perçoivent peut-être cette incohérence : le fait de vouloir devenir humble ou de vouloir pousser les autres à devenir humbles

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(par toutes sortes de démarches louables, y compris la prédication ou l’écriture de livres sur le sujet) n’est-il pas, déjà, une manifestation de l’ego humain ? Toutes ces démarches ne se résument-elles pas finalement à un seul et même schéma : un orgueilleux (le pasteur) désire encourager d’autres orgueilleux (les croyants) à développer tous ensemble l’orgueil de devenir humbles (ou plutôt de croire qu’ils peuvent l’être), après quoi ils pourront éventuellement considérer que leur communauté est la meilleure et qu’en dehors de leur petit troupeau – ou de leur grande megachurch – il n’y a point de salut... ? Nous comprenons aisément ce qui ne va pas dans ce raisonnement. On tourne en rond, tout simplement.

La vérité, c’est que nous faisons fausse route dès lors que nous abordons la question de l’humilité à partir des hommes. Fondamentalement, je crois que l’humilité n’est pas en nous. Nous ne possédons pas ce manteau dans notre garde-robe. Nous ne pouvons donc pas le porter. Un point c’est tout. L’humilité, il faut la chercher ailleurs.

Et voici : j’ai la conviction que le Seigneur nous appelle à considérer ce sujet de manière différente et à cesser de considérer notre humilité, pour ne plus évoquer que son humilité à lui. L’humilité véritable ne se trouve qu’en Jésus. Inutile de la chercher ailleurs. Illusoire de vouloir la produire soi-même. C’est en Jésus seul qu’elle s’exprime pleinement.

Une petite nuance tout de même. Je ne suis pas en train d’affirmer qu’il n’y a absolument aucune once d’humilité en nous. Je ne dis pas que nous sommes viscéralement incapables de faire preuve de bons sentiments. Je ne dis pas que l’être humain est foncièrement mauvais jusqu’à la moelle. Certes, nous sommes tous pécheurs et nous sommes tous orgueilleux… mais à des degrés divers. Je crois que nous portons tous en nous de petits trésors laissés par Jésus, parfois à notre insu. Après tout, Dieu a fait l’homme à

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son image1. Il faut donc qu’il y ait quelques traits de ressemblance entre les humains et lui. De la même manière qu’un papa de trois enfants transmettra au premier la couleur de ses yeux, au deuxième la longueur de son nez et au troisième sa passion pour les mathématiques, Dieu le Père a transmis des caractéristiques uniques et particulières à chaque être humain. Ce sont des petits morceaux de lui-même, distribués à sa guise aux humains qu’il a créés à sa ressemblance. Et l’humilité peut très bien en faire partie, dans une mesure plus ou moins grande.

Dieu, qui fait lever son soleil sur les mauvais et sur les bons2, a déposé (ou préservé, si vous préférez) de petits fragments de sa propre bonté dans le cœur des humains, y compris dans le cœur de ceux qui ne reconnaissent pas (ou pas encore) que ces fragments sont divins. Je crois que cela ne concerne pas uniquement les croyants et qu’une personne non-croyante peut également porter en elle une semence d’humilité déposée par le Seigneur de manière anonyme. Car c’est dans la nature de Jésus de semer de belles choses, même sur les terrains où nous serions tentés de croire que rien ne poussera3.

J’ajouterai que malheureusement, il existe aussi des personnes qui professent haut et fort leur foi en Jésus et qui, pourtant, transpirent tellement l’orgueil qu’elles sont l’arme la plus efficace du diable pour dissuader quiconque de devenir chrétien. Il me semble que de tels « croyants » n’ont tout simplement pas compris qui était Jésus…

1. Dieu créa les humains à son image : il les créa à l’image de Dieu ; homme et femme il les créa (Genèse 1.27).

2. Matthieu 5.45

3. Dans la parabole du semeur (Matthieu 13.1-23, Marc 4.1-20 et Luc 8.4-15), Jésus explique que la Parole de Dieu (la bonne semence) est semée dans toutes sortes de terrains, y compris dans des terrains inadaptés. Ce n’est donc pas parce qu’un terrain est inadapté (ou semble inadapté) qu’il n’a pas reçu, quelque part, quelques graines de bonne semence…

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Je n’affirme donc pas que l’humilité n’existe pas du tout au royaume des humains. J’affirme seulement que l’humilité parfaite et véritable est en Jésus seul. Et j’affirme que, si on réunissait la totalité des élans d’humilité produits par les hommes depuis que le monde est monde, nous ne pourrions toujours pas rivaliser avec l’humilité de Jésus. Son humilité à lui restera toujours supérieure.

Par conséquent, pour grandir dans l’humilité, nous avons besoin d’apprendre à nous nourrir de l’humilité de Jésus et à l’imiter. Car le véritable manteau de l’humilité, c’est lui qui le détient, c’est lui qui le porte, c’est lui qui en dispose ! Et… si nous nous approchons tout près de lui, nous nous apercevons que ce manteau est suffisamment large pour nous abriter, nous, en même temps qu’il l’abrite lui. D’ailleurs, Jésus est tellement humble qu’il se dépouillera volontiers de son propre manteau pour nous l’offrir.

L’humilité de Jésus est sans contradiction. Elle ne nous culpabilise jamais, ni ne nous frustre, mais elle nous convainc et nous transforme. L’humilité de Jésus nous éblouit, nous secoue, nous reprend, nous charme, nous touche, nous fait grandir, nous bouleverse et nous éclaire. Elle est une brise légère et bienfaisante pour tout notre être, une boisson bien fraîche dans nos journées d’été, un oreiller moelleux où reposer notre tête fatiguée… (Désolée pour cette envolée lyrique. Vous avez compris que j’étais attachée à Jésus, je crois. Mais ressaisissons-nous. Ceci est un ouvrage sérieux, tout de même !)

Et voici le secret pour devenir humble. Vous êtes prêt ? Attention, lisez la prochaine phrase très lentement, à haute voix, et même relisez-la plusieurs fois ; je l’écris en gras pour vous aider. Le meilleur moyen de devenir humble, c’est de contempler sans cesse l’humilité de Jésus.

Tel est le secret très précieux que j’ai eu la grâce de découvrir au sujet de l’humilité et qui a motivé l’écriture de ce livre. L’humilité n’est pas en nous (sauf à partir du moment où le Seigneur la dépose dans notre cœur sous forme de trésor caché), et nous ne pouvons

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pas non plus la fabriquer par nous-même. Puisqu’elle ne nous habite pas et que nous ne pouvons pas non plus la produire, il ne nous reste qu’un seul moyen de l’obtenir, c’est que Jésus nous l’accorde.

Nous pouvons, et je vous y encourage, demander à Dieu dans la prière de nous accorder ce cadeau de l’humilité. Je suis convaincue que le Seigneur est tout aussi prêt à nous accorder l’humilité qu’il l’est à nous dispenser sa sagesse1. Si nous demandons l’humilité à Dieu, il nous l’accordera. D’ailleurs, demander quelque chose à Dieu, c’est déjà un pas d’humilité. C’est reconnaître qu’il est plus grand que nous et que nous avons besoin de son secours.

