Andre Muscadin l'homme Shalom

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5 Juillet 2012 No 655

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André Muscadin

l’homme Shalom Animateur, producteur, entrepreneur et pasteur, André Muscadin, 41 ans, fait le don de sa personne pour la cause de l’Évangile. Serein, discret et enthousiaste, le leader de Radio Shalom, Shalom Tabernacle de gloire et Shalom Restaurant , depuis quelque temps, ne dort plus sur ses deux oreilles. Sa notoriété grandissante soulève des controverses un peu partout. Son succès, mitigé de critiques, entrave sa sécurité. Toutefois, berger d’environ 30 000 fidèles, l’initiateur de l’émission « Exaltation » et du rendez-vous culturel « Souffle du samedi soir » est devenu un carrefour presqu’incontournable dans le milieu évangélique haïtien. L’homme Shalom fait le point sur ses activités et ses projets en perspective. Depuis ton départ de la radio «La voix de l’Évangile», tu as beaucoup évolué (radio, restaurant, église …). Partage avec nous l’expérience qui est à la base de cette évolution. La Bible dit que Dieu nous a confié de petites choses, et selon notre intégrité, il nous en confiera de grandes. J’en ai fait l’expérience et tiré profit de ces mots que j’utilise comme leitmotiv. D’abord, j’ai lancé Radio Shalom avec les moyens dont je disposais, sans me soucier des détails ni de ce qui pourrait bien m’arriver. Ensuite, l’église Shalom, qui allait prendre un sérieux tournant, car j’ai dû mettre à disposition tout ce que je possédais. J’ai fait démolir environ 12 pièces d’un appartement dont j’étais propriétaire pour pouvoir construire l’église. Après 2 ans, le temple était devenu si exigu qu’on a abandonné l’espace pour nous installer à une nouvelle adresse. Ça n’a pas été facile de gérer la radio, le restaurant et l’église. J’ai été persécuté pour avoir choisi cette voie, j’ai subi toutes sortes d’accusations. En somme, j’ai consenti d’énormes sacrifices dans mon parcours. Ton assemblée évolue beaucoup. A un moment donné on parlait d’église, maintenant on parle de tabernacle. C’est quoi au juste ? Il s’agit en effet de Shalom Tabernacle de Gloire. L’idée était petite au départ, mais elle a grandi. Dieu aime les gens de grande vision. Il aime faire la route avec des hommes de foi aussi. L’exemple d’Abraham, le père de la foi, me tient à cœur. Moi, André Muscadin, j’avais posé des actions de foi dans le temps. Aujourd’hui, les retombées, jointes à ma vision prospective, ont abouti à ce phénomène dont toute la ville parle. Ici, à Delmas 33, on a aménagé un espace pouvant accueillir entre 20 à 25 000 personnes. Mais on ne s’arrêtera pas là... Déjà, on envisage de construire un temple de 50 000 places afin de prouver qu’avec Dieu on peut faire de grands exploits. Avant il s’agissait de «Inspiration FM ». Comment en êtes-vous arrivé à Radio Shalom ? Si je ne parle pas d’ «Inspiration FM », c’est parce que c’est une page tournée. Mon passage à cette station de radio est une expérience enrichissante qui m’a ouvert les yeux. Pour la petite histoire, avant «Inspiration FM », Jacques Maurice et moi avions mis sur pied Radio Consolation. Deux mois plus tard, un camarade nous propose de nous financer, moyennant que Consolation soit changée en «Inspiration FM ». Par manque de leadership, nous avions baissé les bras, parce qu’à l’époque, nous ne savions pas ce qu’impliquait la radiodiffusion. Quelques semaines après, nous n’arrivions pas à nous entendre avec ce camarade. Sans tarder, nous avions renoncé au projet en remettant au propriétaire tout ce qui lui appartenait. Avec ardeur et détermination, la Radio Shalom a vu le jour ; avec un laptop branché sur Internet et une antenne qu’on avait fait fabriquer. A cause de nos maigres moyens, nous avons passé une longue période à emprunter des micros et d’autres matériels pour réaliser les émissions. Finalement, un