Cependant, au-delà de nos prières, j’ai découvert que le Seigneur travaille nos vies avec une puissance toute particulière lorsque nous commençons à contempler sa personne telle qu’elle nous apparaît dans les Écritures. Lorsque notre regard s’attache à Jésus et que nous contemplons son exemple, notre cœur commence à lui ressembler, car de son exemple se dégage une puissance qui nous transforme.

Voici comment l’apôtre Paul formule cette réalité :

Nous tous qui, le visage dévoilé, contemplons comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même image, de gloire en gloire : telle est l’œuvre du Seigneur, qui est l’Esprit (2 Corinthiens 3.18).

Paul explique que le processus de notre transformation intérieure découle de la contemplation de la gloire du Seigneur, en ajoutant que cette contemplation se fait le visage dévoilé, c’est-àdire en toute transparence, sans filtre, sans barrière.

Pour faire simple, pendant que je contemple la gloire de Jésus en étant vrai(e) avec lui et en lui permettant d’être vrai avec moi, son Esprit me transforme à son image. Je commence à le refléter, à lui renvoyer sa propre image, comme si j’étais son miroir. Il commence

1. Si l’un d’entre vous manque de sagesse, qu’il la demande à Dieu qui donne à tous généreusement et sans faire de reproche, et elle lui sera donnée (Jacques 1.5).

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à se voir en moi. Et le monde qui m’entoure commence également à voir Jésus en moi. C’est un processus : plus je le contemple, plus je lui ressemble.

Pour faire encore plus simple : à force de regarder Jésus, je deviens comme lui ! Et il se regarde en moi.

Avez-vous déjà vu ce qu’il se produit lorsque l’on place deux miroirs l’un en face de l’autre ? Ils se reflètent l’un l’autre à l’infini, de manière sans cesse miniaturisée. Je crois que c’est un peu ce qui se produit entre le Seigneur et nous, lorsque nous le contemplons. Nous devenons, en quelque sorte, sa miniature.

Et Jésus est le seul à disposer de cette capacité-là ! Vous imaginez si cela fonctionnait avec tous les humains ? Il me suffirait de contempler chaque jour la photo de Bill Gates pour devenir riche, ou de lire chaque jour une page de la biographie d’Arnold Schwarzenegger pour que mes biceps prennent du volume, ou encore de m’abonner au compte twitter de Céline Dion pour voir mes capacités vocales se démultiplier … Trop beau pour être vrai, n’est-ce pas ?

Pas avec Jésus. Tandis que nous contemplons qui il est, nous commençons à lui ressembler, et tandis que nous observons attentivement ce qu’il fait, il crée en nous la capacité de faire comme lui. Il a cette capacité miraculeuse de nous transformer. Et cela fait partie de ce que l’on appelle… la grâce.

Paul précise que nous contemplons la gloire du Seigneur. Contempler la gloire du Seigneur est l’aspiration de bien des croyants. Moïse a pu voir la gloire de Dieu 1. Salomon également 2. Et de nombreux croyants désirent voir la gloire du Seigneur, aujourd’hui encore. Nous chantons : « Dieu nous voulons voir ta 1. Voir Exode 33.18-23 2. Voir 2 Chroniques 7.1-3

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gloire1. » Nous prions pour voir la gloire de Dieu, et c’est une aspiration totalement légitime. Mais la Parole nous enseigne que l’humilité précède la gloire2 et c’est précisément dans son humilité que Jésus a été le plus glorieux, comme nous le verrons plus tard. Je suggère donc que nous changions nos prières et nos cantiques, et que nous réclamions plutôt : « Jésus, nous voulons voir ton humilité. » Car si nous voyons son humilité, nous verrons forcément sa gloire.

Ainsi, les propos de Paul nous permettent d’affirmer que, si je veux voir naître et grandir dans mon cœur la même humilité que celle qui caractérise Jésus, je dois regarder l’humilité de Jésus à l’œuvre. Et c’est dans les Écritures, et plus particulièrement dans les Évangiles, que je trouverai tous les indices que j’ai besoin d’examiner, d’analyser, de comprendre et de m’approprier.

Comprenez-moi bien. Si je me contentais de vous encourager à lire la Bible, mon discours n’aurait absolument rien d’inédit.

Mais je dois vous dire qu’il y a différentes manières de lire la Bible. On peut la lire pour acquérir des connaissances, mémoriser des versets, ou y puiser de la sagesse. On peut la lire par amour pour les récits historiques ou poétiques. On peut la lire pour se cultiver. On peut même la lire par habitude, ou par souci d’être un « bon » chrétien (ou par peur d’être un « mauvais » chrétien). On peut la lire parce qu’on est pasteur et qu’on a un sermon à préparer. Ou parce qu’on est étudiant en théologie, féru d’herméneutique et d’exégèse ! Mais on peut aussi lire la Bible… pour y chercher Jésus. En guettant la moindre trace de son passage, la moindre marque discrète qui nous en apprendra davantage sur sa personne, le moindre

1. Je cite ici les paroles d’un très beau chant intitulé Dieu, nous voulons voir ta gloire (Luc Gingras, LTC/Asaph, 1992).

2. La crainte du Seigneur instruit de la sagesse : l’humilité précède la gloire (Proverbes 15.33).

Introduction 27

Jésus, si grand, si humble

trésor qui le révèle, lui. Et là… tout à coup, il se produit quelque chose d’inouï. Nous réalisons non seulement que Jésus est présent partout dans les Écritures, mais aussi que la Parole est vivante et puissante, et qu’à sa lecture… nous changeons.

Voilà pourquoi à travers ce livre, j’aimerais vous inviter à une redécouverte de la personne de Jésus et à une contemplation de son humilité telle qu’elle s’exprime dans les Écritures. Nous le laisserons, lui, définir pour nous ce qu’est l’humilité. Il sera notre baromètre. Vous êtes partant ?

Dans les prochaines pages, nous nous intéresserons à ce que l’humilité peut signifier dans la culture biblique et aux principes fondamentaux posés par Dieu en matière d’orgueil et d’humilité, puis nous plongerons au cœur de notre sujet et nous nous laisserons bousculer par l’humilité de Jésus.

À la fin de chaque chapitre, je vous poserai une question. La réponse sera celle que vous voudrez bien lui donner. Elle vous appartiendra. Mais je dois vous avertir : si vous acceptez ce cheminement qui s’ouvre à vous et si vous laissez le Seigneur vous surprendre par son exemple, vous risquez de ne plus être exactement la même personne à la fin de ce voyage.

Alors… bonne lecture !

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Première partie : L’humilité dans la Bible

CHAPITRE 1 :

Un homme à terre

Se connaître nous fait plier le genou, posture indispensable à l’amour. Car la connaissance de Dieu engendre l’amour, et la connaissance de soi engendre l’humilité.

Mère Teresa

Connaissez-vous

Hercule Poirot, le célèbre détective belge inventé par Agatha Christie ? Il est l’un de mes personnages de fiction préférés. Brillant, élégant, courtois, il est aussi… humble à sa manière. Il a une parfaite conscience des capacités de ses « petites cellules grises », mais cette conscience s’accompagne, fort heureusement, d’une vigilance sur lui-même.

Un jour, alors qu’on lui demande pourquoi il parle toujours de lui-même à la troisième personne, il répond : « Cela aide Poirot à garder une saine distance avec son génie ».