ami nous a permis d’obtenir une fréquence sur la bande FM. Pendant 14 ans tu as été animateur d’émissions évangéliques, qu’est-ce qui t’a poussé à devenir pasteur ? Je n’avais guère l’intention de devenir pasteur. Mais l’appel que j’ai reçu de Dieu était plus fort. Je me souviens avoir dû abandonner mon poste au « Planning Média » au Palais national pour me consacrer à la cause de l’Évangile ; et ça a été un coup dur. Au début, j’étais réticent ; il m’arrivait parfois de voir Dieu en train de me fouetter au sein de même de l’église. J’allais cependant confirmer cet appel par l’entremise du pasteur Jean-Marie Désir, mon père spirituel. Cela faisait un moment que je ne le croisais plus, quand, un beau jour, je l’ai vu en songe. C’était la veille de Noël. Le bishop revenait de l’église et il m’a dit, « Musca, comment se fait-il que je ne te vois plus ? ». Honteux, j’ai voulu m’enfuir, mais ne le pouvais pas. Avec étonnement, je l’ai vu me remettre sa Bible, son recueil de chants d’espérance et même son costume. Depuis, je n’ai plus eu de doutes. Je me rappelle aussi du frère Thélor Joseph, un ami que j’aimais beaucoup, et à qui j’ai rendu visite avant sa mort. Une fois que j’étais allé le voir alors qu’il était dans le coma, il m’a tenu les mains d’une façon qui me prouva une fois de plus que Dieu voulait se servir des hommes de foi pour m’orienter vers son ministère. Avant on te croyait seulement journaliste et entrepreneur. Devenu pasteur, on te qualifie à présent d’opportuniste et de businessman. Que réponds-tu à ces accusations ? Un Haïtien ne félicite jamais un autre, à moins qu’il ne soit payé pour le faire. Un Haïtien est toujours jaloux du succès d’un autre depuis la nuit des temps. Celui qui t’encourage à grandir, souvent, prie dans ton dos pour que tu chutes. C’est ainsi qu’est la réalité haïtienne. Donc face à ces ragots, j’avoue que je ne suis pas étonné. Mais pour ceux qui l’ignorent, je suis un entrepreneur né. Dès l’enfance, on m’a initié au business et on m’a appris à aimer le travail. «Celui qui ne travaille pas ne devrait pas manger », selon les saintes écritures. Le choix d’être animateur n’était pas hasardeux. Après mes études en communication, j’avais opté pour l’animation des émissions évangéliques. Mes camarades n’étaient pas de cet avis, mais Dieu, lui, guidait mon choix. J’incite les membres de l’assemblée que je dirige au désir entrepreneurial, parce que je crois que c’est la seule façon d’aider ce pays à s’en sortir. Et j’exige des fidèles qu’ils payent la dîme parce que dans la maison de l’Éternel il ne doit manquer de rien. Dans un délai record tu as réussi à attirer la grande foule dans tes initiatives. Quel est le secret de ta réussite ? C’est le secret de polichinelle, connu de tous : la prière, la foi et la consécration. Il n’en est rien d’autre. Car la parole de Dieu dit : « L’obéissance vaut mieux que les sacrifices » Avec Dieu, le plus petit d’entre nous est capable de faire de grands exploits.

Pour avoir été au service de la radio «La Voix de l’Évangile» pendant 4 ans, on prétend que tu voles la vedette au pasteur Jean-Marie Désir au moment où son état de santé est inquiétant. Qu’en est-il exactement ? Ce n’est pas du tout le cas. Le public, généralement, a des idées préconçues, un esprit de compétition. Si on travaille pour la même cause, on ne saurait être en rivalité. Tout ceci revient à dire que mon succès n’est pas humain, il est divin. Je ne remplace personne, je suis ma destinée tout simplement. Parle-nous un peu de l’équipe qui t’aide à gravir autant d’échelons. A Radio Shalom on a un staff de 120 employés qui réalisent les émissions, la mise en onde et tout le reste. Au niveau du tabernacle, contrairement aux autres églises, on utilise un concept différent. En lieu et place de comité, on a un staff qui gère tout. Actuellement, on est plus de 25 pasteurs à faire partie de cette équipe. Avec eux, il est possible d’avoir des activités à longueur de journée. Je ne saurais citer le nom de chacun des collaborateurs, mais ils savent que leur apport dans la maison du Seigneur n’est pas vain. Les gens habitant le voisinage du tabernacle vous accusent de nuisance sonore et envisagent de vous conduire en justice… A notre arrivée ici, à Delmas 33, on faisait la location de matériels de sonorisation. Par manque d’expérience, des erreurs glissaient à chaque fois. Il se peut bien que ce soit de là que provienne la nuisance sonore. Depuis quelque temps, on a changé de position sur le terrain pour nous installer loin du voisinage. De plus, on a fait l’acquisition de matériels adéquats pour ne plus avoir à augmenter le volume des haut-parleurs. C’est quoi ta philosophie ou ta première idée de la vie, l’Évangile ou le business ? Autant que je me souvienne, ça a toujours été les deux : l’Évangile et l’entrepreneuriat. Aujourd’hui je crois que ça l’est, et je souhaite que ça le reste pour la gloire de Dieu.

Selon toi, qu’est-ce qu’on pourrait bien te reprocher ? Si l’on devait me reprocher une chose, ce serait sans doute mon intransigeance. Quand je veux une chose, je n’ai que ça en tête. Je ne dors pas, je ne mange pas tant que cela ne se réalise. Ce que je veux c’est ce qui doit se faire, sans compromis. Côté familial, comment ça marche ? Ça va très bien. Je suis autant présent et dynamique dans mon foyer que dans le ministère. J’ai trois enfants. La petite Christelle Marc-Andrèle est la benjamine de la famille. Avant elle j’ai eu Victoria Marc-Andrèle et Sébastien. Actuellement ils sont en vacances à l’étranger. Ma femme et moi sommes restés pour œuvrer dans le ministère. Tes projets ? Mon projet immédiat c’est de pouvoir mettre en onde une chaîne de télé. On aurait dû démarrer avec les essais de Télé Shalom ce 4 juillet, mais matériellement c’était impossible. Parce que la logistique qu’on avait commandée est pour l’heure en transit entre l’Italie et les États-Unis. Je pense qu’elle arrivera à destination vers la fin du mois de juillet. Ma deuxième initiative est la construction du temple. La troisième est un projet ambitieux : la construction du Village Shalom. Un espace où deux à trois mille personnes pourraient habiter en bonne et due forme. Et pour ce faire, on aura besoin d’environ mille carreaux de terre. D’ores et déjà, je lance cet appel à tous ceux qui voudraient se joindre à ce projet. Je crois que nous en Haïti, nous pouvons vivre autrement. À l’instar des États-Unis et de la République Dominicaine, on peut remédier à cette situation humiliante qui fait de nous le pays le plus pauvre de l’hémisphère sud.

Propos recueillis par Dimitry Nader Orisma Retranscription : Duckenson Lazard


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