L’expression est à la fois savoureuse, audacieuse et juste. Par elle, le détective reconnaît l’excellence de ses propres qualités – il a du génie ! – tout en admettant qu’il risque de s’enorgueillir – et qu’il faut donc cultiver une saine distance entre lui-même et son talent. Bel équilibre, ne trouvez-vous pas ?

Même si… parfois, Poirot dérape. Alors que son ami lui reproche un certain manque de modestie, voici ce qu’il déclare : « Je serai…

Un homme à terre 31

Jésus, si grand, si humble

l’homme le plus humble du monde. Nul ne surpassera Poirot, en matière d’humilité : le meilleur ! » Cette déclaration traduit, au mieux, le merveilleux sens de l’autodérision de ce personnage, et au pire, une mauvaise foi tellement flagrante qu’elle nous fait sourire. Car une personne humble ne se fixera sans doute pas pour objectif d’être la meilleure du monde, et encore moins en humilité. Et une personne humble ne déclarera pas non plus : « Je suis humble ! »

Et pourtant… Jésus l’a fait. Il a clairement affirmé qu’il était humble.

Voici ce qu’il a dit :

Venez à moi, vous tous qui peinez sous la charge ; moi, je vous donnerai le repos. Prenez sur vous mon joug et laissez-vous instruire par moi, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. Car mon joug est bon, et ma charge légère (Matthieu 11.28-30).

Permettez-moi de paraphraser un peu les paroles de Jésus pour les placer dans notre contexte actuel. Voici ce qu’il dit, en somme, à ses disciples : « Venez vous reposer, les gars, tout en faisant mon travail, et laissez-moi vous enseigner parce que je suis humble et que mon travail est bon pour vous ».

Pour ma part, si une personne me parlait ainsi, je me dirais sans doute qu’elle ne manque pas d’air, ni d’humilité (et qu’elle devrait lire mon livre) !

Certes, Jésus est souvent provocateur. En parcourant les Évangiles, on s’aperçoit que les provocations sont un moyen qu’il utilise pour sonder le cœur de ses interlocuteurs et attirer leur attention, et qu’elles précèdent souvent une grande révélation.

Nous en voyons un exemple lorsque Jésus rencontre la femme samaritaine1. Il la déstabilise d’abord en lui adressant la parole

1. Ce récit se trouve dans le chapitre 4 de l’Évangile de Jean.

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(contrairement aux usages en vigueur à son époque), puis en lui demandant de chercher son mari (alors qu’il sait très bien qu’elle n’en a pas et que la question va la mettre mal à l’aise). Mais elle ne s’enfuit pas. Elle se laisse intriguer. Ils dialoguent. Et il finit par lui révéler qu’il est le Messie !

Jésus rencontre également une Cananéenne qui le supplie de délivrer sa fille, qui est en proie à des tourments d’ordre démoniaque1. Jésus la provoque en lui faisant croire qu’il est exclusivement venu pour son peuple (les Juifs) et non pour les étrangers comme elle.

Au passage, il qualifie les siens de « moutons perdus de la maison d’Israël » et les non-juifs de « chiens ». De telles déclarations, si elles étaient prononcées en France aujourd’hui, lui vaudraient un procès ! Mais cette femme ne se laisse pas déstabiliser. Elle s’accroche. Elle lui répond. Elle argumente. Et… il se révèle. Elle ne voulait qu’une guérison, mais parce qu’elle a accepté cette provocation et qu’elle est entrée en dialogue avec Jésus, il lui accorde la guérison qu’elle demandait, et il lui offre davantage que cela. Il complimente sa foi. Il la loue. Il la valorise. Et il se révèle par la même occasion comme étant celui qui se laisse approcher par tous, y compris par les étrangers ! Et cette réalité-là était tout bonnement révolutionnaire pour les Juifs.

Alors, lorsque Jésus a déclaré qu’il était « doux et humble de cœur », était-il une nouvelle fois provocateur ? Voulait-il titiller ses disciples sur la question de l’humilité ? S’apprêtait-il à leur révéler quelque chose d’extrêmement profond ?

Que voulait-il réellement dire en se présentant comme étant humble de cœur ? C’est ce que nous allons tenter de déterminer.

1. Voir Matthieu 15.21-28.

Un homme à terre 33

Jésus, si grand, si humble

L’humilité pour les Romains

D’un point de vue étymologique, le mot français « humilité » vient du nom latin humilitas. Félix Gaffiot1 nous donne plusieurs significations de ce mot. La première est l’idée de « petite taille, faible élévation ». C’est donc le contraire de la hauteur et de la grandeur. La deuxième est l’idée de « faiblesse, faible puissance », c’est-à-dire le contraire de la force. La troisième est l’idée de « platitude, abaissement, abjection, caractère rampant ». C’est l’expression d’une petitesse aux yeux des autres, qui portent un regard négatif, méprisant, avilissant sur la personne dite « humble ». La quatrième est l’idée de « faiblesse, abattement ». C’est l’écrasement dû à une tristesse. Enfin, humilitas désigne l’humilité, la modestie.

Le mot « humble », quant à lui, vient de l’adjectif latin humilis. Il traduit les mêmes idées que le nom humilitas. Humilis désigne ce qui est « bas, près du sol, peu élevé, qui rase le sol », mais aussi ce qui est « faible, de caractère humble, modeste, abattu, sans ressort, et rampant ». Humilitas et humilis sont des dérivés du nom latin humus qui signifie « terre ».

Si je résume toutes ces idées, je peux dire qu’être « humble », selon l’étymologie latine, c’est « être à terre » ou « ramper par terre », parce qu’on est petit (physiquement ou socialement), ou fragile et faible, ou écrasé (par les autres ou par les circonstances). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la signification originelle de l’humilité n’a absolument rien de reluisant.

Cette attention portée aux mots latins n’est pas anodine. Le latin était la langue de l’Empire romain. Les Romains avaient envahi Israël avant la venue de Jésus, et ce sont eux qui ont crucifié Jésus, à la demande des autorités juives.

1. Félix Gaffiot, Dictionnaire Latin-Français (Hachette, 1934).

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Aussi, lorsque nous nous intéressons à la signification de l’humilité, il faut la comprendre, tout d’abord, dans le contexte de l’Empire romain. Pour les Romains, la petitesse et la faiblesse étaient de véritables tares. L’adjectif humilis était pour eux un qualificatif péjoratif et méprisant, servant à désigner des personnes sans valeur, des « moins que rien ».

À Rome, il ne fallait pas être petit, mais grand, et l’on pouvait même acheter la citoyenneté romaine, synonyme d’élévation sociale et de grande respectabilité1. Et il fallait être ambitieux. Il suffit de voir les innombrables édifices romains toujours visibles de nos jours pour comprendre à quel point les Romains voyaient grand, et un bref coup d’œil sur une carte du bassin méditerranéen durant l’Antiquité nous permet de comprendre l’étendue de leur désir de conquête et le caractère longtemps invincible de leur armée. À Rome, il ne fallait certainement pas être faible, mais viril, fort et dur. L’armée romaine était redoutable et ses légionnaires n’étaient pas des enfants de chœur. Ils pratiquaient la crucifixion à tour de bras. Ils ne plaisantaient vraiment pas. Et pour eux, une personne faible et chétive ne méritait tout simplement pas de vivre.

Voici ce qu’a écrit Sénèque, philosophe et homme d’État romain contemporain de Jésus : « Nous abattons les chiens enragés, nous tuons un bœuf intraitable et sauvage, nous égorgeons les bêtes malades pour qu’elles ne contaminent pas le troupeau ; nous étouffons les petits monstres, nous noyons même les enfants, quand ils sont venus chétifs et anormaux : ce n’est pas la 1. Voici un dialogue qui évoque cette réalité et que nous trouvons dans Actes 22.2728 (Bible Segond 21) : S’approchant de Paul, le commandant lui demanda : « Dismoi, es-tu romain ? » « Oui », répondit-il. Le commandant reprit : « C’est avec beaucoup d’argent que j’ai acquis ce droit de citoyen. » « Quant à moi, dit Paul, je l’ai de naissance. » Aussitôt ceux qui devaient procéder à l’interrogatoire se retirèrent, et le commandant eut peur en prenant conscience que Paul était romain et qu’il l’avait fait enchaîner.

Un homme à terre 35

Jésus, si grand, si humble

colère, c’est la raison qui nous invite à séparer des éléments sains des individus nuisibles1. »

C’est très éloquent… Et nous constatons au passage que ce ne sont pas les Nazis qui ont inventé l’extermination des personnes souffrant de handicap ou la discrimination entre les « races ». Les Romains le faisaient déjà2.

Ce mépris pour tout ce qui est faible est sans doute l’une des raisons qui expliquent la férocité des soldats romains à l’égard de Jésus. À leurs yeux, Jésus, dans sa docilité, dans son refus de se défendre, devait incarner l’anti-homme par excellence. Ce n’est pas étonnant qu’ils aient pris un malin plaisir à l’humilier et qu’ils se soient précisément moqués de lui en lui donnant un faux manteau royal, un faux sceptre et une couronne (d’épines) et en lui attribuant le titre honorifique de « Roi des Juifs3 ». C’était purement cynique, mesquin et cruel. Diabolique. Ils attaquaient par là ce qu’ils jugeaient être une absence totale de grandeur.

Mais… une fois sur la croix, Jésus allait montrer aux Romains qui était le véritable patron.

1. Sénèque, De la colère, I, 15, 2. Traduction la Collection des Universités de France (Les Belles Lettres).

2. Il est à noter qu’Adolf Hitler éprouvait une grande fascination pour l’Empire romain, au point de vouloir rebâtir cet Empire (le fameux « Troisième Reich », le mot Reich signifiant « empire » en allemand). Il n’est donc pas exagéré d’établir un parallèle entre la cruauté des Nazis et celle des Romains. Car il y a eu de réelles similitudes organisationnelles, morales et surtout spirituelles entre ces deux puissances.

3. Les soldats du gouverneur conduisirent Jésus dans le prétoire et rassemblèrent toute la troupe autour de lui. Ils lui enlevèrent ses vêtements et lui mirent un manteau écarlate. Ils tressèrent une couronne d’épines qu’ils posèrent sur sa tête, et ils lui mirent un roseau dans la main droite ; puis, s’agenouillant devant lui, ils se moquaient de lui en disant : « Salut, roi des Juifs ! » Ils crachaient sur lui, prenaient le roseau et le frappaient sur la tête (Matthieu 27.27-30, version Segond 21).

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Jésus poussa encore un grand cri et rendit l’esprit. Alors le voile du sanctuaire se déchira en deux, d’en haut jusqu’en bas, la terre trembla, les rochers se fendirent, les tombeaux s’ouvrirent et les corps de beaucoup de saints endormis se réveillèrent. […] Voyant le tremblement de terre et ce qui venait d’arriver, le centurion et ceux qui étaient avec lui pour garder Jésus furent saisis d’une grande crainte et dirent : « Celui-ci était vraiment le Fils de Dieu » (Matthieu 27.50-54).

Pouvez-vous imaginer à quoi a dû ressembler ce cri poussé par Jésus ? J’imagine que ce fut le cri le plus viril, le plus puissant et le plus tonitruant de toute l’Histoire de l’humanité. Incroyable Hulk, tu peux aller te rhabiller. Et emmène Spiderman, Batman et tous les autres avec toi. Vous ne faites pas le poids !

Les Romains ont torturé Jésus. Il n’a pas bronché. Mais tout à coup, Jésus a crié sur la croix avant de rendre l’esprit… et la terre a compris le message. Les rochers ont compris le message. Les morts ont compris le message. (Le soleil, lui, avait déjà compris. Au moment où Jésus est mort, cela faisait six heures qu’il se cachait derrière les ténèbres1.)

Et les Romains ont fini par comprendre, eux aussi. Je pense qu’ils ne s’en sont toujours pas remis…

Il faut donc retenir que, jusqu’à la venue de Jésus-Christ, l’humilité n’était absolument pas une vertu. Être humble, c’était être misérable, vil, servile, pitoyable, méprisable, minable. Et c’est précisément l’histoire de Jésus qui a changé le regard que les hommes portaient sur cette notion et qui a fait de l’humilité une qualité. Avant lui, c’était un défaut. À partir de lui, c’est devenu l’une des plus belles qualités qui soient.

Voilà pour le monde romain. Mais rappelons que le Nouveau Testament a été écrit en grec, et que les paroles de Jésus rapportées

1. Matthieu 27.45.

Un homme à terre 37

Jésus, si grand, si humble

en Matthieu 11 l’ont d’abord été dans la langue grecque, même si Jésus devait probablement s’adresser aux foules en araméen (ou peut-être en hébreu). En tout cas, son discours s’inscrit dans une triple culture : romaine, grecque et juive.

Après avoir vu ce qu’était l’humilité pour les Romains, il nous faut donc examiner les termes en grec et en hébreu, et nous intéresser à ce que les Grecs et les Juifs pensaient de l’humilité.

L’humilité en grec

Lorsque Jésus déclare qu’il est doux et humble de cœur, le mot originel traduit par « humble » en français est le mot grec tapeinos. En grec ancien, tapeinos, qui est également employé par de nombreux auteurs antiques en dehors du Nouveau Testament, signifie « bas, peu élevé, de condition humble, sans élévation, de petite taille, de faible puissance, misérable, qui s’humilie, qui s’abaisse, humble, modeste, abaissé, humilié, abject, vil ». On trouve aussi, parmi les mots de la même famille que tapeinos, l’idée d’être « près du sol », mais aussi « l’abattement, le découragement, et la bassesse1 ».

En français, le mot grec tapeinos a produit des dérivés tels que le verbe « se tapir » (qui permet d’évoquer la posture d’un animal = un félin, par exemple = qui s’aplatit sur le sol pour mieux se cacher), ainsi que, probablement (les étymologistes n’en sont pas certains) le mot « tapis ».

Nous voyons que l’humilité en grec désigne sensiblement les mêmes réalités que l’humilité en latin. Toutes les significations de ce mot tournent autour de l’idée d’être « par terre ».

Ainsi, lorsque Jésus déclare qu’il est « humble de cœur », il nous parle de la terre, du sol, de la poussière dont nous sommes issus, et sans doute du tapis.

1. Anatole Bailly, Le Grand Bailly, dictionnaire grec-français (Hachette, 2000).

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Laissez-moi vous faire part de la manière particulière dont ces paroles de Jésus résonnent dans mon cœur.

Imaginons que vous rentriez chez vous après une promenade en forêt. Vous ouvrez la porte mais, avant de franchir le seuil, vous prenez soin d’essuyer vos pieds sur le paillasson pour ôter la terre, les feuilles et la boue accumulées sous vos semelles. Puis, vous enfilez une paire de pantoufles bien confortables et vous pouvez vaquer à vos occupations. Vous préservez ainsi la propreté de votre intérieur et celle de vos pieds. Mais le paillasson, lui, en a fait les frais. Car si votre intérieur est propre, c’est parce que le paillasson a accepté de se salir.

Eh bien, c’est pour moi une image de l’humilité (tapeinos) de Jésus. Si mon cœur est propre, c’est parce que Jésus a porté ma souillure et qu’il s’est chargé de mes péchés. Il s’est placé à terre, comme un paillasson, pour que je puisse déposer sur lui tout ce qui m’encombrait. Mes péchés, mes maux, mes souffrances, mes fardeaux, ma méchanceté. Jésus m’a tellement aimée qu’il est descendu pour se placer à ma hauteur. Il est descendu me chercher dans ma saleté. Il s’est sali pour moi. On lui a même craché à la figure, lacéré le dos, transpercé les mains et les pieds et cloué sur une croix pour que je sois purifiée. La vérité, c’est que même le plus laid des paillassons ne subit jamais un traitement pareil !

Oui, je sais, cette comparaison entre Jésus et un… paillasson peut vous sembler irrespectueuse, voire scandaleuse ou carrément insultante envers lui. Elle m’a choquée moi-même, au début. Parce que Jésus est bien trop glorieux pour que nous puissions le réduire ainsi. Mais le fait est que la croix est un scandale. L’humilité de Jésus est un scandale. Son abaissement est un scandale. Et, en définitive, la grâce est un scandale. Et il faut accepter que la grâce soit scandaleuse pour en bénéficier.

Alors, lorsque Jésus a dit à ses disciples qu’il était humble de cœur et qu’il avait des instructions à leur donner et une tâche qui ne serait pas trop lourde pour eux, c’est un peu comme s’il leur

Un homme à terre 39

Jésus, si grand, si humble

avait dit : « Je vous donne du travail, mais il ne sera pas trop difficile pour vous, parce que c’est moi qui ferai le plus dur... »

Sa déclaration était également prophétique, car en leur parlant de son humilité, c’est-à-dire du fait qu’il était « à terre », Jésus annonçait également son cheminement jusqu’à la croix. Il annonçait ce moment atroce où il allait s’écrouler au sol, écrasé sous le poids de sa propre croix, tombant d’épuisement et de faiblesse, au point que quelqu’un d’autre allait devoir porter la croix à sa place.

Dans son Évangile, Marc raconte : Ils forcèrent un passant qui revenait des champs à porter la croix de Jésus. C’était Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus (Marc 15.21, version Segond 21). Les commentateurs de ce passage précisent : « Les hommes condamnés à mort [par les Romains] étaient généralement forcés de porter une poutre de leur propre croix, dont le poids oscillait entre treize et dix-huit kilos, jusqu’à l’endroit même de la crucifixion1 ». Or, Jésus, pourtant charpentier de formation et sans doute fort et habitué à soulever des poutres, était à ce moment-là tellement affaibli, et son dos, lacéré par les coups de fouet, tellement en lambeaux que même treize à dix-huit kilos de bois étaient devenus trop lourds pour lui. Imaginez-vous l’humiliation que cela pouvait représenter, pour un solide trentenaire, de se voir réduit à ne même plus pouvoir soulever dix-huit kilos, soit le poids moyen d’un enfant de quatre ans ?

Bien que la Bible ne nous donne pas de précision sur la posture de Jésus tandis qu’il marchait vers la croix, je n’ai pas de difficulté à croire que Jésus a littéralement rampé par terre jusqu’à Golgotha. Il était véritablement « humble ». À terre.

Et… il l’a fait pour toi. Pour moi.

1.  La Bible avec notes d’étude archéologiques et historiques, Société Biblique de Genève, 2015, note sur Marc 15.21, p. 1470.

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Si nous arrêtions là notre définition de l’humilité, nous aurions déjà de quoi réfléchir. Mais… après le latin et le grec, il nous reste à voir ce que l’humilité signifie en hébreu, langue de l’Ancien Testament.

L’humilité en hébreu

Le latin n’a qu’un seul mot pour désigner l’humilité, c’est humilitas. Le grec, de même, n’a qu’un mot, c’est tapeinos. En revanche, l’Ancien Testament présente une dizaine de termes hébraïques alternativement traduits par le mot « humble » dans les Bibles en langue française1. J’aborderai ici les plus importants, et vous constaterez que, là encore, à une exception près, tous ces termes ont des connotations péjoratives. Nous devrons donc reconnaître que la notion d’humilité est tout aussi négative dans l’Ancien Testament qu’elle l’est dans le Nouveau.

Le premier terme parfois traduit par « humble » dans les Bibles francophones est tsana’. Il désigne une humilité qui consiste à vivre de manière prudente et réfléchie, et qui relève de la sagesse. Ce terme-là est le seul à avoir une connotation positive. C’est sans doute la raison pour laquelle, dans la Nouvelle Bible Segond, le mot tsana’ n’est pas traduit par « humilité » mais par « modestie ».

Quand vient l’arrogance vient aussi le mépris ; la sagesse est avec les modestes (tsana’) (Proverbes 11.2).

1. Selon les versions bibliques, les traductions des mots hébraïques varient. La classification des termes varie également selon les concordances. Certaines versions bibliques emploient l’adjectif « humble » là où d’autres préfèrent employer des adjectifs comme « pauvre » ou « malheureux ». La liste des termes que je propose ici reprend donc des mots traduits par « humble » dans certaines bibles francophones, mais pas forcément dans toutes les Bibles. Elle s’inspire de la Concordance de James Strong, disponible à l’adresse https://www.lueur.org/bible/hebreu-grec

Un homme à terre 41

Jésus, si grand, si humble

Il t’a fait connaître, ô humain, ce qui est bon ; et qu’est-ce que le Seigneur réclame de toi, si ce n’est que tu agisses selon l’équité, que tu aimes la fidélité, et que tu marches modestement (tsana’) avec ton Dieu (Michée 6.8) ?

Le deuxième terme est anav. Il signifie « opprimé, maltraité, affligé », mais aussi « humble, pauvre, nécessiteux » et enfin « faible, doux, patient ». C’est le qualificatif qui a été attribué à Moïse.

Or, Moïse était un homme très humble (anav), plus qu’aucun être humain sur la terre (Nombres 12.3).

Ce terme est assez ambigu. Nous serions tentés de penser que l’adjectif est élogieux au sujet de Moïse, mais en réalité, la plupart du temps, anav désigne des personnes malheureuses et misérables. Mais pas n’importe quel type de malheureux ! Il désigne les malheureux qui ont reçu la promesse d’une joie future, parce que Dieu se souvient d’eux ! On pourrait dire qu’il désigne des personnes « provisoirement » malheureuses et attendant que Dieu les relève.

Car le Seigneur accorde sa faveur à son peuple, il donne aux pauvres (anav) le salut pour parure (Psaumes 149.4).

Les affligés (anav) auront dans le Seigneur une joie débordante, et les plus pauvres des humains feront du Saint d’Israël leur allégresse (Ésaïe 29.19).

Le souffle du Seigneur Dieu est sur moi, car le Seigneur m’a conféré l’onction. Il m’a envoyé porter une bonne nouvelle aux pauvres (anav), panser ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur libération […] (Ésaïe 61.1).

Le troisième terme est ‘aniy. Il signifie « pauvre, nécessiteux, affligé, faible, humble, humilié, misérable, malheureux ». La plupart du temps, il est synonyme de « souffrance ». La Bible emploie généralement ce terme pour désigner les pauvres, les misérables, les malheureux, c’est-à-dire toutes les personnes souffrantes dont Dieu a compassion, qu’il nous invite à secourir et à assister, et envers qui

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nous sommes appelés à faire preuve de compassion et à exercer la justice.

Quand un pauvre (‘aniy) crie, le Seigneur entend et il le sauve de toutes ses détresses (Psaumes 34.7).

Il existe un passage dans l’Ancien Testament où le mot hébreu ‘aniy désigne prophétiquement Jésus, qui apparaît donc comme l’homme humble-souffrant. Le voici :

Réjouis-toi, fille de Sion ! Lance des acclamations, fille de Jérusalem ! Voici ton roi vient à toi ; il est juste et victorieux, il est humble (‘aniy) et monté sur un âne, sur un ânon, le petit d’une ânesse. […] Il annoncera la paix aux nations, et il dominera d’une mer à l’autre, depuis l’Euphrate jusqu’aux extrémités de la terre (Zacharie 9.9-10, version Bible Segond 21).

Les commentateurs de ce passage précisent que « l’âne est un symbole d’humilité et de paix » et ajoutent que le roi David et ses fils chevauchaient des mulets1. Autrement dit, Jésus est ici annoncé comme un homme « misérable, pauvre, souffrant, humble », mais qui s’inscrit néanmoins dans la lignée de David et qui viendra sur une monture princière.

Le quatrième terme est le mot kana’. Il caractérise l’attitude de celui qui s’humilie lui-même ou qui est humilié par les autres. Il est donc largement synonyme d’humiliation. La Bible l’emploie pour désigner autant ceux qui s’humilient devant Dieu (parce qu’ils se repentent) que ceux qui sont humiliés par Dieu (parce qu’ils ont péché) ou par un ennemi (dans un contexte de guerre).

Par exemple, parmi les lois données par Dieu à Moïse, nous trouvons cet avertissement prophétique :

Alors ils confesseront leur faute et la faute de leurs pères, les sacrilèges qu’ils ont commis envers moi et la résistance qu’ils m’ont opposée – moi

1.  La Bible avec notes d’étude archéologiques et historiques (Société Biblique de Genève : 2016), note 9.9, p. 1352.

Un homme à terre 43

Jésus, si grand, si humble

aussi je leur résisterai et les amènerai dans le pays de leurs ennemis. Alors leur cœur incirconcis s’humiliera (kana’), et ils s’acquitteront de leur faute (Lévitique 26.40-41).

Dans le contexte des guerres menées par Israël, nous pouvons également lire : En ce jour-là, Dieu humilia (kana’) Yabîn, roi de Canaan, devant les Israélites (Juges 4.23).

Le cinquième terme est le mot qalah. Il n’apparaît que six fois dans la Bible et il signifie « disgracier, déshonorer, mépriser » ou encore « n’être que peu estimé, être déshonoré, être méprisé, être avili, considéré comme ayant une moindre importance ». En d’autres termes, il désigne l’humilité de la personne méprisée.

Mieux vaut être méprisé (qalah) alors qu’on a un serviteur que de faire le glorieux alors qu’on manque de pain (Proverbes 12.9).

Maudit soit celui qui méprise (qalah) son père et sa mère ! (Deutéronome 27.16).

Le sixième terme est shachach. Il se traduit par « s’incliner, se coucher, se baisser, se traîner, être abattu, s’affaiblir, être humilié, renverser, être étouffé » et il désigne l’humilité de la personne qui est abattue, triste, voire désespérée ou même dépressive. Sans grande surprise, c’est un terme que nous retrouvons souvent dans la bouche du psalmiste.

Comme pour un ami, pour un frère, je me traînais (shachach) ; comme pour le deuil d’une mère, je me courbais, l’air sombre (Psaumes 35.14).

Je suis courbé (shachach), accablé à l’extrême ; sans cesse je déambule, l’air sombre (Psaumes 38.7).

Avant de nous intéresser au tout dernier terme hébraïque que nos Bibles francophones traduisent par « humble », j’aimerais synthétiser ce que nous venons d’expliquer.

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En hébreu, nous retrouvons donc l’humilité-modestie (tsana’), l’humilité du malheureux en attente de la joie promise par Dieu (anav), l’humilité-souffrance (‘aniy), l’humilité-humiliation (kana’), l’humilité de celui qui est méprisé (qalah) et l’humilité de celui qui est abattu (shachach).

Et si l’on s’interroge sur ces différentes facettes de l’humilité pour définir celles qui caractérisent le mieux Jésus, nous constatons qu’elles le définissent toutes.

Jésus était habité par l’humilité-modestie, marchant humblement et avec obéissance selon les directives de son Père. Voici ce qu’il explique à ses disciples :

Amen, amen, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même, sinon ce qu’il voit faire au Père ; ce que celui-là fait, en effet, le Fils aussi le fait pareillement (Jean 5.19).

Jésus connaissait l’humilité du malheureux qui s’attend à la joie céleste future. Par exemple, voici ce qu’il déclare à l’un des deux brigands crucifiés à ses côtés : Amen, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis (Luc 23.53). Nul doute que Jésus savait que le Ciel l’attendait, ainsi que la consolation qui s’y attache.

Jésus connaissait l’humilité-souffrance, comme nous l’avons déjà relevé en citant le livre de Zacharie. Il connaissait l’humilité-humiliation de celui dont Dieu se détourne : Et vers la neuvième heure, Jésus cria : Eli, Eli, lama sabachtani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ? (Matthieu 27.46).

Quant à l’humilité de celui qui est méprisé ou abattu, elle est criante dans ce passage qui annonce prophétiquement la venue de Jésus, et qui, à lui seul, résume tout ce que nous venons d’énumérer : Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance, semblable à celui de qui on se détourne, il était méprisé, nous ne l’avons pas estimé. En fait, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’était chargé ; et nous, nous le pensions atteint d’un fléau, frappé par Dieu et affligé. Or il était transpercé à cause de nos transgressions, écrasé à cause de nos

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fautes ; la correction qui nous vaut la paix est tombée sur lui et c’est par ses meurtrissures que nous avons été guéris (Ésaïe 53.3-5).

Tout y est : le mépris, la souffrance, l’affliction, le châtiment de Dieu. Et nous pourrions ajouter la solitude, et bien entendu l’injustice.

Ainsi, nous pouvons légitimement avancer que Jésus a goûté à toutes les formes possibles d’humilité et d’humiliation que recouvrent les termes hébraïques que nous venons de lister.

Pourtant, rappelez-vous qu’humilitas (en latin) véhicule également l’idée de « petite taille, faible élévation », mais aussi de « platitude, abaissement, abjection, ou caractère rampant ». Nous avons également vu que tapeinos (en grec) désigne ce qui est « bas, sans élévation, de petite taille, de faible puissance, misérable, abject, vil ». Nous avions regroupé ces termes derrière l’idée suivante : être humble, c’est « être à terre », « ramper par terre », « être près du sol ». Il s’agit d’une dimension spatiale, qui vous place par terre, tout en bas. Or, aucun des termes hébraïques que nous avons vus jusqu’ici ne traduit exactement cette idée de « bassesse » ou « d’aplatissement au sol ». Il se peut donc que humilitas et tapeinos fassent écho à un autre terme hébraïque. Et en effet, il nous reste un dernier terme à découvrir, qui est sans conteste le plus intéressant de tous.

Ce dernier terme est l’adjectif shaphal. Il signifie « bas (en hauteur), humble (de condition ou d’esprit), humilié, rabaissé, moindre, vil et même enfoncé. » Ce terme-là comprend effectivement une dimension spatiale, et il franchit même un cap supplémentaire, puisqu’il ne s’agit plus seulement d’être « à terre », mais d’aller jusqu’à l’enfoncement « dans la terre », voire « sous la terre », c’est-à-dire au point où la terre vous engloutit et où vous disparaissez dans l’invisibilité la plus totale ! C’est l’humilité radicale, l’humilité-disparition, l’humilité-invisibilité, l’humilité-enterrement.

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Dans l’Ancien Testament, shaphal désigne le plus souvent « les humbles », ou « celui qui est humble », mais aussi « ceux qui s’abaissent » ou « ceux qui s’humilient ». Mais vous aurez compris que ces traductions sont beaucoup trop ternes pour restituer toute la force du mot hébreu shaphal.

Pour nous faire une meilleure idée de toute la signification portée par ce mot, il nous suffit d’examiner les différents sens associés au mot shaphal en hébreu moderne. Les dictionnaires d’hébreu moderne disent que shaphal signifie « bas, méprisable, médiocre, vil, abject, minable, ignoble, faible, et même sordide ». La racine hébraïque du mot shaphal permet également de désigner, toujours en hébreu moderne, « la marée basse, la dépression, le marasme, le dernier degré ».

J’ai lu quelque part au cours de mes recherches que le terme shaphal, combiné avec d’autres mots dans le cadre de certaines expressions, aurait aussi un lien avec les eaux d’égout, la fosse d’aisance ou la fosse à purin. Et shaphal permettrait également de désigner les personnes les plus indignes, celles que l’on qualifie parfois et honteusement de « rebuts » de la société. Voire de « déchets ».

Malheureusement, je n’ai pas réussi à retrouver les références de ces toutes dernières significations et mon hébreu est trop rudimentaire pour que je puisse apporter des certitudes en la matière. Il faut donc manier avec prudence ces deux dernières hypothèses. Mais malgré cela, je crois que vous avez bien compris que shaphal désigne ce qui est bas, inférieur, sans la moindre valeur, et vil. En raison de cette idée de « bassesse » et de « moindre élévation », je pense pouvoir dire que shaphal est le mot hébreu qui correspond le mieux à tapeinos en grec et à humilitas en latin, parce que les trois termes se rejoignent autour de l’idée d’être « tout en bas », d’être « à terre ».

Shaphal, c’est donc une humilité qui nous fait toucher le fond, dans tous les sens du terme. Il faut comprendre qu’avec ce type d’humilité, nous ne sommes plus seulement à terre. C’est la

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déchéance la plus totale. Nous sommes dans les bas-fonds. Nous sommes… dans le caniveau ! Avec les rats, les odeurs, et tout ce que vous pouvez imaginer de plus sordide et de plus sale…

Je sais, ce n’est pas très appétissant, mais l’humilité biblique, c’est cela !

Les humbles et les orgueilleux

En observant les versets où figure le mot shaphal, on constate quelque chose de très intéressant. L’adjectif shaphal apparaît souvent associé au verbe shaphel, qui comporte la même racine et qui signifie, entre autres, « abaisser ». Et parfois, on retrouve dans le même verset l’évocation des humbles (shaphal) ET la notion d’abaissement (shaphel). Comment ? Faut-il que les humbles soient encore davantage abaissés ? Ne le sont-ils pas déjà suffisamment ?

En réalité, l’humilité et l’abaissement, bien qu’étant deux mots appartenant à la même racine hébraïque, ne s’appliquent pas du tout aux mêmes personnes. De nombreux versets indiquent que les humbles (shaphal) connaissent l’élévation, tandis que l’abaissement (shaphel) est pour les… orgueilleux. Et cet abaissement est radical et redoutable, puisque c’est Dieu en personne qui abaisse ! Voici quelques versets significatifs :

– C’est le Seigneur qui rend pauvre ou riche, c’est lui qui abaisse (shaphel) et qui élève (1 Samuel 2.7).

– Tu sauves le peuple affligé ; et de ton regard, tu abaisses (shaphel) les hautains (2 Samuel 22.28).

– Il relève les humbles (shaphal) et délivre les affligés (Job 5.11, version Segond 21).

– Car c’est toi qui sauves le peuple affligé et qui abaisses (shaphel) les regards hautains (Psaumes 18.28).

– Car Dieu est le juge : il abaisse (shaphel) l’un, il élève l’autre (Psaumes 75.8).

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– L’Éternel est élevé : il voit les humbles (shaphal). Il reconnaît de loin les orgueilleux (Psaumes 138.6, version Segond 21).

– Le Seigneur soutient les pauvres, il abaisse (shaphel) les méchants jusqu’à terre (Psaumes 147.6).

– L’orgueil d’un homme l’humilie (shaphel), l’esprit humble (shaphal) se saisit de la gloire (Proverbes 29.23).

– L’homme au regard hautain sera abaissé (shaphel). Et l’orgueilleux sera humilié : l’Éternel seul sera élevé ce jour-là (Ésaïe 2.11).

– Car c’est un jour pour le Seigneur des Armées, contre tout ce qui est hautain et orgueilleux, contre ce qui s’élève et doit être abaissé (shaphel) … (Ésaïe 2.12).

– La hauteur de l’être humain sera courbée, la supériorité des hommes sera abaissée (shaphel) (Ésaïe 2.17).

– Je ferai cesser l’orgueil des gens arrogants, je rabaisserai (shaphel) le triomphe des brutes (Ésaïe 13.11).

– Il a renversé ceux qui habitaient la hauteur, il a abaissé (shaphel) la ville élevée, il l’a abaissée (shaphel) jusqu’à terre, il lui a fait toucher la poussière (Ésaïe 26.5).

– Tu seras abaissée (shaphel), ta parole viendra de la terre, tes paroles seront plus basses que la poussière ; ta voix sortira de terre comme celle d’un spectre, et c’est de la poussière que tu chuchoteras ta parole (Ésaïe 29.4).

– Ce qui est abaissé (shaphal) sera élevé, et ce qui est élevé sera abaissé (shaphel) (Ézéchiel 21.31). Ce dernier verset est repris par Jésus en Luc 14.11.

L’abondance de ces versets (et nous n’en avons ici qu’un échantillon !) désignant une même réalité, à savoir que les humbles seront élevés et les orgueilleux abaissés, nous permet d’affirmer différentes choses.

Tout d’abord, cela nous parle d’équilibre. L’humilité et l’orgueil ressemblent aux deux plateaux d’un balancier, le Seigneur étant celui qui « équilibre » la donne. Celui qui fait preuve d’humilité

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en s’abaissant, Dieu l’élèvera. Équilibre. Celui qui s’élève avec un cœur rempli d’orgueil, Dieu l’abaissera. Équilibre. Cela signifie également que plus un homme s’élève haut, plus sa chute sera brutale. Celui dont l’orgueil atteint les cieux finira le nez écrasé dans la poussière tandis que celui qui ne s’élève qu’un petit peu sera plus facilement et moins douloureusement ramené vers l’équilibre par le Seigneur. De même, celui qui s’abaisse un peu connaîtra une petite élévation, mais celui qui s’abaisse à l’extrême connaîtra une élévation glorieuse.

Laissez-moi vous donner une autre image, empruntée à la physique. Lorsqu’une personne se tient debout sur un escabeau ou une échelle, elle court le risque de perdre l’équilibre et de tomber. Plus l’échelle sera haute, plus la chute risque d’être douloureuse et susceptible de provoquer des lésions graves, voire mortelles. Lorsqu’une personne se tient debout sur le sol, elle peut également perdre l’équilibre et tomber, mais le risque de blessures graves est moins grand. Mais lorsqu’une personne s’allonge par terre, quel risque de chute court-elle ? Aucun. Vous aurez beau tout essayer, vous ne pourrez absolument pas la faire tomber. Pourquoi ? Parce qu’elle est déjà au sol.

L’humilité, c’est faire le choix de s’allonger sur le sol. On vous piétinera peut-être. Mais on ne pourra jamais vous faire tomber.

Alors, comment Dieu procède-t-il ? C’est assez simple. Si vous avez l’humilité de vous allonger sur le sol, le Seigneur viendra vous tendre la main pour vous remettre debout, et vous pourrez cheminer ensemble paisiblement. Mais si vous grimpez bien haut sur l’échelle de votre orgueil, il lui suffira de donner un grand coup de pied dans l’échelle. Et patatras ! Vous finirez le nez dans la poussière. Vous aurez alors deux options : remonter sur votre échelle, ou rester à terre et attendre qu’il vienne vous tendre la main pour vous relever. Et c’est évidemment cette deuxième option qu’il souhaite vous voir choisir.

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Mais si vous choisissez de remonter sur votre échelle avec d’autant plus de détermination, il y a des chances pour que Dieu vous laisse monter un peu plus haut cette fois-ci. Du coup, lorsqu’il mettra son coup de pied dans l’échelle (et il le fera, je vous le garantis !), la chute sera plus brutale que la première fois. Nez dans la poussière et… quelques côtes cassées. Peut-être que cette fois-ci, vous aurez compris la leçon. Sinon, vous remonterez, et … vous connaissez la suite.

Je ne sais pas ce que cela vous inspire, mais pour ma part, je trouve profondément rassurant le fait de savoir que Dieu nous rééquilibre sans cesse, et que, si l’orgueil nous saisit (et cela se produit bien plus souvent que nous ne le pensons), le Seigneur sait comment procéder pour nous « remettre en place ». C’est douloureux, mais rassurant.

Tous les versets que nous venons d’énumérer nous parlent également du cœur de Dieu. Nous sentons bien, dans la clarté et la radicalité de ces versets, à quel point l’orgueil est une attaque inacceptable pour Dieu. C’est viscéral, en quelque sorte. C’est comme si Dieu, dès lors qu’un être humain s’enfle d’orgueil, se plaçait luimême dans l’obligation absolue d’agir avec une sévérité radicale. Inversement, lorsque Dieu voit quelqu’un s’abaisser, son cœur est bouleversé d’une fierté telle qu’il ne peut qu’honorer la personne qui s’humilie. Il y a dans ces versets un principe biblique récurrent et aussi fiable que le lever du soleil chaque matin. D’ailleurs, ce principe apparaît si souvent dans la Bible que nous sommes forcés de reconnaître qu’il ne s’agit pas simplement d’un principe. Je crois qu’il s’agit véritablement d’une loi divine immuable, qui s’appliquera toujours, de manière systématique et automatique. Le fait que Jésus lui-même reprenne les propos d’Ézéchiel atteste de la validité permanente de cette réalité. L’entrée dans le Nouveau Testament n’a pas changé la donne. Les humbles connaîtront l’élévation. Les

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orgueilleux finiront à terre. Un point c’est tout. Il n’y a absolument aucune dérogation à cette règle.

Mais pourquoi Dieu a-t-il établi une telle loi ? N’y a-t-il pas là quelque chose d’incompatible avec la notion de grâce ? Nous tenterons de répondre à cette question dans un prochain chapitre, en donnant un certain nombre d’exemples.

Après avoir examiné de près toute la portée de la notion d’humilité dans la Bible, nous comprenons bien qu’en se déclarant humble devant ses disciples, Jésus n’était pas en train de faire preuve de vantardise, mais qu’il était en train de s’approprier un qualificatif jugé extrêmement péjoratif par la triple culture dans laquelle il s’inscrivait. Il était en train de dire à ses amis que son cœur était à terre, misérable, pauvre, malheureux, abattu, méprisé et affligé. En un mot, il leur disait qu’il comprenait leur condition humaine. Qu’il était sur la terre, comme eux. Dans la même galère qu’eux. Et voilà pourquoi il pouvait affirmer que la charge qu’il leur confiait n’allait pas être excessive, car il mesurait cette charge à hauteur d’un homme… allongé à terre.

Au moment de conclure ce premier chapitre, permettez-moi de vous poser cette question : que vous inspire le fait de découvrir que la véritable humilité biblique consiste à « s’allonger par terre » ?

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Le livre que vous tenez dans les mains est une invitation à descendre de votre arbre et à connaître personnellement Jésus. Seuls ceux qui s’abaissent peuvent expérimenter une vie nouvelle.

Jésus. Si grand, si humble fait partie des livres qui laisseront une marque indélébile. Alors qu’un nombre croissant de livres chrétiens se focalisent sur « moi et mon bien-être », celui-là est centré sur Jésus. Son message va à contre-courant d’une génération qui ne cesse de proclamer : « Regardemoi ! Regarde ce que je fais ! » Dans un langage direct, franc (agrémenté d’humour), l’auteure nous secoue, nous dérange et frappe fort là où ça fait mal. Vie chrétienne

Titulaire de plusieurs diplômes de langues étrangères et d’un Master en Sciences de l’Éducation, Anne-Vanessa Bonnefont a enseigné durant plusieurs années dans des lycées et des écoles. Elle poursuit actuellement une formation en théologie tout en servant le Seigneur en Alsace, aux côtés de son mari et de leurs quatre enfants. Elle signe ici son premier livre.

www.clcfrance.com 17 € TTC Réf. : CLCJ100 ISBN : 978-2-7222-0462-1
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